Mme Patricia Schillinger. Monsieur le ministre, face à la crise sanitaire, il a fallu développer des solutions pour permettre aux citoyens et à notre économie de s’adapter aux confinements successifs.
La pandémie a ainsi accéléré le développement du télétravail. Depuis lors, cette organisation du travail est synonyme, pour bon nombre de nos concitoyens, d’amélioration de la qualité de vie et de bien-être au travail. Mieux encore, à l’heure où le prix du carburant pèse lourdement sur le pouvoir d’achat des Français et où l’urgence climatique exige de limiter l’usage des énergies fossiles, le développement du télétravail fait sens.
La capacité des travailleurs frontaliers exerçant en Suisse à travailler chez eux était jusqu’à présent limitée en raison des règles sociales et fiscales encadrant le travail frontalier.
En effet, fiscalement, le télétravail effectué en France pour le compte d’un employeur suisse est imposable en France. Aussi, dans les cantons où l’impôt est prélevé à la source, les employeurs suisses se réfugient derrière le code pénal, qui leur interdit de percevoir un impôt pour le compte d’un État étranger, et refusent toute heure de télétravail aux frontaliers.
En ce qui concerne le volet social, le droit européen fixe à 25 % le seuil au-delà duquel un frontalier peut exercer une activité salariée dans son pays de résidence. Au-delà, son employeur suisse devra s’acquitter des cotisations sociales en France.
Du fait de la crise sanitaire, la France et la Suisse ont conclu un accord amiable permettant de lever ces obstacles, accord reconduit à plusieurs reprises depuis lors. Tandis que ce dernier doit prendre fin au 31 décembre prochain, des négociations sont en cours en vue de pérenniser la possibilité de télétravailler des frontaliers exerçant en Suisse.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer où en sont ces négociations ? Ces frontaliers peuvent-ils espérer les améliorations sociales et fiscales qui leur permettront un recours accru au télétravail au-delà du 31 décembre prochain ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie. Madame la sénatrice Schillinger, je vous remercie de votre question, qui reprend les interrogations de nombre de parlementaires frontaliers.
Comme vous le savez, 300 000 à 400 000 de nos concitoyens travaillent outre-frontière, et le télétravail, vous l’avez souligné, se développe énormément.
En ce qui concerne la fiscalité, la question posée n’est pas celle d’un alignement impérieux sur les règles sociales que vous avancez. Au contraire de l’assujettissement aux cotisations sociales, les règles relatives à l’imposition de ces revenus ne font l’objet d’aucune coordination au niveau européen, car elles relèvent du droit interne de chaque État et des conventions bilatérales en vigueur.
Par nature, le télétravail n’est pas empêché par le fait que les revenus associés seraient imposés en France plutôt qu’en Suisse. Pour lever les difficultés que poserait le prélèvement d’une retenue à la source pour le compte de la France par les employeurs étrangers, nous proposons une mesure de simplification dans le projet de loi de finances pour 2023, afin de prélever l’impôt par acompte contemporain, sans intervention de l’employeur.
Votre demande va plus loin et supposerait une concession unilatérale et sans compensation. Nous ne pensons pas que ce soit souhaitable. Pour autant, les deux États discutent actuellement d’une solution que nous espérons pérenne et équilibrée, c’est-à-dire respectueuse également des intérêts budgétaires de la France – je suis de Bercy, on ne se réinvente pas ! (Sourires.) Nous espérons aboutir avant le 31 octobre 2022, date à laquelle la tolérance, que nous avons prolongée en dépit de la fin de la pandémie, cessera.
En ce qui concerne la sécurité sociale, lorsque l’activité est exercée sur le territoire d’au moins deux États membres, la législation sociale applicable est celle de l’État de résidence.
Pendant la crise sanitaire, et sur le fondement de la force majeure, une période de flexibilité a été mise en place en faveur des télétravailleurs depuis leur État de résidence.
Cette période a été prolongée jusqu’au 31 décembre 2022. Là encore, une réflexion est en cours au niveau européen sur les conséquences du télétravail sur les règles de coordination des systèmes de sécurité sociale. À cet effet, la commission administrative pour la coordination des systèmes de sécurité sociale a mis en place un groupe ad hoc, dont la France est membre.
nouvelle taxe d’aménagement pour les petites communautés de communes
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Louault, auteur de la question n° 158, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie.
M. Pierre Louault. Monsieur le ministre, ma question s’adressait initialement à la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales.
Alerté par les élus locaux d’Indre-et-Loire, je me permets d’attirer votre attention sur le nouveau fonctionnement de la taxe d’aménagement communale.
Si le financement est bon et l’objectif de la loi pertinent, la mise en pratique est à revoir. Comme vous le savez, ce sont aujourd’hui les mairies qui perçoivent la taxe d’aménagement. Ces dernières ont déjà la possibilité d’en reverser tout ou partie à l’EPCI en fonction des accords locaux.
La loi de finances pour 2022 modifie ce fonctionnement en mettant en place un reversement obligatoire du produit de la taxe d’aménagement des communes aux communautés de communes.
Si l’idée est la bonne, les EPCI étant en charge des plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUi) et de certaines autres compétences comme les réseaux d’eau et d’assainissement, sa mise en œuvre place les communes et les communautés de communes dans une situation délicate.
En outre, les communes ont besoin d’une partie de cette taxe, dont le taux maximum est aujourd’hui de 5 %. Si une commune l’applique déjà, elle devra perdre tout ou partie du produit de ces 5 % pour le reverser à l’EPCI, ce qui grèvera ses recettes alors même qu’elle a aussi engagé des frais, notamment en matière de scolarisation ou de transport.
Une solution pourrait être envisagée avec la création d’une part intercommunale de la taxe d’aménagement, en complément de la partie communale, ce qui aurait le mérite d’une plus grande clarté.
Monsieur ministre, pouvez-vous nous dire ce que le Gouvernement entend faire pour surmonter cette situation difficile ? Il me semble que la solution proposée permettrait d’y parvenir sans engendrer de contentieux entre communes et communautés de communes…
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie. Monsieur le sénateur Louault, vous vouliez Caroline Cayeux, vous avez Roland Lescure, j’en suis bien désolé… (Sourires.)
Vous avez appelé mon attention sur la situation des établissements publics de coopération intercommunale auxquels, depuis le 1er janvier 2022, doit être reversé, totalement ou partiellement, le produit de la part communale de la taxe d’aménagement.
Vous considérez que cette nouvelle disposition place les EPCI dans une situation délicate, dans la mesure où ils devront négocier un montant de reversement avec leurs communes membres.
Je rappelle tout d’abord que c’est l’article 109, issu d’un amendement parlementaire, de la loi de finances pour 2022 qui a modifié les modalités de partage de la taxe d’aménagement entre les communes et leur EPCI, en le rendant obligatoire lorsque les communes perçoivent cette taxe.
En effet, depuis 2010, lorsque l’EPCI se substitue à ses communes membres pour instituer et percevoir la taxe d’aménagement, il doit leur reverser tout ou partie du produit, compte tenu de la charge des équipements publics relevant de leur compétence.
Pour instaurer un parallélisme des formes et pour une bonne adéquation entre les charges et les ressources, le législateur a souhaité s’assurer que les EPCI bénéficient bien d’une partie du produit de cette taxe, compte tenu également de la charge des équipements publics relevant de leurs compétences.
Les règles de ce partage, relativement souples, entre les communes et leurs intercommunalités, restent fonction des dépenses d’équipements engagées.
Toutefois, afin d’en faciliter l’appropriation, les services préfectoraux et les associations d’élus locaux ont été destinataires de toutes les informations utiles pour la détermination du montant de ces reversements. Le Gouvernement a également décidé, à titre exceptionnel, de reporter la date limite de délibération pour en fixer les modalités au 31 décembre de cette année. J’espère que ce délai supplémentaire permettra de répondre en partie à votre interrogation.
nécessaire préservation de la recette fiscale de la taxe d’aménagement pour les communes
Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 168, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie.
M. Max Brisson. Monsieur le ministre, ma question, qui s’inscrit dans le prolongement de celle de Pierre Louault, s’adressait aussi initialement à Mme Cayeux.
Actuellement, la taxe d’aménagement est exigible à la date de délivrance de l’autorisation d’urbanisme. Son versement peut s’effectuer en deux échéances : à douze mois, puis à vingt-quatre mois, soit au début du projet.
La loi de finances pour 2021 a modifié ce calendrier. C’est désormais la date d’achèvement des opérations qui s’impose, c’est-à-dire à la fin des travaux.
Ainsi, les collectivités territoriales se voient imposer un décalage dans le versement d’un impôt qui constituait jusqu’alors une recette d’investissement appréciable, car versée au moment où la collectivité supportait le coût des travaux d’aménagement.
De plus, si la loi laissait jusqu’alors la commune libre de reverser ou non une fraction du produit de la taxe d’aménagement à l’intercommunalité, la réforme rend désormais ce reversement obligatoire pour l’ensemble des communes ayant institué une taxe d’aménagement.
Face à ces mesures de calendrier et de reversement, les maires manifestent un sentiment d’incompréhension. Ils craignent d’assister au transfert progressif de la totalité du produit de cette taxe à l’intercommunalité et donc la disparition de cette recette de leur budget communal. Beaucoup nous disent y voir là le décalage entre un discours qui porte les maires aux nues et une réalité : un coup de canif supplémentaire sur les ressources des collectivités.
Monsieur le ministre, ma question est double : ne serait-ce pas un signe fort adressé aux collectivités locales que de rétablir le calendrier initial ou, a minima, d’établir une compensation pour que les collectivités puissent faire face à ce décalage dans le recouvrement de la taxe d’aménagement ? Ne serait-ce pas un signe fort adressé aux communes et aux maires que de rétablir le caractère facultatif du reversement d’une fraction de cet impôt à l’intercommunalité ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie. Monsieur le sénateur Brisson, même motif, même punition : vous parlez fiscalité, vous avez Bercy ; vous rêviez de Mme Cayeux, c’est avec moi que vous allez devoir composer. (Sourires.)
Vous craignez tout d’abord un décalage dans la perception des recettes des taxes d’urbanisme en raison du report de l’exigibilité des taxes à l’achèvement des travaux.
Je tiens à vous rassurer : les études réalisées en vue de cette réforme ont démontré l’absence de conséquences du décalage de l’exigibilité sur la trésorerie des collectivités locales pour près des trois quarts des montants recouvrés, compte tenu de l’accélération du recouvrement induit.
En effet, l’achèvement des projets de faible ampleur intervient majoritairement en moins de vingt-quatre mois, c’est-à-dire avant l’émission du second titre de perception dans le système antérieur.
Par ailleurs, le transfert permet une optimisation des modalités de liquidation des taxes en sus d’une dématérialisation du processus déclaratif, de la création d’un référentiel des délibérations des collectivités et de l’automatisation du calcul des taxes.
Toutefois, il est effectivement possible, en cas de très grands projets immobiliers s’étalant sur plusieurs années, que le reversement aux collectivités fasse l’objet d’un décalage. Pour cette raison, l’ordonnance du 14 juin dernier, relative au transfert à la direction générale des finances publiques (DGFiP) de la gestion de la taxe d’aménagement et de la part logement de la redevance d’archéologie préventive, crée, pour les constructions dont la surface est supérieure à 5 000 mètres carrés, un système d’acompte permettant de neutraliser ces effets.
Vous craignez enfin que la taxe d’aménagement soit insuffisamment contrôlée par les services de la DGFiP. Là aussi, soyez rassuré : les effectifs de la DGFiP ont été renforcés – 290 agents supplémentaires, issus des directions départementales, rejoindront ses services entre le 1er septembre 2022 et le 1er septembre 2024.
Le processus mis en œuvre pour la liquidation et le contrôle des taxes est particulièrement robuste. Il s’appuie sur l’unification des obligations déclaratives fiscales en matière de taxes d’urbanisme avec celles en vigueur en matière de taxes foncières, ce qui permet de profiter de l’expérience acquise pour la surveillance et la relance des redevables. La DGFiP s’appuiera également sur de nouveaux outils de vérification et de contrôle.
Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.
M. Max Brisson. Monsieur le ministre, vous vous appuyez sur des études de Bercy, nous nous appuyons sur le ressenti des maires, en particulier ceux des petites communes. Ce décalage les inquiète. Ils espèrent que ce reversement pourra redevenir facultatif et expriment leurs doutes sur la capacité de contrôle de la DGFiP.
devenir des conseillers numériques
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Filleul, auteur de la question n° 126, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie.
Mme Martine Filleul. Monsieur le ministre, j’ai été interpellée par Emmaüs Connect Lille, qui accompagne les personnes les plus isolées en agissant sur leur inclusion numérique.
Le constat est clair : malgré le déploiement de 4 000 conseillers numériques, le problème est toujours aussi prégnant.
Quels enseignements quantitatifs et qualitatifs en tirons-nous ?
Je salue la volonté du Gouvernement de doubler le nombre de conseillers numériques d’ici à la fin du quinquennat, pour le passer de 4 000 à 8 000.
Cependant, mis à part l’objectif final, le Gouvernement a très peu communiqué sur sa feuille de route pour y parvenir, ce qui suscite de nombreuses inquiétudes. Comment compte-t-il passer de 3 500 conseillers numériques effectifs aujourd’hui à 8 000 d’ici à 2027 ? Avec quelles orientations ?
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023, une enveloppe de 44 millions d’euros est destinée au financement de la pérennisation des postes de conseillers numériques, afin, comme l’a déclaré le Gouvernement, de « continuer à financer, sur plusieurs années, ces postes ».
De combien d’années s’agit-il et avec quel statut ? Initialement financés par l’État pendant vingt-quatre mois, au maximum trente-six, quelle sera demain la durée du financement ? S’agira-t-il d’une prise en charge intégrale par l’État ?
Se pose également la question du maillage territorial. Là encore, que compte mettre en place le Gouvernement pour corriger la très inégale répartition des conseillers numériques sur le territoire français ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie. Madame la sénatrice, je vous remercie de m’interroger sur la pérennité du programme Conseiller numérique de France Services, qui, tout comme les maisons France Services, me tient à cœur. J’ai en effet la modeste satisfaction d’être à l’origine de cette idée, que j’ai suggérée au Président de la République, m’inspirant des maisons Service Canada, qui accompagnent de manière efficace les Canadiens dans leurs démarches administratives.
Ce programme est porté par la volonté du Président de la République et une enveloppe exceptionnelle de 250 millions d’euros a été engagée au sein du plan de relance.
Tout d’abord, je rappelle cette bonne nouvelle : ce dispositif ayant fait la preuve de son utilité sur tous les territoires – ce que vous avez souligné, madame la sénatrice –, la Première ministre a annoncé sa pérennisation.
Ensuite, au-delà des 44 millions d’euros que vous avez mentionnés, l’État engagera en réalité 72 millions d’euros l’année prochaine pour les conseillers numériques, si l’on prend en compte les contrats déjà en cours et ceux qui sont sur le point de commencer. Nous conservons donc notre ambition d’accompagnement des personnes éloignées des usages du numérique vers leur autonomie avec les outils et dans l’espace numérique.
Je peux d’ores et déjà vous indiquer que le Gouvernement a bien en tête les quelques structures – vous en avez mentionné une – demandant à être rassurées à court terme. Je parle ici des contrats qui se terminent dans les prochains mois. Dans les tout prochains jours, mes collègues Jean-Noël Barrot et Stanislas Guerini feront une proposition aux structures employeuses concernées par cette situation.
Sur les modalités d’utilisation des 44 millions d’euros dévolus aux conseillers numériques en 2023, le sujet des restes à charge employeurs est bien identifié. Le portage du contrat, la réévaluation des dotations selon les capacités de chacun ou le glissement progressif vers plus de mutualisation sont autant de pistes à l’étude.
Je rappelle enfin que Jean-Noël Barrot a annoncé, dans votre région, me semble-t-il, madame la sénatrice, une réactualisation de la Stratégie nationale pour un numérique inclusif. La définition de cette stratégie devra aboutir d’ici à la fin de l’année, en concertation avec les parties prenantes, notamment les collectivités et les associations. Jean-Noël Barrot a clairement exprimé à Lens sa volonté de voir émerger un modèle de financement qui permettra de former de nouvelles coalitions autour de ce grand enjeu d’inclusion numérique, qui doit embarquer toute la société, y compris le monde de l’entreprise.
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Filleul, pour la réplique.
Mme Martine Filleul. Monsieur le ministre, permettez-moi d’insister sur le fait que les collectivités et les structures qui hébergent des conseillers numériques ont vraiment besoin de prévisibilité et de visibilité au regard de la situation actuelle. De la même manière, les conseillers numériques ont besoin d’éclaircissements sur leur véritable statut.
Par ailleurs, il est temps d’avoir une politique publique d’État concernant la lutte contre l’illectronisme.
référentiel applicable aux communes classées stations de tourisme
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Berthet, auteure de la question n° 065, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme.
Mme Martine Berthet. Monsieur le ministre, je souhaite revenir sur la modification du référentiel applicable aux communes classées « stations de tourisme » par l’arrêté ministériel du 16 avril 2019.
En effet, ce classement, défini par les articles L. 133-13 à L. 133-16 du code du tourisme, reconnaît pour douze ans les efforts fournis par les communes qui proposent une offre touristique d’excellence. Cette labellisation suppose de respecter des critères précis définis par l’arrêté ministériel du 2 septembre 2008. Pourtant, en 2019, un nouvel arrêté a modifié les conditions de classement et imposé la présence d’une pharmacie sur le territoire communal d’une station classée, alors que le référentiel prévoyait jusqu’alors seulement l’obligation d’une offre de soins à moins de vingt minutes.
Des communes déjà labellisées ne disposent pas d’une pharmacie. Elles ont mis en place des organisations locales, et cela n’a pas posé problème. Aussi, plusieurs d’entre elles ne pourront pas renouveler leur label en 2024, quand d’autres sont encore en attente de leur classement, et ce alors même que leur offre touristique correspond à l’ensemble des critères d’excellence demandés par l’arrêté de 2008, hormis celui d’une pharmacie sur leur sol.
Lors de mes échanges avec l’Association nationale des élus des territoires touristiques (Anett), l’ordre et les syndicats de pharmaciens, ainsi que le cabinet de Mme la Première ministre, nous avons évoqué le retour au critère de distance de vingt minutes pour les professionnels de santé, en particulier pour les pharmaciens, ou la possibilité, pour le maire, de prouver qu’une livraison de médicaments peut être effectuée en quelques heures pour sa population touristique, dans les conditions réglementaires.
Par ailleurs, une expérimentation est menée en Savoie par l’ordre des pharmaciens, avec la possibilité pour une pharmacie en bas de vallée d’avoir une annexe en station avec un adjoint durant la saison.
Aussi, monsieur le ministre, je souhaite savoir si le Gouvernement est prêt à revenir par décret sur l’arrêté ministériel du 16 avril 2019.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie. Madame la sénatrice, je vous livre la réponse d’Olivia Grégoire – c’est comme si c’était elle qui vous répondait ! Vous avez appelé l’attention du Gouvernement sur des difficultés liées au renouvellement du classement de certaines communes en « communes touristiques » au titre des articles L. 133-11 et suivants du code du tourisme. Le classement en « communes touristiques » traduit la reconnaissance par l’État des efforts accomplis par les communes pour structurer une offre touristique d’excellence sur leur territoire.
La dernière réforme du classement, en 2019, a eu pour objet de déconcentrer la procédure et de rationaliser les critères fixés par l’arrêté du 16 avril 2019. Lors de cette réforme, il a été décidé, en concertation avec l’Association nationale des élus des territoires touristiques et les élus adhérents, d’inscrire les services d’une pharmacie parmi les services de proximité obligatoirement présents sur le territoire de la commune prétendant au classement.
En effet, il a été estimé que les services d’une pharmacie constituaient une offre de service minimale, qui plus est dans les zones de montagne où les déplacements sont plus complexes qu’ailleurs et où la fréquentation touristique est plus forte en période hivernale, sans compter les problèmes de santé plus fréquents. Avec la crise sanitaire, la présence d’une officine facilement accessible est apparue comme un élément encore plus important pour les clientèles touristiques, et pas seulement pour les familles avec jeunes enfants, lesquelles étaient initialement ciblées pour justifier cette obligation.
Pour autant, l’impossibilité d’installer une pharmacie dans une commune de moins de 2 500 habitants peut créer un effet de bord qui risquerait de facto de rendre difficile l’accès de ces communes au classement.
Le Gouvernement partage dès lors vos inquiétudes. Ainsi, dès le mois d’octobre 2022, une concertation sera lancée sur la manière de faire évoluer le classement, tout en maintenant dans les territoires une offre d’excellence pour la clientèle touristique, dans l’optique d’aboutir à une révision au plus tard au début de l’année 2023.
Nul doute que vos propositions seront intégrées à ce travail, qui sera mené avec les élus, en lien notamment avec les services du ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, du ministère de la santé et de la prévention, du ministère de la cohésion des territoires et de l’Anett.
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Berthet, pour la réplique.
Mme Martine Berthet. Il suffit de considérer les pharmaciens pour ce qu’ils sont, à savoir des professionnels de santé, et d’en revenir au critère de vingt minutes auxquels sont assujettis les autres professionnels de santé.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à onze heures quarante-cinq.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
dispositif médical implantable de stérilisation féminine définitive essure
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Deroche, auteure de la question n° 106, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.
Mme Catherine Deroche. Ma question s’adresse à M. le ministre de la santé et de la prévention. Nonobstant le respect que je vous dois, madame la secrétaire d’État, je suis un peu surprise que ce soit vous qui me répondiez, alors que vous êtes chargée de la ruralité. J’écouterai néanmoins votre réponse avec beaucoup d’attention.
Ma question concerne le dispositif médical implantable de stérilisation féminine définitive Essure.
Quatre ans après l’arrêté du 14 décembre 2018 limitant la pratique de l’acte d’explantation de dispositifs pour stérilisation tubaire Essure à certains établissements de santé et prévoyant un recueil d’informations relatif à l’acte d’explantation et après la mise en place plus récente d’un protocole d’explantation élaboré par le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), il se trouve que l’information à destination des femmes porteuses d’Essure et des professionnels de santé doit être largement renforcée.
Le réseau d’entraide, de soutien, d’informations sur la stérilisation tubaire, l’association Resist, dénonce aujourd’hui une situation sanitaire d’urgence pour les femmes souffrant de symptômes liés aux conséquences d’une mauvaise application du protocole d’explantation, comme la non-réalisation des imageries de contrôle préalable à l’intervention chirurgicale et la méconnaissance des risques liés à la casse de l’implant sur leur santé.
C’est pourquoi je souhaite savoir ce qu’il en est du projet de registre des femmes explantées permettant d’améliorer leur suivi et les connaissances scientifiques annoncé au mois de février 2022, de l’étude Ables sur l’amélioration des symptômes après ablation, enfin de la mise en place d’un parcours de soins conforme à l’arrêté de 2018.