M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour la réplique.
M. Mathieu Darnaud. Madame la ministre, je forme le vœu que vos souhaits soient entendus à l’Assemblée nationale.
Nos concitoyens ont besoin de proximité ; nous réclamons plus de décentralisation et plus de confiance dans les élus locaux, qui ont montré encore, durant cette crise sanitaire, qu’ils étaient les véritables fantassins de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Stéphane Artano et Henri Cabanel applaudissent également.)
valeurs éducatives
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Laurence Rossignol. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le ministre, je souhaite évoquer avec vous la une du Figaro Magazine, qui révèle que nos enfants subiraient à l’école un endoctrinement. À l’appui de cette thèse, Le Figaro Magazine identifie deux dérives : l’antiracisme et la lutte contre l’homophobie.
Il me semblait, jusqu’alors, que l’antiracisme et la lutte contre l’homophobie faisaient partie des valeurs universelles, de celles que décline la devise de la République : « Liberté, Égalité, Fraternité ». Les enseignants, et de nombreux citoyens, ont ainsi été choqués par cette campagne.
Monsieur le ministre, face à cette offensive, les enseignants ont besoin de vous entendre leur dire que l’antiracisme et la lutte contre l’homophobie sont bien des valeurs que l’école a mission de transmettre aux enfants, et que vous les soutenez.
Telle est la réponse que je vous propose de donner à cette question ! (Sourires. – Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Madame la sénatrice, je vous remercie de cette question-réponse et je vous laisserai avec plaisir poursuivre la réponse quand vous reprendrez la parole !
Je souhaite tenir des propos très simples et vous m’en donnez l’occasion, même si je n’ai pas vocation à réagir à chaque article de journal, au risque d’y consacrer mes journées.
L’école, nous en sommes tous d’accord, transmet des connaissances et des valeurs. Lorsqu’elle transmet des connaissances, elle est au cœur de son métier : l’instruction publique. C’est la raison pour laquelle j’insiste tant sur lire, écrire, compter et respecter autrui – on est alors déjà dans votre sujet.
Lorsqu’elle transmet des connaissances, elle transmet ipso facto des valeurs. En effet, si l’on ne sait pas bien lire, on se trouve déjà en difficulté sur la transmission de tout, y compris des valeurs.
Ensuite, l’école transmet des valeurs, en complément de la famille, bien entendu. C’est pourquoi il est important que la famille et l’école convergent. Elle le fait au titre des principes de la République – « Liberté, Égalité, Fraternité » –, et nous avons aussi beaucoup insisté sur la laïcité, car c’est le cadre qui permet l’épanouissement de ces principes.
Ces idées sont claires, elles constituent le socle républicain et il me semble que, à gauche, à droite comme au centre, partout dans l’hémicycle et dans le pays, on pourrait s’accorder sur cela.
Bien entendu, la lutte contre le racisme, le féminisme, la lutte contre l’homophobie s’intègrent complètement dans « Liberté, Égalité, Fraternité », je le dis très fortement. Je soutiens les professeurs qui opèrent cette transmission des valeurs, il n’y a aucun doute sur ce point.
Pourtant, il est exact aussi que notre société est traversée par des courants – je l’ai beaucoup dit ces derniers temps –, parfois venus de l’extérieur, y compris des États-Unis, lesquels ont une résonance dans certains cercles intellectuels et ne sont pas sans influence sur ce qui se passe à l’école ; ne pas le voir serait une erreur.
Madame la sénatrice, je n’ai pas lu les articles que vous avez relevés, j’ai seulement vu leur titre. De mon point de vue, il importe que nous soyons fermes sur les principes républicains sur la base de l’humanisme, c’est-à-dire pas dans une course victimaire. Au contraire, nous devons défendre l’idée que, parce que tous les êtres humains ont la même égale dignité, nous défendons tout le monde contre toute discrimination à l’école. Nous le faisons au nom de l’humanisme et non de la lutte des identités au sein de l’enceinte scolaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe UC. – Mme Colette Mélot applaudit également.)
M. Max Brisson. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour la réplique.
Mme Laurence Rossignol. Monsieur le ministre, votre réponse me va bien et je suis heureuse de vous avoir offert l’occasion de la donner au Sénat. Je forme le vœu qu’elle atteigne les enseignants.
Il existe, effectivement, des idéologies nouvelles, qui font l’objet de débats et que l’on peut critiquer, apprécier plus ou moins, voire ne pas apprécier du tout. Pour autant, tout ne se vaut pas.
Mes pensées vont en particulier à la jeune Dinah, cette élève victime de harcèlement scolaire, qui s’est suicidée. Elle était d’abord victime de harcèlement raciste, lesbophobe, homophobe. Elle s’est suicidée parce qu’elle n’en pouvait plus d’entendre « sale métisse » et « sale lesbienne ».
Aujourd’hui, il faut d’abord protéger nos élèves du racisme, de l’antisémitisme et de l’homophobie. C’est cela qui les tue ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST, ainsi que sur des travées des groupes RDSE, RDPI et UC.)
avenir de la sécurité sociale
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour le groupe Les Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Mouiller. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (Hcaam), qui constate, comme nous tous, l’augmentation des déficits de la sécurité sociale – ceux-ci atteindront 22 milliards d’euros en 2022 – vient de proposer un nouveau et énième scénario pour sortir de ces déficits chroniques, lequel s’apparente à la création d’une « grande sécu ».
Ce n’est pas un hasard. Vous avez ainsi déclaré en octobre : « j’ai semé des petits cailloux pendant la crise sanitaire […] et je n’ai vu personne s’en plaindre ».
Ce scénario coûterait, au minimum, plus de 20 milliards d’euros aux finances publiques, pourtant déjà bien mal en point. Il est vrai que le « quoi qu’il en coûte » permet toutes les audaces !
L’essentiel n’est pourtant pas là. Derrière cette proposition, on retrouve le dessein, porté depuis dix ans déjà, avec François Hollande puis avec Emmanuel Macron, d’étatiser notre système de santé.
Comment peut-on croire encore que l’État, champion des déficits, pourrait se charger de nouvelles dépenses ? S’il était aussi bon gestionnaire, cela se saurait, et les Français n’auraient pas à supporter à la fois des impôts record et une dette qui ne cesse de se creuser.
Pour revenir à la santé et à l’hôpital public, si celui-ci n’était pas suradministré, les patients seraient peut-être mieux accueillis et les personnels soignants, plus nombreux, travailleraient peut-être dans de meilleures conditions !
Faute de réformes et de moyens, l’État régule les dépenses de santé par la pénurie ; c’est cela la réalité à laquelle les patients sont aujourd’hui confrontés.
Étatiser les dépenses de santé, c’est aller chercher comme remède la cause même de nos déboires.
Monsieur le ministre, ne croyez-vous pas qu’étatisation rime avec grande illusion, et monopole d’État avec déficit ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Tout d’abord, permettez-moi de vous remercier, monsieur le sénateur, de me permettre de discuter d’un rapport que ni vous ni moi n’avons lu, mais qui est d’ores et déjà largement commenté.
Ni vous ni moi ne l’avons lu, puisqu’il sort demain.
Il fait pourtant couler beaucoup d’encre. C’est intéressant : peut-être touchons-nous un point sensible ? Quel est-il ? Les complémentaires santé sont des acteurs majeurs de la protection sociale, mais elles coûtent cher. Leurs coûts de gestion atteignent 19 % à 20 %, alors que ceux de l’assurance maladie sont à 3 % ou 4 %.
M. Vincent Segouin. C’est incomparable, vous faites de la démagogie !
M. Olivier Véran, ministre. Cette différence pèse sur le budget des ménages ; il s’agit donc d’un enjeu de pouvoir d’achat, encore plus important pour les retraités, les étudiants ou les personnes sans emploi.
Nous nous demandons comment améliorer le pouvoir d’achat des retraités ; il me semble que cette question fait l’objet d’un consensus dans cet hémicycle.
Néanmoins, confier au Hcaam, comme je l’ai fait, une mission de réflexion sur le rôle de chacun des acteurs de la protection sociale, ce qui arrive tous les dix ans, n’emporte aucune conséquence quant à des démarches gouvernementales. Il n’y a pas de réforme sous-jacente à cette réflexion, mais il est intéressant de se poser la question.
Vous le voyez bien : avant même que le rapport soit sorti, on ne compte plus les tribunes et les commentaires qui décrivent déjà ce qu’il faudrait faire ou ne pas faire.
Attendons le rapport. Les premières conclusions qui me sont parvenues, que je retrouve dans la presse, indiquent qu’une bascule des complémentaires santé vers l’assurance maladie équivaudrait à une bascule d’une cotisation indirecte – que les Français payent chaque mois à leur complémentaire – vers une cotisation directe, c’est-à-dire une hausse des cotisations ou des impôts.
Or, vous le savez, le Gouvernement n’augmentera les impôts sous aucun prétexte. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) C’est déjà une façon de vous répondre quant à l’avenir de cette proposition.
Ensuite, il y a un enjeu d’emplois dans le secteur des complémentaires santé. Personne ne souhaite, évidemment, que des dizaines de milliers de nos concitoyens perdent leur emploi.
Se poser la question de l’avenir de la protection sociale est très sain dans une démocratie ; confier cette mission à une instance que vous avez créée quand vous étiez au pouvoir et qui est justement chargée de mener des réflexions sur ce sujet me semble être de bon aloi.
Quant aux conclusions, aux post-conclusions et aux synthèses déjà écrites, permettez-moi de vous dire qu’elles n’engagent ni le Gouvernement ni, au premier chef, le ministre que je suis. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour la réplique.
M. Philippe Mouiller. Monsieur le ministre, je vous entends et nous sommes d’accord sur la nécessité de réécrire les missions des complémentaires santé.
Toutefois, nous connaissons trop bien la méthode de ce gouvernement et les annonces nous inquiètent énormément,…
M. Philippe Mouiller. … même si le rapport ne sort que demain. Si les fuites sont partout dans les médias, c’est bien qu’elles découlent d’une réflexion et qu’elles portent un message.
Notre inquiétude est la suivante : une « grande sécu » équivaudrait à une remise en cause des principes fondamentaux de 1945, il faut l’entendre. Ce serait, en outre, la fin de la médecine libérale, à laquelle nous sommes attachés.
Surtout, cela reviendrait à mettre en œuvre un grand principe et à amplifier les déficits. Nous serons donc très vigilants quant à vos avis et à vos conclusions. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Élisabeth Doineau applaudit également.)
situation en libye
M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Olivier Cigolotti. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Alors que vient de s’achever la conférence internationale de Paris sur la Libye, Saïf al-Islam Kadhafi, le fils de Mouammar Kadhafi, a présenté dimanche sa candidature à l’élection présidentielle libyenne. C’est un électrochoc pour le pays, qui ne parvient pas à se reconstruire.
La chute du régime de Mouammar Kadhafi devait ouvrir une nouvelle ère, plus démocratique et plus prospère. Dix ans après, tous les espoirs ont été déçus. La Libye n’a cessé de vivre dans le chaos, livrée aux milices souvent instrumentalisées par des puissances étrangères.
Néanmoins, depuis la signature d’un accord de cessez-le-feu le 23 octobre 2020, à l’issue de la conférence de Berlin, un processus de sortie de crise semble se dessiner. Il a été confirmé, le 15 novembre 2020, par l’adoption de la feuille de route politique libyenne à Tunis et, le 10 mars dernier, par l’approbation du Gouvernement d’unité nationale de transition.
La prochaine étape, décisive, est celle des élections présidentielle et législatives du 24 décembre prochain.
La candidature du fils de Mouammar Kadhafi peut mettre à mal le processus politique libyen. Avec des conséquences directes pour la France. Ainsi, le refroidissement de nos relations avec l’Algérie nous force à survoler la Libye pour gagner le Mali ; si ce pays s’embrase de nouveau, cela ne sera plus possible.
La stabilité de la Libye est aussi pour nous un enjeu migratoire et de sécurité, sans parler de la responsabilité de notre pays dans cet échec cuisant.
Monsieur le ministre, selon vous, le processus politique libyen est-il en danger ? Si tel est le cas, quelle sera votre action pour le conforter ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Sébastien Meurant applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Cigolotti, vous avez raison de souligner qu’une fenêtre d’opportunité existe pour parvenir à une sortie de crise en Libye.
Elle s’est ouverte au moment du forum politique qui s’est tenu au mois d’octobre dernier, lorsqu’une feuille de route a été définie pour prévoir un cessez-le-feu dont on a pu constater qu’il s’appliquait.
Elle s’est confirmée, vendredi dernier, lors de la conférence internationale pour la Libye, qui a été initiée par le Président de la République et à laquelle participaient tous les acteurs, soit seize chefs d’État ainsi que des pays représentés par certains de mes homologues.
Au terme de cette conférence, qui a eu lieu en la présence conjointe du président du Conseil présidentiel libyen Al-Manfi et du Premier ministre du gouvernement provisoire Dbeibah, deux décisions majeures ont été actées. Tout d’abord, un processus électoral interviendra avant la fin de l’année et la date du 24 décembre a été annoncée ; ensuite, sur le plan sécuritaire, les forces étrangères commenceront à se retirer de part et d’autre, et un premier engagement a été pris concernant le retrait de trois cents mercenaires tchadiens à l’est du Tchad.
Tout cela est positif, après dix années marquées par des migrations irrégulières, du trafic d’êtres humains, des flux irréguliers d’armes, des ingérences étrangères ; bref, des années de désastre.
Monsieur le sénateur, vous me posez une question sur les candidatures. Il me paraît évident que c’est aux Libyens eux-mêmes de décider qui est candidat ou pas. Une haute commission électorale, neutre et indépendante est prévue pour cela. Elle a commencé à engager le processus électoral, auquel 3 millions de Libyens se sont déjà inscrits sur une population totale de près de 7 millions d’habitants, ce qui témoigne d’une attente et d’une volonté fortes. Il revient à cette haute commission de valider ou pas les candidatures, et ce n’est pas le rôle de tel ou tel ministre qui interviendrait de l’extérieur.
Vous avez cité un candidat, en particulier, mais il y en a déjà plusieurs autres, ce qui montre que le processus est dans une phase positive, même si certains veulent le retarder et l’empêcher. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, pour la réplique.
M. Olivier Cigolotti. Merci, monsieur le ministre, de votre réponse, mais la Libye est au cœur de nombreux enjeux stratégiques, notamment pour l’Europe. Durant la dernière décennie, le pays n’a pas su endiguer la violence et la guerre civile. Il est devenu, comme la Syrie, le théâtre d’une guerre par procuration et un enjeu de convoitises à la fois régionales et internationales.
Monsieur le ministre, la France doit absolument rester vigilante quant à l’évolution du processus libyen. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.)
autonomie financière des communes
M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Belrhiti. Madame la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, nous allons bientôt fêter les 40 ans des lois de décentralisation. Cette évolution aura permis aux communes, aux départements et aux régions de s’affirmer en tant qu’institutions démocratiques à part entière.
Pourtant, le principe de l’autonomie financière des collectivités et celui de leurs ressources propres, qui constituent les bases de cette décentralisation, ne cessent d’être remis en question.
Les déclarations d’amour du Président de la République et du Gouvernement envers les élus, renouvelées encore à l’occasion du 103e Congrès des maires, ne peuvent dissimuler un processus de concentration des ressources financières des collectivités entre les mains de l’État.
Votre réforme de suppression de la taxe d’habitation ne laissera bientôt plus aux maires que les taxes foncières et un tiers de l’ancienne taxe professionnelle comme ressources à pouvoir de taux. Ce n’est pas une question accessoire, car c’est toute la démocratie locale qui sera, à terme, remise en cause.
En outre, si l’on ne fait peser l’impôt local que sur les seuls propriétaires et entreprises, le lien fiscal entre les habitants et leurs territoires ne tient plus qu’à un fil.
Vous nous direz que l’État sera là pour compenser intégralement chaque euro perdu, mais nous savons ce que vaut la parole d’un État qui est toujours revenu sur ses engagements.
Le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC), censé assurer une équité entre territoires, est de plus en plus mal compris par les communes.
Madame la ministre, allez-vous enfin enrayer ce processus délétère de recentralisation et de creusement des inégalités entre nos territoires ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Madame la sénatrice, j’ai bien entendu les préoccupations que vous venez d’exposer au sujet de l’autonomie financière des collectivités territoriales.
Permettez-moi de vous dire très simplement que, comme le Président de la République s’y était engagé au début de son quinquennat, nous avons mis fin à la baisse des dotations. La dotation globale de fonctionnement (DGF) est stable depuis 2017 (Mme Sophie Primas s’exclame.), alors qu’elle avait baissé de plus de 10,6 milliards d’euros entre 2014 et 2017 – vous vous le rappelez. (M. Rémy Pointereau proteste.)
Nous avons effectivement supprimé la taxe d’habitation sur les résidences principales ; c’était un engagement pris par le Président de la République lors de sa campagne. Nous avons aussi, vous le savez, compensé à l’euro près la perte de cette recette, de sorte que nos concitoyens bénéficient désormais en moyenne d’une garantie de pouvoir d’achat de 723 euros.
Les communes reçoivent également une compensation, du fait que depuis cette année elles perçoivent la totalité du produit de la taxe foncière, dont la part départementale leur a été rendue. Je le signale, car il me semble que c’est là le signe que les communes ont conservé des ressources à pouvoir de taux et qu’elles bénéficient donc de l’autonomie financière.
Nous avons aussi stabilisé le montant du FPIC à hauteur de 1 milliard d’euros depuis 2016 tout en augmentant les dotations de péréquation au sein de la DGF. Vous savez, en effet, que dans le prochain budget, en matière de péréquation, nous avons prévu une hausse de la dotation de solidarité urbaine (DSU) et de la dotation de solidarité rurale (DSR) pour les territoires les plus défavorisés.
Enfin, je veux vous dire, madame la sénatrice, que depuis 2017, en tenant compte certes de l’effet du plan de relance, nous avons doublé la dotation d’investissement dans notre pays. (M. Alain Richard applaudit.)
Mme Sophie Primas. Dotations, dotations…
M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour la réplique.
Mme Catherine Belrhiti. Madame la ministre, l’Association des maires de France réclame depuis plusieurs années une réforme du calcul du fonds de péréquation au profit d’une répartition entre les communes et non plus entre les intercommunalités.
Dans le système actuel, des communes aux ressources modestes ne bénéficient pas de ce fonds autant qu’elles le devraient, parce qu’elles sont considérées comme globalement riches depuis leur rattachement aux intercommunalités.
Madame la ministre, nous attendons une action forte et rapide de la part du Gouvernement ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
services publics de proximité
M. le président. La parole est à M. Lucien Stanzione, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Lucien Stanzione. Madame la ministre, fermeture de classes, fermeture de bureaux de poste, de trésoreries ou d’établissements de santé comme celui de Roquefraîche dans le Vaucluse… Le Gouvernement opère une véritable casse du service public !
Alors qu’il s’était engagé à ne fermer aucune classe et aucune école rurale sans l’accord du maire à la rentrée de septembre dernier, la trajectoire observée est bien différente.
La collaboration avec les collectivités territoriales semble avoir été délaissée au profit d’une application froide du seuil d’élèves, qui ne prend pas en compte la réalité de nos territoires.
Dans le Vaucluse, trente-trois fermetures de classes sont à déplorer dont trois à Apt, dans un territoire qui est pourtant très paupérisé.
La réduction des horaires d’accueil, voire la fermeture des bureaux de poste, comme à Robion, sont les signes de l’absence totale de considération des usagers.
La fermeture des trésoreries publiques, comme à Langon, Paimpol ou encore Vaison-la-Romaine, et la suppression de 5 700 lits d’hôpitaux en pleine pandémie sont d’autres exemples.
Face à toutes ces disparitions, la seule réponse que vous apportez est la dématérialisation et la création de quelques maisons France Services, en sollicitant financièrement les collectivités locales.
Cette conception d’une société tournée uniquement vers les hyperconnectés et la concentration des services, sans considération de nos aînés, par exemple, n’est pas la nôtre.
Madame la ministre, expliquez-nous comment vous ferez pour répondre concrètement aux besoins quotidiens des usagers ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe GEST. – M. Éric Bocquet applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques.
Mme Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques. Monsieur le sénateur, je ne peux pas vous laisser dire cela. (Exclamations sur de nombreuses travées. – Mme Patricia Schillinger applaudit.) Depuis 2017, de manière constante, ce gouvernement – il le fera encore en 2021, et encore en 2022 – remet des agents publics sur le terrain, que ce soient des policiers, des greffiers ou des enseignants. (Mme Sophie Primas proteste.) Il n’y a jamais eu autant d’enseignants dans le premier degré qu’en 2022 !
Nous rouvrons des postes d’agents dans les préfectures et les sous-préfectures, alors qu’entre 2010 et 2017, sous l’effet de la révision générale des politiques publiques (RGPP), puis de l’action d’un gouvernement de gauche, on a constaté une diminution de 35 % du nombre d’agents dans l’État territorial.
Nous agissons donc, et nous le faisons pour l’État. Comme je viens de le dire, entre 2021 et 2022, 5 000 postes supplémentaires seront pourvus dans les départements, notamment celui de Carpentras, dans les préfectures, dans les sous-préfectures, dans les communes de tout le pays, et dans tous les endroits où les Français voient des agents de proximité.
La politique en faveur des services publics est partenariale de sorte que nous l’assumons aussi avec Jacqueline Gourault et avec les élus, afin de développer des espaces France Services qui sont loin d’être des gadgets. Dans le Vaucluse, on en compte déjà vingt et il y en aura bientôt vingt-trois, soit un par canton, situé à moins de vingt minutes de chaque habitant, qu’il soit âgé ou jeune, pour l’aider à s’orienter dans toutes ses démarches.
M. David Assouline. Tout va bien !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Le programme France Services donne des résultats et c’est un succès partenarial. Nous ne sommes pas de ceux qui considèrent que ce que fait l’État est forcément bien et ce que font les élus inévitablement moins bien. Nous estimons au contraire que nous réussissons ensemble. Ce programme, que nous mettons en œuvre avec Jacqueline Gourault et que le budget pour 2022 vient abonder de plus de 35 millions d’euros, permet à chaque Français d’avoir près de chez lui un soutien.
Enfin, je ne suis pas non plus de ceux qui pensent que le numérique est forcément une difficulté. Les Français veulent tout à la fois du numérique et de la proximité. Or nous faisons du très bon numérique…
M. Bruno Belin. Encore faut-il que tout le monde y ait accès !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. … et de la grande proximité. (Mme Laurence Cohen s’exclame.) Telle est notre ambition. Mieux vaut dire aux Français la vérité plutôt que d’en rester aux rengaines qu’ont répétées plusieurs majorités avant nous, sans qu’elles produisent de résultat. (Applaudissements sur les travées du RDPI. – Huées sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Lucien Stanzione, pour la réplique.
M. Lucien Stanzione. Madame la ministre, le service public est l’amortisseur de la crise. Il est l’engagement de la Nation au profit de ses concitoyens. Il garantit aussi l’égalité sociale.
Ce sont les publics les plus fragiles qui subissent la disparition des services de proximité.
Le service public contribue à rapprocher les Français des institutions et, donc, de la démocratie.
Dans le cadre du plan national de relance et de résilience, doté de plusieurs milliards d’euros, votre priorité, madame la ministre,…