M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi quau banc des commissions. – M. Didier Mandelli et Mme Nadège Havet applaudissent également.)

M. Jean-François Longeot. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaite profiter de cette tribune pour aborder l’épineuse problématique du financement et de la planification de la transition écologique.

Rappelons le constat dressé, dans leur rapport, par Jean Pisani-Ferry et Salma Mahfouz : il nous faudra investir quelque 66 milliards d’euros supplémentaires d’ici à 2030 pour atteindre nos objectifs climatiques et énergétiques. À cet égard, la hausse de 7 milliards d’euros des financements favorables à l’environnement dans ce projet de loi va dans le bon sens.

Les montants mobilisés chaque année ne font toutefois pas tout. Nous devons aussi donner de la visibilité aux acteurs. Si, pour l’heure, ce besoin de visibilité se heurte au principe d’annualité budgétaire, un changement d’approche pourrait survenir en 2024. En application de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, le Gouvernement devra en effet remettre au Parlement une stratégie pluriannuelle définissant les financements de la transition écologique et de la politique énergétique nationale.

Je souhaite que cette stratégie soit l’occasion d’identifier les soutiens apportés par l’État aux collectivités territoriales, lesquelles sont à l’origine de 70 % de l’investissement public dans notre pays.

Selon l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE), au moins 12 milliards d’euros d’investissements pour le climat devront être réalisés par les collectivités chaque année d’ici à 2030, soit deux fois plus que les montants actuellement mobilisés. Il me paraît donc évident que nous ne pourrons pas atteindre nos objectifs sans visibilité concernant les financements de l’État au bénéfice des collectivités territoriales.

Si, comme je l’ai dit, nous manquons aujourd’hui de visibilité concernant le financement de la transition énergétique et climatique, nous en manquons aussi en matière de financement de la préservation et de la restauration de la biodiversité.

Je salue certes l’effort louable consenti à cet égard par le Gouvernement, qui a doublé les crédits qui sont consacrés à cette politique. Reste que les cinq grandes pressions qui s’exercent sur la biodiversité amoindrissent les services écosystémiques qu’elle rend. Si nous n’agissons pas de manière résolue, les coûts économiques atteindront plusieurs points de PIB.

Seules les actions réduisant en même temps les mutations d’usage des terres, la surexploitation, le changement climatique, les pollutions et la prolifération des espèces exotiques envahissantes sont susceptibles de produire des effets transformateurs.

Le sursaut budgétaire en faveur de la préservation et de la restauration de la biodiversité constitue donc une bonne nouvelle, mais – car il y a un « mais… », comme dans toutes les bonnes histoires ! – je déplore la présentation très tardive de la stratégie nationale pour la biodiversité 2030.

Après moult retards, plusieurs atermoiements et autres reports, celle-ci n’a en effet été présentée que la semaine dernière, alors que les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis du Sénat avaient déjà procédé à leurs auditions et établi leur rapport. Une fois de plus, l’examen parlementaire s’appuie sur des données parcellaires, des « peut-être ».

S’agissant d’une stratégie aussi fondamentale, je regrette vivement que les rapporteurs n’aient pu analyser, dans le cadre de leurs travaux préparatoires, la cohérence des actions envisagées.

En somme, nous pouvons et nous devons faire mieux encore en matière de planification budgétaire de la transition écologique. Il y va de notre capacité à projeter réellement notre pays dans le XXIe siècle.

Je tiens pour conclure à remercier l’ensemble des rapporteurs de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable pour le travail réalisé. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Nadège Havet applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)

M. Jacques Fernique. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, après une nouvelle année de records de températures et de catastrophes climatiques – il nous faudra, du reste, revoir nos financements pour répondre à cette nouvelle donne –, et alors que la COP28 est tenue de reprendre la main, l’on sait à présent qu’il s’agit de se préparer à une augmentation des températures en France d’ici à 2100 de l’ordre de 3,5 à 4 degrés.

Le rapport Pisani-Ferry-Mahfouz pointe l’ampleur des investissements nécessaires pour la transition écologique.

C’est donc en fonction de sa concordance avec ces enjeux qu’il s’agit d’apprécier le budget de la mission « Écologie ».

Or que constate-t-on ? Une fois mis à part le reflux des mesures de soutien aux consommateurs d’énergie, nettement moins coûteuses que l’an dernier, si les crédits de cette mission, tous programmes confondus, se révèlent globalement en hausse, ladite hausse est néanmoins inférieure à l’inflation.

Le fonds vert connaît une progression significative, réponse au nombre considérable de dossiers déposés en 2023 qui n’ont pas pu être financés. Ce fonds n’étant pas, comme promis, « à la main des collectivités », et afin de remédier à la faiblesse d’une animation territoriale pourtant indispensable pour accélérer et gagner en efficacité, le groupe écologiste propose de basculer 200 millions d’euros du fonds vert en direction de l’ingénierie et du financement des plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET).

Pour ce qui est des effectifs du ministère, ils augmenteront, mais cette augmentation mesurée doit être relativisée à l’aune d’une trajectoire de plus de vingt ans de réduction draconienne.

Pour l’Office français de la biodiversité (OFB), mobilisé sur la biodiversité, les aires protégées et le plan Eau, l’augmentation des effectifs est clairement insuffisante.

De même, l’Institut national de l’information géographique et forestière, qui voit son plafond diminuer, ne peut être ainsi laissé-pour-compte. Les mégafeux de l’été 2022 ont montré combien l’inventaire de l’IGN était précieux pour suivre les effets du changement climatique sur les écosystèmes.

Les défis climatiques et énergétiques, mais aussi ceux du pouvoir d’achat et de la santé, mettent au rang des urgences le traitement des 25 millions de passoires thermiques. La hausse de 1,6 milliard d’euros des crédits alloués à MaPrimeRénov’ est donc bienvenue, même si une part de cette augmentation est un peu en trompe-l’œil.

Je déplore toutefois que le gros milliard d’euros de crédits non consommés en 2023 ait été annulé, comme je déplore que le reste à charge demeure, pour les ménages les plus modestes, de l’ordre de 45 %.

Le rapport de notre commission d’enquête sur l’efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique a bien mis en lumière les dysfonctionnements de MaPrimeRénov’ et la nécessité de sortir de l’instabilité et de la confusion que ce dispositif suscite pour les usagers, compte tenu notamment de la complexité de la constitution des dossiers.

S’il convient d’abonder encore le programme budgétaire dédié – mon groupe présentera un amendement en ce sens –, il faut aussi s’assurer que les conditions de leur consommation soient remplies. Mon groupe propose donc de garantir la stabilité des modalités de ces aides en insérant cette stratégie et son volume financier dans une programmation pluriannuelle.

La sous-exécution des crédits de MaPrimeRénov’ est symptomatique d’un dispositif qui s’essouffle dans sa montée en puissance, qui a besoin de clarté, mais aussi d’animation territoriale et de visibilité budgétaire.

Avec ce PLF, l’effort budgétaire pour les transports continue son augmentation. Pour autant, cette hausse des crédits ne décline pas de manière lisible l’engagement dans le scénario de planification écologique que l’on nous promet. Certes, des signaux sont envoyés : je citerai la réduction de moitié de l’enveloppe destinée aux routiers dans les contrats de plan État-région (CPER) et la part majeure, de 8 milliards d’euros sur un total de 13,5 milliards, allouée aux mobilités durables que sont le train, le transport fluvial, le vélo ou les transports urbains.

Pour autant, ce PLF n’est pas ce qu’il aurait dû être, à savoir le premier acte de l’avancée dans la planification écologique. Vous affirmez qu’il y aura beaucoup moins de projets routiers à l’avenir, monsieur le ministre chargé des transports, mais le projet d’A69 n’est pas remis en cause et, les CPER mis à part, car ils relèvent encore de l’hypothèse, je constate, à la lecture des crédits ligne par ligne, que ceux qui sont consacrés au transport routier sont stables, voire qu’ils augmentent : aucun changement net !

Pour ce qui est du rail, chantier principal de la planification écologique, nous n’avons pas le début construit des éléments tangibles du plan d’avenir de 100 milliards d’euros d’ici à 2040 dont la Première ministre nous annonçait pourtant, en février dernier, qu’il serait opérationnel dès l’été venu. L’été est passé et, manifestement, le Gouvernement n’y est pas encore.

Les 300 millions d’euros supplémentaires alloués à la régénération et à la modernisation viendront exclusivement du fonds de concours du groupe SNCF. Ce sont autant de moyens en moins pour les trains de nuit, qui ont besoin de rames de qualité pour réussir comme en Autriche, sans compter que c’est la possibilité de réduire le coût des billets que l’on compromet ainsi.

Alors que l’essor du fret ferroviaire est lui aussi menacé, ce mode de transport est de surcroît fragilisé par la discontinuité imposée à Fret SNCF, qui sera dépecé.

Au regard de la planification écologique à engager, ce budget ne tient-il pas plutôt du budget d’attente ? Il y manque en tout cas les arbitrages déterminants nécessaires en vue d’une loi de programmation qui réponde aux besoins des AOM pour leurs services express régionaux métropolitains, qui fasse avancer la question du versement mobilité, qui débloque le frein des péages ferroviaires, qui actionne le principe du pollueur-payeur pour le kérosène ou la contribution poids lourds, qui mobilise effectivement les crédits issus de la mise aux enchères des quotas carbone, et qui atteigne, à terme, les 5 milliards d’euros par an indispensables à la régénération et à la modernisation du réseau.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, si ce PLF améliore bel et bien les perspectives pour cette mission, il n’est cependant pas le tournant budgétaire décisif en faveur de l’écologie auquel nous aspirons. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER. – Mmes Marie-Claude Varaillas et Nadège Havet, ainsi que M. Michel Masset, applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas.

Mme Marie-Claude Varaillas. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, les sécheresses, incendies, disparitions d’espèces, canicules et tempêtes se succèdent à un rythme de plus en plus soutenu et de manière de plus en plus violente.

Chaque degré supplémentaire devrait réduire de 20 % les ressources en eau.

À l’heure de la COP28, l’ONU estime que les efforts des États pour limiter les émissions de gaz à effet de serre sont très insuffisants. Aucun des pays du G20 ne réduit ses émissions à un rythme conforme à nos objectifs.

Les 10 milliards d’euros annoncés par le Gouvernement, dont 7 milliards dans le budget 2024, représentent certes un effort significatif, mais nous sommes loin des 30 milliards d’euros d’investissements par an nécessaires, selon le rapport Pisani-Ferry-Mahfouz, pour atteindre la neutralité carbone.

Le bilan, par ailleurs, nous pose question, puisqu’il s’établit en baisse de 13,6 milliards d’euros en autorisations d’engagement, soit une diminution de plus de 35 %, et de près de 15 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une diminution de plus de 40 %.

Ces économies, qui résultent des baisses appliquées, entre autres, au dispositif des chèques énergie, remettent en cause la protection de nos concitoyens qui subissent de plein fouet la hausse des prix de l’énergie.

La rénovation thermique est l’un des principaux remparts contre l’explosion des prix de l’énergie et un levier de la transition écologique. La lutte contre la précarité énergétique, qui concerne 12 millions de ménages, est une priorité tant elle agit sur le climat, mais aussi sur la santé et le pouvoir d’achat des plus modestes.

Quelque 65 000 rénovations performantes ont été financées par l’Agence nationale de l’habitat (Anah) en 2022, et 90 000 sont escomptées pour 2023. Nous sommes loin encore des 200 000 rénovations sur lesquelles la Première ministre s’était avancée pour 2024. À la fin du premier trimestre 2023, l’Anah recensait moins de 10 000 rénovations globales.

La massification de la mise en œuvre de MaPrimeRénov’ appelle une vigilance accrue. Le développement du dispositif au travers d’une procédure dématérialisée complexe a multiplié le nombre d’opérateurs, si bien que nombre de nos concitoyens ont subi des escroqueries de la part de démarcheurs frauduleux.

Pour mener à bien ses missions – contrôle, liquidation des aides –, l’Anah doit disposer de moyens supplémentaires. Sur le terrain, les retards de paiement peuvent en effet placer les artisans dans une situation économique difficile.

Les crédits alloués aux infrastructures – il faut le reconnaître – sont en hausse dans ce budget.

Les crédits du transport ferroviaire enregistrent une augmentation de 260 millions d’euros par rapport à 2023, pour atteindre près de 3 milliards. Au regard toutefois de l’objectif affiché d’investir 100 milliards d’euros d’ici à 2040, ce sont bien 6 milliards d’euros annuels qui seraient nécessaires pour mettre en œuvre une feuille de route ambitieuse, incluant les services express régionaux métropolitains, dont le déploiement nécessitera 40 milliards d’euros, le doublement du fret ferroviaire et du transport de voyageurs d’ici à 2030 et le budget indispensable à SNCF Réseau pour réaliser les travaux de régénération des rails, de l’aiguillage et des caténaires.

Je note avec satisfaction les efforts financiers déployés en faveur des lignes Intercités, particulièrement en faveur de la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, la ligne Polt, qu’il serait bienvenu de parfaire en procédant à l’électrification des lignes Périgueux-Limoges et Périgueux-Coutras, projet inscrit dans le CPER de Nouvelle-Aquitaine depuis 2015, monsieur le ministre.

En ce qui concerne la gestion de l’eau, qui demeure un sujet majeur, les différents travaux menés par le Sénat à ce propos ont montré la nécessité de préserver la quantité et la qualité de l’eau douce afin d’assurer la disponibilité de cette ressource pour la population.

Si le plan Eau prévoit une augmentation du budget des agences de l’eau de 475 millions d’euros par an, il est nécessaire et urgent de supprimer le plafond mordant pour augmenter significativement les moyens financiers et les porter à la hauteur qu’exige notamment la rénovation des réseaux – je rappelle qu’un litre d’eau sur cinq se perd en fuites.

Le fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires, ou fonds vert, est certes porté à 2,5 milliards d’euros, ce qui est une bonne chose, mais cette augmentation est encore trop timide pour affronter le défi de la rénovation des bâtiments publics, lesquels représentent 81 % de la consommation énergétique des communes.

Cette situation est d’ailleurs à mettre en relation avec la non-indexation sur l’inflation de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Cette décision constitue, de notre point de vue, un contre-signal inquiétant, alors même que la transition écologique induit des investissements publics substantiels pour les collectivités.

Le virage écologique et social que nous devons prendre afin de respecter les accords de Paris nécessite des investissements massifs. La réussite de la bifurcation écologique est conditionnée à un changement de logique économique qui doit s’appuyer sur le développement de services publics susceptibles de répondre aux enjeux sociaux, humains et écologiques, dans des domaines aussi essentiels que l’énergie, la mobilité et l’accès à l’alimentation, la priorité étant de ne laisser personne au bord de la route.

En l’état, nous ne voterons pas les crédits de cette mission, qui s’inscrivent, de surcroît, dans un budget de nouveau frappé du sceau du 49.3…

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Alain Marc.)

PRÉSIDENCE DE M. Alain Marc

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables », du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale ».

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Éric Gold. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Nadège Havet applaudit également.)

M. Éric Gold. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, grâce au budget vert mis en place depuis 2020, nous connaissons la part des dépenses de l’État favorables à l’environnement : 40 milliards d’euros en 2024 sur les 570 milliards d’euros de dépenses budgétaires et fiscales. Si les 7 milliards d’euros supplémentaires prévus l’an prochain permettront d’accélérer les efforts de la France dans la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre, 90 % des dépenses de l’État sont toujours considérées comme ayant un impact neutre sur l’environnement. Un objectif ambitieux d’atteinte de la neutralité carbone en 2050 ayant été fixé, il est nécessaire d’augmenter sans tarder la part des dépenses relatives à l’écologie dans le budget de l’État.

Pour l’année 2024, si l’on exclut de l’analyse la baisse des dispositifs de soutien à la consommation d’énergie, les financements des programmes de la mission sont globalement en hausse.

Le fonds vert, tout d’abord, permettra aux territoires d’accélérer leur transition écologique grâce à l’enveloppe déconcentrée de 2,5 milliards d’euros qui a été allouée aux préfets. Attention, cependant, à ne pas sous-estimer une nouvelle fois les besoins : les collectivités dépensent actuellement 5,5 milliards d’euros par an en ce domaine et l’on estime à 12 milliards d’euros les investissements qu’il sera nécessaire de réaliser chaque année jusqu’en 2030.

Attention également à garantir que toutes les communes auront accès à ce fonds – je pense aux plus petites d’entre elles, qui manquent d’ingénierie et qui sont toujours les premières victimes de notre complexité administrative.

Espérons que l’ouverture de 760 équivalents temps plein supplémentaires pour 2024 – une excellente nouvelle – permettra que les collectivités soient mieux accompagnées dans leur transition écologique.

De manière générale, il est indispensable de mettre davantage d’humain dans nos politiques publiques : la sous-utilisation des crédits MaPrimeRénov’, dont l’exécution devrait atteindre 75 % de l’objectif à la fin du mois de décembre, pourrait être enrayée grâce à un meilleur accompagnement, ce dispositif étant souvent décrié pour sa complexité.

Pour ce qui concerne les crédits alloués à la prévention des risques, en augmentation de 16 %, le groupe RDSE considère que le fonds Barnier demeure largement insuffisant. D’un montant de 220 millions d’euros, il ne parviendra pas à couvrir l’intégralité des besoins, déjà estimés à 1,3 milliard d’euros à la suite des tempêtes survenues récemment.

Nous proposerons donc un amendement d’appel pour augmenter significativement les ressources de ce fonds. Compte tenu de l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des catastrophes naturelles, c’est tout notre régime d’indemnisation qui doit être repensé.

Alliés indispensables de la transition écologique, les investissements dans les transports collectifs et ferroviaires seront, l’an prochain, en nette augmentation. Ils s’inscrivent notamment dans le plan de développement du transport ferroviaire, doté de 100 milliards d’euros jusqu’en 2040, et dans l’engagement du Gouvernement à allouer 1,5 milliard d’euros supplémentaires chaque année, jusqu’à la fin du quinquennat, au financement des infrastructures ferroviaires.

Veillons toutefois à ne pas faire peser l’intégralité des investissements dans le réseau ferroviaire sur la SNCF, qui pourrait soit ne pas le supporter soit reporter ces coûts sur le prix des billets. Si l’on veut diminuer la part modale de la voiture individuelle, il convient de renforcer et non de réduire l’attractivité des transports collectifs.

S’agissant d’augmenter encore les investissements dans le transport collectif, qui en a tant besoin – les usagers réguliers du train Paris-Clermont en savent quelque chose –, certaines pistes sont bien identifiées. Par exemple, le maintien du tarif réduit sur le gazole pour le transport routier de marchandises entraînera de nouveau en 2024 une perte de recettes pour l’État de 1,3 milliard d’euros, alors que cette tarification devait être progressivement alignée sur le tarif normal de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Il existe également une exonération de taxe annuelle sur les véhicules lourds de transport de marchandises pour les véhicules de collection ; quant au tarif réduit du carburant utilisé par les taxis, il fait perdre 67 millions d’euros chaque année à l’État. Il y a là autant de niches fiscales difficilement justifiables dans un contexte de changement climatique.

Enfin, si l’on peut déplorer la baisse de 200 millions d’euros des crédits destinés à financer les aides à l’acquisition de véhicules propres, on peut aussi se réjouir de la mise en place, dès janvier prochain, d’un score environnemental qui permettra de mieux prendre en compte l’empreinte carbone des véhicules sur l’ensemble de leur cycle de vie. Aujourd’hui, les trois quarts des voitures électriques qui sont vendues en France sont importées et les trois quarts des batteries sont produites en Chine. Nous pouvons subventionner moins, mais subventionner mieux.

Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. Voilà !

M. Éric Gold. En conclusion, si le groupe RDSE apporte son soutien à ces crédits, y compris à la minoration du bouclier tarifaire sur l’électricité pour tout le monde, il souhaite avant tout lancer un appel à la sobriété. Les mesures de soutien face à la hausse des prix de l’énergie ont déjà coûté 50 milliards d’euros à la France depuis 2021. Cette situation, en particulier dans un contexte de raréfaction des ressources en énergie et en eau, nous oblige à changer de logiciel. Les plus gros consommateurs doivent notamment être incités, sinon forcés, à réduire plus vite et plus fort leur consommation et leurs émissions. À défaut, les efforts du quotidien que fournissent nos concitoyens ne seront qu’une goutte d’eau dans un océan de pétrole. (Mme Nadège Havet applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme Nadège Havet. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, pour 2024, le budget vert de la France est en nette hausse : 7 milliards d’euros de plus qu’en 2023. Compte tenu des 10 milliards d’euros inscrits en autorisations d’engagement, hors relance et mesures exceptionnelles, l’ensemble des dépenses favorables à l’environnement et des dépenses mixtes s’élèvera au total à 41,7 milliards d’euros. Ce texte, il est vrai, « consacre la transition écologique comme une priorité absolue », pour reprendre les mots prononcés par le ministre délégué chargé des comptes publics.

En Bretagne, en Normandie et dans le Pas-de-Calais, ces dernières semaines ont été marquées par des événements climatiques violents. L’automne 2023 sera le plus chaud jamais enregistré depuis 1900. La dynamique de verdissement du budget doit se poursuivre et s’amplifier.

L’orientation de nos finances publiques locales et nationales vers un soutien à la planification écologique, telle qu’elle a été présentée fin septembre, est une nécessité absolue. Définir une stratégie nous donnant les moyens d’atteindre les objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés pour 2030 en matière de réduction de nos émissions de gaz à effet de serre et de notre consommation d’énergie, voilà la tâche à laquelle nous nous attelons une nouvelle fois collectivement aujourd’hui.

La COP28 s’est ouverte jeudi dernier et – nous le savons – les engagements pris à l’échelle planétaire seront déterminants. Là encore, la France joue tout son rôle. À ce propos, je salue la tenue à Paris, début novembre, du premier sommet international consacré aux glaciers et aux pôles. Dans un budget qui se chiffre en milliards d’euros, il faut ajouter celui que le Président de la République a promis d’allouer à la recherche polaire d’ici à 2030.

En marge de sa récente visite au technopôle Brest-Iroise de Plouzané, la ministre Sylvie Retailleau a précisé certaines dispositions que le Gouvernement entend prendre à destination de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) et de l’Institut polaire français Paul-Émile Victor.

Les fonds propres de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » s’élèvent à 24,5 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 21,6 milliards d’euros en crédits de paiement.

La baisse globale des crédits par rapport à 2023 traduit la fin d’un dispositif conjoncturel exceptionnel, celui des aides sur l’énergie, porté par le programme « Service public de l’énergie », qui perd 70 % de son enveloppe.

Toutefois, la grande majorité des autres postes, qui sont quant à eux pérennes, enregistre une hausse parfois très forte. Les autorisations d’engagement du programme « Affaires maritimes, pêche et aquaculture » sont ainsi en hausse de 22 % au titre du financement de diverses actions : poursuite du développement d’une formation maritime de qualité ; garantie d’un soutien accru à l’économie des filières et à l’innovation ; préservation de l’environnement marin ; amélioration de la sécurité maritime.

Pour répondre chaque année à plus de 20 000 demandes d’intervention de secours en mer, chiffre en constante augmentation, les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (Cross) bénéficient d’un plan de modernisation qui se poursuivra en 2024.

Afin de répondre aux priorités de la France en matière de préservation de la biodiversité et de la ressource en eau, le budget du programme dédié est plus que doublé ; il s’articule autour de deux grands chantiers : d’une part, le renforcement de la stratégie nationale pour les aires protégées, de la restauration écologique, de la restauration des sols et de la protection des espèces via la stratégie nationale pour la biodiversité 2030 ; d’autre part, le plan Eau, qui doit permettre une gestion plus résiliente et plus sobre de l’eau, financé par une augmentation substantielle du plafond de recettes des taxes affectées aux agences de l’eau, dont les dépenses pourront ainsi croître de 475 millions d’euros d’ici à 2025.

L’enveloppe consacrée à la prévention des risques augmente de 16 % pour atteindre 1,3 milliard d’euros.

Le fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires, autrement appelé fonds vert, voit le montant de ses crédits augmenter de 25 % pour être porté à 2,5 milliards d’euros, dont une enveloppe spécifique de 500 millions d’euros allouée à la rénovation du bâti scolaire. Le groupe RDPI proposera au Sénat d’aborder de nouveau ce sujet dans le cadre de sa niche parlementaire du mois de décembre.

Il faut bien entendu mentionner également le financement du plan d’avenir pour les transports, doté de 1,6 milliard d’euros et destiné à soutenir les investissements dans les infrastructures et les mobilités vertes.

Les ressources de l’Afit France augmentent de 800 millions d’euros ; l’Agence financera notamment le volet mobilités des contrats de plan État-région de nouvelle génération, qui mobilisera au total 8,6 milliards d’euros. Il s’agira d’amorcer la mise en place des services express régionaux métropolitains, de favoriser le développement du fret, de moderniser le réseau et d’assurer la mise en accessibilité des gares prioritaires nationales.

Quant au programme 174 « Énergie, climat et après-mines », il financera les principales dépenses relatives aux priorités inscrites dans la loi relative à l’énergie et au climat, à savoir la neutralité carbone à l’horizon 2050, le déploiement des énergies renouvelables – l’année prochaine sera marquée par l’accélération du développement de l’éolien en mer – ou encore le soutien à la rénovation énergétique.

En 2024, près de 90 % des 5 milliards d’euros de crédits du programme 174 serviront à financer les trois principaux dispositifs d’aides versées aux ménages. Il s’agit, premièrement, de la prime à la conversion des véhicules et du bonus écologique, deuxièmement, du chèque énergie, qui a vocation à aider les 5,6 millions de ménages à revenus modestes, troisièmement, du dispositif MaPrimeRénov’, qui participe au financement des travaux de rénovation énergétique réalisés par des propriétaires occupants ou par les bailleurs du parc privé.

Ces hausses de crédits visent en définitive à soutenir l’accélération de la décarbonation des secteurs stratégiques principaux de notre vie quotidienne, ainsi qu’à garantir la préservation de la biodiversité et de nos ressources. Le groupe RDPI les soutiendra.

Alors que la transition est intimement liée à la cohésion – cohésion des territoires, mais aussi cohésion entre les collectivités et l’État –, la territorialisation de la planification écologique apparaît par ailleurs comme un enjeu clé.

À cet égard, mon groupe soutient les centaines de créations d’emplois qui sont inscrites dans ce budget : au titre de cette seule mission, +254 ETP pour les opérateurs et +317 ETP dans les services des ministères et autorités administratives indépendantes. Depuis vingt ans, le ministère perdait des postes : il était grand temps d’inverser la courbe. Cette inflexion permettra notamment d’accompagner les élus, qui en ont besoin, en matière d’ingénierie. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)