Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Je ferai remarquer que l’article 2 a été, malgré tout, quelque peu modifié par vos rapporteurs par rapport aux dispositions initiales…
Cela étant dit, l’avis du Gouvernement sur ces amendements est également défavorable, pour les raisons exposées par votre rapporteur.
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 28 rectifié et 54.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. L’amendement n° 92, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 5422-12 du code travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le taux de contribution de chaque employeur peut être minoré en fonction de l’index d’égalité entre les femmes et les hommes prévu à l’article L. 1142-8 si celui-ci est supérieur à 85 points. »
II. – La perte de recettes résultant pour le régime d’assurance chômage du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Bien qu’aujourd’hui le taux de chômage des femmes soit presque égal à celui des hommes, les femmes demeurent davantage touchées par le sous-emploi – rappelons que nous débattons ici d’un texte dont l’objet serait le plein emploi –, le temps partiel et le halo du chômage.
Selon l’Insee, en 2020, un peu plus d’un million de femmes étaient concernées par le halo du chômage, contre 866 000 hommes. En outre, les femmes sont deux fois plus touchées par le sous-emploi que les hommes. En 2019, 7,8 % des femmes actives étaient sous-employées contre 3,1 % des hommes. Enfin, en 2019, 28,4 % des femmes actives travaillaient à temps partiel. De plus, lorsqu’elles travaillent, les femmes perçoivent en moyenne une rémunération inférieure de 28,5 % à celle des hommes.
Il y a cinq ans, Emmanuel Macron déclarait que l’égalité femmes-hommes serait la grande cause de son quinquennat, ce qui impliquait de prendre des mesures pour le plein emploi des femmes.
Par cet amendement, nous proposons, au sein du dispositif de bonus-malus que nous examinons, de conditionner l’octroi d’un bonus au respect des objectifs fixés par l’index d’égalité entre les femmes et les hommes, prévu par le code du travail.
Ce serait une manière plus vertueuse d’utiliser une mesure incitative que de simplement conditionner l’octroi du bonus – comme c’est actuellement le cas – à un moindre recours aux contrats courts dans des secteurs déjà sinistrés par des taux de remplacement élevés.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement a pour objet de minorer la contribution d’assurance chômage en fonction de l’index d’égalité entre les femmes et les hommes.
Même si l’égalité professionnelle est un objectif que nous partageons, nous considérons que la modulation de ces contributions n’est pas le bon instrument pour l’atteindre. Nous sommes effectivement loin des enjeux liés à l’assurance chômage.
En outre, les entreprises dont l’index n’a pas atteint une note minimale sont déjà couvertes par un dispositif, qui prévoit des sanctions financières en l’absence de mesures correctives.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 92.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 2 bis
I. – À titre expérimental et par dérogation au 1° des articles L. 1242-2 et L. 1251-6 du code du travail, dans les secteurs définis par décret, un seul contrat à durée déterminée ou un seul contrat de mission peut être conclu pour remplacer plusieurs salariés.
L’expérimentation ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.
II. – Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard trois mois avant le terme de l’expérimentation prévue au I du présent article, un rapport d’évaluation de cette expérimentation évaluant en particulier, dans les secteurs mentionnés au premier alinéa du même I, les effets de l’expérimentation sur la fréquence de la conclusion des contrats à durée déterminée et des contrats de mission ainsi que sur l’allongement de leur durée et les conséquences des négociations de branche portant sur les thèmes mentionnés au 7° de l’article L. 2253-1 du code du travail, afin de déterminer notamment les conditions appropriées pour son éventuelle généralisation.
III (nouveau). – La durée de l’expérimentation prévue au I du présent article est de deux ans à compter de la publication du décret mentionné au même I.
Mme le président. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 64 est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 106 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l’amendement n° 64.
Mme Céline Brulin. Cet article réactive une expérimentation, pourtant boudée par les entreprises, consistant à permettre le remplacement de plusieurs salariés absents par une seule personne, titulaire d’un CDD ou d’un contrat de mission.
Le droit du travail nous semble fondé sur l’individualisation des contrats de travail. Par ces dispositions, on risque d’ouvrir une boîte de Pandore et de précariser les salariés. Les entreprises disposent quand même de beaucoup de souplesse, puisqu’elles peuvent signer deux CDD à temps partiel afin de pourvoir à deux postes vacants. Il est même possible – et nous le regrettons ! – de contourner l’obligation de temps minimal de travail de vingt-quatre heures.
Cet article et la prolongation prévue de cette expérience risquent d’aggraver la précarité qui touche de nombreuses personnes.
Mme le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 106.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet article 2 bis réinstaure l’expérimentation des CDD multi-remplacement, instaurée en 2018 par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel et réservée à certains secteurs définis par décret, qui échappent dans ce cas aussi à la négociation.
Ce dispositif avait été présenté comme une solution vertueuse et flexible pour le remplacement de plusieurs personnes sur une longue période, pour des tâches et des compétences potentiellement différentes, ce qui permettrait de limiter la multiplication de contrats courts successifs. Son retour dans ce projet de loi est motivé par la volonté de réduire le taux de séparation.
La réintégration de ce dispositif relance donc une expérimentation qui n’a fait l’objet d’aucune évaluation, ce qui devrait constituer un préalable à toute reconduction ou généralisation. Ainsi, il conviendrait de vérifier si ce dispositif n’a pas été utilisé afin de pourvoir durablement à un emploi lié à l’activité normale de l’entreprise.
En effet, même si le contrat est d’une durée plus longue, il maintient le travailleur dans une situation de précarité, ce qui va à l’encontre de la volonté affichée du Gouvernement lors de la mise en place du bonus-malus.
Le maintien d’un CDD, même long, est source de désavantages pour le salarié, notamment pour conclure un bail ou un emprunt, et peut être source de stress et de souffrance au travail pour le salarié bloqué dans une précarité permanente.
Aussi, par cet amendement, nous proposons de supprimer cet article afin de ne pas relancer un dispositif qui n’a fait l’objet d’aucune évaluation.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet article, inséré dans le texte par l’Assemblée nationale, a été quelque peu modifié par la commission afin de le rendre plus efficient.
Il s’agit de réactiver une expérimentation créée dans la loi de 2018, par laquelle un CDD peut remplacer plusieurs salariés absents, simultanément ou successivement, dans onze secteurs qui nous sont chers, déterminés par décret, comme le médico-social, le sanitaire ou la propreté – les autres secteurs ne nous sont pas moins chers ; si ceux-ci ont été retenus, c’est parce qu’ils connaissent une forte pénurie de recrutement.
Ce dispositif a-t-il été boudé par les entreprises, comme je l’ai entendu dire sur certaines travées ? Je l’ignore. Cependant, il est certain qu’il n’a quasiment pas pu être appliqué. En effet, la publication très tardive des décrets et la crise sanitaire n’ont permis la mise en œuvre de cette expérimentation que pendant une année seulement.
Il s’agit donc de remettre en place ce dispositif expérimental pour une durée de deux ans. Madame Poncet Monge, nous vous avons écoutée, en prévoyant une évaluation au terme de l’expérimentation ainsi qu’un rapport, que nous espérons recevoir en temps voulu, afin de statuer sur la prolongation de ce dispositif. L’objectif est d’abord de lutter contre la permittence – là est l’enjeu –, puis de réduire les coûts de gestion pour les employeurs et d’améliorer l’intégration des salariés dans l’entreprise.
Quand des personnes en remplacent d’autres, puis s’en vont sans qu’on les revoie plus, cela ne favorise pas l’intégration des salariés. Si ces personnes peuvent rester dans l’entreprise, y compris à des postes différents, l’intégration est socialement bien meilleure.
La commission refuse le principe de suppression de cet article et a donc émis un avis défavorable sur ces amendements.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre. Ce dispositif avait été expérimenté jusqu’au 31 décembre 2020. La crise sanitaire a eu pour effet qu’il n’a pas été reconduit, davantage par inadvertance que par une véritable volonté d’arrêter l’expérimentation.
Il s’adresse à onze secteurs, dont celui de la distribution, et permet, notamment, de pourvoir au remplacement de plusieurs salariés partant successivement en congé par une seule personne. Ainsi, deux ou trois salariés peuvent être remplacés pour une période de deux, trois ou quatre mois plutôt que d’avoir recours à plusieurs contrats, avec tous les risques de rupture que cela comporte.
Ce dispositif nous paraît utile et simple, à la fois pour les entreprises et pour l’allongement de la durée des contrats de remplacement dont peuvent bénéficier les salariés.
L’avis du Gouvernement sur ces amendements est donc défavorable.
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 64 et 106.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. Je mets aux voix l’article 2 bis.
(L’article 2 bis est adopté.)
Article 2 ter (nouveau)
L’article L. 1251-58-6 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 1251-58-6. – La durée totale du contrat de mission prévue à l’article L. 1251-12-1 n’est pas applicable au salarié lié par un contrat à durée indéterminée avec l’entreprise de travail temporaire. »
Mme le président. Je suis saisie de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 36 rectifié est présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Chantrel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 71 est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 98 est présenté par le Gouvernement.
L’amendement n° 107 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.
L’amendement n° 113 rectifié est présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 36 rectifié.
Mme Monique Lubin. L’échéance est inscrite dans la définition même de l’intérim, celui-ci visant des situations de remplacement ou d’accroissement temporaire de l’activité d’une entreprise, ou encore des emplois saisonniers.
La durée maximale des missions d’intérim est de dix-huit mois ; elle a été portée à trente-six mois, soit trois ans, pour ce qui est des missions réalisées dans le cadre d’un CDI intérimaire (CDII).
Les rapporteurs proposent, avec cet article 2 ter, la suppression de toute durée maximale applicable aux missions d’intérim réalisées dans le cadre d’un CDII.
En quoi un travail de trois, cinq ou dix ans peut-il encore correspondre à un remplacement, répondre à un accroissement temporaire d’activité ou s’inscrire dans le cadre d’un emploi saisonnier ?
Cet amendement vise à revenir sur l’aberration que représenterait une mission temporaire non bornée dans le temps.
Mme le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 71.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous sommes en totale adéquation avec ce que vient de dire Mme Lubin : nous n’avons rien à y ajouter.
Mme le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 98.
Mme le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 107.
Mme Raymonde Poncet Monge. Cet article, introduit en commission des affaires sociales, prévoit de déplafonner la durée légale des CDI intérimaires, actuellement fixée – excusez du peu – à trente-six mois.
Cette mesure, présentée comme devant limiter le recours aux contrats courts, légitime en réalité une forme de contrat aux droits réduits qui pourrait concurrencer le CDI et devenir une nouvelle norme.
Privés d’indemnités de précarité, les intérimaires en CDII voient souvent leurs conditions de travail se dégrader. La preuve en est que la durée moyenne des CDI intérimaires est de huit mois et que 84 % des sorties se font par démission.
Cet article, dont les auteurs se montrent aveugles à la précarisation et à la dégradation des conditions de travail que traduisent ces chiffres, ne fait donc que valider cet état de fait sans mettre en question ses effets sur les salariés ; il est proposé d’allonger arbitrairement la durée de ce type de contrats alors même qu’un salarié est très rarement absent plus de trois ans.
Déplafonner les CDI intérimaires n’est autre qu’un moyen supplémentaire de dévitaliser le mécanisme du malus.
La commission des affaires sociales ne propose aucun amendement tendant à améliorer la protection des travailleurs, mais – remarquons-le – multiplie ceux qui visent à répondre aux demandes des employeurs.
Un tel dispositif n’ayant pas sa place dans un projet de loi dont l’objet n’est pas la modification du régime des intérimaires, mais l’assurance chômage, cet amendement vise à le supprimer.
Mme le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 113 rectifié.
Mme Maryse Carrère. Il nous semble souhaitable qu’un tel projet de modification ne soit pas examiné dans le cadre de ce texte, mais fasse d’abord l’objet d’une concertation avec les partenaires sociaux.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ces amendements identiques visent à supprimer l’article 2 ter, que nous avons introduit dans le projet de loi. Cet article supprime la durée maximale applicable aux missions d’intérim réalisées dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée intérimaire, qui est actuellement de trente-six mois.
Nous considérons que le CDII est plutôt vertueux : d’abord, il est à durée indéterminée ; ensuite, il garantit le versement d’une rémunération mensuelle minimale quelle que soit l’activité de la personne – socialement, c’est intéressant.
Eu égard à ce que j’ai entendu, je rappelle cependant, pour que tout soit bien clair, que ce CDII est réalisé dans les mêmes conditions que l’intérim ; en d’autres termes, il ne saurait avoir pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice. Le cadre du CDII est bien le même que celui de l’intérim.
À l’heure actuelle, le CDII représente seulement 6 % des effectifs des agences d’emploi. Les entreprises d’intérim souhaitent porter ce taux à 20 % ; la présente disposition n’est en la matière qu’un élément d’amélioration : d’autres mesures devront sans doute être proposées, dans le cadre des discussions qui vont avoir lieu avec les partenaires sociaux – je vous rejoins sur ce point, mes chers collègues –, afin d’aller plus loin et de favoriser l’augmentation du nombre de CDII, outil que nous considérons comme vertueux.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 36 rectifié, 71, 98, 107 et 113 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. L’amendement n° 63, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 1251-6 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 1251-6. – Un utilisateur ne peut faire appel à un salarié temporaire que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas suivants :
« 1° Remplacement d’un salarié en cas d’absence ou de suspension de son contrat de travail et pour pourvoir directement le poste de travail du salarié absent ;
« 2° Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise. Au titre de ce motif, le nombre de salariés temporaires ne peut excéder 10 % de l’effectif occupé en moyenne au cours de l’année civile précédente dans les entreprises d’au moins onze salariés. Ce nombre obtenu est arrondi à l’unité supérieure. En cas de dépassement de ce taux, les contrats de travail excédentaires et par ordre d’ancienneté dans l’entreprise sont réputés être conclus pour une durée indéterminée avec l’entreprise utilisatrice. »
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise à encadrer le recours au travail temporaire en limitant le nombre de personnes employées en contrat d’intérim à 10 % de l’effectif total des entreprises comptant au moins onze salariés. Nous proposons de surcroît que le recours à de tels contrats ait pour seul objet de remplacer un salarié absent ou de pourvoir à un accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise.
Le travail en intérim augmente de façon très significative d’année en année, tout particulièrement ces dernières années ; cela veut bien dire qu’il existe des besoins structurels de recrutement dans les entreprises. Or l’emploi en contrat de travail temporaire limite terriblement la capacité des salariés à mener une vie stable et à faire des projets. Il nous semble donc nécessaire d’instaurer un tel encadrement.
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cet amendement vise à restreindre les cas de recours à l’intérim.
Son adoption reviendrait à supprimer les dispositions que nous avons introduites pour déplafonner la durée des missions réalisées dans le cadre d’un CDII ; nous ne saurions donc y être favorables.
De surcroît, en restreignant les cas où il peut être fait appel à l’intérim, on retirerait à plus de 695 000 équivalents temps plein la possibilité d’avoir une activité professionnelle. On constate certes une augmentation du nombre d’intérimaires, quoique la tendance récente soit plutôt à la baisse, si je ne m’abuse, monsieur le ministre ; cependant, l’intérim est parfaitement défini par le code du travail : il peut être utilisé soit pour remplacer un salarié qui n’est pas là, soit dans une logique de flexibilité.
S’agissant d’un dispositif que nous tenons plutôt pour vertueux, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme le président. Je mets aux voix l’article 2 ter.
(L’article 2 ter est adopté.)
Article 3
I. – L’article L. 2314-18 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 2314-18. – Sont électeurs l’ensemble des salariés âgés de seize ans révolus, travaillant depuis trois mois au moins dans l’entreprise et n’ayant fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relative à leurs droits civiques. »
II. – Le premier alinéa de l’article L. 2314-19 du code du travail est complété par les mots : « ainsi que des salariés qui disposent d’une délégation écrite particulière d’autorité leur permettant d’être assimilés au chef d’entreprise ou qui le représentent effectivement devant le comité social et économique ».
III. – Le I entre en vigueur le 31 octobre 2022.
Mme le président. La parole est à Mme Monique Lubin, sur l’article.
Mme Monique Lubin. Mon collègue Jean-Pierre Sueur ne pouvant être parmi nous ce soir, c’est moi qui vais lire l’intervention qu’il avait préparée.
M. Sueur ayant déposé un amendement visant à insérer un article additionnel après l’article 3, il a eu la désagréable surprise de constater qu’il était déclaré irrecevable en application de l’article 45 de la Constitution. (Ah ! sur des travées du groupe Les Républicains.)
Il souhaite exprimer son étonnement devant une telle décision : un amendement ayant trait à l’application des accords d’entreprise en cas de liquidation judiciaire ne présenterait-il donc aucun lien, même indirect, avec un projet de loi relatif au « fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi », et ce quand bien même l’article 3 dudit projet de loi modifie un article du code du travail portant précisément sur les élections au comité social et économique ? Cette interprétation trop restrictive de la Constitution pose question.
L’amendement ainsi déclaré irrecevable avait pour objet de modifier l’article L. 3253-13 du code du travail en réduisant de dix-huit mois à douze mois la condition d’ancienneté qui y est posée, celle-ci s’appliquant au délai minimal séparant la conclusion d’un accord d’entreprise et l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire, délai en deçà duquel l’accord d’entreprise relatif aux indemnités supralégales ne peut s’appliquer.
Pourquoi une telle modification ? Pour les salariés de l’usine Proma de Gien, dans le Loiret, qui ont été injustement privés de leur prime supralégale et, à défaut de rétroactivité, pour tous les salariés qui à l’avenir pourraient se retrouver dans une situation similaire.
En septembre 2008, un accord avait été conclu entre la direction et les salariés de Proma : dans le cadre d’un plan de restructuration, il était convenu qu’une indemnité de licenciement supralégale d’un montant de 23 000 à 35 000 euros serait versée aux salariés licenciés. Un an plus tard, la société se trouvait en cessation de paiements et placée en redressement judiciaire. Or, à cause de ce délai de dix-huit mois, les salariés n’ont pas touché la prime supralégale de licenciement ; les juges avaient pourtant maintenu qu’ils y avaient droit.
Aussi, monsieur le ministre, notre collègue Jean-Pierre Sueur tenait-il à vous alerter tout particulièrement sur cette disposition du code du travail qu’il serait utile de modifier.
Mme le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Je tiens à répondre à M. Sueur, qui a pu poser sa question par la voix de Monique Lubin.
Je rappelle que l’irrecevabilité en application de l’article 45 n’est pas déclarée par les administrateurs de la commission, mais bien par la commission elle-même sur l’avis de ses rapporteurs.
En l’espèce, l’amendement qui a été déclaré irrecevable par la commission avait pour objet non le régime d’assurance chômage assurant le revenu des salariés en cas de privation involontaire d’emploi, qui est régi par la cinquième partie du code du travail et constitue l’un des objets du projet de loi soumis à notre examen, mais l’Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS), qui est régie, elle, par la troisième partie du code du travail et dont la vocation est d’accompagner ou de soutenir les entreprises dans les procédures collectives en garantissant les créances salariales.
C’est donc à cet égard, et sans préjuger de son contenu, que l’amendement déposé par M. Sueur a été considéré comme dépourvu de tout lien, même indirect, avec le texte en discussion.
Mme le président. L’amendement n° 3 rectifié bis, présenté par Mmes Procaccia, F. Gerbaud et Micouleau et MM. Burgoa et Milon, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les branches regroupant des établissements mentionnés aux articles L. 442-5 du code de l’éducation et L. 813-8 du code rural et de la pêche maritime, les suffrages des personnels enseignants liés par un contrat de droit public à l’État, qui les rémunère directement, et qui ne sont pas liés à l’établissement par un contrat de travail, sont recueillis dans des urnes distinctes pour les élections des membres du comité social et économique de ces établissements.
Dans ces branches, la représentativité des organisations syndicales prévue à l’article L. 2122-5 du code du travail est établie sur le fondement des suffrages exprimés par les personnels soumis aux stipulations conventionnelles.
Par dérogation aux deux premiers alinéas du présent article et dans l’attente de la mesure de l’audience prévue au même article L. 2122-5 effectuée dans les conditions prévues à ces mêmes alinéas, le ministre chargé du travail fixe, par arrêté, la liste et le poids des organisations syndicales reconnues représentatives dans ces branches sur le fondement des suffrages exprimés lors de la dernière mesure de l’audience quadriennale.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.