Mme Céline Brulin. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis plusieurs années, radios et télévisions publiques sont bousculées : fin des recettes publicitaires, restrictions budgétaires, suppression de la redevance, restructuration administrative, plan de départs… Voilà quelques semaines, un projet de fusion de France 3 et France Bleu a fuité.
La note des directions de France Télévisions et de Radio France est très claire : « création d’une marque unique, mise en œuvre d’un projet éditorial commun, rationalisation des implantations, création de directions uniques et développement de la polyvalence au sein des équipes ».
Cette annonce a eu l’effet d’une bombe. Elle est ressentie par les personnels comme du mépris à l’égard du nécessaire dialogue social et comme une nouvelle attaque contre leurs missions et leurs compétences.
Ils craignent, à juste titre, un plan social à peine dissimulé et une perte de qualité des émissions proposées au public.
L’inquiétude est d’autant plus grande que les rapprochements intervenus ces derniers temps n’ont pas suscité l’adhésion, loin de là. La diffusion des matinales de France Bleu sur France 3 et la création de l’application « ici » ressemblent à des coquilles vides, sans vision éditoriale, ce qui alimente la perte de sens ressentie. En revanche, tout cela est gourmand en termes de budget.
Quelle est la vision du Gouvernement concernant l’audiovisuel public et, plus précisément, le devenir de France Bleu et France 3 ?
Où est passé l’engagement pris par la ministre de la culture au moment de la suppression de la redevance d’associer « le Parlement et les entreprises de l’audiovisuel public » à la définition des nouveaux contrats d’objectifs et de moyens (COM) adossés à une trajectoire de dotation pluriannuelle avec la volonté de placer la proximité parmi les grandes priorités ?
Cette proximité, à laquelle nos concitoyens sont très attachés, est dans l’ADN de France 3 et France Bleu, avec vingt-quatre antennes régionales et éditions locales pour l’une et quarante-quatre antennes locales pour l’autre.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Madame la sénatrice Céline Brulin, les résultats de l’audiovisuel public n’ont jamais été aussi bons. En se transformant ces dernières années et en multipliant les coopérations, il s’est renforcé et imposé comme le premier média des Français en radio comme en télévision. Son développement numérique s’est accéléré.
Le média global Franceinfo est devenu le premier site d’information en ligne de notre pays et sa couverture quotidienne a doublé en cinq ans ! Il s’agit bien d’un projet de coopération, le plus abouti de l’audiovisuel public.
France 3 et France Bleu ont également commencé à unir leurs forces avec le déploiement des matinales filmées et le lancement d’une offre numérique commune, « ici », par France 3 et France Bleu.
La ministre de la culture travaille avec les entreprises pour consolider et renforcer cette dynamique, qui portera ses fruits dans les prochains contrats d’objectifs et de moyens. Des pistes sont en cours d’expertise. La proximité constituera à n’en pas douter l’une des priorités de ces COM.
Toutes les enquêtes le montrent : les Français attendent davantage de proximité dans l’information, les programmes et les sujets traités. Leur défiance croissante à l’égard des médias traduit aussi un sentiment d’éloignement et le besoin que les médias soient plus proches de leur vie locale.
Les coopérations entre France 3 et France Bleu ont vocation à être poursuivies et amplifiées.
Il ne s’agit évidemment pas d’amoindrir une offre plus indispensable que jamais, mais bien de la renforcer. Elle doit gagner en puissance et en visibilité, notamment en ligne, et offrir une couverture toujours plus riche de la vie locale.
Il est important que ces projets, s’ils devaient prospérer, se fassent dans le respect du dialogue social, en concertation avec les salariés et les organisations syndicales.
réforme de la protection sociale complémentaire dans la fonction publique
Mme la présidente. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, auteure de la question n° 538, adressée à M. le ministre de la transformation et de la fonction publiques.
Mme Élisabeth Doineau. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question porte sur la réforme en cours de la protection sociale complémentaire dans la fonction publique.
Le champ des garanties prévoyance et les moyens que le Gouvernement envisage de mettre en œuvre pour soutenir ces garanties protectrices pour tous – titulaires, contractuels, actifs et retraités – sont en train d’être arbitrés. J’ai le sentiment que cette réforme est, pour le moment, « arrêtée ». Toutefois, je veux insister sur le fait qu’elle devra englober tous les statuts, mais aussi tous les champs de la prévoyance : l’incapacité, l’invalidité, le décès, mais aussi la perte d’autonomie, en passant par les autres leviers d’action incontournables que sont la prévention et l’accompagnement social.
La réflexion sur le volet prévoyance peine pourtant à aboutir, notamment pour les personnels de l’État, où aucune construction de couverture cofinancée par l’employeur n’est aujourd’hui imposée par le cadre légal. La prévoyance risque donc fortement de devenir secondaire dans la réforme en cours, ce qui laisserait les agents dépourvus de garanties, alors qu’ils ont cotisé pendant de nombreuses années.
De plus, pour les personnels territoriaux, les niveaux de couverture, corrélés aux aides financières des collectivités, risquent d’être inaccessibles pour les personnels aux plus bas revenus. Pour les hospitaliers, durement touchés, la prévoyance n’est toujours pas abordée.
Qu’en est-il des discussions et réflexions au sein du ministère de la fonction publique ? Surtout, quelles garanties pouvez-vous donner aujourd’hui ? Il paraît urgent de prioriser ce dossier, en tenant compte des fragilités des personnels des services publics. En effet, la prévoyance garantit au sens large des protections incontournables pour tous, notamment les plus fragiles, pour mieux faire face aux aléas de la vie tels que la perte conséquente de salaire, le risque de basculer sous le seuil de pauvreté, les difficultés de retour à l’emploi ou la dépendance.
Nous attendons beaucoup de la réforme, raison pour laquelle je souhaite connaître l’état d’avancement des travaux du ministère sur cette question.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Madame Élisabeth Doineau, vous abordez le sujet majeur de la réforme de la protection sociale complémentaire dans la fonction publique.
Une première étape importante a été franchie grâce à l’ordonnance n° 2021-175 du 17 février 2021, qui définit un nouveau cadre, afin de favoriser et d’améliorer la couverture sociale complémentaire des agents de la fonction publique. Avec cette ordonnance, l’employeur public a pris ses responsabilités – il est important de le souligner. Les employeurs publics sont en effet désormais tenus de financer au moins 50 % de leur complémentaire santé.
Cette ordonnance permet également une participation de l’employeur à des contrats de prévoyance couvrant les risques d’incapacité de travail, d’invalidité, d’inaptitude ou de décès.
Cette obligation s’applique bien aux trois versants de la fonction publique, tout en tenant compte des points de départ différents et des spécificités.
La question de la protection sociale pose également celle de la prévoyance, qui est au cœur des négociations que mène actuellement le ministère de la transformation et de la fonction publiques avec les organisations syndicales. Celles-ci se dérouleront d’ici à la fin du premier semestre 2023.
Pour renforcer les garanties, les employeurs publics ont plusieurs choix : améliorer les revenus de remplacement qu’ils servent – c’est ce qu’on appelle les garanties statutaires ou l’auto-assurance – ou recourir à des contrats de protection sociale complémentaire.
De la même façon, des négociations se poursuivent dans la fonction publique territoriale et s’engageront dans la fonction publique hospitalière.
D’ici à l’été, le ministère de la transformation et de la fonction publiques réunira les employeurs publics et les organisations syndicales des trois versants, afin de faire un premier bilan de la mise en œuvre, par les employeurs, de l’ordonnance « protection sociale complémentaire ».
application du dispositif d’emploi-retraite pour les élus locaux cessant leur activité professionnelle principale
Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Deseyne, auteur de la question n° 399, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Chantal Deseyne. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, ma question porte sur l’application du dispositif d’emploi-retraite pour les élus locaux cessant leur activité professionnelle principale.
Pour bénéficier du cumul emploi-retraite, ces élus sont dans l’obligation de liquider l’ensemble des régimes de retraite de base et complémentaire obligatoires auprès desquels ils cotisent.
Cette situation place de fait l’exercice du mandat d’élu comme une activité donnant lieu à l’application du dispositif encadrant le cumul emploi-retraite, lorsque la personne concernée cesse son activité professionnelle principale, comme l’impose l’application des dispositifs prévus par le code de la sécurité sociale, dans la rédaction issue de la loi du 20 janvier 2014.
Une telle situation ne permet pas à l’élu de poursuivre une activité professionnelle principale au titre de l’emploi-retraite, sauf à engager les mesures susceptibles d’entraîner la liquidation de son régime de retraite auprès de l’Ircantec, l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques.
À titre d’exemple, si un élu local, maire d’une commune de moins de 500 habitants, veut poursuivre son activité d’avocat au titre du cumul emploi-retraite, il est dans l’obligation soit de démissionner de son mandat soit de renoncer à ses indemnités, pour répondre à l’obligation de liquidation de l’ensemble des régimes de retraite obligatoires auprès desquels il cotise.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite savoir si le Gouvernement envisage de prendre les mesures réglementaires nécessaires pour que la cotisation auprès de l’Ircantec, en raison de l’exercice d’un mandat, ne fasse pas obstacle à la possibilité d’exercer une activité dans le cadre du dispositif d’emploi-retraite.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Madame la sénatrice Chantal Deseyne, la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites a harmonisé les règles de cumul d’emploi-retraite applicables au sein des différents régimes de retraite. Plus précisément, la loi a introduit le principe de cessation d’activité pour pouvoir liquider sa retraite et de non-constitution de droits nouveaux en cas de reprise d’activité.
Le législateur a également clarifié le statut des mandats électifs au regard de ces nouvelles règles. Afin de ne pas décourager l’exercice d’un mandat local à la retraite, les règles du cumul ne font pas obstacle à la perception d’indemnités de fonction.
Les élus ne sont donc pas obligés d’interrompre leur activité au moment où ils liquident leur retraite et peuvent continuer à percevoir leurs indemnités de fonction, ainsi qu’une pension.
Ils bénéficient par ailleurs d’une mesure dérogatoire concernant le cumul emploi-retraite au titre de leur régime complémentaire obligatoire. Celle-ci leur permet de se constituer de nouveaux droits à retraite Ircantec.
Ces droits ouverts les empêchent néanmoins d’accéder aux dispositifs de cumul d’emploi-retraite dit intégral.
S’agissant des avocats, ils relèvent d’un régime de retraite de base distinct du régime général, lequel ne prévoit pas la possibilité de reprendre ou poursuivre une activité dans le cadre d’un cumul emploi-retraite plafonné. Seul le cumul emploi-retraite intégral leur est ouvert. Néanmoins, les modalités d’application de la création de droits nouveaux pour tous les assurés en cumul emploi-retraite prévues dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 devraient résoudre cette difficulté.
Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour la réplique.
Mme Chantal Deseyne. La caisse des retraites des avocats constitue en effet un cas particulier. Il convient de trouver une solution, dans la mesure où l’on prive les territoires d’élus investis, souhaitant s’engager pour leur collectivité.
amélioration du dispositif de calcul des populations légales des communes
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Chain-Larché, auteure de la question n° 414, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Anne Chain-Larché. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les chiffres des populations légales des communes, fournies chaque année par le recensement de l’Insee, permettent de déterminer les concours financiers de l’État, au premier rang desquels la dotation globale de fonctionnement.
En outre, 350 textes réglementaires font référence aux chiffres de population légale, dans de nombreux domaines : nombre d’élus au conseil municipal, détermination du mode de scrutin, ouverture de pharmacies ou réglementation sur l’hébergement d’urgence.
Or il s’avère, de l’avis des maires comme des associations d’élus, que la méthode actuelle est particulièrement défavorable aux communes qui connaissent un accroissement de population, comme c’est le cas de plusieurs d’entre elles dans mon département de Seine-et-Marne.
En effet, les effets de l’augmentation de la population ne sont pris en compte que plusieurs années après l’arrivée des nouveaux habitants sur la commune.
Sont en cause le décalage entre la date de recensement et son entrée en vigueur, mais également un effet de lissage sur cinq ans, qui retarde la prise en compte de l’augmentation de la population.
Les communes, de leur côté, doivent, dès l’arrivée des nouveaux habitants, engager des travaux pour agrandir l’école, créer de nouvelles routes, construire un gymnase et réaliser tous les autres investissements nécessaires pour garantir une bonne proportion de services publics.
Elles doivent faire face aux nouvelles dépenses tout de suite, sans bénéficier des recettes qui leur reviennent.
Autre sujet connexe, de nombreux territoires font état de défaillances notables dans les modalités de recensement, avec la non-prise en compte des portes closes, le phénomène de multi-location ou la suroccupation de logements, ce qui aboutit au même problème de différentiel entre les statistiques, qui déterminent les dotations, et la réalité du terrain.
Madame la ministre, il paraît indispensable d’améliorer le dispositif actuel, pour mieux appuyer l’effort des communes qui accueillent de nouveaux habitants.
Je souhaite savoir si vous envisagez une évolution de la méthode de calcul des populations légales pour mettre fin à ce décalage ou, a minima, un mécanisme permettant de le compenser.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Madame la sénatrice Anne Chain-Larché, le recensement de la population a été réformé en 2002 par la loi du 27 février relative à la démocratie de proximité.
Depuis cette date, les chiffres de population d’une commune sont actualisés chaque année. Il n’est plus nécessaire d’attendre les résultats d’un recensement général. Les informations collectées sont ramenées à une même date pour toutes les communes, afin d’assurer l’égalité de traitement et de permettre une bonne fiabilité des données. Cette nouvelle procédure traite à égalité l’ensemble des communes, puisque c’est l’année médiane du cycle des recensements qui est retenue.
Il n’est pas concevable qu’une commune reçoive une dotation calculée sur des chiffres plus anciens ou plus récents, du simple fait de sa taille ou en vertu du hasard ayant fixé la date du recensement.
Les événements qui affectent positivement ou négativement la démographie d’une commune sont effectivement pris en compte avec un décalage de trois ans dans toutes les communes.
Vous avez raison, cette méthode peut être défavorable aux communes qui connaissent une forte croissance de leur population. Mais elle est favorable à celles qui connaissent une dynamique inverse : en 2022, 43 % des communes ont vu leur dotation forfaitaire diminuer du fait d’une baisse de leur population. Or les deux types de communes doivent être traités de la même façon.
Le recensement de la population fait l’objet d’une évaluation permanente, lors de laquelle il peut être proposé des modifications. C’est sans doute dans ce cadre que le débat pourrait être porté, si vous le souhaitez.
gestion de l’eau
Mme la présidente. La parole est à M. Édouard Courtial, auteur de la question n° 531, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
M. Édouard Courtial. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, alors que l’année 2022 a été la plus chaude jamais enregistrée et que plus de 80 % des nappes phréatiques sont à un niveau jugé inquiétant, la bataille de l’eau est à nos portes. Nous devons nous y préparer sans attendre.
Pour cela, il est indispensable d’accompagner les communes et les intercommunalités dans la gestion de cette ressource autrefois abondante et bon marché qu’est l’eau.
Trois axes m’apparaissent essentiels.
Le premier est naturellement d’ordre financier, puisque 40 % du réseau a plus de 50 ans et que 20 % de l’eau se perd avant d’arriver au robinet. Les annonces présidentielles sont-elles à la hauteur des énormes besoins ? Avons-nous la garantie que les collectivités locales n’auront pas, in fine, à payer ?
Le deuxième est d’ordre administratif. Il faut lever les verrous et les trop nombreuses contraintes pesant sur les collectivités, qui sont en première ligne. Nous sommes d’ailleurs revenus, voilà quelques jours, dans cet hémicycle, sur le transfert obligatoire de la compétence eau et assainissement, afin de donner davantage de souplesse aux municipalités.
Ainsi, nous avons agi, au-delà de nos appels répétés sur ce retour nécessaire, dans la continuité du rapport du Sénat de novembre dernier intitulé Éviter la panne sèche, qui préconise notamment de décentraliser davantage la décision publique sur l’eau et de faire confiance aux échelons locaux.
Enfin, le troisième axe est de refuser et de combattre tout dogmatisme dans la gestion de l’eau et de sa rareté, loin d’une vision écologique rétrograde, incarnée par un extrémisme dangereux, comme nous avons pu le voir à Sainte-Soline ou ailleurs.
Madame la secrétaire d’État, cette bataille se fera avec les élus locaux ou ne se gagnera pas.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Monsieur le sénateur Édouard Courtial, le changement climatique a des impacts d’ores et déjà visibles sur le cycle de l’eau. La résilience de nos territoires est une priorité du Gouvernement. Ce sujet est au cœur des travaux de planification écologique portés par la Première ministre. Le plan Eau, en particulier, a été annoncé par le Président de la République le 30 mars dernier.
En 2022, en anticipation de la sécheresse, 100 millions d’euros des agences de l’eau ont été dégagés en urgence, notamment pour engager des travaux de sécurisation de l’approvisionnement en eau potable. Eu égard à la sécheresse hivernale que nous rencontrons actuellement, cet effort a été renouvelé en 2023.
La gouvernance de l’eau repose sur l’implication des collectivités et de leurs groupements pour porter la maîtrise d’ouvrage des opérations. L’échelon intercommunal a été choisi par le législateur pour remédier aux difficultés sanitaires, économiques et écologiques engendrées par l’émiettement des services d’eau et d’assainissement sur l’ensemble du territoire.
Le plan Eau conforte une gestion décentralisée de l’eau structurée autour de bassins et de sous-bassins.
Il prévoit une modernisation des Sage, les schémas d’aménagement et de gestion des eaux, la mise en place d’une CLE, une commission locale de l’eau, et la définition d’un projet politique de territoire dans tous les sous-bassins.
Les élus locaux sont encouragés à définir dans ces Sage les priorités d’usage de la ressource en eau et la répartition, sur leur territoire, des volumes entre usagers.
Par ailleurs, des moyens supplémentaires sont apportés pour soutenir les collectivités les plus en difficulté. Face aux investissements importants pour réduire les fuites et sécuriser l’alimentation en eau potable, des aides supplémentaires en faveur des agences de l’eau, à hauteur de 180 millions d’euros par an, seront dédiées au petit cycle de l’eau et conditionnées à une amélioration durable de la gestion de l’eau de leur patrimoine.
Le plan Eau renforce de manière inédite les capacités d’intervention des agences de l’eau, qui sont les principaux financeurs de la politique de l’eau aux côtés des collectivités. Une capacité d’intervention supplémentaire de 475 millions d’euros par an permettra une augmentation des ressources de près de 25 %. Je crois pouvoir le dire, nous sommes au rendez-vous !
Mme la présidente. La parole est à M. Édouard Courtial, pour la réplique.
M. Édouard Courtial. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Vous le savez, jamais il n’y a eu autant de démissions d’élus locaux, découragés par les blocages et charabias administratifs. Sur ce sujet central pour la gestion de nos collectivités, je vous incite à établir un dialogue direct, franc et régulier avec ces derniers. J’y veillerai particulièrement.
profession de géomètre topographe
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, auteur de la question n° 501, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la profession de géomètre est artificiellement scindée entre géomètres-experts et géomètres-topographes. Les premiers bénéficient d’un monopole instauré par la loi du 7 mai 1946 portant sur les travaux et études permettant de fixer les limites foncières, par exemple le bornage, tandis que les seconds peuvent exécuter tous les travaux topographiques n’ayant pas d’incidence foncière.
Pourtant, cette distinction est manifestement d’un autre temps, la technique topographique n’étant plus celle de 1946, de sorte que les opérations de bornage – monopole des géomètres-experts – sont bien moins complexes que les opérations topographiques.
Ce monopole passéiste entraîne des conséquences importantes : coût élevé des prestations foncières, procédures ralenties, risques juridiques majeurs pour les autres professionnels de la mesure, au premier chef les géomètres-topographes, au gré de l’interprétation des tribunaux du monopole des géomètres-experts.
L’Autorité de la concurrence ne s’y était pas trompée, en affirmant dans son avis du 28 février 2018 que « réserver les plans ou esquisses annexés aux états descriptifs de division de copropriété reviendrait à […] accorder [aux géomètres-experts] une rente de situation injustifiée ». Elle ajoutait : « Avec plus de 10 millions de logements en copropriété en France, cela équivaudrait, en moyenne, à réserver à chaque géomètre-expert un monopole sur les plans de plus de 5 000 logements en copropriété. Outre son anachronisme, une telle décision serait totalement inopportune en termes d’efficience économique ».
Madame la secrétaire d’État, avez-vous l’intention de mettre un terme à ce monopole ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Couillard, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l’écologie. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Nathalie Goulet, la loi du 7 mai 1946 instituant l’ordre des géomètres-experts reconnaît à cette profession un monopole sur la délimitation des biens fonciers.
En France, la propriété est un droit constitutionnel. En réservant aux géomètres-experts la réalisation des études et des travaux topographiques qui fixent les limites des biens fonciers, le législateur a entendu garantir la protection de la propriété foncière, en confiant sa délimitation à des professionnels spécialement qualifiés et présentant toutes les garanties que la loi impose.
Si le progrès technique a facilité la réalisation des opérations de délimitation foncière, le professionnel engage cependant sa responsabilité sur ces prestations.
Dans son avis de 2018, l’Autorité de la concurrence n’a pas remis en cause le bien-fondé du monopole.
Toutefois, elle a recommandé de préciser la définition légale de ce monopole en matière de délimitation de la propriété foncière, en établissant notamment une liste qui définirait précisément les prestations qui relèvent du monopole et celles qui sont dans le champ concurrentiel.
À cet égard, la jurisprudence de la Cour de cassation du 29 juin 2022 conclut en particulier que la réalisation des plans annexés aux actes de division foncière relèverait du monopole des géomètres-experts. Un tel plan, dès lors qu’il est visé et annexé aux actes de copropriété, peut en effet contribuer à la délimitation foncière.
L’Autorité de la concurrence a été de nouveau saisie par la Chambre syndicale nationale des géomètres-topographes. Le Gouvernement attend ses conclusions avant de statuer.
La profession compte 1 878 professionnels. Les conditions d’accès à la profession ont été profondément assouplies par le biais du diplôme délivré par le Gouvernement. Pour faciliter encore l’accès à la profession pour les géomètres-topographes, des réflexions sont en cours sur un dispositif de valorisation des acquis de l’expérience.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour la réplique.
Mme Nathalie Goulet. Il convient, me semble-t-il, de réunir les professionnels. J’ai sous les yeux plusieurs lettres, notamment de votre ancien collègue Michel Sapin du 10 octobre 2016, ainsi que du ministre de la justice du 21 décembre 2016, qui affirment que la situation n’est plus possible.
À cet égard, je regrette de ne pas avoir déposé un amendement lors de l’examen de la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat. En effet, une telle situation augmente terriblement le coût des documents d’urbanisme. Par ailleurs, elle crée une distorsion de concurrence, les tribunaux ne jugeant pas de la même façon d’un département à l’autre.
Selon moi, la bonne solution consisterait à réunir les professionnels pour essayer d’améliorer une situation qui n’est pas tenable pour les collectivités territoriales.
demande du site de yara à montoir-de-bretagne d’une dérogation pour ses rejets atmosphériques
Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 508, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Yannick Vaugrenard. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis 2012, l’usine de fabrication d’engrais Yara, située à Montoir-de-Bretagne, en Loire-Atlantique, ne cesse d’inquiéter.
Lors de certains pics journaliers, le site rejette dans les eaux de la Loire jusqu’à 4 296 kilogrammes d’azote, au lieu des 175 kilogrammes réglementaires, soit autant que l’azote dégagé par la consommation d’eau d’une ville de la taille de Nantes. Ce site rejette également 60 kilogrammes de phosphore, au lieu des 2 kilogrammes autorisés.
Son bilan en matière de pollution atmosphérique est tout aussi sinistre. En 2020, Yara a rejeté plus de 200 tonnes de poussières, principalement constituées de particules fines.
Dans l’agglomération nazairienne, le nombre d’hospitalisations pour affections respiratoires est plus élevé de 39 % à la moyenne nationale chez les moins de 18 ans. Un tel constat est insupportable !