Mme la présidente. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 58
Supprimer les mots :
, dont la durée ne peut être inférieure à douze mois
II. – Alinéa 68
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
17° L’article 25-3 est ainsi rédigé :
« Art. 25-3. – La durée cumulée des formations probatoire et complémentaire dispensées aux stagiaires ne peut être inférieure à 12 mois. » ;
17°bis L’article 25-4 est abrogé ;
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Cet amendement de coordination, ainsi que les suivants, a été travaillé avec les rapporteurs. Il est défendu, de même que les deux amendements suivants, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. L’avis est favorable sur l’ensemble des amendements.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Encore une fois, il s’agit de l’avis, non pas de l’avis de la commission, mais de celui de la rapporteure !
Mme la présidente. Vous pourrez vous exprimer dans un instant, lors des explications de vote, ma chère collègue.
Le vote est réservé.
article 5
Mme la présidente. L’amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 19
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article est applicable selon les cas au parquet financier, au parquet antiterroriste ou aux membres intéressés de ces parquets, dans la limite de leurs attributions.
II. – Après l’alinéa 21
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article est applicable selon les cas au parquet financier, au parquet antiterroriste ou aux membres intéressés de ces parquets, dans la limite de leurs attributions.
III. – Après l’alinéa 23
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article est applicable selon les cas au parquet financier, au parquet antiterroriste ou aux membres intéressés de ces parquets, dans la limite de leurs attributions. » ;
Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement, et que l’avis de la commission est favorable.
Le vote est réservé.
article 7
Mme la présidente. L’amendement n° 3, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 37
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
7° L’article 41-27 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « non renouvelables » sont supprimés ;
b) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ils peuvent être nommés pour un second mandat pour la même durée et dans les mêmes formes. »
Je rappelle que le Gouvernement a déjà présenté cet amendement, et que l’avis de la commission est favorable.
Le vote est réservé.
Explications de vote communes
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi et du projet de loi organique dans les rédactions résultant des textes élaborés par les commissions mixtes paritaires, textes modifiés par les amendements du Gouvernement, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.
La parole est à M. Guy Benarroche, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
M. Guy Benarroche. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s’était exprimé de manière circonstanciée lors de l’examen de ces textes. Les conclusions des commissions mixtes paritaires, dont les rouages, que j’ai pu découvrir pour la première fois il y a peu, relèvent d’un remarquable mélange entre la boîte noire et la chambre d’enregistrement, ne lui semblent guère plus soutenables.
Ce sujet est d’une importance rare pour l’équilibre de notre société et, malgré des échanges respectueux et de qualité que nous avons eus lors de l’examen de ces textes au Sénat, la vision de la justice pour les prochaines années présentée par le Gouvernement et adoptée par les commissions mixtes paritaires ne nous satisfait pas totalement.
Magistrats épuisés, greffiers en sous-effectif permanent, délais trop importants ou incompréhensibles, avec, pour corollaire, des détentions provisoires bien trop longues : ce constat – que je crois partagé – méritait une autre réponse.
L’urgence à agir ne saurait contraindre notre groupe à s’aligner sur l’ensemble de la vision proposée. La régulation carcérale est bien la grande absente de ce texte.
Je rappelle que notre pays a tout autant été condamné en raison de la surpopulation carcérale structurelle que pour l’absence de recours effectif permettant à un détenu de faire cesser des conditions de détention qu’un tribunal jugerait indignes.
Les États généraux de la justice avaient plaidé pour un mécanisme fixant pour chaque établissement un seuil de « suroccupation majeure » au-delà duquel pourraient être envisagées des mesures de régulation de la population carcérale. Le ministre a bien exposé que ces problématiques étaient déjà mises en œuvre au cas par cas, mais nous regrettons l’absence de volonté d’une expérimentation et d’une évaluation plus poussées.
Les rapporteures ont indiqué à ce sujet que « la solution passe par la construction de places », et elles ont ajouté qu’il fallait « aller vite ». Vous avez pour votre part indiqué, monsieur le garde des sceaux, que selon vous, « le seul levier dont nous disposons aujourd’hui pour faire cesser la surpopulation carcérale consiste à construire de nouveaux établissements pénitentiaires ».
Ce fut l’un des sujets centraux de nos discussions. Pourtant, la construction de prisons n’est pas et ne peut pas être la seule solution à la surpopulation carcérale et aux conditions de détention indignes qu’elle entraîne, au titre desquelles notre pays a si souvent et si lourdement été condamné.
Comme la Cour des comptes le rappelait dans un rapport datant du début de ce mois, « la France figure ainsi parmi les dix pays européens où la population incarcérée progresse ». Dans ce même rapport, la Cour alerte sur la réalité de l’évolution du nombre de personnes incarcérées, l’aggravation des conditions de vie en détention et la « situation difficile » qui en découle « pour l’ensemble des acteurs de l’exécution des peines ».
Elle poursuit : « Ce n’est donc qu’en se fondant sur une disposition explicite de nature législative que les magistrats pourraient prendre en compte, parmi les différents motifs fondant leur décision, la situation dégradée des établissements pénitentiaires de leur ressort. Il n’appartient toutefois pas à la Cour des comptes de se prononcer sur l’opportunité de mettre en place par la loi un dispositif national de régulation carcérale. Une telle proposition relève du débat démocratique et d’une orientation forte de la politique pénale. »
Nous nous sommes efforcés de relayer ce débat lors de nos prises de parole. Le rapport de la Cour des comptes montre que ce fut un rendez-vous manqué.
Je le redis : une société avec moins de personnes en prison n’est pas un modèle moins disant ou moins sécurisant, bien au contraire. Les programmes des services pénitentiaires d’insertion et de probation (Spip), les travaux d’intérêt général (TIG), auxquels le garde des sceaux est si attaché, et les expérimentations ont fait la preuve de leur efficacité et de leur moindre coût.
Voir dans la prison la seule punition possible, dans la détention provisoire une option usuelle plus qu’une exception et développer les comparutions immédiates aboutit à remplir toujours plus de prisons sans que la société devienne plus sûre, sans que les détenus et les condamnés soient mieux punis ni mieux réinsérés. La prison n’est et ne doit pas être le seul remède.
Nous saluons la volonté de faire sortir les assistants des magistrats de la précarité et d’ouvrir l’accès à la magistrature via des voies diversifiées. L’ouverture de ces recrutements est l’un des aspects essentiels d’une politique de justice efficace et au service des citoyens. Je me félicite à ce titre de l’adoption d’un amendement que nous avons soutenu visant à faciliter l’accès au concours professionnel pour les docteurs en droit.
Nous regrettons les mesures qui, malgré les modifications apportées par les commissions mixtes paritaires, continuent de remettre en cause la liberté syndicale des magistrats, qui tendent à trop généraliser les modalités de visioconférence, pour la garde à vue notamment, ou qui aggravent l’éloignement du justiciable et du citoyen des lieux de justice.
Nous avons également exprimé nos inquiétudes quant à la refonte de l’accès à l’aide juridictionnelle, à l’activation des microcaméras et des dispositifs de géolocalisation des portables à distance, ou encore à l’extension des horaires de perquisition, et ce, en dépit des limites que nous avons pu introduire dans le texte pour les perquisitions de nuit, limites qui ont été conservées par la commission mixte paritaire.
Si notre groupe salue l’effort budgétaire consenti, celui-ci ne saurait être salvateur en lui-même. La justice n’est pas réparée pour autant. Recrutements non pérennes, maintien d’une politique du tout carcéral, dessaisissement des prérogatives du juge des libertés et de la détention (JLD) : une loi d’orientation aurait dû permettre de lever ces difficultés, par exemple en développant les compétences et les actions des Spip.
Nous le regrettons et ne pouvons, en conséquence, voter ces textes. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Mme Cécile Cukierman. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, à l’heure d’examiner les textes élaborés par les commissions mixtes paritaires, l’écueil serait de refaire les débats que nous avons eus. En effet, si nous avons pu avancer ensemble sur un certain nombre d’articles, nous avons également eu des désaccords.
Ceux-ci démontrent du reste, s’il en était besoin, le caractère démocratique de notre institution. Ils manifestent notre attachement commun, sur toutes les travées, à une justice réellement efficace, au service de nos concitoyennes et de nos concitoyens et rendue dans des conditions sereines et satisfaisantes par les professionnels de la justice.
Il serait malhonnête de ma part, monsieur le garde des sceaux, de ne pas souligner l’effort qui est consenti, notamment en termes de recrutement de magistrats et de greffiers d’ici à 2027. C’est un élément de réponse important.
L’ancienne enseignante que je suis noterait toutefois en bas de votre bulletin : « Des vrais efforts, de la ténacité à confirmer, ne pas se relâcher. » (Sourires.) Sachez, monsieur le garde des sceaux, que nous serons vigilants, dans le cadre de l’examen des prochains projets de loi de finances et de la mission de contrôle du Sénat, à l’ouverture effective de ces postes dans l’ensemble des juridictions de la République.
Mes chers collègues, nous ne nous retrouvons pas pleinement dans les textes qui nous sont soumis.
Nous demeurons inquiets du renforcement de la technologie, voire du déploiement d’une hypertechnologie. Celle-ci peut certes sembler porteuse de solutions et facilitatrice dans un certain nombre d’enquêtes, notamment face à des menaces de plus en plus graves pour notre pays, que celles-ci relèvent du terrorisme ou du crime organisé, mais j’estime que nous devons toutefois nous prémunir contre cette hypertechnologie, car celle-ci se heurte aux droits, tout aussi fondamentaux que la sécurité, à la présomption d’innocence et à la participation au débat citoyen, y compris pour ceux qui ne souscrivent pas au discours majoritaire, mais qui ne basculent pas dans le camp antirépublicain pour autant.
Permettez-moi de rendre hommage à la collègue qui m’a précédé à la présidence de notre groupe, Mme Assassi, qui a fait le choix de ne pas se représenter, mais qui, à la fin de son mandat, avait déposé une proposition de loi visant à mettre fin à la surpopulation carcérale. Certaines dispositions de cette proposition de loi avaient été évoquées lors de l’examen des présents textes.
S’il n’existe, hélas ! pas de formule magique pour remédier à la surpopulation carcérale – nous l’aurions tous prononcée depuis longtemps –, nous devons continuer de travailler en ce sens, car s’interroger sur les conditions de la détention en prison, c’est s’interroger sur l’humanité de notre République et de notre démocratie. Jamais nous ne nous détournerons de ce combat.
Je terminerai en évoquant le sujet, parfois traité de manière caricaturale tant il nous divise et nous oppose, de la liberté syndicale. La liberté syndicale doit être garantie et préservée dans tous les métiers – cette conviction est inscrite dans l’ADN de notre groupe. Elle n’est certainement pas la liberté de faire ou de dire n’importe quoi, elle est celle de contester et de s’opposer dans le respect de la déontologie de chaque métier. Nous y sommes viscéralement attachés, et ce quel que soit le métier.
Pour toutes ces raisons et comme lors de leur examen en première lecture, nous nous abstiendrons sur ces deux textes. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Mme Nathalie Delattre. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, au terme de l’examen de ce projet de loi et de ce projet de loi organique, nous pouvons nous féliciter que, sur un sujet aussi essentiel, notre Parlement ait su s’accorder lors des commissions mixtes paritaires.
Comme l’avaient souligné nos collègues d’alors à la commission des lois, Maryse Carrère et Jean-Yves Roux, nos juridictions survivent grâce au dévouement, au courage et à l’abnégation des magistrats et des agents qui les accompagnent. Ils fournissent un travail considérable et sont le dernier maillon faisant tenir un service public primordial à notre État de droit.
Le délabrement de la justice dans notre pays fait l’objet d’un consensus depuis des années ; il nous impose de réagir, afin d’inverser cette tendance à la précarité.
Il importe donc de souligner et de saluer les efforts budgétaires qui sont consentis depuis plusieurs lois de finances, monsieur le garde des sceaux. Nos services peuvent nourrir l’espoir de rejoindre dans quelques années le niveau de leurs voisins européens. Je me félicite de la trajectoire dynamique de cette loi de programmation.
En sus des perspectives financières, je relève de nombreux apports positifs dans ce texte.
Je pense en particulier à la mise en avant de la peine de travail d’intérêt général ou à l’élargissement du champ des infractions recevables auprès de la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions.
Je pense également à l’habilitation du Gouvernement à prendre une ordonnance pour récrire à droit constant le code de procédure pénale. Si le groupe RDSE défend l’idée que les débats et le travail législatif ne doivent pas être conduits en dehors des hémicycles, nous constatons avec lucidité et pragmatisme qu’une ordonnance sera plus efficace au regard d’un tel objectif.
Je veux aussi évoquer le sujet de la médiation en matière civile et, plus largement, des modes alternatifs de règlement des conflits. Le 13 septembre 2021, j’avais déposé une proposition de loi visant à développer le recours à la médiation dans le cadre de la procédure civile, car il me paraît essentiel que la médiation trouve sa place dans notre institution judiciaire.
Je me réjouis donc que le projet de loi reprenne cette idée, même si ce n’est que dans le rapport annexé, en soulignant la nécessité d’une réorganisation des dispositions relatives aux modes alternatifs de règlement des conflits au sein du code de procédure civile.
Autre point positif du projet de loi, son article 2 bis reprend la proposition de loi visant à compléter les dispositions relatives aux modalités d’incarcération ou de libération à la suite d’une décision de cour d’assises qu’avait déposée notre ancien collègue Jean-Claude Requier et que le Sénat avait adoptée au mois de novembre 2022.
Une disposition technique viendra donc compléter l’article 367 du code de procédure pénale relatif aux modalités d’incarcération ou de libération à la suite d’une décision de cour d’assises. Elle vient surtout corriger un oubli qui s’était glissé lors de la réécriture de cet article par la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire.
Espérons que les travaux de simplification et de réécriture du code de procédure pénale qui seront engagés permettront d’éviter que des bévues de ce genre ne soient commises, ce qui nous obligerait à légiférer trop régulièrement.
Dans cet état des lieux non exhaustif des apports de ce projet de loi, j’aurais également pu évoquer la création, à l’article 11, du métier d’attaché de justice, ou encore le maintien, par l’article 17, de la déjudiciarisation de la procédure de saisie des rémunérations.
Mais il me faut maintenant formuler quelques réserves, notamment au regard des valeurs de notre groupe, particulièrement attaché au respect des libertés.
En premier lieu, je veux évoquer l’assouplissement du recours aux moyens de télécommunication pour les interprètes pendant la garde à vue et à la téléconsultation médicale en garde à vue. Si nous comprenons l’utilité et les bienfaits de telles pratiques, leur déploiement de plus en plus systématique finit par poser des contraintes évidentes, notamment dans les cas où les personnes sont en situation difficile ou précaire.
En second lieu, nous sommes toujours réservés quant à l’activation à distance des appareils connectés des suspects aux fins de géolocalisation et de captation d’images et de sons. La position qu’avait retenue le Sénat, en limitant ce dispositif aux infractions punies de moins de dix ans d’emprisonnement, nous paraissait plus raisonnable et proportionnée. Un certain nombre de garanties ont certes pu être apportées, mais il faudra demeurer vigilant quant à l’application concrète de ce dispositif par les agents.
En conclusion, au regard de ces différentes remarques, une partie du groupe RDSE s’abstiendra, tandis que l’autre partie votera en faveur de ce texte. (MM. Raphaël Daubet et François Patriat applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Mme Patricia Schillinger. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, avec la lecture des conclusions des commissions mixtes paritaires s’achève un long processus entamé avec les États généraux de la justice.
Les deux textes de compromis que nous nous apprêtons à adopter revêtent un caractère historique : une trajectoire budgétaire ambitieuse conduisant à la mobilisation de 11 milliards d’euros pour la justice d’ici à 2027 ; 10 000 emplois supplémentaires d’ici à la fin du quinquennat ; la réforme des voies d’accès à la magistrature ; la revalorisation des métiers et des carrières de la justice ; la constitution d’une véritable équipe autour du magistrat ; la simplification de la procédure pénale ; le renforcement des moyens de l’administration pénitentiaire.
Toutes ces mesures impressionnent par leur ampleur. C’est du jamais vu !
Au nom du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants (RDPI), je tiens à saluer l’état d’esprit constructif qui a présidé à l’élaboration de ces deux textes.
Je tiens également à vous remercier, monsieur le garde des sceaux, pour votre sens de l’écoute et votre esprit d’ouverture.
Grâce à cette réforme sans précédent, votre ministère disposera des moyens nécessaires pour renforcer ses effectifs, améliorer les conditions de travail de ses agents, faire progresser la qualité du service rendu et poursuivre la mise en œuvre des programmes immobiliers judiciaires et pénitentiaires.
Compte tenu du temps qui m’est imparti, je concentrerai mon propos sur quelques-unes des nombreuses dispositions prévues par les deux textes.
Permettez-moi tout d’abord de me réjouir du relèvement à 1 800 du nombre de postes supplémentaires de greffiers. Les magistrats seront ainsi mieux assistés. Ils seront d’autant mieux épaulés que les nouveaux attachés de justice rejoindront leur équipe. Ces renforts tant attendus permettront de rendre la justice plus efficace et plus rapide.
Parmi les quelques désaccords de fond figuraient les dispositions relatives à l’activation à distance des appareils connectés.
À cet égard, nous nous réjouissons que la commission mixte paritaire ait retenu la rédaction de l’Assemblée nationale. Le dispositif de géolocalisation pourra ainsi être utilisé dans les affaires qui empoisonnent le quotidien de nos concitoyens, à commencer par le trafic de stupéfiants.
Autre motif de satisfaction : la rédaction retenue en matière de compétence universelle. Notre groupe attache une grande importance à l’expérimentation des tribunaux des activités économiques. Aussi, nous nous félicitons que le dispositif retenu par la commission mixte paritaire s’inspire très largement de celui que prévoyait notre collègue Thani Mohamed Soilihi dans sa proposition de loi.
Refus de l’échevinage, présence d’un juge assesseur exerçant la profession d’agriculteur, exclusion des professions juridiques réglementées, inclusion de la totalité des associations : le compromis qui a été trouvé semble parfaitement équilibré.
Par ailleurs, nous constatons avec satisfaction que la commission mixte paritaire a conservé une disposition issue d’un amendement du groupe RDPI, celle qui a trait à la participation des parlementaires à l’évaluation de l’expérimentation.
Pour ce qui concerne l’administration pénitentiaire, nous prenons acte du maintien de la mesure prévoyant le conditionnement de la construction de 3 000 places de prison supplémentaires à la délivrance des autorisations d’urbanisme nécessaires à la réalisation de la première partie du « plan 15 000 ».
En première lecture, la question sensible de la confidentialité des avis rédigés par les juristes d’entreprise avait fait l’objet de discussions nourries. Nous nous réjouissons de l’adoption d’une rédaction à mi-chemin entre celle du Sénat et celle de l’Assemblée nationale.
J’en viens à présent au projet de loi organique.
Là encore, le texte élaboré par la commission mixte paritaire constitue un excellent compromis.
Nous nous félicitons de la suppression de la limitation de l’exercice du droit syndical par les magistrats voulue par la majorité sénatoriale. Une telle disposition aurait indubitablement été censurée par le Conseil constitutionnel, dans la mesure où la liberté d’expression d’un syndicat ne peut souffrir aucune restriction.
La rédaction retenue apparaît plus raisonnable, même si je constate qu’elle n’emporte pas l’adhésion de certains de nos collègues.
Je conclurai mon intervention en formant le vœu que les mesures adoptées puissent contribuer à réduire la défiance de nos concitoyens à l’égard des institutions judiciaires.
Les sénateurs du groupe RDPI sont fiers du travail accompli et se réjouissent que les dispositions adoptées sur leur initiative aient été maintenues dans le texte qui nous est soumis. C’est donc avec ferveur et enthousiasme (Exclamations amusées sur des travées des groupes SER et RDSE.) qu’ils voteront les textes issus des travaux des commissions mixtes paritaires. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Nathalie Delattre applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (M. Christian Redon-Sarrazy applaudit.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, les textes qui nous sont soumis aujourd’hui, et ce même si notre hémicycle est quelque peu clairsemé, sont très importants – vous aviez raison de l’indiquer, monsieur le garde des sceaux.
Il est incontestable que les hausses budgétaires que vous avez réussi à obtenir, d’autant qu’elles se répéteront plusieurs années consécutives, sont extrêmement significatives, même si je ne sais pas si l’on peut pour autant les qualifier d’« historiques ».
Ces augmentations doivent d’ailleurs nous conduire à nous poser une question presque philosophique : l’argent peut-il tout acheter ? En somme, l’ampleur du budget alloué au ministère de la justice nous oblige-t-elle à être d’accord avec tout ce que vous proposez, monsieur le garde des sceaux ? Vous vous en doutez, ma réponse sera nuancée, sans être négative. (M. le garde des sceaux fait un signe de satisfaction.)
Dans le cadre de ces deux projets de loi ordinaire et organique, vous avez eu à cœur de renforcer l’attractivité des métiers, de revaloriser certains d’entre eux, d’augmenter significativement les effectifs, y compris ceux des greffiers – j’évoque un compromis trouvé en commission mixte paritaire –, de sorte à respecter le fameux ratio de 1,2 greffier par magistrat. Tout cela est très important.
La pérennisation des attachés de justice et de l’équipe autour du magistrat me paraît également très positive.
Nous avons accepté le principe d’une réécriture du code de procédure pénale, non seulement par pragmatisme, mais aussi parce qu’il a été décidé lors des débats parlementaires qu’un certain nombre de procédures seraient encadrées, ce qui est une bonne chose. En effet, il s’agit de la seule manière de procéder si nous voulons récrire le code de manière à peu près lisible – le résultat n’est en effet jamais garanti.
Par ailleurs, nous avons obtenu la suppression de la condition de double incrimination pour la compétence universelle des tribunaux français dans les affaires de génocide, de crime contre l’humanité et de crime de guerre. À cette occasion, je rends évidemment hommage à l’obstination convaincue et convaincante de notre ancien collègue Jean-Pierre Sueur qui, comme Éliane Assassi, a décidé de ne pas se représenter, mais qui a su emporter notre conviction.
Voilà pour les aspects positifs de ces textes qui, comme vous le savez, souffrent aussi d’un certain nombre de manques – nous avons déjà eu l’occasion de les évoquer.
Rien par exemple sur la régulation carcérale, qui est une espèce d’éléphant au milieu de la pièce (Mme Patricia Schillinger rit.), parce que vous refusez de l’examiner. Le sujet n’est certes pas simple – nous sommes prêts à y travailler –, mais nous ne pouvons pas accepter que perdurent ces conditions de détention indignes, que chacun d’entre nous connaît. Il convient évidemment d’avancer sur ce point, ce que vous avez refusé.
Figure finalement dans le texte élaboré par la commission mixte paritaire la suppression de l’autorisation préalable du juge dans le cadre de la procédure de saisie des rémunérations, à laquelle nous étions hostiles, parce que nous pensons qu’un juge protège davantage qu’un commissaire de justice et que les Français qui ont les revenus les plus faibles seront les premières victimes.
Nous nous inquiétions également du processus d’activation à distance des appareils connectés, mais nous avons été heureusement surpris de la décision de limiter aux infractions punies d’au moins cinq ans d’emprisonnement le champ d’autorisation de la géolocalisation. Nous étions un peu à front renversé dans cet hémicycle à ce sujet, mais l’essentiel est que cela se soit bien terminé.
In fine, cela n’a pas perduré : ainsi, monsieur le garde des sceaux, vous n’avez pas voulu, car vous êtes une personne relativement obstinée, créer de juridiction spécialisée dans les violences intrafamiliales. Il est question d’un pôle spécialisé dans le rapport annexé : espérons que celui-ci voie le jour.
Bizarrement, en vous écoutant tout à l’heure, je n’ai pas compris la raison pour laquelle, en définitive, vous refusiez l’intégration des greffiers à la catégorie A de la fonction publique, puisque vous évoquez vous-même un processus très proche, celui de la mise en place de tout un mécanisme conduisant à l’amélioration de leur statut.
C’est très regrettable : vous connaissez leur mouvement, ainsi que notre attachement envers cette profession sans laquelle – les choses sont parfaitement claires – la justice ne fonctionnerait pas, ce que chacun d’entre nous a pu constater, au cas où il en doutait, au moment de la crise du covid-19.
S’agissant du projet de loi organique, je soulignerai quelques apports tout aussi positifs que ceux du projet de loi ordinaire, notamment la diversification des profils, le renforcement de l’attractivité des métiers, ou la parité – formidable ! –,…