M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 61 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel et Daubet, Mme Girardin et MM. Gold, Grosvalet, Guiol et Laouedj.
L’amendement n° 1061 rectifié bis est présenté par Mme Berthet, MM. Bouloux et Pellevat, Mmes Petrus, Joseph, Puissat, Dumont et Belrhiti et MM. Lefèvre, Piednoir et Panunzi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 61 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. L’article 10 quinquies, introduit à l’Assemblée nationale, vise à geler à son niveau de 2023 la valeur du Smic qui permet de calculer le montant plafond des rémunérations bénéficiant des allégements généraux pour les cotisations maladie, 2,5 Smic, et famille, 3,5 Smic.
Cette mesure, qui n’a fait l’objet d’aucune étude d’impact, risque d’avoir des conséquences particulièrement néfastes pour le secteur industriel. Elle pourrait en effet aboutir, pour les entreprises du secteur industriel, à une hausse du coût du travail de 140 millions d’euros la première année ; ce surcoût atteindrait 0,5 milliard d’euros en 2027.
Couplée au décalage de la baisse de la CVAE, cette mesure intervient alors que nos concurrents engagent des politiques industrielles offensives. Aussi, dans un contexte de déficit de la balance commerciale et de perte de compétitivité, l’objectif de réindustrialisation du pays fixé par les pouvoirs publics justifie le maintien de mesures d’allégement en faveur des emplois qualifiés. C’est pourquoi nous proposons la suppression de l’article 10 quinquies.
M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l’amendement n° 1061 rectifié bis.
Mme Martine Berthet. Un tel gel de l’indexation des exonérations de cotisations aurait des conséquences de plus en plus pénalisantes pour les entreprises au fur et à mesure des revalorisations du Smic, provoquant un renchérissement du coût du travail.
Seraient particulièrement affectées les entreprises du secteur industriel et les activités les plus confrontées à la concurrence internationale. Ce sont pourtant les secteurs les plus dynamiques en matière de créations d’emplois. Le retentissement serait en définitive considérable sur notre balance commerciale, qui connaît déjà un déficit record.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. J’y insiste, il ne s’agit en aucune manière de supprimer les allégements de charges. Mesdames les sénatrices, j’ai entendu vos inquiétudes à ce sujet, mais laissez-moi vous redire notre détermination à poursuivre la réindustrialisation de notre territoire.
Je veux toutefois vous donner quelques chiffres pour que nous mesurions bien l’évolution des allégements de charges ces dernières années : ils ont augmenté de 8,6 % en 2021, de près de 15 % en 2022, de 10 % en 2023. Au total, entre 2021 et 2023, ils auront augmenté de 17 milliards d’euros, et le montant global de ces allégements atteindra 80 milliards d’euros en 2024.
Mme Émilienne Poumirol. Eh oui !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Au bout du compte, le gel de ce que nous appelons les « points de sortie » vise non pas à diminuer les allégements de charges, mais à maîtriser leur impact sur les finances publiques.
Lors des débats à l’Assemblée nationale, il a été question du rapport de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) : ses auteurs, Marc Ferracci et Jérôme Guedj, proposaient une remise en cause de ces allégements, notamment sur les rémunérations les plus élevées. Telle n’est pas l’option que nous avons retenue.
En revanche, la solution que nous souhaitons voir appliquer permet, tout en garantissant le maintien des allégements de charges, de limiter leur impact sur les finances publiques.
Mesdames, messieurs les sénateurs, comme je l’ai dit il y a quelques instants au sujet de la réforme des indépendants, on ne peut pas faire comme si la contrainte des finances publiques ne pesait pas aussi sur l’équilibre du financement de la sécurité sociale.
M. Bruno Retailleau. Il a raison.
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Cette mesure de gel des points des bandeaux représente une somme comprise entre 500 millions et 600 millions d’euros. Il faut bien que nous tenions compte de cet enjeu de la maîtrise des finances publiques !
Ma conviction à cet égard est que nous avons trouvé un bon équilibre : nous maintenons une politique favorable à l’emploi et à l’industrie tout en maîtrisant son impact sur les finances publiques.
Mme Émilienne Poumirol. Du « en même temps » !
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. C’est une position d’équilibre que nous vous proposons : avis défavorable, donc, sur ces amendements de suppression.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je ne sais pas si tout le monde a bien compris que cet article aurait des effets très modestes.
Les chiffres sont assez simples à comprendre : tout le dispositif repose sur des multiplicateurs du Smic, qui, lui, est indexé sur l’inflation. Si l’on retient un plafond de 3,5 Smic, par exemple, les salaires n’augmentant pas tous au rythme du salaire minimum, l’indexation de ce dernier a pour effet mécanique de faire entrer dans le champ de l’exonération, au fil des années, des salaires plus élevés qui n’y étaient auparavant pas éligibles. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant de faire le constat d’une dynamique un peu débridée.
Le gel au montant de 2023 réduira la perte de ressources publiques de 600 millions d’euros, quand les exonérations représentent 60 milliards d’euros au total : la réforme proposée est vraiment timide !
Il n’y a pas d’étude d’impact, a-t-on dit et répété. Ce qui est bien documenté, en tout cas, c’est qu’appliquer l’allégement de cotisations jusqu’à 2,5 Smic ou jusqu’à 3,5 Smic conduit à prendre en compte des emplois qui n’ont absolument pas besoin de ce type de mesures. On sait même que l’impact est nul au-delà de 2 Smic.
À rebours de ces analyses, et de peur que les seuils ne baissent trop rapidement, la commission des affaires sociales nous propose de fixer un niveau plancher à 2 Smic de l’année en cours. Mes chers collègues, il n’est pas sérieux de prétendre que ces 600 millions d’euros vont léser nos entreprises et pénaliser les emplois qui sont rémunérés 3,5 Smic !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 61 rectifié et 1061 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 954, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est complété par sept alinéas ainsi rédigés :
« La réduction dont bénéficie chaque employeur peut être minorée en fonction :
« 1° Du nombre de fins de contrat de travail, à l’exclusion des démissions ;
« 2° De la nature du contrat de travail et de sa durée ;
« 3° De la politique d’investissement de l’entreprise ;
« 5° De l’impact de l’entreprise sur l’environnement ;
« 6° De la taille de l’entreprise ;
« Un décret précise les modalités de calcul de la minoration de la réduction du taux des cotisations d’assurance maladie. »
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Je sais bien que M. le ministre et la majorité sénatoriale s’agacent un peu quand nous parlons des exonérations de cotisations sociales, dont le coût dépasse tout de même 87 milliards d’euros. Mais ce montant, nous ne l’avons pas inventé : il provient du rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale publié en mai 2023. J’en cite la page 56 : « L’année 2023 devrait marquer la fin des mesures d’urgence visant à limiter l’impact de la crise sanitaire. Toutefois, le coût des dispositifs d’exonération continuerait de croître à un rythme élevé, bien qu’un peu moins rapide qu’en 2022, +7,4 %, pour s’établir à 87,9 milliards d’euros pour l’ensemble des attributaires. »
Cette précision étant faite, revenons au présent amendement, par lequel nous proposons de minorer les réductions de cotisations patronales de la branche famille en fonction du nombre de fins de contrat de travail, de la nature du contrat de travail et sa durée, de la politique d’investissement de l’entreprise, ou encore de l’impact de l’entreprise sur l’environnement. Nous entendons ainsi reprendre une proposition formulée par l’ensemble des organisations syndicales à l’occasion de la conférence sociale organisée par le Gouvernement.
Pour nous, qui combattons les exonérations de cotisations sociales, il s’agit évidemment d’un amendement de repli, qui revient à dire : nous consentons aux exonérations, mais il faut des contreparties. La majorité sénatoriale, si imaginative quand il s’agit de trouver des critères d’activité à imposer aux bénéficiaires du RSA, ne sera pas capable, je le crains, de trouver avec nous des conditions à imposer aux entreprises qui bénéficient des aides publiques. Ce hiatus est étonnant…
M. le président. L’amendement n° 1062 rectifié bis, présenté par Mme Berthet, MM. Bouloux et Pellevat, Mmes Petrus, Joseph, Puissat, Dumont et Belrhiti et MM. Lefèvre, Piednoir et Panunzi, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa de l’article L. 241-2-1 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « maladie », sont insérés les mots : « applicable du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2024 » ;
b) Les mots : « calculés selon les modalités prévues au deuxième alinéa du III du même article L. 241-13 » sont remplacés par les mots : « applicable au 31 décembre 2023 ».
2° Le premier alinéa de l’article L. 241-6-1 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « familiales », sont insérés les mots : « applicable du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2024 est réduit de 1,8 point pour les salariés dont l’employeur entre dans le champ d’application du II de l’article L. 241-13 et dont les revenus d’activité tels qu’ils sont pris en compte pour la détermination des assiettes des cotisations définies à l’article L. 242-1 n’excèdent pas 2,5 fois le salaire minimum de croissance applicable au 31 décembre 2023 » ;
b) Le nombre : « 3,5 » est remplacé par le nombre : « 2,5 » ;
c) Les mots : « calculé selon les modalités prévues au deuxième alinéa du III de l’article L. 241-13 » sont remplacés par les mots : « applicable au 31 décembre 2023 ».
La parole est à Mme Martine Berthet.
Mme Martine Berthet. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à mon amendement précédent ; celui-ci vise à limiter à la seule année 2024 l’impact du gel de l’indexation des exonérations de cotisations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il est défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thomas Cazenave, ministre délégué. L’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 954 est défavorable, en raison des complexités qu’un tel dispositif susciterait.
Quant à l’amendement de Mme Berthet, je comprends qu’il est motivé par la crainte de voir perdurer l’effet du gel de l’indexation. Dans cet esprit, le Gouvernement émettra un avis favorable sur l’amendement n° 240 de la commission des affaires sociales, qui vise justement à garantir que le seuil plafond d’exonération ne descendra pas en dessous de 2 Smic de l’année en cours. Je veux croire, madame la sénatrice, que cela répondra à votre souci de ne pas laisser le montant de ce seuil s’éroder complètement au fil du temps.
Par conséquent, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement n° 1062 rectifié bis au profit de l’amendement de la commission.
M. le président. Madame Berthet, l’amendement n° 1062 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Martine Berthet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 1062 rectifié bis est retiré.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote sur l’amendement n° 954.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il faut bien se dire que le dogmatisme dont font preuve le Gouvernement et la majorité sénatoriale en matière de recettes frôle l’hypocrisie !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Pour notre part, quoique hostiles au principe même des exonérations de cotisations sociales, nous proposons ici un mécanisme qui tend à les rendre plus vertueuses. Nous ne refusons certes pas d’évoquer l’attractivité des entreprises ; néanmoins, s’agissant à la fois des recettes de la sécurité sociale et des compensations financières que verse l’État à cette dernière, nous devrions être doublement attachés à la bonne maîtrise de l’argent public.
Le coût du CICE nouvelle version s’élève à 28 milliards d’euros en 2024. Ce sont donc 28 milliards de cotisations patronales qui ne rentrent pas dans les caisses de la sécurité sociale, mais aussi 28 milliards d’euros de compensations qui sont soustraits aux recettes fiscales de l’État. Nous discutons donc, tranquillement, de la bonne utilisation de 56 milliards d’euros.
La majorité sénatoriale, si imaginative d’ordinaire – je l’ai dit –, pourrait trouver des solutions : nous les accepterions, sans dogmatisme. Tout ce qui nous sera proposé, nous le prendrons !
M. le président. L’amendement n° 240, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Remplacer les mots :
, dans la limite de
par les mots :
et 2 fois le salaire minimum de croissance calculé selon les modalités prévues au deuxième alinéa du III du même article L. 241-13, dans la limite de
II. – Alinéa 3
Remplacer les mots :
, dans la limite de
par les mots :
et 2 fois le salaire minimum de croissance calculé selon les modalités prévues au deuxième alinéa du III de l’article L. 241-13, dans la limite de
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je le présenterai de manière assez rapide, monsieur le président, car je me suis déjà exprimée sur ce que veut faire la commission.
Il est vrai que, dans sa rédaction actuelle, l’article 10 quinquies donne au Gouvernement la possibilité de relever par décret le montant du seuil s’il convient d’en enrayer la baisse. Toutefois, il semble plus prudent d’inscrire un seuil minimal dans le dur de la loi.
Ce seuil minimal, nous proposons de le fixer à 2 Smic de l’année en cours, ce qui n’est pas la même chose que 2 Smic de l’année 2023. Concrètement, dans dix ou vingt ans – le temps passe vite ! –, quand le Smic aura beaucoup augmenté, les plafonds des deux bandeaux, qui sont actuellement de 2,5 et de 3,5 Smic, pourraient ne plus équivaloir qu’à 2 Smic de l’année en cours ; aux termes de notre amendement, ils se stabiliseraient alors à ce niveau.
Ce choix de 2 Smic correspond en partie à une convention : on considère habituellement que les allégements de cotisations conservent une certaine efficacité un peu au-dessus de 1,6 Smic et qu’ils la perdent tout à fait autour de 2,5 Smic. En quelque sorte, nous avons coupé la poire en deux.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Je salue l’œuvre de pédagogie de notre rapporteure générale.
Ayons tout de même conscience que ce n’est pas une décision légère que nous prenons en adoptant cet article : nous sommes en train de toucher au dogme de la baisse du coût du travail en acceptant l’augmentation, certes légère, qui découlera du gel des exonérations de cotisations. Certes, cela se fait de manière extrêmement lissée ; cependant, en adoptant l’amendement de Mme la rapporteure générale, qui vise à empêcher que les plafonds d’exonération ne baissent en dessous de 2 Smic de l’année en cours, nous compléterons utilement le signal que nous envoyons.
Je voterai donc cet amendement ; il faut avoir conscience de ce que nous sommes en train de faire en matière de coût du travail.
M. le président. Je mets aux voix l’article 10 quinquies, modifié.
(L’article 10 quinquies est adopté.)
Après l’article 10 quinquies
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 813 rectifié, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale, le nombre : « 3,5 » est remplacé par le nombre : « 1,6 ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à limiter aux salaires inférieurs ou égaux à 1,6 Smic le champ d’application de l’allégement de cotisations d’allocations familiales. En effet, comme je l’ai déjà dit, les rapports s’accordent pour établir que cet allégement est inefficient pour des salaires plus élevés.
L’extension aux salaires élevés, via le bandeau famille, des allégements de cotisations d’allocations familiales, décidée à la suite des préconisations du rapport Gallois dans le but d’augmenter la compétitivité des entreprises, n’a eu aucun effet ni sur l’emploi ni sur l’industrie. Cela a d’ailleurs été démontré par le CAE, qui préconisait en 2019 de revenir sur les exonérations de cotisations au-delà de 1,6 Smic, ainsi que dans le récent rapport de MM. les députés Ferracci et Guedj : ces derniers recommandent de revenir sur la part du bandeau famille portant sur les hauts salaires, la jugeant inefficace et coûteuse.
En outre, cette réduction des cotisations familiales sur les salaires profite surtout aux grandes entreprises : 270 grandes entreprises concentrent 28,3 % du volume de l’allégement sur les rémunérations comprises entre 2,5 et 3,5 Smic. Il s’agit dès lors d’un véritable cadeau pour les hauts salaires, cadeau qui n’a aucune justification, puisque son efficience pour l’emploi et la compétitivité est quasi nulle.
Ainsi, chaque année, cet allégement inefficace sur les cotisations de la branche famille coûte plus de 4 milliards d’euros à la sécurité sociale, soit deux fois le montant dont ont besoin les hôpitaux et établissements publics de santé afin de réellement compenser l’inflation et les revalorisations salariales survenues en 2023.
Cet amendement vise donc à suivre les recommandations du CAE et du rapport de MM. Ferracci et Guedj en limitant ces exonérations aux salaires inférieurs à 1,6 Smic. Avec votre plancher à 2 Smic, madame la rapporteure générale, on n’en est plus très loin : encore un effort !
M. le président. L’amendement n° 1221 rectifié bis, présenté par MM. Jomier et Ouizille, Mmes Poumirol, Canalès et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin et Rossignol, MM. Redon-Sarrazy, Kerrouche, Chantrel et Lurel, Mme Bélim, MM. Jacquin, Ziane et Michau, Mmes Bonnefoy et Harribey, MM. Temal et Durain, Mme G. Jourda, MM. Féraud et Cardon, Mme Blatrix Contat, MM. Cozic, P. Joly et Stanzione, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Chaillou, Tissot et Marie, Mme Artigalas, MM. Mérillou, Gillé et Montaugé, Mme Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au 1er janvier 2024, au premier alinéa de l’article L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale, le nombre : « 3,5 » est remplacé par le nombre : « 3,2 ».
II. – Au 1er janvier 2025, au premier alinéa de l’article L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale, le nombre : « 3,2 » est remplacé par le nombre : « 2,8 ».
III. – Au 1er janvier 2026, au premier alinéa de l’article L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale, le nombre : « 2,8 » est remplacé par le nombre : « 2,5 ».
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Dans un esprit similaire à celui qui inspire l’amendement que vient de présenter Mme Poncet Monge, cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise à limiter le champ d’application de l’allégement de cotisations patronales d’allocations familiales : on réduirait progressivement, sur trois ans – c’est très doux ! –, le montant maximal des salaires donnant lieu à cet allégement à 2,5 Smic, en lieu et place du plafond actuel de 3,5 Smic.
Cela a été dit et redit, y compris par M. le ministre : en trente ans, le coût des allégements généraux de cotisations sociales patronales a explosé.
Le coût des allégements de cotisations et exemptions d’assiette est désormais, au total, de plus de 80 milliards d’euros. Vous l’avez même évalué, monsieur le ministre, à 87 milliards d’euros !
Le bandeau famille, dispositif d’exonération de cotisations d’allocations familiales, consiste notamment en une réduction de cotisations sur les rémunérations élevées, comprises entre 2,5 et 3,5 Smic ; cette réduction fut conçue en 2014 comme une mesure en faveur de la compétitivité et de l’industrie. Les éléments objectifs issus des différentes études sur le sujet prouvent toutefois que cet allégement a en vérité des effets quasi nuls sur l’emploi et un impact difficilement décelable sur la compétitivité.
En supprimant progressivement ces exonérations, nous permettrons à la branche famille d’accroître ses ressources d’au minimum 1,6 milliard d’euros d’ici trois ans.
M. le président. L’amendement n° 527 rectifié, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale, le nombre : « 3,5 » est remplacé par le nombre : « 3 ».
La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Par cet amendement, mes chers collègues, il vous est proposé de supprimer les allégements de cotisations patronales pour les salaires qui vont de 3 à 3,5 fois le Smic.
Le Rassemblement national propose et continuera de proposer, au cours de nos échanges, un changement de logique dans la politique de baisse du coût du travail. Si nous considérons que les Français sont trop peu rémunérés, les politiques constantes de baisse des cotisations sociales sur les salaires jusqu’à 3,5 Smic ne portent pas leurs fruits, toutes les études le montrent. En effet, selon une note publiée par le CAE en janvier 2019, la baisse des cotisations patronales n’a d’effets significatifs sur l’emploi que lorsqu’elle est limitée aux salaires inférieurs à 1,6 Smic.
Nous proposerons donc, dans la suite de ce débat, l’adoption de la mesure phare de Marine Le Pen : pour une augmentation de 10 % des salaires, après concertation entre les salariés et les employeurs, ces derniers bénéficieraient d’une annulation des cotisations patronales afférentes.
En attendant, par cet amendement, nous vous proposons de supprimer les allégements de cotisations patronales accordés pour les salaires compris entre 3 et 3,5 Smic, afin de faire rentrer dans les caisses de notre système social un argent qui lui manque tant, mais également de préparer ce grand choc de hausse des salaires qui fut plébiscité par des millions de Français en 2022.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1221 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 1083 rectifié bis, présenté par Mme Vermeillet, MM. Bleunven et Canévet, Mmes Sollogoub et N. Goulet, MM. Laugier et Kern, Mme O. Richard, MM. Mizzon et Henno, Mmes Gatel, Saint-Pé, Perrot et Gacquerre, MM. P. Martin et J.M. Arnaud, Mme Jacquemet, M. Duffourg et Mme Romagny, est ainsi libellé :
Après l’article 10 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale est complété par trois paragraphes ainsi rédigés :
« III. Au sens du présent code, les salariés mis à la disposition, en tout ou partie, d’un ou de plusieurs de ses membres par un groupement d’employeurs ne sont pas pris en compte dans l’effectif de ce groupement d’employeurs, sauf en ce qui concerne l’application des dispositions relatives à la tarification des risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles. »
« IV. Au sens du présent code, les salariés mis à disposition par un groupement d’employeurs sont pris en compte par l’entreprise utilisatrice à due proportion de leur temps de travail, pour le calcul de ses effectifs, sauf en ce qui concerne l’application des dispositions relatives à la tarification des risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles.
« V. Les dispositions des alinéas III et IV sont applicables à compter du 1er janvier 2025. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Sylvie Vermeillet.