Sommaire
Présidence de M. Roger Karoutchi
Secrétaires :
Mme Corinne Imbert, M. Dominique Théophile.
Conclusions de la conférence des présidents
4. Mise au point au sujet de votes
5. Communication relative à une commission mixte paritaire
6. Loi de finances pour 2023. – Rejet en nouvelle lecture d’un projet de loi
Discussion générale :
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances
Clôture de la discussion générale.
7. Mise au point au sujet d’un vote
compte rendu intégral
Présidence de M. Roger Karoutchi
vice-président
Secrétaires :
Mme Corinne Imbert,
M. Dominique Théophile.
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je n’ai que du bonheur à être avec vous ce matin pour la dernière séance de l’année 2022. Je suis sûr que vous prendrez ensuite quelques jours de congé bien mérités. (Sourires.)
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Conférence des présidents
M. le président. Les conclusions adoptées par la conférence des présidents réunie, hier soir, sont consultables sur le site du Sénat.
En l’absence d’observations, je les considère comme adoptées.
Conclusions de la conférence des présidents
SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Jeudi 15 décembre 2022
À 11 heures
- Nouvelle lecture du projet de loi de finances, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2023 (texte n° 203, 2022-2023)
• Réunion de la commission pour le rapport : jeudi 15 décembre matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : jeudi 15 décembre à l’ouverture de la discussion générale
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : jeudi 15 décembre à l’issue de la discussion générale
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 14 décembre à 15 heures
SEMAINE DE CONTRÔLE
Mardi 10 janvier 2023
À 14 h 30
- Débat sur la gestion de l’eau dans une perspective économique et écologique (demande du groupe Les Républicains)
• Temps attribué au groupe Les Républicains : 8 minutes
• Réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
• Après la réponse du Gouvernement, séquence de 16 questions-réponses :
2 minutes, y compris la réplique
Possibilité de réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
Possibilité pour le Gouvernement de répondre à une réplique pendant 1 minute et à l’auteur de la question de répondre de nouveau pendant 1 minute
• Conclusion par le groupe Les Républicains : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 9 janvier à 15 heures
- Débat sur l’instauration des zones à faible émission (ZFE) (demande du groupe Les Républicains)
• Temps attribué au groupe Les Républicains : 8 minutes
• Réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
• Après la réponse du Gouvernement, séquence de 16 questions-réponses :
2 minutes, y compris la réplique
Possibilité de réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
Possibilité pour le Gouvernement de répondre à une réplique pendant 1 minute et à l’auteur de la question de répondre de nouveau pendant 1 minute
• Conclusion par le groupe Les Républicains : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 9 janvier à 15 heures
- Débat sur le thème « Mieux rémunérer le travail en France : la nécessité d’un Grenelle sur les salaires » (demande du groupe SER)
• Temps attribué au groupe Socialiste, Écologiste et Républicain : 8 minutes
• Réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
• Après la réponse du Gouvernement, séquence de 16 questions-réponses :
2 minutes, y compris la réplique
Possibilité de réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
Possibilité pour le Gouvernement de répondre à une réplique pendant 1 minute et à l’auteur de la question de répondre de nouveau pendant 1 minute
• Conclusion par le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 9 janvier à 15 heures
Le soir
- Débat sur les conclusions du rapport : « Faire de la RSE une ambition et un atout pour chaque entreprise » (demande de la délégation aux entreprises)
• Temps attribué à la délégation aux entreprises : 8 minutes
• Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure
• Possibilité pour le Gouvernement de prendre la parole après chaque orateur pour une durée de 2 minutes ; possibilité pour l’orateur de répliquer pendant 1 minute
• Temps de réponse du Gouvernement : 5 minutes
• Conclusion par la délégation aux entreprises : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 9 janvier à 15 heures
Mercredi 11 janvier 2023
À 15 heures
- Questions d’actualité au Gouvernement
• Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mercredi 11 janvier à 11 heures
À 16 h 30
- Débat d’actualité
• Délai limite de transmission par les groupes des propositions de thème et de format : mardi 3 janvier à 14 heures
• Délai limite pour les inscriptions de parole : mardi 10 janvier à 15 heures
- Débat sur la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales (demande de la commission des finances)
• Temps attribué à la commission des finances : 8 minutes
• Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure
• Possibilité pour le Gouvernement de prendre la parole après chaque orateur pour une durée de 2 minutes ; possibilité pour l’orateur de répliquer pendant 1 minute
• Temps de réponse du Gouvernement : 5 minutes
• Conclusion par la commission des finances : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 10 janvier à 15 heures
Le soir
- Débat sur la politique du logement dans les outre-mer (demande de la délégation sénatoriale aux outre-mer)
• Temps attribué à la délégation sénatoriale aux outre-mer : 8 minutes
• Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure
• Possibilité pour le Gouvernement de prendre la parole après chaque orateur pour une durée de 2 minutes ; possibilité pour l’orateur de répliquer pendant 1 minute
• Temps de réponse du Gouvernement : 5 minutes
• Conclusion par la délégation sénatoriale aux outre-mer : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 10 janvier à 15 heures
Jeudi 12 janvier 2023
À 10 h 30
- Questions orales
À 14 h 30
- Proposition de résolution en application de l’article 34-1 de la Constitution, proposant au Gouvernement de sortir le système électrique des mécanismes concurrentiels, présentée par MM. Fabien Gay, Pierre Laurent, Mme Marie-Noëlle Lienemann et plusieurs de leurs collègues (texte n° 176, 2022-2023 ; demande du groupe CRCE)
• Temps attribué à l’auteur de la proposition de résolution : 10 minutes
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 11 janvier à 15 heures
• Les interventions des orateurs vaudront explications de vote.
SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Mardi 17 janvier 2023
À 14 h 30 et le soir
- Désignation des dix-neuf membres de la commission d’enquête sur l’efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique (droit de tirage du groupe EST)
• Délai limite de remise, au secrétariat de la direction de la législation et du contrôle, des candidatures à cette commission d’enquête : mercredi 11 janvier à 15 heures
- Désignation des vingt-trois membres de la mission d’information sur le thème : « Le développement d’une filière de biocarburants, carburants synthétiques durables et hydrogène vert » (droit de tirage du groupe UC)
• Délai limite de remise, au secrétariat de la direction de la législation et du contrôle, des candidatures à cette mission d’information : mercredi 11 janvier à 15 heures
- Projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (procédure accélérée ; texte n° 100, 2022-2023)
Ce texte a été envoyé à la commission des affaires économiques avec une saisine pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 9 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 11 janvier matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 16 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 17 janvier matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 16 janvier à 15 heures
Mercredi 18 janvier 2023
À 15 heures
- Questions d’actualité au Gouvernement
• Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mercredi 18 janvier à 11 heures
À 16 h 30 et le soir
- Suite du projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (procédure accélérée ; texte n° 100, 2022-2023)
Jeudi 19 janvier 2023
À 10 h 30, 14 h 30 et, éventuellement, le soir
- Suite du projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (procédure accélérée ; texte n° 100, 2022-2023)
SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Mardi 24 janvier 2023
À 9 h 30
- Questions orales
À 14 h 30 et le soir
- Sous réserve de son dépôt, projet de loi portant sur les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024
Ce texte sera envoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale avec une saisine pour avis de la commission des affaires sociales et de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 16 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 18 janvier matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 23 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 24 janvier matin et mercredi 25 janvier matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 23 janvier à 15 heures
Mercredi 25 janvier 2023
À 15 heures
- Questions d’actualité au Gouvernement
• Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mercredi 25 janvier à 11 heures
À 16 h 30 et le soir
- 3 conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :
=> Projet de loi autorisant l’approbation de l’amendement de la convention relative à la collecte, au dépôt et à la réception des déchets survenant en navigation rhénane et intérieure et de son règlement d’application, partie B, par des dispositions concernant le traitement de résidus gazeux de cargaison liquide (vapeurs), issu de la résolution CDNI-2017-I-4, adoptée le 22 juin 2017 (procédure accélérée ; texte n° 486, 2021-2022)
=> Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord relatif à la coopération sur les questions de sûreté maritime et portuaire s’agissant spécifiquement des navires à passagers dans la Manche (texte n° 128, 2022-2023)
=> Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d’Ouzbékistan relatif aux transports routiers internationaux de voyageurs et de marchandises et de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne sur le transport international routier de personnes (texte n° 521, 2021-2022)
• Délai limite pour demander le retour à la procédure normale : lundi 23 janvier à 15 heures
- Sous réserve de son dépôt, suite du projet de loi portant sur les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024
Éventuellement, jeudi 26 janvier 2023
À 10 h 30 et 14 h 30
- Sous réserve de son dépôt, suite du projet de loi portant sur les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024
SEMAINE SÉNATORIALE
Mardi 31 janvier 2023
À 14 h 30 et le soir
- Proposition de loi visant à régulariser le PLUi de la Communauté de communes du Bas Chablais, présentée par M. Cyril Pellevat et Mme Sylviane Noël (texte n° 28, 2022-2023) (demande du groupe Les Républicains)
Ce texte a été envoyé à la commission des affaires économiques. Il est examiné conformément à la procédure de législation en commission selon laquelle le droit d’amendement des sénateurs et du Gouvernement s’exerce en commission.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 23 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 25 janvier matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance, en application de l’article 47 quater, alinéa 1, du Règlement : lundi 30 janvier à 12 heures
• Délai limite de demande de retour à la procédure normale : vendredi 27 janvier à 15 heures
• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, les représentants de la commission pendant 7 minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder 5 minutes chacun, ainsi qu’un sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder 3 minutes
• Délai limite pour les inscriptions des orateurs des groupes : lundi 30 janvier à 15 heures
- Proposition de loi tendant à renforcer la protection des épargnants, présentée par MM. Jean-François Husson et Albéric de Montgolfier (texte n° 586, 2021-2022) (demande du groupe Les Républicains)
Ce texte a été envoyé à la commission des finances.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 23 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 25 janvier matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 30 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 31 janvier début d’après-midi
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 30 janvier à 15 heures
- Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à protéger les logements contre l’occupation illicite (texte n° 174, 2022-2023) (demande du groupe RDPI)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 23 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 25 janvier matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 30 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 31 janvier début d’après-midi
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 30 janvier à 15 heures
- Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à calculer la retraite de base des non-salariés agricoles en fonction des vingt-cinq années d’assurance les plus avantageuses (texte n° 166, 2022-2023) (demande du groupe Les Républicains)
Ce texte a été envoyé à la commission des affaires sociales.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 23 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 25 janvier matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 30 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 31 janvier début d’après-midi
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 30 janvier à 15 heures
Mercredi 1er février 2023
À 15 heures
- Questions d’actualité au Gouvernement
• Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mercredi 1er février à 11 heures
De 16 h 30 à 20 h 30
(Ordre du jour réservé au groupe SER)
- Proposition de loi relative à l’instauration d’un nombre minimum de soignants par patient hospitalisé, présenté par M. Bernard Jomier et plusieurs de ses collègues (texte n° 105, 2022-2023)
Ce texte a été envoyé à la commission des affaires sociales.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 23 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 25 janvier matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 30 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 1er février matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 31 janvier à 15 heures
- Proposition de loi constitutionnelle, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à protéger et à garantir le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse (texte n° 143, 2022-2023)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 23 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 25 janvier matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 30 janvier à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 1er février matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 31 janvier à 15 heures
Jeudi 2 février 2023
De 10 h 30 à 13 heures et de 14 h 30 à 16 heures
(Ordre du jour réservé au groupe GEST)
Cet ordre du jour sera complété ultérieurement.
Prochaine réunion de la Conférence des Présidents :
mercredi 18 janvier 2023 à 18 heures
3
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour un rappel au règlement.
M. Éric Bocquet. Mes chers collègues, dans le cadre de l’examen de ce projet de loi de finances pour 2023, il est difficile de ne pas évoquer le déroulement du débat budgétaire, dont nous atteignons l’épilogue, du moins au Sénat.
Après les élections du mois de juin 2022, certains imaginaient que, dans la nouvelle configuration politique de l’Assemblée nationale, le rôle du Parlement tout entier – Assemblée nationale et, par conséquent, Sénat – serait renforcé. Au mois de septembre dernier, nous avons eu droit à l’annonce des dialogues de Bercy. Ah, les « dialogues de Bercy » : c’était beau comme du Verlaine ! (Sourires.)
Pourtant, depuis le 19 octobre dernier, le Gouvernement a utilisé l’article 49.3 à neuf reprises. Selon les rumeurs qui courent dans les couloirs, il s’apprête à le réutiliser dimanche prochain – ce sera la version dominicale du 49.3 ! –, histoire de rappeler à tout le monde, monsieur le ministre, que c’est bien vous qui décidez.
Nous considérons pour notre part que cette séquence budgétaire aura affaibli le pouvoir parlementaire. Certes, l’usage du 49.3 est constitutionnel, mais l’abus du 49.3 mine le parlementarisme et, dans le même temps, la confiance de nos concitoyens.
Le Président de la République déclarait au soir du deuxième tour de l’élection présidentielle : « Je sais que nombre de nos compatriotes ont voté ce jour pour moi, non pour soutenir les idées que je porte, mais pour faire barrage à celles de l’extrême droite. » N’oublions pas ces paroles et mesurons bien les dangers politiques nourris par le mépris du Parlement, ainsi que les doutes profonds qu’expriment régulièrement nos compatriotes.
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.
4
Mise au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Lors des scrutins nos 98 à 104 portant sur la proposition de loi visant à rétablir l’équité territoriale face aux déserts médicaux et à garantir l’accès à la santé pour tous, Mme Guylène Pantel souhaitait voter pour.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique des scrutins concernés.
5
Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 n’est pas parvenue à l’adoption d’un texte commun.
6
Loi de finances pour 2023
Rejet en nouvelle lecture d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution (projet n° 203, rapport n° 213).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.
M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, l’année qui s’achève a été celle d’un choix d’une constance absolue : refuser que le choc d’inflation ne mette au tapis l’économie française. Depuis le premier jour, nous avons affirmé une ligne extrêmement claire, celle du soutien et de la protection. Protéger encore et protéger toujours : protéger les ménages, protéger les entreprises, protéger nos collectivités.
Le projet de loi de finances que nous examinons aujourd’hui en nouvelle lecture, tout comme la loi de finances rectificative promulguée le 1er décembre dernier, resteront comme les textes des engagements tenus vis-à-vis des Français.
Grâce aux mesures que nous avons proposées, la France est le pays d’Europe dans lequel les ménages sont les moins exposés à la flambée des prix. Ce rempart contre la vie chère, nous avons pu l’ériger parce que nous avons collectivement fait le choix d’un soutien public franc et massif. Une analyse de la direction générale du Trésor, publiée la semaine dernière, montre que l’État a pris à sa charge plus de la moitié du choc inflationniste et du choc énergétique que subit notre pays depuis plus d’une année.
Entre le bouclier tarifaire que nous avons été les premiers à mettre en œuvre en Europe, la ristourne sur les prix à la pompe, le chèque exceptionnel et la revalorisation des pensions de retraite et des prestations sociales, ce sont près de 110 milliards d’euros d’argent public qui ont été mis sur la table pour protéger les Français et notre économie. Ces mesures ont conduit l’État à assumer 52 % de la perte de revenus réels liée au choc énergétique, laissant les entreprises en assumer 42 % et les ménages 6 %. Ce reste à charge de 6 % pour les Français, en des temps d’inflation, c’est évidemment trop : je n’ignore rien des difficultés de ces millions de ménages qui vivent à l’euro près.
Toutefois, je vous le dis, mesdames, messieurs les sénateurs, nous pouvons être fiers d’avoir, en France, fait le choix de la protection. Nous avons choisi de protéger le pouvoir d’achat. Nous avons choisi de soutenir les Français et nos entreprises. Nous avons choisi de préserver au maximum l’activité économique et la croissance. Oui, une fois encore, nous avons fait le choix de la protection : c’est non seulement un choix de justice, mais aussi un choix d’efficacité. Cette stratégie est efficace, car il vaut mieux investir pour préserver que payer pour réparer.
Comme durant la crise sanitaire, notre pays a ainsi évité l’explosion de la pauvreté qui frappe certains de nos voisins européens. Cela a été possible notamment grâce à la revalorisation anticipée des prestations sociales dès l’été 2022, au financement d’une aide exceptionnelle de rentrée de 100 euros pour 11 millions de familles, au versement d’un chèque énergie exceptionnel à 12 millions de ménages et à la mise en place de dispositifs spécifiques pour nos concitoyens qui se chauffent au fioul ou au bois.
En parallèle, notre politique en faveur du travail et de la stabilité fiscale continue de porter ses fruits, puisque le chômage se maintient à un niveau historiquement bas – 7,3 % –, tandis que l’investissement des entreprises résiste, avec plus de 8 % d’investissement acquis en 2022.
Il ne s’agit bien évidemment pas de dresser de nouveau un tableau qui consisterait à dire que tout va bien dans le meilleur des mondes. Il s’agit de reconnaître que notre économie résiste et que, s’il en est ainsi, ce n’est pas seulement grâce au Gouvernement et à la majorité qui seraient les garants de cette capacité de résistance : c’est aussi grâce aux millions de Français qui se lèvent le matin pour aller travailler, grâce aux millions d’entrepreneurs qui continuent d’investir et d’embaucher et grâce aux Français qui continuent autant que possible de consommer, parce que nous prenons des mesures pour protéger leur pouvoir d’achat.
Le budget que nous présentons pour l’année prochaine traduit la continuité de cette stratégie, sans jamais perdre de vue que l’argent public, c’est l’argent des Français et que chaque euro investi doit être un euro efficace.
Nous l’assumons : ce projet de loi de finances est un texte de combat contre la vie chère, qui prévoit le maintien des boucliers tarifaires et l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu.
Durant le débat parlementaire, le texte a été enrichi de mesures très concrètes qui, pour moi, ont comme fil conducteur essentiel de redonner de l’oxygène à ces millions de Français qui travaillent. En effet, ceux-ci ont parfois le sentiment que l’argent public sert davantage à accompagner certains de nos concitoyens qui ne travaillent pas plutôt qu’à les soutenir eux, eux qui se lèvent le matin pour aller travailler. Il est extrêmement important que nous nous adressions aussi à ces Français qui travaillent, qui se lèvent le matin et qui font des efforts dans un contexte et dans des circonstances parfois difficiles. Nous devons leur montrer que l’action et l’argent public sont aussi là pour eux.
C’est pour les Français qui travaillent que nous avons fait le choix d’indexer le barème de l’impôt sur le revenu : 6 milliards d’euros supplémentaires auraient sinon été prélevés.
C’est pour les Français qui travaillent que nous avons décidé de relever le plafond et la valeur faciale du ticket-restaurant, en faisant passer cette dernière de 11,84 euros à 13 euros.
C’est pour les Français qui travaillent que nous avons fait le choix de rehausser de 50 % le plafond du crédit d’impôt pour les frais de garde d’enfants, qui sera porté à 3 500 euros.
C’est pour les Français qui travaillent et pour nos entrepreneurs que nous avons fait le choix de relever le plafond permettant de bénéficier du taux réduit d’impôt sur les sociétés pour les petites et moyennes entreprises (PME).
C’est pour les Français qui travaillent que nous avons fait le choix de redonner de l’oxygène à nos agriculteurs, avec la prorogation jusqu’à 2025 de la déduction pour épargne de précaution, ainsi que son indexation sur l’inflation.
Ce projet de loi de finances, c’est aussi celui du réarmement de nos services publics. Ce texte donne plus de moyens à la police, à la justice et à nos armées dans un contexte géopolitique à haut risque.
Dans le cadre de la loi relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, ce projet de loi de finances prévoit une hausse de 3 milliards d’euros pour la mission « Défense ». S’agissant des moyens de nos forces de sécurité, 1,4 milliard d’euros de crédits supplémentaires ont été inscrits, ce qui représente plus de moyens pour les équipements et pour les technologies numériques, ainsi que pour le renforcement de la présence des policiers et des gendarmes sur la voie publique, conformément à la trajectoire de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, dite Lopmi, que vous avez adoptée, mesdames, messieurs les sénateurs.
Enfin, nous poursuivons le renforcement des moyens du ministère de la justice, avec une nouvelle hausse des crédits de 8 % pour la troisième année consécutive. Au total, depuis 2017, la hausse des crédits du ministère de la justice a été de 40 %. Si nous agissons pour lutter contre l’insécurité, nous agissons aussi pour lutter contre l’impunité et pour faire en sorte que notre justice puisse fonctionner plus efficacement et plus rapidement.
Tout cela s’inscrit en cohérence avec le choix que nous avons fait dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023. L’an prochain en effet, pour la première fois dans l’histoire de notre pays, le budget de l’hôpital public dépassera les 100 milliards d’euros.
En matière économique, notre principal objectif est de gagner la bataille du plein emploi d’ici à 2027. C’est grâce au travail des Français que la croissance résiste. C’est par l’augmentation du volume de travail que nous serons en mesure de créer plus de richesses et de les redistribuer.
Le plein emploi commence par l’éducation. L’année prochaine, le budget de l’éducation nationale augmentera de près de 4 milliards d’euros : comme le Président de la République s’y était engagé pendant la campagne, aucun professeur ne commencera sa carrière avec un traitement inférieur à 2 000 euros net par mois.
Le plein emploi, c’est aussi l’apprentissage. Quelque 6,7 milliards d’euros de crédits supplémentaires seront investis dans l’emploi et l’apprentissage pour atteindre l’objectif du million d’apprentis d’ici à 2027.
Enfin, et je le dis avec fermeté, ce texte acte le refus catégorique du laisser-aller budgétaire. (M. le rapporteur général s’exclame.) Comme ministre chargé des comptes publics, je continuerai de défendre le « combien ça coûte », parce que l’argent public ne sera jamais de l’argent magique.
Oui, malgré les aléas, nous poursuivons le rétablissement des comptes amorcé dès 2021, en stabilisant le solde public à 5 % cette année, comme en 2023. Nous y parviendrons parce que nous maîtrisons l’évolution des dépenses. Nous y parviendrons aussi grâce aux recettes liées à la contribution sur les rentes inframarginales.
Lorsqu’au mois de juillet dernier, nous évoquions notre volonté de nous inscrire dans un cadre européen, certains ont cru y voir une manœuvre dilatoire, une façon de balayer le problème d’un revers de la main. La réalité, c’est que nous ferons entrer 11 milliards d’euros supplémentaires dans les caisses de l’État, l’année prochaine, grâce à cette contribution sur les rentes inframarginales des énergéticiens. Ils permettront de financer nos mesures en faveur des ménages, des entreprises et des collectivités locales. Ces grands objectifs, nous avons eu l’occasion d’en discuter de manière approfondie.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le débat a également permis d’enrichir significativement le texte qui vous est aujourd’hui présenté. Bon nombre d’ajouts issus de cette assemblée ont été retenus dans la version finale du texte. Je ne peux pas être exhaustif, mais vous me permettrez de mentionner un certain nombre de mesures.
M. Vincent Delahaye. Ce ne sera pas long !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Je pense à la suppression de la condition d’âge du décès de l’ancien combattant pour le bénéfice, par sa veuve, d’une demi-part fiscale, défendue par M. Didier Rambaud, ainsi que par M. Jean-Jacques Panunzi et Mme Jocelyne Guidez. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Et Marc Laménie !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Je pense à l’introduction de crédits d’impôt, pour les entreprises comme pour les particuliers, sur les dons aux communes et syndicats forestiers pour certaines opérations de gestion forestière. Le sujet, mis en avant notamment par Vanina Paoli-Gagin et par le groupe Les Indépendants, était d’ailleurs au cœur d’une proposition de loi adoptée en première lecture dans cet hémicycle.
M. Joël Guerriau. Très bien !
M. Vincent Segouin. Parfait !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Je pense à l’établissement d’une base légale à l’exonération d’impôt dont bénéficient déjà les allocations versées aux orphelins de victimes d’actes antisémites et d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale, sur l’initiative de Marc Laménie, qui a déposé cet amendement. (Applaudissements.)
Sur nos outre-mer, nous avons également intégré plusieurs amendements importants. Je pense à l’amendement du rapporteur général de la commission des finances visant à inclure les collectivités d’outre-mer dans le périmètre des dispositifs de défiscalisation prorogés. Je mentionne également la prolongation de plusieurs dispositifs de défiscalisation jusqu’en 2029 pour les collectivités d’outre-mer, sur l’initiative de Teva Rohfritsch, l’amendement de Georges Patient visant à lutter contre l’habitat insalubre outre-mer ou encore celui de Micheline Jacques sur la continuité territoriale et la prise en charge des billets d’avion pour nos compatriotes ultramarins.
Concernant la Corse, nous avons retenu dans le texte deux amendements défendus par Jean-Jacques Panunzi : l’un prévoit la prorogation du crédit d’impôt en Corse jusqu’en 2027, l’autre permet de garantir l’éligibilité de ce même crédit d’impôt aux résidences de tourisme.
J’y insiste donc : le débat parlementaire a permis un enrichissement important du projet de loi de finances pour 2023. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)
Il s’agit également d’un texte de soutien à nos collectivités territoriales, qui, comme l’État, les ménages et les entreprises, sont confrontées à une situation exceptionnelle. Bon nombre de mesures sont d’ailleurs, directement ou indirectement, le résultat des échanges que nous avons eus et des compromis que nous avons su construire malgré un certain nombre de désaccords légitimes, je le crois, en démocratie.
Le projet de loi de finances acte une augmentation de 320 millions d’euros de la dotation globale de fonctionnement (DGF). C’est la première fois depuis treize ans que cette dotation connaît une augmentation. L’année prochaine, grâce à cet amendement, 95 % des communes verront leur DGF augmenter ou se stabiliser.
M. André Reichardt. Sauf que l’inflation augmente !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. S’agissant de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), nous garantissons une compensation à l’euro près avec une fraction pérenne de TVA. La compensation sera calculée en faisant une moyenne sur quatre années, de 2020 à 2023. Je sais que cela constituait une préoccupation forte sur ces travées, mesdames, messieurs les sénateurs, car vous teniez à ce que les bonnes années en matière d’activité économique, en d’autres termes les toutes dernières années, puissent être prises en compte dans ce calcul.
Quant au filet de sécurité, il sera étendu à l’ensemble des strates de collectivités, en l’espèce, les départements et les régions. Cette version de 2023, largement inspirée par les travaux du Sénat, a été remaniée de la façon suivante : nous supprimons le premier critère d’éligibilité ; le seuil de perte d’épargne brute est fixé à 15 % au lieu de 25 %, comme cela était initialement prévu, et seulement 50 % des recettes réelles de fonctionnement sont pris en compte pour le calcul de l’effet de ciseaux, donc de la dotation.
D’autres mesures en faveur des collectivités locales ont par ailleurs été retenues. Je pense à l’amendement de Mme Françoise Gatel sur les communes nouvelles. (M. Jean-Claude Requier s’exclame.) Je pense aussi à l’amendement de M. Bernard Delcros sur la dotation biodiversité. Les mesures sont nombreuses qui pourraient ainsi être citées.
Comme vous le savez, notre soutien se poursuivra l’année prochaine pour aider les communes à faire face à la flambée des coûts de l’énergie. Le dispositif des tarifs réglementés d’électricité en 2023 pour les petites communes est complété par un amortisseur électricité qui s’appliquera dès le 1er janvier.
Concrètement, cela signifie que les collectivités territoriales qui ne sont pas éligibles au bouclier tarifaire seront également soutenues par l’État, et ce quelle que soit leur taille : pour un tarif entre 180 euros et 500 euros le mégawattheure, nous prendrons en charge la moitié de leur facture d’électricité. Cette baisse de prix s’appliquera immédiatement sur la facture, l’État se chargeant de verser la différence entre le prix de marché et le prix fixé au fournisseur d’énergie, via les charges de contribution au service public de l’électricité (CSPE).
Le troisième étage de cette fusée est évidemment constitué par le filet de sécurité, dont le montant par rapport à 2022 sera plus que triplé. Je précise que, dans le cadre du filet de sécurité de 2022, près de 5 000 communes ont bénéficié d’un acompte. Je ne doute d’ailleurs pas, mesdames, messieurs les sénateurs, que, dans chacun de vos départements, des communes aient pu en bénéficier, sachant que certaines ont fait le choix de ne pas le demander, préférant attendre la clôture de leurs comptes pour 2022 afin d’être certaines de pouvoir bénéficier d’un accompagnement.
Je retiens des débats que nous avons eus le sentiment d’avoir réussi à nouer un véritable dialogue, malgré de profondes divergences qui, encore une fois, sont parfaitement légitimes.
Oui – je réponds ainsi à Éric Bocquet qui est intervenu sur le sujet –, nous avons fait le choix de prendre nos responsabilités, via l’utilisation du 49.3. Nous ne pouvons en effet imaginer la sixième puissance mondiale affronter l’année 2023 les poches vides et sans budget. Nous avons une responsabilité, celle de doter notre pays d’un budget.
Vous avez rappelé les dialogues de Bercy, monsieur le sénateur. Dès la fin de l’été dernier, l’ensemble des oppositions représentées à l’Assemblée nationale ont indiqué qu’elles voteraient contre le budget, quelles que soient les mesures qu’il contiendrait, nous contraignant ainsi à utiliser le 49.3.
Pendant plus d’une dizaine d’heures, dans le cadre de ces réunions, nous leur avons demandé quelles mesures leur permettraient de reconsidérer leur position et d’envisager la possibilité de s’abstenir, voire – on peut toujours rêver – de voter favorablement. La réponse est restée immuable : aucune mesure ne les ferait changer d’avis. Le vote du budget étant un vote symbolique, voter en faveur du projet de loi de finances reviendrait à faire partie de la majorité. Par conséquent, elles voteraient contre, quel que soit son contenu.
Oui, nous avons donc assumé nos responsabilités en utilisant l’article 49, alinéa 3, de la Constitution. L’absence de budget pour 2023, cela aurait été l’absence de revalorisation du salaire de nos enseignants. Cela aurait été l’absence de moyens supplémentaires accordés à nos armées dans un contexte géopolitique particulièrement tendu. Cela aurait été une hausse de la facture d’électricité et de gaz des Français de 120 %, alors que, grâce à ce budget, celle-ci est limitée à 15 %. Cela aurait été 3 000 postes de policiers et de gendarmes en moins pour la sécurité des Français. Cela aurait été…
M. Pascal Savoldelli. Le chaos ! Dites-le, la gauche, c’est le chaos !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. … un pays laissé dans une situation d’insécurité, alors que de très forts aléas existent aujourd’hui en Europe et dans le monde.
Nous avons donc eu des débats, au cours desquels nous avons tâché de faire pour le mieux afin de protéger les Français, tout en tenant nos comptes publics.
Nous aurons l’occasion, lors de l’examen de prochains textes ou dans les prochaines années – je le souhaite –, de discuter de ces sujets, de continuer à travailler ensemble.
J’espère que, au Sénat, ce débat se déroulera toujours dans le même esprit de dialogue respectueux de nos institutions, respectueux de la courtoisie républicaine, respectueux – je le crois profondément – des attentes des Français, qui souhaitent que nous nous parlions et que nous travaillions ensemble. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Joël Guerriau applaudit également.)
M. le président. Monsieur le ministre, je vous rassure : au Sénat, la courtoisie républicaine est la règle.
La parole est à M. le rapporteur général. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons, en nouvelle lecture, le projet de loi de finances pour 2023, après l’usage, une nouvelle fois, de la procédure de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution à l’Assemblée nationale.
En effet, la commission mixte paritaire, qui s’est réunie le 6 décembre dernier, n’a pu aboutir favorablement, en raison de la persistance de divergences trop importantes portant sur les 237 articles restant en discussion. Notons qu’en première lecture l’Assemblée nationale et le Sénat avaient déjà adopté, dans les mêmes termes, 88 articles.
À l’issue de la nouvelle lecture, le texte considéré comme adopté par l’Assemblée nationale – qui est finalement le vôtre, monsieur le ministre – a parfois suivi le Sénat, même partiellement. J’en présenterai quelques exemples, avant de vous indiquer, toutefois, les nombreux désaccords qui demeurent entre nos deux chambres.
Parmi les principaux apports du Sénat conservés par l’Assemblée nationale figure évidemment, tout d’abord, la suppression de l’article 40 quater du projet de loi de finances, tel que considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture. Celui-ci consistait, en réalité, à réintroduire le dispositif de contractualisation et de sanction, souhaité par le Gouvernement, à destination des collectivités territoriales, alors même que celui-ci avait été rejeté par les deux assemblées lors de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.
Je me félicite, ensuite, qu’aient par exemple été conservées non seulement l’exonération de malus pour les véhicules des services départementaux d’incendie et de secours (Sdis), mais aussi les mesures de financement défendues par le président de la commission des finances, Claude Raynal, en faveur des nouvelles lignes à grande vitesse (LGV).
Plusieurs mesures de prorogation ou d’amélioration de dépenses fiscales assurent un soutien, notamment économique ou dans la lutte contre l’habitat indigne, aux collectivités d’outre-mer, qui font face à des contraintes et à des difficultés spécifiques. Il en est de même pour la Corse.
Je me réjouis aussi du maintien, non pas de tous, mais de plusieurs dispositifs visant à lutter contre la fraude fiscale, qui constituent la traduction législative de recommandations issues des travaux de la mission d’information relative à la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, créée par la commission des finances.
Je salue également le fait que le texte reprenne la position du Sénat en conservant, sous réserve de divers aménagements, l’essentiel des modifications apportées à la nouvelle contribution sur la rente inframarginale, applicable aux producteurs d’électricité.
Pour autant, sur les mesures fiscales et budgétaires relatives à l’énergie, je rappelle que le Sénat a fait preuve d’un sens aigu des responsabilités en votant les dispositions proposées par le Gouvernement visant à lutter contre la hausse des prix de l’énergie et à faire contribuer à leur financement les producteurs d’énergie, conformément aux décisions prises à l’échelon européen.
En effet, je le rappelle, monsieur le ministre, nous avons accepté de voter des dispositifs qui n’ont cessé d’évoluer de façon majeure au cours de la navette parlementaire, sans que nous ayons pu disposer d’études d’impact suffisamment solides ni même de tous les éléments nous permettant de comprendre parfaitement l’ensemble des enjeux des modifications opérées.
Sachez-le, monsieur le ministre, nous serons particulièrement attentifs à la mise en œuvre de l’ensemble de ces dispositifs et au fait qu’ils répondent véritablement aux besoins. Je pense en particulier au bouclier tarifaire et à l’amortisseur électricité.
Pour autant, malgré le maintien de ces apports du Sénat, des désaccords importants subsistent entre les positions de notre assemblée et celles qui figurent dans le texte considéré comme adopté par l’Assemblée nationale, sur lequel le Gouvernement engage sa responsabilité.
Nous avons, tout d’abord, eu l’occasion d’exprimer nos réserves quant aux prévisions de croissance retenues par le Gouvernement pour l’année 2023. L’hypothèse de 1 % de croissance est, à ce jour, bien éloignée du consensus des économistes et, surtout, ne tient pas compte des récents événements conjoncturels. Le Président de la République lui-même partage l’avis du Sénat et en a fait état publiquement. Il faudrait donc, monsieur le ministre, que votre position soit en harmonie avec les propos du Président.
Quand la dette publique atteint 111,5 % du PIB, la remontée des taux d’intérêt constitue un risque pour la soutenabilité de notre dette. S’il est vrai que l’inflation est mieux maîtrisée en France que dans d’autres économies développées, c’est au prix d’une forte mobilisation de nos finances publiques.
Si le soutien aux ménages et aux entreprises est maintenu, un effort pour maîtriser la dépense ordinaire des administrations publiques doit parallèlement être engagé.
Concernant le budget de l’État, le Gouvernement fait en réalité le choix d’identifier les dépenses qui doivent continuer à augmenter, sans s’occuper des économies qui devraient les compenser. Ce n’est pas faire preuve de responsabilité.
Le déficit de l’État, supérieur à 150 milliards d’euros pour la quatrième année consécutive, reste sur les sommets atteints pendant la crise sanitaire. Ce budget est celui de tous les records en termes de niveau, aussi bien de déficit présenté en loi de finances initiale que d’emprunts nouveaux.
Un grand nombre des amendements adoptés par le Sénat n’ont pas été conservés.
Le rétablissement de l’article 5 par le texte issu de la nouvelle lecture, qui supprime la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), est opéré sans que soient proposées de meilleures garanties quant aux modalités de compensation prévues pour les collectivités territoriales. Pourtant, la volonté d’assurer une véritable autonomie financière de ces collectivités ainsi que leur capacité à assumer les charges qui leur sont imposées expliquait le choix d’une majorité du Sénat de supprimer cet article – c’est ce qu’il fallait comprendre –, donc de contester la suppression de la CVAE. Toutefois, cela ne remet en rien en cause notre soutien aux entreprises, qui doivent rester concurrentielles.
Des mesures en faveur des PME n’ont pas été retenues. Il s’agit du rehaussement du plafond des bénéfices soumis au taux d’impôt sur les sociétés tenant compte de l’inflation ou encore de la prorogation, pour une année supplémentaire, du renforcement du crédit d’impôt pour les travaux de rénovation énergétique des bâtiments à usage tertiaire.
Je reviens aux finances locales.
Nous pourrions nous réjouir du fait que, sous la pression du Sénat et du dispositif que nous avions adopté, le Gouvernement ait été contraint d’ouvrir davantage les conditions d’éligibilité au filet de sécurité prévu pour les collectivités territoriales à l’article 14 ter. Pourtant – et je le regrette –, la conservation du critère de perte d’épargne brute, même réduit à 15 %, est une mauvaise nouvelle pour deux raisons : d’une part, il est fortement excluant et générateur d’importants effets de seuil ; d’autre part, il ne me paraît pas utile pour s’assurer que les collectivités doivent être aidées, dans la mesure où les modalités mêmes de calcul de la dotation mettent déjà en relation la différence entre la progression des dépenses et celle des recettes.
Notre proposition, qui visait à rendre éligibles un plus grand nombre de collectivités territoriales durement touchées par la crise, donc à étendre la protection qui leur serait apportée, était à mon sens à la fois juste, équitable et raisonnable. En effet, elle devait permettre aux collectivités, par des effets cumulés avec ceux du bouclier tarifaire et de l’amortisseur électricité, d’envisager plus sereinement l’arrivée des prochains mois et la construction de leurs budgets primitifs.
Il est d’ailleurs regrettable que d’autres mesures de soutien aux collectivités n’aient pas été conservées, à l’instar de l’intégration des opérations d’aménagement et d’agencement dans le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), devenues inéligibles à la suite de la réforme portant sur l’automatisation de ce dernier.
Je ne comprends pas non plus pourquoi la majorité gouvernementale ne nous a pas rejoints autour d’amendements pourtant votés à la quasi-unanimité. Ainsi en est-il du relèvement du plafond du prêt à taux zéro (PTZ), qui doit permettre de soutenir l’accession à la propriété des primo-accédants, sous conditions de ressources, dans un contexte de durcissement des conditions d’emprunt immobilier.
Le texte considéré comme adopté par l’Assemblée nationale a également rétabli les crédits des quatre missions qui avaient été rejetés par le Sénat, sans apporter aucune réponse aux objections du Sénat.
Pour finir, j’aborderai un sujet apparemment plus technique. Aucun des amendements adoptés par notre assemblée afin de « sincériser » le budget n’a été conservé. Nous avons pourtant déjà la confirmation que le Gouvernement s’est bien ménagé une confortable réserve de crédits au sein de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles (DDAI).
En effet, celle-ci est subitement réduite de 700 millions d’euros en nouvelle lecture, tandis que cette même somme figure désormais dans la mission « Écologie, développement et mobilité durables » pour couvrir le financement de la nouvelle aide aux carburants de 100 euros, annoncée récemment. Ces crédits, tels qu’ils étaient inscrits dans le texte initial, avaient donc une tout autre destination. Cela n’est évidemment pas satisfaisant pour le législateur.
Monsieur le ministre, vous le constatez, les sujets de désaccords entre le Sénat et la majorité gouvernementale sont nombreux. C’est pourquoi la commission des finances proposera d’opposer la question préalable sur le projet de loi de finances pour 2023.
Monsieur le ministre, je conclurai en évoquant l’état d’esprit qui anime le Gouvernement à l’endroit des collectivités territoriales. J’entends de nombreux reproches adressés aux collectivités locales, qui se nourriraient sur le dos de l’État. Cependant, la France des collectivités n’est pas l’ennemi de la République : elle la sert chaque jour !
Alors, faites-lui confiance et donnez à la France, ainsi qu’aux territoires, les meilleures chances d’agir pour l’avenir ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sylvie Vermeillet applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Sylvie Vermeillet applaudit également.)
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2023 devrait connaître l’issue qu’elle rencontre tous les ans au Sénat, à savoir l’adoption de la motion tendant à opposer la question préalable, cette discussion générale est l’occasion de revenir sur l’ensemble des travaux budgétaires que nous avons conduits cet automne.
Si le grand public a beaucoup entendu parler de la série historique de procédures du 49.3 déclenchées à l’Assemblée nationale à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances, il est probablement moins informé de leur examen complet par la Haute Assemblée. Plus de 3 000 amendements ont en effet été déposés à l’occasion de la discussion du projet de loi de finances, ce qui constitue un record maintes fois souligné.
Que reste-t-il de nos 160 heures de débat et, encore plus, du travail effectué en amont et en commission ? Sans surprise, le Gouvernement est revenu sur l’amendement de la majorité sénatoriale prévoyant un dégrèvement de la CVAE pour les entreprises plutôt que sa suppression sèche. La suppression en deux ans de cet impôt territorial est une mesure emblématique du budget 2023. Nous resterons attentifs aux modalités de compensation, annoncées à l’euro près, à destination des collectivités territoriales.
Les contributions exceptionnelles sur les bénéfices des entreprises du secteur de l’énergie entreront également en vigueur, bien que des modifications techniques et relatives à leur périmètre puissent encore être apportées – le diable est dans les détails. Un débat existe, parmi les économistes, sur le montant que rapporteront ces contributions. Les chiffres varient de plusieurs milliards d’euros à seulement quelques centaines de millions d’euros. Ce débat n’est pas sans rappeler celui ayant trait à la taxe Google portant sur les services numériques, mise en place en 2019, qui avait attiré le courroux de nos partenaires d’outre-Atlantique.
Quoi qu’il en soit, l’exécution du budget 2023 sera cruciale. Elle dépendra plus que jamais de l’évolution de la conjoncture macroéconomique. Espérons qu’elle sera plus favorable que ne l’affirment certains prévisionnistes, parfois un peu alarmistes, alors que le coût des intérêts de la dette publique a explosé en 2022.
Pour le reste, le Gouvernement a logiquement rétabli la plus grande partie de son texte, après l’échec de la commission mixte paritaire la semaine dernière. Dans la seconde partie du projet de loi de finances, les nombreux crédits supprimés par la majorité sénatoriale ont été rétablis.
Pour ma part, je me félicite de la pérennisation des amendements adoptés ayant pour objet le malus pour les véhicules des services départementaux d’incendie et de secours, ou encore le relèvement de la dotation minimale aux communes pour la protection de la biodiversité, au moment où se tenait la COP15.
Concernant la taxe d’aménagement, la suppression de la réforme de la répartition au sein du bloc communal, votée l’an dernier, nous paraît préférable, dans la mesure où les charges d’aménagement varient fortement en fonction de chaque territoire.
Je note enfin la suppression conforme de l’article 40 quater sur les nouveaux contrats État-collectivités. Cette disposition figurant à l’origine dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 avait en effet été réintroduite de façon un peu surprenante dans les articles non rattachés. C’est le retour des contrats de Cahors !
À ce sujet, je précise que ces contrats ont été annoncés par le Premier ministre d’alors, Édouard Philippe, non pas à Cahors,…
M. André Gattolin. Imposture !
M. Jean-Claude Requier. … mais à Fontanes-Lalbenque. Si les habitants de Cahors en font état, la commune de Fontanes-Lalbenque reste toutefois plus célèbre pour ses truffes que pour les contrats de Cahors. (Sourires.)
M. Jean-François Husson. Je préfère les truffes ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Claude Requier. La réforme de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) a pour effet positif de ramener le nombre d’articles non rattachés à des proportions plus raisonnables, même si l’appropriation en détail de la réforme a pu créer quelques difficultés çà et là.
En conclusion, les membres du groupe RDSE, attachés à la poursuite du débat parlementaire, s’opposeront, sur la forme, à la motion tendant à opposer la question préalable, même s’ils en comprennent les motivations. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – M. André Gattolin applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Sautarel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire, qui s’est réunie le 6 décembre dernier, n’est pas parvenue à un accord. En nouvelle lecture, le Gouvernement a de nouveau et par deux fois déclenché le recours à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution pour les deux parties du projet de loi de finances.
Monsieur le ministre, la déception est forte. Tout ça pour ça !
Après 160 heures de séance au Sénat, l’examen de plus de 3 000 amendements et l’adoption de plus de 600 d’entre eux, très peu d’apports de la Haute Assemblée ont été finalement retenus.
Le Gouvernement, une nouvelle fois, fait peu de cas du Parlement.
Nous sommes pourtant la seule chambre qui, cette année, a examiné l’ensemble du texte. Nous vous avons fait des propositions constructives. Quasiment tout a été balayé, y compris les mesures adoptées à la quasi-unanimité du Sénat, comme le prêt à taux zéro ou la limitation des bonus pour les véhicules électriques.
Mes chers collègues, je salue notre travail collectif tout au long de la discussion, malgré quelques moments curieux, et l’action de notre rapporteur général, toujours efficace et bienveillante, avec pour seul souci l’intérêt général.
Pourtant, monsieur le ministre, vous prétendez qu’une méthode nouvelle devait être mise en place et vous ne cessez de demander à chacun, à la droite républicaine en particulier, de travailler avec vous, dans l’intérêt du pays. En réalité, la main que vous tendez est un poing fermé. (Eh oui ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
À quoi bon perdre son temps dans les pseudo-dialogues de Bercy, ou même dans nos débats, pour en arriver à ce déni total de notre régime parlementaire ? Vous ne voulez pas écouter, alors même que, comme nous l’avions dénoncé dans la discussion générale, votre budget est l’un des pires jamais présentés, loin d’une gestion à l’euro près.
Je citerai seulement trois chiffres : 500 milliards d’euros de dépenses publiques de l’État, 270 milliards d’euros d’emprunts, 27 milliards d’euros d’investissements ! Je pourrais ajouter le coût de la dette qui explose. Qui plus est, tout cela est fondé sur une hypothèse de croissance contestable, alors que la sincérité du budget est interrogée et que l’absence de véritable boussole engendre de l’inquiétude dans l’ensemble de la société, en dépit d’une addiction au « quoi qu’il en coûte ».
Au mois de juillet dernier et de nouveau à la rentrée, le ministre de l’économie, des finances, et de la souveraineté industrielle et numérique, Bruno Le Maire, qui a déserté nos travées pendant quasiment toute la discussion budgétaire…
M. Vincent Segouin. Il est habitué !
M. Stéphane Sautarel. … – à quoi bon, en effet, « perdre son temps » au Parlement ? (Marques d’approbation sur les travées du groupe Les Républicains.) –, nous appelait à lui faire des propositions d’économies : « Je propose que ce soit les parlementaires qui se saisissent du sujet, et plus le Gouvernement. »
Je veux toutefois ouvrir une parenthèse pour vous remercier, monsieur le ministre, de votre présence et de vos réponses, même si vous ne nous avez finalement pas entendus, ce qui risque de rendre le dialogue plus difficile demain.
Que le Gouvernement se dessaisisse de la question de la réduction de la dépense, dans le contexte de l’envolée de notre dette, en disait déjà beaucoup sur son manque de responsabilité.
Qu’il ne reprenne finalement aucune de nos propositions d’économies, alors même qu’il nous avait mis au défi de lui en proposer, montre que, encore une fois, tout cela n’était que de la communication.
Les calculs politiques semblent plus importants que l’intérêt du pays. Nous avions pourtant proposé 4,3 milliards d’euros d’économies, conformément à la trajectoire que nous avions votée dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 : pas un centime n’a été retenu.
Il en est de même des mesures que nous avions adoptées pour venir en aide aux entreprises et aux collectivités territoriales, confrontées à une explosion de leurs factures énergétiques, à une exception près, que nous tenons à saluer : la suppression du « pacte de confiance » entre l’État et les 500 plus grandes collectivités territoriales. En réalité, il s’agissait plutôt d’un acte de défiance à l’encontre des élus locaux, puisque des sanctions étaient prévues en cas de non-respect de ses dispositions. Il n’avait d’ailleurs de pacte que le nom, puisqu’il était imposé aux collectivités visées (M. le rapporteur général acquiesce.) ; de ce fait, il s’apparentait davantage à un contrat léonin.
Cette mesure importante exceptée, aucun apport notable du Sénat n’a été retenu, à commencer par la simplification du filet de sécurité qu’il avait proposée.
Le Gouvernement a rétabli les critères de baisse d’épargne brute et de potentiel fiscal. Une fois de plus, monsieur le ministre, vous avez préféré une machine technocratique peu lisible pour les collectivités à un système simple et transparent. Au total, ce dispositif n’aurait sans doute pas été plus coûteux et il aurait à coup sûr été bien plus vertueux pour les collectivités qui font des efforts de gestion.
Ce filet de sécurité prend de nouveau comme référence l’évolution des dépenses d’énergie entre 2022 et 2023, plutôt qu’entre 2021 et 2023, alors qu’il s’agit là du bon étalon de mesure. Par rapport à la version considérée comme adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture, il a simplement été un peu élargi. La perte d’épargne brute entre 2023 et 2022 doit être supérieure à 15 %, au lieu de 25 % ; en parallèle, le seuil de déclenchement correspond désormais à une hausse des dépenses d’énergie supérieure à 50 % de la hausse des recettes entre 2022 et 2023, contre 60 % dans la version initiale.
Quoi qu’il en soit, nous sommes très loin du texte voté par le Sénat, en vertu duquel toutes les collectivités territoriales, sans critère aucun, percevaient une dotation égale à 50 % de la différence, si elle était positive, entre l’augmentation des dépenses d’énergie entre 2023 et 2021 et 40 % de la hausse de ses recettes réelles de fonctionnement sur la même période.
Plus largement, je note que rien – ou si peu ! – n’a été retenu parmi les améliorations proposées au titre des dotations aux collectivités. On est bien loin de leur indexation, pourtant justifiée.
Monsieur le ministre, à l’instar de M. le rapporteur général, je vous appelle à faire confiance aux collectivités territoriales.
De surcroît, nous regrettons vivement que la réintégration des opérations d’agencement et d’aménagement de terrains dans l’assiette du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) ait été supprimée. C’était une demande très forte des élus locaux.
Vous avez pourtant déjà laissé entendre ici même, au mois d’août dernier, lors de l’examen du premier projet de loi de finances rectificative, puis lors de l’examen du projet de loi de finances, que vous aviez entendu cette demande légitime. Comment rétablir la confiance en agissant ainsi ?
Par ailleurs, vous avez rétabli la suppression de la moitié de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en 2023. Pour ce qui concerne la territorialisation, les critères du nouveau fonds national d’attractivité économique des territoires ne sont toujours pas précisés : ils restent renvoyés à un décret ultérieur. Nous voterons donc ce dispositif à l’aveugle, ce qui est on ne peut plus regrettable.
Le président de la commission des finances l’a rappelé à plusieurs reprises : nous sommes face à un véritable problème démocratique. L’essence même du Parlement est de voter l’impôt. Or cette évolution de la CVAE, quoi qu’on en pense par ailleurs – vous savez que nous y sommes favorables sur le principe –, n’aura bénéficié d’aucune approbation parlementaire. Plus qu’un problème, c’est une alerte.
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Très bien !
M. Stéphane Sautarel. Pour ce qui concerne les entreprises, nous n’avons pas davantage été entendus. La hausse majorée du plafond de bénéfice relevant du taux réduit d’impôt sur les sociétés a également été supprimée, bien que le Gouvernement ait laissé entendre qu’un compromis eût été possible : à l’évidence, il n’en est rien. Il a été décidé de revenir au texte initial, qui fixe ce plafond à 42 500 euros.
Le rehaussement du seuil d’entrée dans la contribution sociale sur les bénéfices (CSB), de 7,63 millions d’euros à 10 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel, a également été supprimé.
La hausse du taux de réduction d’impôt sur le revenu pour la souscription au capital des petites et moyennes entreprises (IR-PME), de 25 % à 30 %, n’a pas non plus été reprise.
J’aurais pu citer bien d’autres exemples, mais le temps est compté.
Si nos entreprises lâchent, victimes de la crise énergétique, c’est notre pays tout entier qui dévisse. Les réponses apportées aujourd’hui ne sont pas à la hauteur de l’urgence et je crains que leur faiblesse n’appelle des ajustements réguliers tout au long de l’année 2023 si nous voulons éviter le pire.
Au regard du peu de considération que le Gouvernement témoigne au travail du Sénat, il ne servirait à rien de réexaminer l’ensemble du budget. Non seulement nous n’en aurions pas le temps, mais nous connaissons déjà le sort de nos amendements.
C’est pourquoi les membres du groupe Les Républicains voteront la motion tendant à opposer la question préalable déposée par la commission des finances, que notre rapporteur général présentera dans quelques instants. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau.
M. Joël Guerriau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Sénat a toujours su s’adapter en suivant l’évolution des traditions et, pour ce qui concerne les projets de loi de finances, il semble qu’une nouvelle tradition se dessine : le rejet du texte en nouvelle lecture.
Certes, le calendrier très strict imposé par la loi organique relative aux lois de finances rend illusoire la poursuite de débats sereins et approfondis. Toutefois, les élus de notre groupe regrettent que le Sénat s’en trouve réduit à se priver d’un nouvel examen du projet de loi de finances pour 2023. Nous le regrettons d’autant plus que ce texte contient des mesures importantes pour les collectivités territoriales.
Nos élus locaux attendent un véritable soutien pour lutter contre l’inflation. Ces mesures sont à la fois fortes et nombreuses, à tel point que nous devons désormais faire un effort de pédagogie pour que nos collectivités puissent tirer profit des dispositifs qui seront mis en place en 2023.
Entre les annonces égrenées par le Gouvernement pendant tout l’automne et les discussions parlementaires, les élus sont perdus. Ils ont besoin d’y voir plus clair sur ce qui figure finalement dans le texte. Nous prendrons notre part du travail nécessaire pour faire connaître ces dispositifs, mais la démarche doit être collective.
Ce constat vaut notamment pour le filet de sécurité. À ce titre, la commission des finances du Sénat avait supprimé tout critère d’éligibilité : son choix avait le mérite de simplifier le dispositif et de n’exclure aucune collectivité territoriale. En revanche, il ne permettait sans doute pas d’optimiser la dépense publique au profit des collectivités qui en ont le plus besoin. (M. Alain Richard acquiesce.) C’est pourquoi la solution retenue par le Gouvernement en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale me paraît plus raisonnable.
Certains critères d’éligibilité sont ainsi rétablis. Le dispositif élaboré est à la fois plus généreux qu’il n’était à l’issue de la première lecture à l’Assemblée nationale et plus restrictif que celui qu’a voté le Sénat : il s’agit donc d’une solution intermédiaire.
Je remarque d’ailleurs qu’une perte d’épargne brute de 15 % correspond à ce que notre groupe avait proposé par la voie d’un sous-amendement à l’amendement de M. le rapporteur général. Ce critère permettra de couvrir la majorité des collectivités territoriales frappées par la hausse des coûts de l’énergie. (M. Alain Richard le confirme.)
Ce n’est pas une solution idéale, mais c’est une solution raisonnable. Elle ne résoudra pas toutes les difficultés des collectivités, mais elle limitera largement l’impact de l’inflation sur les finances locales.
En outre, le filet de sécurité ne constitue que l’un des volets du mécanisme de soutien.
Pour les plus petites communes, le bouclier tarifaire continuera de s’appliquer en 2023. Pour les communes qui ne seraient éligibles ni au bouclier tarifaire ni au filet de sécurité, il restera l’amortisseur électricité.
Avant de conclure, je tiens à revenir sur deux sujets importants pour les membres de mon groupe.
Le premier sujet touche à la préservation de nos forêts. Ce texte reprend, en deux articles, le dispositif de la proposition de loi inscrite dans l’espace réservé de notre groupe afin d’ouvrir le mécénat, pour les particuliers comme pour les entreprises, aux dons effectués au bénéfice des communes forestières.
Le second a trait au sort des communes nouvelles ; en leur faveur, une solution de court terme a été trouvée, mais plusieurs d’entre elles restent inquiètes pour l’avenir. J’espère que nous pourrons continuer à les soutenir.
Nous pouvons nous féliciter de la qualité de nos débats en première lecture : nous avons analysé 3 507 amendements – c’est un nouveau record – au cours de 160 heures de discussions en séance.
Certes, monsieur le ministre, vous nous promettez de conserver un certain nombre d’avancées proposées par notre assemblée, néanmoins, les élus du groupe Les Indépendants – République et Territoires déplorent que nous ne soyons pas en mesure de peaufiner le texte en nouvelle lecture. (MM. Jean-Claude Requier et Alain Richard applaudissent.)
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ah !
M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller.
M. Daniel Breuiller. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de vous citer l’article 14 ter de ce projet de loi de finances : si « leur épargne brute a enregistré, en 2023, une baisse de plus de 15 % […] parmi les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, seul[es] sont éligibles au versement de la dotation susmentionnée […] les communes dont le potentiel financier par habitant est inférieur à deux fois le potentiel financier moyen par habitant de l’ensemble des communes appartenant au même groupe démographique, défini à l’article L. 2334-3 du code général des collectivités territoriales ».
Monsieur le ministre, merci d’avoir simplifié le filet de sécurité, pour que les collectivités territoriales puissent faire face à la hausse du coût de l’énergie ! (Sourires. – M. le rapporteur général rit.)
Il est vrai que, en adoptant un amendement de M. le rapporteur général visant à considérer les seules hausses de dépenses et de recettes, le Sénat avait retenu une version trop peu technocratique pour Bercy et trop lisible pour les maires, qui tous se demandent comment boucler leurs budgets. (Nouveaux sourires.)
Cet exemple illustre le traitement réservé à nos 160 heures de débat et aux quelque 3 000 amendements que nous avons discutés.
Vous êtes dénué de majorité à l’Assemblée nationale, mais vous continuez à gouverner seuls, dans un entre-soi dangereux pour la démocratie et pour nos institutions.
Vous avez fait votre « tri sélectif » parmi les amendements votés pour revenir, via le 49.3, à la maquette à peine modifiée du texte initialement présenté à l’Assemblée nationale. Pour l’essentiel, vous avez retenu les amendements gouvernementaux !
Adieu la TVA à 5,5 % pour les transports collectifs.
Adieu l’indexation de la dotation globale de fonctionnement, pourtant votée sur toutes les travées de cet hémicycle, à une très large majorité.
Adieu aussi les 8 milliards d’euros de CVAE.
Vive la dette publique !
En matière d’écologie, il ne restera malheureusement pas grand-chose de ce texte. On y trouve quelques mesures bienvenues, mais aux marges, et elles ne sont en aucun cas à la hauteur des crises climatiques et de l’effondrement du vivant que les conférences des parties (COP) ne cessent de démontrer, sans qu’au fond vous osiez les changements indispensables.
Vous mobilisez vingt fois plus d’argent pour le bouclier tarifaire que pour MaPrimeRénov’. Or les 100 milliards d’euros consacrés aux différents boucliers créés depuis deux ans manquent cruellement à la transition écologique.
Monsieur le ministre, il y a quelques semaines, à l’ouverture de nos débats, je vous ai posé cette question : respecterez-vous le travail du Parlement ?
Cette question est sérieuse. La crise démocratique que nous vivons exige la volonté et la capacité d’entendre le Parlement, les syndicats, les organisations non gouvernementales (ONG) et les citoyens.
Certes, le 49.3 est constitutionnel. Évidemment, vous faites bien de ne pas laisser un texte qui supprime cinq missions budgétaires poursuivre son chemin. Pour autant, cela ne justifie pas de ne rien retenir, ou presque, de nos discussions.
L’inutilité de nos débats et non-débats laisse trop de place au Rassemblement national, qui en profite pour apporter ses mauvaises réponses à de bonnes questions. Pendant que nous sommes tous les acteurs d’une comédie burlesque sur l’inutilité parlementaire, une partie des Français tombent dans le tragique.
L’inflation explose – on le voit notamment pour l’alimentation –, si bien que, désormais, ce ne sont plus seulement les fins de mois qui sont difficiles : parfois, c’est dès le 10 du mois que l’argent vient à manquer. Les coupures d’électricité inquiètent. La crise énergétique préoccupe les Français et les désarçonne tout autant, quand Engie enregistre une année record : son chiffre d’affaires a augmenté de 85 % au cours des neuf premiers mois de 2022, pour atteindre 69,3 milliards d’euros.
Vos déclarations publiques annoncent, hélas ! la poursuite des décisions jupitériennes, ignorant le Parlement comme vous ignorez les partenaires sociaux avec votre réforme néfaste des retraites.
Monsieur le ministre, on a rarement raison seul. La démocratie sans Parlement et sans partenaires sociaux, ce n’est déjà plus la démocratie. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des finances s’est réunie ce matin pour déposer une motion tendant à opposer la question préalable. Elle s’apprête ainsi à nous priver du débat…
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Ah oui ?
M. Patrick Kanner. Et le 49.3 ?
M. André Gattolin. … en nous empêchant d’examiner en nouvelle lecture ce projet de loi de finances.
Comme chaque année, les élus de notre groupe déplorent cette posture. Cette année, nous regrettons plus particulièrement de ne pas pouvoir discuter des engagements forts que traduit ce budget…
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Il fallait commencer par le faire à l’Assemblée nationale !
M. André Gattolin. … pour la protection des Français et des collectivités territoriales, ou encore des apports du Sénat qui ont été retenus dans la navette parlementaire. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Vincent Segouin. C’est faux !
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Des miettes…
M. André Gattolin. Ce budget consacre le réarmement de nos forces de sécurité en augmentant leurs moyens de 7 %. Aucun gouvernement ne l’avait fait par le passé !
Le ministère de la justice voit quant à lui son budget progresser de 8 % pour la troisième année consécutive.
Pour le ministère de l’éducation nationale, l’objectif fixé par le Gouvernement est le plus ambitieux depuis des années : pas un enseignant à moins de 2 000 euros net par mois en début de carrière.
Aux ménages, nous rendons plus de 6 milliards d’euros de pouvoir d’achat, grâce à l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu.
En parallèle, la reconduction du bouclier tarifaire permet de protéger le pouvoir d’achat, non seulement des ménages, mais aussi des entreprises et des collectivités territoriales.
Avec l’amortisseur électricité et le filet de sécurité, la France dispose du système de protection le plus complet et le plus ambitieux déployé en Europe. (M. le président de la commission manifeste sa circonspection.)
Au cours de la navette parlementaire, le Gouvernement et les députés ont conservé des apports importants du Sénat (M. le ministre délégué le confirme.), venus de toutes les travées. M. le ministre les ayant longuement énumérés, je n’y reviendrai pas. Les membres de notre groupe ont notamment apporté leur pierre à l’édifice.
En dépit de tous ces efforts pour protéger les Français et réarmer nos services publics, en dépit des nombreuses concessions faites, la majorité sénatoriale choisit de nous priver de ce débat…
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Oh !
M. André Gattolin. … et de se dessaisir elle-même de sa responsabilité.
Mes chers collègues, depuis des semaines, vous nous accusez de négligence budgétaire,…
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C’est pire que cela !
M. André Gattolin. … mais vous n’avez fait que voter de nouvelles dépenses tout au long de l’examen en première lecture.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Non !
M. André Gattolin. L’article 5, relatif à la CVAE, que vous avez rejeté après avoir pris tant de peine à le réécrire, n’y change rien.
L’échec de la commission mixte paritaire chargée d’examiner le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, réunie ce matin même, est une triste illustration de ces incohérences.
Vous dénoncez une trajectoire peu ambitieuse et réclamez des efforts plus importants : soit. Je vous rappelle néanmoins que vous n’avez pas pu respecter la trajectoire que vous vouliez fixer pour 2023 dans le projet de loi de programmation, à savoir une baisse du déficit public représentant 4,6 % du PIB. Il vous aura fallu improviser une seconde délibération portant sur un certain nombre d’amendements de la première partie pour afficher un déficit à peine en recul.
En outre – disons-le franchement –, vous n’êtes parvenus à cet assez piètre résultat…
M. Alain Richard. Oui !
M. André Gattolin. … qu’au prix du rejet en bloc du budget de l’agriculture – rien de moins ! –, des crédits de la mission « Cohésion des territoires », de la mission « Immigration, asile et intégration » et de la mission « Engagements financiers de l’État ».
C’est un futur retraité de la vie parlementaire qui vous parle – autant dire que je m’adresse à vous en toute amitié (Sourires.) : mes chers collègues de la majorité sénatoriale, je vous apprécie tous personnellement et individuellement, mais, tels les membres d’une équipe de foot qui perd, vous omettez de parler entre vous, d’agir collectivement et en cohérence sur le terrain,…
M. André Gattolin. … au point, très souvent, de procéder dans l’hémicycle à des votes en totale contradiction avec vos choix en commission.
Vous l’avez compris, les élus du groupe RDPI voteront contre cette motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – MM. Joël Guerriau et Bernard Fialaire applaudissent également.)
M. Alain Richard. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Éric Jeansannetas.
M. Éric Jeansannetas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme du marathon budgétaire de 2022.
Moment phare de chaque session parlementaire, l’examen du projet de loi de finances est normalement le théâtre des grands arbitrages qui guideront l’action politique pour l’année à venir : députés et sénateurs sont censés enrichir ce texte pour répondre au mieux aux préoccupations de nos concitoyens et des territoires qu’ils représentent.
Bien sûr, la commission mixte paritaire n’est pas conclusive. Bien sûr, la motion tendant à opposer la question préalable sera votée, et nous la voterons. Cette issue n’en est pas moins regrettable, monsieur le ministre.
Non bridé par le 49.3, le Sénat a pu travailler. Il a même produit un nombre record d’amendements – 3 035 cette année, dont environ 600 ont été votés – et passé de nombreuses heures avec vous dans cet hémicycle ; nous vous remercions d’ailleurs de votre présence. (M. le ministre délégué sourit.) Pour ce qui les concerne, les élus du groupe socialiste ont proposé 282 amendements, dont 41 ont été adoptés.
Le Sénat a pleinement joué son rôle dans la navette parlementaire, dont, aujourd’hui, on cherche malheureusement le sens et l’utilité.
Nous n’allons pas employer ces minutes pour parler de la dixième utilisation consécutive de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution par l’exécutif en l’espace de quelques semaines. Les élus, les partis politiques, la presse et les Français le font suffisamment pour que – je l’espère – vous mesuriez le poids de ces décisions sur la perception que notre nation a de ses politiques, de son gouvernement et de ses élus.
Au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, je déplore le manque de responsabilité dont a fait preuve le Gouvernement. Monsieur le ministre, vous aviez besoin du Sénat pour que votre budget cesse d’afficher du mépris à l’égard de nos collectivités territoriales.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C’est vrai !
M. Éric Jeansannetas. D’ailleurs, ce projet de loi de finances ne protège pas plus les collectivités que nos concitoyens contre la hausse de l’inflation.
La majorité – relative – du Président de la République avait l’occasion de tenir compte du scrutin législatif du mois de juin dernier, elle l’a manquée ! À l’Assemblée nationale, la succession des recours au 49.3 par le Gouvernement a conduit à défaire les résultats des votes intervenus afin d’établir un texte qui intègre 99 % des propositions de votre seule majorité !
Au Sénat, ensuite, vous avez fait le choix de ne pas retenir nos propositions ou si peu… Tout naturellement, l’échec de la commission mixte paritaire en témoigne – il était écrit d’avance, reconnaissons-le.
Nous avons donc désormais une version finalisée du texte – nous attendons l’analyse vigilante du Conseil constitutionnel –, sur laquelle nous pouvons nous prononcer. Disons-le d’emblée : le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera contre.
S’agissant des recettes, notre groupe a tenté – en vain, il faut bien l’admettre – de rééquilibrer ce budget et, plus particulièrement, de proposer une fiscalité plus juste, plus équitable et plus adaptée aux activités économiques et sociales actuelles. Nos propositions de bon sens en matière de justice sociale ont tout simplement été balayées, tant par la majorité sénatoriale que par le Gouvernement.
Mes chers collègues qui siégez sur les travées de droite, pour le dire sans ambages, alors que l’urgence sociale est indéniable, en matière de recettes, vous partagez avec le Gouvernement exactement la même vision et défendez les mêmes propositions libérales.
Pourtant, si, face à l’inflation galopante, la fraternité devrait être le maître-mot de l’action publique, vous tous avez fait le choix de vous obstiner en poursuivant sur la voie du libéralisme : rejet du rétablissement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et de l’instauration de la taxation sur les superprofits, réticence à verdir la fiscalité… Où est passée la recherche du consensus et du compromis avec l’ensemble des forces républicaines ?
Il en est de même pour les dépenses. En dépit de la mise en échec systématique de nos dispositions en matière de recettes, qui vous aurait donné des marges budgétaires supplémentaires, nous avons tenu à vous faire de nouvelles propositions. Malheureusement, force est de constater que le maintien des services publics dans les territoires, notamment ruraux, n’était pas votre priorité : hôpitaux, écoles, bureaux de poste… rien de tout cela n’était au cœur de ce budget, nous le déplorons !
Votre indifférence à l’égard du terrain s’illustre aussi par le sort réservé aux collectivités territoriales : toutes alertent sur leurs difficultés de financement – elles subissent les mêmes crises que nous… Pourtant, monsieur le ministre, vous avez fait fi de l’adoption par le Sénat de la proposition socialiste d’indexer la dotation globale de fonctionnement sur l’inflation. Je ne peux pas non plus passer sous silence votre entêtement à vouloir supprimer la CVAE, pourtant sauvée, si je puis dire, par le Sénat grâce à une proposition venue de la gauche !
Finalement, vous aurez réussi l’exploit de présenter une copie qui ne satisfera aucun élu local ni aucune association représentative de ces derniers. Soulignons-le !
Dans un contexte marqué par une inflation importante, la sortie de la crise sanitaire, la guerre aux portes de l’Europe, notre pays a, je pense, besoin d’un État fort. Au contraire, votre politique est fondée sur deux principes clairs : le désarmement fiscal en matière de recettes et la contraction des interventions de l’État en matière de dépenses.
Monsieur le ministre, somme toute, si votre gouvernement prétend incarner une forme de modernité en renouvelant les modes d’exercice du pouvoir, la réalité est tout autre ! Vous défendez une politique libérale – je partage le constat dressé par Éric Bocquet –, pour ne pas dire ultralibérale ; c’est aux antipodes des besoins de notre pays et de notre population !
Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons que nous opposer à ce projet de loi de finances pour 2023. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli. (Applaudissements sur des travées des groupes CRCE et GEST.)
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les débats sur ce budget sont placés sous le signe de la contrainte et, au gré de la dizaine de recours au 49.3, des coups de force répétés !
Monsieur le ministre, vous nous parlez de « fermeté ». Oui, vous avez raison ! Elle s’exprime par cette nouvelle étape dans la confiscation du pouvoir ! Vous faites mine d’avoir gagné contre une solution différente proposée par la gauche, mais votre budget sera adopté sans avoir été voté… On ne gagne jamais contre la démocratie.
Les administrations publiques, la sécurité sociale ou les collectivités territoriales sont confrontées à un gouvernement qui fuit ses responsabilités. Ce budget marque le désengagement de l’État sur le financement de la formation continue, via le compte personnel de formation, au détriment des travailleurs, et sur le financement de l’apprentissage dans la fonction publique territoriale, au détriment des collectivités, par exemple.
En vérité, le partage de la valeur créée est sans cesse raboté et sans cesse volé aux travailleuses et aux travailleurs – en voilà un angle mort dans votre budget ! Partager la valeur, c’est pourtant accroître la contribution du capital, en mobilisant les transactions financières, les dividendes ou les bénéfices par exemple, mais c’est également s’interdire de faire payer les mesures de soutien aux ménages et aux collectivités par l’ensemble des concitoyens.
Ensuite, vous créez une fiction : vous prétendez aider ceux qui subissent l’explosion des prix de l’énergie et des denrées alimentaires, mais ce sont ceux-là même que vous faites contribuer aux 47 milliards d’euros du bouclier tarifaire ! Nous savons d’ailleurs comment ils le financent : par la baisse des droits au chômage, par l’allongement du temps de travail dans la semaine et dans leur vie professionnelle, par la baisse en euros courants de l’impôt sur le revenu des plus riches, par le rejet de l’amendement adopté pour baisser la TVA sur le transport ferroviaire.
Monsieur le ministre, votre politique ne soutient pas les plus précaires ; elle fait majoritairement des perdants !
Face aux crises systémiques, être « en responsabilité » – pour reprendre cette grande expression – aurait impliqué, selon nous, de préserver ces sentinelles de la République – ce dernier rempart – que sont les collectivités territoriales, lorsque l’État est rendu défaillant.
D’un côté, ce budget, en supprimant la CVAE, prive les collectivités des recettes de fiscalité économique, d’un autre, l’indexation de la DGF sur l’inflation, qui est pourtant érigée en priorité absolue, est amputée de 4 % en euros courants. Par ailleurs, le filet dit de sécurité est consciemment mal tissé, bien loin du bouclier indispensable pour leur permettre d’équilibrer leur budget – j’ai bien dit « équilibrer leur budget », puisque les collectivités ont cette obligation, contrairement à l’État, monsieur le ministre !
M. Éric Bocquet. Eh oui !
M. Pascal Savoldelli. Sous l’impulsion des élus locaux et de notre groupe, le Sénat avait amélioré ce filet de sécurité, mais, encore une fois, le ministre des finances l’a restreint : des milliers de communes en sont privées. C’est un signal extrêmement préoccupant que votre gouvernement envoie aux collectivités.
Les départements en pâtiront également : ils constateront que la modeste revalorisation du revenu de solidarité active (RSA) pèsera quelque 240 millions d’euros en 2023 ; d’ailleurs, le RSA est de plus en plus conditionné.
À la fin des fins – et non pas malheureusement de la faim, pour ainsi dire –, ce sont toujours les précaires qui payent, quitte à en faire des travailleurs rémunérés en deçà du salaire minimum estonien ! J’ai en effet fait ce rapide calcul et la comparaison vous plaira sans doute, monsieur le ministre.
Enfin, le Gouvernement tente de diviser les collectivités territoriales entre elles : la métropole du Grand Paris contre les établissements publics territoriaux, les communes rurales contre les communes urbaines, les départements selon leur potentiel financier, les autorités organisatrices de mobilités d’Île-de-France contre celles d’ailleurs. La concrétisation de ce projet dangereux se fait, encore une fois, au détriment des habitants, qui voient leurs services publics se dégrader, et des usagers, qui constatent une baisse de la cadence des transports publics « en même temps » – le fameux ! – qu’une hausse du passe Navigo en Île-de-France.
J’étais avec les maires du département mardi dernier pour partager leur colère : ils ont le sentiment d’être dépossédés de leurs capacités d’action. Les élus locaux sont confrontés à des choix cornéliens, puisqu’ils doivent choisir – rien de moins ! – entre fermer leurs écoles ou d’autres services publics essentiels, tels que les centres communaux d’action sociale. L’État transfère sa responsabilité aux élus locaux, qui sont pourtant privés de leur fiscalité, de leurs dotations, et ne sont pas à même de faire face à leurs dépenses d’énergie.
Votre budget traduit votre idéologie : l’argent va à l’argent ! Pour toutes ces raisons et parce que l’intérêt général n’est pas au rendez-vous, nous nous opposerons à votre projet de loi de finances. (Applaudissements sur des travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Joël Guerriau applaudit également.)
Mme Sylvie Vermeillet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après trois mois de travail en commission et trois semaines d’un examen intensif, mais attentif, en séance publique, où pas moins de 3 000 amendements ont fait l’objet de discussions, nous sommes réunis aujourd’hui pour nous prononcer sur le projet de loi de finances pour 2023 adopté en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale, après engagement par le Gouvernement de sa responsabilité sur le fondement de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.
Nous vous le disons clairement, monsieur le ministre : nous regrettons qu’un aussi grand nombre de mesures adoptées par le Sénat n’aient pas été prises en compte par l’Assemblée nationale et le Gouvernement dans la version finale. Bruno Le Maire nous avait indiqué en ouverture des débats être « à l’euro près ». Visiblement, il n’est pas « au milliard près »…
Plusieurs mesures volontaristes de rationalisation des niches fiscales, en d’autres termes d’optimisation des ressources publiques, adoptées sur l’initiative du groupe Union Centriste, ont ainsi été balayées d’un revers de main par l’exécutif, sans la moindre explication, ni même parfois le moindre chiffrage de la part de Bercy.
Les crises sont devenues omniprésentes. Il nous faut composer avec elles. Leur multiplication a pour inéluctable conséquence de détériorer la situation de nos finances publiques. Pourtant, la Banque centrale européenne vient de resserrer le robinet budgétaire, si je puis dire, et l’augmentation des taux d’intérêt sur les marchés financiers nous invite collectivement à être responsables.
C’est dès 2023 qu’il aurait fallu engager les comptes de l’État sur la voie du redressement. Plusieurs amendements de notre groupe, qui une fois de plus aura eu le sens des responsabilités, y auraient contribué.
Monsieur le ministre, nous vous l’avons dit à l’issue du vote sur la première partie du projet de loi de finances et nous vous le répétons aujourd’hui : nous regrettons de ne pas être parvenus à élargir la contribution exceptionnelle de solidarité à l’ensemble des secteurs économiques, au-delà du seul secteur de l’énergie. S’il est parfaitement légitime que la collectivité publique vienne au chevet des entreprises lorsqu’elles sont en difficulté, il est non moins légitime que ces mêmes entreprises, lorsque leur santé est meilleure, concourent à l’effort collectif d’assainissement des comptes publics.
M. Vincent Delahaye. Tout à fait !
Mme Sylvie Vermeillet. De même, la suppression de l’article 5, qui aurait sauvé la CVAE perçue par le bloc communal et les départements, aurait garanti à la sphère publique de sauvegarder immédiatement près de 4 milliards d’euros de recettes fiscales, tout en préservant l’autonomie financière des collectivités locales, malmenée depuis de trop nombreuses années.
M. Patrick Kanner. Eh oui…
Mme Sylvie Vermeillet. Parmi les mesures adoptées pour soutenir nos collectivités territoriales figurait la réintégration dans le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) des opérations d’aménagement et d’agencement, qui y étaient devenues inéligibles du fait de la réforme de l’automatisation. Nous avions volontairement laissé de côté les opérations d’acquisition, par souci, là encore, d’en limiter le coût pour les finances publiques. Le Gouvernement n’a, hélas ! pas conservé la disposition du Sénat, pourtant légitime et nécessaire au regard des investissements élevés que les collectivités ont engagés.
Par ailleurs, nous avions substantiellement simplifié et renforcé le filet de sécurité, pour le rendre accessible à un plus grand nombre de collectivités touchées par la crise énergétique, afin de leur permettre d’aborder plus sereinement les échéances à venir. Le Gouvernement lui-même semblait admettre la trop grande complexité des critères retenus dans le dispositif au titre de l’année 2022. Pour autant, que fait-il pour l’année 2023 après avoir recouru au 49.3 ? Il réintroduit ces mêmes critères, au détriment de l’intelligibilité du mécanisme, donc au détriment des élus locaux.
M. Guy Benarroche. C’est vrai.
Mme Sylvie Vermeillet. Monsieur le ministre, malgré ces griefs, nous tenons à vous remercier des discussions toujours positives et constructives que nous avons eues, tout au long des débats, ainsi que de votre disponibilité et de vos prises de position argumentées.
Mme Sylvie Vermeillet. En revanche, nous sommes nombreux à déplorer l’absence répétée, à l’exception de l’ouverture de la discussion générale initiale, du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur des sujets aussi cruciaux pour l’avenir du pays. Nous pensions que la configuration politique actuelle pouvait contribuer, à ses yeux, à la revalorisation du rôle du Sénat.
Sans surprise, la commission mixte paritaire qui s’est réunie le 6 décembre dernier n’a pas été conclusive. Ainsi que l’a rappelé le rapporteur général, un trop grand nombre d’articles restaient en discussion.
Compte tenu non seulement de l’échec de la commission mixte paritaire, mais également des délais prévus par la Constitution qui rendent impossible l’examen complet du texte en nouvelle lecture, le groupe Union Centriste adoptera quasi unanimement la motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi qu’au banc des commissions. – MM. Arnaud Bazin et Marc Laménie applaudissent également.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.
Question préalable
M. le président. Je suis saisi, par M. Husson, au nom de la commission, d’une motion n° I-2.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement du Sénat ;
Considérant que, du point de vue du scénario macroéconomique sur lequel repose le projet de loi de finances, il apparaît que la prévision de croissance du produit intérieur brut (PIB) pour 2023, retenue à 1 %, paraît bien trop optimiste, au regard des perspectives du consensus des économistes, mais aussi des propos du Président de la République lui-même, et ne tient pas compte des récents développements conjoncturels comme le ralentissement de l’activité au troisième trimestre 2022, la hausse des taux directeurs de la Banque centrale européenne ou encore la prévision de récession en Allemagne et de stagnation de l’activité en zone euro ;
Considérant qu’alors que les crises sanitaire et énergétique s’enchainent voire se superposent, le nécessaire soutien aux ménages et aux entreprises ainsi que l’affectation des moyens indispensables au bon fonctionnement des services publics doivent s’accompagner d’un effort notable pour maîtriser la dépense ordinaire des administrations publiques ;
Considérant qu’au contraire, le Gouvernement fait le choix d’identifier les politiques publiques sur lesquelles il souhaite augmenter les crédits sans indiquer sur quelles missions des économies devraient parallèlement être réalisées dans le budget de l’État, conduisant ainsi à des efforts trop restreints pour redresser les comptes publics et pour retrouver à terme des marges de manœuvre budgétaires utiles pour répondre le plus efficacement possible à toute nouvelle crise ;
Considérant que, dès lors, les niveaux du déficit public et de la dette publique demeurent particulièrement élevés et extrêmement préoccupants, alors que la hausse des taux d’intérêt pourrait rapidement devenir insoutenable pour la France ;
Considérant que le rétablissement de l’article 5 dans le texte du projet de loi, qui supprime la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et permet donc de réduire le poids des impôts de production pesant sur les entreprises, ne s’accompagne toujours pas de meilleures garanties quant aux modalités de compensation prévues pour les collectivités territoriales qui se voient une nouvelle fois privées, dans un contexte déjà difficile, d’une ressource fiscale locale et craignent d’être victimes de la perte de lien entre leurs ressources et le dynamisme économique de leurs territoires ;
Considérant qu’il est regrettable que l’Assemblée nationale soit également revenue sur les mesures adoptées par le Sénat pour soutenir les petites et moyennes entreprises, en particulier le rehaussement du plafond de leurs bénéfices soumis au taux réduit d’impôt sur les sociétés en tenant compte de l’inflation, ou encore la prorogation, pour une année supplémentaire, et le renforcement du crédit d’impôt pour les travaux de rénovation énergétique de leurs bâtiments à usage tertiaire ;
Considérant que, s’agissant des finances locales, il convient de se féliciter du fait que le texte considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture a confirmé la suppression opérée par le Sénat de l’article 40 quater qui réintroduisait le dispositif de contractualisation avec les collectivités territoriales pourtant rejeté par les deux assemblées lors de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 ;
Considérant qu’en revanche, s’il faut se réjouir de la reprise, même partielle, de certains apports du Sénat s’agissant du « filet de sécurité » mis en place pour l’année 2023 au bénéfice des collectivités territoriales, ne peut qu’être déploré le maintien dans le texte considéré comme adopté par l’Assemblée nationale d’un critère de perte d’épargne brute pour déterminer l’éligibilité au dispositif, dans la mesure où il est très fortement excluant et générateur d’importants effets de seuil et dès lors que les modalités de calcul de la dotation mettent déjà en relation la différence entre la progression des dépenses et celle des recettes ;
Considérant qu’il est également fort regrettable que d’autres mesures de soutien aux collectivités territoriales n’aient pas été conservées, en particulier l’intégration des opérations d’aménagement et d’agencement dans le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), devenues inéligibles avec la réforme de l’automatisation ;
Considérant qu’il convient de saluer le fait que le texte considéré comme adopté par l’Assemblée nationale reprenne la position du Sénat en conservant, sous réserve de divers aménagements, l’essentiel des modifications apportées au dispositif proposé par le Gouvernement s’agissant de la contribution sur la rente inframarginale applicable à la production d’électricité ;
Considérant que, pour autant, même si le Sénat a fait preuve d’un sens aigu des responsabilités en votant les mesures proposées par le Gouvernement pour contrer la hausse des prix de l’énergie et faire contribuer les producteurs d’énergie comme le prévoient les textes européens, il n’en demeure pas moins que les dispositifs proposés n’ont cessé d’évoluer, de façon majeure, au cours de la navette parlementaire, sans que les parlementaires disposent d’études d’impact particulièrement solides, ce qui nécessitera une attention particulière dans leur mise en œuvre ;
Considérant qu’alors que le Sénat avait adopté plusieurs amendements de sincérisation budgétaire, notamment s’agissant des crédits non répartis, il paraît très critiquable que le projet de loi tel que considéré comme adopté par l’Assemblée nationale revienne sur toutes ces mesures et confirme bien que le Gouvernement s’était ménagé une confortable « réserve de crédits » au sein de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles puisqu’il la réduit dès la nouvelle lecture pour couvrir, à hauteur de 700 millions d’euros, la nouvelle « aide aux carburants » de 100 euros prévue au sein de la mission « écologie, développement et mobilité durables » ;
Considérant qu’il convient de saluer la conservation, en nouvelle lecture, de plusieurs apports du Sénat de première lecture, à l’instar de l’exonération de malus pour les véhicules des services départementaux d’incendie et de secours, des prolongations de dépenses fiscales essentielles pour le soutien économique outre-mer, des mesures destinées au financement pour de nouvelles lignes à grande vitesse (LGV) ou encore de la traduction législative de plusieurs recommandations de la mission d’information de la commission des finances relative à la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales ;
Considérant qu’au contraire, il n’est pas compréhensible que la majorité gouvernementale n’ait pas rejoint le Sénat sur beaucoup des amendements qu’il a adoptés à une très grande majorité voire à la quasi-unanimité, par exemple lorsqu’il souhaitait, dans un contexte de hausse des taux d’intérêt et donc de durcissement des conditions d’emprunt immobilier, soutenir l’accession à la propriété des primo-accédants les plus modestes, en relevant le plafond légal du prêt à taux zéro (PTZ) ;
Considérant que l’Assemblée nationale a également rétabli plusieurs articles qui ne relèvent pas du domaine des lois de finances selon la jurisprudence établie par le Conseil constitutionnel ;
Considérant enfin que le Sénat a rejeté les crédits des missions « Administration générale et territoriale de l’État », « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », « Cohésion des territoires » et « Immigration, asile et intégration » dont les crédits ont été rétablis par l’Assemblée nationale sans réponse aux objections qui avaient été soulevées ;
Considérant, en conséquence, que l’examen en nouvelle lecture par le Sénat de l’ensemble des articles restant en discussion du projet de loi de finances pour 2023 ne conduirait vraisemblablement pas à faire évoluer le texte ;
Le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture n° 203 (2022-2023).
La parole est à M. le rapporteur général, pour la motion.
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Mes chers collègues, j’éviterai de jouer les prolongations – pour employer une expression du moment (Sourires.) –, puisqu’à ce stade elles sont plutôt inutiles… J’éviterai également de me répéter, même si répétition vaut mieux que contradiction.
La question préalable a pour effet d’écourter le débat de manière brutale, mais, compte tenu des contraintes juridiques inhérentes à l’examen du projet de loi de finances, il eût fallu que nous trouvions d’ici à demain minuit un texte qui puisse convenir à notre assemblée, avant de transmettre notre version à l’Assemblée nationale.
Monsieur le ministre, il faut, je crois, veiller à être cohérent en matière budgétaire. Le Sénat a tracé des perspectives et ouvert la route de la responsabilité ainsi que de l’effort de maîtrise et de ciblage de la dépense, en concentrant celle-ci dans certains domaines.
Vous avez considéré que ces efforts étaient inutiles, puisque le Gouvernement n’en a tenu aucun compte. C’est votre responsabilité, mais sachez que je serai attentif aux déclarations qui indiqueraient qu’aucune piste d’économies n’a été trouvée, car nous avons ici même proposé plus de 4 milliards d’euros d’économies et avons dessiné une trajectoire, conformément à nos engagements. D’ailleurs, nous avons échoué à rapprocher celle-ci de celle qui a été prévue par le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.
Monsieur le ministre, il faut en finir avec le « quoi qu’il en coûte », dites-vous. Dont acte, mais prenez vos responsabilités ! La responsabilité qui vous a été confiée par la réélection du Président de la République, c’est de travailler pour la France, tout en prenant en compte les deux assemblées, qui reflètent les choix des Français.
À l’Assemblée nationale, vous utilisez le 49.3 – c’est votre droit, garanti par la Constitution – ; ici, vous menez une opération fort agréable d’écoute – les débats se passent bien –, pour ne finalement retenir que des amendements de moindre portée et non ceux qui portent sur les enjeux majeurs. Je pense à cette question centrale, à côté de laquelle vous êtes passé : le filet de sécurité à destination des collectivités territoriales ! Je fais le pari que nous nous retrouverons dès la mi-2023 pour en corriger les insuffisances. En effet, dès le début de l’année prochaine, les conséquences de votre filet de sécurité face aux contraintes énergétiques pèseront lourdement sur les outils de production que sont nos entreprises !
Monsieur le ministre, le dispositif dont nous avons débattu n’est pas encore stabilisé – amortisseur électricité, filet de sécurité, bouclier tarifaire… Aussi, nous en suivrons la mise en œuvre, mois après mois – nous avons votre accord de principe sur ce point, me semble-t-il.
Les élus des territoires doivent être aux côtés des acteurs économiques, car la France ne sortira pas de la crise, si nous ne veillons à ce que notre économie soit aussi dynamique que possible.
Je rappellerai, au moment où nous en terminons l’examen, que ce budget a été placé par le ministre des finances sous le signe de « l’euro près ». Résultat : nous ne constatons rien d’autre qu’une dérive supplémentaire, dont le montant est estimé à 6 milliards ou 7 milliards d’euros !
Évidemment, je comprends qu’il soit difficile de faire des économies. Alors que nous avons proposé pour plus de 4 milliards d’euros d’économies, vous ajoutez 6 milliards d’euros de dépenses supplémentaires à votre copie initiale. Ce n’est plus le « quoi qu’il en coûte », pas plus que le « à l’euro près » : ce n’est que la poursuite d’une dérive budgétaire qui ne manque pas de nous inquiéter, au moment où la dette s’accroît et où les taux d’intérêt augmentent, ce qui ne sera pas sans conséquence sur la dette de la France. Cette dette financière et budgétaire pèse sur tous les Français et s’ajoute à une dette écologique et climatique préoccupante pour chacun d’entre nous.
Voilà ce qui explique cette motion tendant à opposer la question préalable, qui viendra abréger la situation difficile dans laquelle le Gouvernement s’est mis au cours de la discussion parlementaire.
M. le président. Personne ne demande la parole contre la motion ?…
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement émet évidemment un avis défavorable sur cette motion.
Je tiens à exprimer ma déception, puisque j’aurais souhaité qu’avec cette nouvelle lecture du projet de loi de finances nous reprenions ensemble la discussion et le travail, pour nous plonger à nouveau dans le fond des sujets, débattre, parfois projet contre projet, et échanger.
Cela ne sera pas possible, puisque la majorité sénatoriale votera cette motion. J’observerai les votes des groupes politiques qui nous ont reproché d’abréger les débats à l’Assemblée nationale, avec le 49.3, et qui abrègent, de fait, les débats au Sénat en votant la question préalable.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. Rien ne les arrête ! (M. André Gattolin s’exclame.)
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Personnellement, je suis favorable au débat et à la discussion.
Entre le début et la fin de cet examen budgétaire, il y a des dépenses supplémentaires, c’est vrai. Encore heureux ! Cela prouve que nous avons tenu compte des propositions et des ajouts votés à l’Assemblée nationale et au Sénat. Sur ces 7 milliards d’euros supplémentaires que vous avez cités, 5,5 milliards d’euros iront aux collectivités locales. Vous ne pouvez pas nous reprocher, d’un côté, de ne pas suffisamment les soutenir et, de l’autre, quand nous les soutenons, de dépenser trop.
Le plus important est que l’examen de ce projet de loi de finances, qui a débuté à l’Assemblée nationale avec un déficit de 5 % pour 2023, s’achève avec un déficit de 5 %. Entre-temps, des dépenses supplémentaires ont été votées ; elles sont financées par l’augmentation des recettes liées à la taxation des superprofits que nous avons décidée à l’échelon européen. (M. Pascal Savoldelli manifeste sa satisfaction en levant le poing.)
Mme Sylvie Vermeillet. Très bien !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Oui, j’ose les termes de taxation des superprofits ! (Exclamations amusées.)
M. Éric Bocquet. Il ne savait pas ce que c’était !
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Comme quoi, on progresse tous et l’on évolue. Cet été, nous ne parlions pas forcément en ces termes, mais passer du temps au Sénat forge un homme et le fait changer. (Sourires sur les travées du groupe CRCE.)
Oui, ce budget inclut 11 milliards d’euros de recettes supplémentaires liées à la taxation des superprofits du secteur énergétique grâce au dispositif décidé à l’échelon européen. Ainsi, nous finançons de nouvelles mesures pour la protection des Français.
C’est vrai, nous n’avons pas retenu un certain nombre de propositions d’économies issues du texte adopté par la majorité sénatoriale, qu’il s’agisse de la suppression du ministère de l’agriculture, de celle du ministère de la cohésion des territoires…
M. Vincent Segouin. Très drôle…
M. Gabriel Attal, ministre délégué. … ou de celle de l’administration territoriale de l’État, alors que les Français ont besoin de refaire leur carte d’identité ou leur passeport.
C’est vrai, nous n’avons pas retenu la limitation de la prise en charge du bonus écologique et de la prime à la conversion pour les véhicules électriques, qui a donné lieu à un vrai et beau débat. (M. Pierre Cuypers s’exclame.) Sur ce sujet, la majorité sénatoriale a adopté une position très marquée et a particulièrement insisté sur le fait qu’aujourd’hui – nous le déplorons tous – ce soutien financier public va à une industrie qui n’est ni française ni européenne, mais qui est plutôt chinoise, parce que nous ne produisons pas suffisamment de véhicules électriques.
Il ne vous aura pas échappé que nous avons adopté un plan massif pour être en mesure de produire des millions de véhicules électriques d’ici à la fin du quinquennat et que deux gigafactories de batteries électriques ont ouvert dans le nord de la France. Tout le monde peut le constater.
En revanche, nous avons conservé des économies supplémentaires sur la question de la formation – il s’agit là d’une orientation défendue par le Sénat. Monsieur Savoldelli, vous ne pouvez pas soutenir que les économies sur France Compétences, via le compte personnel de formation (CPF), mettent à bas la formation professionnelle dans notre pays, alors même que le budget du ministère de l’emploi et de la formation professionnelle augmente de 6,7 milliards d’euros ! Dans ces conditions, qu’en serait-il si l’on s’attaquait à la formation professionnelle ?
Non, nous ne nous attaquons pas à la formation professionnelle ; au contraire, les crédits augmentent massivement, mais nous devons faire des économies structurelles, notamment sur France Compétences. Ce débat est récurrent au cours de nos discussions budgétaires.
Avec ce texte, nous sommes parvenus à résoudre une équation évidemment complexe : tenir nos comptes et maintenir notre objectif de déficit à 5 %, tout en accompagnant les Français, les entreprises et les collectivités locales pour faire face au choc de l’inflation et de la hausse des prix de l’énergie et en gardant des moyens pour investir dans le réarmement du service public et la transition écologique.
Ce budget, tel qu’il est issu de l’Assemblée nationale, y parvient. Nous aurions pu en débattre davantage dans les jours qui viennent, mais il était important de le rappeler maintenant. (MM. André Gattolin et Pierre Louault applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.
M. Joël Guerriau. J’entends la frustration exprimée avec force et conviction par mes collègues concernant les amendements qui n’ont pas été retenus. Je la partage, notamment pour les mesures qui ont été adoptées à l’unanimité. C’est pourquoi il me semble essentiel de poursuivre le débat, en mettant l’accent sur les enjeux qui méritent d’être davantage expliqués et défendus.
Je ne comprends donc pas ce qui motive le dépôt de cette motion, à savoir considérer que prolonger cette discussion nous conduirait vraisemblablement à ne pas faire évoluer le texte. Je n’en suis pas certain. D’ailleurs, ce paradoxe, qui consiste à exprimer cette frustration de ne pouvoir être pleinement entendu tout en se privant de pouvoir l’être, m’interroge.
Après la Seconde Guerre mondiale, le Conseil de la République a duré douze ans, pendant lesquels la Haute Assemblée a été totalement privée de son pouvoir législatif. Il a fallu attendre 1954 pour que la situation revienne à la normale, grâce à deux sénateurs, Gaston Monnerville et Michel Debré, qui se sont battus, pas à pas, pour que le Sénat retrouve la vocation législative qui est la sienne aujourd’hui. (M. Alain Richard approuve.)
J’ai le sentiment que nous faisons marche arrière. En votant cette motion, nous allons nous priver de notre pouvoir et de l’expression libre qui est la nôtre – certes, le résultat ne serait peut-être pas à la hauteur de nos attentes, mais au moins aurions-nous un résultat. Voilà ce que nous devons attendre du Parlement.
Je regrette vraiment que nous renoncions, encore une fois, à une nouvelle lecture, alors que nous avons acquis cette prérogative législative très difficilement. Pouvoir débattre, c’est notre dignité.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Joël Guerriau. Voilà la raison pour laquelle les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires, unanimement, voteront contre cette motion tendant à opposer la question préalable. (M. Alain Richard applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, j’avais demandé à prendre la parole contre la motion, à la suite de M. le rapporteur général, qui est intervenu pour. Dans ce cas, l’orateur dispose d’un temps de parole de dix minutes, contre deux minutes lors d’une explication de vote.
M. le président. Monsieur Delahaye, je suis sûr que votre synthèse sera remarquable. (Sourires.)
M. Alain Richard. Il est impitoyable ! (Nouveaux sourires.)
M. Vincent Delahaye. Au sein du groupe Union Centriste, nous étions quelques-uns à considérer qu’il fallait continuer à discuter, même si M. le ministre nous écoute, mais ne nous entend pas vraiment. Nous aurions aimé que soient retenues un plus grand nombre de nos propositions, notamment des mesures plus intéressantes que celles qu’il a retenues jusqu’à présent. Pour ce faire, il aurait peut-être fallu faire davantage preuve de conviction, ce qui demande du temps.
Monsieur le ministre, je m’inscris en faux contre vos propos : les comptes ne sont absolument pas tenus ! Avec 165 milliards d’euros de déficit et 270 milliards d’euros de dette nouvelle, cette année, ce n’est pas le cas.
Vous auriez diminué le déficit de 20 milliards d’euros, j’aurais reconnu que vous alliez dans la bonne direction. Présentement, nous en sommes loin.
Le niveau de la dette reste très élevé, alors que nous sommes sortis des années exceptionnelles de crise sanitaire au cours desquelles, à mon avis, nous avons aidé de façon trop large. Une fois passée cette période, nous devrions revenir au niveau antérieur du déficit, qui est déjà élevé, puisqu’il est de l’ordre de 100 milliards d’euros, contre 165 milliards d’euros aujourd’hui.
Nous sommes déçus que nos propositions n’aient pas été entendues. À l’avenir, il faudra oser envisager une nouvelle lecture, en sélectionnant un nombre de sujets limités – car il sera impossible de tous les embrasser –, sur lesquels nous souhaiterons appeler l’attention du Gouvernement et des médias. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – MM. Jean-Claude Requier et Alain Richard applaudissent également.)
Monsieur le président, même si je n’ai pas disposé du temps de parole que j’aurais souhaité, je vous souhaite un joyeux Noël ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Breuiller, pour explication de vote.
M. Daniel Breuiller. Il toujours difficile de se quitter, après des moments si agréables. (Sourires.)
Comme vous, monsieur le ministre, j’aime le débat, parfois jusque dans la nuit, mais j’ai parfois l’impression que continuer à débattre ne permet ni de convaincre ni de changer la position du Gouvernement, lequel reste sourd à nos amendements, même s’ils émanent de personnalités politiques proches de sa sensibilité.
Pour notre part, nous ne voterons pas cette motion tendant à opposer la question préalable, parce que nous ne partageons pas nombre de ses attendus. Comme je l’ai souligné dans la discussion générale, nous nous sentons un peu comme les protagonistes d’une comédie burlesque sur l’inutilité parlementaire, dont, au fond, le dernier acte sera celui du vote de cette motion.
Puisque nous sommes au théâtre, citons Marcel Pagnol : « La pièce était si mauvaise que les acteurs eux-mêmes partaient avant la fin. » (M. Alain Richard sourit.)
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le ministre, il ne faut pas se mentir : les délais constitutionnels accordent vingt jours de débat au Sénat, ce qui nous impose, « quoi qu’il en coûte » – je reprends à mon tour cette formule –, de mettre fin à nos travaux vendredi soir. De ce point de vue, une réforme s’impose, mais je ferme cette parenthèse.
Lorsque vous nous demandez d’être cohérents, je suppose que vous ne vous adressez pas à mon groupe. Au début de l’examen de ce texte, nous avons déposé une motion tendant à opposer la question préalable, car nous savions déjà quel était votre préalable : le 49.3.
Parlons du sérieux de nos travaux : franchement et sans être polémique plus que de raison, croyez-vous que la biodiversité soit une affaire de loto ? Pendant le projet de loi de finances comme sur d’autres textes – le projet de loi de financement de la sécurité sociale ou la réforme de l’assurance chômage –, vous n’avez cessé de jouer au loto, en tirant dix fois le même numéro : 49.3 ! Au loto, ce n’est pas possible, et ici, ce n’est pas la loterie parlementaire. On ne joue pas ainsi.
Enfin, sur cette motion, nous nous abstiendrons, car ce n’est tout de même pas aux communistes, avec d’autres sénateurs de gauche, d’arbitrer le jeu hégémonique des droites sur les droites ! Au-delà des questions budgétaires et fiscales, c’est en effet bien cela qui est en jeu : savoir qui exerce l’hégémonie sur les valeurs de droite et sur l’idéologie libérale. Nous vous laissons en découdre et ne comptez pas sur nous pour participer à ce jeu de dupes.
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera cette motion, non pas parce que nous serions devenus des amis indéfectibles de la droite sénatoriale, mais parce que nous voulons nous associer à l’issue de cette journée des dupes, duperie qui a commencé au début de l’examen de ce budget.
Monsieur le ministre, vous êtes pris en tenaille : vous proposez un déficit budgétaire qui est énorme et vous ne vous donnez pas les moyens de le combler. Accompagnés par d’autres groupes, nous vous avons fait des propositions, comme taxer les superdividendes et les superprofits et, ainsi, augmenter les recettes.
Bien au contraire, vous diminuez les recettes de l’État et vous creusez le déficit, fidèle à votre dogme, qu’Olivier Véran a présenté voilà quelques semaines lors d’une émission de radio : « Nous avons un dogme, celui du moins d’impôts. » L’impôt n’est ni une injure ni un gros mot, monsieur le ministre, quand il est bien utilisé et qu’il permet de répartir correctement la richesse produite par les Français.
La suppression de la taxe d’habitation, de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), même en deux ans, et de la redevance audiovisuelle, alors que vous devez compenser ces baisses de recettes pour les collectivités, cela représente 35 milliards d’euros de recettes en moins dans les caisses de l’État.
Cela étant, vous ne pouvez pas vous en sortir, et ce sont toujours les mêmes qui paient, comme ils paieront demain la réforme des retraites. J’étais ce matin avec Mme Borne et les ministres Franck Riester et Olivier Dussopt, nous avons compris la volonté qui est la vôtre : gagner 10 milliards d’euros. (M. le ministre délégué acquiesce.) C’est une peccadille à l’aune des 334 milliards d’euros de déficit de l’État !
Aujourd’hui, par notre vote, nous défendons ceux qui ont besoin d’un État solidaire.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, par principe, le groupe RDSE vote contre toute motion tendant à opposer la question préalable. Même s’il en comprend la finalité et en attend le résultat, il votera donc contre celle-ci.
Revenons sur les durées d’examen des budgets.
Sous la IVe République, temps d’instabilité ministérielle, souvent, les budgets n’étaient pas votés à temps. Les huissiers arrêtaient alors les pendules à minuit, jusqu’à ce qu’une solution soit trouvée. J’espère que nous n’aurons pas à arrêter les pendules et que nous partirons d’ici avec un budget voté.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix la motion n° I-2, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de finances.
Je rappelle également que le Gouvernement a émis un avis défavorable.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 108 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 314 |
Pour l’adoption | 260 |
Contre | 54 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, le projet de loi de finances pour 2023 est rejeté.
7
Mise au point au sujet d’un vote
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet.
Mme Sylvie Vermeillet. Lors du scrutin public n° 29 de la séance du 4 novembre 2022 portant sur l’ensemble du projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, Mme Nathalie Goulet souhaitait voter contre.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin.
8
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 10 janvier 2023 :
À quatorze heures trente et le soir :
Débat sur la gestion de l’eau dans une perspective économique et écologique ;
Débat sur l’instauration des zones à faible émission (ZFE) ;
Débat sur le thème « Mieux rémunérer le travail en France : la nécessité d’un Grenelle sur les salaires » ;
Débat sur les conclusions du rapport : « Faire de la RSE une ambition et un atout pour chaque entreprise ».
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à douze heures quarante.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER