M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Voilà deux jours que nous débattons et je constate que nous avons bien fait de prendre ce temps du débat, sereinement, sans céder à l’urgence.
Dans un pays aujourd’hui particulièrement divisé, nous avons besoin à la fois de concorde, de cohésion, d’humilité – de beaucoup d’humilité – et d’un discours de vérité.
On le voit bien et nous l’avons vu tout au long de cette crise sanitaire : ce qui est vrai aujourd’hui ne le sera pas forcément demain. En tout cas, nous n’avons certainement pas besoin de clivages.
Nous ne répéterons jamais assez combien la vaccination est indispensable, qu’elle protège, évite la propagation du virus et sauve des vies. Force est de constater que cela n’est pas suffisant.
Je regrette que nous en soyons restés à une simple logique de contraintes et d’obligations et que nous ayons oublié l’essentiel : la santé.
Dans cette dérive, je me demande toujours, d’ailleurs, quelle sera l’étape d’après. Alors que, face au virus, une stratégie durable serait nécessaire, c’est l’absence de stratégie qui est aujourd’hui inquiétante.
Je rappelle que plus de 1 200 scientifiques appellent à une vision beaucoup plus globale, qui suppose une action internationale visant à la levée des brevets. Je rappelle qu’il reste 4 millions de personnes à vacciner en France et 4 milliards dans le monde.
Nous avons besoin de protections, de masques FFP2, de détecteurs de CO2 ; nous avons besoin de renforcer la proximité et la politique d’« aller vers » les publics les plus éloignés, de renforcer notre hôpital, de lancer un véritable plan de soutien, de remettre le contrôle parlementaire au cœur de la vie politique.
Dans chacun de ces domaines, le Gouvernement est absent et vous l’avez, madame la ministre, hélas !, encore confirmé.
Le virus mute, il s’adapte. Il est urgent de nous adapter nous aussi et de mettre en œuvre une véritable stratégie durable et internationale de protection.
Ce soir, nous sommes très loin du compte. En conséquence, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ne votera pas ce texte.
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour explication de vote.
Mme Maryse Carrère. Depuis le début de cette crise, le groupe du RDSE a voté, dans sa grande majorité, en responsabilité, avec un seul objectif : éviter le maximum de décès parmi nos concitoyens.
C’est la raison pour laquelle nous avons accepté, parfois avec quelques aigreurs, de brider nos libertés publiques. Nous restons aujourd’hui persuadés que, si la vaccination n’empêche pas la propagation du virus, elle diminue fortement les cas graves et les décès, personne ne peut le nier.
Devant cette cinquième vague, il nous semble que l’effort à fournir nécessite encore de franchir ce cap du passe vaccinal.
Je tiens à saluer le travail réalisé sur ce texte par les commissions, par nos rapporteurs et par l’ensemble des sénateurs.
Le groupe du RDSE se satisfait en particulier d’avoir obtenu quelques avancées : celles qui ont été proposées par notre collègue Nathalie Delattre, sur les jauges dans les établissements recevant du public (ERP) ou sur l’obligation vaccinale des plus de dix-huit ans seulement, mais également, par l’amendement de notre président, l’autorisation parentale unique pour la vaccination de mineur.
Enfin, parmi les satisfactions figure aussi l’abandon de l’obligation de la présentation d’une pièce d’identité jointe au passe vaccinal.
Pour toutes ces raisons, je le répète, la grande majorité du groupe du RDSE votera ce texte. (Mme Nathalie Delattre applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Je ne vais pas reprendre ce qui a été dit, lorsque nous avons débattu de l’article 1er, mais après mûre réflexion, la très grande majorité du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain votera ce texte, en faisant le choix de la responsabilité.
Nous sommes favorables à l’obligation vaccinale, dont le principe a été défendu ici par Bernard Jomier et plusieurs autres collègues, et nous considérons que le texte proposé par le Gouvernement s’en rapproche – plusieurs membres du Gouvernement l’ont d’ailleurs dit eux-mêmes…
Il aurait donc été incompréhensible que nous fassions un autre choix, mais j’insiste sur le fait que ce choix repose aussi sur le fait que le Sénat a apporté des modifications qui nous semblent très importantes, en particulier en ce qui concerne les libertés publiques. Ainsi, nous avons refusé – ce qui aurait été un désastreux mélange des genres – que des personnes non habilitées puissent procéder à des contrôles d’identité. Je rappelle que le Sénat a voté mardi soir contre cette mesure à 303 voix contre 37, ce qui me semble constituer un message fort.
Je terminerai en m’adressant à vous, madame la ministre.
Lors de la commission mixte paritaire, le Gouvernement et la majorité de l’Assemblée nationale pourront naturellement choisir l’intransigeance, la volonté d’avoir raison, y compris contre notre assemblée. Je veux vous dire du fond du cœur qu’un tel choix serait une profonde erreur. Notre débat a été de bonne qualité et il mérite d’être entendu.
Il est donc nécessaire, pour notre population elle-même, que les apports du Sénat à ce texte soient pris en compte ! (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.
M. Loïc Hervé. Au mois d’avril, quand le passe sanitaire a été inventé, il ne devait durer que le temps d’un été. C’était suffisamment beau et romantique pour qu’une majorité de nos collègues croie en cette promesse. Puis, en juillet, il a été étendu ; à l’automne, il a été généralisé et, ce soir, le Sénat s’apprête à accepter un tour de vis supplémentaire.
Finalement, les libertés publiques seraient le seul levier qu’il nous reste pour faire reculer le virus ! Je pense, je l’ai dit à plusieurs reprises, que c’est une erreur.
Et dans cet escalier sans fin qui nous entraîne à contraindre davantage, marche après marche, les libertés publiques, je me pose une question : quelle sera l’étape suivante ?
Nous entrons dans la période la plus importante de la vie démocratique de notre pays, puisque les élections présidentielle et législatives auront lieu dans quelques mois. Alors, quelle nouvelle idée va surgir ? Quelle mesure supplémentaire de contrainte nous proposera-t-on, en sachant que ce qui a été décidé jusqu’alors n’a pas permis de faire reculer la circulation du virus ?
Je voterai évidemment contre ce texte, comme j’ai voté contre l’article 1er. J’étais opposé au passe sanitaire ; je suis opposé au passe vaccinal.
J’espère que notre pays saura retrouver le chemin de la raison et de la protection des libertés publiques. D’autres pays européens ont fait des choix différents des nôtres, y compris dans la période très récente, et l’humilité commande de regarder ce qui se passe ailleurs afin de nous permettre de rester le pays de la liberté.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. À l’issue de nos débats, qui se sont déroulés dans un climat qui honore notre assemblée, je confirme que le groupe communiste républicain citoyen et écologiste ne votera pas ce projet de loi.
J’ai déjà expliqué, lors de la discussion générale, les raisons de notre vote. En fait, ce texte, qui instaure un passe vaccinal, n’apporte rien de nouveau pour notre système de santé. Il ne dégage aucun moyen supplémentaire pour le personnel soignant. Il ne remet pas en cause la logique autoritaire qui prévaut depuis le début de cette crise, même si le Sénat, en votant plusieurs amendements identiques, dont l’un déposé par notre groupe, a supprimé la possibilité pour des personnes non habilitées de procéder à des contrôles d’identité.
Au-delà de la nécessité de se faire vacciner, il reste à prendre des mesures pour convaincre les plus éloignés et les plus réticents et ce projet de loi ignore un certain nombre de mesures, pourtant simples, qui seraient à même de ralentir, voire de stopper, la propagation de l’épidémie.
Enfin, mon groupe regrette que la question de la levée des brevets sur les vaccins soit systématiquement balayée d’un revers de la main. Nous l’avons pourtant évoquée à de nombreuses reprises dans cet hémicycle comme dans d’autres lieux, en particulier lors de l’audition, lundi, de M. Véran. Il y a pourtant nécessité de vacciner l’ensemble de la population mondiale et il y a urgence à exiger des laboratoires pharmaceutiques, qui se sont bien enrichis ces derniers temps, qu’ils participent à garantir le droit universel à la santé.
Je confirme notre opposition à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, pour explication de vote.
Mme Laurence Muller-Bronn. Nous avons entendu la promesse de ne jamais rendre la vaccination obligatoire, celle de ne jamais généraliser le passe sanitaire aux actes de la vie courante, puis celle de ne jamais transformer ce passe en un passe vaccinal.
Que de mensonges ont été proférés sans ciller, sans rougir ! Pensez-vous que les Français n’ont pas de mémoire, qu’ils ne réfléchissent pas ? Croyez-vous qu’ils ont encore confiance ?
Je voterai contre ce texte et ce passe vaccinal !
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Nous arrivons au terme de l’examen de ce texte qui a parfois déchaîné les passions. La très grande majorité du groupe Les Républicains le votera dans la rédaction, très significativement améliorée, issue notamment des travaux de nos deux commissions – je voudrais d’ailleurs en remercier leurs rapporteurs respectifs.
Ces améliorations ont aussi été permises par le climat de sérénité qui a régné en notre sein et auquel chacun a pris sa part. Le Sénat reste un lieu où le débat démocratique, la conversation civique, peut se tenir sereinement. Chacun y défend ses positions et ses arguments, mais nous en débattons en visant l’intérêt commun et pour faire en sorte d’améliorer la loi.
Cela a été également possible grâce à vous, monsieur le président du Sénat, qui avez refusé, la semaine dernière, que nous légiférions dans l’hystérie suscitée alors par certains propos. Nous y avons gagné, et chaque groupe y a pris sa part.
Madame la ministre, je veux également vous remercier d’avoir contribué à la sérénité de nos débats, mais je veux aussi vous dire que le Gouvernement et la majorité de l’Assemblée nationale vont devoir faire un choix lors de la commission mixte paritaire – Jean-Pierre Sueur en a parlé.
Vous pourrez choisir de balayer d’un revers de la main la contribution du Sénat, en espérant peut-être, dans une perspective politicienne, nous rejeter dans le camp des antivax pour que la majorité s’arroge le monopole de la protection vaccinale des Français. Ce serait un mauvais choix !
Vous pourrez aussi choisir de rechercher un minimum de consensus, en considérant que, dans une crise sanitaire aussi profonde, imposer un outil comme le passe vaccinal nécessite de dépasser les limites de la seule majorité.
Nous devrons faire ce choix ensemble, demain. Nous tendons la main, mais nous ne le ferons pas à n’importe quel prix, car il y va du bien commun des Français ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 74 :
Nombre de votants | 338 |
Nombre de suffrages exprimés | 312 |
Pour l’adoption | 249 |
Contre | 63 |
Le Sénat a adopté.
Je veux remercier les membres du Gouvernement qui se sont succédé au banc à l’occasion de nos débats, ainsi que nos rapporteurs et les présidents de la commission des lois et des affaires sociales et les nombreux sénateurs présents.
11
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 13 janvier 2022 :
De onze heures trente à treize heures et de quatorze heures trente à dix-sept heures :
(Ordre du jour réservé au groupe UC)
Proposition de loi relative au port du casque à vélo et dans le cadre d’autres moyens de transport, présentée par M. François Bonneau et plusieurs de ses collègues (texte n° 761, 2020-2021) ;
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à la création d’une plateforme de référencement et de prise en charge des malades chroniques de la covid-19 (texte n° 229, 2021-2022).
À dix-huit heures trente et, éventuellement, le soir :
Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 13 janvier 2022, à deux heures trente.)
nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire
La commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale a désigné deux candidats pour faire partie de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 quater du règlement, ces candidatures sont ratifiées. M. Bernard Jomier, en remplacement de Mme Laurence Rossignol, et M. Thani Mohamed Soilihi, en remplacement de M. Alain Richard, sont proclamés membres titulaires de l’éventuelle commission mixte paritaire.
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER