M. Vincent Delahaye, rapporteur. Très bien !
M. Raphaël Daubet. Rappelons que ces conventions sont des traités internationaux bilatéraux.
Rappelons qu’elles sont conclues pour faciliter les échanges et les investissements dans les pays concernés, en supprimant les obstacles fiscaux aux activités commerciales ou économiques.
Rappelons que, pour ce faire, ces conventions ont un objectif : éliminer la double imposition et donc offrir une véritable sécurité juridique au contribuable, qu’il s’agisse des entreprises ou des particuliers, en même temps que prévenir la fraude et l’évasion fiscales.
Rappelons, enfin, que ces accords internationaux facilitent la coopération administrative entre les États et, en l’occurrence, entre des États membres de l’Union européenne.
Il faut donc se féliciter de voir advenir des accords qui apporteront de la clarification, de la justice et de la transparence fiscale, ce qui correspond, à mon sens, à une ancienne et légitime aspiration pour l’Europe.
On peut néanmoins s’étonner que, dans un contexte où les enjeux économiques et budgétaires vont croissant, l’on ait tant tardé à conclure ces traités bilatéraux. Je rappelle que la France et le Danemark n’étaient plus liés par une convention depuis 2008 et que la France et la Grèce sont unies par une convention obsolète, qu’il était grand temps de dépoussiérer – ce texte date de 1963.
La mise au point d’une convention-cadre par l’OCDE, ratifiée par la France en 2018, a visiblement constitué une avancée importante pour le déploiement de nos accords fiscaux à travers le monde.
Les élus du RDSE appellent justement de leurs vœux de telles coopérations internationales renforcées.
Nous sommes convaincus que les réajustements de l’économie mondiale, au travers des enjeux de décarbonation, de relocalisation, voire de démondialisation, ne marqueront pas pour autant la fin des mouvements humains et commerciaux.
Il faut donc continuer sans relâche à tisser la toile de nos conventions internationales. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Samantha Cazebonne.
Mme Samantha Cazebonne. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui deux conventions bilatérales, l’une signée en février 2022 avec le Danemark, l’autre conclue en mai suivant avec la Grèce.
Ces deux textes assurent une mise à jour essentielle pour la fiscalité de nos compatriotes, ainsi que des entreprises concernées à l’étranger.
La convention signée entre la France et le Danemark en février 2022 vient combler une lacune déjà ancienne : nos deux pays n’étaient plus liés par un accord fiscal depuis 2008.
La signature de cette nouvelle convention fiscale revêt une grande importance, au regard du poids économique des relations entre le Danemark et la France. Elle met fin, j’y insiste, à treize années d’absence de convention bilatérale entre nos deux pays.
Je saisis cette occasion pour saluer le travail de notre ancien collègue Richard Yung, qui avait alerté sur les effets pour nos compatriotes de la dénonciation de l’ancienne convention par le Danemark.
Cette nouvelle convention fiscale représente une avancée majeure pour les relations entre nos deux pays. Elle contribuera à renforcer leurs liens tant économiques que financiers : elle offrira un cadre conventionnel à l’élimination des doubles impositions, notamment en matière de pensions, en appliquant les standards internationaux les plus récents établis par l’OCDE. Nous saluons, partant, la signature de la convention franco-danoise.
La seconde convention que nous examinons aujourd’hui a été signée entre la France et la Grèce en 2022. Il est essentiel de la ratifier pour garantir à nos compatriotes établis hors de France, que j’ai l’honneur de représenter, la fiscalité la plus juste possible.
Mes chers collègues, souvenons-nous de la situation kafkaïenne dans laquelle ont été placés les enseignants du lycée franco-hellénique Eugène-Delacroix, établissement homologué par l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE). Les intéressés s’étaient vus réclamer en 2020 des arriérés d’impôt au titre des revenus perçus depuis 2014, montants équivalant à plusieurs mois du salaire moyen d’un enseignant !
La nouvelle convention permet de supprimer la double imposition sur le revenu. À ce titre, elle est évidemment la bienvenue. Elle pose ainsi un nouveau principe d’imposition exclusive dans l’État de source pour les rémunérations publiques. Elle comporte également une clause rétroactive, destinée à corriger les injustices que ces enseignants ont subies.
Par ailleurs, cette convention permettra l’application des dernières normes fiscales internationales. Elle apportera une visibilité accrue en la matière, au profit des particuliers et des entreprises, afin de favoriser le développement des relations économiques en général et notamment des investissements.
En résumé, ces deux conventions répondent à des enjeux importants pour nos compatriotes, ainsi que les entreprises concernées à l’étranger. Pour toutes les raisons que je viens d’indiquer, les élus du groupe RDPI voteront le présent texte sans réserve.
M. le président. La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.
Mme Florence Blatrix Contat. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les accords examinés conjointement ce matin sont, d’une part, une convention avec le Danemark, et, de l’autre, une convention avec la Grèce. Ils s’inscrivent dans le mouvement continu de renégociation de nos conventions fiscales, engagé depuis plusieurs années.
Ces textes classiques, du moins pour la France, découlent des travaux de l’OCDE et de la montée en puissance de la démarche dite Beps (Base Erosion and Profit Shifting), même si la nouvelle convention conclue avec la Grèce ne reprend que partiellement ces derniers apports.
Pour ce qui concerne les conventions internationales, le Parlement ne dispose pas du droit d’amendement. Il peut simplement voter ou rejeter le texte qui lui est soumis, conformément à l’article 53 de la Constitution.
Le rôle des parlementaires est donc contraint, même si, bien sûr, l’examen de ces textes est précédé d’une négociation. En pratique, la procédure retenue relève davantage d’une information des députés et des sénateurs que de l’examen d’un texte de loi, même si, je le répète, un rejet est toujours possible.
Notre rapporteur, M. Delahaye, a précisé qu’il souhaitait voir le contrôle de l’application de ces accords renforcé à l’avenir. Nous soutenons cette démarche. L’exemple de la convention fiscale avec le Luxembourg est particulièrement éclairant à cet égard : il prouve que de lourds problèmes subsistent parfois au stade de l’application des textes.
J’en viens maintenant aux objectifs de ces accords.
Les nouvelles conventions conclues avec le Danemark et la Grèce tiennent compte toutes deux des derniers standards Beps.
Ainsi, elles appliquent les nouvelles définitions de l’agent dépendant et de l’agent indépendant, la clause anti-fragmentation des activités en matière d’établissement stable et la clause générale anti-abus.
Elles sont également assorties d’un préambule conforme au contenu de la convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales. Ce dernier texte permettra de prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices. Ce sont là autant d’éléments essentiels.
En outre, le préambule de l’accord conclu avec le Danemark le précise expressément : la convention fiscale signée a pour objet d’éliminer la double imposition sans créer de possibilité de non-imposition ou d’imposition réduite par l’évasion ou la fraude fiscale. Ce sont également des avancées majeures.
Mes chers collègues, sur le plan politique, les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain approuvent donc le principe retenu par ces deux textes. De telles conventions permettent d’établir une coopération fiscale positive. Ce sont des outils pertinents, tant pour lutter contre l’évasion et l’optimisation fiscales que pour protéger les contribuables.
Ces deux conventions renforcent la sécurité juridique des personnes morales et physiques. En parallèle, elles clarifient les règles fiscales applicables aux opérations impliquant des résidents des deux États et entrant dans leur champ d’application.
Les conventions fiscales permettent d’arrêter les règles de partage du droit imposées entre la France et les pays étrangers. En prévenant la double imposition, elles offrent une réelle sécurité juridique aux résidents de chaque État, qu’il s’agisse de personnes physiques ou de personnes morales. De plus, elles constituent un outil économique au service du développement des investissements directs et de la lutte contre l’évasion fiscale.
Les ressortissants français qui travaillent dans des pays avec lesquels la France ne dispose pas de convention fiscale portant sur l’impôt sur le revenu – ils sont encore nombreux – font souvent face à de grandes difficultés.
Ainsi, les membres du groupe SER se prononceront pour la ratification et l’approbation de ces deux conventions.
Toutefois, nous déplorons le choix de démarches bilatérales, menées au coup par coup. Les avenants aux conventions fiscales se succèdent à un rythme soutenu sans que la situation globale change vraiment ; il en résulte une sensation d’immobilisme. Nous aurions besoin, à l’inverse, d’une approche multilatérale à même d’inclure l’ensemble des problématiques soulevées par les précédents orateurs.
En la matière, le Sénat examine aujourd’hui les septième et huitième textes qui lui sont soumis depuis 2019. Or, je l’ai indiqué en commission, nous n’avons aucune vision d’ensemble quant au travail de modernisation de nos conventions fiscales avec d’autres pays. Pour l’heure, j’ai cru noter que seules se poursuivaient les discussions avec la Moldavie… (Mme Nathalie Goulet s’exclame.)
Je souhaite que le Gouvernement nous éclaire quant au nombre de pays signataires de conventions fiscales avec la France, que ces accords relèvent, ou non, du cadre Beps. L’exécutif pourrait également nous indiquer le nombre d’États avec lesquels la France ne dispose d’aucune convention fiscale commune. De fait, il faudra avancer sur ce sujet.
Si la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales sont toujours une priorité du Gouvernement, ne devrait-on pas envisager d’actualiser plus rapidement notre réseau de conventions fiscales ?
Nous pourrions, ce faisant, répondre à un triple enjeu : premièrement, et de manière évidente, prendre en compte les derniers standards internationaux ; deuxièmement, renforcer les échanges économiques et les investissements avec les pays étrangers tout en luttant contre la fraude et l’évasion fiscales ; troisièmement, et enfin – ce sujet a toute son importance –, assurer la sécurité juridique de nos ressortissants. (M. Thierry Cozic applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, 128, tel est le nombre des conventions fiscales signées par la France. Notre pays dispose ainsi, dans ce domaine, du plus vaste réseau conventionnel au monde.
Ces textes internationaux évitent que les entreprises et les particuliers ne subissent une double imposition. Ils simplifient les procédures fiscales, fluidifient les échanges entre les États signataires et nous permettent de lutter contre la fraude fiscale.
C’est bien le but du projet de loi que nous examinons aujourd’hui, ratifiant les conventions fiscales entre la France et le Danemark, d’une part, entre la France et la Grèce, d’autre part.
M. le rapporteur l’a rappelé, la convention fiscale entre la France et le Danemark est attendue depuis quinze ans.
En 2008, le Danemark a dénoncé sa convention fiscale de 1957, la jugeant déséquilibrée. Non seulement le traitement des pensions privées était selon lui trop défavorable, mais de nombreux retraités danois domiciliés en France étaient imposés dans notre pays, et cette situation entraînait une perte de recettes fiscales pour le Danemark.
Sans avoir la fiabilité juridique d’une convention fiscale, l’instruction administrative française de 2010 a permis, dans l’intervalle, de pallier l’absence conventionnelle et d’éviter, au moins partiellement, les cas de double imposition. Ces situations ont pu être traitées par voie contentieuse.
La nouvelle convention franco-danoise clarifie ce cadre fiscal en répartissant les droits d’imposition de chaque État.
Elle permet désormais d’imposer les retraités danois résidant en France sur l’intégralité de leur pension et donne au Danemark le droit de taxer ces pensions, dans la limite de la différence entre l’impôt acquitté en France et celui qui est payé au Danemark. Les retraités français qui vivent au Danemark bénéficieront bien entendu des mêmes conditions, dans une logique de réciprocité.
Cette convention permet également d’imposer les bénéfices provenant d’une activité commerciale ou industrielle au lieu de son exercice. Il s’agit là de clarifications essentielles.
Madame la secrétaire d’État, je rappelle que le Danemark est un important partenaire commercial de la France, avec plus de 7,4 milliards d’euros d’échanges en 2022.
L’actuelle convention fiscale entre la France et la Grèce date quant à elle de 1963. Ce texte, désormais désuet, a trop longtemps fait l’objet de différences d’appréciation quant à l’imposition partagée. Ces dernières ont entraîné la double imposition, en France et en Grèce, des fonctionnaires français résidant en Grèce.
Je confirme à ce titre les propos de Mme Cazebonne : ces difficultés concernent essentiellement les professeurs et, plus largement, les équipes pédagogiques du lycée français Eugène-Delacroix d’Athènes.
La nouvelle convention franco-grecque permettra de réduire le risque de double imposition entre nos deux États.
Ces accords fiscaux nous apporteront une meilleure visibilité au profit des particuliers, en établissant des règles claires.
Plus largement, ils permettront d’améliorer les relations économiques, de favoriser les investissements et la coopération entre nos deux pays et de mettre en application les derniers standards de l’OCDE en matière fiscale. Ils renforceront donc nettement la sécurité juridique des Français et des entreprises françaises installés dans les pays considérés. Voilà pourquoi nous voterons le projet de loi qui nous est présenté.
Madame la secrétaire d’État, en tant que sénateur des Français établis hors de France, je ne puis que me réjouir de la ratification de nouveaux accords de cette nature.
J’attends avec impatience le renforcement de notre édifice fiscal, non seulement par la ratification de la convention avec la Belgique et de l’avenant à la convention avec le Luxembourg, mais aussi par la conclusion de nouvelles conventions bilatérales – je pense notamment au Cambodge, à l’île Maurice, à Djibouti et au Pérou.
Néanmoins, dans certains cas, la signature d’une convention ne peut pas tout. J’ai à l’esprit les redressements fiscaux dont font aujourd’hui l’objet des centaines de retraités et d’enseignants français en Italie.
Jusqu’en 2021, les Français résidant en Italie et percevant une pension relevant du régime général de la sécurité sociale étaient exclusivement imposables en France. Mais subitement, à la suite d’un changement d’interprétation, l’administration fiscale italienne a réclamé à ces résidents des impôts sur leur retraite ou leur rémunération française, en plus des impôts acquittés en France, le tout assorti de pénalités et d’intérêts calculés rétroactivement à partir de 2015.
Ces retraités, ces enseignants modestes, vont être contraints de vendre leur petit logement pour s’acquitter de pénalités et d’intérêts exorbitants, atteignant parfois des centaines de milliers d’euros. Certains vont tout perdre, le rattrapage s’étendant à toutes les années non prescrites.
Pouvons-nous envisager des échanges avec l’administration fiscale italienne pour lever ces pénalités et intérêts sanctionnant des contribuables français de bonne foi ?
L’expérience italienne nous invite à faire preuve d’une vigilance toute particulière quant à la clarté des nouvelles conventions. Nous devons garantir leur interprétation similaire et pérenne par les deux administrations fiscales.
Enfin, selon nous, certaines conventions doivent être revues. Il s’agit ni plus ni moins que de rééquilibrer nos relations économiques, commerciales et géopolitiques. Je pense notamment à l’accord qui nous lie au Qatar.
Mme Nathalie Goulet. Ah !
M. Éric Bocquet. Très bien !
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Signée en 1990 et amendée en 2008, cette convention fiscale bilatérale n’est plus un accord réciproque entre les ressortissants de nos deux pays. Elle donne lieu à une fiscalité unilatéralement avantageuse.
Mes chers collègues, je vous rappelle que ce texte exonère les ressortissants du Qatar d’imposition sur les plus-values immobilières des biens qu’ils détiennent en France.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Il les exonère d’impôt sur les dividendes. Il les exonère d’impôt sur les redevances. Il les exonère d’impôt sur le revenu des créances.
Mme Nathalie Goulet. Bravo !
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. À titre de comparaison, les investissements du Qatar en France sont du même ordre de grandeur que ceux du Royaume-Uni ou bien de l’Allemagne, des pays qui ne bénéficient pourtant pas des mêmes avantages.
Mme Nathalie Goulet. Excellent !
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Madame la secrétaire d’État, ces conventions bilatérales sont un outil protecteur pour nos ressortissants et pour les entreprises françaises à l’étranger. Je sais que vous en êtes convaincue vous aussi : en témoigne le travail que votre cabinet consacre actuellement à certains de ces accords.
À ce titre, je suis à votre disposition, ainsi que nos conseillers des Français de l’étranger, qui se trouvent en première ligne, pour vous apporter les informations du terrain. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
Mme Marie-Claude Lermytte. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi, à l’occasion de ma première intervention à la tribune, d’adresser un salut amical et reconnaissant au sénateur honoraire Jean-Pierre Decool.
Pour nous, parlementaires, l’examen des conventions internationales est un exercice quelque peu frustrant : nous sommes tenus de voter en bloc des textes souvent très étoffés et très techniques, sans pouvoir exercer notre droit d’amendement.
La question qui nous est posée est fermée : nous sommes tenus d’y répondre par oui ou par non. Je le précise d’emblée, pour les sénateurs du groupe Les Indépendants – République et Territoires, la réponse sera bien sûr oui.
Pour la France, les conventions fiscales sont un outil diplomatique de premier ordre. Selon un rapport publié par la Cour des comptes en 2019, notre pays dispose d’ailleurs du plus grand réseau en la matière, à égalité avec le Royaume-Uni.
Il s’agit bien sûr d’une réalité de nature économique, mais ces enjeux sont bien souvent dominés par des considérations d’ordre politique, voire d’ordre géopolitique. On l’a vu encore récemment avec la remise en cause de certaines conventions fiscales.
Cela étant, le contenu des deux accords aujourd’hui soumis à notre vote est nettement moins polémique.
Ces conventions fiscales concernent respectivement le Royaume de Danemark et la République hellénique. Toutes deux s’adaptent aux derniers standards de l’OCDE pour le calcul des bases d’imposition et la lutte contre l’évasion fiscale ; et, dans un cas comme dans l’autre, il est dans l’intérêt de nos deux pays de coordonner leurs actions.
Il s’agit pourtant de deux cas de figure bien différents.
La convention avec le Danemark concerne principalement les retraités danois établis en France. L’objectif est de permettre au fisc danois de prélever un montant correspondant au différentiel entre l’impôt qui est dû en France et l’impôt qui aurait dû l’être au Danemark. Techniquement, cette convention concerne aussi les retraités français établis au Danemark, mais ils sont nettement moins nombreux.
Il est important que notre pays puisse accéder aux demandes de notre partenaire danois. Il y va de la qualité de nos relations bilatérales.
Toutefois, ceux qui partagent leur vie entre la France et le Danemark ne sont a priori pas les pires suspects d’évasion fiscale. En effet, la France et le Danemark sont les deux pays de l’Union européenne où les taux de prélèvements obligatoires sont les plus élevés : pour optimiser son impôt, on a connu mieux…
Ces situations individuelles prouvent au contraire l’amitié qui lie nos deux pays. L’édition 2022 du Tour de France, partie de Copenhague, et la liesse du public danois nous l’ont rappelé : le Danemark et la France ont des passions communes, qui rassemblent leurs deux peuples.
Pour ce qui concerne la Grèce, la situation est assez différente. La convention vise principalement à normaliser la situation de certains de nos compatriotes établis en Grèce, qui subissent une double imposition atteignant parfois des montants astronomiques.
L’accord conclu est une réponse effective et concrète à ce problème. Je me réjouis que nous puissions mettre un terme à cette aberration fiscale et faciliter ainsi la vie des Français, parmi lesquels de nombreux enseignants, qui ont choisi de résider dans ce beau pays.
Surtout, ladite convention va se substituer à l’accord en vigueur, signé à Athènes en août 1963. Le temps était venu d’adapter ce cadre aux nouveaux standards fiscaux.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris : c’est avec la conviction d’agir dans l’intérêt de nos relations bilatérales que les élus de notre groupe voteront ce projet de loi. Consolider nos relations avec nos partenaires européens, c’est renforcer notre souveraineté nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, mes chers collègues, à ce stade des débats, tout le monde a compris ce dont il s’agissait. Vous le devinez, les élus de notre groupe voteront l’approbation de ces deux conventions.
Cet exercice s’apparente bel et bien à une figure imposée, dans la mesure où nous ne pouvons pas débattre du fond. Madame la secrétaire d’État, je n’en ai pas moins plusieurs questions à vous poser.
Au cours de cette discussion, l’absence d’étude d’impact a été déplorée à de nombreuses reprises.
Mme Renaud-Garabedian a mentionné l’accord qui nous lie au Qatar. À ce titre, j’ai posé une question écrite, puis une question orale à M. le ministre de l’économie pour savoir combien nous coûtaient nos conventions fiscales avec le Qatar et les autres pays du Golfe.
« Combien de temps met le fût du canon pour se refroidir ? Un certain temps. » (Sourires.) C’est peu ou prou la réponse qui m’a été apportée : combien ces conventions fiscales nous coûtent-elles ? Une certaine somme… (Nouveaux sourires.)
Les études d’impact ont d’autant plus d’importance que nos accords fiscaux connaissent parfois de graves aléas.
Le Gouvernement a ainsi demandé et obtenu du Parlement – je précise que je ne me suis pas prononcée en ce sens, pas plus que mes collègues du groupe Union Centriste – la ratification d’une convention fiscale avec le Luxembourg, avant que cet accord ne soit brusquement suspendu. Même si nous avons quelques idées en la matière, cette décision mériterait tout de même quelques explications : pourquoi ladite convention n’est-elle finalement pas appliquée ?
Dans divers rapports, la Cour des comptes elle-même a demandé davantage de transparence et de lisibilité en la matière, mais ses recommandations n’ont pas été suivies d’effet.
Qu’en est-il, à présent, des débats parlementaires portant sur ces questions ?
Mes chers collègues, le dernier débat que le Sénat a consacré à l’efficacité des conventions internationales date du mois d’avril 2013. Il avait été organisé à la demande du groupe Communiste Républicain et Citoyen, désormais Écologiste et Kanaky…
Lors de ce débat extrêmement important, le ministre de l’économie de l’époque s’était engagé à examiner ces conventions plus avant avec le Parlement. Depuis lors, dix années ont passé… Pensez-vous qu’un jour nous pourrons poursuivre cette discussion ?
Dans l’intervalle, l’OCDE a beaucoup avancé, et nous disposons désormais d’outils nous permettant de réviser les conventions fiscales internationales. Ce qui nous manque donc, c’est un peu de volonté : passez-moi l’expression, mais nous sommes un peu mous du genou… (Sourires.)
Jusqu’à nouvel ordre, les parlementaires n’ont aucune possibilité de modifier ces conventions ou même d’en discuter. Bruno Le Maire, qui se disait pourtant extrêmement hostile aux conventions fiscales avec les pays du Golfe, prend soin d’éviter toute discussion sur ce sujet. Nous passons de promesse en promesse et de débat en débat sans jamais disposer d’une vision d’ensemble ; Mme Blatrix Contat l’a pertinemment rappelé.
En résumé, nous n’avons ni visibilité, ni évaluation, ni perspective.
Madame la secrétaire d’État, pourriez-vous nous dire combien de conventions fiscales sont aujourd’hui en pourparlers ? Le cas de la Moldavie a été mentionné. Les négociations dont il s’agit sont sans doute importantes pour les ressortissants de nos deux pays, mais cette convention n’est probablement pas la seule qui, aujourd’hui, attend d’être ratifiée.
Pouvons-nous envisager un débat plus global, comparable à celui qui s’est tenu il y a dix ans ? Nous pourrions ainsi connaître la position de la France sur ces conventions fiscales internationales et disposer d’une ligne directrice.
Notre collègue Éric Bocquet a procédé à l’examen attentif de la convention avec le Danemark : il a su dévoiler sa face cachée, à savoir son application aux transports maritimes. Sa lecture, tout à fait perspicace – reconnaissez-le –, montre que cet accord, tout en traitant un certain nombre de problèmes, en soulève d’autres, dont nous devrons débattre.
Je conclus en vous disant une nouvelle fois tout le mal que je pense de la méthode employée ; tout le mal que je pense du peu d’intérêt porté à ces conventions fiscales ; tout le mal que je pense du peu d’intérêt porté aux travaux de la Cour des comptes ; et tout le mal que je pense du peu d’intérêt que l’on porte aux travaux parlementaires ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d’État. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la France dispose de conventions fiscales avec 125 pays. Elle possède ainsi, en la matière, l’un des réseaux les plus étendus au monde.
La priorité actuelle est moins d’élargir ce réseau que de moderniser les accords les plus anciens. De nouvelles conventions avec la Moldavie, la Finlande et le Rwanda, ainsi que des avenants aux conventions conclues avec le Luxembourg, la Suisse et la Suède, feront prochainement l’objet de projets de loi de ratification.
Enfin, madame Goulet, j’ai pris bonne note que vous demandiez l’organisation d’un débat portant sur ces questions, au sens large ; soyez assurée que le Gouvernement y est ouvert.
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à l’examen du texte de la commission.
projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le gouvernement de la république française et le gouvernement du royaume du danemark pour l’élimination de la double imposition en matière d’impôts sur le revenu et la prévention de l’évasion et de la fraude fiscales et la ratification de la convention entre la république française et la république hellénique pour l’élimination de la double imposition en matière d’impôts sur le revenu et pour la prévention de l’évasion et de la fraude fiscales
Article 1er
Est autorisée l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Danemark pour l’élimination de la double imposition en matière d’impôts sur le revenu et la prévention de l’évasion et de la fraude fiscales, signée à Paris le 4 février 2022, et dont le texte est annexé à la présente loi.