Mme le président. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisie d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…
Le vote est réservé.
Vote sur l’ensemble
Mme le président. Avant de mettre aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, l’ensemble du projet de loi, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.
La parole est à Mme Nadine Bellurot, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Nadine Bellurot. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous poursuivons nos travaux avec l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire d’un treizième projet de loi sanitaire.
Comme ce fut le cas par le passé, ce texte comprend un certain nombre de dispositions destinées à doter les pouvoirs publics d’outils servant à accompagner la prévention et la lutte contre l’épidémie : les enjeux et cadres juridiques nous sont donc familiers.
Cependant, ce projet de loi se caractérise par un contexte particulier, puisque les régimes dérogatoires mis en place ces deux dernières années arriveront à leur terme ce dimanche. La question était donc de savoir quels outils nous souhaitions conserver temporairement.
Or, tandis que la septième vague de l’épidémie de covid-19 est toujours en cours, le Gouvernement a souhaité prolonger deux dispositifs : les systèmes d’information SI-DEP et Contact Covid et le mécanisme permettant l’instauration de contrôles sanitaires aux frontières.
Au regard des lourdes dérogations et des régimes d’exception des lois sanitaires précédentes, c’est moins, évidemment. Toutefois, c’est encore accorder au Gouvernement, qui l’a souhaité, d’importants pouvoirs de contrôle des déplacements. La teneur des débats à l’Assemblée nationale en a attesté.
Pour cette raison, le Sénat a suivi les préconisations de son rapporteur, Philippe Bas, dont je tiens à saluer le travail, afin de remanier en profondeur le projet de loi dans le sens d’une plus grande proportionnalité, de la responsabilité et de la clarté.
Nous avons tout d’abord décidé d’inclure explicitement dans la loi l’abrogation des différents dispositifs dérogatoires du droit commun qui s’étaient accumulés dans les textes depuis mars 2020. À l’avenir, réactiver un régime d’exception nécessitera de remettre entièrement l’ouvrage sur le métier devant le Parlement.
Nous avons ensuite voté l’ajustement du dispositif juridique concernant le système d’information, qui permettra de conserver l’accès des Français au certificat covid numérique de l’Union européenne entre janvier et juin 2023, sans dérogation au secret médical ni au contact tracing.
En ce qui concerne la question cruciale des soignants et autres personnels soumis à l’obligation vaccinale, nous avons souhaité offrir une perspective de réintégration aux personnes suspendues, qui ont nécessairement vocation à être réintégrées.
La décision de cette réintégration, comme l’a souligné notre rapporteur, relevait jusqu’ici du seul Gouvernement : le Sénat a fait en sorte que ce soit la Haute Autorité de santé qui en décide le moment venu.
Enfin, face aux incompréhensions et aux inquiétudes légitimes qu’a pu susciter le fameux article 2, nous avons proposé un dispositif juridique très ciblé et exigeant à l’égard de l’exécutif. En effet, il est question non plus de donner carte blanche au Gouvernement pour instaurer des contrôles sanitaires généralisés, mais plutôt de limiter cette possibilité aux voyageurs en provenance de pays où l’apparition de nouveaux variants pourrait susciter des risques sanitaires particulièrement graves. En cas d’activation de ces dispositifs, les voyageurs concernés devront fournir un test virologique négatif.
Ce mécanisme prévoit également un traitement spécifique des outre-mer, où la question de la saturation potentielle des services de santé se pose dans des termes encore plus dramatiques qu’en métropole.
Enfin, en cohérence avec ses positions sur les textes sanitaires précédents, le Sénat avait prévu que le Gouvernement soit tenu de demander au législateur la prolongation de toutes ces mesures au-delà d’une durée initiale limitée.
C’est donc avec satisfaction que je constate qu’il a été possible d’arriver en commission mixte paritaire à un accord constructif, sans compromission, autour du texte sénatorial. Bien évidemment, la rédaction issue des travaux du Sénat a été en partie modifiée – ainsi, la durée initiale des mesures de contrôle que j’évoquais à l’instant a été prolongée d’un à deux mois –, mais l’essentiel de ce que nous avions voté demeure.
La majorité du groupe Les Républicains votera donc ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nassimah Dindar applaudit également.)
Mme le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Mme Esther Benbassa applaudit.)
M. Guy Benarroche. Madame le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, alea jacta est ! (Sourires.)
M. Philippe Bas, rapporteur. On ne saurait mieux dire !
M. Guy Benarroche. Faute de mieux, voilà ce que se sont dit nombre de participants à cette commission mixte paritaire, dont le texte a été écrit et négocié en amont par les rapporteurs.
Si personne ne reproche ces échanges informels, tous, à l’exception des membres des groupes Les Républicains et Renaissance ou RDPI, regrettent ce conclave « pré-CMP » et espèrent que cela ne deviendra pas une habitude.
Certes, comme nous l’avions souligné, le texte issu des travaux du Senat était déjà l’aboutissement d’une négociation entre le Gouvernement et la droite sénatoriale. La commission mixte paritaire aura seulement permis aux parlementaires présents d’exprimer leur regret de ne pouvoir tenir une réelle négociation.
Certains aspects du texte sont à saluer. Je pense notamment à la sortie de l’état d’urgence – toute ambition de réactivation par le Gouvernement sera désormais soumise à acceptation d’une nouvelle loi par le Parlement – et à la prise en compte des acteurs locaux. L’article 2 accorde ainsi un rôle majeur aux élus des outre-mer ou de Corse pour demander la mise en œuvre ou la levée des mesures de contrôle lors des déplacements. Nous saluons le travail du rapporteur et de la commission des lois sur cette question.
Pour autant, ces contrôles pourront être mis en œuvre durant deux mois et non plus un seul. Le texte de la commission mixte paritaire accorde donc davantage de pouvoir au Gouvernement. Au regard du bilan de ces deux années de gestion de crise, quel dommage !
En ce qui concerne l’article 1er, nous regrettons que les remarques de la CNIL demandant une évaluation de l’impact du dispositif SI-DEP n’aient pas été prises en compte.
L’article 2, réécrit par la majorité sénatoriale, reste trop problématique. Certes, il limite la présentation d’un certificat de voyage aux personnes venant de l’étranger ou à toute personne souhaitant se rendre dans les collectivités ultramarines, mais il maintient cette obligation dès l’âge de 12 ans et ne rend pas les tests gratuits pour tous.
Notre groupe reste persuadé que toute modification significative des libertés, telle que celle d’aller et venir, doit se faire de manière non seulement concertée, mais surtout éclairée et précise.
Éclairée, en ce que le Parlement doit bénéficier des mêmes informations que l’exécutif. Il est regrettable, pour ne pas dire plus, que nous ne soyons pas destinataires de manière concomitante au Gouvernement ou au Président de la République des travaux du Conseil scientifique.
Précise, ensuite. La nouvelle rédaction de l’article 2 évoque une « menace sanitaire grave » ou des risques de « saturation du système de santé », expressions qui laissent une marge d’appréciation trop importante au Gouvernement.
Le refus du Gouvernement d’inscrire des seuils ne nous étonne plus : les seuls seuils d’alerte qu’il s’était lui-même imposés depuis quelques mois n’ont eu aucun impact sur sa propre gestion de la crise… Quant à la saturation du système de santé, je ne vous ferai pas offense en affirmant que nous pourrions dès aujourd’hui reconnaître qu’elle est atteinte.
Les autres mesures de veille et de sécurité sanitaire brillent par leur absence – port du masque en lieu clos, encadrement du prix des masques FFP2, contrôle de la qualité de l’air…
Bien avant que le Gouvernement n’engage la discussion sur la troisième dose, nous l’avions alerté sur les disparités vaccinales en lui demandant de s’attacher à comprendre et combattre de tels déséquilibres. Pourtant, alors qu’à peine plus d’un quart des plus de 75 ans ont un schéma vaccinal complet, à savoir deux doses et deux rappels, le Gouvernement détourne le regard des plus fragiles, des plus précaires, des plus éloignés de l’épicentre de notre vie sociale.
J’en profite pour attirer l’attention du Gouvernement sur la nouvelle urgence de santé publique internationale décrétée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à la fin de la semaine dernière. Pourquoi l’État n’arrive-t-il pas à enclencher une vaccination massive contre la monkeypox, à l’instar de ce qui a été fait contre le covid ? Sur le terrain, on s’interroge : y aura-t-il assez de doses de vaccin ? Pourquoi la campagne de vaccination est-elle si lente ?
La direction générale de la santé nous dit qu’il n’y a pas de problème de stock de vaccins, mais elle refuse de nous donner plus d’information en raison du secret-défense !
Pour en revenir au covid, ce texte ne prend toujours pas en compte les propositions présentées par notre groupe. La première disposition à prendre dans le cas d’un virus qui circule dans l’air devrait concerner la qualité de l’air. Mais il n’y a toujours aucun plan ni aucune mesure solide sur l’air des lieux fermés, comme les écoles, dont la sécurisation devrait être votre priorité.
Nous attendions des mesures fortes dès maintenant pour aller vers les populations non vaccinées, ainsi que des mesures claires sur le prix des masques efficaces, comme les FFP2, et sur la gratuité des tests de dépistage, particulièrement essentielle pour ne pas faire des Ultramarins et des Français de l’étranger des citoyens de seconde zone. Nous attendions des rappels forts de l’importance des gestes barrières, pour ne pas transformer le vaccin ou le passe sanitaire en un outil à effets pervers.
Nous souhaitions des discussions éclairées sur l’avancée des données scientifiques quant à l’efficacité éventuelle des vaccins sur de nouveaux variants ou sur la nécessité de conserver ou non les données en jeu à l’article 1er.
Nous demandions des actes et un accompagnement financier sur la qualité de l’air dans nos écoles, maintes fois repoussés et désormais promis par le Président de la République.
Enfin, nous proposions un dialogue réel sur les dangers connus, les dangers prévisibles et les retours d’expérience de la gestion de ces deux dernières années par votre gouvernement.
Rien de cela ne figure dans ce texte. Aussi, notre groupe s’abstiendra. (Mme Esther Benbassa et M. Jean-Pierre Sueur applaudissent.)
Mme le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Mme Éliane Assassi. Madame le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les conclusions de cette commission mixte paritaire nous conduisent au terme du onzième texte sur la situation sanitaire liée à la pandémie de covid-19,…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Le treizième texte !
Mme Éliane Assassi. … mais aussi au terme de tout régime d’exception en la matière.
Dans l’absolu, c’est une bonne chose, d’autant que le tout nouveau rapport de force au Parlement a permis de conserver en CMP les mesures adoptées par notre assemblée.
Ainsi, le Gouvernement ne pourra plus réactiver simplement un passe sanitaire ou vaccinal, ni confiner la population sans repasser devant le Parlement avec un nouveau texte et de nouvelles mesures, qui seraient alors débattues et votées. C’est ce qu’implique l’abrogation complète des dispositifs exceptionnels de lutte contre la pandémie.
Cette mesure emporte notre approbation, tout comme l’instauration d’un mécanisme de protection sanitaire aux frontières si un nouveau variant très dangereux apparaît. Un test pourrait alors être exigé pour l’accès au territoire. Nous n’y sommes pas défavorables non plus, à un bémol près : l’applicabilité de cette mesure aux jeunes de 12 à 18 ans.
Nous avions proposé, en séance publique, que le certificat sanitaire de voyage ne soit pas applicable pour les 12-18 ans, considérant qu’il fallait maintenant épargner à la jeunesse de notre pays toute forme de mesures restrictives, largement délétères pour son état de santé psychique, comme l’avait relevé à plusieurs reprises la Défenseure des droits, notamment. L’ensemble des jeunes mineurs ne devraient pas être concernés par ce genre de mesures. Pour les 12-16 ans, qui sont soumis au choix de leurs parents en matière de vaccination, cela n’est pas entendable.
Par ailleurs, nous nous interrogeons fortement sur le sort qui serait réservé à nos concitoyens ultramarins si ce certificat sanitaire de voyage devait entrer en vigueur.
Nous avions également proposé en séance publique que les élus ultramarins aient un droit d’initiative pour la mise en place de cette mesure. Qui mieux qu’eux pourrait avoir une connaissance assez fine des systèmes hospitaliers outre-mer et de leur saturation ?
Enfin, en ce qui concerne la réintégration des personnels non vaccinés, notre rapporteur a décidé d’évacuer la question en renvoyant la décision à la Haute Autorité de santé, que le Parlement pourra saisir. À elle de décider de la réintégration de ces personnels, s’il est constaté que l’obligation vaccinale n’est plus médicalement justifiée.
Pour notre part, nous pensons que ces personnels devraient immédiatement être réintégrés : comme chacun le sait, le vaccin n’empêche pas d’être porteur du virus, et c’est d’ailleurs bien la logique que vous avez adoptée, mes chers collègues, en instaurant un certificat sanitaire de voyage nécessitant uniquement un test négatif et non un schéma vaccinal complet.
De plus, si ces personnels avaient été suspendus, ce à quoi nous étions fermement opposés, c’était pour protéger les plus vulnérables au service desquels ils étaient amenés à travailler et non pour les protéger eux-mêmes d’un risque de contamination. Aujourd’hui, on nous présente le schéma inverse : ces personnels devraient continuer d’être suspendus, car leur non-vaccination les exposerait à développer une forme de covid dangereuse pour leur propre santé…
Vous voyez où je veux en venir : les arguments « médicaux » ou « sanitaires » restent avant tout politiques. Nous ne sommes pas dupes !
De nombreuses raisons auraient pu nous pousser à nous abstenir sur ce texte, réécrit par notre commission des lois,…
M. Philippe Bas, rapporteur. Et pourquoi ne pas aller jusqu’à le voter ?
Mme Éliane Assassi. … mais les trous dans la raquette que nous constatons nous feront voter contre.
Comme l’a souligné le Conseil d’État dans son avis, si la situation sanitaire semble stable et sous contrôle, et bien que les nouvelles admissions à l’hôpital tendent à augmenter légèrement, ces indicateurs doivent être mis en perspective avec les fragilités que connaît le système de soins.
Que propose le Gouvernement en la matière ? Rien, sinon vivre avec le virus. Ce dernier ne devrait-il pas nous pousser à engager une réforme d’ampleur face à l’état d’urgence de nos hôpitaux qui, lui, n’a jamais cessé, et face à la casse généralisée et désormais totalement assumée de notre système public hospitalier ?
Monsieur le ministre, que vous inspirent les quelque 150 services d’urgences qui ont manifesté leur détresse depuis la fin du mois de mai dernier ? Que vous inspire l’hémorragie de fermetures de lits d’hôpitaux ? Il s’agit là de questions cruciales, qui demeurent sans réponse sérieuse, malgré toutes nos alertes.
Pour toutes ces raisons, vous l’aurez compris, les sénatrices et sénateurs du groupe CRCE voteront contre ce texte, qui est très loin d’être à la hauteur. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Mme le président. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Philippe Bonnecarrère. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre groupe participera à l’allégresse collective en votant ce texte. Celui-ci devrait être largement approuvé, y compris par le Gouvernement, même si M. le ministre, qui avait porté une appréciation sanitaire sur le certificat de vaccination, semble toujours du même avis…
Notre groupe est sensible à l’abrogation expresse de toutes les dispositions relatives à l’état d’urgence et à la sortie de crise. Nous avons suffisamment souligné le caractère liberticide des textes qui nous étaient soumis pour apprécier cette mesure.
Nous approuvons également l’idée de la prolongation du système de collecte statistique. Il est effectivement plus aisé, pour nos concitoyens, de présenter le justificatif de leur situation par le biais de l’application, notamment à l’occasion des déplacements.
Nous approuvons d’autant plus cette prolongation que le texte a évolué sur ce point. En effet, le recours à l’application est soumis au principe du consentement individuel. Ainsi, si l’un de nous fait l’objet d’une vaccination supplémentaire ou d’un test négatif, il approuvera ou non le fait que ces éléments figurent dans le fichier.
Nous sommes également favorables à des mesures de sécurité exceptionnelles en cas de crise liée à une évolution des variants, pour ce qui concerne soit les déplacements internationaux, soit les relations avec l’outre-mer.
En ce qui concerne l’article 2 bis relatif aux personnels soignants non vaccinés, notre groupe ne fera pas de commentaire particulier. Il s’agit d’une mesure normative, qui ne change pas grand-chose, puisque c’est la reformulation de dispositions figurant dans le texte initial.
Je formulerai enfin rapidement quelques observations.
Tout d’abord, la question de la santé publique et, en particulier, de la logique de vaccination a été largement développée au cours du débat. Au-delà du port du masque ou de l’aération, la vaccination est très clairement ce qui a permis à l’ensemble de notre société de surmonter cette situation difficile, même si, à l’évidence, la pandémie subsistera.
Le rappel vaccinal contribue donc à l’immunité dite « collective » ou « populationnelle ». Comme chacun d’entre vous, j’ai pris connaissance du dernier avis du Conseil scientifique en date du 19 juillet dernier, qui insiste sur la nécessité de garder le cap sur la vaccination, en particulier pour les personnes à risque, à savoir les personnes âgées de plus de 60 ans, comme votre serviteur, et celles qui ont des difficultés respiratoires.
Ce qui nous a quelque peu gênés – nous sommes ici autorisés à tout nous dire ! –, c’est cette espèce de petite musique défendant l’idée selon laquelle la vaccination ne serait plus nécessaire, parce qu’elle n’aurait plus la même efficacité.
Dans le texte, mes chers collègues, on ne trouve plus aucune référence à la vaccination ! C’est une sorte de contre-message adressé à nos concitoyens,…
M. Jean-Pierre Sueur. Très juste !
M. Philippe Bonnecarrère. … dont le dilemme est le suivant : dois-je me faire vacciner ou non ? Nous regrettons donc cet état de fait.
Enfin, monsieur le ministre, vous avez apporté une touche d’humour à nos débats, en nous indiquant que vous vous réjouissiez d’avoir pu mettre en place une nouvelle méthode fondée sur le dialogue. Nous entendons votre promesse. Simplement, nous considérons que le dialogue est bilatéral.
À cet égard, vous voudrez bien prier M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement de considérer que le dialogue peut concerner plusieurs groupes, y compris le groupe Union Centriste. Même si nous ne nous vexons de rien, nous sommes tout de même attentifs à ces choses ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe SER. – Mme Véronique Guillotin applaudit également.)
Mme le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Mme Véronique Guillotin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le premier texte de la législature issu d’un accord rapide entre députés et sénateurs, et ce dès la première lecture. Le texte a été adopté hier par l’Assemblée nationale.
Le compromis est quelque chose que nous connaissons bien, ici, au Sénat. Les résultats du travail de M. le rapporteur et de notre assemblée tout entière sur ce texte en témoignent.
Après le rejet de l’article 2 par l’Assemblée nationale, notre rapporteur, Philippe Bas, a réintroduit un possible contrôle aux frontières. Il était essentiel de prévoir une telle mesure, l’épidémie n’étant pas encore éteinte et sa résurgence restant du domaine du possible.
Toutefois, je tiens à exprimer de nouveau ici mes regrets quant à la voie qui a été choisie. Un contrôle sanitaire pourra être instauré aux frontières de l’Hexagone en cas de résurgence d’un variant du covid ou de saturation des hôpitaux outre-mer, mais seul le test fera foi.
Nous sommes nombreux à regretter la suppression de la preuve vaccinale et du certificat de rétablissement. Le débat a laissé le champ libre aux antivax, alors que les faits sont clairs : en plus de protéger la personne concernée, le vaccin, je le répète, limite la circulation virale et en réduit la contagiosité. Certes, les vaccins n’assurent pas une efficacité individuelle et collective à 100 %. La fiabilité des tests n’est d’ailleurs pas non plus totale… Pour autant, devrions-nous ne rien faire ?
Le problème tient aussi au message adressé. Alors que les vaccins anti-covid ont sauvé des millions de vies, ils seraient aujourd’hui devenus inutiles pour lutter contre la diffusion d’un variant dangereux, avant même que les autorités médicales ne s’expriment ?
De la même façon, le maintien de l’article 2 bis, jugé par le président de la commission des lois de l’Assemblée nationale à la fois « inutile, inefficace et dangereux », est apparu à mes yeux comme inutile et, surtout, source de confusion.
M. Jean-Pierre Sueur. Tout à fait !
Mme Véronique Guillotin. Sur le fond, cet article ne change rien au droit actuel, hormis l’automaticité de la réintroduction des soignants non vaccinés, dès que la Haute Autorité de santé aura jugé l’épidémie éteinte.
Après deux avis similaires rendus par le conseil scientifique et l’Académie de médecine, la HAS a tranché la semaine dernière. Elle s’est déclarée de nouveau favorable au maintien de l’obligation vaccinale contre le covid-19 pour les personnels des établissements de santé et médico-sociaux, compte tenu des « incertitudes sur l’évolution de l’épidémie » et de l’« efficacité d’un schéma vaccinal complet à réduire le risque d’être infecté et de transmettre la maladie ».
Toutes les autorités scientifiques s’accordent sur ce sujet. Il est donc regrettable de voir nos assemblées parlementaires jouer sur une forme d’ambiguïté, qui aurait pu mener, je l’ai craint, à l’adoption d’amendements visant à autoriser sans délai la réintroduction trop précoce des soignants suspendus, alors que la période n’y est pas propice. Néanmoins, cette loi a le mérite de préserver l’essentiel – je pense à certains outils de lutte contre l’épidémie.
Tout d’abord, les systèmes d’information – Contact Covid, dont la fin est fixée au 31 janvier 2023, et SI-DEP, prolongé jusqu’au 30 juin 2023 pour prendre en compte les exigences du droit européen – sont indispensables à l’observation de l’épidémie et permettent de poursuivre le suivi statistique ou encore le lien avec les cas contacts.
Par ailleurs, la possibilité de contrôle aux frontières en cas de survenue d’un variant dangereux est rétablie. Nous nous réjouissons que notre amendement, rejeté en séance, ait été repris par la commission mixte paritaire. Le Parlement devra ainsi autoriser ce contrôle aux frontières, s’il est prolongé au-delà de deux mois.
Le changement de titre, souhaité par notre rapporteur, offre par ailleurs une clarification bienvenue. Les réseaux antivax et antipasse se sont réactivés à l’approche de l’examen de ce projet de loi, diffusant des messages mensongers sur une possible prolongation de l’état d’urgence. La nouvelle dénomination permet ainsi d’établir clairement la fin des régimes d’exception. Le plus dur semblant être derrière nous, il paraît logique de revenir à des procédures plus classiques pour un virus lui-même plus classique.
Nous devons continuer, collectivement, à lutter contre la désinformation, en prenant des décisions fondées sur les données scientifiques.
Le Gouvernement a également un rôle majeur à jouer dans la communication des mesures efficaces de lutte contre le covid : gestes barrières, aération des espaces clos, politique vaccinale. À ce jour, je le rappelle, moins de 30 % des plus de 60 ans ont reçu leur deuxième dose de rappel. Mais une meilleure communication est aussi attendue du corps médical s’agissant des nouveaux traitements disponibles, efficaces dans certaines indications. Il y va de la responsabilité de chacun.
Après avoir rappelé ces nécessaires points de vigilance, j’indique que notre groupe votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Martin Lévrier applaudit également.)
Mme le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Mme Esther Benbassa. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’accord obtenu lors de la commission mixte paritaire acte, enfin, la sortie des régimes d’exception que nous subissons depuis le début de l’épidémie de la covid-19.
Pourtant, nous le savons, l’épidémie n’est pas encore derrière nous, 1 300 personnes étant aujourd’hui hospitalisées en soins critiques. Par ailleurs, nous ne sommes pas à l’abri de l’apparition d’un nouveau variant plus dangereux, qui viendrait accroître la tension sur notre système hospitalier à bout de souffle. La lutte contre l’épidémie doit continuer, mais aussi s’adapter.
Tel est l’objet de ce texte, qui allie proportionnalité et nécessité des dispositifs. La prorogation du système SI-DEP, pilier de la lutte contre l’épidémie, est indispensable. La date finalement retenue du 30 juin 2023 me semble toutefois bien lointaine. Il eût été judicieux d’introduire une clause de revoyure permettant de réduire l’effectivité du dispositif, si la situation sanitaire le permet.
En cas d’apparition d’un variant, la mise en place d’un certificat sanitaire de voyage fondé uniquement sur un test semble logique, à l’heure où les vaccins perdent de leur efficacité pour ce qui concerne l’éradication de la contagiosité des sous-variants.
À ce sujet, je tiens à émettre une réserve. En cas de mise en place du dispositif, seules les personnes disposant d’un schéma vaccinal complet ou d’un certificat de rétablissement pourraient prétendre à la gratuité des tests.
Or ce certificat possède une durée de validité de six mois. De ce fait, le test sera payant passé ce délai. Je vois dans une telle situation une réelle inégalité. En octobre 2021, la Défenseure des droits alertait déjà sur le caractère discriminatoire du non-remboursement des tests pour une partie de la population. La solution est pourtant simple : la gratuité des tests pour toutes et tous, vaccinés, non vaccinés et rétablis de la covid.
Si ce texte incarne notre relative adaptation à l’épidémie, il ne permettra pas à l’ensemble de la population de vivre de façon égale avec ce virus. C’est pour cette raison que je m’abstiendrai.