M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Corbisez, dans le cadre de la priorité donnée à l’amélioration des déplacements du quotidien par la loi d’orientation des mobilités, et sous l’impulsion du Président de la République, le Gouvernement a lancé une démarche visant à doter les grandes aires urbaines qui le souhaitent de services express régionaux métropolitains (Serm).
L’objectif est ambitieux. Il s’agit de développer les transports du quotidien et, en particulier, de doubler la part modale du transport ferroviaire dans les déplacements du quotidien autour des grands pôles urbains, à la fois pour améliorer la desserte des zones périurbaines et pour participer à la décarbonation des mobilités.
Pour le concrétiser, il s’agit de s’inscrire dans une démarche collective visant à élaborer des projets locaux avec les acteurs concernés, au premier rang desquels les régions et les autorités organisatrices des mobilités.
C’est l’objet de la proposition de loi déposée par M. Jean-Marc Zulesi, votée par l’Assemblée nationale le 16 juin dernier et par le Sénat le 23 octobre dernier. Celle-ci donne une définition des Serm et prévoit qu’ils soient labellisés par l’État sur la base d’une proposition des collectivités concernées.
En matière de financement, l’État est au rendez-vous pour accompagner les démarches locales. Ainsi, après que le plan de relance aura consacré un volet spécifique à la mise en œuvre de services express métropolitains, doté de 30 millions d’euros, pour engager de premières études et faire émerger les projets plus rapidement, la future programmation budgétaire prévoit un volet spécifique dans les contrats de plan État-régions, les fameux CPER, représentant un montant de l’ordre de 800 millions d’euros pour l’État.
Le cas échéant, des financements innovants tels que des recettes affectées aux projets pourront également être mis en place, si les collectivités portant les projets le souhaitent et selon des modalités qu’elles définiront.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour la réplique.
M. Jean-Pierre Corbisez. Je réinterrogerai M. Clément Beaune ce soir en commission. Mme la Première ministre annonce 100 milliards d’euros pour le ferroviaire. Or vous venez d’évoquer 30 millions d’euros ! Quel écart ! (Mme la ministre proteste.) Nous espérons que la région sera suivie concernant les financements !
conséquences de la modification du seuil de ratio de tension sur la demande de logement social pour les communes
M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, auteure de la question n° 790, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics.
Mme Sylviane Noël. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le décret du 29 mars 2023 est venu modifier le seuil de tension sur la demande de logement social mesuré à l’échelle des territoires concernés par la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU.
En Haute-Savoie, plusieurs communes se voient subitement appliquer un nouveau ratio. C’est le cas de Marignier dans l’agglomération clusienne, qui se voit dorénavant appliquer un objectif de 25 % de production de logements sociaux, au lieu de 20 %, ce qui fait mathématiquement passer le montant de sa pénalité SRU de 40 000 euros à 85 000 euros, soit plus du double, payable immédiatement, alors même que cette commune avait atteint une très large majorité de ses objectifs initiaux en la matière.
Une telle attitude de l’État est très décourageante, voire stigmatisante pour les élus. C’est une situation insupportable, à plusieurs titres.
Financièrement, cette pénalité intervient de manière rétroactive – son montant a été notifié aux communes au mois de juillet, alors que leur budget devait être voté au plus tard le 15 avril 2023 –, dans un contexte particulièrement délicat pour les collectivités locales, compte tenu de l’explosion de leurs charges de fonctionnement et de la baisse d’une partie de leurs recettes.
Juridiquement, cette pénalité vient sanctionner, à la manière d’un couperet, sans aucun délai ni préavis, la non-atteinte d’un objectif qui ne s’imposait pas jusqu’alors aux communes, ce qui est particulièrement discutable.
Humainement, enfin, sont sanctionnés des élus, alors que, dans immense majorité, ils sont particulièrement actifs pour tenter de résorber le retard de production de logements sociaux. Leurs efforts ne sont donc pas récompensés, bien au contraire, dans un département frappé de surcroît par la rareté et la cherté du foncier.
Madame la ministre, ne pensez-vous pas qu’en matière de logements, comme pour bien d’autres politiques publiques, il est temps que l’État fasse usage de la carotte plutôt que du bâton dans ses rapports avec les collectivités locales, afin de restaurer la confiance ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Noël, à chaque début de période triennale d’application du dispositif issu de l’article 55 de la loi SRU, le Gouvernement définit un seuil de tension sur la demande de logements sociaux en deçà duquel les territoires concernés se voient appliquer un objectif abaissé.
Le récent décret n° 2023-235 du 28 avril 2023 a fixé ce seuil à quatre demandes pour une attribution.
Le Gouvernement a fait le choix de la stabilité en décidant de reconduire le seuil préexistant. Ce décret a fait l’objet d’une concertation avec les associations nationales représentatives des élus locaux et a reçu des avis favorables du Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) et du Conférence nationale du handicap (CNH).
Les communes dans lesquelles le taux de tension est inférieur à ce seuil se voient appliquer un taux abaissé de 20 % de logements sociaux parmi l’ensemble des résidences principales, contre 25 % dans le droit commun.
Par conséquent, la hausse du taux cible attendu de la commune de Marignier s’explique non pas par le changement réglementaire, mais uniquement par la hausse de la tension observée dans l’unité urbaine de Cluses, à laquelle elle est rattachée.
Le taux est passé de 3,9 à 4,5 demandes pour une attribution en trois ans. Ce niveau de tension résulte d’une méthode de calcul visant à prendre en compte la situation particulière liée à l’épidémie de covid-19, puisqu’un décret du 17 février 2023 a prévu, de manière dérogatoire, de neutraliser les données de l’année 2020 au sein de la moyenne triennale retenue.
Le relèvement de l’objectif est ainsi lié à l’intensification des enjeux de production de logements sociaux sur ce territoire. La commune conserve la possibilité de déduire de son prélèvement annuel ses dépenses engagées en faveur du développement d’une offre sociale.
M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, pour la réplique.
Mme Sylviane Noël. Madame la ministre votre réponse me laisse une nouvelle fois sur ma faim !
Je vous ai interrogée sur des faits très concrets, et vous me répondez en termes techniques. Je connais les dispositifs de déductibilité que vous évoquez.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Sylviane Noël. Je souhaitais vous sensibiliser aux caractéristiques d’une telle sanction.
réforme du dispositif maprimerenov’
M. le président. La parole est à M. Christian Klinger, auteur de la question n° 875, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Christian Klinger. Le projet de planification écologique du Gouvernement, rendu public fin septembre, vise à faire de la France « l’une des premières nations à sortir des énergies fossiles », afin de préserver sa biodiversité et ses ressources, tout en répondant aux préoccupations des Français.
Le chauffage au bois domestique s’inscrit bien dans cette vision. Les Français ne s’y sont pas trompés : 7,2 millions de ménages utilisent un tel équipement ! Pourtant, vous envisagez de réduire de manière drastique les aides pour le chauffage au bois domestique à partir de 2024, alors que d’autres solutions de chauffage verraient leur niveau d’aide augmenter.
Ce sera priver une partie importante des ménages les plus modestes habitant en milieu rural d’un accès à la source de chauffage la plus compétitive, au moment où le Gouvernement cherche précisément à amortir le choc de la facture énergétique.
Une telle évolution aurait des conséquences directes sur le tissu économique de la filière, qui compte de nombreuses PME et entreprises de taille intermédiaire (ETI), ancrées dans les territoires, notamment les territoires ruraux, alors même qu’une augmentation planifiée de près de 250 000 tonnes par an de la production est prévue jusqu’en 2028.
Agir contre la filière bois énergie reviendrait donc à remettre en cause une solution efficace pour décarboner le secteur du chauffage, qui reste encore très dépendant des énergies fossiles.
Lors des annonces de la révision du dispositif MaPrimeRénov’ pour 2024, avez-vous mesuré toutes les conséquences pour la filière bois et granulés de chauffage ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur Klinger, depuis plusieurs mois, le Gouvernement prépare une refonte des aides à la rénovation énergétique, MaPrimeRénov’, pour le 1er janvier 2024.
L’objectif de cette réforme est double. Tout d’abord, il s’agit d’accélérer la dynamique de restauration performante, qui reste aujourd’hui insuffisante pour atteindre nos objectifs climatiques de réduction de la consommation énergétique. Celle-ci fait l’objet du parcours MaPrimeRénov’ pour les rénovations d’ampleur.
Ensuite, il s’agit d’accélérer la dynamique de décarbonation du chauffage, pour atteindre nos objectifs de sortie des énergies fossiles et de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030.
Ce parcours MaPrimeRénov’ donne lieu à des aides qui seront conditionnées, avant l’installation d’un équipement de chauffage décarboné, y compris une pompe à chaleur hybride, à la présentation d’un DPE, un diagnostic de performance énergétique, avant travaux, afin de s’assurer que les maisons individuelles ne sont pas des passoires énergétiques notées F ou G.
Compte tenu du caractère limité de la ressource en biomasse à l’horizon 2030, les travaux de planification écologique ont dégagé des priorités d’utilisation de la biomasse.
Dans l’optique de respecter cette priorisation, les paramètres des aides MaPrimeRénov’ pourraient être ajustés, afin de soutenir l’installation d’équipements bois, dans les cas pour lesquels il s’agit de la solution de référence. Je pense ainsi au remplacement de chaudières au fioul dans les zones rurales ou les zones de montagne.
En tout état de cause, tout recentrage sera progressif, afin de ne pas mettre à mal notre trajectoire de décarbonation des vecteurs de chauffage et donner de la visibilité à la filière.
Le parcours MaPrimeRénov’ accompagné continuera de financer l’installation d’un appareil de chauffage bois – chaudière, foyer fermé, poêle, insert –, dans le cadre d’une rénovation d’ampleur. Les nouvelles modalités seront connues dans les prochains mois.
M. le président. La parole est à M. Christian Klinger, pour la réplique.
M. Christian Klinger. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
Vous le savez, le bois de chauffage et le granulé de bois sont issus d’une ressource locale, durable et responsable qui répond pleinement aux problématiques écologiques et économiques de la transition énergétique.
Si vous fléchez trop vers la pompe à chaleur électrique, vous augmentez le risque de pics de demande pendant la période hivernale et par grand froid. Ne mettez donc pas tous vos œufs dans le même panier et soutenez aussi la filière bois, vertueuse à bien des égards.
lutte contre les causes de l’insécurité des élus locaux
M. le président. La parole est à Mme Marie Mercier, auteur de la question n° 859, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Marie Mercier. Le 10 octobre dernier, le Sénat a adopté la proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires de M. François-Noël Buffet. Ce texte, auquel vous êtes favorable, madame la ministre, est nécessaire.
Nous l’avons tous dit, l’agression d’un maire est une attaque contre la République. Et je ne reviendrai pas sur les exemples dramatiques et tristement connus qui se sont déroulés en France.
En Saône-et-Loire, le maire de Mancey a démissionné. Des menaces graves ont été proférées contre les maires de Cheilly-lès-Maranges, Montcenis, Senozan, Les Bizots, Saint-Ambreuil et Saint-Rémy. Bien d’autres encore ont dû affronter de véritables tempêtes.
Voilà quelques jours, dans ce département, que vous connaissiez bien, un maire entouré de ses adjoints et de son directeur général des services n’a pas pu présenter un projet d’agrandissement de zone de loisirs devant 30 administrés. Ces derniers se sont montrés tellement agressifs que le maire a failli appeler le 17. Il avait préparé quatre projections, et il a dû s’arrêter au début de la première.
Très attachée à l’intérêt général et à l’attractivité de sa commune, l’équipe municipale est profondément bouleversée et se sent démunie. Pourquoi tant de violence dans une commune tranquille et pour une aire de jeux ? Si les maires ont toujours été confrontés à des conflits et des querelles, l’ampleur que prend le phénomène est inquiétante. Il n’y a plus de respect de la fonction.
Madame la ministre, quand cette proposition de loi, que vous défendez, sera-t-elle inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, promulguée et, surtout, appliquée ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Marie Mercier, vous le savez, la sécurité des élus revêt un caractère fondamental et la lutte contre les violences commises à l’encontre des titulaires de mandats locaux appelle à un travail collectif, que nous avons entrepris depuis le début de l’année.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement s’est engagé à soutenir la proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires, adoptée par le Sénat en première lecture le 10 octobre dernier. Ce texte comporte des avancées majeures, en permettant notamment d’améliorer la prise en charge financière de la protection des élus et d’alourdir les sanctions pénales.
J’ai annoncé le 17 mai dernier le lancement d’un « pack sécurité ».
À l’échelon national, j’ai souhaité la création d’un centre d’analyse et de lutte contre les atteintes aux élus – il comprend un gendarme et un sous-préfet –, qui se consacre à temps plein à la coordination des milliers de policiers et gendarmes œuvrant pour leur sécurité, afin d’associer une prévention à chaque menace.
Enfin, j’ai présenté début juillet 2023 un plan national de prévention et de lutte contre les violences aux élus. Ce plan cherche à agir sur quatre axes : la protection juridique et fonctionnelle, la sécurité physique des élus et l’accompagnement psychologique, la réponse judiciaire, et les relations entre les maires et les parquets.
De très nombreux sujets nécessitent toutefois de modifier la loi. Tout est dans le texte voté à l’unanimité au Sénat. Je fais mon maximum pour qu’il soit inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale avant la fin de l’année.
M. le président. La parole est à Mme Marie Mercier, pour la réplique.
Mme Marie Mercier. Madame la ministre, je note la date importante que vous venez de nous annoncer.
Nous le savons, cette proposition de loi a des limites. En effet, les amendes restent impayées et les dépôts de plainte sont classés sans suite. Il faut traiter non seulement les effets, mais aussi, et surtout les causes.
D’ores et déjà, il convient d’appliquer les règles existantes. Les règles communes ne sont plus respectées, l’autorité est défiée par des administrés – j’insiste sur ce point – de tous âges et tous milieux.
Les maires sont inquiets, madame la ministre, et la France tout entière s’inquiète face à ce qui est ressenti comme un recul de l’ordre et de l’autorité.
projet de révision de la directive sur les émissions industrielles
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, en remplacement de M. Bernard Buis, auteur de la question n° 756, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, en remplacement de M. Bernard Buis. Notre collègue Bernard Buis tenait à interroger le Gouvernement sur le projet de modification de la directive européenne relative aux émissions industrielles (IED).
Avec cette directive, il s’agit de réduire les émissions des exploitations concernées via des mesures environnementales définies à l’échelon européen.
Le 5 avril 2022, la Commission européenne a présenté un projet de modification de cette directive, en intégrant dans son champ d’application les élevages de volailles, porcins et bovins à partir du seuil de 150 unités de gros bétail.
Dans le cadre des négociations européennes, le Gouvernement a défendu une position visant à tenir compte des contraintes, notamment financières, que la révision de la directive engendrerait pour la profession agricole.
Le 10 juillet 2023, le Parlement européen a voté contre le projet de la Commission. Nous pouvons nous réjouir de ce vote, qui est porteur d’un message de soutien à destination des filières agricoles. Contrairement à ce que nous pouvons lire ici ou là, ce n’est en rien une mauvaise nouvelle pour la transition écologique.
Les exploitations agricoles françaises sont d’ores et déjà activement engagées dans la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre et dans la préservation de l’environnement. Élevage et écologie ne sont pas incompatibles. Les opposer sans nuance ne sert à rien.
Cela étant, il y a eu des négociations dans le cadre du trilogue européen, au lendemain du vote des parlementaires.
Mon collègue Bernard Buis souhaitait donc vous interroger. Les négociations sont-elles toujours en cours ? Quelles sont les prochaines étapes de ces négociations ? Comment le Gouvernement s’investit-il pour protéger nos éleveurs ? Enfin, ces derniers ont-ils encore des raisons de s’inquiéter ou peuvent-ils être sereins ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Monsieur le sénateur, l’inclusion dans le champ de la directive des activités d’élevage ayant des impacts environnementaux importants ne peut être pensée qu’en soulignant que l’élevage a un avenir en France et détient une partie de la solution face au changement climatique.
Dans cette logique, le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire a annoncé, en lien avec le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, un plan de soutien à l’élevage, à l’occasion du trente-deuxième sommet de l’élevage de Cournon.
Dans la même optique, la France s’est aussi exprimée à plusieurs reprises au niveau européen pour défendre l’élevage et restreindre au maximum l’inclusion de l’élevage dans le champ de la directive IED.
Ces interventions fortes en faveur de l’élevage ont porté leurs fruits, puisque plusieurs avancées ont ainsi été obtenues dans l’orientation générale du Conseil adoptée le 16 mars dernier par rapport à la proposition initiale de la Commission européenne : rehaussement des seuils d’entrée, exclusion des élevages extensifs, définition des règles applicables aux exploitations par acte d’exécution pour un meilleur contrôle par les États membres des obligations qui seront imposées aux exploitants.
La France a soutenu cette proposition de compromis, tout en insistant sur l’indispensable prise en compte des systèmes d’élevage durables.
Le mandat du Parlement, voté le 11 juillet dernier, propose le statu quo sur le sujet. Les trilogues sont désormais engagés sous l’égide de la présidence espagnole, et le sujet « élevage » devrait être abordé lors du troisième trilogue politique du 28 novembre prochain.
Les négociations sont donc en cours. Il nous faut, côté Conseil, trouver des voies de compromis entre les deux mandats. La France estime que le résultat du vote du Parlement doit inciter le Conseil à faire un effort supplémentaire pour desserrer la contrainte sur les exploitations d’élevage.
conséquences potentielles de la proposition de règlement européen sur les produits phytosanitaires (sur) sur les vignobles français.
M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, auteur de la question n° 817, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Mme Pascale Gruny. Depuis plusieurs mois, les viticulteurs français s’inquiètent des conséquences potentielles de la proposition de règlement européen relatif à l’utilisation durable des pesticides, dit règlement SUR.
Ce règlement, en cours de négociation, vise à imposer des mesures contraignantes aux États pour réduire de 50 % l’usage des produits phytosanitaires, en prévoyant notamment une interdiction absolue de traitement dans et à proximité de zones dites sensibles.
Concrètement, il s’agirait d’une bande d’interdiction de traitement sanitaire de 3 mètres, que la rapporteure de la commission de l’environnement du Parlement européen voudrait même étendre à 50 mètres !
Si une telle approche extensive des « zones sensibles » était retenue, cela reviendrait à abandonner purement et simplement les parcelles du vignoble champenois. Plus de 1 500 hectares de l’appellation Champagne sont déjà classés site Natura 2000, et on estime à 1 000 hectares les surfaces concernées par les zones de non-traitement !
Les latitudes de l’AOC Champagne rendent par ailleurs les vignes très sensibles aux maladies et ne permettent pas de se dispenser de traitements pour produire du raisin qualitatif en quantité. Il est indispensable de laisser aux vignerons un temps de transition nécessaire pour trouver des alternatives aux produits de biocontrôle, dont on leur interdirait l’utilisation dans certains secteurs de l’appellation.
Madame la ministre, quelles positions le Gouvernement entend-il défendre à Bruxelles sur ce dossier pour préserver les intérêts de nos viticulteurs et protéger notre souveraineté alimentaire ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Gruny, il convient de le préciser, la négociation du texte SUR est encore en cours. Cette proposition de règlement est donc encore susceptible d’évoluer, tant au niveau du Conseil que du Parlement européen, puis en trilogue.
La France soutient la proposition de la Commission d’avoir un règlement sur l’utilisation durable des produits phytopharmaceutiques.
Placée au niveau européen, une telle initiative porte cette transition à la bonne échelle. Elle assure en effet une protection commune du consommateur européen et l’absence de distorsions entre les producteurs européens. Elle permet ainsi de négocier les mêmes conditions de production sur tout le territoire de l’Union européenne.
La France soutient le principe d’un tel texte, notamment au regard d’un objectif d’harmonisation. Toutefois, des évolutions restent nécessaires pour réussir à concilier de manière réaliste protection de la santé et de l’environnement, d’une part, et production agricole et souveraineté alimentaire, d’autre part.
L’étude d’impact complémentaire de la proposition de règlement SUR ne documente pas suffisamment les baisses de rendement et de production, ainsi que les impacts attendus, en fonction des options, pour la protection des zones sensibles.
Oui, la viticulture est essentielle au développement et à l’aménagement de nombre de nos territoires. Elle est créatrice de richesses et d’emplois. Ses écosystèmes et ses paysages sont très divers et abritent une biodiversité reconnue.
Le Gouvernement est conscient de l’enjeu que représente l’utilisation de certains produits dans les zones agricoles comprises dans ces zones sensibles.
Par conséquent, le déploiement du projet SUR doit impérativement être accompagné du développement massif d’alternatives : la mise à disposition de nos agriculteurs d’outils de substitution fiables permettant le maintien d’un état sanitaire performant au sein de l’Union européenne est un enjeu essentiel, sur lequel nous travaillons.
M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour la réplique.
Mme Pascale Gruny. En la matière, madame la ministre, nous avons l’habitude que les intérêts français, loin d’être préservés, passent à la trappe… Nos voisins et néanmoins concurrents européens font souvent beaucoup mieux que nous. Nous comptons donc vraiment sur de la fermeté de la part du Gouvernement !
Les produits phytosanitaires sont aussi un médicament pour les plantes, il faut le dire et le marteler. On en a besoin pour traiter les maladies. Tant que la recherche n’a pas avancé, prenons donc garde de ne pas empêcher nos viticulteurs de continuer de les utiliser.
On estime qu’une réduction de 50 % de l’usage des produits phytosanitaires se traduirait par une perte de rendement de 28 % pour la viticulture française. Or, dans le Bordelais, on arrache des vignes…
dégâts occasionnés aux vignobles par le mildiou, indemnisations et création d’un fonds d’urgence
M. le président. La parole est à M. Alain Duffourg, auteur de la question n° 846, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Alain Duffourg. Madame la ministre, je souhaite interroger le Gouvernement sur la situation climatique qu’a connue notre pays entre les mois de mai et de juillet 2023, ainsi que sur son impact sur les récoltes, en particulier dans le vignoble gersois.
En effet, comme vous le savez, les vignes du Gers et de certains départements limitrophes ont subi une attaque de mildiou sans précédent. Celle-ci faisait suite à des calamités survenues en 2021 et 2022, liées notamment au gel et à la grêle.
Votre collègue M. Fesneau, ministre de l’agriculture, est venu dans le Gers le 2 octobre dernier. À cette occasion, les représentants de la profession agricole et de la filière viticole du territoire lui ont remis un dossier faisant état de pertes particulièrement importantes, estimées à 50 %, voire à 80 % de la récolte, alors que celle-ci s’annonçait assez prometteuse.
Vous n’ignorez pas que le préjudice économique risque d’être très important. C’est la raison pour laquelle ce dossier a été adressé à votre ministère.
Les réclamations qui sont formulées aujourd’hui par les viticulteurs et les organisations agricoles me paraissent tout à fait justifiées : nous le savons, dans le cadre du dispositif d’assurance qui a été mis en place pour couvrir les agriculteurs contre les calamités agricoles, une partie des dégâts doit rester à la charge des producteurs, en l’occurrence des viticulteurs, une autre est prise en charge par l’assurance et le reste relève de la solidarité nationale.
Si nous acceptons qu’une part des pertes reste à la charge des viticulteurs, la compagnie d’assurances concernée n’entend pas régler les dommages consécutifs au mildiou. Il ne reste donc que la solidarité nationale, à laquelle aujourd’hui nous faisons appel, en demandant la création d’un fonds d’urgence.
Ces pertes ont été chiffrées à 23 millions d’euros. Madame la ministre, concrètement, une ligne budgétaire est-elle prévue à cet effet ? Et quand les viticulteurs pourront-ils être indemnisés ?