Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 2 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier, Roux et Guérini, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 14, présenté par Mmes Harribey et de La Gontrie, MM. Sueur, Bourgi, Durain, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 9
Après les mots :
cour d’appel
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
et de procureur général près ladite cour ;
II. – Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État fixe, en fonction de l’importance de l’activité juridictionnelle, des effectifs de magistrats et de fonctionnaires des services judiciaires et de la population du ressort, la liste des emplois de président de tribunal judiciaire, de tribunal de première instance, de tribunal supérieur d’appel et de procureur de la République près lesdits tribunaux, qui relèvent du troisième grade.
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 69, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 21 à 28, 35 à 37, 43 à 46 et 74 à 79
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéas 83 et 84
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
20° La seconde phrase du deuxième alinéa de l’article 38-1 est supprimée ;
III. – Alinéas 85 à 90 et 96 à 99
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Cet amendement tend à supprimer les durées minimales d’exercice des fonctions et la durée maximale d’affectation dans la même juridiction, qui ne sont pas justifiées.
La magistrature est un corps particulièrement mobile. Nous cherchons à en limiter les effets par des lignes directrices de gestion.
Le système en place repose sur un dialogue nourri entre la direction des services judiciaires et le Conseil supérieur de la magistrature. Et cela fonctionne !
La solution que vous proposez est source de rigidités, que les dérogations envisagées ne permettent pas de couvrir.
Que fait-on, par exemple, d’un magistrat qui, après un peu plus de deux années d’exercice, serait candidat retenu à un détachement ? Alors qu’il peut posséder les compétences particulières que requiert le poste, doit-on lui dire non, au seul motif qu’il n’a pas exercé trois années dans ses fonctions ? Cela n’a pas de sens !
Madame la rapporteure, plusieurs membres de mon cabinet ne seraient pas à mes côtés si l’on vous suivait.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. Ils seraient aussi très utiles là où ils sont censés être…
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Peut-être, mais ils sont encore plus utiles auprès du garde des sceaux, qu’ils conseillent tous les jours !
Autre question, simple, pragmatique, pratique : que dire à un magistrat qui, faisant face à des difficultés médicales, souhaite se rapprocher de son lieu de prise en charge, mais n’a pas fait ses trois années d’affectation ? Lui dit-on : « Tant pis ! » ?
Il faut que les choses soient un peu plus souples. La gestion des ressources humaines des magistrats, à l’instar de ce qui est prévu dans les autres corps de la haute fonction publique, nécessite, de mon point de vue, une appréhension des situations individuelles au cas par cas, sur la base de lignes directrices de gestion.
Il n’y a pas lieu de traiter différemment les magistrats des autres corps, d’autant plus que les magistrats sont, aux termes de l’article 64 de la Constitution, inamovibles, et que les entorses à ce principe ont toujours été motivées et validées par la volonté de préserver leur impartialité.
Si c’est l’effet d’aubaine dans l’accès au troisième grade que vous cherchez à supprimer, et même si ce projet de loi organique propose déjà des évolutions de la structure du corps judiciaire qui tendront à le limiter, en offrant d’autres perspectives, je suis enclin à proposer une évolution permettant de le faire disparaître qui serait moins attentatoire au principe d’inamovibilité.
Enfin, ériger la règle de dix ans d’affectation minimale me semble contraire au principe constitutionnel d’inamovibilité. La limitation actuelle sur les fonctions spécialisées n’impose aucunement une mobilité géographique, mais simplement un changement de fonctions, y compris au sein du même tribunal.
Je vous demande, en conséquence, de faire droit à cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 42 rectifié bis, présenté par Mme Tetuanui, M. Bonnecarrère et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 28
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Nul magistrat ne peut être affecté plus de dix années consécutives dans des juridictions d’outre-mer. Il peut être dérogé à ces règles sur avis motivé du Conseil supérieur de la magistrature, pour des raisons personnelles ou professionnelles, ou pour garantir l’égalité de traitement des magistrats dans leur déroulement de carrière.
« Neuf mois au plus tard avant la fin de la dixième année consécutive d’exercice de leurs fonctions, les magistrats soumis aux obligations résultant de l’alinéa précédent font connaître au garde des sceaux, ministre de la justice, l’affectation qu’ils désireraient recevoir, à niveau hiérarchique égal, dans trois juridictions au moins, à l’exclusion de juridictions d’outre-mer, appartenant à des ressorts de cour d’appel différents. »
La parole est à M. Philippe Bonnecarrère.
M. Philippe Bonnecarrère. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Pour ce qui concerne l’amendement n° 69 du Gouvernement, si nous avons souhaité introduire des durées minimales d’exercice d’une fonction ou d’affectation dans une juridiction d’affectation, c’est bien parce que nous avions nos raisons !
Première remarque, monsieur le garde des sceaux : on ne peut pas légiférer sur la base d’exceptions et de cas à la marge. Nous avons toujours appris que toute bonne règle de droit a des exceptions, que la loi doit fixer le principe et qu’il vous appartiendra ensuite, par la voie réglementaire, comme vous l’avez dit tout à l’heure, d’en définir les modalités et les limites.
L’idée de prévoir ces bornes de trois ans minimum et de dix ans maximum n’est pas sortie du chapeau comme étant l’idée du siècle : elle correspond à un besoin.
La durée minimale correspond aussi à la nécessité d’éviter les risques d’aubaine que nous ont présentés l’ensemble des acteurs lors des auditions : des chefs de juridiction pourraient se mettre en position de détachement dès qu’ils auraient accédé au troisième grade. L’affectation de trois ans minimum répond à cet objectif.
L’affectation de dix ans maximum vise, elle, à garantir l’impartialité des magistrats et à permettre que les magistrats puissent progresser et accéder à de nouvelles fonctions, tout en respectant, dans un souci d’équilibre, le principe d’inamovibilité, à valeur constitutionnelle, ainsi que leur vie privée, parce que l’on sait que les difficultés à évoluer sont souvent liées à des questions de mobilité géographique, notamment pour les femmes.
L’objet de l’amendement de notre collègue polynésienne Lana Tetuanui est d’éviter que les magistrats ne fassent leur carrière uniquement en outre-mer, passant d’île en île, si je puis dire, sans revenir régulièrement sur le territoire métropolitain.
C’est pourquoi il vise à inscrire l’obligation de ne pas rester plus de dix ans dans la même affectation en outre-mer et de revenir, pour trois ans minimum, en métropole – avant, éventuellement, de repartir.
Nous pensons que c’est une bonne idée. Nous émettons donc un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 42 rectifié bis ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je veux rappeler que l’encadrement de la durée d’exercice des fonctions est toujours motivé par le souci de protéger l’impartialité – encore l’impartialité, monsieur le sénateur Bonnecarrère !
J’entends évidemment les préoccupations qui vous conduisent à solliciter l’instauration d’une durée maximale d’exercice des fonctions en outre-mer.
Néanmoins, la rédaction que vous proposez nécessite d’être retravaillée, parce qu’elle vise indistinctement tous les outre-mer, soit dix ans d’exercice dans des outre-mer successifs, et non pas au sein du même territoire.
Or imposer un exercice en métropole à des magistrats natifs d’outre-mer, où ils disposent de leurs attaches, pourrait, d’une certaine façon, être considéré comme discriminatoire.
Je propose, en conséquence, que l’on retravaille à une solution qui permette de concilier ces préoccupations et les principes que je viens de rappeler.
Je sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, le Gouvernement y sera défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote.
M. Philippe Bonnecarrère. Madame la présidente, excusez-moi d’avoir manqué de réactivité au regard des enjeux de la Polynésie.
Monsieur le garde des sceaux, vous l’avez compris, notre collègue Lana Tetuanui considère que l’attractivité des fonctions judiciaires est assez différente suivant la nature des outre-mer concernés et qu’il y a à l’évidence une appétence plus particulière pour la Polynésie, d’où effectivement des délais d’affectation qui peuvent être importants et qui peuvent être suspendus par une nomination, par exemple, à La Réunion ou en Nouvelle-Calédonie, entre autres, avant de revenir en Polynésie.
Cela étant, vous avez bien compris la nature de la question posée par notre collègue : je pense que sa logique, en évoquant tous les outre-mer et en ne visant pas spécifiquement la Polynésie, était justement de ne pas porter atteinte à l’égalité.
Je prends volontiers acte, et j’en rendrai compte à notre collègue, que vous êtes ouvert à une réécriture et que vous êtes bien conscient qu’il y a un sujet spécifique à la Polynésie française. Je pense que notre collègue sera sensible à ce travail de réécriture et se tiendra à votre disposition, ainsi qu’à celles de vos services, pour travailler dans ce sens.
Au regard des explications qui nous ont été présentées, je retire l’amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 42 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 69.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 80, présenté par Mmes Canayer et Vérien, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 29
Remplacer les mots :
premier à
par les mots :
deuxième et
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 4 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier, Roux et Guérini, est ainsi libellé :
Alinéa 58, seconde phrase
Après le mot :
magistrature
insérer les mots ;
, lequel l’approuve
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. L’article 3 fixe les modalités d’accession au troisième grade pour les magistrats et confie notamment à une commission d’avancement le soin de dresser et d’arrêter le tableau d’avancement.
Encore une fois, je vais relayer les observations du Conseil supérieur de la magistrature rendues le 27 avril 2023. Celui-ci s’interroge notamment sur la légitimité de la commission d’avancement pour procéder à l’inscription au tableau d’avancement du troisième grade des magistrats, et recommande que l’accès à ce dernier soit systématiquement soumis à son approbation.
L’objet du présent amendement est donc d’introduire ce mécanisme d’approbation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Les craintes du CSM sont compréhensibles, mais une telle disposition reviendrait à priver la commission d’avancement de l’essentiel de ses prérogatives. Or cette commission présente des garanties de représentativité et d’indépendance suffisantes.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 81, présenté par Mmes Canayer et Vérien, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 108, première phrase
1° Remplacer le mot :
neuvième
par le mot :
deuxième
2° Remplacer le mot :
dixième
par le mot :
troisième
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 61, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge et M. Salmon, est ainsi libellé :
Alinéas 165 et 166
Remplacer les mots :
six mois
par les mots :
un an
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement vise à élargir le droit de retrouver son poste pour les magistrats qui prennent un congé parental d’une durée allant jusqu’à un an.
Vous savez que le congé parental, tel que nous le connaissons aujourd’hui, donne des droits à un salaire, etc., mais garantit aussi de retrouver son poste, dans certaines conditions.
Sauf que la situation est un peu plus compliquée pour les magistrates et les magistrats, qui, actuellement, doivent faire connaître au garde des sceaux trois choix de réaffectation dans trois juridictions différentes à l’issue du congé, ce qui emporte évidemment beaucoup d’incertitudes, surtout quand on vient d’avoir un enfant.
Le projet de loi apporterait une avancée en garantissant un retour à l’emploi occupé avant le congé parental, mais uniquement si le congé parental n’excède pas six mois. Or les salariés du secteur privé bénéficient d’un congé parental d’un an au maximum, à l’issue duquel ils et elles peuvent retrouver le poste précédemment occupé ou se voir proposer un poste similaire, quand les fonctionnaires ont le droit de réintégrer leur poste à l’issue du congé parental, indépendamment de sa durée.
Nous voulons simplement, avec cet amendement, faire correspondre le droit pour les magistrates et les magistrats de retrouver leur poste après un congé parental au moins avec celui des salariés du privé, raison pour laquelle nous allongeons la durée de six mois à un an.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Nous comprenons bien évidemment l’intention de l’amendement, qui va dans le sens du dispositif bienvenu qu’a porté le Gouvernement pour garantir plus de transparence dans la gestion des congés parentaux de moins de six mois et permettre aux magistrats de réintégrer leurs fonctions au-delà.
Vous proposez d’allonger le délai à un an. Nous pensons que cela risque d’entraîner une désorganisation des juridictions.
Nous sommes donc plutôt défavorables à cette mesure de souplesse, mais nous aimerions connaître l’avis du Gouvernement sur le sujet.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je pense aussi qu’allonger le délai, c’est faire courir des risques aux juridictions, d’autant que, comme vous le savez, le magistrat, après le congé parental, peut demander la réintégration dans la juridiction.
C’est une question d’équilibre entre le désir – bien évidemment légitime – des magistrats qui souhaitent prendre un congé parental et la nécessaire prise en compte des besoins des juridictions.
À cet égard, je me vois contraint de vous dire, madame la sénatrice, que je suis défavorable à votre amendement.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Sans être totalement étonnée, je suis consternée par la position du Gouvernement.
Est-ce cela sa politique familiale ? On ne cesse de dire qu’il faut encourager les naissances et, lorsque l’on veut simplement aligner la situation des magistrats, hommes ou femmes, sur celle des salariés du secteur privé, on nous dit que c’est compliqué. Certes, mais c’est compliqué aussi dans le secteur privé ! C’est un vrai sujet.
Et le nombre de magistrats est suffisamment important pour que l’on puisse imaginer des solutions ! Au reste, les congés parentaux de six mois sont aussi compliqués à gérer pour les juridictions !
Mon groupe soutiendra cet amendement très important.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 12 est présenté par Mmes Harribey et de La Gontrie, MM. Sueur, Bourgi, Durain, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 51 est présenté par Mmes Cukierman, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 172
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° 12.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Le dispositif de l’alinéa 172 est amusant.
Je pense que l’idée est toujours, monsieur le garde des sceaux, de chercher des magistrats.
On s’est dit que l’on pouvait peut-être recourir aux « seniors » – c’est le mot qu’il faut employer pour ne vexer personne et ne pas se faire d’ennemis…
Aujourd’hui, la limite d’âge est de 68 ans. C’est, du reste, un grand succès… En effet, savez-vous combien de magistrats ont demandé à exercer jusqu’à 68 ans ? Trois !
Ce n’est pas grave : comme le Gouvernement aime bien, en ce moment, nous faire travailler deux ans de plus, il s’est dit qu’il allait proposer une limite d’âge à 70 ans.
Pour notre part, nous sommes contre.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 51.
Mme Laurence Cohen. Il a été défendu avec brio par Mme de La Gontrie.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Nous sommes défavorables à cet amendement de suppression du relèvement de la limite d’âge.
Nous avons un vrai objectif : le recrutement de 1 500 magistrats.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. C’est une curieuse conception du travail.
J’ai cru, s’agissant de magistrats, que vous alliez parler de deux ans ferme – expression utilisée à moult reprises, me semble-t-il.
Toutefois, quelque chose vous a échappé, ce qui m’étonne, car vous êtes toujours en alerte : cette disposition repose sur la base du volontariat.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Trois magistrats seulement !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Quand bien même, madame la sénatrice !
Si certains ont envie de travailler et de servir leur justice un peu plus longtemps, que dire à cela ? Le métier de magistrat, tout comme celui d’avocat, est formidablement passionnant. Il importe de le souligner.
Je vois dans vos amendements une forme de provocation, un petit clin d’œil ; pour autant, je ne me laisse pas troubler.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Nous voilà rassurés, monsieur le ministre de la justice, vous êtes en plein accord avec le ministre du travail.
Comme l’a souligné ma collègue, cette disposition n’a concerné que trois volontaires. Nous nous apprêtons donc à légiférer pour dire que le métier de magistrat est passionnant… Pardonnez-moi, mais il me semble que d’autres métiers le sont tout autant, comme ceux de la santé ou de l’éducation, par exemple.
Cet argument n’est pas sérieux.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Pourquoi s’arrêter à 70 ans ?
Mme Éliane Assassi. Place aux jeunes !
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Richard.
M. Alain Richard. Nombre de magistrats à la retraite reprennent une activité juridictionnelle en tant que magistrats honoraires. C’est un fait.
La limite d’âge est alors fixée non pas à 70 ans, mais à 75 ans, me semble-t-il, ce qui permet à de nombreuses juridictions d’assurer des fonctions et des missions qu’elles auraient du mal à assumer autrement.
Mme la présidente. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Tout d’abord, madame la sénatrice, je ne sais pas d’où vous sortez ce chiffre de trois volontaires,…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je vous le dirai !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. … mais il me semble contestable.
Nous allons nous revoir prochainement – ne serait-ce que mardi prochain, pour le scrutin public solennel –, je vous communiquerai les chiffres.
Ensuite, des magistrats exerçant à titre temporaire (MTT) veulent servir longtemps leur justice, notamment avec la mise en place de l’amiable. Ils souhaitent pouvoir aller assez loin, jusqu’à 75 ans. Je connais de nombreux MTT et avocats qui décident de travailler longtemps – nous avons d’ailleurs mis en place des avocats honoraires.
M. Alain Richard. Et des professeurs de médecine !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Et des professeurs de médecine. Beaucoup de gens n’ont pas envie de cesser leur activité, parce qu’ils sont passionnés.
M. Antoine Lefèvre. Et des sénateurs ! (Sourires.)
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Et quelques sénateurs, certes, mais ce n’est pas moi qui l’ai dit ! (Nouveaux sourires.)
J’ai compris que, pour vous, il s’agissait de deux ans ferme. Ce n’est pas mon idée : un certain nombre de magistrats seront ravis de servir encore la justice qui les passionne.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 12 et 51.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures vingt-cinq.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Article 4
Après l’article 27-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, il est inséré un article 27-2 ainsi rédigé :
« Art. 27-2. – I. – Les magistrats exerçant leurs fonctions dans un des emplois rencontrant des difficultés particulières de recrutement, définis par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, après avis de la commission d’avancement, bénéficient d’une priorité d’affectation dans les conditions fixées ci-après.
« Avant leur nomination dans l’un de ces emplois, ils font connaître au garde des sceaux, ministre de la justice, au moins cinq affectations qu’ils désireraient recevoir au terme de l’exercice de leurs fonctions dans cet emploi, dans au moins trois juridictions différentes. Les demandes d’affectation des magistrats prévues par le présent alinéa ne peuvent porter exclusivement, ni sur des emplois du grade supérieur, ni sur les emplois mentionnés à l’article 39-1.
« Ces demandes d’affectation sont communiquées à la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature en même temps que le projet de nomination dans l’emploi mentionné au premier alinéa du présent article.
« II. – Au plus tôt à l’expiration de la durée minimale d’exercice des fonctions fixée par le décret en Conseil d’État mentionné au IV du présent article, et sous réserve des dispositions de l’article 3-1, ces magistrats sont nommés dans l’une des affectations qui ont fait l’objet de leurs demandes dans les conditions prévues au deuxième alinéa du I du présent article. Ces nominations sont prononcées, le cas échéant, en surnombre de l’effectif budgétaire du niveau hiérarchique auquel ils appartiennent et, s’il y a lieu, en surnombre de l’effectif organique de la juridiction. Les surnombres sont résorbés à la première vacance utile dans cette juridiction.
« III. – Durant l’exercice de leurs fonctions, les magistrats bénéficiaires de la priorité d’affectation prévue au présent article peuvent faire connaître au garde des sceaux, ministre de la justice, au moins trois nouvelles affectations qu’ils désireraient recevoir s’ils justifient d’une évolution de leur situation personnelle ou familiale. Ces modifications sont communiquées à la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature.
« IV. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. »
Mme la présidente. L’amendement n° 15, présenté par Mmes Harribey et de La Gontrie, MM. Sueur, Bourgi, Durain, Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
particulières de recrutement
par les mots :
de recrutement durables
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Défendu !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur. Il s’agit de substituer le critère de difficultés « durables » de recrutement à celui de difficultés « particulières » de recrutement.
La notion de difficultés particulières de recrutement est déjà utilisée en matière de démographie sanitaire ou de recrutement des fonctionnaires en zone tendue.
Ce critère étant admis et déjà utilisé en droit constant, la commission estime qu’il n’y a pas lieu de le remplacer et émet un avis défavorable sur cet amendement.