compte rendu intégral
Présidence de M. Georges Patient
vice-président
Secrétaires :
Mme Jacqueline Eustache-Brinio,
Mme Martine Filleul.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 25 novembre 2021 a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
2
Questions orales
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
taxation des sites de gestion des déchets sur nos territoires
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, auteur de la question n° 1945, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics.
M. Jean-Jacques Michau. Monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi de revenir sur la taxation des sites de gestion des déchets, qui constitue une problématique bien spécifique.
La taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) frappe l’ensemble des sites où l’on gère des déchets polluants. Or, dans la pratique, cette absence de différenciation entre types de sites suscite de nombreuses interrogations.
L’exemple du site d’enfouissement des déchets inertes de Berbiac, dans la commune de Manses, en Ariège, est tout à fait parlant.
Cette installation, où les déchets font l’objet d’une valorisation énergétique par bioréacteur, comme dans d’autres installations conçues sur le même modèle, a nécessité pour les collectivités territoriales un investissement important, de l’ordre de 10 millions d’euros. Exploitée depuis quelques années, elle a fait l’objet en décembre 2019 d’un arrêté préfectoral qui a permis aux services de l’État de vérifier et de valider l’efficience du système.
De plus, un processus de veille et de suivi environnemental particulièrement efficace, piloté par les riverains et des experts indépendants, sous contrôle de la préfecture, permet de s’assurer en permanence de l’absence de conséquences sur la faune et la flore.
Il paraît donc peu compréhensible que cette installation soit taxée au taux maximum de TGAP, de la même manière que d’autres sites bien plus polluants. Nous trouvons injuste de taxer à un tel niveau un système de traitement choisi par des élus locaux en accord avec les services de l’État.
Comment ces difficultés pourraient-elles être prises en compte ? Quelle réforme pourrait être engagée, afin de réduire le taux de TGAP pour ces installations ? Ce taux pourrait rejoindre celui qui frappe les installations d’incinération, par exemple.
Par ailleurs, pour limiter les graves conséquences de cette taxe sur les collectivités territoriales, le Gouvernement compte-t-il mettre en place un dispositif de rétrocession à l’exploitant de la plus grande partie de son produit ? Ce dispositif pourrait prendre la forme d’un fonds de compensation de la TGAP en recettes d’investissement, similaire au fonds de compensation de la TVA (FCTVA).
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le sénateur Jean-Jacques Michau, la composante de la TGAP portant sur les déchets constitue un axe important de la politique environnementale du Gouvernement. En effet, elle contribue au respect de la hiérarchie de traitement des déchets en incitant à leur valorisation, préférable à leur élimination par incinération ou par stockage.
Elle incite ainsi à la réduction des mises en décharge, ce qui est rendu nécessaire par le coût de celles-ci comme par la saturation des installations de stockage.
Dans ce cadre, conformément à la feuille de route de l’économie circulaire, la loi de finances pour 2019 a rationalisé et renforcé les taux de TGAP, avec pour objectif que le stockage et l’incinération ne soient en aucune circonstance moins onéreux que le recyclage des déchets. La réintroduction de différenciations dans les taux au bénéfice de certaines installations serait donc directement contradictoire avec cette démarche.
Toutefois, le Gouvernement ne méconnaît pas l’impact budgétaire que la TGAP peut avoir sur les collectivités territoriales. C’est pourquoi il a soutenu la mise en œuvre de mesures d’accompagnement financier.
Ainsi, parallèlement au renforcement de la TGAP par la loi de finances pour 2019, le législateur a ramené le taux de TVA à 5,5 % pour les opérations de prévention ou celles de collecte des déchets. Il a également fait passer de 8 % à 3 % les frais de gestion perçus par l’État sur la taxe d’enlèvement des ordures ménagères pour les cinq premières années au cours desquelles la part incitative est mise en œuvre. Des dispositifs budgétaires permettent également d’accompagner les collectivités territoriales dans leur transition écologique.
En outre, la création de nouvelles filières de responsabilité élargie du producteur, prévue par la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite « loi AGEC », permet de transférer la charge de la gestion de certaines catégories de déchets vers les acteurs économiques qui les ont produits.
De même, la mise en place de modes de gestion des déchets plus favorables à l’environnement, comme l’extension du tri des emballages ou le déploiement du tri des biodéchets, est soutenue par le fonds « économie circulaire » de l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, dite Agence de la transition écologique), dans le cadre du plan de relance.
Enfin, la mise en place d’un fonds de compensation de la TGAP, sur le modèle du FCTVA, ne ferait pas de sens. En effet, en compensant de manière forfaitaire la TVA que les collectivités territoriales ont acquittée sur leurs dépenses d’investissement et certaines de leurs dépenses d’entretien, et qu’elles ne peuvent pas, à la différence des entreprises, récupérer par la voie fiscale, le FCTVA encourage un comportement vertueux en faveur de l’investissement.
À l’inverse, un dispositif similaire de récupération de la TGAP conduirait à abonder les installations les moins vertueuses, à rebours du principe pollueur-payeur qui sous-tend cette taxe.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour la réplique.
M. Jean-Jacques Michau. Je regrette cette décision, qui pénalise les collectivités territoriales, monsieur le secrétaire d’État.
dépôts d’espèces par les régisseurs des communes
M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, auteur de la question n° 1765, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics.
M. Bernard Buis. Si la question de la nouvelle carte des trésoreries a souvent été évoquée ici, monsieur le secrétaire d’État, c’est une interrogation complémentaire que je souhaite soumettre aujourd’hui. En effet, depuis la réorganisation territoriale des trésoreries, il est très difficile de déposer les fonds recueillis par les régisseurs des communes en l’absence d’une trésorerie proche.
Lors des fermetures des antennes, il avait été prévu que ces versements en numéraire puissent être faits au plus proche, éventuellement dans les agences postales communales. Or il apparaît que ces versements ne sont pas possibles, alors que, en période estivale, leurs montants peuvent s’élever à quelques milliers d’euros, avec la caisse des piscines municipales ou des campings, par exemple.
En conséquence, les régisseurs sont dans l’obligation d’aller jusqu’à une trésorerie désormais éloignée de leur commune. Ils parcourent ainsi plusieurs dizaines de kilomètres en transportant des espèces.
Il me semble important d’apporter une autre réponse, afin de ne pas transformer nos secrétaires de mairie en transporteurs de fonds. J’en prends pour exemple le régisseur qui part de La Motte-Chalancon pour aller à Nyons, parcourant 38 kilomètres, soit quarante-cinq minutes de trajet. À partir du 1er janvier 2022, il lui faudra aller de Lus-la-Croix-Haute à Crest, soit 83 kilomètres pour une heure et demie de route, c’est-à-dire une demi-journée pour effectuer l’aller-retour !
C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, je vous interroge sur la possibilité d’augmenter par dérogation, pour les collectivités locales, le montant maximum des dépôts en espèces, et sur la question de l’acceptation de ces dépôts par les agences postales proches des communes.
Faute d’évolution, il faudra prévoir un financement de ces transports d’espèces par des professionnels comme les convoyeurs de fonds, ou encore la possibilité de déposer ces fonds dans un bureau de tabac.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le sénateur Bernard Buis, votre question me permet de rappeler que le nouveau réseau de proximité de la direction générale des finances publiques (DGFiP) constitue une réforme importante.
Comme son nom l’indique, ce nouveau réseau permet à l’administration des finances publiques d’agir au plus près de nos concitoyens, d’être à leur écoute et d’offrir à nos partenaires des collectivités territoriales des prestations de conseils, comptables et bancaires, par exemple, de plus grande qualité.
Cette réorganisation se fait de façon progressive et concertée avec l’ensemble des élus locaux. Il va de soi qu’elle ne doit pas altérer le travail des régisseuses et régisseurs que vous évoquez – je profite d’ailleurs de l’occasion que vous me donnez de parler d’eux pour saluer leur travail quotidien.
Certes, les régies ne peuvent plus déposer leurs espèces aux guichets des trésoreries, sauf dans les quelques caisses dites « résiduelles » encore ouvertes, mais ils peuvent le faire, et dans de très bonnes conditions de dépôt et de retrait d’argent, dans les bureaux de poste.
En effet, la réduction du nombre de caisses de trésorerie est très largement compensée par l’accroissement du nombre de bureaux de poste partenaires. Presque 3 600 bureaux accueillent aujourd’hui les régies pour ces opérations en espèces. C’est bien plus que les quelque 2 000 trésoreries, avant même leur réorganisation. La prestation offerte par la Banque postale est à cet égard tout à fait satisfaisante.
Cette amélioration repose non seulement sur une plus grande accessibilité des régies, permise par un maillage territorial renforcé, mais aussi sur des conditions de réalisation du service meilleures qu’aujourd’hui, notamment en termes d’amplitude horaire.
Par exemple, les dépôts peuvent aller jusqu’à 30 000 euros dans des sacs scellés et sécurisés, contrairement à ce qui se faisait auparavant dans les trésoreries, et ils peuvent être effectués au rythme auquel celles-ci le souhaitent. C’est un service que l’État prend entièrement à sa charge. Il est vrai, toutefois, que nous leur conseillons d’éviter de déposer des sacs pour de la menue monnaie, car cela ne sert pas à grand-chose.
Vous évoquiez les caisses des piscines municipales. Beaucoup d’usagers des piscines, notamment pendant les vacances, paient leur entrée en espèces. Pourtant, ces mêmes usagers utilisent très facilement le paiement sans contact, en toute confiance, pour leurs paiements de tous les jours chez les commerçants.
Nous invitons donc les régies municipales à se doter de ces moyens d’encaissement du quotidien, pour faciliter le paiement par carte bancaire. La mise à disposition d’un paiement dématérialisé relève d’une obligation réglementaire et évite d’avoir à se déplacer dans les bureaux de poste pour de la petite monnaie ; en tout cas, cela réduit la fréquence de ces déplacements.
M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour la réplique.
M. Bernard Buis. Monsieur le secrétaire d’État, le problème est que les agences postales communales ne peuvent encaisser que 500 euros par semaine, ce qui est relativement peu par rapport aux encaissements de menue monnaie dans les campings et les piscines municipales.
Nous devons trouver une solution, car la dématérialisation des paiements que vous évoquez n’est pas encore pour demain dans nos campagnes. Aujourd’hui, nos régisseurs sont, malheureusement, transformés en convoyeurs de fonds.
fiscalité des travailleurs frontaliers au grand-duché de luxembourg
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, auteur de la question n° 1877, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le secrétaire d’État, votre gouvernement a signé le 20 mars 2018 une convention bilatérale entre la France et le Luxembourg qui est destinée à traiter des questions fiscales pour les particuliers et les entreprises. Elle remplace celle qui était en vigueur auparavant, qui avait été signée en 1958.
À l’instar de Christian Eckert, ancien secrétaire d’État au budget, de nombreux experts de la fiscalité ont tiré le signal d’alarme sur le risque évident de majoration d’impôt induite par le nouveau mode de calcul – risque bien réel, contrairement à ce que des parlementaires de votre majorité ont affirmé.
Le 10 octobre 2019, votre gouvernement signait donc un avenant à la convention pour revenir sur la méthode d’exonération. Cet avenant est entré en vigueur pour les revenus de l’année 2020. L’administration fiscale, accusée publiquement par des élus de votre majorité d’être responsable des conséquences de leurs propres décisions, a mis en œuvre les modalités d’imposition prévues par le législateur.
Selon la direction générale des finances publiques (DGFiP) en Moselle, ce sont 25 000 dossiers qui doivent actuellement être revus, et non pas ceux d’un contribuable sur 200, comme l’affirme un rapport rédigé sous l’égide de la majorité parlementaire. Au passage, l’intersyndicale des finances publiques, dont les membres, en général, savent compter, n’évoque pas moins de 100 000 dossiers à reprendre !
Le 1er octobre 2021, le Gouvernement a suspendu cette convention pour deux ans, et l’administration invite par écrit près de 100 000 contribuables à demander la correction de leur imposition en déclarant un revenu net de charges et impôts luxembourgeois.
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous assurer que ces dispositions n’incitent pas les contribuables à contrevenir à plusieurs principes fondamentaux de notre droit ?
L’avenant stipule que l’impôt luxembourgeois n’est pas déductible des revenus. Aussi comment allez-vous inscrire dans un cadre légal et pérenniser cette instruction donnée à votre administration ? Pouvez-vous nous affirmer que vous ne créez pas une situation d’inégalité avec nos compatriotes frontaliers en Allemagne ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le sénateur Jean-Marc Todeschini, comme vous l’indiquez, le Gouvernement a récemment annoncé des mesures exceptionnelles pour l’ensemble des foyers fiscaux percevant des revenus de source luxembourgeoise.
La nouvelle convention franco-luxembourgeoise permet de moderniser la méthode d’élimination de la double imposition pour les résidents de France percevant des revenus de source luxembourgeoise, pour tenir compte des standards de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
L’ancienne méthode d’élimination de la double imposition concernait les rémunérations de source publique, pensions de sécurité sociale et revenus fonciers de source luxembourgeoise, en retenant la méthode dite « de l’exemption ».
Cette méthode d’élimination, qui n’était plus conforme aux standards de l’OCDE, pouvait aboutir, dans certaines situations, à une double exonération d’impôt injustifiée, notamment par rapport aux contribuables soumis à des conventions respectant les standards de l’OCDE.
La nouvelle convention fiscale prévoit donc que les revenus de source luxembourgeoise donnent droit à un crédit d’impôt égal à l’impôt français. Cela permet de neutraliser effectivement toute forme de double imposition.
Le passage d’une méthode à l’autre peut toutefois avoir une incidence sur le taux d’imposition appliqué aux autres revenus perçus en France. Dans certaines situations, comme vous l’avez dit, l’application de cette nouvelle convention peut entraîner des augmentations d’impôts par rapport à la situation antérieure.
Afin de préciser l’ampleur de cette incidence pour les contribuables, le Gouvernement procède à une évaluation complémentaire de l’impact du changement de méthode d’élimination de la double imposition. Dans l’attente des résultats de cette évaluation, qui sera présentée au Parlement, les foyers concernés pourront exceptionnellement demander, pour ce qui concerne l’élimination de la double imposition, l’application des stipulations de l’ancienne convention.
Ces mesures exceptionnelles, annoncées le 1er octobre 2021, ont été précisées par une instruction fiscale, publiée le 11 octobre 2021 et dont peuvent se prévaloir les contribuables concernés, ainsi que par une communication adressée par la DGFiP le 12 octobre 2021 à l’ensemble des services locaux concernés et détaillant l’ensemble des modes opératoires nécessaires à la traduction de cette annonce.
Le traitement des opérations de régularisation sera réalisé par le service des impôts des particuliers. Nous verrons, une fois l’impact du changement de méthode précisément documenté et communiqué au Parlement, les suites qu’il conviendra, le cas échéant, d’apporter.
À ce stade, les mesures exceptionnelles concernent l’imposition des revenus de 2020 et 2021.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour la réplique.
M. Jean-Marc Todeschini. Dur métier que celui de secrétaire d’État, quand il faut répondre à propos d’un sujet que l’on ne traite pas soi-même ! (Sourires.)
Votre réponse, bien sûr, ne me satisfait pas du tout. Les contribuables ne doivent pas être pris dans ce jeu de dupes, avec un retour à la convention initiale dès les élections passées !
Nous étions censés avoir affaire à un gouvernement de professionnels… Aussi, comment se fait-il qu’aucune simulation n’ait été réalisée avant que cette convention ne soit signée ?
arrêt brutal du mécanisme de soutien financier destiné aux petites et moyennes entreprises s’impliquant en normalisation
M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, auteur de la question n° 1908, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie.
M. Thierry Cozic. Monsieur le secrétaire d’État, les normes volontaires sont partout, jusque dans la vie quotidienne.
Il en est ainsi, par exemple, du format du papier à lettres, du format des prises de chargeurs de téléphones portables ou du format de compression audio et vidéo MPEG, pour Moving Picture Experts Group. On compte actuellement en France environ 35 000 normes publiées, reconnaissables aux indicatifs sous lesquels elles sont enregistrées.
Ces normes sont destinées à fournir des règles de conduite ou des bonnes pratiques dans des domaines extrêmement variés de l’activité des entreprises auxquelles elles s’adressent essentiellement.
Je souhaite aujourd’hui vous alerter sur l’arrêt brutal du mécanisme de soutien financier destiné aux PME s’impliquant dans la normalisation et mis en œuvre par la sous-direction de la qualité pour l’industrie et de la normalisation (Squalpi).
L’arrêt de ce dispositif entraînera un retrait important de certaines professions dans le domaine de la normalisation, alors même que le montant de l’aide financière et sa durée étaient deux éléments contribuant positivement à la décision d’un dirigeant de PME de s’y impliquer.
Le dispositif Squalpi permet d’accompagner de manière efficiente nos PME, tout en leur garantissant une compétitivité réelle. Je tiens à dire que le crédit d’impôt recherche (CIR), présenté comme le véhicule budgétaire suppléant à ce dernier, n’est pas le dispositif idoine pour encourager et accompagner nos PME dans le processus de normalisation.
Aussi, il eût été judicieux d’introduire par voie d’amendement gouvernemental au projet de loi de finances la réinstauration de ce dispositif vertueux, qui s’inscrit pleinement dans les objectifs gouvernementaux du programme France Relance.
Cela n’a pas été fait, et, en raison du rejet de l’article d’équilibre voté par mes collègues de la majorité sénatoriale, l’occasion ne m’a pas été donnée de proposer un tel amendement au Sénat. Pourtant, la réintroduction de ce dispositif serait naturellement perçue comme un signal fort pour nos industriels qui œuvrent à proposer une relance des plus fortes.
Il faut donc réintroduire une nouvelle version de ce mécanisme de soutien, qui devra nécessairement s’inscrire dans la durée – trois ans, dans l’idéal, avec des possibilités de prolongation –, du fait de la temporalité spécifique liée au processus de rédaction des normes européennes et internationales.
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, prendre un tel engagement aujourd’hui devant la représentation nationale ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le sénateur Thierry Cozic, comme vous le soulignez, afin de renforcer l’implication des PME dans la normalisation, la direction générale des entreprises (DGE) a mis en place en 2007 un programme de soutien financier à des groupements sectoriels de PME désireuses de participer aux travaux de normalisation européens et internationaux.
L’État apportait à ces entreprises une subvention pouvant couvrir jusqu’à 50 % des frais de déplacement suscités par la participation de leurs experts aux réunions.
Entre 2007 et 2007, une soixantaine de projets ont ainsi pu être accompagnés, pour un montant d’environ 9 millions d’euros, dans des secteurs concernant plus de 250 000 PME.
L’érosion progressive des demandes a conduit la direction générale des entreprises à clôturer ce dispositif, qui semblait avoir assuré sa mission d’initiation auprès d’entreprises peu familières de la normalisation et encore mal outillées pour y prendre une part active et profitable.
Toutefois, les PME ne sont pas privées de solutions pour réduire la charge financière que représente leur participation aux travaux de normalisation. En effet, l’article 8 du décret n° 2009-697 relatif à la normalisation prévoit que les PME sont exonérées de participation aux frais d’élaboration des normes au sein des commissions de normalisation. Cette disposition a été confirmée lors de la révision, le 10 novembre 2021, de ce décret.
Les PME ne conservent donc à leur charge que les frais liés à leur personnel s’engageant dans les travaux. Pour ces frais, elles peuvent bénéficier du CIR, qui rend éligibles les dépenses engagées au titre de leur participation à des travaux de normalisation.
Les dernières données étudiées en 2016 ont mis en évidence que plus de 250 TPE ou PME avaient bénéficié du CIR au titre de la normalisation. C’est là un flux de bénéficiaires sensiblement plus dynamique que celui qui a été engagé par le dispositif Squalpi.
La commodité du mécanisme déclaratif du CIR, dont les usagers peuvent de surcroît demander simultanément la prise en compte de leurs dépenses de recherche et développement, apparaît comme un réel facteur d’attractivité et d’efficacité pour ces entreprises.
Je souligne aussi que, depuis l’extension des mécanismes de subvention, nous n’avons pas observé de diminution du nombre de PME siégeant dans les commissions de normalisation. Ces éléments constituent donc un cadre très encourageant pour que les TPE et PME s’engagent dans ces travaux et y défendent leurs intérêts.
projet de liaison ferroviaire roissy-picardie
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, auteur de la question n° 1834, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports.
M. Stéphane Demilly. Madame la secrétaire d’État, ma question concerne le projet de barreau Creil-Roissy. Jusqu’ici, ce projet de ligne ferroviaire, destiné à faciliter la mobilité entre l’Île-de-France et la Picardie, était, si j’ose dire, sur de bons rails. (Sourires.)
Au mois de septembre 2020, le ministère de la transition écologique avait officiellement annoncé une mise en service en 2025. Élus et usagers picards s’en sont réjouis : le barreau Creil-Roissy, qui est inscrit dans le projet de loi d’orientation des mobilités, est attendu dans la région depuis plus de vingt ans…
On estime que près de 4 millions de voyageurs emprunteront annuellement la liaison dès sa mise en service, dont plus des deux tiers pour leurs transports du quotidien.
Pour Amiens, la liaison va ouvrir la ville au réseau à grande vitesse. C’est une ouverture, d’une part, vers l’est et le sud-est de la France – je pense par exemple à des villes comme Strasbourg, Lyon ou Marseille –, sans changement à Paris, et, d’autre part, à un nouveau bassin d’emplois pour les Amiénois et, inversement, aux compétences et aux atouts de notre grande ville picarde pour les Franciliens.
Je salue d’ailleurs la ténacité des élus locaux, dont Brigitte Fouré, maire d’Amiens, pour l’aboutissement de ce chantier ferroviaire.
Travailleurs, touristes et investisseurs… Tous attendent avec intérêt la mise en place du barreau de liaison Roissy-Picardie. Mais, car il y a un « mais », alors que l’arrêté préfectoral déclarant le projet d’utilité publique était annoncé pour le mois de juillet, nous attendons toujours sa publication.
On parle aujourd’hui d’une publication au mois de décembre. Il ne faudrait pas que la mise en service promise en 2025 soit une fois de plus repoussée, d’autant que, lors de sa venue à Amiens voilà une semaine, le Président de la République a réaffirmé que les délais seraient tenus.
Qu’en est-il concrètement aujourd’hui ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Stéphane Demilly, vous interrogez le Gouvernement sur l’état d’avancement du projet de barreau ferroviaire Creil-Roissy, également connu sous le nom de liaison ferroviaire Roissy-Picardie. En tant qu’ancienne rapporteure à l’Assemblée nationale du projet de loi d’orientation des mobilités sur le volet infrastructures, je sais l’attachement des élus et des acteurs du territoire à ce projet.
Vous l’avez souligné, le dossier est hautement prioritaire pour le Gouvernement. Le Président de la République l’a lui-même rappelé lors d’un déplacement à Amiens le 22 novembre dernier. Je crois que nous pouvons nous en réjouir.
Vous le rappelez à juste titre, le projet est essentiel pour le développement économique du territoire concerné. Il répond aux besoins de dizaines de milliers de travailleurs qui se rendent quotidiennement dans ce premier bassin d’emploi qu’est Roissy.
L’enquête publique s’est bien déroulée du 23 février 2021 au 6 avril 2021, et la commission d’enquête a rendu un avis favorable au projet le 13 mai 2021, avec toutefois une réserve, vous le savez, sur les nuisances sonores et visuelles pour les territoires traversés.
Cette réserve doit donc être levée pour que le préfet puisse prendre l’arrêté de déclaration d’utilité publique. Pour cela, nous devons collectivement renforcer l’acceptabilité du projet pour les communes traversées. C’est ce à quoi les services du ministère chargé des transports et SNCF Réseau travaillent évidemment d’arrache-pied avec le préfet du Val-d’Oise. Vous savez que la bonne réalisation du projet en dépend. Nous souhaitons que l’arrêté puisse être pris dans les prochaines semaines une fois la réserve levée.
Parallèlement, je vous confirme que les études se poursuivent et le projet ne souffre d’aucun retard à ce jour. L’engagement des premiers travaux est donc prévu dès 2022, dans le respect des objectifs de calendrier fixés par le Président de la République.
spécificité des bacs fluviaux à passager et droit de l’union européenne