M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Pour les mêmes raisons que celles que j’ai déjà exposées, je suis défavorable aux deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements.
M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.
M. Loïc Hervé. Je profite de votre arrivée, monsieur le secrétaire d’État, pour vous indiquer que le ministre des solidarités et de la santé, avant que vous le remplaciez au banc du Gouvernement, ne m’a pas répondu sur les chiffres que j’ai cités.
Croyez-moi, je ne souhaite polémiquer avec personne à ce sujet. Mais je le redis, la rubrique CheckNews du journal Libération, dont le rôle est de lutter contre les fake news, a publié un article remarquable qui reprend les chiffres de la Drees du mois de décembre.
Je vais vous envoyer le lien vers l’article, mes chers collègues, afin que vous puissiez le consulter. Je vous invite à le lire intégralement, car il est extrêmement bien fait.
M. Bruno Retailleau. Vous vous trompez !
M. Loïc Hervé. Peut-être, monsieur le président Retailleau, mais je vous assure que vous feriez bien de lire cet article, parce qu’il est extrêmement précis et détaillé et démonte les fausses informations, d’où qu’elles viennent.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Artano, pour explication de vote.
M. Stéphane Artano. Je suis l’un des coauteurs de l’amendement n° 2 rectifié, que je vais évidemment soutenir.
Depuis le début de l’année dernière, je m’oppose au passe sanitaire, au point que certains ont pu dire qu’il s’agissait d’une posture dogmatique.
Je perçois une réelle résistance dans notre pays, plus particulièrement dans mon territoire de Saint-Pierre-et-Miquelon, où s’est déroulé ce week-end un événement malheureux, qui fait l’objet d’une enquête et sur lequel la justice fera toute la lumière.
Quand 15 % de la population d’un petit archipel comme le mien se mobilise, alors que ses habitants sont vaccinés à plus de 92 %, cela doit conduire les responsables publics à réfléchir.
Cet outil n’est pas adapté à tous les territoires. En l’occurrence, il est en train de fracturer un petit territoire insulaire où la cohésion sociale est importante. Je l’ai dit à plusieurs reprises, et je le répéterai ce soir au préfet lorsqu’il conduira une nouvelle réunion sur la mise en œuvre du passe sanitaire : cet instrument est une erreur !
Selon moi – et je suis bien placé, en tant que triple vacciné, pour en parler et en discuter –, il existe d’autres méthodes pour inciter les gens à se faire vacciner. Nous commettons une erreur fondamentale, dont nous n’avons pas forcément mesuré toutes les conséquences.
Au-delà de sa dimension sanitaire, je pense que le passe soulève des questions d’ordre philosophique. Je pense qu’il est en train d’opérer un changement de paradigme dans notre société, preuve en est le mouvement de fond, notamment en outre-mer, contre ce que l’on peut appeler l’obligation vaccinale des personnels médicaux.
J’avais déclaré lors d’une émission de télévision sur Public Sénat que ce mouvement différait de celui des gilets jaunes et que l’on assisterait à un embrasement en outre-mer : ça n’a pas raté !
Il y a d’ailleurs un paradoxe, monsieur le secrétaire d’État, à ce que vous acceptiez, comme vous l’avez fait à l’Assemblée nationale, de reporter l’entrée en vigueur du passe sanitaire ou du passe vaccinal dans des territoires qui ne sont pas suffisamment vaccinés – c’est le cas des outre-mer. C’est un profond paradoxe.
D’ailleurs, si le passe vaccinal est adopté dans les termes fixés par nos collègues députés pour l’outre-mer, je demanderai qu’il soit également adapté au contexte local de Saint-Pierre-et-Miquelon. La disposition qui a été adoptée à l’Assemblée nationale cible des territoires où le taux de vaccination n’est pas suffisant ; je demanderai qu’on l’ajuste aussi à des territoires, comme dans mon archipel, où ce taux est très élevé, parce que je le répète, cet outil n’est pas forcément adapté au contexte sociologique local.
M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.
M. Alain Houpert. Monsieur le secrétaire d’État, je regrette que M. le ministre des solidarités et de la santé soit parti et qu’il n’ait pas répondu sur les chiffres. Après tout, les chiffres, c’est un peu comme les lampadaires pour les alcooliques, cela sert plus à soutenir qu’à éclairer ! (Rires.)
Je voterai l’amendement de Loïc Hervé en tant que citoyen, parlementaire et, enfin, médecin.
Quand on ne disposait pas de tests, on prescrivait ce que l’on appelle des scanners low dose, qui permettaient de déterminer si tel patient était malade ou non J’en ai fait beaucoup, j’en fais encore, mais j’en vois de moins en moins.
S’agissant des chiffres, cela fait deux ans que j’entends des mensonges. On nous a également dit que le vaccin fonctionnait, qu’il empêchait les contaminations et les transmissions. La France est l’un des pays où les habitants sont les plus vaccinés – 91 % des Français sont vaccinés –, et ça ne marche pas !
Je vais donc soutenir Loïc Hervé, qui n’est pas médecin, mais qui est plein de sagesse.
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Je n’ai évidemment pas voté les amendements de suppression de l’article 1er et je ne voterai pas non plus ces deux amendements en discussion commune.
M. Loïc Hervé. Dommage !
M. Bruno Retailleau. Je vais bien sûr m’en expliquer, cher Loïc Hervé.
Le vaccin n’est pas parfait – on le sait –, notamment pour ce qui concerne les contaminations, mais si on sait quelque chose – et les chiffres ont un sens ! –, c’est qu’il nous protège contre les formes graves de la maladie.
Mon cher collègue, vous avez fait allusion à la fameuse enquête de la Drees, qui a été menée entre la mi-novembre et la mi-décembre. Tout le monde ici l’a lue. Les chiffres que vous avez cités sont exacts, mais vous en tirez de mauvaises conclusions.
En effet, ces statistiques portent sur deux populations de taille très différente : les Français vaccinés représentent plus de 90 % de la population, les non-vaccinés moins de 9 %. En réalité, si l’on prend les mêmes chiffres que vous, mais que l’on raisonne en valeur absolue, il y a neuf fois plus de risques pour les personnes non vaccinées d’être admises en réanimation.
Par ailleurs, ce matin, j’ai rencontré des représentants de la Société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR), qui regroupe des professionnels. Au moment même où nous débattons de ce texte, ils sont en première ligne face à l’épidémie.
La SFAR a réalisé une étude : sur 165 sites hospitaliers, mes chers collègues – je vous rappelle qu’il y a 101 départements en France –, les patients admis en soins critiques et en réanimation sont à 80 % des personnes non vaccinées. Cela signifie que le taux de protection du vaccin contre les formes graves de la maladie – je ne parle de la protection contre la transmission du virus ! – s’élève sans doute à 93 % ou 94 %.
C’est la raison pour laquelle je voterai en faveur du passe vaccinal modifié par les amendements de la commission, laquelle a tenu à garantir une stricte proportionnalité du dispositif aux impératifs sanitaires. Cet outil présente l’immense avantage d’éviter au maximum le tri, les déprogrammations et l’encombrement dans les services de réanimation. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. J’ai le sentiment que, depuis le début de notre discussion sur le passe vaccinal, deux débats se tiennent en parallèle et non un débat contradictoire.
Je comprends très bien ceux qui, parmi nos collègues, insistent sur les chiffres, mais je comprends aussi tout à fait les raisons qui poussent certains autres à considérer, à juste titre d’ailleurs, que la vaccination est un élément indispensable de la lutte contre la pandémie. Aujourd’hui, nous ne pouvons en effet que nous féliciter qu’un si grand nombre de Français soient vaccinés.
Je le comprends parfaitement, je l’admets volontiers et je partage cette opinion compte tenu de la situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement, et non de celle dans laquelle nous étions il y a un an et demi quand le nombre de vaccinés était bien moindre.
Aujourd’hui, nous connaissons le nombre de personnes non vaccinées mais, dans les faits, nous ignorons les raisons pour lesquelles elles ne le sont pas. Combien d’entre elles sont ce que vous appelez des antivax, que certains de nos collègues vouent aux gémonies ? Quelle est la proportion des personnes qui n’ont pas eu la possibilité de se faire vacciner ou pour qui ce serait très compliqué de le faire ? Enfin, quel est le nombre de Français qui sont dans cette situation simplement par négligence ? Nous ne disposons pas de statistiques sur cette répartition.
Ce que nous savons en revanche, c’est que les non-vaccinés sont davantage que les autres susceptibles de développer des formes graves, qui les conduiront aux urgences.
Cela étant, je ne pense pas que Loïc Hervé ait contesté ce point – en tout cas, en ce qui nous concerne, nous ne le remettons pas en question.
Nous estimons simplement que, au vu de la situation actuelle, aucune urgence ne justifiait de faire voter une nouvelle loi d’urgence sanitaire. D’ailleurs, nous dénonçons depuis maintenant un an et demi le fait que, petit à petit, cet état d’urgence sanitaire vienne aggraver le climat liberticide qui règne dans notre pays.
Ces lois successives, telle une propagande qui produit ses effets, que l’on pourrait comparer à ceux que ressentirait une grenouille plongée dans une eau froide que l’on ferait bouillir petit à petit, nous habituent progressivement à accepter une société du contrôle social et permanent, camouflé derrière un état d’urgence récurrent. C’est ce que nous mettons en accusation aujourd’hui ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 73, présenté par MM. Sueur, Jomier et Kanner, Mme Lubin, M. Leconte, Mmes Rossignol et de La Gontrie, MM. Durain et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche et Marie, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou, Jasmin, Meunier, Monier et Poumirol, M. Assouline, Mme Blatrix Contat, M. Bouad, Mmes Briquet et Carlotti, M. Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Cozic, Féraud, Jacquin, Lurel, Mérillou, Michau et Montaugé, Mme S. Robert, MM. Stanzione, Temal, Tissot, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au premier alinéa du I de l’article 1er, la date : « 31 juillet 2022 » est remplacée par la date : « 28 février 2022 » ;
II. – Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
– au premier alinéa, la date : « 31 juillet 2022 » est remplacée par la date : « 28 février 2022 » ;
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Nous persistons et nous signons !
Mes chers collègues, vous savez que nous avons toujours veillé, ici au Sénat, à introduire des clauses de revoyure dans les différentes lois sur l’état d’urgence sanitaire.
Comme nous l’avons déjà dit, monsieur le secrétaire d’État, prévoir une échéance au 31 juillet 2022 n’est pas sérieux. Nous considérons, après avoir lu attentivement l’avis du Conseil d’État, que le passe vaccinal justifie davantage encore que cette clause de revoyure soit fixée avant le 31 juillet prochain.
Il est absolument nécessaire que le texte comporte des dispositions visant à garantir le respect des libertés. Nous devons donc être vigilants à ce sujet, et je pense en particulier aux contrôles d’identité.
Par conséquent, il nous paraît tout à fait légitime de défendre un amendement, dont l’objet est analogue à celui d’amendements que nous avons déjà présentés par le passé, et qui, je l’espère, monsieur le rapporteur, suscitera votre intérêt. (Sourires.) Il vise à fixer au 28 février 2022 l’échéance avant laquelle nous nous réunirons afin d’apprécier de nouveau la situation.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 167 est présenté par Mme Benbassa.
L’amendement n° 187 est présenté par M. Ravier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au premier alinéa du I de l’article 1er, la date : « 31 juillet 2022 » est remplacée par la date : « 28 février 2022 » ;
La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 167.
Mme Esther Benbassa. Est-ce normal de déprogrammer l’intervention chirurgicale d’une personne vaccinée atteinte d’un cancer et d’accueillir à sa place une personne non vaccinée contaminée par la covid ?
Spontanément, je comprends l’exaspération de ceux qui sont confrontés à un tel dilemme, qui se pose tous les jours dans nos hôpitaux, mais la réflexion se doit d’être plus approfondie.
Ainsi, les personnes non vaccinées n’enfreignent aucune loi. Le refus de cette vaccination est un droit, la possibilité de se faire soigner l’est aussi. S’opposer aux vaccins peut paraître irresponsable, et bien que cela soit subjectif, je partage cet avis.
Pour autant, un irresponsable n’est-il plus un citoyen, comme l’affirme le Président de la République ? Chacun est libre de ses actes et de ses choix et ne doit pas risquer de se voir privé de ses libertés les plus fondamentales quand ils sont réalisés dans un cadre légal. Mais jusqu’où va la liberté ? C’est la question éthique principale qui se pose.
Quelle sera par ailleurs la prochaine étape : l’interdiction pour les fumeurs de se faire soigner ou encore le conditionnement de nos libertés à nos choix en matière de santé ? Un hôpital public en bonne santé aurait empêché d’avoir à faire face à un tel dilemme. Ce n’est pas aux non-vaccinés et aux autres « irresponsables » – je mets des guillemets – de payer par la privation de leur liberté la politique désastreuse en matière de santé conduite par les gouvernements successifs.
Face à ces enjeux éthiques, le Parlement doit garder la main sur les outils de gestion de la crise. Aussi, je propose que l’on fixe une clause de revoyure au 28 février 2022, soit avant la fin de la session parlementaire, de sorte que nous puissions juger de la nécessité ou non de proroger des mesures jusqu’au 31 juillet 2022.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier, pour présenter l’amendement n° 187.
M. Stéphane Ravier. Permettez-moi de regretter le départ précipité de M. le ministre. Je ne sais pas à quelle occasion il aura fait preuve du plus grand mépris à l’égard du Sénat, si c’est au moment où il était présent dans cet hémicycle ou lorsqu’il en est parti ! En tout cas, si vous cherchiez une raison, mes chers collègues, de sanctionner le ministre et de le renvoyer à ses chères études vaccinales, en voilà une toute trouvée !
Cet amendement vise à en finir avec l’état d’urgence sanitaire le 28 février et non le 31 juillet 2022 et à prévoir la possibilité de consulter le Parlement le moment venu pour reconsidérer la situation.
L’état d’urgence sanitaire n’a pas vocation à devenir notre régime juridique permanent. Le laisser courir pendant sept mois encore, sans aucune possibilité de contrôle, c’est accorder un blanc-seing à l’actuel gouvernement, ainsi qu’à celui qui sera constitué après l’élection présidentielle et dont on ne connaît pas encore les intentions.
Toutes les mesures de restriction des libertés et de contrôle doivent être encadrées, sauf à prendre le risque qu’elles deviennent permanentes, a fortiori à la veille d’échéances électorales majeures.
Je note avec inquiétude un glissement du droit vers le non-droit, une fascination grandissante pour une société du tout contrôle. Je m’inquiète devant la paresse intellectuelle qui conduit certains à tout relativiser.
Les digues de la séparation des pouvoirs sautent ; le Parlement ne peut se dessaisir de sa compétence en matière de contrôle du Gouvernement.
J’ai bien compris, au vu des votes successifs intervenus cet après-midi, que vous cachiez votre proximité idéologique avec le Gouvernement derrière des circonvolutions juridiques. Comment pouvez-vous accepter, monsieur le rapporteur de la majorité de droite, que nous continuions à vivre dans ce régime hybride d’état d’urgence pérennisé ?
En laissant filer cet état d’urgence, vous acceptez d’endormir le Parlement dans un véhicule dont le pilote continue de rouler à tombeau ouvert, pilote élyséen dont la pensée peu complexe en 2016 le conduisait à refuser de déchoir de leur nationalité les auteurs d’actes terroristes au prétexte que l’on ne traite pas le mal en l’expulsant de la communauté nationale, mais qui vante aujourd’hui la déchéance de citoyenneté pour les non-vaccinés !
Pourtant, l’article 1er de la Constitution qui régit notre pays prévoit que la France « assure…
M. le président. Il faut conclure !
M. Stéphane Ravier. … l’égalité devant la loi de tous les citoyens ». Son article 5 prévoit, lui, que « le Président de la République veille au respect de la Constitution ».
Contre cette volonté de fracturer l’unité nationale, j’en appelle à la responsabilité historique de l’opposition !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. J’ai cru déceler un peu de malice dans les propos de notre collègue Jean-Pierre Sueur lorsqu’il a rappelé tout à l’heure que je suis celui qui, dans le texte que nous avons voté en novembre dernier, avait décidé de fixer au 28 février 2022 l’échéance avant laquelle le Parlement aurait dû se prononcer de nouveau sur le maintien du régime de l’état d’urgence sanitaire et de tous les instruments de gestion de la crise.
Mais justement, mes chers collègues, j’ai d’une certaine façon obtenu mieux que ce que j’envisageais à l’époque. En effet, nous débattons aujourd’hui, au mois de janvier et non au mois de février, de l’adaptation de ce régime, sur l’initiative du Gouvernement lui-même, qui a bien dû, compte tenu de l’évolution de la crise sanitaire, se ranger aux arguments que nous avions avancés au mois de novembre, c’est-à-dire que l’on ne peut pas gérer cette crise sans le vote d’une loi par le Parlement !
Cela étant dit, pour que nous puissions nous prononcer avant le 28 février sur la prolongation des instruments d’action donnés au Gouvernement pour lutter contre la crise, il faudrait que, dans quinze jours, celui-ci nous présente un nouveau projet de loi. Ce délai me paraît un peu court et pas très réaliste.
C’est pourquoi j’ai essayé d’imaginer un système alternatif que je crois finalement plus efficace que l’inscription d’une date, comme celle du 28 février, dans la loi, ce que proposent les auteurs de ces trois amendements.
Ce mécanisme, que j’ai proposé à la commission des lois, qui l’a accepté, consiste à mettre, au moment même où nous le créons, le passe vaccinal en voie d’extinction en fixant dans la loi des critères liés à la gravité de l’épidémie. S’ils étaient favorablement réunis, ces critères entraîneraient nécessairement l’abrogation du passe vaccinal là où il s’appliquerait.
Il me semble que ce dispositif, peut-être un peu créatif, a pour lui l’adaptation à la réalité de la situation sanitaire et ne laisse pas les mains libres au Gouvernement – c’est bien notre objectif, n’est-ce pas ? – de maintenir le passe vaccinal si les conditions n’étaient plus réunies d’un point de vue sanitaire.
J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements, tout en partageant l’objectif des auteurs des amendements : faire en sorte que le Parlement garde la main sur l’utilisation de moyens dérogatoires au droit commun et restreignant les libertés des Français. Les propositions adoptées en commission nous permettent de garder la main. Nous n’avons donc pas besoin d’inscrire dans la loi l’échéance du 28 février, qui, au demeurant, me semble trop rapprochée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. À ce stade de nos discussions, je ne vais pas réagir sur la créativité du rapporteur, telle qu’il l’a lui-même évoquée – nous aurons l’occasion d’y revenir – ni sur les critères qu’il souhaite mettre en œuvre pour instaurer un régime de sortie du dispositif que, mesdames, messieurs les sénateurs, vous allez adopter.
Je voudrais simplement le rejoindre sur le fait qu’il n’y a évidemment pas d’abus d’autorité. Est juste octroyée au Gouvernement une possibilité de prendre un certain nombre de mesures dans le cadre donné, en respectant bien sûr une stricte nécessité et une stricte proportionnalité au regard de l’évolution de la situation sanitaire. C’est là une obligation qui pèse sur le Premier ministre : dès lors que la situation s’améliore, nous pouvons sortir du cadre.
Je rejoins également le rapporteur sur le fait que, concrètement, la date du 28 février est bien trop rapprochée pour envisager d’avancer à cette date le terme d’un cadre qui, je le répète, donne une faculté au Gouvernement sans lui laisser les mains totalement libres. Au fur et à mesure des textes adoptés, il me semble effectivement qu’un certain nombre de dispositifs ont été instaurés afin de garantir le contrôle du Gouvernement par le Parlement s’agissant de la mise en œuvre de ces dispositions.
Quoi qu’il en soit, nous ne saurions revenir vers vous dans quinze jours pour vous proposer un nouveau texte, si cette date du 28 février devait être retenue. Nous vous proposons donc d’en rester à celle, initialement prévue, du 31 juillet et j’émets au nom du Gouvernement un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 167 et 187.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 62 est présenté par M. Piednoir.
L’amendement n° 72 est présenté par MM. Vaugrenard, Sueur, Jomier et Kanner, Mme Lubin, M. Leconte, Mmes Rossignol et de La Gontrie, MM. Durain et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche et Marie, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou, Jasmin, Meunier, Monier et Poumirol, MM. Antiste et Assouline, Mme Blatrix Contat, M. Bouad, Mmes Briquet et Carlotti, M. Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Cozic, Féraud, Jacquin, Lurel, Mérillou, Michau et Montaugé, Mme S. Robert, MM. Stanzione, Temal, Tissot, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 180 rectifié est présenté par MM. E. Blanc et Somon et Mmes V. Boyer, Belrhiti et Bonfanti-Dossat.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’alinéa 1
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
… Après le 1° du I de l’article 1er, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis Encourager les gestionnaires de transports en commun à étudier les équipements de traitement de l’air ou des surfaces les plus adaptés aux spécificités de leurs véhicules ; »
II. – Après l’alinéa 2
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
… Après le même 2°, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis Encourager les gestionnaires d’établissements recevant du public à étudier les équipements de traitement de l’air ou des surfaces les plus adaptés aux spécificités de leurs établissements et de leurs activités ; »
La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour présenter l’amendement n° 62.
M. Stéphane Piednoir. Dans le cadre de la lutte collective contre ce fichu virus responsable de la covid-19, le présent projet de loi, on l’a bien compris, contient certaines mesures plus ou moins contraignantes.
Je voudrais, à l’occasion de l’examen de cet amendement, appuyer le message adressé à nos concitoyens quant à la nécessité de renforcer les gestes permettant d’éviter la propagation de l’épidémie. Mais je pense que l’on doit aussi prendre collectivement des mesures pour encourager, dans certaines structures, la mise en œuvre de dispositifs visant le même but.
Ainsi, je propose d’encourager les responsables, publics ou privés, d’établissements recevant du public et de sociétés de transport à investir dans des solutions de traitement de l’air pour éviter la propagation de ce virus.
M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour présenter l’amendement n° 72.
M. Yannick Vaugrenard. Cet amendement étant identique au précédent, je ne vais pas allonger outre mesure le débat.
J’indiquerai simplement que, si elle peut paraître de détail, cette mesure a son importance. Il suffit, et nous en faisons probablement tous l’expérience de manière régulière, de se trouver dans le train, le métro, dans un car ou dans un bus, pour constater certains problèmes d’aération, difficiles à résoudre sur le plan technique.
L’objet du présent amendement est donc, effectivement, d’encourager la mise en place de dispositifs permettant le renouvellement de l’air et le lavage des surfaces dans ces transports en commun.
M. le président. La parole est à M. Étienne Blanc, pour présenter l’amendement n° 180 rectifié.
M. Étienne Blanc. Il est défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Je préférerais que ces amendements soient retirés, car ils n’ont pas une très grande portée législative et traitent de questions qu’il est difficile d’approfondir à l’occasion d’une discussion d’amendements au sein de cet hémicycle.
Est-il pertinent de proposer, par amendement, qu’une campagne de communication soit engagée sur les instruments qui devraient être utilisés en matière de traitement de l’air ou des surfaces dans les transports ? Certainement ! Mais une telle proposition doit aussi être pertinente dans d’autres domaines de l’action publique.
Je vais donc demander aux auteurs, si le Gouvernement leur donne des explications satisfaisantes sur ce qu’il a entrepris, de bien vouloir retirer leurs amendements. À défaut, comme j’ai bon cœur, je m’en remettrai à la sagesse de notre Haute Assemblée.