M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Franck Montaugé. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est à l’aune des retards et des manquements graves – condamnés pour certains d’entre eux – que les moyens budgétaires qui nous sont proposés doivent être appréciés.
Marquent-ils, avec le passé, une rupture de l’action gouvernementale à la hauteur de la profondeur des transitions à mener ? Visiblement non, quand on constate, au terme d’une année 2022 sans précédent du point de vue des dérèglements climatiques, que ce budget est en réalité la reconduction du précédent.
Correction faite de l’inflation de 2023, qui est estimée – hypothèse basse – à 5 %, les quelque 60 milliards d’euros de la mission correspondent, en euros constants, à une augmentation de 2 %.
Si l’on s’en tient aux programmes 113, 159 et 181, l’augmentation faciale de 3,2 % est en réalité une baisse réelle de la capacité d’intervention publique de près de 2 %. Tout cela n’est pas, et de loin, à la hauteur des enjeux et de l’urgence climato-environnementale.
Dans le cadre du programme 113, « Paysages, eau et biodiversité », je redis que le Varenne de l’eau est inabouti et que les préconisations en matière de projets de territoire de gestion de l’eau (PTGE) doivent être mises en œuvre.
Au périmètre des bassins ou des captages, l’association de tous les usagers à la gestion contractuelle de la ressource et des usages est indispensable. Agriculture, biodiversité et sécurité doivent être conciliées.
De façon plus générale, nous devons revenir au principe de l’eau qui va à l’eau. Il est temps de supprimer le plafond mordant et d’affecter les 2,8 milliards d’euros de redevance prélevés aux agences de l’eau pour aider les collectivités et leurs syndicats à améliorer rapidement le rendement des réseaux, les milieux aquatiques et les dispositifs de protection contre les inondations, ces dernières étant amenées, hélas !, à se produire à une fréquence élevée.
Les maires sont aussi très inquiets de la mise en œuvre du « zéro artificialisation nette », dont je note, monsieur le ministre, que vous avez pris la mesure des faiblesses ou des difficultés.
Je regrette que, en première partie du budget, vous ayez refusé de donner aux communes les moyens de travailler sur les dents creuses ou sur la continuité de l’habitat des rues des villages. Il y a là, vous le savez, un potentiel d’accueil de nouveaux habitants. Le fonds vert de 2 milliards d’euros que vous prévoyez de créer dans ce budget participe de cet esprit, mais il se limite aux espaces publics.
Pour terminer, j’aborderai la réponse problématique que le Gouvernement donne à la flambée des prix de l’énergie. Monsieur le ministre, vous mettez en œuvre un bouclier tarifaire de 45 milliards d’euros, qui coûtera, net des reversements provenant des énergies renouvelables, 20 milliards d’euros.
Les dispositifs sont complexes et insuffisants pour les Français en difficulté, tandis que les règles d’éligibilité ont des effets de bord qui mettent en situation intenable des maires et des présidents d’intercommunalités, par ailleurs rigoureux dans leur gestion.
Vous devez amplifier le chèque énergie et faciliter le retour des collectivités aux tarifs réglementés, notamment en augmentant la puissance des contrats, qui sont aujourd’hui plafonnés à 36 kilovolts-ampères.
La loi d’accélération de la production d’énergies renouvelables doit aussi s’inscrire dans une planification écologique globale, dont il nous faut pouvoir, en tant que parlementaires, évaluer concrètement la cohérence et l’efficacité de mise en œuvre.
Enfin, nous sommes très inquiets des effets de l’envolée des prix de l’énergie sur la compétitivité de nos filières industrielles. On voit bien que le Président de la République peine à se faire entendre par les États-Unis d’Amérique sur la question du protectionnisme commercial.
Quelles sont, monsieur le ministre, vos propositions pour restructurer le marché européen de l’électricité, dont nous voyons aujourd’hui les limites ?
M. le président. La parole est à Mme Denise Saint-Pé. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Denise Saint-Pé. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce mercredi, Météo-France annonçait que l’année 2022 était la plus chaude jamais mesurée en France.
Autrement dit, le changement climatique n’est pas à venir, il est déjà en cours. Ce rappel me semble bienvenu, alors que nous devons examiner les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2023.
Malheureusement, en dépit d’une détermination louable en la matière, le Gouvernement se trouve devant une équation quasi insoluble : il doit mener la transition écologique tambour battant, sans compromettre des finances fragilisées par un endettement record, tout en s’assurant de ne laisser personne sur le bord de la route.
De fait, en caricaturant un peu, ces crédits retranscrivent une conciliation acrobatique entre le besoin d’éviter la fin du monde, tout en permettant à nos concitoyens de vivre ou, pour les plus précaires d’entre eux, de survivre, jusqu’à la fin du mois.
Il ne s’agit pas de remettre en cause le bouclier tarifaire ou l’amortisseur électricité. Ces mesures sont nécessaires, en ce qu’elles permettent à nos ménages, nos entreprises et nos collectivités de lutter comme ils le peuvent contre une hausse effrénée des prix de l’énergie.
Néanmoins, au vu du coût vertigineux de ces dispositifs, il faut se féliciter que les compensations habituellement versées par l’État aux producteurs d’énergies renouvelables se soient muées en recettes exceptionnelles, permettant ainsi d’en financer la plus grande partie.
Cela illustre l’intérêt d’accélérer la production des énergies renouvelables en France et démontre toute la pertinence du projet de loi récemment voté par le Sénat, qui va dans ce sens.
Le chèque énergie est une mesure essentielle pour protéger les ménages les plus fragiles. Il a nécessité en 2022 l’ouverture de nouveaux crédits, pour un coût total de près de 2,9 milliards d’euros. En comparaison, 795 millions d’euros sont prévus en crédits de paiement pour 2023. Je crains que cela ne suffise pas, mais j’espère de tout cœur que l’avenir me donnera tort.
À en croire les enquêtes de satisfaction, le dispositif MaPrimeRénov’ a visiblement trouvé son public. Je m’interroge, toutefois, sur son efficacité. En effet, d’après un rapport de la Cour des comptes de mars 2022, seuls 2 100 logements sont sortis en 2021 du statut de « passoire thermique », pour un objectif de 80 000.
Il m’apparaît par conséquent impératif d’augmenter le taux de rénovations globales, bien plus performantes d’un point de vue énergétique que les rénovations monogestes, afin que MaPrimeRénov’ soit à la hauteur des ambitions qui lui sont assignées.
Enfin, je tiens à saluer vos efforts, monsieur le ministre, pour stabiliser les effectifs de votre ministère et des agences placées sous votre autorité. Au vu des défis à relever, il était effectivement vital de mettre fin aux réductions de personnel.
C’est pourquoi, comme l’a déjà annoncé le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable Jean-François Longeot, le groupe Union Centriste votera en faveur des crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Bruno Belin applaudit également.)
M. Emmanuel Capus. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nassimah Dindar applaudit également.)
M. Jean-Claude Anglars. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, les 22 milliards d’euros de crédits de paiement qui sont demandés au titre de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » en 2023 montrent à quel point l’écologie est devenue le référentiel majeur des politiques publiques.
Des transports aériens, ferroviaires, fluviaux et maritimes à la reprise de plusieurs dispositifs du plan de relance, en passant par la politique de l’eau et de la biodiversité, le champ d’action de cette mission est d’ailleurs si vaste que le rattachement à l’écologie de certains secteurs interpelle.
Toute politique publique a-t-elle vocation à être renouvelable, à être « en transition » et enfin à être évaluée au regard de sa performance énergétique ?
Ces objectifs peuvent-ils être simplement dupliqués uniformément sur tous les territoires ? Rurales, urbaines, périurbaines, denses ou très peu denses, les communes n’ont-elles pas des spécificités qui expliquent que les modes de vie et les préoccupations de leurs habitants diffèrent ?
Je me permets ces interrogations, tant il me semble que ce budget révèle une conception de l’écologie trop souvent dogmatique et étatiste. Loin du pragmatisme et du bon sens nécessaires pour répondre aux difficultés locales et les plus éloignées des métropoles, le budget de cette mission comporte plusieurs lacunes, que les rapporteurs, dont je salue le travail, ont déjà soulignées.
C’est le cas notamment de l’abondement du fonds vert, qui doit participer prioritairement à la sobriété foncière si nous voulons réussir cette politique. Et je passe volontairement sous silence la question des ZAN.
Les conséquences des choix du Gouvernement sur les mobilités durables sont aussi négatives quand écologie et industrie ne sont pas conciliées.
Les effets pervers de la stratégie gouvernementale en matière de transition écologique du secteur automobile continuent d’apparaître. Vous me permettrez, madame Pannier-Runacher, de citer l’abandon du moteur thermique, qui a déjà produit des conséquences désastreuses sur les bassins d’emploi de l’automobile diesel, avec, par exemple, la fermeture de l’usine Bosch à Onet-le-Château, en Aveyron.
Ces effets se poursuivent à grande échelle, avec les aides à l’acquisition de véhicules dits « propres », qui amènent concrètement à subventionner les constructeurs étrangers, ainsi que l’ont souligné certains de mes prédécesseurs. Sur ce point, il est essentiel que le Gouvernement tienne compte des modifications proposées par Christine Lavarde en tant que rapporteur spécial.
Les conséquences des choix du Gouvernement sont aussi négatives lorsque le traitement de la mobilité ne tient pas suffisamment compte de la diversité des territoires.
La population est de plus en plus mobile, et l’on observe des migrations pendulaires souvent contraintes, en particulier dans les territoires ruraux.
L’attractivité des territoires ne se décrète pas, et le désenclavement des territoires ruraux ne peut se faire selon les méthodes qui sont appliquées dans les métropoles. Or le budget ne tient pas suffisamment compte de cette réalité. En ce sens, comme l’ont noté Philippe Tabarot et Stéphane Sautarel, l’insuffisance des investissements en faveur du réseau ferroviaire est préoccupante.
Avec ce budget, la dégradation du réseau se poursuivra, et les dessertes fines du territoire ne se développeront pas autant que nécessaire (M. Guillaume Chevrollier, rapporteur pour avis, approuve.). Et ce n’est pas la carte que vient de produire à l’instant le Gouvernement sur Twitter qui y changera quoi que ce soit !
Alors que nous assistons à l’attrition du réseau aérien français, il est indispensable de renforcer le financement des aéroports de province, classés « liaisons d’aménagement du territoire ».
M. Dominique de Legge. Tout à fait !
M. Jean-Claude Anglars. Au total, le Grand Soir écologique dans lequel le Gouvernement veut apparaître ne trompe personne. Au contraire, il inquiète, par un dogmatisme qui peut être aveugle à la complexité des fractures territoriales.
Si j’osais, je demanderais qui décide. Est-ce la Première ministre, chargée de la planification écologique, ou le Haut-Commissaire au plan, qui travaille, selon les termes du Président de la République, sur la grande transition écologique ?
Si l’écologie est votre nouveau référentiel, madame, messieurs les ministres, les solutions, même écologiques, sont plus complexes que des slogans de communication. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nassimah Dindar applaudit également.)
M. Dominique de Legge. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi de saluer les rapporteurs et les différents orateurs qui se sont succédé à la tribune pour exprimer la position des commissions et des différents groupes.
Vous comprendrez aisément qu’il ne me soit pas possible, en quinze minutes, d’apporter une réponse précise à la totalité des arguments qui ont été énoncés. Dans la présentation succincte de cette mission, je ferai nécessairement l’impasse sur un certain nombre de sujets, tout en réagissant à quelques-uns des propos qui ont été tenus. Je vous renverrai ensuite collectivement à l’examen des amendements qui ont été déposés, pour que nous puissions entrer dans le détail de tel ou tel dispositif.
Tous les orateurs ont souligné la crise écologique et énergétique sans précédent que nous connaissons : son origine – un réchauffement climatique qui ne date pas de ces derniers mois –, sa réalité, son actualité et la nécessité d’une transition vers une économie neutre en carbone et sobre dans l’usage de nos ressources naturelles.
C’est plus que jamais une priorité, même si, manifestement, nous pouvons avoir des divergences sur la manière de concevoir le sens de l’urgence ou la nécessité de l’accélération.
Notre pays fait partie de la vingtaine d’États du monde qui ont commencé à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Dans ce contexte, l’argument selon lequel nous ne pèserions que 1 % des émissions à l’échelle mondiale n’est pas une excuse pour ne pas agir : il est assez malvenu d’expliquer que l’on ne commencera pas à éteindre l’incendie de son propre appartement tant que le voisin, qui en a un plus grand, n’aura pas commencé à le faire…
Nous avons à conduire cette transition avec le double souci de la solidarité et de la justice. En effet, comme certains ont pu le dire, oublier les plus fragiles sur le bord du chemin serait à la fois injuste – ce sont ceux qui émettent le moins – et surtout profondément contre-productif, dans la mesure où une transition qui ne serait pas synonyme d’effort collectif ne saurait être réussie.
Les budgets qui vous sont présentés agglomèrent ceux du ministère de la transition écologique, de la cohésion des territoires et de la transition énergétique. Ils atteignent le niveau inédit de 69 milliards d’euros pour l’année 2023, en progression de 36 % par rapport à 2022.
Si la progression des crédits est alimentée par les dispositifs de soutien et de bouclier tarifaire, elle demeure, après retraitement, bien réelle : 41 milliards d’euros sont alloués à la transition écologique et 28 milliards d’euros à la transition énergétique, avec une méthode, « France Nation verte », et une déclinaison, la planification écologique, qui a fait l’objet de 22 chantiers thématiques et de 7 chantiers transversaux.
Ces chantiers visent à s’accorder, avec les parties prenantes, sur des propositions, qui seront ensuite soumises, par grands domaines, au vote du Parlement. Mais sans attendre, un certain nombre de priorités sont d’ores et déjà déclinées : c’est le cas, par exemple, de l’accélération de la décarbonation du mix énergétique.
Je veux dire aux sénateurs, dont François Calvet, qui ont souligné la contribution des énergies renouvelables aux recettes de ce budget, que ces 39 milliards d’euros constituent une forme de prélèvement de ce qui s’apparenterait à des rentes si nous n’avions mis en place un plafonnement des prix.
C’est donc un dispositif particulièrement efficace pour notre pays, quand on le compare à ce qui se fait dans les autres États européens. La contribution des énergéticiens permet en effet de financer les mesures de soutien aux acteurs privés ou publics au travers de toute une palette de dispositifs, du type boucliers, amortisseurs ou guichets.
Je veux souligner les 2,5 milliards d’euros qui sont mobilisés pour financer MaPrimeRénov’. J’ai entendu les pistes d’amélioration qui ont été suggérées. Elles rejoignent une partie de celles que nous pointons nous-mêmes, en particulier la faible proportion des copropriétés dans l’ensemble du dispositif ; eu égard aux règles de majorité qui s’appliquent, il n’est pas certain que le frein principal soit de nature budgétaire. Nous devons aussi réfléchir à la manière dont nous pouvons massifier les gestes et parfois les simplifier.
Quelle que soit notre conception d’une efficacité accrue, il n’empêche que je me réjouis malgré tout du million et demi de rénovations rendues possibles et des économies d’énergie et d’émissions d’ores et déjà atteintes, qui représentent l’équivalent de la consommation de la ville de Lyon.
Plusieurs d’entre vous ont évoqué la question du bonus écologique et de la prime à la conversion, qui représentent 1,3 milliard d’euros. Ces crédits témoignent d’abord du fait que le Gouvernement a parfaitement conscience qu’il ne peut conduire une politique de transition écologique qui serait opposée à la voiture.
Ce moyen de transport est indispensable et nécessaire dans un certain nombre de territoires. Nous devons simplement faire en sorte de le décarboner, avec un rythme qui doit tenir compte de nos capacités de production.
Je précise en particulier au sénateur Gillé que l’une des raisons pour lesquelles le leasing n’entre pas en vigueur au début de l’année 2023, c’est que nous ne voulons pas que ce dispositif se mue en outil de financement d’importations massives de voitures qui seraient produites au bout du monde. Cela nécessite que la mise en œuvre du dispositif coïncide avec les capacités des filières de production de véhicules électriques sur le sol européen.
J’y insiste, la décarbonation de notre mix énergétique se traduit par près de 70 millions d’euros qui seront consacrés au financement des études sur l’implantation des parcs éoliens. Dans la droite ligne du projet de loi qui a été présenté par Agnès Pannier-Runacher et que la Haute Assemblée a su adopter avec sagesse, nous mettons ainsi en cohérence les ambitions affichées et les moyens financiers qui permettent de les atteindre.
La décarbonation du mix énergétique passe également par le fonds Chaleur, dont les crédits sont sanctuarisés à hauteur de 500 millions d’euros.
Quant à l’industrie, elle n’est pas oubliée : dans un autre pan du budget, 5 milliards d’euros sont alloués au fonds Décarbonation de l’industrie : 4 milliards d’euros à destination des plus grandes zones émettrices du pays et 1 milliard d’euros pour les 26 000 petites et moyennes industries (PMI) considérées.
Vous êtes revenus sur la protection des Français face à la hausse brutale des prix de l’énergie. La mise en œuvre du bouclier tarifaire sur le gaz et l’électricité et de l’amortisseur électricité représentent 54 milliards d’euros. Notre pays est ainsi celui qui, en Europe, aura consacré, en 2022 et 2023, les moyens les plus importants à la protection de ses concitoyens.
Je rappelle également que le chèque énergie soutiendra financièrement, en 2023, les ménages modestes qui se chauffent au fioul, mais également au bois. À cela s’ajoute le chèque énergie exceptionnel, qui a été envoyé, en cette fin d’année 2022, aux 40 % des ménages les plus modestes.
Beaucoup a été dit sur les transports. Je rappellerai que le programme 203, « Infrastructures et services de transport », est en hausse de près de 5 % et dépasse les 4 milliards d’euros.
Des moyens importants, comme ceux qui sont inscrits au budget annexe de l’aviation civile – je salue Mme la sénatrice Perrot –, au budget de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) – je salue le sénateur Tabarot – ou encore les crédits de 12 milliards d’euros environ qui sont alloués au verdissement des véhicules, sont bien consacrés à la politique des transports.
Au total, cela représente une hausse de près de 13 % par rapport à l’année 2022, avec une priorité assumée pour le système ferroviaire. Ainsi, plus de 6,3 milliards d’euros lui sont consacrés, soit plus de la moitié des dépenses globales en faveur des transports. Dans ce cadre, un peu moins de 100 millions d’euros sont prévus pour continuer à soutenir le fret ferroviaire.
Parmi les orateurs ayant abordé la thématique des transports, presque tous ont tenu à revenir sur les annonces qu’a formulées voilà quelques jours le Président de la République sur le RER métropolitain. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.) C’est pour moi l’occasion de les saluer, de noter qu’elles ne sont manifestement pas passées inaperçues (Mme Sophie Primas ironise.) et de les remettre dans le contexte du présent projet de loi de finances.
Depuis plusieurs mois déjà, Clément Beaune et moi-même soulignons la nécessité, dès lors que le rapport du conseil d’orientation des infrastructures aura été rendu, de présenter un plan massif d’investissements dans le ferroviaire.
Plusieurs dizaines de milliards d’euros sont nécessaires pour la planification écologique, la régénération du réseau, le soutien au fret – à cet égard, les travaux du Sénat sur la possibilité de revenir dans la moyenne européenne en doublant la part de fret alimentent notre réflexion – et les RER métropolitains.
M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. C’est dans le budget ?
M. Christophe Béchu, ministre. Les RER métropolitains ont le mérite de concerner les zones les plus denses, dans lesquelles le potentiel de décarbonation est le plus important.
Nous ne pouvons pas opposer ces projets, d’abord parce que, dans un certain nombre de cas, les itinéraires des lignes à grande vitesse (LGV) concourent à la réalisation des RER métropolitains. Je pense en particulier à Toulouse. (Exclamations.)
Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. Très bon exemple !
M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Excellent !
M. Christophe Béchu, ministre. Dans d’autres cas, nous avons d’ores et déjà des discussions très précises avec les territoires qui ont lancé des programmes de RER métropolitains et pour lesquels l’État sera financièrement au rendez-vous, dans le cadre de la planification écologique.
Je précise que, dans le socle, le système européen de gestion du trafic ferroviaire (ERTMS) et les commandes centralisées du réseau (CCR) sont bien évidemment totalement intégrés.
Je ne m’étendrai pas sur le secteur routier, sauf pour souligner que les budgets sont bien au rendez-vous et sont même légèrement supérieurs à la trajectoire prévue par la LOM.
J’ajoute que la question du transport aérien, qui n’est pas taboue, reste très importante en matière d’accessibilité pour les territoires.
Je veux souligner les dossiers importants qui ont progressé grâce au travail parlementaire : insonorisation des aéroports, cher Vincent Capo-Canellas, développement des lignes à grande vitesse, chers Claude Raynal, Philippe Tabarot et Henri Cabanel, ou encore taxation des carburants des jets privés, grâce au rapporteur général de l’Assemblée nationale, Jean-René Cazeneuve, et à Jean-Marc Zulesi.
Plusieurs d’entre vous ont évoqué la biodiversité – la COP15, qui lui est consacrée s’ouvre le 7 décembre prochain –, pour saluer les crédits de 3,6 milliards d’euros qui sont associés à cette thématique.
En ce qui concerne la question de l’eau, je rejoins le sénateur Chevrollier et je rappelle que 2,2 milliards d’euros plus 100 millions d’euros complémentaires y sont consacrés. Dans ce domaine, les écarts de performance des réseaux doivent aussi être considérés à la lueur des prix qui sont payés par les usagers. En effet, se glorifier d’avoir un prix très bas quand le réseau est peu performant interroge sur les critères de bonne gestion des réseaux.
Quand on a des taux de fuite de 20 % en moyenne, mais que ces taux montent parfois jusqu’à 70 %, se réjouir que le mètre cube soit bon marché ne doit pas conduire à demander à l’État de compenser les efforts qui auraient dû être faits pour assurer les interconnexions de réseaux ou la sécurisation des différents dispositifs.
M. François Bonhomme. Et outre-mer ?
M. Christophe Béchu, ministre. À la fin du mois de janvier prochain, nous aurons l’occasion de présenter les conclusions du travail que j’ai entamé à la fin du mois de septembre avec Bérangère Couillard et qui comprend plusieurs axes : la lutte contre les fuites, le recyclage des eaux usées, la question, que certains ont évoquée, de la diminution des moyens pour parachever ou prolonger le Varenne de l’eau.
Je précise, en réponse à la question de Pascal Martin, qu’il s’agit bien de 25 ETP pour l’année prochaine, après les 50 ETP des années précédentes. En la matière, nous avons conscience, bien entendu, des efforts qui restent à faire.
Je vous dirai évidemment quelques mots du fonds vert, que certains d’entre vous ont longuement évoqué. (M. François Bonhomme s’exclame.) À ce sujet, j’ai entendu plusieurs inexactitudes.
Ce fonds ne vaut que pour l’année 2023. Si la totalité des autorisations d’engagement sont précisées au titre de cette année et si nous n’indiquons que 500 millions d’euros de crédits de paiement, c’est que nous ne pourrons pas verser les crédits sans que le service soit offert par les collectivités. Le financement ne s’étalera pas sur quatre ans. Je l’ai répété à de multiples reprises depuis des mois, dans cette enceinte lors de mes auditions comme aux associations d’élus : ce fonds ne porte que sur l’année 2023. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
Le principe du fonds a été coconstruit avec les associations d’élus reçues à partir du début du mois de juillet, en particulier l’AMF. Au sénateur Anglars, qui souhaite que l’on puisse tenir compte des petites communes, je veux dire que ce que certains déplorent comme étant une absence de ligne parfaitement claire est justement la condition de la fongibilité et de la souplesse !
Ce fonds a précisément la souplesse qui va nous permettre d’accompagner les collectivités sur une seule année. Il sera temps ensuite d’en imaginer le prolongement et la pérennisation dans le cadre de la planification écologique, en tenant compte du retour d’expérience. Je serai évidemment attentif à ce que vous suggérez.
Certains prétendent qu’il s’agirait de crédits recyclés. Si vous considérez que le plan de relance avait vocation à durer toute la vie, c’est de l’honnêteté intellectuelle, mais si vous considérez que le plan de relance devait se terminer à la date prévue, j’ai plus de difficultés à vous suivre !
Par définition, en effet, les crédits auraient dû être nuls sur la totalité des lignes qui sont issues du plan de relance. Oui, nous assumons le prolongement du fonds Friches au travers du fonds vert, mais, plus largement, ce sont bien 2 milliards d’euros qui ne figureraient nulle part si nous n’avions pas validé ce dispositif. Pour le reste, je répondrai plus tard.
Mon dernier mot sera pour les effectifs. Nous mettons fin non pas à cinq ans ou à dix ans de baisse, comme je l’ai entendu, mais plutôt à vingt ans de baisse. Le pôle écologique est celui qui, depuis vingt ans, en pourcentage, a le plus contribué à la baisse des effectifs dans le périmètre de l’État. Il importait de mettre fin à cette tendance. Les rapports se sont succédé pour montrer qu’un certain nombre d’opérateurs étaient à l’os.
Cette stabilité est prévue pour cinq ans, mais elle masque en fait des hausses, puisque la Société du Grand Paris, qui se trouve à l’intérieur du dispositif, rendra des centaines de postes dans deux ans. C’est donc bien une progression des effectifs à périmètre constant qui vous est proposée et qui nous permettra de disposer des moyens humains de conduire cette bataille indispensable de la transition écologique. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP et UC.)
écologie, développement et mobilité durables