Mme Corinne Imbert, rapporteure. Merci, monsieur le ministre, pour votre écoute et pour l’avis de sagesse que vous avez émis sur cette proposition de loi. Merci, mes chers collègues, pour la qualité de nos échanges.

Avec cette proposition de loi du président Retailleau, nous n’avions pas la prétention de tout régler, mais il était important que ce texte soit voté aujourd’hui. La situation actuelle en matière d’accès aux soins étant insupportable pour un grand nombre de patients et pour les élus, une première réponse était nécessaire.

Ce texte constitue un pas. Il n’aura pas pour conséquence de retirer des internes à l’hôpital public, bien au contraire. Peut-être la venue de médecins juniors dans les territoires évitera-t-elle l’arrivée de patients aux urgences. On parle toujours du lien entre ville et hôpital. L’hôpital ira mieux si la médecine de ville va mieux.

On demande aux internes en médecine générale de faire un pas, mais aussi au ministère en termes de reconnaissance, aux médecins généralistes installés, que l’on sollicite pour qu’ils deviennent maîtres de stage, et à la Faculté, pour qui l’on facilite la maîtrise de stage au plus près des lieux d’exercice.

Tel est l’intérêt de cette proposition de loi, que je vous remercie d’avoir adoptée. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante-deux, est reprise à dix-huit heures cinquante-trois.)

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à la consolidation et à la professionnalisation de la formation des internes en médecine générale
 

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Mises au point au sujet de votes

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.

M. Jean-Michel Arnaud. Nos collègues Amel Gacquerre et Anne-Catherine Loisier souhaitent rectifier leur vote sur le scrutin n° 3 portant sur l’ensemble du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur. Elles souhaitaient voter pour.

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat.

Mme Frédérique Puissat. Nos collègues Charles Guené, Gérard Longuet, Albéric de Montgolfier et Damien Regnard souhaitaient également voter pour ce même projet de loi.

M. le président. Acte est donné de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l’analyse politique du scrutin.

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Finances locales

Débat organisé à la demande de la commission des finances

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat sur les finances locales, organisé à la demande de la commission des finances.

Dans le débat, la parole est à M. Vincent Éblé, au nom de la commission qui a demandé ce débat. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Vincent Éblé, vice-président de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques nous permet désormais, en amont de la discussion du projet de loi de finances, de consacrer un débat à la situation des finances locales. Nous sommes tous d’accord pour dire que cet exercice est bienvenu.

Madame la ministre, vous souhaitez supprimer la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en deux ans, prétendument pour améliorer la compétitivité de nos entreprises industrielles. En fait, cette suppression ne bénéficierait qu’à hauteur de 40 % à ces dernières. Elle bénéficierait en revanche à nombre de sociétés du secteur tertiaire. En supprimant la CVAE, vous ne ciblez pas les entreprises industrielles. Pour soutenir la compétitivité de notre industrie, ne faudrait-il pas mieux conserver ces moyens pour faire face à la crise énergétique qui touche celle-ci de plein fouet ?

Par ailleurs, la compensation proposée a été calculée en prenant en compte deux années de crise sanitaire pendant lesquelles nous avons observé une contraction du produit de la CVAE. Pourtant, l’État a déjà perçu le montant de la CVAE pour 2023 qui, lui, est dynamique. La ficelle est trop grossière pour ne pas fâcher les bénéficiaires ainsi lésés !

La Première ministre s’est certes engagée à abonder ponctuellement le nouveau Fonds vert du montant de la dynamique de 2023, mais cela n’affecte pas le socle de la compensation de la CVAE. Cela revient donc à diminuer la somme fixée pour cette compensation…

Les incidences du schéma de compensation sur les indicateurs financiers des collectivités territoriales, qui n’interviendraient certes qu’à compter de 2024, n’ont pas à ce jour été évaluées, ni leurs conséquences éventuelles corrigées.

Sur ce point, le projet de loi de finances pour 2023 se limite pour l’heure à un renvoi bien trop large au pouvoir réglementaire. Cela me rappelle la suppression de la taxe d’habitation, pour laquelle des problèmes de compensation subsistent, notamment du fait de la réforme des indicateurs financiers. Vous vous attaquez au sujet de la CVAE alors que celui de la taxe d’habitation n’est pas clos.

Après les contrats de Cahors, vous souhaitez poursuivre aujourd’hui avec le nouveau pacte de confiance le mouvement visant à recentraliser le fonctionnement des collectivités territoriales.

Je note d’ailleurs que l’article correspondant a été supprimé à l’Assemblée nationale… Pourquoi ? Parce qu’il était irréaliste ! Il fixait le plafonnement de la progression des dépenses de fonctionnement à un niveau inférieur d’un demi-point à celui de l’inflation. Des sanctions étaient même prévues en cas de dépassement. Cela ne me semble pas acceptable, d’autant plus que l’on ne connaît ni les critères ni l’organisation précise de ce nouveau dispositif coercitif. Madame la ministre, votre copie est à revoir !

Il convient de sortir de l’ère du soupçon à l’égard de nos élus locaux, d’autant plus que ceux-ci sont contraints par des règles budgétaires bien plus exigeantes que celles qui s’appliquent à l’État et au Gouvernement – et, madame la ministre, cela se voit. Pour respecter vos engagements européens, vous souhaitez faire des économies sur le dos des collectivités territoriales, qui sont plus vertueuses que vous !

Face à la hausse des coûts de l’énergie, de nombreuses collectivités, même celles qui sont en bonne santé financière, se voient dans l’obligation de décaler des travaux importants ou des projets d’investissement, notamment en faveur de la transition énergétique.

Madame la ministre, votre seul souci devrait être de permettre aux collectivités territoriales de conserver une épargne brute significative afin de couvrir des investissements nouveaux, sachant en outre que le montant de leur facture énergétique est estimé, dans le rapport de notre collègue Françoise Gatel, à 11 milliards d’euros.

Le bouclier tarifaire et le plafonnement des prix de l’électricité à 180 euros le mégawatt sont certes utiles, mais ils ne compenseront que de manière insatisfaisante l’augmentation des charges des collectivités.

Oui, ces collectivités peuvent participer à l’effort de redressement de nos comptes publics, mais un échange constructif avec les associations d’élus est nécessaire au préalable. Souvenons-nous que les comptes des collectivités territoriales ne peuvent être en déséquilibre.

Actuellement, les finances locales connaissent un effet de ciseaux du fait d’une forte progression des dépenses non compensées par une augmentation équivalente de leurs recettes.

Madame la ministre, le processus de mitage fiscal organisé méthodiquement transforme peu à peu les principaux impôts directs locaux en compensations, puis en dotations, sur lesquelles les élus locaux n’exercent ni pouvoir de taux ni pouvoir d’assiette.

Au regard du contexte actuel, l’enjeu majeur est de mieux coordonner les finances locales, sociales et étatiques plutôt que de revenir à un idéal d’État central qui ne peut et ne doit plus être. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme le vice-président de la commission des finances. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Christine Lavarde, vice-président de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’interviens au nom du rapporteur général, Jean-François Husson, qui ne peut être présent dans l’hémicycle cet après-midi.

Ce débat sur la situation des finances des collectivités territoriales constitue une avancée importante, permise par la réforme de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), à laquelle le rapporteur général tenait particulièrement.

Pour cadrer ce débat, un premier constat s’impose : il faut d’emblée dissiper l’illusion que la situation financière des collectivités territoriales est favorable. Elle est au contraire d’une grande hétérogénéité. Dès lors, raisonner à partir de moyennes globales n’a pas grand sens.

Quelle est la réalité ? Tout d’abord, à la fin de l’année 2021, près de 46 % des communes disposaient d’une épargne brute encore inférieure à son niveau de 2019. La crise sanitaire a laissé des traces budgétaires dans de très nombreuses collectivités, frappées désormais par les conséquences de la guerre en Ukraine. Une première réponse a été apportée cet été avec l’adoption, dans la loi de finances rectificative, d’un filet de sécurité pour le bloc communal et de mesures spécifiques pour les départements et les régions.

Ce filet de sécurité est le fruit d’un travail réalisé par les différents groupes de l’Assemblée nationale. Le Sénat l’a renforcé de façon significative en y incluant les charges liées au relèvement du point d’indice de la fonction publique, à la hausse des prix de l’énergie et à la forte inflation sur les produits alimentaires.

Ce dispositif a le mérite d’exister pour préserver les collectivités qui auront connu le plus de difficultés en 2022. Pour autant, sa portée n’est plus adaptée à une situation qui continue de se dégrader depuis la rentrée. De nombreuses collectivités voient se dresser un mur lors du renouvellement de leurs contrats de fourniture d’électricité et de gaz et ne savent pas à ce stade comment équilibrer leur budget pour l’année prochaine.

Des mesures puissantes et efficaces doivent donc être prises dans le projet de loi de finances pour protéger les collectivités qui en ont besoin. Le Gouvernement doit comprendre que si nous les laissons dans cette impasse financière, nous agissons contre notre propre intérêt. Car ce sont bien elles qui ont la capacité de mener, dans nos territoires, les projets d’investissement indispensables, en particulier ceux qui nous permettront de mettre en œuvre et de réussir, au plus près des besoins, la transition écologique indispensable à notre pays.

Ce débat budgétaire ne doit toutefois pas être limité aux épreuves de l’année à venir. L’examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 nous donnera également l’occasion de nous prononcer globalement sur la stratégie de redressement des comptes publics, en particulier sur la juste part que doivent prendre les collectivités territoriales à cet effort.

Bien que le solde des collectivités territoriales soit excédentaire de près de 5 milliards d’euros en 2021 et que leur dette représente moins de 9 % de la dette publique totale, le Gouvernement fait le choix de leur demander un effort très substantiel de baisse de leurs dépenses de fonctionnement de 0,5 % par an en volume.

Dans le même temps, si l’on neutralise l’effet des dépenses du plan d’urgence, du plan de relance et plus globalement des dépenses de crise, il apparaît que l’État ne réaliserait pas le moindre effort sur ses dépenses et que celles-ci progresseraient même sur la période de programmation.

Les membres de notre assemblée comme les élus locaux ne sauraient accepter sans réagir les méthodes d’un État qui entend réduire la dette publique tout en continuant d’aggraver la sienne, ou encore baisser les impôts en supprimant ceux des autres ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Michel Arnaud applaudit également.) La proposition de suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) en est une nouvelle illustration.

En conclusion de son propos, le rapporteur général souhaitait évoquer le prétendu « pacte de confiance ». On nous affirme que les mesures prévues n’ont rien à voir avec les contrats de Cahors. Il faut donc croire que c’est par étourderie que le Gouvernement a laissé, à l’article 23 du projet de loi de programmation des finances publiques (LPFP), plusieurs paragraphes entièrement copiés-collés depuis l’article 29 de la précédente loi de programmation qui instituait les contrats de Cahors…

Si une première année de « liberté surveillée » est accordée, elle précède la mise en œuvre d’un mécanisme de correction extrêmement contraignant, appliqué au terme d’un raisonnement par strates de collectivités pour le moins douteux. De nouvelles sanctions ont par ailleurs été imaginées, notamment l’exclusion des dotations d’investissement de l’État.

Nous sommes donc bien loin de la « nouvelle méthode » qui avait été annoncée. Les collectivités territoriales savent pourtant pertinemment qu’il existe entre elles et l’État une communauté de destin et que la réussite de notre pays passe par le redressement de ses finances publiques. Elles ont consenti de très importants efforts par le passé pour maîtriser leurs dépenses et sont prêtes à les poursuivre, sous réserve de réciprocité de la part de l’État. C’est une question de justice.

Au-delà des mots, nous attendons plus que jamais des actes, mais des actes de confiance ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le président, monsieur le vice-président de la commission des finances, madame la vice-présidente de la commission des finances, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est un plaisir et un honneur de prendre part avec vous à ce premier débat consacré aux finances locales.

Ce nouvel outil démocratique a été rendu possible par la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques. Il constitue, selon moi, une avancée pour notre pays et pour nos collectivités, en introduisant de manière inédite un temps consacré aux finances locales dans le cours de l’examen des projets de loi de finances.

J’ai déjà pu me livrer à cet exercice vendredi dernier à l’Assemblée nationale, avec mon collègue Gabriel Attal. Comme le veut le fonctionnement de nos institutions, c’est aujourd’hui au Sénat, chambre des territoires, que j’ai l’occasion de m’y livrer de nouveau, selon des modalités légèrement différentes.

Gabriel Attal, Christophe Béchu et moi-même avons en effet suivi une méthode renouvelée dans l’élaboration du volet territorial du projet de loi de finances pour 2023, conformément à la volonté du Président de la République et de la Première ministre. Notre démarche a consisté à échanger en continu, en amont, avec les associations d’élus, afin de coconstruire des mesures qui répondent aux besoins des territoires et aux attentes de nos concitoyens.

Nous les avons toutes reçues, à plusieurs reprises, jusqu’à la présentation du projet de loi de finances (PLF) au Comité des finances locales le 26 septembre, quelques heures après sa présentation en conseil des ministres.

Après le temps de la concertation, nous sommes désormais entrés dans celui de la construction d’un budget protecteur, bien sûr, mais aussi d’un budget sincère, qui prend en compte l’impératif de maîtrise de nos finances publiques et la participation indispensable de chacun à cet effort.

Cet esprit de responsabilité et cet impératif d’action ont été nos deux guides dans la conception du PLF pour 2023. Ce sont aussi, je n’en doute pas, les deux principes qui guideront son examen par le Sénat.

Face à la progression inédite de l’inflation et à l’envolée des coûts de l’énergie, les défis auxquels les collectivités territoriales doivent faire face imposent un soutien accru de l’État.

Dès cet été, le Gouvernement a proposé des mesures fortes dans la loi de finances rectificative, que vous avez enrichie et votée, mesdames, messieurs les sénateurs.

Je pense en particulier au filet de sécurité de 430 millions d’euros pour aider les communes et les intercommunalités les plus fragiles à faire face à la hausse du point d’indice et des prix de l’alimentation et de l’énergie.

Nous savons que certaines collectivités ont besoin de cette aide au plus vite. C’est pourquoi, comme l’a annoncé Gabriel Attal, dès la parution du décret le 13 octobre et jusqu’au 15 novembre, elles pourront déposer une demande qui leur permettra d’obtenir un acompte de 50 %, lequel sera versé avant le 15 décembre.

Nous avons par ailleurs alloué 120 millions d’euros aux départements, qui versent le revenu de solidarité active (RSA), afin de compenser intégralement la hausse de 4 % de cette prestation prévue par l’État. Nous avons également instauré le recouvrement total par l’État auprès des régions de la hausse de 4 % des rémunérations des stagiaires de la formation professionnelle.

Nous accentuons encore cet accompagnement de l’État dans le cadre du PLF pour 2023.

Un amendement du rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale vise à prolonger le filet de sécurité pour les dépenses énergétiques en 2023. Le bouclier tarifaire sera prolongé, ce qui permettra de limiter à 15 % la hausse des prix de l’électricité pour 80 % des communes. Nous prévoyons aussi de quintupler l’enveloppe à destination des communes en grande difficulté, à hauteur de 10 millions d’euros, et surtout de ne pas plafonner les bases fiscales, afin de laisser toute autonomie aux collectivités sur leur dynamique fiscale.

Ces mesures permettront aux collectivités de faire face dans l’immédiat à leurs surcoûts financiers, mais il nous faudra aussi agir à d’autres échelles.

Au niveau du marché européen de l’énergie, tout d’abord, nous devrons chercher à réguler les prix et à capter les superprofits réalisés par les grands groupes énergétiques du fait de cette situation de tension.

Nous devons aussi, chacun à notre échelle, suivre les recommandations formulées par la Première ministre dans le plan de sobriété.

Toutefois, résoudre durablement la crise que nous connaissons impose aussi d’effectuer des changements profonds de notre modèle, en favorisant la transition écologique et la transition énergétique dans tous les territoires.

C’est pourquoi il est prévu dans le projet de loi de finances pour 2023 d’augmenter d’un tiers les moyens consacrés à la dotation de biodiversité pour 2023, qui avaient déjà été doublés en 2022, pour atteindre un montant de 30 millions d’euros.

Il est également prévu de mettre en œuvre un fonds vert d’un montant inédit de près de 2 milliards d’euros. Ses crédits seront attribués selon des règles simples, décentralisées et sans appel à projets. Tout partira des initiatives des élus, selon une méthode lisible et reconnue, celle du dialogue entre les élus et leur préfet de département ou de région.

La Première ministre a par ailleurs annoncé vendredi dernier que 200 millions d’euros seront spécifiquement alloués aux départements.

Accompagner les collectivités territoriales, c’est avant tout leur donner les moyens d’agir, en sécurisant leur financement et en leur assurant une visibilité à long terme.

Ainsi, avec la Première ministre, nous avons souhaité porter une hausse de 320 millions d’euros de la dotation globale de financement (DGF), les augmentations de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) et de la dotation de solidarité rurale (DSR) étant financées par l’État et non par écrêtement des crédits des autres communes. Cette augmentation, inédite depuis treize ans, est un acte fort du Gouvernement.

La suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, quant à elle, permettra à notre pays de gagner en compétitivité sans amoindrir les ressources des collectivités. Elle sera en effet intégralement compensée et territorialisée par l’attribution d’une part supplémentaire de TVA, mais aussi par sa dynamique, dès 2023.

La compensation, l’année prochaine, correspondra aux sommes que l’État aurait dû reverser aux collectivités en 2023 au titre de la CVAE. Il n’y aura pas d’année blanche, rien ne sera conservé par l’État.

Elle sera également territorialisée : ceux qui accueillent davantage d’activités seront davantage compensés, sur le fondement de critères précisés dans un décret en Conseil d’État. Un travail est d’ailleurs en cours avec les associations d’élus. Sur ce sujet comme sur les autres, l’écoute et la concertation devront primer.

Notre souci de préserver les marges de manœuvre des collectivités transparaît enfin dans le maintien de leurs dotations d’investissement, pour un montant de près de 2 milliards d’euros, comme l’année précédente.

Mesdames, messieurs les sénateurs, voici les principaux éléments des concours de l’État aux collectivités pour 2023.

Notre pays et nos collectivités ne manquent pas d’atouts pour relever les défis qui sont les nôtres. Nous avons toujours su construire, au cours de notre histoire, dans ces situations de crise, des consensus responsables, au service de l’intérêt général. Je sais que ce sera une nouvelle fois le cas, car, au-delà du débat démocratique indispensable, les postures et les effets de manche ne font plus illusion aux Français. Nos concitoyens ne se satisferont pas d’une nouvelle représentation du spectacle sempiternellement rejoué du combat entre les Montagnards et les Girondins.

C’est collectivement que les Français nous jugeront : sur notre bilan, nos réussites et notre capacité à améliorer concrètement leur qualité de vie. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, dans ce débat, le Gouvernement aura la faculté, s’il le juge nécessaire, de prendre la parole immédiatement après chaque intervention, pour une durée de deux minutes ; l’orateur disposera alors à son tour du droit de répliquer, pour une minute.

Dans la suite du débat, la parole est à M. Hervé Maurey. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Hervé Maurey. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après le quinquennat de François Hollande, caractérisé par la baisse drastique des dotations, à hauteur de 11 milliards d’euros, Emmanuel Macron, lors de son accession à la présidence de la République en 2017, a voulu donner des assurances aux collectivités locales en matière financière.

L’annonce d’une stabilisation du niveau de la dotation globale de fonctionnement avait ainsi été favorablement accueillie.

Malheureusement, la désillusion fut rapide. Dès l’été 2017, le Gouvernement décida d’une réduction de 300 millions d’euros des crédits dédiés aux collectivités, de la suppression de la réserve parlementaire et de la quasi-suppression des emplois aidés.

Quant à la DGF, si son montant a en effet été stabilisé globalement, la réalité pour les communes, à titre individuel, est tout autre, puisque la moitié d’entre elles ont vu leur dotation diminuer ces cinq dernières années.

Les collectivités ont également vu leurs leviers fiscaux considérablement réduits par les réformes fiscales qui se poursuivent aujourd’hui, au détriment de leur autonomie financière.

Dans le même temps, les collectivités locales ont dû faire face à deux chocs sans précédent, la crise sanitaire et l’inflation.

Le choc de la crise sanitaire a coûté 7 milliards d’euros aux collectivités, dont 3,2 milliards d’euros au seul bloc communal.

D’un côté, les pertes de recettes se sont élevées à 3,4 milliards d’euros pour le bloc communal ; de l’autre, la compensation a été limitée à 270 millions d’euros au titre des pertes de recettes fiscales et domaniales et à 250 millions au titre du dispositif d’aide aux services publics industriels et commerciaux (Spic) et aux services publics administratifs (SPA).

À présent, c’est au choc de l’inflation que les collectivités locales doivent faire face.

Je rappelle que j’ai attiré l’attention du Gouvernement dès le mois de février sur les conséquences de l’augmentation des prix de l’énergie, à l’époque sans aucune écoute de sa part…

Le Gouvernement a accru ce choc en juillet en augmentant le point d’indice, pour un surcoût de 2,3 milliards d’euros. Le Gouvernement n’avait pas jugé utile de prévoir un dispositif de compensation pour les collectivités.

Si l’Assemblée a introduit un filet de sécurité, qui a été considérablement amélioré par le Sénat, notamment grâce aux apports du groupe Union Centriste, auquel j’ai l’honneur d’appartenir, celui-ci reste toutefois très limité. Il ne devrait en effet bénéficier qu’à 5 000 à 8 000 communes ou groupements, et se limiter à l’année 2023, alors que ces collectivités font face, dès aujourd’hui, à d’importants surcoûts.

Ce dispositif pose question et je souhaiterais que ce débat soit l’occasion de nous éclairer sur le système d’avances prévu. Quelles communes vont en bénéficier ? Quand et comment ?

Vous avez évoqué précédemment la nécessité de déposer un dossier, madame la ministre, mais la plupart des communes ne savent même pas si elles peuvent prétendre à ce filet de sécurité ! Des clarifications s’imposent. Nous serions très heureux de vous entendre sur ce point.

À notre grande surprise, le projet de loi de finances pour 2023, dont nous aurons l’occasion de reparler prochainement, ne prévoyait pas, dans la version initiale déposée à l’Assemblée nationale, de prolongation de ce filet de sécurité l’année prochaine.

L’augmentation de 320 millions d’euros de la DGF annoncée par la Première ministre et présentée comme « une première depuis treize ans » représente en réalité une revalorisation de 1,2 % de son montant total, quand l’inflation est de plus de 5 %. Nous sommes bien loin de l’indexation de la DGF sur l’inflation demandée par les associations d’élus.

Comme vous l’aurez compris, les élus, et plus particulièrement les maires, sont inquiets des perspectives financières pour leurs collectivités.

J’ajouterai que dans le contexte de transfert de la taxe d’aménagement à l’intercommunalité, certaines situations sont particulièrement complexes. Ce dispositif a été voté par l’Assemblée nationale sans aucune concertation. Il faudra en reparler lors de l’examen du projet de loi de finances.

M. le président. Merci de conclure !

M. Hervé Maurey. Madame la ministre, je ne peux que vous appeler à revoir votre copie sur le prochain PLF pour permettre aux collectivités de faire face à cette période particulièrement difficile. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier.

M. Stéphane Ravier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, y a-t-il encore une décentralisation dans notre pays ? La question mérite d’être posée. Car si l’on décentralise les compétences, la fiscalité, elle, reste jacobine !

Ce gouvernement fait preuve de démagogie fiscale sur le dos des collectivités territoriales.

On a osé parler de « suppression » de la taxe d’habitation, mais rien n’est supprimé pour le contribuable. Les propriétaires supportent la hausse de la taxe foncière et les locataires celle des loyers qui en découle.

Avec la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, les communes finissent de perdre toute autonomie fiscale : peu de ressources propres et plus de ressources réellement dynamiques. Prises au piège, elles sont contraintes de racketter les propriétaires en augmentant la taxe foncière.

Du fait de la hausse des prix de l’énergie de plus de 250 %, de la flambée des prix matières premières, de la restauration scolaire et de l’augmentation du point d’indice des fonctionnaires, les communes n’ont plus de marges de manœuvre.

En ce moment, les maires et leurs adjoints aux finances préparent leur budget pour 2023 et ils s’arrachent les cheveux ! Ils font face à une explosion de leurs dépenses de fonctionnement.

Pourtant, depuis le printemps dernier, je demande en vain au Gouvernement un bouclier tarifaire sur les prix de l’énergie pour les collectivités !

Cet été, on a eu droit, en pleine canicule, à la fermeture de piscines, comme dans les Bouches-du-Rhône, à Cabriès. Cet hiver, on risque la suppression des décorations et des fêtes de Noël.

Pendant ce temps, l’État obèse refuse de descendre de notre dos et de sortir ses mains de nos poches.

La crise qui s’installe montre, une fois encore, l’inefficacité de l’État et la pertinence de la gestion locale. Mais le Gouvernement ne veut rien entendre.

L’État répond par des soins palliatifs à l’asphyxie des collectivités locales : des aides, des hausses des dotations, mais plus de ressources propres.

Les communes restent tributaires du bon vouloir de Bercy et en sont réduites à faire la manche. La Banque postale prévoit une baisse de 11,3 % de son épargne brute cette année. En 2023, les communes épuiseront en quelques mois la totalité de leur budget de fonctionnement. Sans changement, nous allons vers un blackout fiscal communal.

La Cour des comptes, dans son rapport de la semaine dernière, propose que les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) soient recentrés sur le bloc communal. Une telle mesure permettrait aux communes de retrouver une ressource dynamique. Ce serait un juste retour sur investissement, pour elles qui œuvrent avec constance pour l’attractivité du territoire. Cela leur permettrait notamment de financer leurs dépenses de fonctionnement.

Décentraliser la fiscalité, c’est garantir le principe constitutionnel de consentement à l’impôt de nos concitoyens. Quiconque a les pieds dans le réel comprendra qu’il s’agit là d’un enjeu majeur.

Rendre aux communes leur autonomie fiscale, c’est à cela, et à rien d’autre, que nous devons travailler, mes chers collègues.