Sommaire
Présidence de M. Roger Karoutchi
Secrétaires :
M. Jacques Grosperrin, Mme Victoire Jasmin.
2. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire
3. Financement de la sécurité sociale pour 2022. – Discussion d’un projet de loi
Discussion générale :
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales
Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l’assurance maladie
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse
M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille
M. Philippe Mouiller, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’autonomie
M. Christian Klinger, rapporteur pour avis de la commission des finances
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
M. Philippe Mouiller, rapporteur
Clôture de la discussion générale.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol
Article 2 et annexe A – Adoption.
Vote sur l’ensemble de la première partie
Adoption de l’ensemble de la première partie du projet de loi.
Amendement n° 123 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 124 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article 3 bis (nouveau) – Adoption.
Amendement n° 909 rectifié bis de Mme Émilienne Poumirol. – Rejet.
Amendement n° 765 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 3 rectifié de M. Bernard Bonne. – Devenu sans objet.
Amendements nos 912 rectifié bis et 910 rectifié bis de M. Bernard Jomier. – Devenus sans objet.
Amendement n° 826 de Mme Laurence Cohen. – Devenu sans objet.
Amendement n° 915 rectifié bis de M. Bernard Jomier. – Devenu sans objet.
Amendement n° 918 rectifié bis de Mme Marie-Pierre Monier. – Devenu sans objet.
Article 5 bis (nouveau) – Adoption.
Amendement n° 812 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 1057 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 1056 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Vote sur l’ensemble de la deuxième partie
Adoption de l’ensemble de la deuxième partie du projet de loi, modifié.
Amendement n° 128 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 922 rectifié bis de M. Rachid Temal. – Rejet.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Amendement n° 129 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 130 de la commission. – Retrait.
Amendement n° 131 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 4 rectifié de M. Bernard Bonne. – Retrait.
Amendement n° 132 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 358 rectifié quater de M. Christian Klinger. – Rejet.
Amendement n° 635 de Mme Samantha Cazebonne. – Non soutenu.
Amendement n° 920 rectifié ter de M. Jean-Yves Leconte. – Devenu sans objet.
Amendement n° 2 rectifié de M. Christophe-André Frassa. – Devenu sans objet.
Amendement n° 783 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 979 rectifié bis de Mme Annie Le Houerou. – Rejet.
Amendement n° 981 rectifié bis de Mme Annie Le Houerou. – Rejet.
Amendement n° 237 rectifié bis de M. Rémy Pointereau. – Rejet.
Amendement n° 831 rectifié bis de M. Franck Menonville. – Rejet.
Amendement n° 985 rectifié bis de Mme Annie Le Houerou. – Rejet par scrutin public n° 24.
Amendement n° 988 rectifié de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 786 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Rejet par scrutin public n° 25.
Amendement n° 789 rectifié bis de Mme Cathy Apourceau-Poly. – Rejet par scrutin public n° 26.
Amendement n° 380 de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.
Amendement n° 320 rectifié de M. Michel Savin. – Rejet.
Amendement n° 321 rectifié de M. Michel Savin. – Rejet.
Amendement n° 133 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article 11 ter (nouveau) – Adoption.
Adoption de l’article.
Amendement n° 26 rectifié de M. Sebastien Pla. – Rejet.
Amendement n° 935 rectifié bis de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 794 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Rejet par scrutin public n° 27.
Amendement n° 729 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 638 rectifié de Mme Annie Le Houerou. – Rejet.
Amendement n° 788 rectifié bis de Mme Laurence Cohen. – Rejet par scrutin public n° 28.
Amendement n° 970 rectifié ter de Mme Monique Lubin. – Rejet.
Amendement n° 796 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 939 rectifié bis de Mme Annie Le Houerou. – Rejet.
Amendement n° 283 rectifié bis de M. Olivier Henno. – Retrait.
Amendement n° 843 rectifié de M. Jean-Pierre Moga. – Rejet.
Amendement n° 547 rectifié de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Amendement n° 317 rectifié bis de Mme Chantal Deseyne. – Rejet.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
Présidence de M. Roger Karoutchi
vice-président
Secrétaires :
M. Jacques Grosperrin,
Mme Victoire Jasmin.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 4 novembre 2021 a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
2
Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire
M. le président. Mes chers collègues, j’ai le plaisir et l’honneur de saluer la présence dans notre tribune officielle d’une délégation de la commission de l’administration du Sénat de la République tchèque, conduite par la vice-présidente du Sénat, Mme Jitka Seitlová. (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)
Cette délégation a été reçue par le groupe d’amitié France-République tchèque, présidé par notre collègue Julien Bargeton. Le questeur du Sénat, notre collègue Jean-Pierre Sueur, et moi-même la recevrons demain.
Cette visite intervient à la veille de la présidence française de l’Union européenne au premier semestre 2022, laquelle comprendra un important volet parlementaire, notamment au Sénat. Elle sera suivie par la présidence de la République tchèque au second semestre. C’est dire toute l’importance des échanges entre nos deux assemblées.
En vous souhaitant un séjour fructueux, mesdames, messieurs, je formule le vœu que votre visite contribue au renforcement des relations d’amitié et de coopération qui lient la France et la République tchèque, ainsi que le Sénat français et le Sénat de la République tchèque. (Applaudissements.)
3
Financement de la sécurité sociale pour 2022
Discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2022 (projet n° 118, rapport n° 130, avis n° 122).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, chère Catherine Deroche, madame la rapporteure générale, chère Élisabeth Doineau, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l’autonomie, qui devait vous présenter le volet de ce texte consacré à l’autonomie, et qui m’a demandé de la remplacer.
Nous voilà réunis pour examiner le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). C’est un moment important de la vie de cette assemblée, qui se répète chaque année. La période que nous venons de traverser a prouvé, si besoin était, que notre protection sociale était au cœur des préoccupations et du quotidien des Français.
Il s’agit aussi du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale de ce quinquennat. Mais s’il est le dernier, il n’en est pas le moindre, et nous n’allons pas relâcher nos efforts maintenant, bien au contraire, car il y a encore de beaux projets et de belles conquêtes devant nous.
Vous connaissez la situation des comptes sociaux. C’est peu dire qu’elle a déjà été meilleure, et c’est avec une petite pointe de nostalgie que je rappelle qu’il y a à peine deux ans, nous étions très proches d’un équilibre si longtemps espéré et attendu.
Une pandémie mondiale est passée par là. Elle a exigé de notre part une action publique très ambitieuse et une intervention de l’État à des niveaux jamais atteints.
Parce que, oui, l’État social a répondu présent pour offrir la meilleure protection possible à tous les Français, aux soignants comme aux soignés, aux travailleurs comme aux retraités, aux entreprises comme aux salariés, aux parents comme aux enfants, aux biens portants comme aux malades.
Au début de ce quinquennat, nous voulions poser les fondations de l’État-providence du XXIe siècle. Ce projet politique s’est heurté à la force des circonstances et d’un choc historique sans précédent. Aujourd’hui plus que jamais, nos systèmes de solidarité et de santé sont regardés pour ce qu’ils sont : les piliers d’une grande Nation dans laquelle les hôpitaux accueillent chacun, quel que soit son prénom, quel que soit son statut et quels que soient ses revenus.
Notre protection sociale n’est pas qu’une grande machine assurantielle ou un agrégat de tableaux sophistiqués et de mesures techniques accessibles à un cercle restreint de spécialistes. Elle est encore moins un musée que l’on regarderait avec une certaine nostalgie.
Notre protection sociale est une réponse aux défis d’aujourd’hui et de demain, qui relèvent non pas de ceux qui agitent les plateaux de télévision et ne concernent que peu la vie réelle des Français, mais de ceux qui se manifestent parfois dans l’urgence, souvent dans la détresse, et toujours dans les morsures du quotidien.
Nous ne parlerons pas d’autre chose dans les jours et les semaines qui viennent, et c’est tant mieux.
Mesdames, messieurs les sénateurs, si la crise sanitaire a engendré 33 milliards d’euros de dépenses exceptionnelles en 2020 et 2021, la situation paraît aujourd’hui plus favorable : d’une part, nous ne provisionnerons que 5 milliards d’euros de dépenses pour répondre à la crise en 2022 et, d’autre part, le déficit prévisionnel ne s’élèverait qu’à un peu moins de 22 milliards d’euros, montant que les bonnes nouvelles économiques devraient permettre de réduire encore un peu plus.
Soyons clairs, ce n’est évidemment pas la fin de la crise et nous devons rester très vigilants. Les conséquences économiques de la pandémie se feront sentir très longtemps, mais la dynamique est véritablement celle d’un début de sortie de crise.
Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale tire les enseignements de la situation à laquelle nous sommes confrontés. Cette période a démontré le rôle central de l’hôpital et, plus largement, de la sécurité sociale.
La réponse n’est pas moins de droits, mais plus de droits, voire même « mieux de droits », si je puis dire. C’est d’ailleurs dans ce cadre que j’ai demandé au Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) de réfléchir à l’articulation entre assurance maladie obligatoire et complémentaire. J’observe que cette question fait d’ores et déjà couler beaucoup d’encre, avant même que les conclusions du HCAAM ne soient connues. J’invite chacun à garder son calme : aussi importante soit-elle, il s’agit avant tout d’une piste de réflexion et de travail.
Par ailleurs, et cela n’aura échappé à personne, du moins je l’espère, nous avons engagé un réinvestissement massif dans notre système de santé grâce au Ségur de la santé : 12,5 milliards d’euros en 2020, dont 10 milliards d’euros pour revaloriser les carrières de celles et ceux qui soignent, et 2,5 milliards d’euros pour l’investissement matériel.
Contrairement à ce que j’entends parfois, et je tiens là encore à être très clair, aucune économie ne sera faite sur le dos de l’hôpital public. Croyez bien que je n’élude pas les difficultés, et même le malaise qui traverse actuellement l’hôpital public.
Dans le même esprit que celui qui a animé le Ségur de la santé, le Gouvernement a déposé un amendement, qui vise à relever de près de 1,7 milliard d’euros l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) 2021, notamment l’Ondam hospitalier, pour garantir la prise en charge de l’intégralité des coûts liés à l’épidémie de covid-19.
En outre, partout, sur tous les territoires, des stratégies régionales d’investissement se déploient, en partenariat étroit avec les agences régionales de santé (ARS), les soignants et les élus locaux.
J’étais il y a deux semaines en Centre-Val de Loire, la semaine dernière en Occitanie, ce matin même en Normandie pour présenter des projets de grande envergure, qui vont durablement transformer l’offre de soins dans les territoires, permettre de moderniser les structures et redonner du sens au quotidien de celles et ceux qui soignent.
Je tiens à cet égard à souligner les bénéfices du partenariat mis en place avec les collectivités territoriales, notamment en Normandie : la région contribue à hauteur de 200 millions d’euros à l’action de l’État dans le cadre du Ségur des hôpitaux ; quant aux départements, ils ont décidé, à chaque fois que l’État investira un euro dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), de faire de même.
Nous voulons également tirer profit de ce qui a fonctionné pendant la crise et pérenniser des innovations qui semblaient hier audacieuses et qui sont désormais bien présentes dans la vie des Français et des professionnels de santé.
Je pense par exemple au numérique en santé, avec la téléconsultation et le télésoin : je le rappelle, nous sommes passés en quelques jours de plusieurs milliers à 1 million de téléconsultations par semaine durant la crise. Je souhaite que cette pratique perdure et apporte une réponse – elle n’est évidemment pas la seule – au problème de la désertification médicale. En effet, il s’agit là d’une réponse pertinente : entre une téléconsultation et pas de consultation du tout, le choix des Français est fait.
Le virage numérique, nous y sommes. Le Ségur de la santé a misé sur ce nouveau levier, dans des proportions très importantes, pour renforcer la collaboration entre les professionnels et favoriser l’accès aux soins des patients. Je pense bien entendu aux outils du quotidien comme l’espace numérique de santé (ENS) qui, à compter de janvier prochain, permettra à chaque citoyen d’avoir accès de manière sécurisée à ses données de santé.
Je l’ai dit en préambule, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale a beau être le dernier du quinquennat, il nous permet d’afficher des ambitions importantes, comme celle d’apporter des réponses concrètes à nos concitoyens en perte d’autonomie.
En effet, il faut regarder en face la réalité du grand âge et prendre à bras-le-corps ce bouleversement démographique sans précédent. La société française, les sociétés européennes dans leur ensemble vieillissent. Nous le savons, il ne s’agit pas là d’une projection vague et abstraite, c’est déjà le cas ici et maintenant. Dans toutes les familles de France et de Navarre, c’est un sujet de préoccupation, parce qu’un parent ou un grand-parent qui perd son autonomie, c’est toute une organisation à penser ou à repenser.
Vous le savez, l’autonomie est un chantier majeur du Gouvernement dans lequel Brigitte Bourguignon s’est engagée avec détermination, mais c’est aussi une préoccupation largement partagée sur les travées de votre assemblée. Je pense notamment aux travaux des sénateurs Bernard Bonne et Michelle Meunier, ou encore à ceux de Jean-Marie Vanlerenberghe, à qui je tiens à rendre hommage en cet instant.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 prévoit donc une réforme de l’autonomie, notamment pour renforcer la lisibilité et la qualité de l’offre à domicile, parce que pouvoir vieillir chez soi, bien vieillir chez soi est l’une des premières aspirations de nos aînés.
C’est une réforme ambitieuse à laquelle nous consacrerons 1,3 milliard d’euros d’ici à 2025, une réforme financée par des moyens d’ores et déjà rendus disponibles à l’horizon 2024. Il s’agit donc d’une réforme structurelle et financée, d’une réforme d’avenir et pérenne.
Le Gouvernement propose notamment d’instaurer et de financer un tarif national de 22 euros par heure d’intervention, c’est-à-dire un niveau de financement public minimum, pour tous les services d’aide à domicile, ce qui représente un investissement de 240 millions d’euros dès 2022.
Avec le Ségur de la santé, d’une part, l’agrément de l’avenant n° 43 à la convention collective de la branche de l’aide à domicile, d’autre part, ce sont plus de 2,8 milliards d’euros qui seront alloués chaque année au financement de revalorisations salariales.
Je sais que certaines aides à domicile, en particulier celles qui sont employées par des services privés lucratifs, n’ont pas encore bénéficié de ces revalorisations. Grâce à la hausse du financement de l’intervention horaire, le dialogue social devrait aboutir à des revalorisations salariales. Je sais que Brigitte Bourguignon y veillera personnellement.
Vos collègues députés ont enrichi ce projet de loi de financement de la sécurité sociale de nombreuses mesures qui vont dans le sens d’une vraie politique du grand âge. Si je ne veux pas dresser un inventaire à la Prévert, je ne peux pas ne pas citer le financement d’une dotation à la qualité pour les services à domicile, qui représente 500 millions d’euros supplémentaires par an d’ici à 2025, et 800 millions d’euros d’ici à 2030.
Ce sont autant de mesures et de dispositifs qui chaque jour un peu plus font du fameux « virage domiciliaire » une réalité.
Nous n’esquivons pas non plus la question de l’accès aux soins, qui reste notre priorité et le fil rouge de mon action.
Les déserts médicaux, que l’on nomme de manière plus administrative et moins brutale les « zones sous-denses », constituent un problème ancien, voire très ancien. Aussi loin que je me souvienne, la démographie médicale était déjà au cœur des préoccupations lors de mes études de médecine.
Là encore, les députés ont formulé des propositions qui doivent permettre un accès aux soins plus direct et plus simple, et avec un niveau élevé de qualité, dans tous les territoires.
Je pense ici à la prise en charge des consultations auprès des psychologues en ville, à la suite des annonces du Président de la République dans le cadre des assises de la santé mentale, à la prise en charge intégrale, pour les jeunes hommes de moins de 25 ans, d’une consultation longue en santé sexuelle, afin de mobiliser les garçons autour des thématiques de santé sexuelle, notamment sur le choix d’une contraception adaptée, ou encore à l’encadrement renforcé des centres de santé, en particulier pour les soins dentaires et optiques, afin de garantir des prestations de qualité.
Qui dit accès aux soins dit également accès aux traitements. Si cela passe par un meilleur financement de l’innovation et une meilleure sécurité d’approvisionnement en médicaments, il faut aussi responsabiliser les laboratoires, en continuant à baisser les prix sur les produits les plus amortis, afin d’éviter les phénomènes de rente, ou en étant plus exigeant sur les ruptures de stock.
Nous consacrerons ainsi 300 millions d’euros pour faciliter l’accès à des molécules onéreuses sur tout le territoire, et ce afin que l’accès à ces produits ne soit pas conditionné à la santé financière de l’hôpital qui les délivre.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nos débats seront l’occasion d’aller encore plus loin dans beaucoup de domaines et sur des sujets dont la crise a prouvé qu’ils étaient parfois d’une envergure insoupçonnée, comme c’est le cas, par exemple, de la santé mentale, dont nous n’avons jamais autant parlé. Je m’en félicite d’ailleurs, parce qu’elle a trop longtemps été le parent pauvre de nos politiques de santé.
Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale apporte des réponses concrètes, qu’il s’agisse de l’accès direct et remboursé à des psychologues ou de l’entretien postnatal pour prévenir la dépression post-partum. Il vous reviendra de les ajuster et de les enrichir.
C’est tout le sens de la discussion qui débute aujourd’hui sur un texte qui traite de sujets aussi divers que concrets. Je pense à la régulation des centres de santé, ou encore à la participation des médecins libéraux au service d’accès aux soins.
Ma conviction est que, si l’on regarde de près les moyens mis en œuvre, article par article, il est possible, quel que soit notre bord politique et au-delà de nos engagements réciproques, de trouver des compromis sur l’essentiel des dispositions de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui se veut un texte budgétaire à la fois concis et ambitieux.
Nous aurons ces débats, et dans un pays qui doute parfois de sa force et a tendance à s’autodénigrer, il est bon de rappeler qu’avoir une certaine idée de la France, c’est aussi avoir une certaine idée de sa protection sociale, hier, aujourd’hui et demain. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le président, monsieur le ministre, cher Olivier, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous retrouvons aujourd’hui pour examiner le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.
S’il s’agit du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale du quinquennat, j’aurais aimé qu’il soit aussi celui du retour à l’équilibre. (M. Jérôme Bascher s’exclame.)
Je le dis sans détour : en tant que ministre délégué chargé des comptes publics, je ne peux évidemment pas me satisfaire des tableaux d’équilibre que nous vous proposerons de voter, même si les amendements que le Gouvernement déposera d’ici à l’examen des articles, lesquels tiennent compte notamment de la révision à la hausse des hypothèses macroéconomiques, permettront d’améliorer les comptes de la sécurité sociale.
Ces chiffres contrastent fortement avec les ambitions que nous nourrissions avant la crise sanitaire, quand le retour à l’équilibre de la sécurité sociale était proche et que l’amortissement de la dette sociale avait vocation à s’arrêter en 2024.
Ainsi, après révision, le déficit du régime général de la sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) devrait s’établir à 33,5 milliards d’euros en 2021, à 20,4 milliards d’euros en 2022, et dépasser encore 11 milliards d’euros en 2025.
Par rapport aux agrégats figurant dans le texte initial, qui ont été adoptés par l’Assemblée nationale, le déficit serait ainsi diminué de 1,1 milliard d’euros en 2021, de 1,2 milliard d’euros en 2022 et de 2,2 milliards d’euros en 2025.
Cette amélioration globale tient à la combinaison de quatre éléments.
Tout d’abord, ces trajectoires révisées traduisent la hausse de 0,4 point du PIB et de 1,1 point de la masse salariale sur la période 2021-2025. Cette amélioration de la trajectoire macroéconomique, qui légitime notre politique, conduit à elle seule à une amélioration du solde de 2,1 milliards d’euros en 2021, de 1,9 milliard d’euros en 2022 et de 3,3 milliards d’euros en 2025.
Ensuite, cette révision intègre les mesures adoptées en première lecture à l’Assemblée nationale, notamment la dotation à la qualité que vient d’évoquer le ministre de la santé et des solidarités.
Par ailleurs, ces trajectoires intègrent une révision de l’Ondam 2021, lequel sera rehaussé de 1,7 milliard d’euros en raison de dépenses plus dynamiques que celles que nous avions initialement prévues pour ce qui concerne les médicaments, les indemnités journalières ou les honoraires médicaux, ainsi que de la nécessité de couvrir les surcoûts éventuels liés à l’épidémie de covid-19 pour les établissements de santé. L’Ondam 2022, lui, augmentera de 500 millions d’euros pour prendre en compte les effets de certaines dépenses supplémentaires enregistrées en 2021.
Enfin, le solde pour 2021 intègre l’affectation de 0,7 milliard d’euros de TVA à la sécurité sociale, votée dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2021 au titre de la compensation des achats de vaccins pour des pays tiers.
Comme je le disais, le déficit de la sécurité sociale s’établirait à environ 11 milliards d’euros en 2025. Cette dégradation durable des comptes sociaux, bien que plus faible que celle que nous anticipions il y a quelques semaines, doit nous interpeller. Elle ne doit néanmoins pas nous faire oublier l’amélioration des comptes observée avant la crise sanitaire.
Je rappelle que le déficit de la sécurité sociale et du FSV avait atteint un plus bas historique en 2018 et 2019, avec respectivement 1,2 milliard d’euros et 1,9 milliard d’euros. Ces chiffres montrent que notre majorité n’a plus rien à prouver en matière de sérieux budgétaire et nous donnent une leçon précieuse pour l’avenir : c’est aussi parce que ses comptes étaient en ordre que la sécurité sociale a pu protéger les Français aussi vite et aussi bien durant la crise que nous avons traversée.
Tous les Français sont conscients, je le crois, de l’immense effort que notre système de santé a fourni et continue de fournir pour lutter contre la crise sanitaire et les protéger. Cet effort est bien entendu d’abord celui des soignants, que je tiens encore à saluer.
C’est également un effort financier d’une ampleur colossale. Je rappellerai quelques chiffres : 135 millions, c’est le nombre de tests de dépistage que nous avons réalisés, soit davantage que tout autre pays en Europe ; 4,7 milliards d’euros, c’est l’estimation du coût de notre campagne vaccinale, que je considère toujours comme le meilleur investissement qui soit, non seulement pour la santé de nos concitoyens, mais également pour le redémarrage de notre économie.
La crise sanitaire a rendu plus concrète que jamais la raison d’exister de la sécurité sociale : protéger les Français. Ne jamais prendre cette mission comme acquise, chercher continuellement à mieux protéger les Français, cela fait partie des objectifs que nous nous sommes fixés durant ce quinquennat.
Je ne reviendrai pas en détail sur chacune des avancées de ce quinquennat en matière de droits sociaux. Je citerai seulement les principales d’entre elles : le déploiement du dispositif « 100 % santé », une réforme qui a changé le quotidien de millions de nos concitoyens ; la création d’une cinquième branche dont l’édification donnera lieu, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, à de nouvelles avancées en matière de prévention de la perte d’autonomie – Olivier Véran les a détaillées il y a un instant ; un investissement financier inédit tant pour nos soignants que dans nos établissements de santé, que nous avons depuis étendu aux établissements médico-sociaux.
Les différents projets de loi de financement de la sécurité sociale présentés durant ce quinquennat ont également été l’occasion de traduire un autre fil rouge de notre action, sur lequel je souhaite revenir : je veux parler de la revalorisation du travail et de notre engagement en faveur de l’emploi et de la croissance.
Ainsi, depuis 2017, nous avons successivement transformé le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en un allégement pérenne de charges sociales de plus de 23 milliards d’euros et supprimé les cotisations salariales chômage et maladie, soit un effort supplémentaire de 6 milliards d’euros en faveur des actifs. Nous avons supprimé les cotisations sociales sur les heures supplémentaires, par ailleurs défiscalisées. Nous avons enfin étendu les allégements généraux à l’ensemble des contributions sociales, afin qu’il n’y ait plus de cotisations ou de contributions patronales au niveau du SMIC.
Cette politique en faveur de la croissance, de l’emploi et du pouvoir d’achat a été une constante de notre action. Nous l’avons poursuivie sous une autre forme en octroyant des aides massives aux entreprises et aux salariés en activité partielle durant la crise sanitaire, et ce en un temps record.
Nous l’avons prolongée en déployant France Relance, un plan de relance de l’activité inédit de 100 milliards d’euros, qui servira notamment à renforcer l’investissement dans notre système de santé. C’est tout l’objet des plus de 18 milliards d’euros investis au titre du Ségur de la santé.
J’assume d’autant plus facilement cette politique en faveur de la croissance que je suis convaincu que c’est d’abord grâce à la croissance que nous rétablirons nos finances publiques, notamment nos finances sociales.
Cette politique porte ses fruits. Nous avons ainsi relevé nos prévisions de croissance de 6 à 6,25 % pour 2021, ce qui conduit à la révision de la trajectoire pluriannuelle que je viens de vous détailler. Comme pour le projet de loi de finances, je précise que, si la croissance constatée était supérieure à 6,25 %, comme le laisse entrevoir l’Insee dans ses dernières prévisions, les recettes supplémentaires qu’elle engendrerait nous permettraient de réduire encore davantage les déficits tant de l’État que de la sécurité sociale.
À ceux qui auraient aimé que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 comporte des mesures brutales de rétablissement des comptes sociaux, nous répondons que ce n’est pas la politique choisie par le Gouvernement. Contrairement à l’après-crise de 2009-2010, nous avons en effet privilégié la croissance.
La révision à la hausse des prévisions de recettes sociales engendrée par le surcroît de masse salariale, associée au dynamisme de la reprise, nous donne raison. Les récents chiffres du troisième trimestre 2021 concernant les embauches de plus d’un mois nous confortent dans cette stratégie : elles se sont de nouveau accrues de 11,4 %, après une augmentation de 16,6 % au deuxième trimestre. Cette hausse concerne à la fois les contrats à durée déterminée (CDD) de plus d’un mois – +12,8 % – et les contrats à durée indéterminée (CDI) – +9,9 %.
Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale n’en est pas moins un texte de transformation, qui s’inscrit dans le prolongement de ceux qui vous ont été présentés depuis 2017. J’en veux pour preuve qu’il marque une nouvelle étape dans le chantier de l’unification du recouvrement social. Ce chantier est structurant, car de cette unification découleront des gains d’efficacité significatifs, ainsi qu’une plus grande fiabilité des cotisations collectées et des droits sociaux enregistrés. Elle constitue par ailleurs un levier majeur de simplification pour les entreprises qui n’auront plus, à terme, qu’un seul interlocuteur au titre des cotisations sociales.
Vous aviez adopté une trajectoire ambitieuse d’unification du recouvrement social dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020. Certains de ces jalons ont pu ou pourront être aménagés, afin de tenir compte des effets de la crise sanitaire et de sécuriser les transferts. Ainsi, le transfert des cotisations collectées par l’Agirc-Arrco sera amorcé en 2022 par un pilote ; sa mise en œuvre pleine et entière n’interviendra, quant à elle, qu’en 2023.
Si nous sommes pragmatiques, nous n’en restons pas moins ambitieux : aussi, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit d’acter le transfert des cotisations collectées par la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse des professions libérales (Cipav) à l’issue de premiers travaux techniques, dont je tiens à saluer la qualité, pour une mise en œuvre en 2023.
Je souhaiterais évoquer rapidement deux autres mesures de transformation prévues dans ce texte. Nous vous proposons de généraliser le versement en temps réel des aides fiscales et sociales du secteur de l’aide à domicile, à commencer par le crédit d’impôt au titre des services à la personne.
Dès le 1er janvier 2022, les particuliers employeurs qui utilisent le Cesu+, le nouveau chèque emploi service universel dématérialisé, pourront bénéficier d’une avance de leur crédit d’impôt en temps réel. En avril 2022, cette généralisation sera étendue aux clients de services intermédiés, mandataires, prestataires et plateformes. À partir de 2023, une fois les conventions de partenariat conclues avec les conseils départementaux, ce sont les bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, ou de la prestation de compensation du handicap, la PCH, qui entreront dans le dispositif ; enfin, en 2024, cette généralisation sera élargie à la garde d’enfants.
Cette réforme simplifiera la vie de millions de nos concitoyens qui doivent aujourd’hui avancer le montant de leur crédit d’impôt. Elle contribuera à accompagner le virage domiciliaire et l’essor du secteur des services à la personne et de l’aide à domicile. Elle simplifiera le développement du travail déclaré et favorisera ainsi l’ouverture des droits sociaux associés aux salariés concernés.
Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale traduit enfin les mesures de transformation de la protection sociale du plan présenté par le Président de la République le 16 septembre dernier en faveur des travailleurs indépendants. Elles permettront de neutraliser les effets de la crise, de faciliter l’ajustement des échéances de cotisations sociales par les travailleurs indépendants eux-mêmes en fonction des revenus perçus et de moderniser le statut de conjoint collaborateur.
Vous le voyez, nous avons fait le choix de réformer jusqu’au dernier jour.
Le travail devra être poursuivi, s’agissant notamment du rétablissement des comptes sociaux. Il n’est en effet pas envisageable de reporter indéfiniment le retour à l’équilibre, sans quoi ce sont nos enfants et petits-enfants qui devront assumer le poids de nos déficits actuels.
Nous avons plus que jamais besoin d’une vision et d’un pilotage global des finances publiques, ainsi que d’une gouvernance modernisée de nos finances sociales. C’est toute l’ambition de la proposition de loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, que l’Assemblée nationale a votée le 19 juillet dernier, et que le Sénat a modifiée il y a quelques semaines. Son adoption, que je souhaite prochaine, nous donnera des outils bienvenus pour nous aider à mieux maîtriser les comptes sociaux.
Nous avons également besoin d’un pilotage unifié des finances sociales, ce qui implique, au vu du déficit global, de ne pas considérer les éventuels excédents isolés comme des marges de manœuvre, mais de renforcer la solidarité interbranches. Nous devrons évidemment poursuivre les réformes structurelles lorsque les conditions seront réunies.
Enfin, après des exercices forcément exceptionnels, nous devrons renouer avec un pilotage rénové des dépenses d’assurance maladie, qui ne soit pas incompatible avec nos objectifs en matière de santé publique, mais qui garantisse au contraire une utilisation plus juste des contributions des Français à notre système de protection sociale.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 ne solde donc pas l’ensemble des sujets. Il clôt toutefois un quinquennat de transformation de notre système social et d’avancées en faveur d’une meilleure protection des Français. Dans ces temps difficiles, la sécurité sociale a de nouveau prouvé sa modernité. Il nous reste à faire en sorte collectivement de lui permettre de continuer, demain, à remplir sa mission de protection des Français.
Je ne doute pas que nos débats seront l’occasion d’approfondir ces sujets en visant ce même objectif et cette même convergence. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme la présidente de la commission des affaires sociales applaudit également.)
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de saluer mon prédécesseur, Jean-Marie Vanlerenberghe, qui m’inspire et guide mes premiers pas en tant que rapporteure générale. Qu’il en soit remercié. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Nous abordons ce projet de loi de financement de la sécurité sociale dans un moment très particulier pour la sécurité sociale, comme viennent de le rappeler MM. les ministres.
En effet, les premiers articles du texte nous invitent à constater le plus lourd déficit de l’histoire des comptes sociaux. J’y reviendrai simplement à votre suite, messieurs les ministres, pour souligner une nouvelle fois que, dans une période de crise d’une très grande violence, la sécurité sociale a su pleinement jouer son rôle en aidant les Françaises et les Français, tant pour ce qui est du volet sanitaire de la crise que de son volet social.
Le Sénat et sa commission des affaires sociales ont d’ailleurs pleinement soutenu cette démarche, même si nous avons pu regretter, à raison, de ne pas avoir été consultés via un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. Espérons que la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale nous autorisera à le faire à l’avenir.
Quant aux chiffres, au-delà des 39,7 milliards d’euros de déficit des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (Robss) et du Fonds de solidarité vieillesse en 2020, je retiendrai surtout la prolongation de neuf ans de l’existence de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), notamment pour éponger quelque 92 milliards d’euros au titre des déficits anticipés à partir de 2020.
Pour l’année 2021, l’amélioration des comptes n’est que peu sensible, malgré une vigoureuse reprise économique et la forte diminution du recours à l’activité partielle. Avant la probable révision que vous nous proposerez, le projet de loi de financement de la sécurité sociale transmis au Sénat prévoyait encore un déficit de 34,8 milliards d’euros, c’est-à-dire le deuxième plus élevé de l’histoire de la sécurité sociale, bien au-delà de celui qui avait été enregistré en 2010.
Certes, la prévision de solde est pratiquement identique à ce que prévoyait la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021. Mais c’est de l’ordre de l’apparence, puisque cela découle d’une augmentation des recettes comme des dépenses d’un peu moins de 12 milliards d’euros : les recettes, en raison de la reprise économique ; les dépenses, du fait d’une nouvelle augmentation d’ampleur de l’Ondam, liée à la prolongation de la crise sanitaire et à des dépenses pour les tests et la campagne vaccinale mal calibrées.
Là encore, messieurs les ministres, la consultation du Parlement en cours d’exercice aurait été préférable.
À l’issue de ces deux années bouleversées par la crise, c’est bien l’évolution des finances sociales qui se joue dès le PLFSS pour 2022. Or, mes chers collègues, de ce point de vue, je ne peux vous cacher les inquiétudes que m’inspire ce texte.
Certes, pour l’exercice à venir, le déficit de la sécurité sociale devrait s’améliorer assez nettement, pour revenir à 22,6 milliards d’euros au niveau des Robss et du FSV, ce qui reste considérable.
Cette amélioration, qui pourrait d’ailleurs être encore plus forte du fait de la révision des hypothèses macroéconomiques, comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre Dussopt, n’est due qu’à l’embellie économique. Ce sont bien les recettes, tirées par la hausse du PIB et de la masse salariale, qui comblent en partie le trou des années 2020 et 2021.
En revanche, aucune mesure nouvelle, notamment en dépenses, ne contribue à cette amélioration. L’annexe 4 du PLFSS montre d’ailleurs bien que les mesures nouvelles dégradent légèrement le solde.
Je peux comprendre ce choix pour l’année à venir, non seulement en raison des échéances électorales, mais aussi parce qu’en sortie de crise la France reste fragile d’un point de vue économique et social. Dans ce contexte, il importe sans doute de ne pas briser l’élan, d’autant que nul ne sait ce que nous réserve l’épidémie de covid-19 à l’avenir.
C’est sur l’avenir un peu plus éloigné que se porte l’essentiel de mes inquiétudes.
En effet, comme vous le savez, le PLFSS présente l’originalité de comprendre une annexe à la fois « littéraire » et financière relative aux quatre prochaines années, ce qui peut évidemment inclure l’effet de mesures nouvelles à venir.
Or, messieurs les ministres, cette annexe ne dessine aucune stratégie de retour à l’équilibre pour les quatre années à venir, après la crise actuelle. Bref, il n’y a aucun signe de « dégrisement » après le « quoi qu’il en coûte ».
En conséquence, malgré le rebond économique de 2021 et 2022, la trajectoire des comptes de la sécurité sociale tranche nettement avec ce qui a été observé lors de la crise financière de 2008. Non seulement le décrochage initial est plus élevé, mais surtout le déficit des Robss et du FSV devrait atteindre un plateau dès 2023, à un niveau d’une quinzaine de milliards d’euros littéralement insoutenable pour la sécurité sociale. Cette trajectoire contraste nettement avec le chemin suivi après la crise financière de 2008, dans un contexte de langueur économique sur une plus longue période.
Pour ces raisons, la dette sociale n’apparaît pas maîtrisable.
À partir des propres hypothèses du Gouvernement, le cumul des déficits de la sécurité sociale postérieurs à l’année 2019 transférables à la Cades aux termes de l’article 1er de la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie devrait dépasser le plafond de 92 milliards d’euros dès 2022 – l’endettement est le principal ennemi de la solidarité ; comme l’a plus ou moins dit un des ministres, il faut revenir à des termes raisonnables, car, si d’autres crises surviennent, nous devrons absolument être en mesure de les affronter.
Surtout, la poursuite de l’accumulation de déficits importants après 2022, actée par le Gouvernement, conduirait à dépasser ce plafond de plus de 51 milliards d’euros d’ici à 2025.
Bien entendu, en l’absence de stratégie de retour à l’équilibre, il n’y a aucune raison de croire que les déficits se résorberont comme par magie à partir de 2026.
Dès lors, la dette sociale apparaît comme un puits sans fond, qui se creuserait chaque année, presque dans les mêmes proportions que le niveau d’amortissement – environ 17 milliards d’euros – que la Cades peut mettre en œuvre. Au total, la trajectoire financière proposée par le Gouvernement semble réellement hypothéquer notre capacité collective à léguer notre système de protection sociale aux générations futures.
Face à cette situation, notre commission a pris ses responsabilités et choisi d’afficher un message clair.
D’une part, en rejetant le rapport annexé, dont le fond restera inchangé même avec les éventuels amendements que le Gouvernement pourrait présenter.
D’autre part, en formulant plusieurs propositions concrètes destinées à envoyer un message de responsabilité financière sans casser la reprise en cours.
Ces propositions se déclineront autour de trois axes.
Le premier consiste à ne faire assumer à la sécurité sociale que les coûts lui incombant. Je pense notamment à l’explosion du budget de Santé publique France et à la dette hospitalière, deux sujets dont nous avons déjà beaucoup parlé au cours des éditions précédentes et sur lesquels nous aurons l’occasion de revenir.
Le deuxième consiste à assurer, avec notre rapporteure de la branche maladie, Corinne Imbert, et dans la continuité de nos propositions en loi organique, un meilleur contrôle du Parlement sur les multiples dotations que la sécurité sociale, en particulier cette branche maladie, verse à différents organismes.
Le troisième consiste à avancer, avec notre rapporteur de la branche vieillesse, René-Paul Savary, une proposition qui associera les partenaires sociaux tout en affichant la nécessité d’évolutions paramétriques en matière de retraite.
En somme, messieurs les ministres, mes chers collègues, la commission des affaires sociales a fait le choix de la cohérence, afin de préserver à long terme la solidité de notre modèle social. Soyons conscients que seule une sécurité sociale avec des comptes en ordre nous permettra d’offrir la même protection à nos enfants et de faire face à la prochaine crise.
On a le sentiment d’être en apnée… Mais, comme vous le savez, mes chers collègues, toute apnée nécessite des phases en aérobie, des temps pour reprendre son souffle. J’aurais donc tendance à conclure ainsi : faisons remonter les comptes de la sécurité sociale à la surface ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et Les Républicains. – M. Xavier Iacovelli applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l’assurance maladie. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce PLFSS pour 2022 est le dernier de cette législature, mais aussi, et surtout, le second depuis le début de la pandémie de covid-19, qui, cette année encore, marque fortement la branche maladie et les articles rattachés à celle-ci.
Je commencerai par les observations de la commission sur la trajectoire financière proposée dans ce texte pour la branche et pour l’Ondam, devenu au fil des ans le référentiel, si ce n’est un totem du PLFSS.
Cette trajectoire, messieurs les ministres, nous paraît particulièrement préoccupante. Force est de constater que les revalorisations du Ségur de la santé ne sont pas financées et qu’en présentant une perspective de déficit à hauteur de 15 milliards d’euros pour 2025, le Gouvernement met l’assurance maladie dans une situation de grande fragilité. Quel avenir assurons-nous au financement de notre système de santé avec pas moins de 63 milliards d’euros de déficits cumulés entre 2021 et 2025 ? La Cades paiera sans doute…
L’Ondam devrait atteindre l’an prochain 236,3 milliards d’euros, soit, en définitive, un montant en très léger repli par rapport à la rectification pour 2021. Mais, hors dépenses liées à l’épidémie de covid-19, il sera en progression de 3,8 %. C’est une dynamique particulièrement forte.
Vous nous répondrez que l’Ondam pour 2022 est ambitieux et revendiquerez un effort sur le médicament et une absence d’économies sur l’Ondam hospitalier. Soit !
Pourtant, ce niveau de dépenses record dont vous vous réjouissez nous semble en décalage criant avec la réalité que nous constatons tous dans nos territoires : nos hôpitaux connaissent des situations parfois alarmantes, avec des services d’urgence hors d’état de marche, ainsi qu’un profond et préoccupant malaise de certaines professions de santé – comment ne pas citer les sages-femmes, ou encore les internes ?
Cinquante articles sont rattachés à la branche maladie. N’ayant pas le temps de les détailler, je me limiterai à quelques observations.
S’agissant de l’hôpital, les dispositions proposées se bornent à des ajustements des réformes structurelles du financement de la psychiatrie, des soins de suite et de réadaptation et des urgences, rendus nécessaires par la crise sanitaire.
Sur le volet des produits de santé, le PLFSS pour 2022 se revendique comme celui de la mise en œuvre des mesures arrêtées par le Conseil stratégique des industries de santé (CSIS) de 2021 et celles du plan Innovation Santé 2030, qui en découle.
Si l’article 36, avec le nouveau dispositif dit d’« accès direct » au médicament, et l’article 38, traitant de la prise en compte de l’empreinte industrielle dans la fixation du prix, nous paraissent bienvenus, nous sommes plus réservés sur leur mise en œuvre concrète.
Dans le champ du dispositif médical, je me félicite de la création, à l’article 24, d’un régime de prise en charge de droit commun des dispositifs médicaux numériques de télésurveillance et, à l’article 33, d’un accès à une prise en charge anticipée pour ceux de ces dispositifs qui présenteraient un caractère innovant.
Concernant les soins de ville, le PLFSS comporte plusieurs articles qui visent à faciliter l’accès à certains soins dispensés par des auxiliaires médicaux, en supprimant la prescription médicale préalable. Sur ce point, disons-le, il ne remplit pas son rôle.
Les dispositions que vous y avez inscrites, messieurs les ministres, comme les articles additionnels adoptés à l’Assemblée nationale ont transformé ce texte en une loi de santé au rabais, ficelée à la hâte avant la fin de votre mandat, comme une sorte de véhicule balai.
M. Bernard Jomier. C’est vrai !
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ce n’est pas satisfaisant sur la forme : c’est un dévoiement du PLFSS. Ce n’est pas non plus satisfaisant sur le fond : ces mesures, qui répondent parfois à de réelles lacunes dans nos territoires, méritaient une vraie concertation avec l’ensemble des professionnels concernés, d’autant que certains des dispositifs envisagés risquent de mettre à mal, sur le long terme, le rôle du médecin traitant et le principe même de parcours de soins coordonnés.
MM. Bernard Jomier et René-Paul Savary. Très juste !
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Enfin, dans le domaine de la prévention, le PLFSS comprend une série de mesures disparates, consistant essentiellement à généraliser ou prolonger des expérimentations, dont la commission partage l’intention globale, même si elle en regrette parfois le manque d’ambition.
Telles sont en quelques mots, mes chers collègues, mes principales observations sur la branche maladie et les dispositions la concernant, que la discussion des articles doit désormais nous permettre d’examiner plus en détail. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, à l’heure où nous abordons l’examen du dernier PLFSS du quinquennat, je ne peux m’empêcher de repenser à la grande réforme du système de retraite promise par le candidat Emmanuel Macron en 2017. Nous allions voir ce que nous allions voir… Nous n’avons toujours rien vu !
Pendant ce temps, les perspectives de retour à l’équilibre de la branche vieillesse ne cessent de s’éloigner et relèvent davantage de la chimère que du champ des possibles.
Après la forte dégradation, en 2020, de la situation financière de la branche, dont le déficit a atteint 7,4 milliards d’euros sous l’effet de la crise sanitaire, l’amélioration de la conjoncture économique ne devrait pas permettre de ramener le solde à son niveau de 2019, tant s’en faut.
Ainsi, grâce à la progression du produit des cotisations sociales, liée à la fois à l’accroissement de la masse salariale et à la régularisation des cotisations reportées des travailleurs indépendants, le déficit de la branche vieillesse reculerait à 6,4 milliards d’euros en 2021 et à 5,2 milliards en 2022.
Ajoutons que cette tendance ne durerait pas au-delà de 2022. Dès 2023, en raison de la vigueur de l’inflation et de la poursuite du vieillissement démographique, le déficit de la branche se dégraderait de nouveau, pour atteindre 10 milliards d’euros d’ici à 2025.
À mesure que se profile ce sinistre horizon, qui remet gravement en cause la confiance des jeunes générations en la capacité du système de retraite à leur garantir une pension en contrepartie des cotisations versées tout au long de leur carrière, pour la cinquième année consécutive le Gouvernement demeure totalement passif.
Au-delà de quelques mesures de bon sens relatives à l’assurance vieillesse, comme la validation de trimestres de retraite par les travailleurs indépendants frappés par la crise, la possibilité de racheter des trimestres pour certains travailleurs indépendants, dont les cotisations n’ont pas été appelées pendant de nombreuses années, ou encore l’extension de la retraite progressive aux cadres en convention de forfait en jours, ce PLFSS ne contient aucune mesure de redressement des comptes de la branche vieillesse.
Comme chaque année, la commission prendra donc ses responsabilités – je vous remercie, madame la rapporteure générale, de l’avoir souligné – en proposant à la représentation nationale d’adopter, en vue d’un retour à l’équilibre à l’horizon de 2030, les seules mesures envisageables compte tenu de notre refus catégorique du recours à la diminution des pensions ou à l’augmentation des cotisations.
Réaffirmant notre attachement au paritarisme, nous proposons de confier aux partenaires sociaux, réunis dans le cadre d’une conférence de financement – nous n’avons rien inventé –, la charge de formuler des propositions en ce sens en recourant à divers leviers.
Dans le cas où cette conférence ne parviendrait pas à trouver un consensus, ce que, bien évidemment, nous ne souhaitons pas, les ajustements paramétriques qui nous paraissent nécessaires entreraient en vigueur dès 2023. Il s’agit, d’une part, du report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans dès la génération 1966 et, d’autre part, de l’accélération de la mise en œuvre de la réforme Touraine, de façon à ce que la durée d’assurance nécessaire à l’obtention du taux plein soit portée à 43 annuités à compter de la génération 1966, au lieu de la génération 1973.
En somme, mes chers collègues, la question fondamentale qui se présente à nous est la suivante : voulons-nous faire peser sur nos enfants et nos petits-enfants le poids de la dette qui s’accumule jour après jour, à défaut de trouver le courage de mener enfin une réforme difficile, mais indispensable ?
Laisser filer plus longtemps les déficits reviendrait à porter atteinte au principe même de répartition, fondé sur la solidarité entre les générations. Or qui dit solidarité, dit aussi équité : une génération ne doit jamais se trouver contrainte à payer les frais de l’incapacité des générations précédentes à assumer leurs propres responsabilités.
Pour ma part, j’estime normal de proposer, plutôt, d’améliorer l’employabilité des personnes d’expérience, que l’on appelle volontiers les seniors. Il y va de la préservation de notre modèle social. Plus on tarde à prendre les décisions, plus elles sont longues à s’appliquer et plus les mesures mises en œuvre sont brutales. C’est pourquoi il est indispensable d’agir ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, après un déficit provoqué par la crise sanitaire l’année dernière, la branche famille retrouverait l’équilibre en 2021 avec un solde de 1,2 milliard d’euros. Le rétablissement des recettes de la branche serait porté par la reprise économique, tandis que les dépenses augmenteraient légèrement.
Pour 2022, la situation de la branche continuerait à s’améliorer avec un excédent de 1,7 milliard d’euros.
Si l’on peut se réjouir de ces perspectives financières rassurantes, le doute est permis quant au bon emploi des excédents retrouvés.
Je ne peux ainsi cacher ma déception de voir la branche famille faire l’objet, une fois encore, de si peu de mesures dans le PLFSS, alors que la politique familiale dans notre pays a besoin d’un renouveau.
Toutefois, les quelques dispositions proposées vont dans le bon sens, et c’est pourquoi la commission vous proposera de les adopter.
La systématisation de l’intermédiation financière des pensions alimentaires constitue sans aucun doute l’avancée la plus importante. Elle parachève le mouvement de réforme visant à lutter contre les impayés des pensions alimentaires, en s’attaquant au problème à la racine.
En 2019, nous avions voté en faveur du recours à l’intermédiation lorsqu’elle est mentionnée dans le titre exécutoire fixant la pension alimentaire ou lorsqu’un des parents demande sa mise en place auprès de sa caisse d’allocations familiales.
L’article 49 propose d’aller plus loin en rendant applicable l’intermédiation de la créance alimentaire dès l’émission du titre exécutoire. Par dérogation, les parents pourront refuser conjointement ce dispositif, sauf si le parent créancier ou l’enfant a été victime de menaces ou de violences volontaires commises par le parent débiteur.
La commission vous propose, mes chers collègues, d’adopter cet article, qui permettra de réduire l’insécurité financière des familles victimes d’impayés, notamment les familles monoparentales.
La commission a également accueilli favorablement l’article 49 ter, qui simplifie les modalités de calcul et de revalorisation de la prestation d’accueil et de restauration scolaire versée dans les départements et collectivités d’outre-mer. Alors que les montants de la prestation ont été injustement gelés depuis plusieurs années, il est notamment proposé que sa revalorisation annuelle soit désormais indexée sur l’inflation.
D’autres dispositions renforcent l’accès aux droits par l’échange de données entre organismes et administrations ou bien par une lutte accrue par les organismes débiteurs de prestations familiales contre le non-recours. Ces dispositions, qui correspondent largement aux pratiques déjà en vigueur, ne posent pas de difficultés de fond, sous réserve de quelques ajustements que je proposerai.
Enfin, l’article 49 quater vise à décaler l’entrée en vigueur du tiers payant pour le complément de libre choix du mode de garde (CMG) accordé aux parents ayant recours à une structure pour la garde de leurs enfants. C’est avec regret – je l’ai déjà souligné en commission – que je constate l’impossibilité technique de déployer le tiers payant dès janvier prochain et la nécessité d’adopter cet article.
Ainsi, je ne formule pas d’opposition sur les mesures proposées dans ce texte. Je constate en revanche que le Gouvernement n’enclenche pas la relance de la politique familiale dont notre pays a tant besoin au vu de sa natalité déclinante. De 2012 à 2019, le nombre annuel de naissances dans l’Hexagone est passé de 790 000 à 714 000.
La remise en cause de notre modèle de politique familiale a sa part dans cette chute de la natalité. Introduite en 2015, la modulation du montant des allocations familiales selon les ressources du foyer a brouillé la lisibilité de notre système, en assignant un objectif redistributif à une prestation universelle. Il me semble nécessaire et urgent de revenir sur cette modulation. C’est pourquoi je déposerai prochainement une proposition de loi en ce sens.
Le renouvellement des générations est le meilleur investissement pour l’avenir. Tout notre système de sécurité sociale, dont nous débattrons cette semaine, repose sur une démographie dynamique. Il convient donc de ne pas le mettre en difficulté dans quelques années, par un manque de vision et de considération pour le temps long qui serait dramatique. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Pascale Gruny, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, après la brutale dégradation du solde de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) en 2020 sous l’effet de la crise sanitaire, celui-ci revient en territoire positif pour l’année 2021.
La branche serait ainsi excédentaire de 676 millions d’euros, tous régimes confondus, la reprise économique ayant tiré vers le haut la masse salariale sur laquelle sont assises les cotisations versées par les employeurs, ce que n’a pas annulé l’augmentation mécanique des accidents du travail au sortir de l’année 2020.
Une augmentation de cet excédent est prévue pour l’an prochain, conduisant les capitaux propres de la branche à culminer à plus de 5 milliards d’euros à la fin de 2022. À long terme, toutes choses égales par ailleurs, les recettes de la branche AT-MP restent donc structurellement plus dynamiques que ses dépenses. Cela signifie que les prestations fournies par la branche ne sont pas au niveau de la contribution demandée aux employeurs.
L’extension du périmètre du fonds d’indemnisation des victimes de pesticides (FIVP) aux médicaments antiparasitaires vétérinaires et l’égalisation des conditions de reconnaissance des maladies professionnelles dans le secteur agricole entre l’outre-mer et l’Hexagone n’auraient qu’un impact financier extrêmement limité pour 2022 et les années à venir, de l’ordre du million d’euros. Si je souscris à ces mesures, je déplore le déploiement tardif du FIVP : celui-ci n’est intervenu qu’à la fin de l’année 2020.
Ainsi, ce PLFSS est quasi neutre pour la branche et ne contient aucune réforme modifiant décisivement son équilibre, que ce soit en recettes ou en dépenses.
Il est d’autant plus notable – ou dommageable – que la principale mesure financière de ce projet de loi concerne l’augmentation de 100 millions d’euros du transfert effectué par la branche AT-MP au bénéfice de la branche maladie du régime général, au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles. Ce versement atteindrait 1,1 milliard d’euros, ce qui représente près de 8 % de l’objectif de dépenses pour la branche !
Cette augmentation fait suite au dernier rapport de la commission qui évalue, tous les trois ans, le coût pour la branche maladie de la sous-déclaration des AT-MP, en se fondant sur des études épidémiologiques et, surtout, statistiques. Ce coût, selon le rapport de juin 2021, serait compris entre 1,2 et 2,1 milliards d’euros. Le Gouvernement s’est fixé pour horizon d’atteindre la fourchette basse de l’estimation, soit 1,2 milliard d’euros, dès 2023.
Le maintien de ce transfert à un niveau aussi élevé, s’il se fonde sur les travaux de la commission d’évaluation, est avant tout le fruit d’un choix politique. Il laisse entendre qu’aucun progrès n’a été accompli sur la question de la sous-déclaration, ce qui est faux. Plusieurs des recommandations du rapport de 2017 ont été mises en œuvre et celles du rapport de 2021 sont en passe de l’être.
Tout porte plutôt à croire que ce versement, dont le montant est pris en compte dans la détermination des éléments de calcul de la cotisation AT-MP et pèse donc sur les entreprises, sert principalement à contribuer au rééquilibrage de la branche maladie. Or, la cotisation AT-MP est censée responsabiliser les employeurs sur leur sinistralité, et non pallier les difficultés d’autres branches.
J’observe que, si pendant les sept dernières années, lors desquelles le transfert à la branche maladie a été fixé à 1 milliard d’euros, ce versement avait pris pour référence la fourchette basse des estimations de la commission d’évaluation, soit près de 800 millions d’euros, il s’en serait suivi un gain moyen pour la branche d’un peu plus de 200 millions d’euros. Il conviendrait de les soustraire au 1,2 milliard que se propose d’atteindre le Gouvernement.
La commission des affaires sociales a donc adopté un amendement tendant à maintenir le montant du versement pour 2022 à la branche maladie à 1 milliard d’euros. La différence pourrait judicieusement être utilisée pour financer des actions de prévention dans le cadre de la prochaine convention d’objectifs et de gestion 2023-2027.
En particulier, si un report de l’âge de départ à la retraite était mis en œuvre, les conditions de travail des futurs retraités devraient leur permettre de partir à l’âge prévu en bonne santé, quand aujourd’hui de nombreux salariés en fin de carrière sont fréquemment en arrêt de travail.
Si je ne méconnais pas les efforts que déploie la branche AT-MP en la matière, j’ai été alertée sur le fait que le capital de subventions attribuables aux très petites entreprises (TPE) a été entièrement consommé dès avril de cette année, ce qui indique un problème d’offre par rapport à la demande de prévention.
La branche pourrait donc, compte tenu de ces marges de manœuvre financières, prévoir une augmentation enfin conséquente des dépenses de prévention, dans la lignée de la loi votée cet été, et poursuivre dès que possible l’ajustement à la baisse des cotisations, en cohérence avec la baisse tendancielle, bien qu’inégale selon les secteurs, de la sinistralité.
Sous ces réserves, mes chers collègues, je vous invite à vous prononcer en faveur de l’objectif de dépenses de la branche, fixé à 14,1 milliards d’euros pour l’ensemble des régimes obligatoires de base pour 2022. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Philippe Mouiller, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’autonomie. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, en cette fin d’année, la jeune branche autonomie achève son tout premier exercice ; cette nouvelle étape de l’histoire de la sécurité sociale est à l’heure d’un premier bilan.
Il est bien mince. Aucune conséquence n’a été tirée de la création d’une nouvelle branche qui comprend, comme l’an dernier, les dépenses de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, et celles de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, l’AEEH.
Le problème, c’est la méthode : toujours pas de vision à moyen ou long terme de la politique de l’autonomie ! Certes, la loi du 7 août 2020, qui a créé la branche, a aussi prévu de lui transférer en 2024 une part de contribution sociale généralisée (CSG) dérivée de la Cades. Mais, pour l’heure, le déficit atteint 900 millions d’euros.
L’objectif de dépenses de la branche pour 2022 s’élève à 34,2 milliards d’euros, soit 800 millions d’euros de plus que le tendanciel de dépense. Cette somme, non négligeable, finance notamment deux nouveautés, que je salue.
La première nouveauté est l’extension des revalorisations salariales issues du Ségur de la santé aux agents de la fonction publique hospitalière, ainsi qu’aux agents exerçant comme soignants, aides médico-psychologiques, auxiliaires de vie sociale et accompagnants éducatifs et sociaux des établissements financés au moins en partie par l’Ondam. Cela représente un large pan du champ médico-social, mais pas son intégralité.
Ces revalorisations successives, par cercles excentriques, de l’hôpital vers le secteur social sont incompréhensibles pour les personnels sur le terrain, voire pour l’administration elle-même. Encore un problème de méthode.
Elles déstabilisent un secteur aux statuts très hétérogènes du fait de l’aspiration des professionnels par les services concernés par les revalorisations. Nombreuses sont les structures associatives qui sont aujourd’hui menacées de fermeture. Dans le secteur du handicap, l’alerte est extrêmement sérieuse.
Le dispositif le plus ambitieux du texte engage la réforme des structures en prévoyant la fusion des services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD), des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) et des services polyvalents d’aide et de soins à domicile (Spasad) dans une entité unique baptisée « services autonomie à domicile », dont le pouvoir réglementaire devrait fixer à 22 euros la valeur du tarif plancher national.
De nouveau, une question de méthode se pose. En effet, il est regrettable que l’ensemble des acteurs du domicile n’aient pas été intégrés à cette réforme et que nous n’ayons pas profité de cette opportunité pour évoquer le mode mandataire, l’emploi direct et les prestataires de santé à domicile.
Une « dotation qualité » de 3 euros financera des services s’engageant par contrat avec les départements à respecter certaines contraintes. C’est une avancée notable vers la rationalisation de l’offre et l’amélioration du financement de ces structures.
Ces mesures, qui vont dans la bonne direction, illustrent les limites d’une méthode consistant à retoucher ce qui peut l’être en loi de financement, faute d’avoir pu transformer en loi la concertation pourtant bien engagée sur le grand âge et l’autonomie : la vision d’ensemble est quasi absente, la concertation préalable avec les professionnels ou les départements faible, mais la complexité s’accroît à chaque dispositif nouveau.
Songez que les concours de la CNSA aux départements transiteront désormais par une dizaine de canaux différents…
À ces dispositifs d’intérêt variable, les députés ont ajouté, sur l’initiative du Gouvernement ou du groupe majoritaire, huit autres articles d’un intérêt, si je puis dire, plus variable encore.
Je ne prendrai pour exemple que l’expérimentation d’une carte professionnelle pour les salariés du domicile, qui serait anodine si le climat n’était pas aussi tendu pour le secteur. La commission vous proposera de la supprimer.
En 2003, la canicule avait donné lieu à la création de la CNSA, de la journée de solidarité et d’un plan pour le grand âge. Derrière ces dispositifs, quelques idées simples : l’engagement d’une réflexion stratégique sur l’autonomie ; une caisse à la gouvernance innovante ; la création de ressources nouvelles ; un début de vision pluriannuelle.
Dix-huit ans plus tard, après un traumatisme social au moins égal en intensité, que propose le Gouvernement ? La transformation, sans conséquences opérationnelles, de la CNSA en caisse de sécurité sociale, d’innombrables missions et groupes de travail dont peu d’enseignements sont tirés et quelques mesures nouvelles que je vous ai présentées.
Ces efforts ne sont pas à la hauteur des attentes de nos concitoyens.
Pour maintenir les questions d’autonomie à l’agenda politique et qu’enfin des décisions de financement soient prises, la commission des affaires sociales vous propose d’institutionnaliser le dialogue entre les différents partenaires, sous la forme d’une conférence annuelle des générations et de l’autonomie, alimentant le travail du Parlement. Puisse-t-elle jouer le rôle qu’a la Conférence nationale du handicap pour faire progresser la prise en charge des plus fragiles. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Christian Klinger, rapporteur pour avis de la commission des finances. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le Gouvernement a présenté le 7 octobre dernier le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.
Au regard de ses effets sur nos finances publiques, la commission des finances a souhaité se saisir pour avis de ce texte. Cet avis porte principalement sur la trajectoire des comptes sociaux.
Les finances de la sécurité sociale se trouvent aujourd’hui prises entre deux tendances contradictoires : la crise sanitaire a provoqué un effondrement sans précédent des comptes de la sécurité sociale, les mesures de confinement s’étant poursuivies dans la première moitié de l’année.
Dans le même temps, la reprise économique, plus vigoureuse que prévu, vient améliorer les prévisions de recettes et de solde par rapport à celles qui étaient inscrites dans la loi de financement de la sécurité sociale de l’année dernière.
Cette reprise économique, si elle est bien entendu une bonne nouvelle, ne doit pas faire oublier les risques majeurs qui pèsent aujourd’hui sur les comptes sociaux. Je préfère ainsi parler de « convalescence » des comptes sociaux : s’il y a indéniablement une amélioration des indicateurs, les effets de la crise se font encore sentir, et elle continuera à marquer la trajectoire des finances sociales pour de nombreuses années à venir.
En 2022, nous pouvons espérer que l’essentiel de la crise sera derrière nous. Cet optimisme se traduit dans les prévisions pour les comptes sociaux : le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) devrait être ramené à 21,6 milliards d’euros, ce qui représente une réduction de 37,5 % par rapport à l’exercice précédent.
Ce déficit reste néanmoins vertigineux, et c’est aussi le moment où nous devons nous interroger sur la trajectoire des comptes sociaux et leurs risques de dérives. En effet, il est possible désormais de mieux distinguer entre les augmentations de dépenses, qui visent à répondre immédiatement à la crise, et celles qui ont vocation à s’installer dans la durée. Les premières ne représentent pas une menace pour les comptes sociaux, contrairement aux secondes.
À ce titre, laissez-moi citer un chiffre : il est estimé qu’à l’horizon 2024, le déficit du régime général et du FSV serait supérieur à 10 milliards d’euros.
Ces déficits sont qualifiés par la Cour des comptes, dans son rapport du début d’octobre, de « permanents » ; c’est-à-dire qu’ils ne se résorberont pas, sauf mesures nouvelles ou « miracle » économique.
L’amélioration des indicateurs économiques par rapport à ceux qui sont inscrits dans le PLFSS ne sera pas suffisante pour changer cet état de fait. Il demeurera toujours à partir de 2024 un déficit permanent et élevé. Or plus longtemps on maintiendra ce déficit, plus il sera difficile d’inverser la tendance et plus la perspective d’un retour à l’équilibre des comptes s’éloignera.
Mais tout le problème est là : le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne présente aucune mesure structurelle forte à même de rétablir la trajectoire des comptes de la sécurité sociale.
Toutes les mesures de maîtrise des dépenses ne sont pas incompatibles avec la croissance économique ; certaines peuvent au contraire la favoriser. Je pense par exemple à la lutte contre la fraude sociale. La seule mesure présente dans le texte est une simplification marginale du processus de contrôle.
La grande absente du projet de loi reste la réforme des retraites. En effet, quoique la branche vieillesse n’ait été que marginalement affectée par la crise, elle est aujourd’hui celle qui connaît l’évolution, en pourcentage, la plus inquiétante. Le déficit de la branche vieillesse devrait, en 2025, être plus de trois fois supérieur à celui de 2022.
Nous sommes ainsi obligés de poser à nouveau la question de la gestion de la dette sociale.
Le présent projet de loi de financement met en avant des déficits cumulés du régime général et du FSV supérieurs à 92 milliards d’euros pour la période 2020-2023. En outre, un déficit de 10 milliards d’euros est attendu pour l’exercice 2024. Idem pour celui de 2025.
Ces perspectives rendent irréaliste la prévision actuelle d’une extinction de la Cades aux environs de 2033. Il apparaît alors que le poids de la dette sociale est confié aux générations futures, ce que l’on cherchait pourtant à éviter avec la création de cette caisse en 1996.
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, la commission des finances a émis un avis défavorable sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, pendant toute la crise sanitaire, dont nous ne sommes toujours pas sortis, notre système social a répondu « présent » pour les Français.
Conformément aux promesses de 1945, il a protégé leurs revenus contre les aléas de l’existence – ceux-ci ont été nombreux au cours des deux dernières années – et a pris soin de leur santé dans un cadre solidaire.
Nous attendons légitimement beaucoup de notre protection sociale, qui fait partie de notre bien commun. Mais le financement de ce bien commun n’a rien du miracle : il repose sur les ménages et les entreprises qui manifestent souvent, désormais, sous des formes diverses, une certaine lassitude à l’égard des prélèvements obligatoires.
La crise sanitaire ne doit pas effacer celle qui l’a précédée, et qui a révélé la gravité des fêlures de notre société : celle des « gilets jaunes ».
Dans ce contexte, le projet de loi de financement de la sécurité sociale est un objet politique majeur. Acquis démocratique, il est le moment par excellence où doivent se confronter les attentes à l’égard du système social et les dispositions à même d’assurer son financement.
Rappelons que l’enjeu est de taille : de l’ordre de 500 milliards d’euros. Il mérite que l’on s’y attarde un instant.
C’est donc le moment de s’interroger sur la part de l’effort que les Français souhaitent consacrer à la santé, aux retraites, à la famille, au vieillissement. Cet effort est légitime ; rappelons que d’autres le sont tout autant : l’éducation et la formation professionnelle, mais aussi la culture ou la défense, pour n’en citer que quelques-uns.
Aucun sujet n’est tabou, bien au contraire, mais les questions doivent être clairement posées.
Or il semble à la commission des affaires sociales que ce projet de loi prend le plus grand soin à les éluder très largement.
Sur la santé, le système public donne l’impression d’être hors de contrôle malgré les efforts budgétaires déployés. Les soignants fuient l’hôpital, certes épuisés par la crise, mais surtout en perte de sens dans des organisations qu’ils ne comprennent plus.
Il est désormais certain que le Ségur de la santé n’y suffira pas, mais quel cap donner à présent au système de santé ?
Sur l’autonomie, les années passent et nous rapprochent de plus en plus d’un véritable mur de financement, que les évolutions démographiques rendent inéluctable. Le diagnostic est clairement posé par les rapports qui s’empilent. Mais faute d’avoir répondu à la question cruciale du financement, la réforme s’est enlisée et le dossier patine. Qui doit assumer le financement de l’autonomie ? Les personnes concernées et, le cas échéant, leur patrimoine ? Les jeunes retraités pour préparer l’avenir ? La société dans son ensemble, mais, dans ce cas, sous quelle forme : l’impôt, l’assurance obligatoire ? Cette question relève-t-elle de l’aide sociale pour les plus pauvres ou d’une assurance généralisée ? Le système actuel proclame la seconde, mais ne finance de facto que la première, et encore partiellement.
Aucune réponse n’ayant été apportée à ces questions, la branche autonomie reste une coquille vide qui ne fait que labelliser des dispositifs existants. Ce ne sont pas les dispositifs proposés par le PLFSS qui suffiront à répondre aux enjeux.
Sur les retraites, faut-il rappeler que les paramètres sont bien identifiés entre le niveau de vie que l’on souhaite garantir aux retraités et les efforts que l’on est prêt à consentir pour y parvenir ? Là encore, notre système doit s’adapter à des évolutions démographiques. La France vieillit : il faut faire en sorte qu’elle puisse en assumer les conséquences pour des générations moins nombreuses et confrontées de surcroît à des conditions économiques difficiles.
La réforme des retraites la plus astucieuse et la plus complexe ne fera pas disparaître ces paramètres qui s’imposent à nous. Comme les années précédentes, la commission invite le Sénat à prendre ses responsabilités, sans tarder davantage et sans bercer les Français de contes qui ne dureront que le temps d’une campagne présidentielle. Ils ne sont pas des enfants et n’ont pas manqué de le faire savoir.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale devrait donc être l’occasion d’aborder ces grands enjeux et de se projeter dans l’avenir.
Au lieu de cela, que nous propose ce texte ? Rien sur l’avenir, en tout cas, puisque la trajectoire pluriannuelle ne porte aucune trace d’action volontariste. Elle ne se fait en quelque sorte que le sismographe des effets de la croissance envisagée sur les comptes sociaux.
Pour les décisions, il est acté qu’il en faudra, mais elles viendront plus tard.
Nous pensons qu’une telle position n’est pas tenable et nous vous proposerons d’en tirer les conséquences.
Pas grand-chose non plus sur la santé : le projet de loi de financement s’est mué cette année en catalogue de mesures éparses qui auraient souvent mieux trouvé leur place ailleurs.
Entre l’encadrement des mesures de contention en psychiatrie, dont on peinera à nous expliquer pourquoi, après deux censures du Conseil constitutionnel, elles n’ont pu faire l’objet d’un texte spécifique, ou les aménagements par petites touches de la répartition des compétences entre les différentes professions de santé, on hésite, malgré le sérieux des sujets, entre l’inventaire à la Prévert et la complainte du progrès !
Pour redonner sa portée au PLFSS, la commission des affaires sociales a pris le parti de le recentrer sur sa vocation première, telle que la Constitution la définit, c’est-à-dire les questions de financement, qui à nos yeux se posent de façon cruciale cette année encore.
Elle vous propose donc de supprimer toute une série de dispositions qui n’ont pas leur place dans ce texte et appelle à une saisine du Conseil constitutionnel sur ce point, afin qu’il structure clairement sa jurisprudence. Elle a de ce fait appliqué avec rigueur, mais discernement me semble-t-il, les irrecevabilités spécifiques qui s’y attachent. L’enjeu est celui de la démocratie : les délais constitutionnels ne doivent pas forcer la main des parlementaires pour examiner à la va-vite diverses mesures d’ordre social qui seraient la « voiture-balai » du quinquennat !
Le PLFSS n’est pas le succédané d’une loi Grand Âge ayant renoncé à ses ambitions ou d’une loi Santé qui en serait dépourvue.
C’est donc dans cet état d’esprit que nous abordons l’examen de ce texte, avec des objectifs clairs : il ne suffit pas de se gargariser de l’excellence de notre modèle social ; encore faut-il lui donner les moyens de se renouveler et de s’adapter afin que nous puissions en faire non pas une parenthèse dans l’histoire, mais bien un legs pour les générations futures. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.
Question préalable
M. le président. Je suis saisi, par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, d’une motion n° 415.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2022 (n° 118, 2021-2022).
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la motion.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, face à la crise sanitaire qui a ébranlé le pays et mis en tension notre système de santé, et singulièrement les services hospitaliers, le Gouvernement a enfin choisi de ne pas poursuivre les réductions de dépenses pour l’hôpital.
Après quatre ans de coupes claires, soit plus de 4 milliards d’euros depuis 2017, vous maintenez, monsieur le ministre, le même niveau – hors Ségur – que l’année dernière.
Cette pause est la bienvenue, mais va-t-elle suffire à redresser la barre ? Les personnels sont épuisés et leurs conditions de travail ne leur permettent plus d’assurer leur mission dans de bonnes conditions, ce qui ne peut que nuire à la qualité des soins.
Outre la nécessité de dégager des moyens suffisants, il s’agit de les rendre pérennes, ce que vous n’êtes visiblement pas prêts à faire.
L’Ondam, sacro-saint objectif que nous n’avions jamais pu faire évoluer malgré les mobilisations syndicales et politiques, a dépassé fort heureusement la barre des 9 % d’augmentation en 2020, et le pouvoir à l’hôpital a quelque peu échappé aux technocrates pour laisser les équipes s’organiser, s’entraider au mieux des intérêts des patients.
Mais pour 2022, retour à un Ondam inférieur à l’augmentation du coût des dépenses de santé, qui se situe entre 4 % et 5 %. Vous ne tirez donc aucune leçon de ce que nous sommes en train de vivre. Le Gouvernement semble pressé d’en finir avec la crise sanitaire pour reprendre sa politique là où il l’avait laissée, c’est-à-dire en réduisant et en contraignant encore et toujours les budgets.
Ce budget, présenté comme exceptionnel par le Premier ministre, est en réalité une poursuite de l’offensive contre notre système de sécurité sociale. Après avoir décidé en 2020 de faire payer à la sécurité sociale la crise sanitaire et ses conséquences économiques, le Gouvernement poursuit sa logique de fiscalisation de la sécurité sociale. Nous sommes passés en quinze ans d’un financement de l’assurance maladie majoritairement par les cotisations sociales à un financement aux deux tiers par la CSG et les taxes.
En réalité, les assurés sociaux perdent 75 milliards d’euros en exonérations de cotisations sociales et paient 75 milliards d’euros en TVA et en CSG pour compenser les pertes.
Faire les poches des assurés sociaux, des retraités, sans parler de l’obligation d’avoir recours à des mutuelles ou à des assurances pour être mieux remboursé : on est loin du « 100 % sécu », qui a pourtant fait ses preuves pendant la pandémie ! On est loin de la sécurité sociale universelle, contrairement au discours du Gouvernement sur sa « grande sécu ».
Nous refusons cette fiscalisation de la sécurité sociale, qui conduit à une mainmise de l’État – et, surtout, de Bercy – sur elle, qui traque tout ce qui est dépenses sociales.
La sécurité sociale est confrontée à une crise de financement entretenue par les multiples exonérations de cotisations sociales qui viennent assécher ses ressources, d’autant que toutes ne sont pas compensées.
Le Gouvernement reste fixé sur les dépenses, pensant s’en sortir par une reprise de l’activité économique, ce qui est parfaitement illusoire. Les exonérations de cotisations, qui ont doublé depuis 2013, se poursuivent. En conséquence, les recettes de la branche maladie restent inférieures à leur niveau de 2018, alors que cette branche est soumise à une augmentation des dépenses sans précédent avec la pandémie.
Un petit rappel s’impose : l’ensemble des niches sociales s’élève à 90 milliards d’euros.
Ces choix politiques assumés ont de violentes conséquences sur notre système de santé puisqu’en 2022, il manquera 21 milliards d’euros pour financer les dépenses de santé, soit l’équivalent de l’allégement lié au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE).
Le fameux « trou de la sécu », qui est totalement organisé, est utilisé par le Gouvernement pour justifier les régressions sociales. Plutôt que d’assumer le coût de la crise sanitaire en empruntant à un taux négatif, comme l’État le fait actuellement, vous avez préféré laisser l’ardoise à la sécurité sociale pour faire payer la pandémie par les cotisations des assurés sociaux.
Fidèles aux valeurs et aux principes qui ont permis l’édification de la sécurité sociale dans notre pays, nous sommes pour la suppression des exonérations de cotisations sociales et favorables à un retour de l’autonomie du budget de la sécurité sociale vis-à-vis de l’État, ainsi qu’à sa gestion par des administrateurs élus par les salariés et leurs ayants droit.
Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, en prévoyant de faire financer la perte d’autonomie sur le dos des salariés et des retraités, porte atteinte au principe de partage de la valeur créée, qui fonde notre système de protection sociale.
La crise sanitaire sans précédent qui a secoué notre pays, comme l’ensemble du monde, et qui n’est pas terminée, a mis en évidence comme jamais les failles de notre système de santé, creusées par les choix politiques faits depuis vingt ans.
L’hôpital a tenu le coup grâce à l’engagement des personnels, mais à quel prix ? Celui d’un épuisement généralisé et d’une exigence partagée d’un changement de politique à leur égard. Or, après qu’ils ont été envoyés au front sans protection, après qu’ils ont été applaudis le soir à vingt heures, leurs conditions de travail ne cessent de se dégrader.
De plus, on a assisté à une stigmatisation des personnels, accusés de ne pas se faire vacciner suffisamment vite. Une défiance telle s’est propagée que des contrôles de leurs arrêts de travail ont été organisés, et certains personnels ont même perdu leur emploi faute de vaccination.
Je défends, comme l’ensemble de mon groupe, la vaccination, mais il y avait d’autres mesures à prendre que cette entorse sans précédent au code du travail, comme si l’on pouvait se passer d’elles et d’eux pour faire tourner les services, alors que la pénurie de personnel se fait sentir partout.
La colère, l’amertume sont palpables dans tous les services. Selon une étude parue au printemps dernier, si c’était à refaire, trois médecins sur dix choisiraient une autre profession. Toutes les professions médicales et paramédicales sont touchées.
Les contreparties financières à leur engagement dans la crise sanitaire dégagées par le Ségur de la santé sont jugées insuffisantes, car elles représentent en réalité un rattrapage de dix ans de blocage des salaires. Et il a fallu des réajustements, car beaucoup de catégories professionnelles, notamment dans le secteur médico-social, avaient été oubliées et le sont encore aujourd’hui.
Vous nous dites, monsieur le ministre, que si des lits sont fermés – 13 300 depuis 2017, dont 5 700 en pleine crise sanitaire, et je ne fais pas référence à l’alerte récente du professeur Delfraissy –, c’est par manque de personnel. Mais seulement 15 000 recrutements sont prévus par le Ségur de la santé, soit en réalité 7 500 selon Bercy, ce qui fait à peine six postes par hôpital, quand les postes vacants représentent près de 20 % des effectifs.
Pourtant, en un an, le nombre de départs d’infirmières et d’infirmiers exerçant dans le public a bondi de 43 %. Frédéric Valletoux, président de la Fédération hospitalière de France (FHF), vient d’estimer les besoins de recrutements à 125 000 personnes : 25 000 infirmières et aides-soignantes, ainsi que 100 000 personnes dans les Ehpad. Ces chiffres sont proches des revendications syndicales, avec une exigence de 100 000 emplois par an sur trois ans pour les Ehpad et de 100 000 emplois pour les aides à domicile.
Face aux difficultés de recrutement dans les professions paramédicales et médicales, le Gouvernement fait comme si la crise sanitaire était l’unique cause de l’épuisement des professionnels de santé. Mais c’est oublier que si les moyens financiers avaient été débloqués en 2019 lors du plan Ma santé 2022 pour augmenter la capacité de formation des médecins et autres spécialités de santé, nous aurions pu, d’ici cinq ans, inverser la courbe de réduction du nombre des médecins généralistes pour 1 000 habitants. Ce n’est pourtant pas une crise de vocations, puisque, du côté des jeunes, l’élan pour les métiers de soins est toujours présent. Nous sommes certes passés d’un numerus clausus national à un numerus clausus fixé selon les capacités d’accueil des universités, mais les chiffres restent très bas compte tenu du manque de moyens de ces dernières.
Selon le sociologue de la santé Frédéric Pierru, les rémunérations ne figurent pas en tête des facteurs de satisfaction au travail : les soignants privilégient le soutien des collègues, des supérieurs, la reconnaissance du travail effectué et, bien entendu, les conditions de travail, qui déterminent la qualité de l’ambiance au sein des équipes.
Rien n’est prévu dans ce PLFSS 2022 pour répondre à ces justes revendications. L’adaptation de la société au vieillissement, la nécessité de recouvrer notre souveraineté sanitaire avec une production de médicaments et de produits de santé en France, comme nous vous y invitons à travers notre proposition de loi portant création d’un pôle public du médicament et des produits médicaux, la mise en œuvre d’une démocratie sanitaire qui accorde enfin une place aux personnels, aux usagers et aux élus locaux, une psychiatrie digne du XXIe siècle : voilà des sujets urgents à traiter.
Ce PLFSS est un empilement d’articles qui ne font ni sens ni cohérence. Le monde a changé, l’hôpital public doit redevenir la place forte d’un nouveau modèle de santé. Il est essentiel, par exemple, de créer toutes les conditions d’une coopération entre médecine de ville et médecine hospitalière, à l’heure où les déserts médicaux étendent leur spectre sur l’ensemble du territoire.
Il est plus que jamais indispensable d’avoir une vision à long terme. Or cette vision à long terme, cette impulsion, c’est à l’État de la donner. Hélas ! monsieur le ministre, c’est tout le contraire que vous faites. Vous lancez des appels à projets auprès des ARS et vous attendez leur retour pour faire vos choix. Mais ce n’est pas ce qu’on attend d’une politique de santé nationale ! Sans vision globale, c’est la déliquescence généralisée. (M. le ministre s’exclame.)
Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe CRCE a décidé de déposer cette motion tendant à opposer la question préalable. Et j’espère qu’elle sera votée ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. Personne ne demande la parole contre la motion ?…
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. J’ai écouté très attentivement l’ensemble des éléments qu’a exposés notre collègue en défense de sa motion, et je dois bien reconnaître que ses motifs de préoccupation, d’indignation, voire d’exaspération sont nombreux. Pour autant, précisément pour ces raisons, nous devons débattre de ce PLFSS et offrir la possibilité à chaque groupe de formuler des propositions et d’échanger sur des sujets importants qui concernent les Françaises et les Français au quotidien. L’avis de la commission – j’en suis désolée – est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Véran, ministre. Madame la sénatrice Laurence Cohen, je vous ai bien écoutée et, pardonnez-moi de vous le dire, je ne sais plus où se situe le communisme aujourd’hui ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe CRCE.)
Je n’ai pas dit un mot pendant que vous vous exprimiez !
Vous avez dénoncé les fameux technocrates de la santé qui empêchent les soignants de soigner ! Mais ceux que vous désignez ainsi, ce sont des fonctionnaires. Or j’avais cru comprendre que vous défendiez particulièrement cette catégorie. De surcroît, l’immense et même l’écrasante majorité d’entre eux exerce dans les territoires. Ce matin encore, je visitais un hôpital, où l’on m’a entretenu du poids des charges administratives, de la manière de renforcer le fonctionnement de l’hôpital : de fait, je ne suis pas sûr que le mot « technocrate » soit celui qui sied le mieux à ces femmes et à ces hommes engagés dans les territoires.
Dans les hôpitaux, en médecine de ville, dans les ministères et dans les agences régionales de santé, je défends les fonctionnaires !
Par ailleurs, vous avez déploré que la sécurité sociale soit en partie financée par la CSG. Je ne vous rappellerai pas l’historique de cette contribution qui, me semble-t-il, a été créée alors que le gouvernement était dirigé par un illustre Premier ministre de gauche, cependant que sa majorité était élargie jusqu’aux communistes. La création de la CSG a été, je pense, une très bonne chose dans la mesure où elle permet de faire contribuer le patrimoine au financement de la protection sociale. Or j’avais cru comprendre que, dans la doctrine communiste…
Mme Cathy Apourceau-Poly. De quelle doctrine parlez-vous ?
M. Olivier Véran, ministre. Ne voyez pas dans ce mot une injure !
J’avais donc cru comprendre que, dans la philosophie communiste, si vous préférez ce mot, faire contribuer le patrimoine au financement des politiques publiques était un motif de satisfaction…
Vous avez ensuite plaidé pour que la « sécu » soit davantage financée par le travail. Je suis d’accord avec vous, mais, pour ce faire, il faut qu’il y ait du travail ! Or les mesures de soutien économique qui ont été mises en place par le gouvernement actuel, ainsi, d’ailleurs, que par les précédents, permettent d’afficher aujourd’hui un taux de chômage proche de 7 %, taux inférieur à ce qu’il était avant la crise bancaire et économique de 2008.
Car créer de l’emploi et du travail permet d’accroître les rentrées de cotisations, de financer la protection sociale et de réduire le déficit de la sécurité sociale. Par conséquent, vous devriez vous retrouver dans ce bilan.
Ensuite, vous dites que la vaccination obligatoire est une entorse sans précédent au code du travail.
Mme Laurence Cohen. Ce n’est pas ce que j’ai dit : j’ai parlé des sanctions !
M. Olivier Véran, ministre. Pardonnez-moi, madame la sénatrice, ce sont exactement les mots que vous avez prononcés – je les ai notés. Sanctionner le non-respect de l’obligation vaccinale à laquelle est soumis un soignant n’est pas une entorse historique au code du travail. J’ai consulté les archives : à plusieurs reprises dans le passé ont été votés des textes – y compris par les parlementaires communistes de l’époque – rendant certains vaccins obligatoires, à savoir ceux contre la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite et l’hépatite B. Bref, les temps changent, peut-être, mais ne dites pas que c’est sans précédent.
Mme Laurence Cohen. Sauf que, cette fois, des personnels sont renvoyés…
M. Olivier Véran, ministre. S’agissant de l’attractivité des filières, madame la sénatrice, j’ai regardé les chiffres des inscriptions cette année sur Parcoursup : la formation la plus demandée dans notre pays, tous métiers confondus, c’est celle d’infirmière, avec 689 000 inscriptions ; en deuxième position, on trouve la médecine. Cette filière reste donc attractive. En revanche, il faut pouvoir maintenir en poste celles et ceux qui ont fait le choix de cette magnifique carrière, de ces beaux métiers, ce à quoi nous travaillons avec le Ségur.
À ce propos, vous dites que les hausses de salaire sont insuffisantes.
Mme Laurence Cohen. Ce sont les professionnels qui le disent !
M. Olivier Véran, ministre. Moi, je considère que 10 milliards d’euros par an de hausses de salaire pour les soignants, c’est historique, ce n’est jamais arrivé sous quelque gouvernement que ce soit, de gauche comme de droite. Démontrez-moi l’inverse et je reconnaîtrai alors que j’avais tort.
Par ailleurs, la somme consacrée à ce chantier est près de deux fois supérieure à celle que nous demandaient les uns et les autres, y compris les syndicats, avant que je n’ouvre le Ségur de la santé. Je note également que vous n’avez pas voté ces crédits, madame la sénatrice, et je le regrette.
De plus, vous mélangez les postes à pourvoir et les postes à créer. Un certain nombre de postes ne sont pas pourvus – c’est un fait –, car on manque de soignants, en particulier dans les hôpitaux parisiens. Mais, en parallèle, un certain nombre de postes doivent être créés à la suite du Ségur : nous avons décidé de les financer en plus des postes à pourvoir, et non en lieu et place de ces derniers.
En conséquence, il ne s’agit pas d’une confusion, mais d’une addition : oui, nous voulons que, demain, l’hôpital dénombre davantage de lits qu’il n’y en avait hier. C’est peut-être une rupture, mais nous assumons totalement cette nouvelle politique, financée notamment par ce budget de la sécurité sociale.
Bien sûr, nous ne sommes pas là pour dresser un bilan historique. Mais regardez la contribution des ministres de la santé successifs, y compris les ministres communistes, à notre protection sociale : il y aurait beaucoup à dire, qu’il s’agisse du développement du secteur 2 et des politiques de déremboursement, par exemple pour ce qui concerne l’orthodontie.
En revanche, je ne crois pas que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale fasse une seule entorse à la protection sociale, à la sécurité sociale ou à l’assurance maladie. Il ne contient pas une mesure de déremboursement ! La part de l’assurance maladie dans le remboursement des dépenses de santé a même augmenté de 2 %, pour atteindre le niveau historique et inédit de 80 %.
Nous sommes donc très loin du procès intenté à ce gouvernement, que certains accusent de mener une politique ultralibérale. (Mme Éliane Assassi proteste.)
Madame la sénatrice, vous soulignez que le monde a changé : je suis d’accord. Il faudrait aussi que les discours changent. En effet, nous sommes tous dans le même bateau. Ce que les Français attendent de nous, c’est plus de médecins, plus de soignants et des hôpitaux qui aillent mieux.
Différents chemins permettent sans doute d’y parvenir. Néanmoins – je vous le dis en toute honnêteté –, pas un élément du présent texte ne contrevient aux objectifs que vous avez mis en avant. Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable. (M. Alain Richard applaudit.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. On n’avait pas de doute !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Les élus du groupe écologiste font leur le constat dressé par leurs collègues du groupe CRCE. L’annexe B, évoquée dans la défense de cette motion, nous inspire à nous aussi des inquiétudes. De fait, nous sommes face à la chronique d’une austérité annoncée. Pour rééquilibrer les comptes, on va demander à l’hôpital de faire des économies. À cet égard, 2021 et, peut-être, 2022 ne seront que des parenthèses.
Toutefois, nous souhaitons que le débat ait lieu. Non seulement nous voulons amender autant que possible ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais nous entendons aussi mettre au jour certains faits qui contredisent le beau discours que vient de nous faire M. le ministre de la santé.
Voilà pourquoi nous ne voterons pas la motion présentée par le groupe CRCE.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Mes chers collègues, les membres du groupe Union Centriste ne voteront pas cette motion.
Pour notre part, nous nous sommes posé trois questions.
Premièrement, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale entraîne-t-il une remise en cause globale du paritarisme ? À l’évidence, la réponse est non.
Deuxièmement, ce texte est-il insincère ? Nous ne le pensons pas non plus – je n’en dirais pas autant du projet de loi de finances. (Murmures.)
Troisièmement et enfin, même si nous n’approuvons pas le présent texte en totalité, avons-nous la possibilité, ici et maintenant, de l’amender afin de l’améliorer ?
Mme Laurence Cohen. Eh bien non !
M. Olivier Henno. Selon nous, la réponse est oui. Cette faculté est peut-être trop restreinte à notre goût, mais dès lors que l’on répond positivement à cette dernière question (Protestations sur les travées du groupe CRCE.), on estime qu’il y a tout intérêt à débattre ! (M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Mes chers collègues, la sécurité sociale est le socle de la République et, pour le Sénat, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est l’un des textes les plus importants de l’année. Il traite à la fois de la prise en charge du covid, de la vaccination, des hôpitaux et du secteur médico-social.
Nous, sénateurs, sommes les représentants des collectivités territoriales. Les élus locaux comme nos concitoyens ne comprendraient pas que nous ne donnions pas notre avis sur ce texte en formulant nos propositions.
Pour ma part, je défendrai un certain nombre de mesures, notamment pour lutter contre l’extension des déserts médicaux et assurer la prise en charge de l’autonomie dans les Ehpad, laquelle est pour l’heure très insuffisante.
Je veillerai aussi à souligner un certain nombre d’avancées, comme les revalorisations salariales ou le succès de la vaccination contre le covid.
C’est vrai, considéré globalement, l’Ondam n’augmente pas. Mais les dépenses liées au covid sont évaluées à 5 milliards d’euros pour 2022, contre 15 milliards d’euros en 2021 : j’espère que tel sera bien le cas dans les faits.
Vous l’avez compris, je ne voterai pas cette motion.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Bien entendu, nous ne voterons pas cette motion tendant à opposer la question préalable.
Cela étant, j’ai écouté Mme Laurence Cohen avec beaucoup d’attention. Cette motion a au moins un mérite : elle permet d’avancer un certain nombre de propositions quant au financement de la sécurité sociale à l’avenir.
Mme Laurence Cohen. Merci !
M. Alain Milon. On peut être d’accord ou non avec ces propositions : c’est un autre sujet.
De son côté, M. le ministre insiste sur les dépenses supplémentaires qu’il a déployées, en particulier pour augmenter la masse salariale dans le cadre du Ségur. Les professionnels de santé ne peuvent que s’en réjouir, en tout cas ceux qui en bénéficient. Mais comment ces hausses de salaire sont-elles obtenues ? Elles ne résultent pas d’une augmentation du budget de la sécurité sociale. Elles sont financées par l’emprunt, donc par le déficit.
Or, comme l’a dit Mme la rapporteure générale, ces déficits vont se cumuler budget après budget et, d’ici quelques années, ils atteindront le niveau affolant de 100 milliards d’euros ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 415, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 23 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 278 |
Pour l’adoption | 15 |
Contre | 263 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Discussion générale (suite)
M. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe. (Mme la rapporteure générale applaudit.)
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Madame la rapporteure générale, chère Élisabeth Doineau, après sept années passées comme rapporteur général de la commission des affaires sociales, je mesure pleinement la charge qui vous revient. Nous savons tous ici pouvoir compter sur vos compétences et sur la sagesse de vos analyses pour éclairer notre assemblée et convaincre, je l’espère, le Gouvernement de l’intérêt des mesures que nous adopterons.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, force est de le constater : par le passé, la voix sénatoriale, qui est souvent celle de la sagesse, n’a pas toujours été entendue par l’exécutif. Je pense notamment à un sujet majeur, la non-compensation des exonérations et suppressions de cotisations, décidée au mépris de la loi Veil de 1994 et à rebours des dispositions organiques. Leur nouvelle version, qui reste à venir, donnera – je l’espère – aux alertes de notre assemblée toute l’audience nécessaire.
De la même manière, je forme le vœu que nous ne soyons plus les témoins à l’avenir de ces nombreux tours de passe-passe financiers peu orthodoxes. Je pense en particulier à la transformation de la Cades en caisse d’investissement pour les hôpitaux.
Si nous saluons les 6,5 milliards d’euros débloqués pour l’hôpital, je constate qu’au rythme actuel des déficits le plafond des transferts à la Cades autorisé par le Parlement en 2020 risque d’être rapidement atteint. Mme la rapporteure générale vous l’a d’ailleurs déjà rappelé.
J’en viens maintenant au texte lui-même.
Ministres ou rapporteurs, chacun est dans son rôle. Pour les uns, le verre est à moitié plein ; pour les autres, il est à moitié vide. Pour ma part, j’estime que nous sommes face à un budget de transition, qui comporte des avancées certaines, mais aussi beaucoup d’incertitudes, spécialement pour ce qui concerne la trajectoire de retour à l’équilibre.
En d’autres termes, le présent texte donne-t-il un cap ? Oui, si l’on considère les efforts consentis pour les revalorisations des salaires des soignants dans de nombreux secteurs ; pour l’amélioration des droits sociaux des travailleurs indépendants et pour le développement de la téléconsultation ; pour le versement immédiat des aides sociales et fiscales aux services à la personne et, plus généralement, la mise en place progressive du modèle domiciliaire pour les personnes dépendantes, notamment avec l’augmentation tarifaire minimale et la transformation des Ehpad en centres de ressources.
J’arrête ici l’énumération des motifs de satisfaction, qui pourrait être beaucoup plus longue.
Cher Philippe Mouiller, je relève toutefois que, malgré le déficit qu’elle présente encore cette année, la cinquième branche bénéficiera de moyens accrus. (M. Philippe Mouiller acquiesce.) Ses crédits augmenteront de 6,1 %, soit quelque 34 milliards d’euros de dépenses de fonctionnement et 2,5 milliards d’euros fléchés vers l’investissement, auxquels s’ajoutent 2,5 milliards d’euros de CSG prévus pour 2024. À mon sens, nous sommes sur la bonne trajectoire, celle donnée par les rapports Libault et El Khomri.
Messieurs les ministres, nous regrettons néanmoins l’absence du texte de loi, tant attendu, dédié à l’autonomie et au grand âge. Mme la rapporteure générale l’a souligné : le Gouvernement reste particulièrement flou quant à la gouvernance de cette cinquième branche, dont les enjeux sont non seulement financiers, mais aussi humains.
La proximité qu’apportent les départements nous paraît vitale pour permettre aux personnes en perte d’autonomie de vivre à domicile le plus longtemps possible.
Une question plus vaste encore nous taraude : celle du retour à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale.
Avec le covid et le rattrapage salarial, le « trou de la sécu » se creuse à nouveau. Il nous appartient de remédier à cette situation, par souci de responsabilité à l’égard des assurés et des Français dans leur ensemble. Pourtant, aucune trajectoire n’est fléchée dans ce PLFSS, alors même que la prévision du déficit de l’assurance maladie est de 19,7 milliards d’euros et la prévision du déficit de la branche vieillesse de 3,6 milliards d’euros.
On le voit bien, les économies portent en priorité sur l’assurance maladie. Dès lors, permettez-nous d’émettre quelques réflexions et de vous interroger à ce titre.
Avant de penser aux économies, penchons-nous sur le chapitre des recettes. Je tiens à vous rappeler que, depuis 2019, la non-compensation de certaines exonérations a coûté 4,9 milliards d’euros à la sécurité sociale.
De plus, dans son rapport de 2020, la Cour des comptes évalue les impayés ou fraudes aux cotisations entre 6 et 8 milliards d’euros. Espérons d’ailleurs que les reports temporaires liés au covid seront honorés en 2022 et qu’ils ne creuseront pas plus le déficit.
Attardons-nous un instant sur les fraudes. Je regrette qu’un seul et unique article reprenne les mesures de la proposition de loi votée au Sénat en 2020 et que les trois principales caisses ne livrent leurs estimations de la fraude qu’après l’examen du PLFSS.
Réjouissons-nous quand même : nous aurons enfin des chiffres à opposer aux fantasmes de certains, qui nourrissent les programmes de l’extrême droite. Nous espérons également que ces données renforcent rapidement la lutte contre la fraude, qu’elle soit organisée ou non.
En matière d’économies, évoquons aussi la pertinence des soins, dont vous nous dites qu’elle monte en puissance. Je note bien quelques mesures ou intentions ponctuelles, mais je constate surtout l’absence de vision stratégique, que je signalais déjà dans le rapport de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss) en 2017.
Monsieur le ministre de la santé, face à cet enjeu majeur – rappelons que 20 % à 30 % des actes sont inutiles ou redondants –, les réponses sont trop timides. Le dossier médical partagé (DMP) et, désormais, l’espace numérique de santé, qui sera proposé à tous les assurés en 2022, constituent des avancées, à condition que tous les acteurs s’en saisissent.
Je regrette par ailleurs que la prévention ne fasse pas l’objet d’un plan pluriannuel. La nutrition, l’éducation à la santé et le sport santé sont des voies d’avenir peu financées par la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM).
Qu’en est-il de la branche vieillesse ? Cette année, les pensions seront indexées sur l’inflation, sans abattement. Mais la question qui se pose, à terme, c’est celle de l’équilibre. Elle n’est pas à l’ordre du jour, répond le Gouvernement, après consultation des partenaires sociaux. J’approuve tout à fait ce point de vue, qui n’empêche pas pour autant de réfléchir au retour à l’équilibre de ce régime à moyen terme.
Le rapport Tirole-Blanchard, relatif aux finances publiques, mérite en ce sens toute notre attention. Plutôt qu’un âge de départ à 64, 65 ou 67 ans, il retient une « fenêtre de départ » dépendant de l’entrée dans la carrière professionnelle et de la durée de cotisation.
La dernière étude du Conseil d’orientation des retraites (COR) y fait écho, en notant l’aspect redistributif du système actuel. Rappelons que l’âge réel de départ à la retraite est déjà proche de 63 ans, que la durée de cotisation est de 42,6 ans aujourd’hui et qu’elle sera de 43 ans en 2035, en vertu de la réforme Touraine. D’ailleurs, comme l’a relevé René-Paul Savary, rapporteur pour l’assurance vieillesse, le choix le plus équitable serait sans doute d’accélérer la réforme en question.
J’évoquerai rapidement les cas qui font controverse, à savoir ceux des ophtalmologues, des orthoptistes, des psychologues libéraux et des sages-femmes. Pour ce qui les concerne, les négociations ne semblent pas tout à fait abouties. En somme – passez-moi l’expression –, nous n’y voyons pas très clair. (Sourires.)
Un dernier enjeu, et non des moindres, est l’accès à la permanence des soins.
Le président de la Fédération hospitalière de France l’a rappelé fort justement ce week-end : jusqu’en 2004, les médecins généralistes avaient une obligation de garde. (M. Martin Lévrier opine.) Aujourd’hui, seuls 39 % d’entre eux y participent. Il faut donc revoir l’organisation de la garde par les médecins de ville afin d’éviter la thrombose des urgences hospitalières.
D’une façon plus générale, la crise du covid s’est doublée d’une crise de valeurs dans le monde de la santé, que soulignent d’ailleurs les médecins du centre hospitalier universitaire de Lille, en particulier les professeurs Pruvot et Scherpereel, ainsi que le docteur Goldstein.
La pénibilité accrue des professions, les rythmes parfois insensés et les bouleversements multiples dans l’organisation…
M. le président. Il faut conclure.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. … ont altéré profondément l’attractivité de ces professions.
Monsieur le ministre de la santé, que pensez-vous du diagnostic que font vos collègues ?
M. le président. Merci !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Quels remèdes comptez-vous y apporter pour rendre à ces métiers toute la considération qu’ils méritent ? (Applaudissements au banc des commissions. – M. Alain Richard applaudit également.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir respecter votre temps de parole.
La parole est à M. Bernard Fialaire.
M. Bernard Fialaire. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, personne ne peut ignorer le contexte exceptionnel dans lequel s’inscrit ce projet de loi de financement de la sécurité sociale : non seulement nous nous trouvons dans une situation sanitaire et économique on ne peut plus particulière, mais nous sommes aussi à moins de six mois de l’élection présidentielle.
La première leçon que nous retiendrons du covid, c’est la place de la santé dans la hiérarchie des valeurs de notre société.
Alors que nous glissions sur la pente de plus en plus financiarisée d’une société high-tech et numérique, nous avons brutalement pris conscience que la santé – la vie, tout simplement – était bien l’essentiel. Sans elle, il n’y a plus de société, les robots ne nous ayant pas encore tous remplacés et éliminés de la planète.
Cette réaction pour notre survie, quoi qu’elle en coûte, a été globalement partagée par nos concitoyens, même si les modalités de protection collective ont pu être débattues et sont encore discutées : la prolongation du passe sanitaire en atteste.
Je tiens à saluer les décisions mesurées et courageuses qui ont été prises, grâce auxquelles la France traverse ces épreuves avec pragmatisme et pertinence.
Je pense au maintien de la présence en milieu scolaire comme à l’exceptionnel soutien à notre économie, qui permet, aujourd’hui, un premier redressement de la trajectoire des comptes sociaux que nous avons à examiner.
Dans un contexte de précampagne présidentielle, où les propositions d’extrême rigueur des uns le disputent à la plus grande démagogie des autres, je salue le double signal que constituent le redressement de la trajectoire des comptes et l’effort de dépenses raisonnable pour la santé.
Il nous revient de veiller au financement des prestations d’aujourd’hui, afin qu’elles ne pèsent pas de manière déraisonnable sur les générations futures.
Le régime général était redevenu excédentaire en 2018. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 prévoyait même un quasi-retour à l’équilibre du régime général et du fonds de solidarité vieillesse d’ici à 2023.
La crise est venue durablement bouleverser ces prévisions, avec un effort de près de 35 milliards d’euros en 2020 et un déficit attendu de 15 milliards d’euros à l’horizon 2024-2025.
Nous le savons tous : les dépenses de santé, dans toute l’acception du terme – bien-être physique, psychique et social –, continueront de croître, parce que nous vivons de plus en plus longtemps et que nombre de soins accompagnent cette augmentation de l’espérance de vie. La prévention et les bonnes règles d’hygiène de vie ne sont ni suffisantes ni suffisamment partagées.
De surcroît, les soins auxquels nous pouvons avoir accès sont de plus en plus sophistiqués et onéreux. Les progrès de la médecine, auxquels nous aspirons tous, ont un coût. Ils impliquent des thérapies chères.
Nous nous réjouissons de l’effort de 1 milliard d’euros d’investissements supplémentaires pour l’industrie pharmaceutique. Ces crédits doivent également permettre des relocalisations et une sécurisation de l’approvisionnement. Néanmoins, cet effort ne saurait nous exonérer d’une extrême vigilance quant à l’évolution des comptes sociaux.
La maîtrise de ces dépenses passe autant par la place effective que doivent retrouver les élus dans les décisions de proximité que par nos amendements au PLFSS.
Les élus ont été exclus des prises de décision. Ils sont cantonnés dans un rôle de bienveillante surveillance. Les pleins pouvoirs ont été donnés à l’administration hospitalière et de santé.
À chaque étage – région, département, ville, territoire de santé, établissements de soins –, les économies seront dégagées grâce à la vigilance des élus de terrain. Ces derniers représentent tous les citoyens, et pas seulement les associations d’usagers particuliers.
Enfin, puisque les déficits de l’assurance vieillesse sont déjà prévus pour plusieurs années – 2,5 milliards d’euros en 2022, 4,2 en 2023, 5,8 en 2024 et 7,6 en 2025 –, les déficits cumulés annoncés s’élevant à 97 milliards d’euros en 2022, contre 113 en 2023, 127,9 en 2024 et 143,2 en 2025, il faudra bien s’interroger sur le financement.
Pouvons-nous continuer de financer la solidarité nationale grâce aux seules recettes définies il y a trois quarts de siècle par le Conseil national de la Résistance (CNR), même avec l’apport de la CSG ?
Au total, 74 % des ressources de la sécurité sociale proviennent des revenus d’activité, au moment même où l’on nous annonce des revenus financiers atteignant des niveaux inégalés : les récents records du CAC 40 en attestent.
Si l’on veut diminuer les charges des entreprises, réduisons les prélèvements sociaux afin d’alléger le coût du travail et d’augmenter, en même temps, les revenus de ceux qui fournissent ce travail.
Le Gouvernement l’a fait en 2018, en décidant une baisse des cotisations sociales supérieure à la hausse de la CSG. Cette mesure a permis une progression du pouvoir d’achat des actifs.
En 2018 et 2019, la transformation du CICE en une réduction de six points de cotisations maladie suivait la même logique.
Tout ce qui a pour effet de réduire les prélèvements sociaux sur le travail et de les remplacer par des ressources prélevées dans les domaines où l’activité est florissante va dans le bon sens.
Ainsi, pourquoi le taux de CSG appliqué aux produits des jeux est-il de 6,2 %, bien en deçà de celui qui affecte les revenus d’activité, à savoir 9,2 % ?
De même, le taux de CSG sur les revenus d’activité est égal au taux applicable aux revenus du patrimoine et aux produits de placement : un allégement des prélèvements sur les revenus d’activité permettrait une meilleure reconnaissance du travail. Il aurait, à ce titre, un effet incitatif.
Aujourd’hui, pour un revenu disponible donné, un actif de 45 à 50 ans paiera beaucoup plus qu’un retraité de 70 ans. Est-ce bel et bien justifié en matière de santé ? Les retraités ont souvent acquis leur propriété, alors que de nombreux actifs sont encore en voie d’accession et apportent toujours un soutien financier à leurs enfants, étudiants pour certains. Tout en épargnant les petites retraites, bien sûr, il ne serait pas injuste de demander un effort aux premiers bénéficiaires.
Parallèlement, le ticket modérateur, qui ne modère pas les complémentaires, doit être repensé au terme d’une réflexion approfondie sur la « grande sécu » et la place des mutuelles.
Ces réflexions structurelles doivent être poursuivies. Cela étant dit, ce PLFSS contient un certain nombre d’avancées concrètes.
Le présent texte rend notamment immédiate la perception des aides applicables au secteur des services à la personne, lequel va nécessairement croître dans les années à venir, avec l’allongement de l’espérance de vie.
Il est aussi prévu d’assouplir les régimes de déclaration pour les travailleurs indépendants : il s’agit là d’une mesure bienvenue pour ces professionnels, frappés de plein fouet par la crise sanitaire.
On le sait : ce texte vient mettre en œuvre les avancées, attendues et nécessaires, du Ségur de la santé. Ainsi, 9 milliards d’euros sont dédiés à la revalorisation des rémunérations des personnels soignants et non soignants des hôpitaux ainsi que des établissements médico-sociaux, à la suite de la mission Laforcade.
Je salue également la prise en charge dans le droit commun de la télésurveillance par l’assurance maladie, tout comme la poursuite de l’évolution, engagée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, au regard des médicaments faisant l’objet d’autorisations temporaires d’utilisation (ATU) et des dispositifs médicaux numériques.
Ce PLFSS prévoit encore d’attribuer systématiquement la complémentaire santé solidaire aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) et d’en faciliter l’accès pour les bénéficiaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA). Les élus du RDSE défendront d’ailleurs un amendement visant à étendre la facilitation de cet accès aux bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH).
Le présent texte instaure également un tarif plancher national de 22 euros de l’heure pour les services à domicile et étend les missions des Ehpad à une offre d’accompagnement à domicile des personnes en perte d’autonomie.
Le travail parlementaire a besoin d’informations claires et précises. En ce sens, la nouvelle loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale, votée chaque printemps, sera tout à fait opportune. Elle constituera une évaluation de l’exécution en amont des discussions budgétaires de l’automne.
De même, si la date de dépôt du PLFSS était avancée au 1er octobre, nous disposerions d’un délai supplémentaire bénéfique à la qualité des débats.
Mes chers collègues, l’examen du financement de la sécurité sociale est éminemment technique : il ne doit pas être partisan. Nos seuls objectifs doivent être l’amélioration de l’accès aux soins et l’assainissement des comptes publics.
C’est dans cet état d’esprit que les élus du groupe RDSE prendront part aux discussions de cette semaine ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Bernard Jomier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, que retiendrons-nous du budget de la sécurité sociale que nous proposent le Gouvernement et sa majorité ?
Tout d’abord, j’évoquerai les conditions d’examen de ce PLFSS. À l’évidence, le cadrage incertain et mouvant des lois de financement de la sécurité sociale conduit le Gouvernement lui-même à charger ce texte de dispositifs dont le lien avec le PLFSS manque d’évidence. Nous, parlementaires, devons en conséquence multiplier les demandes de rapports et les propositions d’expérimentation pour que les problèmes soient enfin débattus.
Ensuite, sur le fond, nous sommes assurément face à un budget de fin de quinquennat, sans grande nouveauté – cela a été dit. J’ajoute qu’il s’agit d’un budget d’esquive : esquive face à l’autonomie et à la dépendance ; esquive face aux retraites ; esquive face à l’organisation du système de santé ; et, pour couronner le tout, esquive sur la question fiscale. C’est par là que je commencerai.
Le Gouvernement nous promet une sécurité sociale structurellement déficitaire, aussi loin que courent ses tableaux prévisionnels.
Or, maintenir la sécurité sociale en déficit sans perspective, c’est envoyer à la Nation un message politique : celui d’une protection sociale qui serait trop onéreuse, au-dessus de nos moyens. C’est aussi adresser à celles et ceux qui travaillent dans les domaines de la santé et du médico-social le message que ces activités pèsent sur le pays, alors même qu’elles en sont l’une des principales richesses, qu’elles constituent un bien précieux : celui de la solidarité nationale.
Ce fut l’honneur de la gauche d’avoir presque rétabli les comptes sociaux, même si ce fut une erreur de n’avoir pas préservé nos hôpitaux de cet effort.
Ce rétablissement des comptes constituera donc un point d’accord avec Mme la rapporteure générale. Nous devons redonner une perspective d’équilibre à notre budget social. Toutefois, pour y parvenir, il est nécessaire d’ouvrir aussi le débat sur les recettes – certes, par la compensation des détournements de l’État, mais également par la création de nouvelles recettes, en particulier sur les plus favorisés.
Nous porterons ce débat lors de nos travaux.
Nous n’esquiverons pas non plus le débat sur l’autonomie. En approuvant la création de la cinquième branche, nous avons – peut-être par excès de respect pour la parole du Gouvernement – accepté que le cadre en soit posé ultérieurement, lors de l’étude d’un projet de loi sur l’autonomie et la dépendance.
Las, la parole n’a pas été tenue. Le Gouvernement sature l’agenda du Parlement de textes opportunistes et souvent bâclés et refuse d’affronter ce qui est, de fait, la grande question irrésolue de notre protection sociale.
Vous faites naître la cinquième branche également en déficit – déficit de cadrage, de vision, de dispositifs, et déficit financier. Ma collègue Michelle Meunier y reviendra.
Les retraites sont la seconde esquive de ce budget. La grande réforme systémique s’est perdue dans un agenda plus que jamais livré aux derniers calculs du Président, tandis qu’est lancé le grand concours de la surenchère du report de l’âge légal.
L’esquive consiste ici à ne pas dire aux Français que l’on projette d’ajouter encore des conditions nouvelles à l’obtention d’une pension complète, alors même qu’ils sont de plus en plus nombreux à ne plus être en activité à l’heure du départ, et que la dégradation des conditions de travail rend cette perspective socialement injuste et souvent physiquement irréaliste dans de nombreux secteurs.
Enfin, notre système de santé est l’objet de la troisième esquive. Vous connaissez évidemment, monsieur le ministre des solidarités et de la santé, la gravité de la situation de notre système de soins. Vous savez, bien sûr, que nos hôpitaux publics sont en voie d’affaissement – d’effondrement, même, selon certains.
Pourtant, ce budget, qui devrait être le premier à apporter des réponses structurelles après la crise de la covid-19, est singulièrement avare d’enseignements de la pandémie.
Il fait suite à une loi printanière bien faible et à une loi de décentralisation – dont on ne sait si elle verra le jour avant la fin du quinquennat – du même acabit en matière de santé.
Vous ne pouvez pas, monsieur le Premier ministre – pardon, j’anticipe… (Sourires.)
M. Bernard Jomier. Vous ne pouvez pas, monsieur le ministre, continuer à arguer des revalorisations – certes bienvenues – du Ségur de la santé pour affirmer que vos décisions sont à la hauteur de la crise hospitalière.
Chaque jour apporte un démenti par les départs de soignants, par les fermetures de lits, et par la reprise, dès le sortir de la première vague, d’une logique administrative qui étouffe les soignants et dégrade l’attractivité des métiers de l’hôpital.
Un hôpital n’est ni une administration ni une entreprise. Épuisés par ces deux logiques, ce sont les soignants qui s’en vont.
Pour ce qui est des soins de ville, après avoir reporté par voie législative – erreur sur laquelle nous vous avions alerté – les négociations conventionnelles à l’après-présidentielle, vous voulez brutalement modifier à coups d’amendements les rapports entre les professions de santé.
Que des évolutions soient nécessaires, nous vous l’accordons. Cependant, elles doivent être effectuées dans le respect des temps : d’abord, le temps des discussions dans le cadre des conventions, puis l’intervention de l’exécutif et du Parlement si les intérêts et les besoins de la population sont insuffisamment respectés.
Or vous faites tout le contraire : après avoir écarté la négociation conventionnelle, vous écartez les syndicats professionnels et vous imposez des décisions qui braquent les uns ou les autres, et qui produisent, je vous en avertis, un malaise qui finira par se muer en des renoncements professionnels.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, la crise sanitaire a modifié les perceptions sur la santé, en l’inscrivant à l’agenda politique comme une priorité. Nos ambitions et nos décisions dans ce domaine doivent se placer à la mesure de cette nouvelle donne.
Il nous faut partir des besoins des territoires, et ensuite – ensuite seulement – procéder aux arbitrages budgétaires qui demeurent, bien sûr, indispensables.
L’outil de régulation que constitue l’Ondam montre en ce sens ses limites. La maîtrise qu’il porte s’impose avant toute délibération sur les besoins en matière de santé, dans nos territoires comme au Parlement où aucun débat sur les besoins sociaux de la Nation n’a lieu en amont de la délibération budgétaire.
Nous pensons qu’il est temps de changer de paradigme sur cette question. L’Ondam est l’outil dépassé d’une époque passée.
Vous l’avez compris, nous ne pouvons nous satisfaire de ce PLFSS. Le Parlement doit être à même de mieux déterminer les besoins de la Nation en matière de santé, dans un cadre démocratique.
Ne passons pas à côté de cette tâche, à un moment où les acteurs de santé, les élus locaux et nos concitoyens demandent à être associés à ces choix fondamentaux pour notre collectivité nationale.
La sécurité sociale a su tenir la société au moment de la crise, et nous avons été reconnaissants de bénéficier d’un tel système. Nous avons trouvé un consensus dans nos rangs sur l’aspect essentiel de l’ensemble des métiers et des dispositifs qui nous ont permis de faire face à l’épidémie.
Nous devons maintenant mettre en œuvre les réformes nécessaires pour que notre sécurité sociale assure à l’avenir l’ensemble des missions de protection sociale dont notre démocratie peut être fière. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Xavier Iacovelli. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous le savons, l’examen du budget de la sécurité sociale pour l’année à venir constitue toujours un exercice particulier, au regard des nombreux enjeux qu’il recouvre et de son importance pour le quotidien des Français.
Il l’est d’autant plus cette année.
Il l’est au regard du calendrier politique dans lequel il s’inscrit, puisqu’il s’agit du dernier PLFSS du quinquennat.
Il l’est également de par le contexte sanitaire inédit. La pandémie qui a frappé le monde, qui nous a frappés, a exigé des réponses fortes et immédiates de la part du Gouvernement, afin de protéger les Français.
Il l’est, enfin, car il comporte, au-delà des réponses nécessaires à la crise sanitaire, de belles avancées pour notre pays qui permettront d’améliorer réellement le quotidien des Français.
Ce budget de la sécurité sociale confirme, en premier lieu, les engagements du Ségur de la santé en matière de revalorisations salariales, d’une ampleur inédite pour l’ensemble des secteurs.
Ainsi, 2,7 milliards d’euros de dépenses supplémentaires sont prévus en 2022, portant le total des revalorisations à plus de 10 milliards d’euros.
Ce budget comprend également des mesures nouvelles au profit des salaires les moins élevés des praticiens hospitaliers ou encore des sages-femmes, dont le rôle au sein de notre système de santé est essentiel.
Il confirme donc, comme je viens de le rappeler, les engagements pris, mais il consacre également de nouveaux droits pour répondre aux besoins des Français.
Je pense à la possibilité de se faire prescrire des lunettes chez un orthoptiste – alors que nous savons que le délai moyen d’attente chez un ophtalmologue s’élève à six mois – et à la généralisation de la télésurveillance visant à renforcer la prise en charge effective des 20 millions de personnes atteintes de maladies chroniques.
Je pense également à l’octroi automatique de la complémentaire santé solidaire aux bénéficiaires du revenu de solidarité active, le RSA, et à la facilitation de son attribution aux bénéficiaires du minimum vieillesse.
Au total, 2,8 millions de Français seront concernés par ce dispositif, dont le caractère protecteur est renforcé par ce budget.
La généralisation du recours à l’intermédiation financière des pensions alimentaires compensera en partie l’injustice dont sont victimes des millions de parents qui assument la charge de leur enfant en ne touchant que partiellement – ou pas du tout dans le pire des cas – leur pension alimentaire.
En aucun cas l’enfant, dont l’intérêt supérieur doit toujours primer, ne doit être la victime collatérale d’une séparation ou d’un divorce.
Je pense, enfin, au remboursement intégral de la contraception pour les 3 millions de femmes de moins de 26 ans. Il s’agit d’une mesure forte, d’autant que plusieurs études montrent que l’achat de moyens de contraception est davantage effectué par les femmes.
Une réflexion devra d’ailleurs être engagée sur les disparités qui subsistent entre les femmes et les hommes en matière de connaissance des dispositifs existants, et sur la nécessité de mieux responsabiliser les hommes sur la contraception afin de parvenir à une réelle égalité en la matière.
La cinquième branche dédiée à l’autonomie – cette même branche promise par beaucoup, sans résultat, depuis des années – a bel et bien été créée par ce gouvernement. Or elle se trouve au cœur de ce budget pour 2022. En effet, les engagements nouveaux apportés depuis sa création s’élèvent désormais à 3,5 milliards d’euros, dont 2,8 milliards d’euros de revalorisations salariales, 250 millions d’euros pour les services à domicile, 70 millions d’euros pour la médicalisation et la modernisation des Ehpad et 450 millions d’euros pour l’investissement.
Il s’agit donc d’un budget considérable, à la hauteur des enjeux auxquels cette branche devra faire face.
Nous savons combien la perte d’autonomie d’un parent ou d’un grand-parent peut être source d’inquiétude pour la famille et implique des aménagements importants pour subvenir à ses besoins.
Il nous faut donc renforcer la qualité de l’offre à domicile tout en poursuivant nos investissements à destination des Ehpad et de leur modernisation.
L’article 30 du PLFSS, relatif à la réforme et à la revalorisation de l’offre de services à domicile en matière d’autonomie, répondra à cet objectif en faisant évoluer les services de soins infirmiers à domicile afin de prendre davantage en compte les besoins en soins des personnes par rapport à leur degré d’autonomie.
La nouvelle mission de centre de ressources territorial pour les Ehpad, créée à l’article 31 de ce PLFSS, apportera un appui aux professionnels du territoire, via notamment la mise à disposition d’expertise gériatrique, ainsi qu’un accompagnement renforcé pour les personnes âgées en perte d’autonomie nécessitant un accompagnement à domicile intensif.
Enfin, nous nous félicitons des apports de l’Assemblée nationale visant à renforcer le congé du proche aidant, en élargissant le champ du bénéficiaire de l’allocation journalière du proche aidant (AJPA) aux proches aidants de personnes dont le handicap ou la perte d’autonomie peuvent nécessiter une aide régulière.
La revalorisation au niveau du SMIC du montant de l’allocation journalière était attendue, et légitime au vu de l’engagement de ces personnes.
En tout état de cause, le groupe RDPI salue et soutient pleinement les orientations de ce budget.
Il s’agit d’un budget à la hauteur des attentes, qui consacre de belles avancées sociales à destination de tous les Français – en particulier de ceux qui en ont le plus besoin : nos aînés, les personnes en situation de handicap, ainsi que celles et ceux qui leur viennent en aide au quotidien.
Ce budget est également à la hauteur des enjeux auxquels notre pays fait face. Je pense en particulier au secteur hospitalier, aux femmes et aux hommes dont la pandémie mondiale a révélé une fois de plus le rôle central, crucial pour notre pays et nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous examinons le dernier PLFSS du quinquennat.
Ce texte, qui entérine à la fois les effets à long terme de la crise sanitaire sur les comptes sociaux et le souhait de nous tourner vers l’avenir, est susceptible de renforcer l’accès à la santé pour l’ensemble des Français.
Les comptes sociaux absorbent l’onde de choc provoquée par la crise sanitaire, au moyen d’un déficit global fixé à 22,6 milliards d’euros en 2022 – contre 35 milliards d’euros en 2021.
Ce déficit est essentiellement supporté par la branche maladie, victime d’un effet de ciseau entre la contraction des recettes et la hausse des dépenses liées aux mesures du Ségur de la santé et à l’amortissement des effets de la crise. La lutte contre l’épidémie devrait coûter près de 5 milliards d’euros en 2022, contre 15 milliards d’euros cette année.
Le déficit est moins marqué que prévu grâce à un climat économique favorable et à des perspectives de croissance du PIB supérieures à 6 % en 2021, et estimées à 4 % en 2022.
Ces hypothèses se fondent sur une amélioration durable de la situation sanitaire, appuyée sur la poursuite de la campagne vaccinale, une vigilance renouvelée en matière de prévention des contaminations et un suivi actif de l’évolution des formes du virus.
Si 88 % de la population majeure est désormais vaccinée – c’est un succès –, la pandémie n’est pas encore vaincue. Elle regagne du terrain en France comme dans le monde et nous devons rester pleinement mobilisés pour y faire face.
Nous débattrons de plusieurs questions importantes allant de l’organisation de notre système de soins à la réforme des retraites – sans oublier la question du grand âge, essentielle à mes yeux.
J’aimerais, pour commencer, saluer les avancées apportées par le texte pour renforcer l’accès aux soins et aux droits sociaux.
Les revalorisations salariales des soignants et du secteur médico-social se poursuivent, en accord avec les conclusions du Ségur de la santé. À ce sujet, il serait souhaitable, monsieur le ministre, de renforcer la lisibilité des mesures de revalorisation successives adoptées afin de mieux identifier les catégories de personnels qui ne bénéficient pas encore du complément de traitement indiciaire de 183 euros net par mois. Ces « oubliés du Ségur » subissent de graves difficultés financières doublées d’une pénurie de personnel dans leurs établissements, alors qu’ils sont pleinement mobilisés pour soigner et accompagner les personnes les plus vulnérables. J’espère que cette situation prendra fin prochainement.
L’accès aux soins visuels sera facilité, grâce à la mobilisation des orthoptistes qui voient leurs compétences élargies à l’article 40. En effet, la filière ophtalmologiste souffre d’une répartition inégale des professionnels sur le territoire et d’un fort cloisonnement, justifiant un élargissement progressif, depuis 2016, du pouvoir de prescription des orthoptistes.
Je suis favorable à cette tendance, tout en estimant nécessaire de préserver le lien entre patients et médecins ophtalmologues pour certains contrôles oculaires.
Je suis également favorable à la gratuité de la contraception pour les femmes de moins de 26 ans, mais suggère de l’étendre aux hommes de la même tranche d’âge.
Le remboursement des préservatifs masculins permettrait de prévenir les risques de transmission des infections sexuellement transmissibles (IST) et de grossesses non désirées. Les services de dépistage relevant une recrudescence de ces pathologies chez les jeunes, nous devons renforcer notre politique de dépistage de toutes les IST, et non du seul VIH.
L’article 49 prévoit de généraliser le dispositif d’intermédiation financière pour faciliter le versement des pensions alimentaires, sachant que le taux d’impayé se situe autour de 30 %. Il s’agit d’une évolution majeure pour lutter contre la pauvreté des familles monoparentales, souvent constituées de mères célibataires.
Nous devons en outre réfléchir, comme l’a dit M. le rapporteur, à la baisse de la natalité continue qui s’observe depuis 2006.
Le développement de la télésurveillance, la revalorisation des indemnités du congé de proche aidant et du congé de présence parentale ainsi que l’accès facilité aux médicaments innovants sont également des mesures bienvenues.
La retraite à mille euros pour les exploitants, la suppression de la surcotisation sur la prime de feu des sapeurs-pompiers et la délivrance de substituts nicotiniques par le pharmacien constituent aussi des avancées.
Le Gouvernement s’est engagé à présenter un amendement pour compléter le dispositif de la proposition de loi présentée par Paul Christophe et adoptée par le Sénat la semaine dernière.
En revanche, nous devons aller plus loin pour lutter contre les déserts médicaux, en particulier pour renforcer l’accès aux soins psychiatriques et aux médecins généralistes. Je présenterai des amendements visant à instaurer un conventionnement sélectif dans les zones surdotées.
Je regrette que les amendements que j’avais déposés tendant à obliger les jeunes médecins généralistes à exercer dans les déserts médicaux durant leur première année aient été jugés irrecevables, car cette situation ne cesse de s’aggraver.
Concernant le financement de la cinquième branche de l’assurance maladie, je dois dire que, malheureusement, à nos yeux, le compte n’y est pas.
Au total, 400 millions d’euros sont dédiés au grand âge, dont 200 millions d’euros pour des créations d’emploi – soit 0,5 emploi par Ehpad –, alors qu’il faudrait consacrer 2 milliards d’euros en deux ou trois ans au seul renforcement des effectifs de soignants, soit cinq soignants supplémentaires en moyenne par Ehpad.
Nous passerions ainsi à un encadrement de 0,6 à 0,7 équivalent temps plein (ETP) par pensionnaire. Cette mesure est demandée depuis des années par les directeurs, le personnel et les familles.
Si nous pouvons comprendre l’étalement dans le temps de ces créations d’emploi en raison de la crise sanitaire, nous ne pouvons pas comprendre le renoncement au renforcement des effectifs en Ehpad, indispensable à une prise en charge décente de nos aînés et pour que les soignants ne posent pas de changes à la course.
Les quelques mesures présentées ne sauraient constituer une réforme digne de ce nom. Les Ehpad doivent se concentrer sur la prise en charge des plus hauts degrés de dépendance.
Déjà, en 2007, le rapport du ministre Philippe Bas, dont le contenu est proche de celui du rapport Libault, préconisait d’atteindre dans les cinq ans un taux d’encadrement d’un soignant par pensionnaire, lorsque le GIR (groupe iso-ressources) moyen pondéré (GMP) avoisinerait les 800 points.
Le GMP s’élève désormais à 750 points en moyenne, quand le taux d’encadrement n’est que de 0,6 soignant par pensionnaire.
Notre politique du grand âge doit changer d’échelle si nous voulons préparer correctement l’avenir des seniors, d’autant que 2,5 millions de personnes seront en perte d’autonomie en 2050, soit deux fois plus qu’en 2015.
Je suis favorable à l’ouverture des Ehpad vers l’extérieur, que vous proposez à l’article 31, à condition qu’un complément soit apporté aux Ssiad et aux SAAD. Je présenterai d’ailleurs un amendement ayant pour objet l’ouverture vers l’extérieur des pôles d’activités et de soins adaptés (PASA). Dans les territoires ne comportant pas d’équipes spécialisées Alzheimer à domicile (ESAD), les personnes externes souffrant de troubles cognitifs pourraient ainsi, sur présentation d’un certificat médical, être incluses aux PASA des Ehpad sans frais supplémentaires.
L’amélioration du maintien à domicile amorcée doit être poursuivie. Tel est le souhait de 90 % de nos concitoyens.
La population française est vieillissante. Cette réalité implique un véritable questionnement sur le système de retraite. Si nous ne voulons pas pénaliser les retraités par une baisse du montant des retraites ni le niveau de vie des actifs par une augmentation des cotisations, le report de l’âge légal de départ à la retraite pourrait, sauf pour les métiers pénibles, constituer une solution – moyennant la recherche d’un accord avec les partenaires sociaux.
La commission propose cette année de fixer l’âge de la retraite à 64 ans. En complément de cette mesure paramétrique, nous devons favoriser la durabilité de l’emploi des seniors par l’action de trois leviers : la prévention, la formation continue et la transmission des compétences par le tutorat et le mentorat – autant d’enjeux clés pour la compétitivité de notre économie.
Monsieur le ministre, si nous saluons l’augmentation des salaires des soignants – qui doit être équitable pour tous les intervenants – et les avancées apportées par le texte, nous déplorons l’absence de proposition d’une trajectoire financière pour une prise en charge décente de nos aînés, à domicile comme en établissement. (M. Olivier Véran, ministre, manifeste sa désapprobation.)
M. le président. La parole est à Mme Chantal Deseyne. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Chantal Deseyne. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous examinons le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale du quinquennat. Malheureusement, ce projet de loi ne répond pas à la situation.
Je souhaiterais tout d’abord rappeler quelques chiffres.
Évalué à 34 milliards d’euros, le déficit de la sécurité sociale s’élève à un niveau jamais atteint auparavant, tandis que la dette sociale culmine, quant à elle, à 166 milliards d’euros.
Bien sûr, les comptes sociaux sont encore très marqués par la crise sanitaire, mais dans ce dernier PLFSS vous n’envisagez aucun choix budgétaire, aucune réforme structurelle pour retrouver l’équilibre.
De surcroît, les réformes plus délicates à mettre en œuvre comme la réforme des retraites ou la loi Grand Âge et autonomie sont reportées aux calendes grecques.
Les familles sont les grandes perdantes de ce budget. En matière de politique familiale, les PLFSS se succèdent et se ressemblent. Le détricotage de notre politique familiale continue.
Une fois de plus, la branche famille ne fait l’objet que d’un très petit nombre de mesures dans le PLFSS. Même si nous soutenons l’allongement du congé paternité pour les collaborateurs de professions libérales ou encore l’amélioration du recouvrement des pensions en cas de divorce, force est de constater que ces mesures ne sont pas à la hauteur des enjeux.
Comme l’a clairement rappelé notre collègue Olivier Henno, la politique familiale a besoin d’un sursaut pour mettre fin au déclin de la natalité. Des mesures visant à apporter des réponses plus adaptées aux inquiétudes des familles quant à la conciliation de leurs vies professionnelles et personnelles auraient été bienvenues. L’irrecevabilité financière nous empêche malheureusement de déposer des mesures dans ce sens.
Cette absence est d’autant plus regrettable que la branche famille est excédentaire.
Je rappelle que la bonne situation financière de cette branche s’est faite au prix d’importantes mesures d’économies qui ont affecté directement le budget des familles. Il s’agit de la modulation des allocations familiales, de la suppression du complément de libre choix d’activité majoré, ou encore de la modulation de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant.
Toutes ces réformes ne datent pas de 2017, je vous l’accorde, certaines ayant été introduites bien avant, en 2014. Cependant, votre gouvernement, monsieur le ministre, n’a pas fait le choix de revenir sur ces mesures – bien au contraire, puisque vous avez sous-revalorisé les prestations familiales en 2019.
L’accumulation de toutes ces mesures fait perdre à la branche famille son rôle essentiel de compensation des charges de famille. Pourtant, la politique familiale constitue un investissement pour l’avenir.
Enfin, il n’est pas légitime que les dépenses directement liées à l’épidémie de covid-19 soient assumées par la branche famille, et non par la branche maladie.
La question de l’accès aux soins constitue un autre sujet de déception.
Dans ce projet de loi, vous esquivez le problème des déserts médicaux, qui devrait pourtant constituer une priorité.
Actuellement, 18 % de la population vit dans un territoire qualifié de « zone sous-dense ». Cette raréfaction de l’offre de soins s’observe alors même que les besoins médicaux de la population s’intensifient en raison du vieillissement, de l’augmentation des maladies chroniques et de la croissance de la population.
Monsieur le ministre, vous avez annoncé la fin des déserts médicaux d’ici cinq ans. Je m’étonne donc que ce projet de loi ne comporte aucune mesure financière pour lutter contre ces derniers et soutenir l’installation des médecins dans les zones sous-denses.
Comment sortir de cette situation et offrir un accès aux soins équitable à l’ensemble de la population ? La télémédecine est une réponse limitée qui ne saurait pallier sur le long terme l’absence de médecins dans les déserts médicaux.
La fin du numerus clausus aura sans doute des effets, mais seulement dans une dizaine d’années. Il n’est pas acceptable que, dans notre pays, certains territoires soient totalement dépourvus de professionnels de santé. Les Français qui rencontrent des difficultés d’accès aux soins n’en peuvent plus d’attendre !
Pendant l’examen du PLFSS, nous proposerons des mesures fortes pour combattre les déserts médicaux, notamment la création de zones franches médicales dont le périmètre sera défini par les ARS en concertation avec les élus des collectivités territoriales concernées. Si l’on veut une juste répartition de l’offre de soins sur l’ensemble du territoire national, il est nécessaire d’accompagner les médecins et d’associer les élus.
Le droit à la santé, composante essentielle du pacte républicain, implique l’égal accès de chacun aux soins nécessités par son état de santé et justifie que l’État, garant de l’égalité et de la solidarité, se trouve en première ligne en matière de santé publique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Véronique Guillotin applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le temps du débat du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale du mandat est aussi celui du bilan des cinq années écoulées.
Ce PLFSS comporte plus d’avancées que les précédents,…
Mme Raymonde Poncet Monge. … mais est-il pour autant à la hauteur des enjeux et répare-t-il les logiques « austéritaires » des quatre précédents ?
Nous pouvons répondre à cette question en répondant à d’autres : la solidarité nationale est-elle toujours le socle de notre protection nationale ? Chacun a-t-il été assuré face aux risques ? Tout le monde a-t-il été invité, à la mesure de ses moyens, à participer aux charges ?
Un premier constat s’impose quant aux 38 milliards d’euros exceptionnels que coûtera la covid-19. Quelles ressources exceptionnelles le Gouvernement a-t-il mobilisées via les profits et distributions de dividendes tout aussi exceptionnels des grands groupes ou via une contribution exceptionnelle des revenus des ménages les plus aisés qui ont enregistré des records d’épargne et d’augmentation de leurs patrimoines ? Aucune !
Les dépenses ne pouvant être contestées, le déficit puis la dette – laquelle ne constitue soudainement plus un problème – absorberont l’inélasticité des recettes.
Or une sécurité sociale sans solidarité, est-ce bien toujours le modèle français ?
Quant au Ségur de la santé, rattrapage partiel de longues années de décrochage salarial, il prévoit 10 milliards d’euros supplémentaires – désormais compris dans la base de l’Ondam et donc récurrents – que le retour à un taux de croissance de croisière ne pourra absorber.
Quelles recettes nouvelles le Gouvernement mobilise-t-il pour y faire face ? Aucune ! Comment s’étonner en ce cas de retrouver l’équivalent de cette dépense représentant deux tiers, voire la totalité du déficit structurel des projections financières en 2025 ?
Sans apport de nouvelles recettes, l’effort sur les dépenses, encore et toujours lui, fera son retour – de façon différée, élections obligent –, soit la politique qui a sinistré l’hôpital et mis à mal les collectifs de travail.
Voilà le constat principal qui délégitime l’économie générale de ce budget – comme celle des budgets précédents.
La protection sociale ne peut prospérer, ni même être défendue, quand les inégalités augmentent, quand un clan reste intouchable.
Malgré cela, la sécurité sociale a joué son rôle d’amortisseur social, mais aussi économique, par le recours massif à l’activité partielle qui a permis de préserver une grande partie des emplois et des compétences. Grâce à cela, la relance a été rapide.
La branche maladie et la branche autonomie ont engagé le rattrapage partiel d’années de déflation salariale, mais il reste des oubliés du Ségur et de la mission Laforcade. Les hôpitaux publics chiffrent ainsi à 500 millions d’euros la non-compensation des accords du Ségur.
Hors dépenses liées au covid, l’Ondam des établissements de santé évolue plus favorablement en 2022. Toutefois, le taux de croissance retenu pour l’évolution tendancielle est inférieur aux taux constatés par la CNAM dans son rapport annuel sur la période 2015-2019, à partir des déterminants de la croissance des dépenses médicales. Ces paramètres – en particulier le vieillissement de la population – pèseront davantage encore dans les années à venir.
L’enveloppe globale supposée répondre à l’évolution tendancielle est quasiment inchangée, voire en très légère baisse, ces dernières années. C’est bien l’écart qu’elle présente avec la dynamique réelle qui met les hôpitaux et le système de santé sous tension.
Sous ce mandat, 4 milliards d’euros d’économies ont été exigés de l’hôpital public. Vous semblez découvrir cette fameuse ligne qui reprenait d’une main ce qu’elle donnait de l’autre, contraignant les hôpitaux en crise à générer des gains d’efficience, à la seule fin de vous targuer – avec un certain cynisme – de ne plus l’exiger d’un hôpital exsangue.
La trajectoire de retour à l’équilibre pèsera sur les dépenses, faute de recettes suffisantes. L’offre a été contrainte pour brider la demande, ce qui a aggravé les déserts médicaux, l’endettement de l’hôpital et l’effondrement de ses investissements.
L’explosion des postes vacants dans tous les métiers – des aides-soignantes et infirmiers jusqu’aux médecins praticiens – a dégradé les conditions de travail et enclenché un cercle vicieux d’absentéisme, de démissions et de crise du recrutement.
C’est alors que la crise sanitaire a percuté un système de santé dont vous aviez poursuivi la dégradation.
L’ampleur du nombre de postes vacants entraîne des fermetures temporaires de lits, de 6 % à 10 % au moins, soit un chiffre énorme, car il s’ajoute aux fermetures définitives.
Il faut enfin répondre aux propositions des hospitaliers et revaloriser les gardes et les astreintes de la permanence des soins qu’assure l’hôpital public, si nous voulons vraiment lutter contre le recours aux mercenaires de l’intérim, qui pèse 1 milliard d’euros et creuse les déficits, sans pour autant fermer des services, notamment des services d’urgences.
Il ne suffit pas de supprimer le numerus clausus, il faut un plan ambitieux pour permettre aux facultés de médecine d’accueillir un plus grand nombre d’étudiants.
Par ailleurs, les 13 milliards d’euros dégagés pour désendetter l’hôpital ne doivent avoir qu’une finalité : lui permettre de se moderniser. Il ne s’agit pas de satisfaire aux injonctions de Maastricht et de réduire l’endettement des administrations publiques en bloquant leurs investissements.
La réduction de l’endettement, lequel est dû à l’insuffisance des Ondam, doit améliorer l’autofinancement et le recours à l’emprunt sur des bases saines et pluriannuelles. L’État, enfin, doit tenir son engagement de reverser aux établissements de santé les crédits sous-exécutés.
Il fallait donc un électrochoc. Vous présentez une loi de financement plus satisfaisante que vos budgets précédents, mais, à l’image de ce que vous prévoyez pour la branche autonomie, faute de dégager les ressources nécessaires dans le cadre d’une programmation pluriannuelle ambitieuse, le compte n’y est pas. De plus, la dette sociale conduira, une fois les élections passées, à de nouvelles baisses des dépenses.
S’agissant des autres branches, la grande loi sociale du quinquennat, rebaptisée « Générations solidaires » à défaut d’être née, a été promise chaque année. Elle restera pourtant le rendez-vous social manqué du Gouvernement, lequel a préféré saturer le travail parlementaire de lois sécuritaires plutôt que de répondre à l’enjeu de la transition démographique à l’horizon de 2030. Dans cette transition aussi, la France prend du retard !
Si le projet de loi comprend des mesures positives, qui témoignent du virage domiciliaire, celles-ci n’emportent pas d’effets structurants, faute de trouver place et cohérence dans une loi systémique.
Le tarif national plancher est l’une de ces mesures emblématiques. L’État vient financer, à concurrence de ce plafond, les écarts des tarifs de référence départementaux. Il réduit ainsi les inégalités territoriales, ce qui va dans le bon sens, même si son aide sera d’autant plus importante que le département pratiquait un tarif bas, instaurant ainsi une sorte de prime paradoxale.
Mme Raymonde Poncet Monge. Malgré cette aide, les contributions de l’État et des collectivités territoriales se dégradent, en raison de la revalorisation seulement partielle des salaires. Surtout, le tarif plancher non indexé demeure bien inférieur au tarif d’équilibre retenu il y a deux ans dans le rapport Libault. À défaut d’un changement radical de modèle économique, il installe durablement une sous-tarification des services.
Nous soutiendrons pourtant des amendements concernant d’autres mesures de la branche autonomie. Là encore, une loi à la hauteur des enjeux nécessiterait d’importantes recettes nouvelles. Cela explique peut-être le recul du Gouvernement, lequel n’excelle que dans l’effort sur les dépenses.
La branche AT-MP est, certes, à l’équilibre, mais reste curative et épuise en un quadrimestre son budget annuel de prévention.
S’agissant de la branche famille, des réformes en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes sont nécessaires. Certaines prestations pourraient ainsi être basées non sur une indemnité forfaitaire faible, mais sur un revenu de remplacement ; de même, il faut augmenter le nombre de places d’accueil du jeune enfant alors que les objectifs de la convention d’objectifs et de gestion (COG) n’ont été atteints qu’à moitié.
Nous demandons l’arrêt des suppressions de postes – encore 500 en 2021 ! –, alors que les effectifs des caisses d’allocations familiales (CAF) sont en tension et que celles-ci doivent mettre en œuvre des mesures positives, à l’instar du dispositif d’intermédiation des pensions alimentaires.
Enfin, beaucoup de réformes ou de revalorisations du personnel se déroulent en plusieurs étapes : Ségur I puis II, acte I de la mission Laforcade, bientôt acte II, ce qui conduit à déstructurer des filières entières. L’iniquité des situations a entraîné des transferts de personnel de secteurs en situation de sous-effectif dramatique vers d’autres dont la situation relative s’améliorait. La pénurie s’est ainsi déplacée, sans que l’attractivité globale s’améliore, parce que les conditions de travail se dégradent partout.
En conclusion, le groupe écologiste soutient toutes les avancées, de la prise en charge de la contraception à la création des services autonomie, mais il faut construire la sécurité sociale des grandes transitions et lui allouer les ressources nécessaires. Ce projet de loi ne trace pas une telle perspective ; aussi, notre groupe votera contre son adoption. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, dans la continuité de la motion défendue par ma collègue Laurence Cohen, je souhaite dénoncer les insuffisances et les dangers de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.
Je ne reviendrai pas sur les nombreuses propositions que Laurence Cohen vous a exposées – sans dogmatisme, monsieur le ministre ! (Sourires.)
Après dix-huit mois d’une crise sanitaire inédite, qui n’est pas encore arrivée à son terme, nous étions en droit d’attendre que le PLFSS pour 2022 en prenne toute la mesure et confère à notre sécurité sociale des moyens à la hauteur de ces enjeux. Force est de constater que c’est loin d’être le cas.
Chaque année, vous faites le choix de faire peser sur le budget de la sécurité sociale des mesures qui devraient être financées par le budget de l’État. Cela a concerné la crise des « gilets jaunes », puis celle du covid ; cette année, il s’agit des dépenses liées aux conséquences économiques de la crise sanitaire. Nous avions déjà dénoncé l’an dernier cette méthode, qui aggrave le déficit de notre système de protection sociale.
Malgré cela, la sécurité sociale a joué un rôle indispensable, en dégageant des ressources considérables qui ont permis de faire face aux urgences liées à la covid, s’agissant, en particulier, de la vaccination et de l’accès massif aux tests.
Nous avions porté un regard critique sur ce procédé à travers le dépôt d’une série d’amendements visant à proposer des mesures urgentes et fortes ; cette année encore, toutefois, la faux de l’article 40 est passée et a rendu irrecevables certains de nos amendements.
Nous discuterons donc à la marge d’un texte dont les principaux arbitrages ne bougeront pas. Vous ne changez pas de méthode tant en matière de dialogue démocratique que de gestion des budgets : toujours plus de restrictions.
Au total, sur le quinquennat, une économie de près de 18 milliards d’euros aura donc été imposée sur la santé, par le biais de différents plans. Quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage ! En limitant les recettes de la sécurité sociale, tout en lui faisant supporter le coût de la crise, vous creusez le déficit. En 2006, les cotisations sociales représentaient 50 % du financement de la branche assurance maladie, contre 34 % aujourd’hui.
Au total, les exonérations de cotisations sociales représentent une perte de 75 milliards d’euros de recettes pour notre sécurité sociale. Imaginez ce que nous pourrions faire avec cet argent !
Depuis 2017, les économies infligées à l’assurance maladie représentent 18 milliards d’euros, dont 4,1 milliards sont à la seule charge des hôpitaux. Le bilan de cette politique, conjuguée au virage ambulatoire, est désastreux : 5 700 lits d’hospitalisation ont été fermés en 2020, en pleine crise sanitaire.
Ces fermetures s’ajoutent aux 7 600 lits déjà supprimés depuis 2017. De même, la France compte désormais moins de 3 000 hôpitaux et cliniques. Sous l’effet des réorganisations et des restructurations, vingt-cinq établissements ont fermé en 2020.
Notre système de santé a pourtant besoin d’une vraie ambition ! Aujourd’hui, les soignants quittent leur poste épuisés, humiliés, parfois maltraités. Vous vous êtes ingéniés à diviser toujours plus la communauté du soin, entre les infirmiers anesthésistes diplômés d’État (IADE), les infirmiers de bloc opératoire diplômés d’État (Ibode), les infirmiers en pratique avancée (IPA), les sages-femmes, les médecins, les aides-soignantes, et tous les autres, sans même parler des agents épuisés dans le secteur médico-social. Certains d’entre eux ont obtenu des revalorisations, bien insuffisantes, d’autres non. C’est juste assez pour essayer de diviser les professionnels entre eux.
Vous avez cassé l’hôpital public à grands coups d’économies et de plans de retour à l’équilibre ; la crise du covid n’a été que le révélateur d’une gestion comptable appliquée à la santé depuis bien longtemps.
Ce qui est vrai dans le soin l’est aussi dans la prise en charge de l’autonomie. On allait voir ce qu’on allait voir : enfin une grande réforme du grand âge et de l’autonomie ! Elle a fait « pschitt ! », disparue, envolée, tout juste recyclée dans quatre articles de ce texte. Ce n’est pas à la hauteur.
J’ai organisé, la semaine dernière, une réunion publique autour de l’aide à domicile dans le Pas-de-Calais, pour préparer cette discussion. S’agissant de la revalorisation salariale du secteur médico-social, nous ne pouvons que saluer une mesure indispensable pour ces femmes qui vivent avec moins de 900 euros par mois, dans des conditions difficiles et avec une pénibilité qui brise les corps et les carrières.
Vous vous êtes pourtant arrêtés au milieu du gué. Pourquoi l’État ne compense-t-il pas à l’euro près cette nouvelle dépense ? Comment voulez-vous que les départements l’assument sans réduire le volume d’heures de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), alors que certaines autres de leurs dépenses sociales, comme le RSA, ne sont pas compensées ?
Pourquoi, surtout, diviser les structures d’aide à domicile avec l’avenant n° 43 ? Pour certaines d’entre elles, la revalorisation sera financée, pour d’autres non, alors qu’elles exercent le même métier. Qui va payer pour que ces secteurs puissent garder leurs salariés ? Il manque aujourd’hui 250 000 aides à domicile, toutes structures confondues ; avec ces mesures, vous aggravez la situation.
S’agissant de la réforme du financement de l’aide à domicile et de la création d’un tarif plancher, je tiens à rappeler que cette proposition avait été faite avec un minimum de 25 euros par mon prédécesseur Dominique Watrin et Jean-Marie Vanlerenberghe, dans un rapport de 2014 intitulé « L’aide à domicile auprès des publics fragiles : un système à bout de souffle à réformer d’urgence ».
Dès 2014, la préconisation d’un renforcement durable de la participation de l’État dans le financement de l’APA et la réévaluation tarifaire du service rendu par les associations d’aide à domicile étaient donc avancées.
Les structures réunies la semaine dernière nous ont rappelé qu’il existe dix-sept diplômes ou intitulés de postes différents pour une même réalité. Les droits et avantages de tous ces salariés varient en fonction des conventions collectives, ce qui provoque une volatilité des compétences et des savoir-faire dommageable, en premier lieu, aux personnes accompagnées.
Il y a urgence à constituer un véritable service public national de l’autonomie et du grand âge. Nous devons élever la qualité du service rendu à la personne âgée et permettre une réelle reconnaissance de la profession.
Pour financer ces mesures, plutôt que de faire payer les salariés et les retraités, comme le préconise le Gouvernement, nous proposons de mettre à contribution les actionnaires.
La cinquième branche que vous proposez n’est pas la solution : elle serait financée à 90 % par la cotisation sociale généralisée (CSG) reposant essentiellement sur les salariés et les retraités, alors que les employeurs ne contribueront qu’à hauteur de 6 % au soutien à l’autonomie.
Pour notre part, nous considérons que les dépenses liées à la perte d’autonomie doivent relever de la branche assurance maladie de la sécurité sociale.
De même, soumettre les revenus financiers des entreprises à des cotisations sociales modulées selon la politique salariale et environnementale permettrait de recruter 100 000 personnels à l’hôpital et 100 000 personnels par an pendant trois ans au profit des Ehpad et du secteur médico-social.
La taxation des laboratoires pharmaceutiques et des Ehpad privés lucratifs permettrait également d’assurer la création d’un pôle public du médicament, des dispositifs médicaux et de la recherche.
Afin de regagner notre souveraineté sanitaire et de lutter contre les pénuries de médicaments, il est indispensable que nous regagnions en 2021 des capacités de production et de distribution des médicaments ou des vaccins.
Nous aurions apprécié de trouver dans ce texte de vraies propositions pour lutter contre la désertification et mieux prendre en charge le handicap, pour assurer une meilleure couverture de la médecine de ville et soutenir les centres de santé – un dispositif qui a fait ses preuves.
Nous espérions trouver des moyens et des idées pour favoriser l’installation de jeunes médecins et en former un plus grand nombre dans les facultés.
Ce PLFSS est le dernier de votre gouvernement. Pourtant, rien ne change… Avec ce texte, vous remettez complètement en cause, une fois de plus, les principes de solidarité qu’avait établis le ministre communiste Ambroise Croizat.
Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale apparaît donc comme extrêmement décevant. Il illustre votre renoncement aux soins pour tous et votre casse de la solidarité nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Jocelyne Guidez. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 subit l’impact simultané de l’agenda politique et de la crise sanitaire et économique.
Je remercie la rapporteure générale et les rapporteurs thématiques de la qualité de leurs rapports, qui éclairent avec précision et mise en perspective ce texte, et je salue l’acuité du regard que mon collègue Jean-Marie Vanlerenberghe porte sur les enjeux financiers de ce PLFSS.
Je souhaite aborder plus particulièrement la branche autonomie, qui ne vit pas ses meilleurs jours après la crise traversée par le secteur médico-social.
Si l’on peut reprocher à ce PLFSS un manque de vision d’ensemble, les quelques dispositions qui s’y trouvent nous semblent de bon sens : mise en œuvre des mesures du Ségur de la santé, amélioration de la prévention et de l’accès aux soins, lutte contre l’obésité infantile, actions de soutien à l’innovation pharmaceutique ainsi qu’à la perte d’autonomie, ou encore renforcement de la médicalisation des Ehpad et des liens avec les services d’aide à domicile.
Néanmoins, les sénateurs du groupe Union Centriste regrettent profondément que la réforme ambitieuse pour le grand âge ne cesse d’être reportée depuis quinze ans. À l’annonce récente de la non-programmation d’une loi dédiée au cours de ce quinquennat, les professionnels des établissements, les services pour personnes âgées et les associations ont ressenti « un sentiment d’abandon ».
Face à cette promesse non tenue, notre frustration est grande ; la déception lui succède, à présent. En effet, il manque un projet de loi ordinaire pour accompagner ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, contenant des mesures de gouvernance permettant de livrer une vision claire des objectifs affichés. Une telle vision à moyen ou long terme sur la politique de l’autonomie nous manque toujours.
Le défi démographique, couplé à des tensions très fortes en matière de ressources humaines, doit nous conduire à être exigeants et ambitieux. Nous devons présenter des mesures fortes et concrètes pour réformer durablement l’accompagnement des personnes âgées ainsi que la qualité de vie au travail des professionnels du secteur.
Il était ainsi attendu que le Gouvernement muscle le volet grand âge du PLFSS en intégrant les mesures les plus urgentes concernant la gouvernance et le financement de l’autonomie, des mesures essentielles pour un secteur qui se trouve dans une situation d’extrême difficulté.
Les annonces de crédits supplémentaires en 2022 pour l’aide aux personnes âgées, notamment dans le secteur de l’aide à domicile, sont intéressantes, mais elles ne sauraient constituer une réponse suffisante à l’urgence de la situation, tout particulièrement dans le secteur des Ehpad.
L’objectif de dépenses de la branche autonomie pour 2022 s’élève à 34,2 milliards d’euros. Cette somme finance essentiellement deux nouveautés : des revalorisations salariales issues du Ségur de la santé et un tarif plancher national pour les services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD). On ne peut que s’en féliciter.
L’article 30 engage également la réforme des structures en prévoyant la fusion des SAAD, des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) et des services polyvalents d’aide et de soins à domicile (Spasad) en une entité unique baptisée services autonomie à domicile (SAD). C’est clairement le dispositif le plus ambitieux du texte, s’agissant de la branche autonomie.
Le Gouvernement propose également la généralisation des infirmières de nuit ainsi qu’une légère augmentation du temps de travail du médecin coordinateur en Ehpad.
Néanmoins, ces annonces, souvent faites sans aucune concertation préalable, ni avec les professionnels ni avec les départements, ne sont pas en mesure de pallier l’absence criante d’une vision pluriannuelle.
En ce qui concerne le handicap, je regrette que l’Assemblée nationale ait rejeté le principe de l’individualisation du calcul de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), proposé par le sénateur Philippe Mouiller à travers une proposition de loi.
Je déplore aussi que le groupe de travail qui devait être mis en place depuis deux ans sur l’accessibilité des transports pour les personnes en situation de handicap n’ait pas vu le jour.
Cependant, j’apprécie que l’allocation journalière du proche aidant soit élargie et indemnisée au SMIC pour les « proches aidants de personnes dont le handicap ou la perte d’autonomie peuvent, sans être d’une particulière gravité, nécessiter une aide régulière ». La même revalorisation sera appliquée à l’allocation journalière de présence parentale.
Pourtant, la réalité de l’application de cette mesure est loin d’être satisfaisante. Moins de 5 000 personnes en ont bénéficié jusqu’à présent. Cette proposition reste au milieu du gué et ne répond pas à une demande exprimée de longue date : son élargissement aux aidants dont les proches souffrent de longues maladies, notamment de cancers, afin que davantage de personnes puissent soutenir un proche malade nécessitant un accompagnement important.
Les personnes malades relèvent de votre champ de compétence, monsieur le ministre. Pourquoi ne pas agir pour soutenir leurs proches aidants ?
Par ailleurs, je propose que la différence entre l’allocation du proche aidant et le salaire puisse être couverte par les contrats collectifs de santé, en assortissant cette mesure d’une exonération sociale afin de neutraliser une potentielle augmentation des primes d’assurance. Nous y reviendrons au cours des débats.
Dans un contexte de crise sanitaire, je trouve opportun d’évoquer le sujet de la biologie délocalisée. Adoptée dans le cadre du pacte de refondation des urgences et dans le PLFSS pour 2020, cette mesure vise à élargir le cadre de cette pratique en ville afin de limiter le recours aux urgences pour des besoins d’examens de biologie de routine. Elle favorise, comme alternative aux passages aux urgences, l’accès des patients à ces examens.
Force est de constater que ce service de proximité n’est toujours pas une réalité pour nos concitoyens. Il est incompréhensible que, deux ans après le vote de cette mesure, il n’existe toujours aucun travail publié au niveau réglementaire par le ministère.
Il semble que la difficulté provienne de la négociation tarifaire de la CNAM pour coter l’acte de biologie délocalisé. Face à l’urgence de la situation, quand pourrez-vous enfin proposer ce modèle aux biologistes médicaux dans les établissements de santé, les maisons de santé ou les Ehpad ?
L’article 42 du PLFSS pour 2022 propose la généralisation d’expérimentations dans le domaine de la santé. Je m’interroge sur la raison pour laquelle le Gouvernement n’a pas souhaité généraliser l’expérimentation du dépistage du virus de l’hépatite C, alors qu’il s’est fixé, dans le cadre du plan national « Priorité prévention » de 2018, l’objectif ambitieux d’élimination de ce virus en France à l’horizon de 2025.
Je me réjouis du remboursement des moyens de contraception accordé aux femmes jusqu’à l’âge de 25 ans. Il s’agit d’une avancée majeure pour toutes, mais pas pour tous ! Alors que la charge contraceptive concerne autant les femmes que les hommes, l’annonce du Gouvernement apparaît comme un rendez-vous manqué, puisqu’elle oublie la contraception masculine et, surtout, la place des hommes dans le partage de la contraception. Il est temps de les impliquer davantage !
Mme Jocelyne Guidez. En ce qui concerne les sages-femmes, il est nécessaire de répondre de manière pertinente à leurs revendications, lesquelles me semblent bien légitimes. C’est un sujet qui mérite votre attention, monsieur le ministre.
L’article 44 ter, issu d’un amendement gouvernemental, confie à la CNAM la mission de mettre en œuvre des campagnes d’information afin de promouvoir les compétences des sages-femmes et de communiquer et d’informer sur ce sujet. Une lettre de votre part ou du directeur de la sécurité sociale à celui de la CNAM aurait pourtant eu le même effet !
Cette disposition n’a pas sa place dans le code de la santé publique ; une telle inscription n’est ni rigoureuse ni sérieuse. Les préoccupations légitimes de ces personnels méritent une réponse d’apaisement, des actions concrètes, et non une disposition législative qui sera assurément retoquée par le Conseil constitutionnel.
Il est bien sûr important de faire connaître les compétences des sages-femmes, et une campagne d’information permettra d’améliorer l’accès aux soins des femmes sur nos territoires. Vous savez que le Sénat est sensible à ce sujet. En revanche, l’article 34 de la Constitution ne prévoit pas que la loi soit le support marketing de la communication gouvernementale ! Aussi, nous voterons l’amendement de suppression proposé par Mme la rapporteure.
Permettez-moi de conclure par un proverbe anglais : « un homme qui promet beaucoup et qui ne tient rien ressemble à un jardin où il ne pousse que de mauvaises herbes. » Il suffit de ne pas multiplier les promesses, si vous n’êtes pas en mesure de les concrétiser.
Notre message est clair : vos efforts ne sont malheureusement pas à la hauteur des attentes, malgré la création d’innombrables missions et groupes de travail dont peu d’enseignements sont tirés pour faire progresser la prise en charge des plus fragiles. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Michelle Meunier applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Michelle Meunier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale est toujours un moment important dans la vie du Parlement.
Au-delà de l’exercice parlementaire en tant que tel, c’est bien plus qu’un texte que nous examinons. De ces articles, de ces chiffres, de ces milliards d’euros ressort la situation de nos concitoyens, le quotidien de celles et ceux dont l’âge avance, d’enfants et d’adultes extraordinaires, dont la vie ne peut se dérouler sans l’aide de proches ou de professionnels, ainsi que la carrière de celles et ceux qui les accompagnent, et dont c’est le métier.
Certes, ce PLFSS comporte bien une cinquième branche, mais que faire d’une branche sans financement ?
Si ce texte apporte bien quelques mesures, celles-ci cachent difficilement le peu de vision de votre gouvernement, lequel, après avoir annoncé une grande loi dédiée à la dépendance, puis au grand âge et à l’autonomie, puis aux liens entre les générations, n’a finalement rien proposé du tout.
Ces effets d’annonce n’ont eu pour conséquence que d’amplifier le désarroi et la déception d’un secteur professionnel déjà en grande tension et en grande souffrance depuis bien trop longtemps. Ce PLFSS ne répond ainsi en rien à la crise du secteur médico-social.
Pourtant, des chiffres implacables nous alertent, reflétant la réalité démographique de notre pays : en 2040 – après-demain, donc –, les plus de 65 ans représenteront plus d’un Français sur quatre. On le sait : il faudrait 10 milliards d’euros supplémentaires pour prendre en charge ce vieillissement de la société.
Or les auteurs de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne veulent pas voir cette réalité et rendent par conséquent invisibles toutes ces personnes, leurs besoins, de même que tous les professionnels du secteur. La création de l’équivalent d’un poste d’infirmière supplémentaire par Ehpad et par an ne suffira sans doute pas à y répondre, non plus que le tarif plancher à 22 euros.
Cette dernière mesure, présentée comme l’alpha et l’oméga de l’amélioration de l’égalité dans la prise en charge des frais de l’accompagnement à domicile, a été, à peine annoncée, décriée par tout le secteur. Elle est considérée comme étant pénalisante pour les départements bons élèves.
Vous y avez ajouté un bonus qualité complémentaire allant jusqu’à 3 euros, soit un reste à charge plus important, donc plus lourd pour les plus modestes. Ainsi, vous creusez un peu plus encore les inégalités.
La France est en retard dans la prise en charge de la dépendance et du handicap ; en retard sur la prévention de la perte d’autonomie.
Pourtant, des solutions existent. Elles figurent dans les nombreux rapports qui vous ont été remis ces derniers mois, le Sénat lui-même ayant contribué à certains de ces travaux.
Le caractère ambitieux de ces propositions a été relevé. Hélas, on n’en voit pas la traduction dans ce PLFSS, qui, comme beaucoup l’a souligné, constitue un rendez-vous manqué. L’autonomie et la dépendance méritent toute notre attention et toute notre vigilance, parce qu’il s’agit d’humanité et de dignité. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. Martin Lévrier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, comme l’a parfaitement rappelé notre collègue Xavier Iacovelli, l’examen du PLFSS est un exercice particulier, eu égard aux nombreux enjeux qu’il recouvre, a fortiori cette année, puisqu’il s’agit du dernier PLFSS de la législature et qu’il est en outre examiné dans un contexte sanitaire et social inédit.
Je ne reviendrai pas sur les nombreuses mesures qui ont d’ores et déjà été détaillées. Avant d’évoquer les apports du texte issu de l’Assemblée nationale, je souhaite rappeler la traduction législative de plusieurs mesures de soutien aux travailleurs indépendants, annoncées par le Président de la République au cours du mois de septembre 2021.
Je veux évoquer, premièrement, la préservation des droits à la retraite des indépendants travaillant dans les secteurs les plus touchés par la crise. Ainsi, certains d’entre eux n’ont pu valider leurs trimestres de retraite durant la crise sanitaire en raison du ralentissement, voire de l’arrêt de leur activité. Cet effet collatéral est corrigé par le projet de loi : désormais, les indépendants les plus touchés par la crise bénéficieront d’un nombre de trimestres de retraite validés en 2020 et 2021 équivalent à la moyenne des trimestres validés lors de leurs trois derniers exercices.
Je citerai, deuxièmement, la simplification du calcul et du recouvrement des cotisations des indépendants prévue dans ce PLFSS.
Ce texte inscrit également dans la loi le versement en temps réel du crédit d’impôt et des aides sociales associés aux services à la personne pour les particuliers.
Il concrétise en outre les mesures en matière de psychiatrie annoncées à l’issue des assises de la santé mentale à la fin du mois de septembre 2021. Elles sont les bienvenues dans un contexte épidémique ayant fragilisé non seulement les corps, mais aussi les esprits.
Je pense notamment au recrutement de personnels dans les centres médico-psychologiques (CMP) pour les adultes et les enfants, mais aussi au déploiement d’un service téléphonique d’accès aux soins psychiatriques vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ou encore au remboursement des consultations chez un psychologue de ville à partir de l’âge de 3 ans dès 2022 sur prescription d’un médecin, introduit par un amendement du Gouvernement lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale.
Les députés ont par ailleurs renforcé le contrôle des centres de santé par les agences régionales de santé et prévu des sanctions en cas de manquement.
Ils ont aussi prolongé jusqu’à la fin de l’année 2022 les dispositions provisoires contenues dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, notamment les accords d’activité partielle de longue durée, qui permettent aux salariés de bénéficier d’indemnités complémentaires de la part de leur employeur.
S’agissant des pénuries de médicaments, dont nous aurons, je l’espère, largement l’occasion de parler ces prochains jours, un amendement des députés durcit les sanctions contre les mauvaises pratiques de certains grossistes répartiteurs, dits short liners, qui ne respectent pas leurs obligations de service public, en particulier celles de disposer d’un stock de médicaments et d’être en mesure de livrer les pharmacies dans un délai de vingt-quatre heures.
Nos collègues de l’Assemblée nationale ont permis l’expérimentation, dans six départements, d’un accès direct, sans ordonnance, aux kinésithérapeutes et aux orthophonistes exerçant dans des structures de soins coordonnés.
La commission des affaires sociales du Sénat, sans revenir sur ce point, a souhaité encadrer davantage le dispositif en précisant que le décret d’application devrait être pris en Conseil d’État, après consultation de la Haute Autorité de santé (HAS) et de l’Académie nationale de médecine.
L’élargissement des activités des orthoptistes a également été maintenu par la commission. Ces professionnels paramédicaux, chargés de la rééducation des yeux en cas de troubles de la vision, pourront réaliser des bilans ou prescrire des lunettes sans que le patient consulte un ophtalmologue. Cette mesure concrète offre un meilleur accès aux soins et une véritable réduction des délais d’attente.
En revanche, pour se prémunir d’une dégradation de la prise en charge des patients, la commission des affaires sociales souhaite garantir des « critères exigeants » dans la réalisation des bilans par les orthoptistes. Les textes d’application devront être pris après l’avis du Conseil national professionnel d’ophtalmologie. La commission exige également que les bilans visuels ne concernent qu’une tranche d’âge particulière, afin notamment de « prévenir les pertes de chance pour les patients les plus âgés ».
Fruits du bicamérisme, ces mesures concrètes amélioreront le quotidien de milliers de personnes.
Dans ce contexte de pandémie qui nous oblige, plusieurs autres défis doivent être relevés par ce PLFSS. Je ne doute pas que nos débats apporteront certaines améliorations. Je compte sur vous non seulement pour ne pas faire l’impasse sur la maîtrise de nos dépenses, mais également pour renforcer nos outils de régulation. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Florence Lassarade. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est le dernier du quinquennat ; il est aussi celui de la sortie de la crise sanitaire.
Malgré un budget de plus de 500 milliards d’euros, ce texte reste très en deçà des attentes des Français et des professionnels du secteur médical. Je ne reviendrai pas sur les observations de notre collègue Chantal Deseyne, auxquelles je souscris pleinement !
Monsieur le ministre, face à la pandémie de covid-19, notre système de santé n’a tenu que grâce au dévouement et à la compétence des personnels soignants. Certes, il y a eu le Ségur de la santé, mais tous les professionnels ne sont pas concernés par les augmentations de salaire prévues.
Il y a les nombreux oubliés, qui, pourtant, n’ont pas ménagé leur peine depuis le début de la crise sanitaire ! Et il y a aussi tous les déçus de vos propositions, qui consistent en des effets d’annonce.
Les sages-femmes, les infirmiers, les médecins, les pédiatres, les ophtalmologistes, les psychologues : la liste des insatisfaits est longue. Le Gouvernement fait montre de bien peu de considération et de reconnaissance envers ces professions.
Mme Florence Lassarade. En premier lieu, je pense aux sages-femmes, grands oubliés du Ségur. La France compte environ 23 000 sages-femmes en activité, dont 97 % sont des femmes. Celles exerçant à l’hôpital bénéficieront à partir de janvier d’une prime de 100 euros et d’une hausse de salaire d’environ 100 euros brut par mois. Malgré cela, les niveaux de rémunération restent inadaptés à leur niveau de responsabilités. Le métier de sage-femme, qui exigerait un statut spécifique, doit être mieux rémunéré.
Malgré les manifestations et les grèves, que propose ce PLFSS ? Il dispose que la première consultation lors d’une demande de stérilisation à visée contraceptive puisse se faire auprès d’une sage-femme, et non plus seulement d’un médecin. Il prévoit également des campagnes de communication organisées par la Caisse nationale de l’assurance maladie pour informer la population sur leurs compétences ! C’est stupéfiant !
J’en viens à un autre sujet de mécontentement : quid de la construction d’une psychiatrie humaine ?
L’état psychiatrique du pays s’est aggravé avec la crise sanitaire et, là encore, les besoins sont criants.
Alors que les maladies psychiques touchent chaque année une personne sur cinq, soit 12 millions de Français, dont seuls 40 % à 60 % d’entre eux sont pris en charge, ce PLFSS ne comporte aucune mesure nouvelle pour la psychiatrie et la pédopsychiatrie. Actuellement, 30 % des postes de praticiens hospitaliers sont vacants dans le public, compte tenu du niveau des salaires et de la détérioration des conditions de travail.
En outre, la psychiatrie ne séduit plus les étudiants, puisque ceux-ci boudent plus de 10 % des postes d’internat de cette spécialité.
Présenté comme la mesure phare des assises de la santé mentale, le remboursement des consultations de psychologues ne rencontre pas le succès escompté auprès des professionnels du secteur. Les modalités pratiques de la mise en œuvre de cette mesure sont en décalage complet avec la pratique des consultations des psychologues. Nous essaierons néanmoins d’améliorer ce dispositif en séance. Notre collègue Alain Milon développera tout à l’heure la situation de la psychiatrie en France dans son intervention.
La pédiatrie est un autre secteur en grande difficulté. Huit départements connaissent une densité inférieure à un pédiatre pour 100 000 habitants et l’âge moyen des pédiatres libéraux laisse présager une aggravation de la situation, puisque 44 % d’entre eux ont plus de 60 ans.
Cette situation pose une question majeure d’accès aux soins pédiatriques. Mais ce PLFSS ne formule aucune proposition.
Monsieur le ministre, nous attendions des mesures fortes en direction des soignants pour corriger tous les manquements du passé. Au lieu de cela, le Gouvernement nous offre des rustines !
Pis encore, une nouvelle étape est franchie dans le démantèlement des compétences médicales, avec un risque important de dégradation de la qualité des soins.
En effet, il est proposé dans le PLFSS d’autoriser les orthoptistes à réaliser un certain nombre d’actes sans prescription médicale et sans que ceux-ci soient placés sous la responsabilité d’un médecin. Il est également prévu de déléguer à ces personnels paramédicaux le dépistage de l’amblyopie chez les enfants de 9 à 15 mois et des troubles de la réfraction chez les enfants âgés de 30 mois à 5 ans.
Comme d’autres médecins, je pense qu’il est dangereux d’autoriser les orthoptistes à effectuer ces contrôles, au regard de la qualité des soins et du dépistage des pathologies oculaires.
Monsieur le ministre, je souhaite rappeler dès cette discussion générale que le certificat de capacité d’orthoptiste se prépare en trois ans et qu’il a pour objet la rééducation et la réadaptation oculaires. Eu égard à sa formation, le médecin est le seul habilité à poser un diagnostic médical. J’espère que l’examen du projet de loi apportera des modifications afin de préserver la santé de nos concitoyens.
Abandonner les médecins, les infirmiers, les aides-soignants, les sages-femmes revient à abandonner ceux qui luttent au quotidien pour préserver la santé de tous nos concitoyens !
Nous plaidons pour une réelle politique d’attractivité des métiers de la santé et du social, avec des rémunérations de base attractives ainsi qu’une meilleure évolution des carrières et des salaires. Malheureusement, le droit d’amendement ne nous permet pas de faire des propositions en ce sens.
Nous comptons néanmoins sur des échanges constructifs avec le Gouvernement pour améliorer ce PLFSS, et nous espérons, messieurs les ministres, que vous accepterez de lever certains gages sur nos propositions d’amendements ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Monique Lubin. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je ne reviens pas sur les propos de nos collègues Bernard Jomier et Michelle Meunier, auxquels je souscris pleinement.
Nous déplorons que ce PLFSS n’offre ni perspectives de financement pour la sécurité sociale ni de solution à la crise de l’hôpital public ; de plus, il enterre la grande loi sur l’autonomie et la dépendance promise par le Gouvernement.
Il s’agissait pourtant de deux chantiers majeurs du quinquennat. En septembre 2020, le Président de la République annonçait une loi relative au grand âge pour le début de l’année 2021. Avant même la crise sanitaire, en janvier 2020, plus de 1 500 médecins démissionnaient de leurs fonctions d’administration, de gestion et de représentation pour protester contre le refus du Gouvernement de négocier avec les parties prenantes sur les moyens de l’hôpital public.
Le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale de la mandature n’est pas à la hauteur dans ces deux domaines, ni dans d’autres au demeurant.
C’est en effet un « presque » qu’inspirent les diverses mesures mises en avant dans ce texte : de nombreuses dispositions, à première vue prometteuses, ne vont pas jusqu’au bout de ce qui peut être proposé.
Si l’on peut ainsi saluer certaines mesures intéressantes, telles que la gratuité de la contraception jusqu’à 25 ans, ou la généralisation de l’intermédiation pour le versement des pensions alimentaires, il aurait fallu en revanche aller plus loin dans la simplification de l’accès à la complémentaire santé solidaire pour les allocataires du RSA et du minimum vieillesse. Cette mesure comporte en effet des « trous dans la raquette » qui nous ont conduits à présenter des amendements afin de lutter contre le risque de non-recours, et afin que les organismes impliqués veillent à transmettre l’information pertinente aux bénéficiaires.
Par ailleurs, la fluidité de la transmission des informations entre administrations et organismes n’est pas garantie. Enfin, ces prestations sont des droits quérables, qui nécessitent de la part des bénéficiaires potentiels de mener à bien un certain nombre de démarches identifiées comme favorisant le non-recours.
L’article ajouté par voie d’amendement par le Gouvernement, visant à permettre aux travailleurs des plateformes de bénéficier du régime général de la sécurité sociale, sous réserve d’un revenu annuel inférieur à 1 500 euros, nous pose toujours le même problème, dès lors que le Gouvernement s’intéresse à ce dossier : ces dispositions entérineraient la création d’un « tiers-statut » cumulant les supposés inconvénients du salariat, notamment le lien de dépendance vis-à-vis de l’entreprise, avec ceux du véritable travail d’indépendant, notamment en ce qui concerne l’accès à la protection sociale.
Nous refusons d’emprunter ce chemin, et demeurons attachés à la préservation d’un authentique salariat et d’un véritable statut d’indépendant. Nous y reviendrons très vite avec l’examen du projet de loi de ratification de l’ordonnance relative aux modalités de représentation des travailleurs indépendants recourant pour leur activité aux plateformes.
Le Ségur de la santé est depuis de longs mois source de mécontentement.
Parmi les oubliés figuraient – entre autres – les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) et les services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD), qui ont pourtant été à pied d’œuvre durant la crise sanitaire et les différentes périodes de confinement.
Nous avons pris bonne note que le Gouvernement a peu à peu rectifié le tir. Je pense notamment à l’amendement au PLFSS 2021 qui a concrétisé un avenant à leur convention collective de branche. Mais les modalités de répartition de cette revalorisation appliquée au 1er octobre n’ont pas fait l’unanimité, une partie des salariés du secteur en étant de fait exclue.
Une loi sur l’autonomie et la dépendance aurait permis de disposer d’une politique unifiée à destination du secteur de l’aide à domicile. Mais on continue à mettre des cataplasmes sur une jambe de bois, alors que la cinquième branche est maintenant créée.
Dans ces conditions, l’article 30 du PLFSS, qui prévoit de consolider le financement des SAAD avec un tarif plancher national de 22 euros par heure, est certes intéressant, mais il ne peut pallier une politique structurellement insuffisante en la matière, d’autant que cette mesure pose aussi la question de la répartition entre l’État et les départements du financement de la revalorisation proposée lors du Ségur de la santé.
Le surcoût de cette mesure pour les départements, entrée en vigueur le 1er octobre dernier, s’élèverait à 75 millions d’euros en 2021, compensé par l’État à hauteur de 70 %, par l’intermédiaire de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Le coût résiduel pour les départements serait de 22 millions d’euros, l’État s’engageant à couvrir 50 % de la dépense supplémentaire à partir de 2022, pour un montant total de 150 millions d’euros.
Il convient de rappeler que, désormais, les départements ne disposent plus de l’autonomie fiscale. Il faudrait s’en souvenir au moment de décider le déploiement de mesures les mettant à contribution, alors même qu’ils n’ont plus les moyens d’ajuster les recettes aux nouvelles dépenses qui leur sont imposées !
Monsieur le ministre, vous avez dit dans votre propos liminaire que le Gouvernement confirmait le virage « domiciliaire ». Mais où sont les financements ? Il serait illusoire de penser que les mesures dont je viens de parler seront suffisantes.
S’agissant des retraites, si le Gouvernement propose des mesures fonctionnelles, dont certaines vont dans le bon sens, comme la retraite progressive étendue aux cadres, nous ne sommes pas dupes ! Bien que vous n’ayez finalement pas mené à bien la réforme envisagée, nous sommes sur la défensive, tant les atermoiements ont été nombreux à ce sujet.
Je sais bien que le Gouvernement – et il n’est pas le seul – attend le moment opportun pour imposer des réformes qui seront contraires aux intérêts du plus grand nombre de salariés. J’entends ici et là que les seules solutions consisteraient à ajouter des trimestres et à reporter l’âge de départ, et donc à faire toujours payer les mêmes catégories de travailleurs : nous nous y opposerons.
Les avancées sociales mises en avant par ce PLFSS dissimulent le refus de mener les politiques publiques nécessaires à la préservation et à la modernisation de notre modèle social. Le quinquennat qui se termine – entre la crise des « gilets jaunes » et les fragilités que la covid-19 a mises en avant – a été lourd d’enseignements. Nous aurions pu espérer un PLFSS de combat, mais il s’agit d’un texte de routine.
Cela me semble d’autant plus surprenant que, depuis quelques jours, les ministres se succèdent dans les médias pour se réjouir d’une situation économique qui connaîtrait une embellie. Se pose donc la question de la répartition des bénéfices de cette sortie de crise. Iront-ils à l’hôpital public, à l’autonomie ? Ce ne sera – hélas ! – pas le cas en 2022 ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Alain Milon. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Milon. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’examen du PLFSS 2022 m’offre l’occasion de vous alerter sur la situation très préoccupante de la psychiatrie publique en France. En 2019, les professeurs Marion Leboyer et Pierre-Michel Llorca ont coécrit un ouvrage intitulé Psychiatrie : l’état d’urgence.
Depuis, la pandémie de covid-19 est passée par là, aggravant considérablement la situation, tant en raison de l’augmentation du besoin de prise en charge d’une partie de la population que de la fuite toujours plus importante de médecins du secteur public.
Le Ségur de la santé a permis de redonner partiellement des moyens à l’hôpital public, grâce, entre autres, à une augmentation salariale significative pour le personnel. Mais ces mesures catégorielles, prises au coup par coup, ne répondent pas aux difficultés structurelles de la fonction publique hospitalière.
En outre, l’application discriminante de certaines mesures a généré incompréhension, frustration et colère chez certains professionnels.
Au-delà des difficultés de management qu’ont rencontrées les directions d’établissement, une inquiétude demeure au regard des surcoûts que représentent les mesures prises. En effet, leur compensation en 2021 a été allouée par les ARS en crédits non reconductibles, et non dans la base de la dotation annuelle de financement (DAF), ce qui préoccupe fortement les directions.
Malgré l’effort de 3,8 milliards d’euros en 2021 destiné au volet salarial du Ségur, la Fédération hospitalière de France (FHF) dénonce un sous-financement des mesures de revalorisation des rémunérations des personnels entrées en vigueur en 2021. Cette sous-évaluation porte sur le complément de traitement indiciaire et sur la revalorisation de traitement des personnels médicaux.
En moyenne, il existerait un différentiel de 15 % à 20 % des crédits alloués par établissement. Cet écart s’explique essentiellement par le fait que ces mesures ont été calculées sur le fondement de la statistique annuelle des établissements de santé (SAE) de 2019, sans tenir compte des recrutements effectués entre 2019 et 2021. Le sous-financement pour l’ensemble des hôpitaux représenterait un montant de 750 à 800 millions d’euros.
À cela s’ajoute la pénurie médicale, qui touche tous les établissements publics de santé, mais surtout certaines spécialités, dont les plus concernées sont les urgences, la réanimation, la gynécologie et la psychiatrie.
Les établissements de santé plaident de longue date pour un contrôle et une régulation ferme du marché de l’intérim médical, et nous adhérons à la philosophie de la loi du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite loi Rist.
Cependant, le calendrier et le dispositif de mise en œuvre de ce texte, même s’il a été reporté en 2022, effraie les personnels hospitaliers. Comme cette loi ne s’applique pas au secteur privé, les mercenaires médicaux et les agences d’intérim reportent leur activité vers ce dernier, au détriment du secteur public, qui subit des démissions d’intérimaires médicaux, la mise à mal de la permanence des soins et des fermetures de lits ou de services.
Les sommes exorbitantes consacrées à l’intérim médical pourraient être judicieusement mises à profit pour rendre l’exercice médical hospitalier plus attractif. En effet, un jeune praticien hospitalier (PH) en psychiatrie touche en début de carrière environ 6 400 euros net par mois après la revalorisation du Ségur, alors qu’un intérimaire en psychiatrie gagne entre 600 et 850 euros net par jour, soit 13 000 euros net par mois. La rémunération des intérimaires médicaux est immorale et indécente.
Des établissements de santé mentale de ma région sont fortement touchés par cette situation, au risque de devoir revoir à la baisse les capacités d’hospitalisation complète, alors que la demande de la patientèle augmente.
La sociologie des patients ayant recours à ces établissements est d’ailleurs en train d’évoluer. Il s’agit soit de nouveaux patients inconnus des services, dont la maladie mentale se double de la consommation de substances illicites, soit de patients suivis de longue date, pouvant faire des épisodes délirants aigus qui nécessitent des traitements de crise. Cette population peut être à la fois malade et délinquante, avec des degrés de dangerosité variable.
Ces situations complexes supposent des parcours de soins fluides et réactifs entre établissements de santé ayant des structures spécialisées, mais également une articulation entre la justice, la police et l’hôpital.
Les députés ont de nouveau voté le renforcement du contrôle du juge des libertés et de la détention (JLD) sur les pratiques d’isolement et de contention en psychiatrie, prévu à l’article 28 du PLFSS 2022.
En juin 2020, le Conseil constitutionnel a jugé que les mesures d’isolement et de contention en milieu psychiatrique constituent une privation de liberté, et les a déclarées contraires à la Constitution, au motif que le législateur n’avait pas fixé de limite à la durée de ces mesures. Les effets de cette abrogation ont été reportés au 31 décembre 2020.
Le Gouvernement a alors pris des mesures correctrices dans le PLFSS pour 2021. Celles-ci ont été de nouveau partiellement censurées, avec un effet différé au 31 décembre 2021.
L’article 28 du PLFSS 2022, dont notre rapporteure a demandé la suppression en commission, crée un contrôle systématique du JLD sur les mesures de maintien en isolement et de contention à compter du 1er janvier 2022.
L’instauration de cette mesure aurait considérablement alourdi le travail des JLD et « technocratisé » les procédures au sein des établissements. En effet, ce contrôle s’appliquerait dès la seconde période de douze heures d’isolement ou de six heures de contention. En cas de saisine pour main levée de la mesure, le JLD bénéficierait de vingt-quatre heures pour statuer.
La lourdeur de ce dispositif conduirait les établissements à réfléchir à d’autres solutions que l’isolement ; cela supposerait un renforcement important des moyens humains et des mesures de restructuration immobilière pour créer des zones d’apaisement dans les services.
Le respect des droits fondamentaux des patients placés sous le contrôle du JLD ne doit pas engendrer un accroissement de l’insécurité pour la société. Certains patients ont besoin, cliniquement, de temps d’isolement.
Il faut donc retravailler les parcours de soins et les fluidifier, notamment les hospitalisations de détenus au titre de l’article D. 398 du code de procédure pénale en centre hospitalier de santé mentale. Après un épisode de crise, ces patients devraient être rapidement transférés au sein d’une unité pour malades difficiles (UMD) ou d’une unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA) pour recevoir des personnes incarcérées nécessitant des soins psychiatriques.
L’UHSA de Marseille n’est que partiellement ouverte depuis 2018 ; il y manque encore 20 places. L’accès aux UMD est de plus en plus difficile sur l’ensemble du territoire national. L’articulation clinique avec les services demandeurs est lacunaire et les sorties unilatérales mettent en difficulté les équipes médicales et paramédicales, lorsque celles-ci doivent recevoir dans l’urgence des patients dangereux.
L’irresponsabilité pénale est un sujet délicat qui resurgit à l’occasion de faits divers dramatiques, mais il faut être conscient que l’auteur de faits criminels peut passer un an et demi en détention provisoire. Après avoir été déclaré irresponsable pénalement, ce même individu peut passer d’un centre pénitentiaire à un centre hospitalier spécialisé ouvert, sans que les soignants qui l’accueillent connaissent ni son dossier pénal ni sa dangerosité.
M. le président. Il faut conclure.
M. Alain Milon. C’est bien dommage, monsieur le président, car le sujet est particulièrement intéressant ! (Sourires.)
L’hôpital et les équipes qui soignent ces patients particulièrement dangereux ne doivent pas être encore plus fragilisés que les publics accueillis. Il faut conforter l’hôpital et l’asseoir comme un acteur majeur du territoire, travaillant en réseau avec l’ensemble des acteurs médico-sociaux et sociaux, les centres de santé, les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et la médecine de ville au cœur de la cité. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ferai une réponse courte, car nous aurons plusieurs jours de débat pour examiner tous ces points. J’espère que vous ne m’en voudrez pas.
J’ai entendu beaucoup de critiques sur l’absence de projet de loi relatif à l’autonomie, mais ce qui compte, ce n’est pas le vecteur, ce sont les mesures. Le PLFSS présente des avantages en comparaison d’un projet de loi ad hoc, qui aurait fait l’objet de deux lectures dans chaque assemblée, voire trois, sans compter le délai nécessaire à sa promulgation. On n’en aurait pas vu la couleur avant des mois ! (Protestations.)
Dans ce texte, vous avez du sonnant et du trébuchant ! Quoi qu’il arrive, le PLFSS sera promulgué avant le 1er janvier 2022, et il sera d’application immédiate.
En outre, j’ai de la mémoire, non pas parce que je suis neurologue, mais parce que je débute l’examen de mon huitième PLFSS, d’abord en tant que député puis comme ministre. Je me retourne vers mes anciens camarades socialistes : je me souviens de la très belle loi défendue par ma collègue et amie Michèle Delaunay, pour laquelle nous étions enthousiastes au Parlement. C’était enfin la loi de l’autonomie ! Certes, elle était intéressante et promouvait de belles avancées.
Mais, au cours des dix-huit derniers mois, le Gouvernement a débloqué plus de moyens que durant tout le quinquennat précédent. Je n’en tire pas gloriole, j’étais député de la majorité ! Mais pardonnez-moi : quand on a de la mémoire et que l’on se compare… En dix-huit mois, ce sont 3,8 milliards d’euros qui ont été engagés dans le champ de l’autonomie, 2,8 milliards d’euros pour les hausses de salaire du personnel hospitalier, 250 millions d’euros pour les hausses de salaire des aides à domicile, 70 millions d’euros pour la médicalisation des Ehpad et 450 millions d’euros pour l’investissement dans ces établissements.
Franchement, vous ne pouvez pas dire que nous ne bougeons pas de la bonne manière ou que nous n’allons pas dans la bonne direction ! Affirmer que le texte ne suffit pas et souhaiter davantage est une chose, dire que nous avions promis une loi et qu’il n’y a rien en est une autre.
On met trop d’argent ici, pas assez là, on identifie les sources de financement, mais les propositions ne vont pas assez loin : voilà le débat traditionnel que nous avons. Cela n’est pas une critique, mais on peut se le dire entre nous. Ce n’est pas le premier texte que je viens défendre devant le Sénat, et vous savez que j’adore cet exercice.
J’ai l’impression, à vous entendre, que chaque article de ce texte pris indépendamment – contraception jusqu’à 25 ans, extension de la complémentaire santé solidaire pour les bénéficiaires de l’ASPA ou du RSA, automaticité des droits, mesures salariales, etc. – recevrait l’assentiment général de cet hémicycle, à droite comme à gauche.
Ce PLFSS ne serait donc pas un mauvais texte, en fin de compte. Certains pensent qu’il ne va pas suffisamment loin, d’autres que la façon d’en financer les dispositifs n’est pas la bonne. J’ai tout de même l’impression que nous parviendrons à trouver une forme de consensus.
Je ne m’attends certes pas à ce que la commission mixte paritaire soit conclusive sur un PLFSS de fin de mandat, mais nous aurons, au-delà des positions de chacun, des débats enrichissants.
Oui, madame Lassarade, je vais bousculer la base des corporatismes pour étoffer celle de l’accès aux soins. Cela fait des décennies que notre pays est étouffé par le corporatisme. Le corporatisme n’est pas une insulte : parfois il est justifié, mais souvent il nous empêche d’avancer dans le bon sens. Je ne comprends pas comment notre pays peut avoir un tel retard dans les pratiques avancées et pourquoi le cloisonnement entre les professions, les secteurs et les milieux est si fort.
Je reçois les syndicats dans mon bureau plus que n’importe qui. Les syndicats de médecins me reprochent de leur enlever tel acte au profit des infirmières, lesquelles se plaignent à leur tour d’être dépossédées de tel acte au bénéfice des aides-soignants. En fin de compte, tous dénoncent un manque de coopération. Or notre logique ne consiste en aucun cas à déshabiller untel au profit des autres. Nous tenons simplement compte de la réalité !
J’observe que des amendements ont été déposés aux fins de supprimer la possibilité conférée à des orthoptistes de prescrire des lunettes à des personnes myopes jeunes et en bonne santé. Qu’on ne me dise pas que c’est pour des raisons de santé ! Il est clair que c’est le corporatisme qui motive une telle proposition. La filière visuelle a travaillé pendant trois ans, en réunissant l’ensemble des acteurs ; l’une des missions de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) a rendu un rapport ; les gouvernements précédents, de gauche comme de droit, avaient déjà évoqué le sujet. Bref, cette mesure me paraît relever du bon sens.
Aujourd’hui, je me suis rendu dans l’Eure. Il y a tellement peu de médecins disponibles dans ce département que les gens s’inquiètent non pas de savoir qui va leur prescrire des lunettes, mais du nombre de kilomètres qu’ils vont devoir parcourir ou du nombre de mois qu’ils vont devoir attendre avant de recevoir une prescription. On doit faire bouger notre système de santé et apprendre des erreurs du passé.
Il a été proposé d’expérimenter l’accès direct aux consultations de kinésithérapeutes pour certaines pathologies telles que les entorses de cheville. Lorsque j’étais médecin neurologue, j’ai prescrit des wagons de rééducation sans mieux savoir que le kinésithérapeute lui-même ce qui était bon pour mon patient.
L’Ordre national des médecins, pour qui j’ai beaucoup de respect, fait des communications pour torpiller toute velléité consistant à permettre à des soignants paramédicaux parfaitement compétents de mieux participer à l’offre de soins dans les territoires.
En parallèle, les élus m’écrivent du matin au soir pour me dire combien notre pays manque de soignants et à quel point les Français sont privés d’accès aux soins. Ce n’est donc pas le Sénat, maison des élus locaux, qui va nous empêcher d’avancer !
M. Bernard Bonne. Ce n’est pas pareil !
M. Olivier Véran, ministre. Si, cela procède du même esprit ! On se trouve empêché à chaque fois que l’on veut progresser. Je ne serai pas le ministre qui freinera ces évolutions, et je l’assume aussi comme ancien député et médecin. Vous avez bien entendu le droit de penser autrement, mesdames, messieurs les sénateurs ; nous en débattrons certainement.
Voilà, dans l’esprit général, ce que je tenais à dire. Nous discuterons par la suite de ce qui manque au texte ou de ce qui peut être renforcé, c’est bien pour cela que le débat parlementaire a lieu.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Je veux souligner trois points.
En premier lieu, je ne partage pas totalement les inquiétudes qu’a exprimées Mme la rapporteure générale concernant la saturation du plafond de dette que la Cades peut amortir. Il est fixé à 92 milliards d’euros par la loi organique. En l’état de nos prévisions, je vous confirme qu’il serait plutôt de l’ordre de 105 à 110 milliards d’euros. Nous considérons toutefois que le caractère assez mouvant des hypothèses macroéconomiques, dans un sens plutôt positif au demeurant, peut nous permettre de passer ce cap difficile. À défaut, il nous faudra évidemment prendre des mesures propres à garantir la bonne gestion de cette dette.
En deuxième lieu, nous sommes en désaccord avec un certain nombre d’expressions, notamment celles qui sont relatives à la solidarité interbranches. Je pense à la fois au transfert que nous proposons de la branche famille vers la branche maladie concernant la prise en charge des indemnités journalières liées à la garde des enfants – cela ne nous paraît pas incohérent – et au transfert opéré de la branche AT-MP vers la branche maladie.
Ce dernier transfert est le fruit d’une mission conduite six mois durant sous l’autorité d’un magistrat de la Cour des comptes. Chacun a pu prendre connaissance de la qualité des travaux, de la précision du diagnostic et, surtout, de la très grande documentation des solutions proposées. Nous sommes restés dans une fourchette extrêmement basse, à hauteur de 1,2 milliard d’euros. C’est plus que les années précédentes, mais il y a certainement des facteurs d’explication.
En matière d’amélioration, le rapport de la mission formule plusieurs préconisations. Celles-ci constituent non pas une remise en cause de la pertinence de ce qui a été réalisé jusqu’alors, mais plutôt une recherche de nouvelles solutions, pour que les déclarations soient plus fiables et pour nous éviter ce jeu comptable à l’avenir.
En troisième lieu, je veux dire un mot de la trajectoire financière. Je partage les interrogations du rapporteur pour avis de la commission des finances sur le niveau de déficit, qui n’est pas soutenable à long terme. Je présenterai des amendements tendant à réviser l’état B, qui retrace le scénario macroéconomique et pluriannuel des finances sociales, afin d’abaisser cette prévision de déficit. Si ces amendements sont adoptés, le déficit s’établira à 39 milliards d’euros pour 2020, 33,5 milliards d’euros pour 2021 – nous craignions pourtant en juin dernier qu’il s’élève à 38,5 milliards d’euros – et 20,4 milliards d’euros pour 2022, plutôt qu’à 25 milliards d’euros.
Nous avons fait le choix d’une absence de mesures brutales. Je le dis notamment à l’endroit du rapporteur Savary, qui appelait de ses vœux des mesures bien plus radicales. Nous avons fait le choix de la croissance. La quasi-totalité de notre stratégie de rétablissement des comptes publics, au-delà des finances sociales, passe par la croissance et la volonté de ne pas l’étouffer. Lors de la crise de 2010, la croissance avait justement été étouffée en raison d’une intention de consolidation et de redressement trop rapide, ce qui avait empêché d’engendrer des recettes supplémentaires.
Aujourd’hui, nous faisons un choix très différent, notamment par la mise en œuvre de mesures d’urgence – chômage partiel pour le maintien des compétences dans les entreprises, prêts garantis par l’État (PGE) et fonds de solidarité pour le maintien de la trésorerie –, dans la perspective de faciliter un rebond de la croissance.
Les quelques centaines d’amendements à examiner nous permettront d’avoir l’ensemble de ces débats. Pour l’heure, je partage ce qu’affirmait Olivier Véran il y a un instant. Ces sujets étant par essence complexes, les attentes peuvent être contradictoires.
J’ai entendu Mme Deseyne dire que le texte ne prévoyait aucune mesure d’économie ni de redressement, que le budget n’était pas soutenable. Elle proposait ainsi un parcours plus rapide de retour à l’équilibre. Quelques instants après, Mme Lassarade nous a demandé de faire plus pour les personnels médicaux et les établissements. C’est assez logique, cela dépend essentiellement de l’angle retenu pour examiner un texte. Chacun est ainsi livré à ses contradictions, voire à ses difficultés.
M. René-Paul Savary. Vous aussi avez des contradictions ! (Mme Florence Lassarade opine.)
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Les différents amendements nous permettront certainement de trancher tout cela.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Monsieur Véran, je souhaite connaître votre avis sur la méthode de travail entre le Gouvernement et le Parlement, notamment avec le Sénat.
Alors que nous nous apprêtons à examiner les premiers articles de ce PLFSS, et que les explications des évolutions de la trajectoire budgétaire ont été faites, vous avez annoncé au cours de la discussion générale vouloir présenter un amendement tendant à créer une rallonge supplémentaire de 1,7 milliard d’euros. Cette rallonge n’étant pas encore votée, nous ne savons pas à quelle grande ligne budgétaire elle sera affectée ni de quelle manière elle sera financée. Elle pose question quant aux capacités d’anticipation du Sénat dans son dialogue avec le Gouvernement.
L’Agence France Presse (AFP), dont les informations sont relayées sur les réseaux sociaux, a indiqué que le Premier ministre a annoncé cet après-midi une rallonge de 120 millions d’euros – 60 millions d’euros seront engagés dès cette année –, justement en faveur des oubliés du Ségur de la santé dans le secteur médico-social.
Nous allons donc voter un amendement que nous ne connaissons pas, pour un crédit d’un montant de 60 millions d’euros. Que pensez-vous d’une telle méthode de travail ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées des groupes GEST, SER et CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre. Même si vous jugez parfois que je ne dépense pas assez, il se trouve que je dépense trop, et que Bercy doit venir compenser les dépenses excessives que j’ai engagées ici ou là. (Sourires.) Pour le détail, je vous laisse voir avec le plombier en chef ; c’est lui le responsable des tuyaux. (Nouveaux sourires.)
Il existe des simulations des surcoûts engendrés par la crise du covid. Force est de constater qu’une partie d’entre eux est survenue bien après le dépôt du PLFSS en conseil des ministres.
Nous vous proposons ainsi de voter 4,9 milliards d’euros de provisions de dépenses en vaccins et en matériel destiné à Santé publique France pour l’année à venir. Au fur et à mesure de l’exercice, nous verrons si nous avons dépensé plus ou moins que la somme prévue à l’origine. Par moments, nous sommes contraints de voter des projets de loi de finances rectificative (PLFR) ; il est d’ailleurs prévu qu’un PLFR soit discuté alors même que le PLF est en cours d’examen.
Monsieur le rapporteur, je vois dans votre remarque la volonté d’avoir une maîtrise parfaite des dépenses. C’est tout à fait légitime de votre part. Cependant, le budget est un exercice annuel. C’est seulement au dernier moment, dans les dernières minutes, que l’on procède aux ajustements nécessaires induits par des dépenses supplémentaires. Nous ne faisons rien de plus, rien de moins, et ce n’est certainement pas une marque d’irrespect envers le Parlement.
M. le président. La discussion générale est close.
Mes chers collègues, dans la mesure où la commission des affaires sociales doit se réunir, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq pour l’examen des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.)
PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.
Je rappelle que la discussion générale a été close.
Rappel au règlement
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour un rappel au règlement.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Sur le fondement de l’article 36 de notre règlement, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste souhaite interpeller le président du Sénat et le ministre chargé des relations avec le Parlement sur le respect du droit d’amendement des groupes parlementaires.
Le 18 octobre dernier, le Président de la République a déclaré qu’une réforme constitutionnelle s’imposait sur le droit d’amendement, car nous aurions « tous collectivement contribué à une inflation législative » et à « l’illisibilité de notre droit ».
Alors que le Sénat entame l’examen du budget de la sécurité sociale, nous tenons à dénoncer le fait que bon nombre d’amendements aient été déclarés irrecevables sur le fondement de la Constitution. Ainsi, sur les 1 034 amendements déposés par l’ensemble des groupes du Sénat, seuls 574 ont été déclarés recevables pour l’examen du texte en séance publique.
Cette critique, nous la formulons chaque année, mais nous avons cette fois le sentiment d’avoir atteint un point de non-retour. Certains de nos amendements sont déclarés irrecevables parce qu’ils n’ont pas d’impact sur le financement de la sécurité sociale ; d’autres sont irrecevables parce qu’ils ont un peu d’impact sur ce financement. On marche sur la tête !
En quoi l’expérimentation de la prescription par les orthoptistes de lentilles ou de verres correcteurs entraînerait-elle davantage une dépense publique que la généralisation de ce dispositif ?
J’appelle solennellement les groupes politiques à prendre conscience de la réduction du droit d’opposition et du droit constitutionnel d’amendement, sachant que notre temps de parole pour défendre les amendements a été parallèlement diminué. Nous avons la désagréable impression que le but est d’en finir au plus vite avec l’examen de ce PLFSS. Les sommes impliquées sont pourtant bien plus importantes que dans le cadre du PLF, pour lequel un examen de trois semaines est prévu. Ainsi, pour 2022, les recettes de l’État s’élèvent à 310 milliards d’euros, quand celles de la sécurité sociale atteignent 440 milliards d’euros, et ses dépenses 460 milliards d’euros.
Mme la présidente. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue, pour lequel vous avez largement dépassé votre temps de parole.
Nous passons à la discussion des articles.
projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022
PREMIÈRE PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2020
Article 1er
Au titre de l’exercice 2020, sont approuvés :
1° Le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :
(En milliards d’euros) |
||||
Recettes |
Dépenses |
Solde |
||
Maladie |
209,8 |
240,2 |
-30,5 |
|
Accidents du travail et maladies professionnelles |
13,5 |
13,6 |
-0,1 |
|
Vieillesse |
241,2 |
246,1 |
-4,9 |
|
Famille |
48,2 |
50,0 |
-1,8 |
|
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
499,3 |
536,6 |
-37,3 |
|
Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse |
497,2 |
537,0 |
-39,7 |
; |
2° Le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :
(En milliards d’euros) |
||||
Recettes |
Dépenses |
Solde |
||
Maladie |
208,3 |
238,8 |
-30,4 |
|
Accidents du travail et maladies professionnelles |
12,1 |
12,3 |
-0,2 |
|
Vieillesse |
135,9 |
139,6 |
-3,7 |
|
Famille |
48,2 |
50,0 |
-1,8 |
|
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
391,6 |
427,8 |
-36,2 |
|
Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse |
390,8 |
429,4 |
-38,7 |
; |
3° Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :
(En milliards d’euros) |
||||
Recettes |
Dépenses |
Solde |
||
Fonds de solidarité vieillesse |
16,7 |
19,1 |
-2,5 |
; |
4° Les dépenses constatées relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, s’élevant à 219,4 milliards d’euros ;
5° Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;
6° Les recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, lesquelles sont nulles ;
7° Le montant de la dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, s’élevant à 16,1 milliards d’euros.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 2
Est approuvé le rapport figurant en annexe A à la présente loi présentant un tableau, établi au 31 décembre 2020, retraçant la situation patrimoniale des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents ou la couverture des déficits, tels qu’ils sont constatés dans les tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2020 figurant à l’article 1er.
Annexe A
Rapport retraçant la situation patrimoniale, au 31 décembre 2020, des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents et la couverture des déficits constatés pour l’exercice 2020
I. – Situation patrimoniale de la sécurité sociale au 31 décembre 2020 :
(En milliards d’euros) |
|||||
Actif |
2020 (net) |
2019 (net) |
Passif |
2020 |
2019 |
Immobilisations |
7,3 |
7,4 |
Fonds propres |
-86,7 |
-61,4 |
Immobilisations non financières |
5,2 |
5,2 |
Dotations |
19,0 |
20,7 |
Régime général |
0,2 |
0,2 |
|||
Prêts, dépôts de garantie |
1,3 |
1,4 |
Autres régimes |
7,3 |
7,0 |
Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) |
0,2 |
0,2 |
|||
Avances/ prêts accordés à des organismes de la sphère sociale |
0,9 |
0,9 |
Fonds de réserve pour les retraites (FRR) |
11,3 |
13,4 |
Réserves |
22,9 |
22,2 |
|||
Régime général |
3,8 |
3,8 |
|||
Autres régimes |
7,2 |
7,3 |
|||
FRR |
11,9 |
11,1 |
|||
Report à nouveau |
-108,1 |
-122,6 |
|||
Régime général |
5,1 |
-4,6 |
|||
Autres régimes |
-0,2 |
-4,1 |
|||
Fonds de solidarité vieillesse (FSV) |
-3,7 |
-8,4 |
|||
CADES |
-109,3 |
-105,5 |
|||
Résultat de l’exercice |
- 22,9 |
15,4 |
|||
Régime général |
-36,2 |
-0,3 |
|||
Autres régimes |
-1,0 |
+0,1 |
|||
FSV |
-2,5 |
-1,6 |
|||
CADES |
16,1 |
16,3 |
|||
FRR |
0,7 |
0,8 |
|||
Écart d’estimation (réévaluation des actifs du FRR en valeur de marché) |
2,4 |
2,9 |
|||
Provisions pour risques et charges |
20,9 |
17,2 |
|||
Actif financier |
68,1 |
57,9 |
Passif financier |
178,8 |
132,5 |
Valeurs mobilières et titres de placement |
39,2 |
45,1 |
Dettes représentées par un titre (obligations, billets de trésorerie, europapiers commerciaux) |
165,5 |
118,6 |
Régime général |
0,0 |
0,0 |
Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) |
62,5 |
26,5 |
Autres régimes |
13,8 |
12,9 |
CADES |
103,0 |
92,0 |
CADES |
0,0 |
0,0 |
Dettes à l’égard d’établissements de crédits |
7,3 |
6,4 |
FRR |
25,3 |
32,3 |
Régime général (ordres de paiement en attente) |
6,0 |
5,1 |
Encours bancaire |
26,9 |
12,1 |
Autres régimes |
0,4 |
0,3 |
Régime général |
10,6 |
1,5 |
CADES |
1,0 |
1,0 |
Autres régimes |
5,6 |
6,4 |
|||
FSV |
0,0 |
0,0 |
Dépôts reçus |
0,4 |
0,4 |
CADES |
9,9 |
3,1 |
ACOSS |
0,4 |
0,4 |
FRR |
0,7 |
1,1 |
|||
Créances nettes au titre des instruments financiers |
2,0 |
0,6 |
Dettes nettes au titre des instruments financiers |
0,0 |
0,2 |
CADES |
1,7 |
0,3 |
ACOSS |
0 |
0,2 |
FRR |
0,3 |
0,3 |
Autres |
5,4 |
6,8 |
Autres régimes |
5,3 |
5,7 |
|||
CADES |
0,1 |
1,1 |
|||
Actif circulant |
101,6 |
83,4 |
Passif circulant |
64,1 |
60,4 |
Créances de prestations |
12,1 |
9,2 |
Dettes et charges à payer à l’égard des bénéficiaires |
29,0 |
30,5 |
Créances de cotisations, contributions sociales et d’impôts de sécurité sociale |
16,9 |
8,5 |
Dettes et charges à payer à l’égard des cotisants |
4,4 |
2,1 |
Produits à recevoir de cotisations, contributions sociales et autres impositions |
52,1 |
47,8 |
|||
Créances sur entités publiques et organismes de sécurité sociale |
13,1 |
10,9 |
Dettes et charges à payer à l’égard d’entités publiques et organismes de sécurité sociale |
16,4 |
11,4 |
Produits à recevoir de l’État |
1,9 |
0,6 |
|||
Autres actifs |
5,5 |
6,3 |
Autres passifs |
14,2 |
16,5 |
Total de l’actif |
177,0 |
148,7 |
Total du passif |
177,0 |
148,7 |
Sur le champ des régimes de base, du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) et du Fonds de réserve pour les retraites (FRR), le passif net (ou « dette ») de la sécurité sociale, mesuré par ses fonds propres négatifs, et qui recouvre pour l’essentiel le cumul des déficits passés restant à financer, s’élevait à 86,7 milliards d’euros au 31 décembre 2020. L’encours de dette sur les produits techniques à fin 2020 était de l’ordre de 17 %, soit environ deux mois de recettes.
Alors qu’il atteignait un niveau très élevé à la fin de la précédente décennie, en partie imputable à la crise économique, le passif net a été un recul constant entre 2014 et 2019 (baisse de 7,9 milliards d’euros entre 2015 et 2016, de 12,8 milliards d’euros entre 2016 et 2017, de 11,6 milliards d’euros entre 2017 et 2018, et de 15,6 milliards d’euros entre 2018 et 2019). Tout au long de la période, la réduction des déficits des régimes de base et du FSV et les bons résultats de la CADES et du FRR ont conduit à dégager un résultat consolidé positif sur le périmètre d’ensemble de la sécurité sociale.
Cependant, dans le contexte de crise sanitaire et économique, le passif net connaît une inversion de tendance marquée en 2020, il s’accroît de 25,3 milliards d’euros par rapport à 2019. Cette dégradation reflète le niveau exceptionnellement élevé des déficits des régimes de base et du FSV en 2020 (déficit de 39,7 milliards d’euros sur ce champ), dont l’effet n’est que partiellement compensé par les résultats de la CADES (16,1 milliards d’euros en 2020 reflétant l’amortissement de la dette portée par la caisse) et du portefeuille du FRR. Le résultat consolidé sur le périmètre d’ensemble de la sécurité sociale, retracé dans le tableau ci-dessus, est ainsi fortement déficitaire (déficit de 22,9 milliards d’euros en 2020, contre un résultat consolidé positif de 15,4 milliards d’euros en 2019).
Le financement du passif net de la sécurité sociale est assuré à titre principal par un recours à l’emprunt, essentiellement porté par la CADES et l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS). L’endettement financier net de la sécurité sociale, qui correspond à la différence entre les dettes financières et les actifs financiers placés ou détenus en trésorerie, suit donc en premier lieu les mêmes tendances que le passif net auquel il est fait référence ci-dessus, en subissant secondairement les effets de la variation du besoin en fonds de roulement lié au financement des actifs et passifs circulants (créances et dettes) et des acquisitions d’actifs immobilisés, qui ont également un impact sur la trésorerie. Après l’infléchissement observé entre 2015 et 2019, l’endettement financier s’est fortement accru en 2020 (110,6 milliards d’euros contre 74,6 milliards d’euros fin 2019), en cohérence avec l’évolution du passif net et l’augmentation marquée du besoin en fonds de roulement.
Évolution du passif net, de l’endettement financier net et des résultats comptables consolidés de la sécurité sociale depuis 2009
(En milliards d’euros) |
||||||||||||
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
2013 |
2014 |
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
|
Passif net au 31/12 (capitaux propres négatifs) |
-66,3 |
-87,1 |
-100,6 |
-107,2 |
-110,9 |
-110,7 |
-109,5 |
-101,4 |
-88,5 |
-77,0 |
-61,4 |
-86,7 |
Endettement financier net au 31/12 |
-76,3 |
-96,0 |
-111,2 |
-116,2 |
-118,0 |
-121,3 |
-120,8 |
-118,0 |
-102,9 |
-86,8 |
-74,6 |
-110,6 |
Résultat comptable consolidé de l’exercice (régimes de base, FSV, CADES et FRR) |
-19,6 |
-23,9 |
-10,7 |
-5,9 |
-1,6 |
+1,4 |
+4,7 |
+8,1 |
+12,6 |
+14,9 |
+15,4 |
-22,9 |
II. – Couverture des déficits et affectation des excédents constatés sur l’exercice 2020
Dans le cadre fixé par la loi organique n° 2010-1380 du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 a organisé le transfert à la CADES, dès l’année 2011, des déficits 2011 des branches Maladie et Famille du régime général. Elle a également prévu la reprise progressive, à compter de 2012, des déficits des années 2011 à 2018 de la branche Vieillesse du régime général et du FSV, dans la double limite de 10 milliards d’euros chaque année et de 62 milliards d’euros au total. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a étendu cette reprise progressive aux déficits 2012 à 2017 des branches Maladie et Famille.
L’article 26 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a modifié ce schéma et supprimé le plafond annuel de 10 milliards d’euros afin de tenir compte de conditions de financement à moyen et long termes particulièrement favorables. Il a ainsi ouvert la possibilité d’une saturation du plafond de 62 milliards d’euros dès 2016 et a conduit à reprendre un montant total de 23,6 milliards d’euros en 2016, correspondant au transfert de la totalité des déficits de la branche Famille et de la branche Maladie au titre de 2013 et 2014 et de ceux de la branche Vieillesse et du FSV au titre de 2015, ainsi que d’une partie du déficit de la branche Maladie au titre de 2015.
Le plafond de reprise ayant été saturé après les transferts intervenus en 2016, fin 2019, l’ACOSS portait en dette à court terme les déficits des derniers exercices. Son endettement financier brut atteignait 26,9 milliards d’euros au 31 décembre 2019.
Dans le contexte d’accroissement de la dette des régimes de base de sécurité sociale et du besoin de financement de l’ACOSS, l’article 1er de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie a prévu un transfert à la CADES d’un montant global de 136 milliards d’euros, organisé en plusieurs étapes.
Dans un premier temps, des versements effectués avant le 30 juin 2021 financent, dans la limite de 31 milliards d’euros, les déficits cumulés non repris constatés au 31 décembre 2019 de la branche Maladie du régime général, du FSV, de la branche Vieillesse du régime des non-salariés agricoles et de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL). Sur ce fondement, le décret n° 2020-1074 du 19 août 2020 et le décret n° 2021-40 du 19 janvier 2021 ont organisé des transferts de la CADES à hauteur de 20 milliards d’euros en 2020 et de 11 milliards d’euros en 2021. Dans un second temps, des versements à compter de 2021 ont vocation à financer, dans la limite de 92 milliards d’euros, les déficits cumulés des exercices 2020 à 2023 des branches Maladie, Vieillesse et Famille du régime général, du FSV et de la branche Vieillesse du régime des non-salariés agricoles.
Concernant la situation des branches et régimes en 2020, dans le contexte de la pandémie sanitaire, le déficit du régime général atteint 36,2 milliards d’euros et celui du FSV, 2,5 milliards d’euros. Les déficits des branches Maladie et Vieillesse se sont élevés respectivement à 30,4 et 3,7 milliards d’euros. Les branches Famille et Accidents du travail et maladies professionnelles, alors qu’elles étaient en excédent en 2019, ont enregistré des déficits respectifs de 1,8 et 0,2 milliard d’euros.
Concernant les régimes de base autres que le régime général et qui présentent une situation déficitaire en 2020, le résultat de la CNRACL ressort en déficit à -1,5 milliard d’euros en 2020. La CADES a repris les déficits des exercices 2018 et 2019 de la caisse lors du transfert intervenu en janvier 2021. Le régime de base de la caisse nationale des barreaux français affiche également un déficit en 2020, à hauteur de 0,02 milliard d’euros, contre un excédent de 0,06 milliard d’euros en 2019.
Concernant les autres régimes de base, la branche Retraite du régime des exploitants agricoles a de nouveau présenté un bénéfice en 2020, à hauteur de 0,01 milliard d’euros en 2020. Les transferts de la CADES en 2020 et 2021, d’un montant total de 3,6 milliards d’euros, ont permis de couvrir l’ensemble de ses déficits cumulés depuis 2011 (les déficits 2009 et 2010 avaient été repris par la CADES en 2011).
Les excédents du régime de retraite des professions libérales (0,1 milliard d’euros en 2020) et de la branche Vieillesse du régime de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (0,1 milliard d’euros en 2020) diminuent respectivement de 0,3 milliard d’euros et 0,1 milliard d’euros en 2020. Ces excédents sont affectés aux réserves des régimes concernés.
Les autres régimes présentent par construction des résultats annuels équilibrés ou très proches de l’équilibre. Il en est ainsi des branches et régimes intégrés financièrement au régime général (ensemble des branches Maladie des différents régimes de base depuis la mise en œuvre, en 2016, de la protection universelle maladie, branches Vieillesse de base du régime des salariés agricoles depuis 1963 et du régime social des indépendants jusqu’en 2017), des régimes de retraite équilibrés par des subventions de l’État (SNCF, RATP, régimes des mines et des marins) et des régimes d’employeurs (fonction publique de l’État, industries électriques et gazières), équilibrés par ces derniers. Concernant le régime des mines, les déficits passés cumulés de la branche Maladie ont par ailleurs été transférés à la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM) à hauteur de 0,7 milliard d’euros, en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’ensemble constitué de l’article 2 et de l’annexe A.
(L’article 2 et l’annexe A sont adoptés.)
Vote sur l’ensemble de la première partie
Mme la présidente. Je mets aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.
(La première partie du projet de loi est adoptée.)
DEUXIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2021
Article 3
I. – Les personnes participant à la campagne vaccinale dans le cadre de la lutte contre la covid-19 en centre de vaccination qui sont directement rémunérées pour cette activité par un organisme local d’assurance maladie et qui ne sont pas affiliées en tant que travailleurs indépendants au titre d’une autre activité sont affiliées à la sécurité sociale, au titre de leur participation à cette campagne, dans les conditions suivantes :
1° Les médecins salariés ou agents publics qui participent à la campagne vaccinale en dehors de l’exécution de leur contrat de travail ou de leurs obligations de service ainsi que les médecins retraités et les étudiants en médecine sont affiliés au régime général de sécurité sociale dans les conditions applicables aux travailleurs indépendants, ainsi qu’aux régimes prévus aux articles L. 640-1, L. 644-1 et L. 646-1 du code de la sécurité sociale. Les cotisations et contributions sociales assises sur les rémunérations issues de cette activité sont calculées sur la base d’un taux global fixé dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article L. 642-4-2 du même code ;
2° Les personnes ne relevant pas du 1° du présent I sont affiliées au régime général dans les conditions applicables aux personnes mentionnées à l’article L. 311-2 du code de la sécurité sociale. Ces personnes sont redevables de cotisations et contributions sociales assises sur les rémunérations perçues diminuées d’un abattement forfaitaire, fixé par décret, qui ne peut être ni inférieur à l’abattement prévu au premier alinéa du 1 de l’article 102 ter du code général des impôts ni supérieur au plus élevé des abattements prévus à la première phrase du cinquième alinéa du 1 de l’article 50-0 du même code.
Les cotisations et contributions sociales dues par les personnes mentionnées aux 1° et 2° du présent I sont précomptées par l’organisme local d’assurance maladie qui les rémunère pour le compte des organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 du code de la sécurité sociale. Les dispositions relatives aux garanties et aux sanctions prévues pour le recouvrement des cotisations et contributions sociales du régime général leur sont applicables.
Le présent I s’applique aux rémunérations perçues depuis le 1er janvier 2021.
II. – A. – À titre exceptionnel, par dérogation aux plafonds et délais de carence définis aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 161-22 du code de la sécurité sociale, aux deux premiers alinéas de l’article L. 643-6 du même code ainsi qu’au deuxième alinéa de l’article L. 84 et à l’article L. 85 du code des pensions civiles et militaires de retraite, une pension de vieillesse liquidée au titre d’un régime de base légalement obligatoire peut être entièrement cumulée avec les revenus tirés d’une activité reprise ou poursuivie, entre le 1er octobre 2020 et le 31 décembre 2021, en qualité de professionnel de santé au sens de la quatrième partie du code de la santé publique.
B. – Le présent II est applicable au régime de retraite défini à l’article 5 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte.
Mme la présidente. L’amendement n° 123, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 2, seconde phrase
Après la référence :
premier alinéa
insérer la référence :
du I
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement de précision rédactionnelle, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 124, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 6
1° Après le mot :
cumulée
insérer les mots :
, entre le 1er octobre 2020 et le 31 décembre 2021,
2° Supprimer les mots :
, entre le 1er octobre 2020 et le 31 décembre 2021,
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à clarifier le texte adopté par l’Assemblée nationale. Celui-ci peut être interprété comme ouvrant le bénéfice des dispositions dérogatoires en matière de cumul emploi-retraite aux revenus tirés, y compris à l’avenir, d’une activité reprise ou poursuivie en qualité de professionnel de santé entre le 1er octobre 2020 et le 31 décembre 2021.
Aux termes du présent amendement, les sommes concernées seraient donc bien les revenus générés uniquement durant les mois d’octobre 2020 à décembre 2021 au titre d’une activité reprise ou poursuivie.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3, modifié.
(L’article 3 est adopté.)
Article 3 bis (nouveau)
L’ordonnance n° 2020-505 du 2 mai 2020 instituant une aide aux acteurs de santé conventionnés dont l’activité est particulièrement affectée par l’épidémie de covid-19 est ainsi modifiée :
1° Après l’article 1er bis, il est inséré un article 1er ter ainsi rédigé :
« Art. 1er ter. – I. – Peuvent également bénéficier de l’aide mentionnée à l’article 1er, sur leur demande, les professionnels de santé libéraux, installés dans l’une des communes mentionnées à l’annexe 3 au décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, dans sa rédaction résultant du décret n° 2020-1770 du 30 décembre 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, ayant constaté une baisse d’activité au cours d’une période allant du 1er décembre 2020 jusqu’à une date fixée par décret, et au plus tard jusqu’au 30 avril 2021.
« II. – Une aide versée par la Caisse nationale de l’assurance maladie destinée aux médecins libéraux affectés par la répétition des déprogrammations au second semestre de l’année 2021 est instituée.
« Elle vise à garantir le maintien d’un niveau minimal d’honoraires, pour compenser la baisse des revenus d’activité au cours de la période allant du 1er juillet 2021 jusqu’à une date fixée par décret, et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2021, aux médecins signataires de la convention mentionnée à l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale exerçant une activité libérale dans un établissement de santé privé et répondant sur la période aux conditions cumulatives suivantes :
« 1° Leur activité, en raison de sa nature particulière, a subi une baisse significative par rapport à une activité normale ;
« 2° L’activité de l’établissement dans lequel ils exercent a été significativement impactée à des fins de maîtrise de l’épidémie de covid-19 ;
« 3° La région dans laquelle est situé l’établissement a connu une tension hospitalière soutenue.
« Les conditions d’application du présent article sont fixées par décret. » ;
2° À la fin du deuxième alinéa de l’article 3, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 ». – (Adopté.)
Article 4
I. – Au a de l’article L. 138-2 du code de la sécurité sociale, le taux : « 1,75 % » est remplacé par le taux : « 1,5 % ».
II (nouveau). – Le I s’applique à la contribution prévue à l’article L. 138-1 du code de la sécurité sociale due à compter de l’exercice 2021.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. L’article 4 prévoit un allégement de la taxe sur la vente en gros des spécialités pharmaceutiques. Si les grossistes-répartiteurs ont été en première ligne pour la fourniture des masques et des vaccins à nos concitoyens, le Gouvernement propose un allégement de 5 millions d’euros pour les laboratoires pharmaceutiques et de 30 millions pour les grossistes-répartiteurs. Cela représente 35 millions de recettes fiscales en moins pour la sécurité sociale.
On peut s’interroger sur les contreparties demandées par l’État. Selon l’association de consommateurs UFC-Que Choisir, 2 400 médicaments auraient manqué en 2020, soit quatre fois plus qu’en 2016. Notre groupe avait déposé un amendement, malheureusement déclaré irrecevable, tendant à faire passer de deux à quatre mois l’obligation de stock des laboratoires et des grossistes-répartiteurs.
Nous souhaiterions savoir si des mesures de lutte contre les pénuries de médicaments et de produits de santé leur sont imposées en contrepartie.
En pleine pandémie, un cadeau de 5 millions d’euros a été fait à l’industrie pharmaceutique. Sa principale entreprise française, Sanofi, a versé 4 milliards d’euros de dividendes à ses actionnaires début 2021. Cela pose une véritable question de choix économiques, voire de choix éthiques.
Le Gouvernement préfère accorder une baisse de fiscalité à des groupes pharmaceutiques incapables de produire un vaccin contre le covid-19 et qui, de surcroît, licencient en France de nombreux salariés, y compris des chercheurs. Cette mesure est injuste socialement et complètement incohérente d’un point de vue économique.
Mme la présidente. L’amendement n° 909 rectifié bis, présenté par Mme Poumirol, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou, Michau, Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise à supprimer cet article, qui a pour objet de réduire le taux de la taxe sur la vente en gros des spécialités pharmaceutiques.
En effet, la réduction proposée de ce taux ne nous semble pas pertinente, pour plusieurs raisons.
Premièrement, elle semble être un cadeau fiscal fait aux entreprises de ce secteur, dont l’objectif est de restaurer de manière mineure leur marge de 0,25 point.
Deuxièmement, cette baisse des recettes est estimée, pour la sécurité sociale, à 35 millions d’euros en 2021, puis à 37 millions d’euros en 2022 ; elle n’est pas compensée pour l’assurance maladie. Devant la situation déficitaire de la sécurité sociale, que nous dénonçons tous les jours, sur toutes les travées, il ne semble pas opportun de faire un tel cadeau aux grossistes-répartiteurs.
Cet amendement tend donc à maintenir la taxe sur la vente en gros des spécialités pharmaceutiques au taux actuellement en vigueur de 1,75 %.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous savons tous que la situation de la répartition pharmaceutique est compliquée, ce depuis plusieurs années. Elle a fait l’objet d’un certain nombre de rapports de la part de l’Autorité de la concurrence, de la Cour des comptes et de l’IGAS, qui ont rappelé que le modèle économique était à revoir.
N’oublions pas que les grossistes-répartiteurs sont l’un des seuls maillons de la chaîne de distribution. Ils ont agi avec détermination durant la crise sanitaire. En outre, ils sont les seuls à être tenus à des obligations de service public. C’est grâce aux grossistes-répartiteurs que les officines sont approvisionnées en continu – ils ont d’ailleurs des règles bien précises à respecter. Or leur situation économique n’est plus soutenable. Ils ont ainsi affiché une perte d’exploitation de l’ordre de 46 millions d’euros en 2018.
L’allégement de la taxe sur la vente en gros de médicaments est l’une des trois mesures envisagées par le Gouvernement pour restaurer les marges des grossistes-répartiteurs. Les deux autres consistent en l’augmentation par arrêté des marges réglementées et en l’instauration d’un forfait spécifique pour la distribution de médicaments conservés au froid. Par ailleurs, cet allégement bénéficiera très majoritairement aux grossistes-répartiteurs, pour 85 %.
Les laboratoires qui réalisent des ventes directes aux officines restent encore très minoritaires dans le circuit de distribution en ville. Toutefois, nous devrons rester attentifs à ce que ces ventes directes ne déstabilisent pas l’activité des grossistes-répartiteurs.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. L’intérêt à accompagner la reconstitution des marges des grossistes-répartiteurs a déjà fait l’objet d’un débat à l’Assemblée nationale. Les grossistes-répartiteurs contribuent à assurer l’approvisionnement en médicaments. Le Gouvernement émet donc, lui aussi, un avis défavorable, pour les mêmes raisons.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. J’entends les explications qui ont été apportées par Mme la rapporteure et M. le ministre. Les grossistes-répartiteurs ont en effet eu des difficultés, ce que je ne nie pas.
Mais ce qui me pose problème, monsieur le ministre, c’est que vous essayez de soulager les grossistes-répartiteurs en ayant recours, une nouvelle fois, aux exonérations de cotisations sociales. C’est une mauvaise idée ! On n’arrête pas d’entendre qu’il y a un trou terrible dans les caisses de la sécurité sociale.
Ces 35 millions d’euros ne représentent peut-être pas grand-chose par rapport à des milliards d’euros, mais, pour notre part, nous considérons qu’il est essentiel qu’ils restent dans les caisses de la sécurité sociale.
Il existe certainement d’autres solutions que les exonérations de cotisations sociales pour soulager les grossistes-répartiteurs. Alors qu’un allégement de 5 millions d’euros est octroyé aux industries pharmaceutiques – elles n’en ont cure, compte tenu des milliards d’euros de profit qu’elles réalisent –, je trouve que cette disposition est plus qu’une maladresse.
C’est moins les grossistes-répartiteurs que les solutions que vous préconisez qui nous posent problème. En règle générale, nous arrivons à avoir avec vous un dialogue, monsieur le ministre. C’est ce que j’attends de vous ce soir.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 909 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 765, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Avant le dernier alinéa de l’article L. 138-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’un grossiste-répartiteur est sanctionné en application de l’article L. 5423-5 du code de la santé publique, le chiffre d’affaires hors taxes pris en compte pour le calcul de l’assiette de la contribution prévue au présent article est majoré de 5 %. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Par cet amendement, nous entendons reprendre le rapport d’information Le médicament : l’urgence d’un changement de modèle !, remis par notre collègue député Pierre Dharréville en juillet dernier. Il pose la question du rôle et de la situation des grossistes-répartiteurs. Ces derniers jouent un rôle décisif dans l’acheminement des médicaments jusqu’aux patients. Cependant, l’organisation actuelle ne semble pas répondre aux besoins des malades. Parmi les grossistes-répartiteurs, on distingue les full liners, qui assurent la répartition, distribuant une large gamme de médicaments, des short liners, lesquels concentrent leur activité sur la vente directe de quelques références pourvoyeuses de marges importantes et n’assurent pas les missions de service public.
Attirés par la rentabilité du marché du médicament, les short liners ont, la plupart du temps, une activité d’import-export sur des produits contingentés par les laboratoires. Dès lors, ils ne respectent ni l’obligation de disposer d’un stock de médicaments ni celle de livrer les officines en vingt-quatre heures. Ces comportements déstabilisent la chaîne d’approvisionnement et portent atteinte à l’obligation de service public ; nous semblions partager ce point au sein de la commission des affaires sociales.
Afin d’encadrer ces pratiques, le présent amendement tend à majorer le chiffre d’affaires pris en compte pour le calcul de la contribution à laquelle les grossistes-répartiteurs sont soumis.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous sommes d’accord, les short liners posent problème en ce qu’ils détournent le secteur de la répartition pharmaceutique de ses obligations de service public.
Cependant, l’adoption de votre amendement aurait pour effet de majorer la taxe à laquelle est soumis un grossiste-répartiteur qui aurait déjà été sanctionné par une pénalité financière en application du code de la santé publique. Cela reviendrait à lui imposer une double peine.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Nous proposons, pour notre part, d’alléger la taxe de manière générale, même si nous partageons la volonté de pénaliser les short liners et – au-delà de l’anglicisme – les grossistes-répartiteurs qui ne respectent pas l’obligation de service public, que nous pouvons définir par ailleurs.
L’article 16 bis du PLFSS prévoit de renforcer les sanctions contre les grossistes-répartiteurs ne respectant pas les obligations de service public. D’une certaine manière, il satisfait votre amendement, même si ce n’est que partiellement. Il serait contradictoire d’alléger les cotisations dans l’article 4 et d’augmenter, de manière générale, l’assiette sur laquelle cette taxe est calculée. Je pense que vous trouverez quelques motifs de satisfaction lorsque nous examinerons l’article 16 bis.
Avis défavorable.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 125 est présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales.
L’amendement n° 880 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire et Gold, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la fin du quatrième alinéa de l’article 13 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021, le taux : « 1,3 % » est remplacé par le taux : « 2,6 % ».
La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter l’amendement n° 125.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement a pour objet de demander aux mutuelles de contribuer davantage en 2021, par solidarité, pour aider l’assurance maladie à régler les sommes importantes induites par la crise sanitaire.
Lors de l’examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, nous avions voté une contribution à hauteur de 1 milliard d’euros pour l’année 2020, et une autre à hauteur de 500 millions d’euros pour l’année 2021. Nous rajoutons 500 millions d’euros, soit une somme importante.
Pendant les confinements de l’année 2020, un certain nombre d’actes n’ont pas été réalisés, permettant un bénéfice évalué à 2,2 milliards d’euros pour les mutuelles. Nous pensons que cette contribution est juste et solidaire dans le contexte que nous avons vécu.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Gold, pour présenter l’amendement n° 880 rectifié.
M. Éric Gold. Comme Mme la rapporteure générale, nous proposons une augmentation de la contribution des mutuelles à la branche maladie de la sécurité sociale.
Compte tenu des économies réalisées par les organismes complémentaires pendant la crise et, dans le même temps, de l’augmentation inédite des dépenses de la branche maladie, il nous paraît naturel de porter cette contribution à 1 milliard d’euros, au lieu de 500 millions.
Nous demandons aux mutuelles de consentir un effort supplémentaire exceptionnel, une action de solidarité dans un contexte tout aussi exceptionnel où les comptes de la sécurité sociale sont entraînés dans le rouge.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. L’année dernière, nous avions proposé une mise à contribution exceptionnelle des organismes mutualistes à hauteur de 1,5 milliard d’euros : 1 milliard d’euros en 2020 et 500 millions d’euros en 2021.
Considérant que les économies de constatation dues à différents facteurs liés à la crise du covid rendaient légitime la contribution des organismes complémentaires au financement de la sécurité sociale, Oliver Véran et moi-même avions demandé à ces mutuelles et à ces organismes complémentaires de veiller à la stabilité de leurs tarifs et des cotisations de leurs différents assurés et bénéficiaires. Force est de constater que tel n’est pas le cas puisque la quasi-totalité des organismes complémentaires a annoncé une augmentation de leurs tarifs, à des niveaux qui semblent même supérieurs à l’inflation.
Après d’assez longues discussions, le Gouvernement a pris la décision de considérer que le prélèvement de 1,5 milliard d’euros restait opportun. Malgré notre désapprobation face à l’augmentation des tarifs, qu’Olivier Véran et moi-même avons illustrée en adressant un courrier à l’attention des organismes complémentaires pour leur dire notre regret et notre déception, l’avis du Gouvernement est défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. La discussion entre les mutuelles et le Gouvernement est au fond plus complexe. Si pendant la crise sanitaire l’activité des mutuelles a en effet fortement chuté, elle a maintenant très nettement repris. Si l’on compare la situation en 2021 à celle d’avant la crise, cette activité est, durant les premiers mois de 2021, en hausse de 5 % par rapport à la période correspondante en 2019. Cela invalide le prolongement du prélèvement exceptionnel sur les mutuelles, lesquelles ne manquent pas d’arguments en la matière. Par ailleurs, ces dernières pointent le fait que la mise en œuvre de la complémentaire santé solidaire a réduit, voire même supprimé, tout un pan de leur activité.
La recette la plus significative que vous souhaitez adopter dans ce PLFSS résulte d’un prélèvement sur le secteur mutualiste, et non pas sur les grandes entreprises ou sur les revenus des actions. On se pose donc forcément la question suivante : quelle est la place des mutuelles dans notre pays ?
En raison de l’élection présidentielle, le Gouvernement ne veut pas que les mutuelles augmentent leurs tarifs cette année. Mais que demande-t-on au secteur mutualiste ? En arrière-plan, le débat sur l’assurance maladie universelle, dite « grande sécu », pointe le bout du nez.
N’étant pas favorables à cette façon de procéder, nous ne voterons pas cette surtaxe que vous souhaitez imposer aux mutuelles.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous nous abstiendrons sur ces amendements, qui ont pour objet de rétablir la contribution exceptionnelle sur les organismes complémentaires d’assurance maladie à 1 milliard d’euros, au lieu des 500 millions d’euros prévus l’an dernier par le PLFSS.
L’an dernier, cette mise à contribution exceptionnelle des organismes complémentaires d’assurance maladie au profit de la branche maladie s’expliquait par le niveau des économies réalisées durant la pandémie, à hauteur d’environ 2 milliards d’euros. Depuis, la situation a évolué, et le Gouvernement a accepté de diviser par deux la contribution des complémentaires pour tenir compte de l’augmentation des dépenses de santé, en contrepartie d’une modération des tarifs.
L’annonce par certains organismes d’une hausse de leurs tarifs au niveau de l’inflation a remis en cause l’engagement pris par les organismes complémentaires de maintenir leurs tarifs au même niveau que l’an dernier, en échange de la réduction de la taxation.
Nous tirons trois conclusions de cet épisode.
Tout d’abord, il est difficile de négocier avec les organismes complémentaires, tant est forte la diversité des acteurs qu’ils représentent. Ainsi, les assureurs n’ont clairement pas les mêmes intérêts que les mutuelles familiales ou les mutuelles de la fonction publique.
Ensuite, nous devons constater l’inefficacité d’un mécanisme qui consiste à augmenter une taxe sur les complémentaires d’assurance, entraînant une augmentation des tarifs, et fait in fine peser sur les adhérents les coûts supplémentaires, ce qui est complètement injuste.
Enfin, cette taxe symbolique pose avant tout la question du financement de la sécurité sociale. Nous gardons à cet égard un intérêt certain pour une « grande sécurité sociale », à condition que celle-ci repose sur les cotisations des salariés et des employeurs et assure un remboursement à 100 % des dépenses de santé.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je ne reprendrai pas les arguments avancés par Bernard Jomier. Les chiffres sont là pour le prouver, il y a effectivement un rattrapage au premier semestre des soins déprogrammés du fait de la covid.
L’année dernière, le Sénat avait voté la différenciation des taux de taxe entre, d’un côté, les mutuelles, qui, étant à but non lucratif, peuvent redéployer leurs excédents pour mener des opérations de prévention ou proposer un moratoire sur l’augmentation des tarifs, et, d’un autre côté, les assurances, qui poursuivent un but lucratif. Si nous nous étions réjouis de ce vote, cette mesure n’avait pas été reprise par l’Assemblée nationale.
Le Gouvernement ne fait aucune différence entre les acteurs concernés, ceux à but non lucratif de l’économie sociale et solidaire et ceux à but lucratif. C’est dommage, car il faudrait voir qui augmente vraiment les tarifs. A priori, les mutuelles n’ont pas encore établi les chiffres qui ont été présentés à la vindicte publique, et qui émanent peut-être de certaines assurances.
La taxe de solidarité additionnelle (TSA) est passée de 190 millions d’euros en 1999 à 3,24 milliards d’euros en 2020. C’est l’une des raisons de l’augmentation des tarifs des mutuelles. Si le Gouvernement s’intéresse tant au pouvoir d’achat, il est temps qu’il cesse de taxer les mutuelles.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 125 et 880 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 126 est présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales.
L’amendement n° 881 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La compensation à la branche maladie du coût réel du transfert de l’Agence nationale de santé publique au titre de l’année 2021 est assurée selon des modalités définies en loi de finances.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme la rapporteure générale, présenter l’amendement n° 126.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement a pour objet de fixer une compensation à son coût réel du budget réel de l’Agence nationale de santé publique (ANSP), plus connue sous le nom de Santé publique France.
En effet, dès le transfert de cette agence à la sécurité sociale, en 2020, son budget est passé de 150 millions d’euros à 4,8 milliards d’euros, du fait de la nécessité de procéder à des achats massifs de divers matériels médicaux pour répondre à la crise sanitaire – masques, tests, etc. En 2021, une nouvelle augmentation de 4,3 milliards d’euros a abondé le budget de l’Agence.
Cela confirme la pertinence de l’analyse du Sénat, qui s’était opposé au transfert de l’ANSP à la sécurité sociale au motif que cette agence remplit des missions de l’État. En outre, le Gouvernement a profité de ce transfert pour s’exonérer de toute demande d’autorisation du Parlement quand il a augmenté massivement les crédits de l’Agence par de simples arrêtés ministériels.
Il convient a minima que la sécurité sociale soit compensée à due concurrence des coûts extraordinaires intervenus dès la première année du transfert. Par la suite, la question du recalibrage de cette compensation se posera.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 881 rectifié.
M. Bernard Fialaire. Je reprends à mon compte l’argumentation de notre rapporteure. La situation nous apparaît aujourd’hui inacceptable.
Nous considérions au moment où a été décidé le transfert de Santé publique France du budget de l’État vers celui de la sécurité sociale qu’il s’agissait d’une erreur, puisque cette agence, qui remplit des missions de l’État, devait demeurer à ce titre dans le budget de l’État. La crise sanitaire nous a malheureusement donné raison : ce transfert a considérablement plombé les comptes de la sécurité sociale, puisque le budget de Santé publique France a augmenté de plus de 4 milliards d’euros.
Plutôt que d’accepter cette situation qui met durablement à mal notre système d’assurance sociale, et qui pourrait se répéter lors de prochaines crises sanitaires, nous souhaitons poser le principe d’une compensation à son coût réel du budget de Santé publique France.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Nous considérons que Santé publique France assure des missions qui relèvent de la protection sociale, de la protection de la santé. Ce débat, que nous avons eu les années précédentes, met au jour des désaccords récurrents entre le Sénat et le Gouvernement. Nous considérons qu’il est logique que le budget de Santé publique France, même s’il est plus important du fait d’une épidémie, relève de la sécurité sociale.
Un autre débat évoqué lors de la discussion générale est présent en filigrane : celui qui porte sur la perméabilité ou l’imperméabilité entre les comptes sociaux et les comptes de l’État.
J’ai déjà eu l’occasion de le dire devant le Sénat, je ne crois pas à l’imperméabilité ou à l’étanchéité. Je ne crois pas que les comptes de la sécurité sociale puissent être équilibrés au prix d’un déséquilibre durable des comptes de l’État. De la même manière, je ne crois pas que les comptes de l’État puissent être équilibrés au prix d’un déséquilibre durable des comptes de la sécurité sociale.
Le contribuable et l’assuré social sont très souvent la même personne, même si, je le sais, il peut y avoir si des nuances et des différences. Je crois surtout à l’universalité de la recette publique, qu’elle soit issue de cotisations ou d’impôts.
Pour toutes ces raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je rappelle que Santé publique France est née du regroupement de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes), de l’Institut de veille sanitaire (InVS) et de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Éprus). Sa création était prévue dans la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, présentée par Marisol Touraine, dont j’étais le rapporteur au Sénat.
Le financement de l’Inpes, de l’InVS et de l’Éprus était à l’époque inscrit dans la loi de finances, et non dans la loi de financement de la sécurité sociale. Je ne sais pas pourquoi il a été décidé que l’assurance maladie devait financer Santé publique France, alors que les missions de celle-ci relèvent a priori de la prévention.
Les plans de prévention, qu’il s’agisse du plan contre le cancer, du programme national nutrition santé (PNNS) ou du plan de lutte contre l’obésité, étaient tous des plans d’État dont le financement figurait dans la loi de finances. Il n’y a aucune raison pour que Santé publique France soit financée par l’assurance maladie, laquelle est chargée de rembourser les frais médicaux et non de faire de la prévention.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 126 et 881 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.
Article 5
I. – L’article 50 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021 est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa du I est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Lorsqu’un contrat ou un avenant au précédent contrat a pour seul objet de concourir à la compensation des charges résultant d’opérations d’investissements structurants, il peut être conclu jusqu’au 31 décembre 2028. Les versements interviennent avant le 31 décembre 2030. » ;
2° Le V est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa du présent V, la dotation ou la fraction de la dotation concourant à la compensation des charges résultant d’opérations d’investissements structurants peut être comptabilisée en plusieurs fois en fonction de l’échéancier des versements. »
II (nouveau). – Le Gouvernement adresse au Parlement un rapport annuel d’information sur le versement de la dotation mentionnée au I. Ce rapport dresse la liste des établissements bénéficiaires de cette dotation et du montant qui leur est versé.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 127 est présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales.
L’amendement n° 767 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 882 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter l’amendement n° 127.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je vais expliquer les raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de l’article 5, ainsi que la position défendue de manière constante par le Sénat depuis l’an dernier.
Oui, il faut investir dans l’hôpital public, nous en sommes tous d’accord. Et oui, monsieur le ministre, il faut reprendre une partie de la dette hospitalière, tout simplement pour donner aux hôpitaux la capacité de réinvestir. Tel était l’objet du plan de reprise d’un tiers de la dette hospitalière annoncé en novembre 2019, durant l’examen au Sénat du PLFSS 2020.
Mais force est de constater que ce plan de reprise de la dette, remaquillé au sein du plan d’investissement de 19 milliards d’euros du Ségur de la santé, est devenu illisible. Alors que l’on nous annonçait l’attribution aux hôpitaux de 6 milliards d’euros par le fonds pour la modernisation et l’investissement en santé (FMIS), au titre du plan de relance sur les investissements structurants, ledit fonds est finalement chargé des investissements courants.
On nous disait que les 13 milliards d’euros transférés à la Cades par la loi du 7 août 2020 relevaient de la dette sociale. Nous estimions, pour notre part, que la dette des hôpitaux ne devait pas être portée par la Cades.
Mais qu’est devenu ce transfert de 13 milliards d’euros à la Cades ? D’une reprise de dettes passées, le financement apporté par la Cades aux établissements via les dotations de la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM) est finalement devenu un dispositif de soutien à l’investissement courant dans le PLFSS pour 2021.
Nous avions dénoncé ce dévoiement de la Cades la transformant en fonds d’investissement, puis en vecteur de financement de l’investissement structurant, ce que l’article 5 confirme en prévoyant des possibilités de reporter la contractualisation pour ces projets structurants.
Mais quel serait le suivi de ce grand plan, et quelle forme prendrait sa justification annuelle devant le Parlement ? Surtout, quel serait son impact sur la branche maladie, qui n’a comme lien avec ces dotations qu’une imputation comptable fictive ?
Pour toutes ces raisons, la commission souhaite la suppression de cet article.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 767.
Mme Laurence Cohen. Nous partageons l’analyse de Mme la rapporteure. L’an dernier, le Gouvernement s’était engagé à reprendre 13 milliards d’euros de la dette hospitalière pour permettre les investissements nécessaires à la modernisation des hôpitaux. S’il s’agit d’une bonne chose, nous avions tout de même dénoncé le fait que ne soit pas reprise la totalité de la dette, c’est-à-dire 30 milliards d’euros.
D’une part, derrière cette annonce, le Gouvernement a transféré la dette à la Cades, en laissant à la sécurité sociale le soin de rembourser une dette qui n’était pas la sienne puisqu’il s’agissait en majorité de dette immobilière.
D’autre part, la reprise de la dette des établissements de santé s’effectue en échange d’une contractualisation avec les agences régionales de santé (ARS), laquelle prévoit que les directions hospitalières s’engagent à réaliser des économies sur leurs dépenses de fonctionnement. Le Gouvernement a supprimé le Comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins hospitaliers (Copermo), mais l’a immédiatement ressuscité sous la forme de contrats de soutien à l’investissement et à la transformation du service public hospitalier.
Selon un rapport de l’inspection générale des finances (IGF) sur l’évaluation de la dette hospitalière, « selon les territoires, il peut s’agir de développer les filières de soins, […] fusionner des services », de les mutualiser. Nous l’avons dit, à l’heure où les hôpitaux ont besoin de moyens financiers pour ouvrir des lits et embaucher du personnel, il est au contraire nécessaire de leur donner les marges de manœuvre qui leur permettent de se renforcer, sans opposer dépenses d’investissement et dépenses de fonctionnement.
Cet amendement de suppression, qui va dans le sens de la philosophie de la commission, vise à refuser le transfert de la dette à la sécurité sociale, ainsi que les conditions de reprise de la dette pour les hôpitaux, auxquels on impose finalement de nouvelles mesures de restriction.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 882 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Nous considérons que la reprise de la dette hospitalière n’a pas à figurer dans la loi de financement de la sécurité sociale. C’est pourquoi nous proposons également la suppression de l’article 5.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Nous retrouvons le débat précédent sur l’étanchéité supposée entre les comptes de la sécurité sociale et ceux de l’État.
Par ailleurs, le plan d’investissement pour les hôpitaux s’élève à hauteur de 19 milliards d’euros, soit deux fois et demie l’addition des plans de 2007 et 2012. Il est attendu par les hôpitaux pour financer autant les investissements immédiats nécessaires à leur fonctionnement quotidien que leurs investissements structurants. Ce matin, le ministre de la santé a annoncé la liste des investissements pour la Normandie, et j’avais la chance – pardonnez-moi ce tropisme qui surprendra peu ceux qui me connaissent – d’annoncer la liste des investissements pour le département de l’Ardèche.
Nous avons aussi prévu de désendetter les hôpitaux à hauteur de 12 milliards d’euros, pour rétablir à la fois leur capacité financière et leur capacité d’investissement.
Nous considérons que la Cades doit amortir une dette sociale. L’investissement et l’amélioration des conditions de fonctionnement et d’exercice des hôpitaux relèvent d’une logique de protection sociale. Il est donc tout à fait logique et cohérent que les modalités de financement soient celles que nous avons prévues.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces trois amendements identiques.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. J’étais déjà intervenu l’an dernier pour dire que les déficits des hôpitaux s’expliquent aussi par des investissements matériels.
Entre 2012 et 2017, l’Ondam hospitalier a augmenté de moins de 2 %. Les hôpitaux pouvaient donc seulement assumer les dépenses de fonctionnement, payer les salaires, et non pas investir ; pour cela, il aurait fallu un Ondam en croissance de 3 % à 4 %.
Je ne suis pas d’accord pour que la Cades paie l’intégralité de la dette, mais une partie relève de la protection sociale. En conséquence, je m’abstiendrai.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Il y a une dizaine d’années, j’avais présenté avec notre ancien collègue Jacky Le Menn, sénateur socialiste de Bretagne, un rapport sur la tarification à l’activité (T2A), dans lequel nous disions clairement que les investissements immobiliers hospitaliers relevaient non pas de l’assurance maladie mais de l’État. Il n’y a aucune raison pour que la sécurité sociale rembourse les prêts immobiliers – il convient de se référer, à cet égard, au fonctionnement de l’éducation nationale. En revanche, elle prend en charge les dépenses liées à l’achat d’équipements médicaux, de type IRM par exemple.
Je voterai évidemment les amendements proposés, des deux mains si c’était possible.
Mme la présidente. Mais cela ne fera qu’une voix, monsieur Milon ! (Sourires.)
La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je partage largement les constats faits par Élisabeth Doineau et Laurence Cohen sur les fragilités de ce dispositif, et même sur son côté inacceptable.
Lors de l’examen de la loi relative à la dette sociale et à l’autonomie du 7 août 2020, le Sénat a transféré plus de 100 milliards d’euros à la Cades. Nous avons dénoncé ce transfert, qui prive la sécurité sociale d’une part de son budget et fait porter une charge d’une dizaine de milliards d’euros par an sur la Cades, cet argent n’étant pas injecté dans l’amélioration de la protection sociale.
Le dispositif a été annoncé à grands coups de trompettes, le Premier ministre nous expliquant que le moment était historique, que c’était formidable, et qu’en transférant à la Cades un tiers de la dette des hôpitaux, les capacités d’investissement de ceux-ci se trouveraient libérées. Un an et demi plus tard, à peu près rien n’a été fait, aucun euro n’a été débloqué. Le calendrier a été reporté à 2028 ou 2030, à des calendes dont je tairai le nom pour ne pas fâcher certains de nos amis européens. (Sourires.)
Faut-il pour autant ne pas discuter des conditions de ce transfert ? Au contraire ! Nous devons débattre de la façon dont ces 13 milliards d’euros vont être débloqués et investis. Or le projet actuel est insatisfaisant, à cause des termes « investissements structurants », de l’échéance retenue, ou de la nature des négociations, lesquelles se dérouleraient exclusivement entre le directeur général de l’ARS et le directeur de l’hôpital, sans que d’autres instances – par exemple, le conseil de surveillance de l’établissement – ne soient consultées. Nous voulons discuter de ces différents points.
Nous ne souscrivons donc pas à ces amendements de suppression, dont l’adoption nous priverait de ce débat.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. J’aurais bien aimé que les hôpitaux se soient endettés pour construire de l’immobilier très moderne. Mais, de fait, c’est l’insuffisance de l’Ondam qui a créé la dette hospitalière !
Quelque 80 % des hôpitaux affichaient un taux d’investissement avoisinant 3 %. La vétusté des locaux est absolument incroyable. Il s’agit de reprendre une dette qui s’explique non pas la modernisation de nos hôpitaux, mais par l’insuffisance de l’Ondam, et qui a tellement pesé sur les capacités d’autofinancement des hôpitaux que ces derniers n’ont pas investi.
Nous souhaitons qu’un taux fixe des recettes soit dédié à l’investissement dans l’Ondam. À défaut, la pression des déficits de fonctionnement provoquera l’effondrement des capacités d’autofinancement, et donc, par un effet de levier, les hôpitaux perdront leur capacité d’emprunt.
Sur les 13 milliards d’euros, ce ne sont pas les 6,5 milliards proposés qui inciteront les hôpitaux à emprunter. On en trouvera l’explication du côté des critères de Maastricht… L’autre moitié, par effet de levier, servira à restaurer les capacités d’autofinancement des hôpitaux et leur capacité à contracter des emprunts pour se moderniser.
Pour toutes ces raisons, et parce que je pense que les hôpitaux attendent cette mesure, je m’abstiendrai sur ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je pense, comme Alain Milon, que le problème vient de la confusion, à la base, entre la détention par l’État de l’immobilier hospitalier et le fait que les remboursements ont toujours été réalisés par l’assurance maladie.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Monsieur le ministre, vous indiquiez précédemment, lorsque nous débattions des articles précédents, qu’il convenait de clarifier les choses et que les relations entre l’État et l’assurance maladie n’étaient pas si simples ; mais là, c’est simple !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Eh oui !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Donc, il faut clarifier ! Sans cela, on assiste à un tour de passe-passe financier, par lequel une caisse d’amortissement, de défaisance – la Cades –, devient une caisse d’investissement.
Afin que l’on ne réinvestisse pas dans l’immobilier, vous êtes allé « inventer » cet investissement de 6,5 milliards d’euros consacré à des biens mobiliers, c’est-à-dire destiné à moderniser les appareils des hôpitaux. Mais, je le répète, tout cela mériterait une clarification, qui n’existe pas pour l’instant.
C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 127, 767 et 882 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l’article 5 est supprimé, et les amendements nos 3 rectifié, 912 rectifié bis, 910 rectifié bis, 826, 915 rectifié bis et 918 rectifié bis n’ont plus d’objet.
Article 5 bis (nouveau)
I. – L’article L. 314-3-3 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Après le mot : « établissements », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « et services mentionnés au 9° du I de l’article L. 312-1 du présent code. » ;
2° Le deuxième alinéa est supprimé.
II. – L’article L. 174-9-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie, ainsi que les structures dénommées “lits halte soins santé”, les structures dénommées “lits d’accueil médicalisés” et les centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogue » sont remplacés par les mots : « établissements et services » ;
2° Au second alinéa, après le mot : « établissements », sont insérés les mots : « et services ».
III. – Les I et II du présent article sont applicables à compter du 1er septembre 2021. – (Adopté.)
Article 6
I. – Le 1° de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la fin du dernier alinéa, le taux : « 28,14 % » est remplacé par le taux : « 24,33 % » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« – à la branche mentionnée au 5° du même article, pour une fraction correspondant à 3,81 % ; ».
II. – Après le 2° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis Une fraction du produit de la taxe sur les salaires, dans les conditions fixées au 1° du même article L. 131-8 ; ».
III. – Les I et II du présent article entrent en vigueur le 1er janvier 2021.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Madame la présidente, si vous me le permettez, je présenterai par la même occasion mon amendement sur cet article.
Mme la présidente. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 812, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Laurence Cohen. L’article 6 prévoit l’affectation, dès 2021, d’une fraction de taxe sur les salaires à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), afin de financer la création d’une nouvelle branche de sécurité sociale consacrée à la perte d’autonomie.
Nous y sommes opposés, pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, nous avons eu l’occasion de le rappeler, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste est attaché à l’autonomie de la sécurité sociale et à son financement par les cotisations sociales.
En outre, nous considérons que la perte d’autonomie des personnes en situation de handicap ou des personnes âgées est liée à l’état de santé, et que les dépenses doivent donc relever de l’assurance maladie. C’est d’ailleurs ainsi que la sécurité sociale a été conçue, dès l’origine, par Ambroise Croizat et Pierre Laroque : comme un système d’assurance couvrant toute une vie, avec ses aléas, de la naissance à la mort.
La question posée est celle du financement de la perte d’autonomie liée au vieillissement de la société. La réponse logique que nous formulons est celle de l’augmentation des cotisations patronales affectées à la branche maladie, afin de financer un grand service public national de la perte d’autonomie et de l’accompagnement, avec l’ensemble des structures d’aide à domicile et du secteur médico-social.
Or le Gouvernement refuse de faire payer les dépenses liées à la perte d’autonomie aux entreprises et aux revenus financiers, qui accumulent des richesses sur le dos de nos aînés, ce que nous désapprouvons.
D’où cet amendement de suppression de l’article 6.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. En réalité, cet article ne vise qu’à donner ponctuellement à la CNSA, en 2021, les moyens de couvrir des charges exceptionnelles liées au non-recouvrement. Ce n’est pas tout à fait ce que vous expliquez à l’appui de votre amendement de suppression.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6.
(L’article 6 est adopté.)
Article 7
I. – Au titre de l’année 2021, sont rectifiés :
1° Les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ainsi qu’il suit :
(En milliards d’euros) |
||||
Recettes |
Dépenses |
Solde |
||
Maladie |
202,2 |
232,2 |
-30,0 |
|
Accidents du travail et maladies professionnelles |
14,6 |
13,9 |
0,7 |
|
Vieillesse |
246,4 |
250,4 |
-4,0 |
|
Famille |
50,5 |
49,4 |
1,2 |
|
Autonomie |
31,8 |
32,2 |
-0,4 |
|
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
531,3 |
563,8 |
-32,5 |
|
Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse |
529,3 |
564,1 |
-34,8 |
; |
2° Les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale ainsi qu’il suit :
(En milliards d’euros) |
||||
Recettes |
Dépenses |
Solde |
||
Maladie |
200,7 |
230,7 |
-30,0 |
|
Accidents du travail et maladies professionnelles |
13,1 |
12,5 |
0,6 |
|
Vieillesse |
140,0 |
143,7 |
-3,7 |
|
Famille |
50,5 |
49,4 |
1,2 |
|
Autonomie |
31,8 |
32,2 |
-0,4 |
|
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
422,5 |
454,7 |
-32,3 |
|
Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse |
421,7 |
456,3 |
-34,6 |
; |
3° Les prévisions de recettes, les prévisions de dépenses et le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ainsi qu’il suit :
(En milliards d’euros) |
||||
Recettes |
Dépenses |
Solde |
||
Fonds de solidarité vieillesse |
17,2 |
19,6 |
-2,4 |
; |
4° Les prévisions des recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;
5° Les prévisions de recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, lesquelles sont nulles ;
6° L’objectif d’amortissement de la dette sociale par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, qui est fixé à 17,4 milliards d’euros.
Mme la présidente. L’amendement n° 1057, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2, tableau
Rédiger ainsi ce tableau :
(en milliards d’euros) |
||||
Recettes |
Dépenses |
Solde |
||
Maladie |
203,9 |
233,6 |
-29,7 |
|
Accidents du travail et maladies professionnelles |
14,7 |
13,9 |
0,8 |
|
Vieillesse |
247,2 |
250,4 |
-3,3 |
|
Famille |
50,8 |
49,4 |
1,4 |
|
Autonomie |
32,0 |
32,4 |
-0,5 |
|
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
534,2 |
565,5 |
-31,2 |
|
Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse |
532,1 |
565,8 |
-33,7 |
;
II. – Alinéa 5, tableau
Rédiger ainsi ce tableau :
(en milliards d’euros) |
|||
|
Recettes |
Dépenses |
Solde |
Maladie |
202,4 |
232,1 |
-29,7 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
13,2 |
12,5 |
0,7 |
Vieillesse |
140,8 |
143,7 |
-3,0 |
Famille |
50,8 |
49,4 |
1,4 |
Autonomie |
32,0 |
32,4 |
-0,5 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
425,4 |
456,4 |
-31,0 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse |
424,5 |
458,0 |
-33,5 |
;
III. – Alinéa 7, tableau, dernière colonne
Remplacer le montant :
- 2,4
par le montant :
- 2,5
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Si vous me le permettez, madame la présidente, je présenterai par la même occasion mon amendement n° 1056, visant à modifier l’article 8.
Mme la présidente. Je vous en prie, monsieur le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. J’avais annoncé l’amendement n° 1057 lors de mon intervention en discussion générale.
Il s’agit de tenir compte de plusieurs éléments : l’amélioration plus prononcée que prévu de la situation économique, un surcroît de dépenses dans le champ de l’Ondam et un amendement au projet de loi de finances rectificative déposé le 3 novembre dernier à l’Assemblée nationale. Le présent amendement tend en outre à tirer les conséquences de plusieurs données ou décisions relatives aux prévisions de recettes, aux objectifs de dépenses et au tableau d’équilibre par branche du régime général et des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale pour 2021.
En premier lieu, cet amendement vise à tirer les conséquences de l’amélioration des hypothèses macroéconomiques, le taux de croissance de 2021 ayant été révisé pour passer de 6 % à 6,25 %, et l’estimation de la hausse de la masse salariale du secteur privé ayant augmenté de 1 point, ce qui porte sa progression prévisionnelle à 16,2 %. Or un point de masse salariale représente près de 2 milliards d’euros de recettes pour le régime général en 2021.
En deuxième lieu, nous souhaitons tirer les conséquences de la majoration, en 2021, des dépenses entrant dans le champ de l’Ondam, à hauteur de 1,7 milliard d’euros. C’est l’objet de mon amendement n° 1056 à l’article 8.
Ce versement de 1,1 milliard d’euros supplémentaire vise : à compenser les surcoûts liés à l’épidémie de covid-19 pour les acteurs du système de santé ; à financer dès ce mois-ci, pour un montant de 60 millions d’euros, les revalorisations salariales du personnel des établissements et services pour personnes handicapées qui découlent des accords dits « Laforcade » et devaient initialement entrer en vigueur en janvier 2022 – je réponds ainsi à une interpellation de M. Mouiller – ; et à tenir compte d’une révision à la hausse de la dynamique des dépenses de soins de ville, à hauteur de 500 millions d’euros par rapport au montant inscrit dans le texte initial.
En troisième lieu, enfin, cet amendement tend à prendre en compte, dans le solde des comptes de la sécurité sociale de 2021, un transfert en provenance de l’État destiné à compenser les dons de vaccins à des pays tiers, pour un montant de 700 millions d’euros. Ce transfert est prévu dans un amendement au projet de loi de finances rectificative pour 2021 qui a été déposé début novembre. Nous anticipons quelque peu sur les débats, mais, vous le comprendrez, le Gouvernement est assez confiant dans sa capacité à convaincre la majorité de l’Assemblée nationale d’adopter cette disposition ; c’est pourquoi il vous propose cette sorte de coordination par anticipation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous souhaitions un surcroît de recettes et, éventuellement, une diminution des dépenses. C’est ce que vous nous proposez au travers de cet amendement, monsieur le ministre. Nous n’allons donc pas bouder notre plaisir : avis favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 7, modifié.
(L’article 7 est adopté.)
Article 8
Au titre de l’année 2021, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que ses sous-objectifs sont rectifiés ainsi qu’il suit :
(En milliards d’euros) |
|
Sous-objectif |
Objectif de dépenses |
Dépenses de soins de ville |
104,5 |
Dépenses relatives aux établissements de santé |
94,8 |
Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes âgées |
14,0 |
Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes handicapées |
12,5 |
Dépenses relatives au fonds d’intervention régional |
4,1 |
Autres prises en charge |
7,3 |
Total |
237,1 |
Mme la présidente. L’amendement n° 1056, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2, tableau
Rédiger ainsi ce tableau :
(en milliards d’euros) |
|
Sous-objectif |
Objectif de dépenses |
Dépenses de soins de ville |
105,0 |
Dépenses relatives aux établissements de santé |
95,5 |
Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes âgées |
14,2 |
Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes handicapées |
12,5 |
Dépenses relatives au Fonds d’intervention régional |
4,3 |
Autres prises en charge |
7,3 |
Total |
238,8 |
Cet amendement a déjà été défendu par M. le ministre délégué.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement, mais nous avons assorti cet avis d’une réserve.
En effet, il ne nous paraît pas acceptable que l’Ondam soit accru de 13,4 milliards d’euros – j’insiste sur ce montant – sans que nous disposions d’informations à ce sujet et sans que le Parlement soit consulté en cours d’exécution. Cela rejoint ce qu’indiquait notre collègue Philippe Mouiller. Nous avions déjà regretté cette pratique en 2020. Or, en 2021, le Gouvernement ne peut plus justifier l’absence de dépôt d’un PLFSS rectificatif par la crise sanitaire, puisque le Parlement a siégé…
En outre, alors que la commission des comptes de la sécurité sociale et le Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses de l’assurance maladie anticipaient, dès le mois de juin dernier, un dépassement de près de 10 milliards d’euros, nous ne constatons cette dépense majorée qu’aujourd’hui, 8 novembre. Ce n’est pas tenable démocratiquement.
Nous ne nous opposons pas aux dépenses rendues nécessaires par la crise sanitaire, cela va de soi, mais justement, parce que nous agissons en responsabilité, nous ne pouvons nous borner à constater les dépenses ex post. Il s’agit d’une question de respect des droits et des missions du Parlement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 8, modifié.
(L’article 8 est adopté.)
Article 9
L’article 95 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021 est ainsi modifié :
1° Au I, le montant : « 1 032 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 1 035 millions d’euros » ;
2° Au II, le montant : « 100 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 90 millions d’euros ». – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble de la deuxième partie
Mme la présidente. Je mets aux voix, modifié, l’ensemble de la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.
(La deuxième partie du projet de loi est adoptée.)
TROISIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2022
TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE
Chapitre Ier
Poursuivre les actions de simplification et d’équité du prélèvement
Article 10
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la deuxième phrase de l’article L. 133-4-11, après le mot : « principal », sont insérés les mots : « par les employeurs » ;
2° Le I de l’article L. 213-1, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020, est ainsi modifié :
a) Après le 2°, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis Par dérogation au 2° du présent I, le recouvrement des cotisations et contributions sociales mentionnées aux articles L. 642-1, L. 644-1 et L. 644-2 dues par les travailleurs indépendants libéraux affiliés à la section professionnelle compétente pour les psychothérapeutes, psychologues, ergothérapeutes, ostéopathes, chiropracteurs et diététiciens mentionnés au 1° de l’article L. 640-1 ainsi que pour les experts devant les tribunaux, les experts automobile et les personnes bénéficiaires de l’agrément prévu à l’article L. 472-1 du code de l’action sociale et des familles mentionnés au 2° de l’article L. 640-1 et dues par les professions mentionnées aux 3°, 4° et 6° à 8° du même article L. 640-1 ; »
b) Au 4°, les références : « L. 137-10 à L. 137-17 et L. 834-1 du présent code » sont remplacées par les références : « et L. 137-10 à L. 137-17 du présent code, à l’article L. 813-4 du code de la construction et de l’habitation » ;
3° L’article L. 225-1-1 est ainsi modifié :
a) Le 5° est ainsi modifié :
– les quatrième à sixième alinéas sont remplacés par les six alinéas ainsi rédigés :
« a) Pour les cotisations et contributions sociales mentionnées au 1° du I de l’article L. 213-1, à l’exception de celles affectées aux branches du régime général mentionnées à l’article L. 200-2 ainsi que de celles dues par les personnes qui relèvent du régime spécial de sécurité sociale des marins ;
« b) Pour les versements mentionnés aux articles L. 2333-64 et L. 2531-2 du code général des collectivités territoriales ;
« c) Pour les cotisations mentionnées au 6° du I de l’article L. 213-1 du présent code, à l’exception de celle prévue à l’article L. 6331-48 du code du travail ;
« d) Pour la cotisation obligatoire et le prélèvement supplémentaire obligatoire mentionnés au 1° de l’article 12-2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ainsi que pour la majoration mentionnée à l’article 12-2-1 de la même loi ;
« e) Pour la contribution mentionnée au 1° du I de l’article L. 2135-10 du code du travail ;
« f) Pour les cotisations ou contributions autres que celles d’origine légale ou conventionnelle prévues par la loi mentionnées au 1° de l’article L. 133-5-7 du présent code. » ;
– au septième alinéa, après le mot : « fixé », sont insérés les mots : « par attributaire ou catégorie d’attributaires, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, » et les mots : « du taux mentionné au premier alinéa du B du I de l’article 1641 du code général des impôts ou » et, à la fin, les mots : « , si ce taux est inférieur » sont supprimés ;
– à l’avant-dernier alinéa, le mot : « septième » est remplacé par le mot : « dixième » ;
b) Le 7° est complété par les mots : « applicable sur les cotisations dues à ces régimes par les employeurs relevant des organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-1 ou des organismes de recouvrement mentionnés à l’article L. 723-1 du code rural et de la pêche maritime » ;
c) Le 7° bis est ainsi rédigé :
« 7° bis De compenser la perte de cotisations résultant, pour l’organisme mentionné au premier alinéa de l’article L. 5427-1 du code du travail, du dispositif de réduction dégressive prévu à l’article L. 241-13 du présent code, applicable sur les cotisations dues à cet organisme par les employeurs relevant des organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 133-9, L. 213-1 et L. 752-1 du présent code ainsi qu’à ceux mentionnés aux a à f de l’article L. 5427-1 du code du travail ; »
4° L’article L. 225-1-5 est ainsi rédigé :
« Art. L. 225-1-5. – Sans préjudice des dispositions particulières prévoyant d’autres règles d’affectation, le produit des majorations de retard et pénalités dues par les redevables est réparti entre les branches du régime général de sécurité sociale dans des conditions déterminées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. » ;
5° L’article L. 613-9 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « revenu », la fin de la première phrase est supprimée ;
b) La seconde phrase est ainsi rédigée : « En cas de recouvrement partiel, les cotisations et contributions sont prélevées dans les conditions prévues à l’article L. 133-4-11. » ;
6° L’article L. 640-2 est ainsi rétabli :
« Art. L. 640-2. – Pour l’application du présent titre aux travailleurs indépendants libéraux affiliés à la section professionnelle compétente pour les psychothérapeutes, psychologues, ergothérapeutes, ostéopathes, chiropracteurs et diététiciens mentionnés au 1° de l’article L. 640-1 ainsi que pour les experts devant les tribunaux, les experts automobile et les personnes bénéficiaires de l’agrément prévu à l’article L. 472-1 du code de l’action sociale et des familles mentionnés au 2° de l’article L. 640-1 du présent code et aux professions mentionnées aux 3°, 4° et 6° à 8° du même article L. 640-1 qui ne relèvent pas des dispositions mentionnées à l’article L. 613-7, les cotisations sociales mentionnées aux articles L. 642-1, L. 644-1 et L. 644-2 sont recouvrées par les organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4, selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables en matière de cotisations et contributions de sécurité sociale dues par les travailleurs indépendants mentionnés à l’article L. 611-1.
« Les cotisations et contributions sociales mentionnées au premier alinéa du présent article sont affectées :
« 1° Pour la cotisation mentionnée à l’article L. 642-1, à la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales, qui procède à sa répartition selon les conditions prévues à l’article L. 642-5 ;
« 2° Pour les cotisations sociales mentionnées aux articles L. 644-1 et L. 644-2, à la section professionnelle mentionnée au premier alinéa du présent article.
« Une convention conclue entre les organismes mentionnés aux 1° et 2° du présent article et ceux mentionnés aux articles L. 213-1, L. 225-1 et L. 752-4 et approuvée par le ministre chargé de la sécurité sociale définit les modalités d’affectation de ces cotisations et contributions. » ;
7° Au début du premier alinéa de l’article L. 641-8 et de la première phrase du premier alinéa de l’article L. 642-5, sont ajoutés les mots : « Sous réserve du 2° bis de l’article L. 213-1 et de l’article L. 640-2, ».
II. – Le dernier alinéa de l’article L. 5422-16 du code du travail est ainsi rédigé :
« Une convention conclue entre l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale et l’organisme gestionnaire du régime d’assurance chômage mentionné à l’article L. 5427-1 précise les conditions garantissant à ce dernier la pleine autonomie de gestion. Elle régit les relations financières entre les deux organismes dans le cadre fixé à l’article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale, en fixant des modalités de reversement de recettes affectées à l’assurance chômage de manière à assurer la neutralité des flux financiers pour la trésorerie de l’organisme gestionnaire du régime, et précise les données nécessaires à l’exercice de ses activités, en particulier concernant les masses salariales assujetties et les établissements cotisants. Elle fixe également les conditions dans lesquelles est assurée la vérification de l’exhaustivité des sommes dues par les employeurs et définit les objectifs de la politique de contrôle et de lutte contre la fraude. Les modalités de rémunération du service rendu par les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général sont fixées en application du même article L. 225-1-1. »
III. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2023, sous réserve des A à F du présent III.
A. – Les 1°, 3°, 4° et 5° du I entrent en vigueur le 1er janvier 2022 et sont applicables aux cotisations et contributions dues au titre des périodes d’activité courant à compter de cette date. Les créances de cotisations et contributions sociales et les créances accessoires correspondant aux restes à recouvrer dus aux attributaires par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale avant cette date font l’objet d’un versement à hauteur de la valeur estimée recouvrable de ces créances au 1er janvier 2022. Les modalités de règlement desdites créances, notamment leur échelonnement, sont fixées par convention entre l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale et les attributaires concernés.
B. – Le II entre en vigueur le 1er janvier 2022.
C. – Les organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 du code de la sécurité sociale assurent, à compter du 1er janvier 2023, le recouvrement des cotisations et l’acquittement des dettes afférentes aux périodes antérieures, pour le compte de la section professionnelle compétente pour les psychothérapeutes, psychologues, ergothérapeutes, ostéopathes, chiropracteurs et diététiciens mentionnés au 1° de l’article L. 640-1 du même code ainsi que pour les experts devant les tribunaux, les experts automobile et les personnes bénéficiaires de l’agrément prévu à l’article L. 472-1 du code de l’action sociale et des familles mentionnés au 2° de l’article L. 640-1 du code de la sécurité sociale et les professions mentionnées aux 3°, 4° et 6° à 8° du même article L. 640-1.
Un décret prévoit, pour la période du 1er janvier 2022 au 30 juin 2023, les modalités d’organisation des travaux conduits par les deux organismes et la section professionnelle susmentionnés pour le transfert de ces compétences.
D. – Au cours d’une période dont le terme ne peut excéder le 30 juin 2022, la section professionnelle mentionnée au C du présent III et les organismes mentionnés aux articles L. 213-1, L. 225-1 et L. 752-4 du code de la sécurité sociale préparent le transfert des contrats de travail des salariés de ladite section qui sont chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale mentionnées aux articles L. 642-1, L. 644-1 et L. 644-2 du même code ou exerçant au sein des services supports associés à cette activité. Ils identifient les salariés à transférer selon l’emploi occupé par le salarié, selon la part de son activité consacrée directement ou indirectement au recouvrement, ainsi que selon ses compétences professionnelles. Ces critères sont repris par une convention entre les organismes mentionnés aux articles L. 213-1, L. 225-1 et L. 752-4 dudit code, laquelle prévoit également, le cas échéant, pour chaque salarié, une solution de reprise adaptée à sa situation.
Au plus tard le 1er janvier 2023, les contrats de travail des salariés de la section professionnelle mentionnée au C du présent III chargés du recouvrement qui ont été identifiés selon les modalités définies au premier alinéa du présent D sont transférés de plein droit aux organismes mentionnés aux articles L. 213-1, L. 225-1 et L. 752-4 du code de la sécurité sociale, dans le respect des solutions de reprise mentionnées au premier alinéa du présent D.
Jusqu’au transfert de leur contrat de travail, les salariés de la section professionnelle mentionnée au C du présent III restent régis à titre exclusif par les statuts collectifs de cette section.
E. – Avant le 31 juillet 2022, les organismes mentionnés aux articles L. 213-1, L. 225-1 et L. 752-4 du code de la sécurité sociale ayant vocation à accueillir les salariés transférés, la section professionnelle mentionnée au C du présent III et les organisations syndicales de salariés représentatives qui respectent les critères fixés à l’article L. 2121-1 du code du travail engagent des négociations au sein de ladite section afin de conclure des accords précisant les modalités, conditions et garanties s’appliquant aux salariés dans le cadre de leur transfert vers ces organismes et prévoyant, le cas échéant, les dispositions résultant des statuts collectifs de la section professionnelle mentionnée au C du présent III s’appliquant aux salariés transférés, à l’exclusion des stipulations portant sur le même objet des conventions collectives de sécurité sociale et des accords applicables dans les organismes vers lesquels leurs contrats de travail sont transférés.
Ces accords sont conclus selon les modalités prévues aux articles L. 2232-12 à L. 2232-20 du code du travail.
À défaut d’accord avant leur transfert, l’article L. 2261-14 du même code est applicable.
Ces accords s’appliquent à compter du transfert des salariés concernés, et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2025. Après cette date, les statuts collectifs des organismes mentionnés aux articles L. 213-1, L. 225-1 et L. 752-4 du code de la sécurité sociale s’appliquent intégralement et à titre exclusif aux salariés qui leur sont transférés.
F. – Les dates d’entrée en vigueur prévues aux C à E du présent III peuvent être reportées par décret, dans la limite de deux ans.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. À l’occasion de l’examen de cet article, qui prévoit le transfert aux Urssaf du recouvrement des cotisations sociales des professions libérales, je tiens à exprimer de nouveau l’opposition du groupe CRCE à l’unification des caisses de retraite.
En effet, ce projet ressemble dangereusement à une ancienne réforme des retraites. Vous vous en souvenez sans doute, mes chers collègues, le PLFSS pour 2020 prévoyait déjà l’unification des retraites complémentaires d’une partie des régimes spéciaux et des employeurs publics. Selon l’étude d’impact de ce projet de loi, ces « différentes étapes permettr[aie]nt que l’unification du recouvrement des cotisations sociales constitue utilement un acquis pour la mise en œuvre future de la réforme des retraites ».
L’ajout, cette année, de la principale caisse de retraite des professions libérales à ce dispositif constitue donc une nouvelle étape de la création des conditions techniques d’une fusion des régimes spéciaux au sein d’un système universel de retraite. Cela mériterait un large débat, car nous ne sommes pas d’accord, tant s’en faut, sur une réforme des retraites.
D’où notre opposition à la mesure figurant dans cet article.
Mme la présidente. L’amendement n° 128, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 46, première phrase
Supprimer les mots :
au plus tard
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L’Assemblée nationale a prévu que les statuts collectifs de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), des Urssaf et des caisses générales de sécurité sociale s’appliqueraient intégralement et à titre exclusif aux salariés qui leur sont transférés depuis la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse (Cipav), à compter du 1er janvier 2026.
Le présent amendement tend à prévoir que les accords conclus pour préciser les modalités, conditions et garanties applicables à ces salariés dans le cadre de leur transfert s’appliqueront jusqu’au 31 décembre 2025.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Effectivement, le Gouvernement a prévu que, à compter du 1er janvier 2026, ces statuts s’appliqueraient à tous les salariés de la Cipav, dans le cadre du recouvrement des cotisations par l’Urssaf. Toutefois, il a également prévu que cette unification du recouvrement pouvait intervenir dès le 1er janvier 2023.
La mesure proposée par Mme la rapporteure générale conduirait à ce que le transfert ne puisse pas intervenir avant le 1er janvier 2026, alors que notre objectif, sous réserve que les conditions soient réunies, est de pouvoir le faire dès 2023.
Faisons un parallèle. L’unification du recouvrement par les Urssaf des cotisations au titre de l’Agirc-Arrco devait entrer en application le 1er janvier 2022 au plus tôt, mais nous avons pris la décision de reporter cette mesure au 1er janvier 2023, afin de laisser aux organismes le temps de mener les travaux techniques ; nous mettrons d’ailleurs en place en 2022 un pilote permettant de finaliser ce transfert.
Je l’ai souligné lors de mon intervention en discussion générale, les travaux techniques conduits avec la Cipav se passent remarquablement bien, ce qui nous permet d’envisager un transfert dans de bonnes conditions des opérations de recouvrement de cette caisse vers l’Urssaf à compter du 1er janvier 2023. Si d’aventure ce n’était pas possible pour des raisons techniques, nous aurions la possibilité de reporter ce transfert, comme nous l’avons fait pour l’Agirc-Arrco.
Par conséquent, figer cette opération d’unification du recouvrement au 1er janvier 2026 nous paraît un peu trop « enfermant », si vous me passez cette vilaine expression. Je le répète, j’ai la conviction que le transfert et l’unification seront tout à fait possibles au 1er janvier 2023 ; nous pourrions toutefois, comme on l’a fait avec l’Agirc-Arrco, et si cela était nécessaire, profiter de la possibilité d’un report à fin 2025.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, pour éviter de figer au 1er janvier 2026 la date de cette unification.
Mme la présidente. Madame la rapporteure générale, l’amendement n° 128 est-il maintenu ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous avons auditionné des représentants de la Cipav : comme vous l’avez indiqué, monsieur le ministre, les choses se passent en effet plutôt bien.
Il convient néanmoins de prendre en compte un temps d’opérabilité, qui peut être long. Au travers de cet amendement, nous souhaitons simplement que soient garanties les conditions dont bénéficient les salariés au sein de la Cipav.
Je maintiens donc mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 10, modifié.
(L’article 10 est adopté.)
Après l’article 10
Mme la présidente. L’amendement n° 922 rectifié bis, présenté par MM. Temal et Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Pendant toute la durée de l’état d’urgence sanitaire tel que défini par la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020, toute la durée du régime de sortie de crise sanitaire tel que défini par la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021, ainsi que pour une période de douze mois à l’issue de celles-ci, les services d’information et de suivi des dossiers des particuliers par téléphone des caisses primaires d’assurance maladie sont gratuits et l’accès à ceux-ci sont garantis sous 72 heures.
La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a pour objet de rendre plus simple et effectif l’accès aux services publics essentiels, au regard de la crise économique et sociale.
En raison de la crise sanitaire, plus d’un million de nos concitoyens ont basculé dans la pauvreté.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Absolument !
M. Jean-Luc Fichet. Toutes les associations de soutien aux personnes en difficulté font d’ailleurs état d’une explosion de la demande d’aide alimentaire ou d’accompagnement social, et les démarches d’accès à la couverture maladie universelle suivent logiquement ce phénomène.
Or, en raison du processus de dématérialisation engagé depuis plusieurs années et des conditions sanitaires, de nombreuses personnes ne maîtrisant pas toujours les outils numériques se trouvent aujourd’hui dans l’impossibilité d’obtenir des réponses à leurs questions ou de l’aide dans leurs démarches.
Le fait de rendre gratuits les services d’information et de suivi qui ne le sont pas encore et de garantir un accès dans les soixante-douze heures suivant le premier appel permettra de prendre en charge plus efficacement ceux, de plus en plus nombreux, qui en ont besoin.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je comprends votre préoccupation, mon cher collègue, mais, conformément à l’article 28 de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance, les appels téléphoniques à l’assurance maladie ne sont déjà plus surtaxés depuis le 1er juillet 2020.
Pour ce qui concerne les délais de mise en relation, si ceux-ci peuvent parfois être effectivement longs – cela dépend en réalité des départements et de la dynamique locale des directeurs de caisse –, il ne semble pas opportun de prévoir une garantie d’accès sous soixante-douze heures, car la mise en œuvre d’une telle disposition paraît particulièrement complexe et semble relever de l’organisation interne des CPAM. En outre, selon la CNAM, le taux de décrochés se situe actuellement entre 75 % et 80 %.
Prévoir un accès gratuit et garanti sous soixante-douze heures aux services d’information et de suivi des CPAM ne semble donc pas pertinent.
Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 922 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 11
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 133-5-12 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
– après la référence : « 6° », est insérée la référence : « à 9° » ;
b) À la première phrase du troisième alinéa, après le mot : « prélèvement », il est inséré le mot : « bancaire » ;
c) Le quatrième alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « présent article » sont remplacés par les mots : « présent I » ;
– à la deuxième phrase, après le mot : « alinéa », sont insérés les mots : « du présent I » ;
d) Le cinquième alinéa est ainsi modifié :
– au début, est ajoutée la mention : « II. – » ;
– après le mot : « alinéa », est insérée la référence : « du I » ;
e) Le 3° est ainsi rédigé :
« 3° Du montant alloué au titre des prestations sociales prévues aux articles L. 232-1 et L. 245-1 du code de l’action sociale et des familles, pour financer les dépenses d’aide humaine auxquelles se rapporte le prélèvement, lorsque le département débiteur a conclu la convention mentionnée à l’article L. 133-8-9 du présent code ; »
f) Sont ajoutés huit alinéas ainsi rédigés :
« 5° D’une aide spécifique au financement des services à la personne fournis à domicile, liquidée lors de ce prélèvement et servie par un organisme désigné selon les modalités prévues à l’article L. 133-5-10 pour le compte de l’État, accordée aux personnes domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts. Le montant de cette aide est égal à 50 % des dépenses effectivement supportées auxquelles se rapporte le prélèvement et qui sont éligibles au crédit d’impôt prévu à l’article 199 sexdecies du même code, dans la limite d’un plafond annuel fixé par décret en fonction de la composition du foyer fiscal des personnes concernées ;
« 6° D’une aide spécifique au financement de la garde des enfants en dehors du domicile, liquidée lors de ce prélèvement et servie par un organisme désigné selon les modalités prévues à l’article L. 133-5-10 du présent code pour le compte de l’État, accordée aux personnes domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts. Le montant de cette aide est égal à 50 % des dépenses effectivement supportées auxquelles se rapporte le prélèvement et qui sont éligibles au crédit d’impôt prévu à l’article 200 quater B du même code, dans la limite d’un plafond annuel fixé par décret en fonction de la composition du foyer fiscal des personnes concernées.
« Le montant des aides spécifiques prévues aux 5° et 6° du présent II est régularisé lors de l’établissement de l’impôt sur le revenu, dans les conditions prévues à l’article 1665 ter du code général des impôts.
« Pour les personnes mentionnées au 9° de l’article L. 133-5-6 du présent code, la contribution mentionnée à l’article L. 7233-1 du code du travail n’est pas éligible aux aides spécifiques prévues aux 5° et 6° du présent II.
« III. – Le prélèvement mentionné au troisième alinéa du I tient compte, le cas échéant, des sommes versées par le particulier employeur à son salarié, directement ou par l’intermédiaire des personnes mentionnées au 9° de l’article L. 133-5-6.
« Le montant de ces versements ne peut pas excéder 50 % de la rémunération et des cotisations et contributions sociales dues.
« Lorsque l’employeur réalise ces versements autrement que par des titres spéciaux de paiement émis par l’un des organismes habilités mentionnés à l’article L. 1271-10 du code du travail ayant conclu la convention prévue au 2° du II du présent article, il conserve les pièces justificatives, dans la limite de la prescription prévue à l’article L. 244-3 du présent code.
« IV. – Sans préjudice des sanctions pénales applicables, l’employeur ou le salarié qui déclarent des prestations fictives sont exclus du dispositif, dans des conditions et pour une durée fixées par voie réglementaire. » ;
2° À la fin de l’intitulé de la section 4 du chapitre III bis du titre III du livre Ier, le mot : « employeurs » est remplacé par les mots : « recourant à des services à la personne » ;
3° L’article L. 133-8-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 133-8-3. – Sans préjudice des articles L. 133-5-12 et L. 133-8-4, lorsque le particulier bénéficie d’une prise en charge le dispensant de faire l’avance des dépenses de toute nature relevant d’un plan d’aide élaboré dans le cadre de l’allocation prévue à l’article L. 232-1 du code de l’action sociale et des familles ou de celle prévue à l’article L. 245-1 du même code et que cette allocation est versée sous forme de titres spéciaux de paiement mentionnés au B de l’article L. 1271-1 du code du travail, le montant de la prise en charge relative aux cotisations et contributions sociales dues par l’allocataire pour l’emploi d’un salarié est calculé par l’organisme de recouvrement mentionné à l’article L. 133-5-10 du présent code au vu des éléments déclarés par le particulier employeur ou les organismes exerçant l’activité mentionnée à l’article L. 7232-6 du code du travail, dans la limite des montants prévus par le plan d’aide ou le plan personnalisé de compensation. Les modalités de paiement direct des cotisations et contributions sociales auprès de cet organisme de recouvrement par le département pour le compte du particulier et, le cas échéant, par ce dernier pour la part qui demeure à sa charge, sont prévues par décret. » ;
4° La sous-section 2 de la section 4 du chapitre III bis du titre III du livre Ier est ainsi rédigée :
« Sous-section 2
« Dispositifs simplifiés de déclaration et de paiement des organismes de services à la personne par les particuliers
« Art. L. 133-8-4. – I. – Tout particulier domicilié en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts peut demander à utiliser un dispositif dématérialisé de déclaration et de paiement des prestations suivantes réalisées par des personnes morales ou des entreprises individuelles adhérant à ce dispositif :
« 1° Prestations de service à la personne réalisées à domicile selon les modalités prévues aux 2° et 3° de l’article L. 7232-6 du code du travail ;
« 2° Prestations d’accueil des enfants réalisées hors du domicile par un assistant maternel agréé mentionné à l’article L. 421-1 du code de l’action sociale et des familles employé par une personne morale de droit public ou de droit privé.
« II. – Le dispositif prévu au I permet à un particulier :
« 1° D’autoriser la personne morale ou l’entreprise individuelle qui réalise les prestations à déclarer à l’organisme de recouvrement mentionné à l’article L. 133-5-10 du présent code les sommes dues au titre des prestations qu’elle a réalisées, dont il est simultanément informé ;
« 2° D’accepter ou de contester la déclaration mentionnée au 1° du présent II auprès de l’organisme de recouvrement. Sans préjudice des voies de recours qui sont ouvertes en cas de litige entre un particulier et un prestataire, cette déclaration est réputée acceptée en l’absence de contestation dans un délai de deux jours francs à compter de sa réception par le particulier ;
« 3° D’autoriser l’organisme de recouvrement à prélever sur un compte bancaire les sommes nécessaires au paiement des prestations acceptées, à l’issue d’un délai de deux jours francs, après prise en compte, le cas échéant, des montants mentionnés aux 3°, 5° et 6° du II de l’article L. 133-5-12.
« III. – Le dispositif prévu au I du présent article permet à la personne morale ou à l’entreprise individuelle qui réalise les prestations :
« 1° D’enregistrer les particuliers qui en font la demande auprès de l’organisme de recouvrement mentionné à l’article L. 133-5-10, pour leur permettre d’utiliser ce dispositif ;
« 2° De déclarer les informations relatives aux sommes dues par chaque particulier pour lequel elle a réalisé des prestations. Le prestataire est tenu de déclarer les sommes directement reçues, le cas échéant, du particulier. Dans ce cas, le particulier et le prestataire en conservent les pièces justificatives, dans la limite de la prescription prévue à l’article L. 244-3 ;
« 3° De percevoir de l’organisme de recouvrement mentionné à l’article L. 133-5-10 le montant dû par chaque particulier, après déduction, le cas échéant, des sommes versées directement par lui dans les conditions mentionnées au 2° du présent III.
« IV. – Les personnes dont l’activité consiste à mettre un particulier en relation avec une personne morale ou une entreprise individuelle réalisant les prestations mentionnées au I peuvent, lorsqu’elles sont mandatées par ce prestataire, effectuer les démarches mentionnées aux 1° et 2° du III dans les conditions prévues à l’article L. 133-11.
« Art. L. 133-8-5. – Toute personne morale ou entreprise individuelle réalisant des prestations de service à la personne selon les modalités prévues aux 2° et 3° de l’article L. 7232-6 du code du travail peut être autorisée par l’organisme mentionné à l’article L. 225-1 du présent code à adhérer au dispositif dématérialisé mentionné à l’article L. 133-8-4, sous réserve :
« 1° De respecter les conditions d’agrément, de déclaration et d’autorisation fixées aux articles L. 7232-1 à L. 7232-1-2 du code du travail ;
« 2° De ne pas avoir fait l’objet d’un constat de l’infraction mentionnée à l’article L. 8211-1 du même code au cours des cinq années précédentes ;
« 3° D’être à jour de ses obligations de déclaration et de paiement auprès des organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-1 du présent code ;
« 4° D’être à jour de ses obligations de déclaration et de paiement en matière d’impôts sur les sociétés ou, le cas échéant, d’impôt sur le revenu et de taxe sur la valeur ajoutée ;
« 5° D’approuver une charte d’utilisation du service établie par l’organisme mentionné à l’article L. 225-1, qui précise notamment les modalités techniques d’accès au dispositif, de paiement des prestations et de reversement des sommes versées à tort ainsi que ses engagements en matière d’accompagnement des particuliers, de réponse aux contestations et de communication sur le service.
« Art. L. 133-8-6. – Sont exclus de la possibilité d’utiliser le dispositif, dans des conditions et pour une durée fixées par décret :
« 1° Le particulier, en cas de défaut total ou partiel de paiement des sommes dues après acceptation de la prestation. La personne morale ou l’entreprise individuelle qui a réalisé les prestations recouvre alors elle-même les sommes qui lui sont dues auprès de son client ;
« 2° Sans préjudice des sanctions pénales applicables, le particulier, la personne morale ou l’entreprise individuelle qui accepte ou déclare des prestations fictives ;
« 3° La personne qui réalise les prestations, en cas de méconnaissance des exigences résultant de la charte mentionnée au 5° de l’article L. 133-8-5.
« Art. L. 133-8-7. – Dans les cas mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 133-8-6, l’organisme de recouvrement mentionné à l’article L. 133-5-10 notifie au prestataire les sommes qui lui ont été versées à tort, en l’invitant à les payer ou à produire ses observations sous un délai de trente jours, puis, en l’absence de paiement ou d’observations, les recouvre par prélèvement bancaire au terme du même délai. Le cas échéant, ce même organisme restitue au particulier les montants que celui-ci a versés à tort.
« Si le prélèvement mentionné au premier alinéa du présent article n’a pas permis de recouvrer les sommes versées à tort ou en cas de rejet total ou partiel des observations du prestataire, le directeur de l’organisme de recouvrement lui adresse, par tout moyen permettant de conférer date certaine à sa réception, une mise en demeure de payer dans un délai d’un mois. La mise en demeure peut concerner plusieurs montants préalablement notifiés.
« Lorsque la mise en demeure reste sans effet, le directeur de l’organisme de recouvrement peut délivrer une contrainte qui, à défaut d’opposition du débiteur devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l’article L. 211-16 du code de l’organisation judiciaire, comporte tous les effets d’un jugement et confère notamment le bénéfice de l’hypothèque judiciaire.
« Une majoration de 10 % est applicable aux sommes réclamées qui n’ont pas été réglées aux dates d’exigibilité mentionnées dans la mise en demeure. Cette majoration peut faire l’objet d’une remise gracieuse totale ou partielle après règlement des sommes dues.
« Sauf en cas de fraude, l’action en recouvrement se prescrit par trois ans à compter de la date de paiement de la somme versée à tort.
« Un décret en Conseil d’État définit les modalités d’application du présent article.
« Art. L. 133-8-8. – L’organisme de recouvrement mentionné à l’article L. 133-5-10 met les organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 territorialement compétents en mesure de procéder, le cas échéant, à une compensation entre le montant des cotisations et contributions sociales leur restant dues au titre de l’emploi de salariés par la personne qui réalise les prestations et les sommes mentionnées au 3° du III de l’article L. 133-8-4. » ;
5° La même section 4 est complétée par une sous-section 3 ainsi rédigée :
« Sous-section 3
« Dispositions diverses
« Art. L. 133-8-9. – En vue de déterminer et de vérifier le montant des dépenses restant à la charge du particulier après application, le cas échéant, des aides mentionnées au 3° du II de l’article L. 133-5-12, dans le cadre des dispositifs prévus au même article L. 133-5-12 et à l’article L. 133-8-4, l’organisme mentionné à l’article L. 225-1 conclut une convention, conforme à un modèle approuvé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, avec les collectivités territoriales qui versent ces aides. Cette convention précise notamment :
« 1° Les modalités d’échange des informations relatives aux particuliers qui bénéficient des aides, aux montants octroyés, à la nature des aides dont ils bénéficient et, le cas échéant, aux modalités spécifiques d’imputation de ces aides sur les dépenses du particulier ;
« 2° Les modalités de remboursement, par l’organisme ou la collectivité, des montants d’aide avancés pour son compte par l’organisme de recouvrement mentionné à l’article L. 133-5-10 ;
« 3° Les modalités d’échange des informations relatives aux personnes qui réalisent les prestations pour les particuliers bénéficiant des aides ainsi qu’aux montants, aux volumes et à la nature des services déclarés.
« Art. L. 133-8-10. – Pour la prise en compte, dans le cadre des dispositifs prévus aux articles L. 133-5-12 et L. 133-8-4, des aides mentionnées aux 5° et 6° du II de l’article L. 133-5-12, l’organisme mentionné à l’article L. 225-1 et l’administration fiscale concluent une convention précisant les modalités du remboursement de ces aides par l’État.
« Ils échangent les informations nécessaires à l’identification des particuliers susceptibles de bénéficier de ces aides, au calcul de ces aides, à leur imputation dans le cadre des dispositifs mentionnés au premier alinéa du présent article, ainsi qu’à leur prise en compte ultérieure pour l’établissement de l’impôt sur le revenu des bénéficiaires. Les données traitées, qui peuvent comporter le numéro d’identification fiscale des personnes physiques, sont conservées dans la limite de la prescription prévue à l’article L. 244-3.
« Le contenu et les modalités de réalisation de ces échanges sont fixés par décret en Conseil d’État. » ;
6° Le dernier alinéa de l’article L. 133-5-6 est supprimé ;
7° (nouveau) À l’article L. 531-8-1, après la première occurrence du mot : « alinéa », est insérée la référence : « du I ».
II. – Le 1 du II de la section I du chapitre Ier du livre II du code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 1665 bis est ainsi modifié :
a) Après le deuxième alinéa, sont insérés cinq alinéas ainsi rédigés :
« Pour l’application du deuxième alinéa du présent article, l’acompte est calculé en fonction :
« 1° Du montant du crédit d’impôt prévu à l’article 199 sexdecies, après imputation de l’aide spécifique prévue au 5° du II de l’article L. 133-5-12 du code de la sécurité sociale servie au cours de l’avant-dernière année. Lorsque le montant de l’aide spécifique servie excède le montant du crédit d’impôt, ce dernier est retenu pour une valeur nulle ;
« 2° Du montant du crédit d’impôt prévu à l’article 200 quater B du présent code, après imputation de l’aide spécifique prévue au 6° du II de l’article L. 133-5-12 du code de la sécurité sociale servie au cours de l’avant-dernière année. Lorsque le montant de l’aide spécifique servie excède le montant du crédit d’impôt, ce dernier est retenu pour une valeur nulle.
« Le montant de l’acompte, calculé dans les conditions prévues aux deuxième à cinquième alinéas du présent article, est réduit du montant de l’aide spécifique mentionnée au 5° du II de l’article L. 133-5-12 du code de la sécurité sociale servie au cours des huit premiers mois de l’année précédant celle du versement de l’acompte, dans la limite de la fraction de l’acompte correspondant au crédit d’impôt prévu à l’article 199 sexdecies du présent code.
« Le montant de l’acompte, calculé dans les conditions prévues aux deuxième à cinquième alinéas du présent article, est réduit du montant de l’aide spécifique mentionnée au 6° du II de l’article L. 133-5-12 du code de la sécurité sociale perçue au cours des huit premiers mois de l’année précédant celle du versement de l’acompte, dans la limite de la fraction de l’acompte correspondant au crédit d’impôt prévu à l’article 200 quater B du présent code. » ;
b) À la fin du troisième alinéa, les mots : « calculé dans les conditions prévues au deuxième alinéa » sont remplacés par les mots : « déterminé dans les conditions prévues aux deuxième à septième alinéas du présent article » ;
2° L’article 1665 ter est ainsi rétabli :
« Art. 1665 ter. – I. – Le montant de l’aide spécifique mentionnée au 5° du II de l’article L. 133-5-12 du code de la sécurité sociale, constitutive d’un acompte du crédit d’impôt prévu à l’article 199 sexdecies du présent code, s’impute sur le montant du crédit d’impôt dont bénéficie l’intéressé au titre de l’année au cours de laquelle les dépenses sont réalisées. Le montant de cet acompte n’est pas déduit des dépenses effectivement supportées mentionnées au 3 du même article 199 sexdecies. Lorsque le montant de l’acompte excède celui du crédit d’impôt, l’excédent est régularisé lors de la liquidation de l’impôt.
« II. – Le montant de l’aide spécifique mentionnée au 6° du II de l’article L. 133-5-12 du code de la sécurité sociale, constitutive d’un acompte du crédit d’impôt prévu à l’article 200 quater B du présent code, s’impute sur le montant du crédit d’impôt dont bénéficie l’intéressé au titre de l’année au cours de laquelle les dépenses sont réalisées. Le montant de cet acompte n’est pas déduit des dépenses effectivement supportées mentionnées au premier alinéa du même article 200 quater B. Lorsque le montant de l’acompte excède celui du crédit d’impôt, l’excédent est régularisé lors de la liquidation de l’impôt. »
III. – L’article 20 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020 est ainsi modifié :
1° Le 1 du I est ainsi modifié :
a) Au début, sont ajoutés les mots : « Dans la perspective de l’entrée en vigueur de l’article 11 de la loi n° … du … de financement de la sécurité sociale pour 2022, » ;
b) L’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 » ;
2° À la fin de la première phrase du IV, les mots : « deux ans » sont remplacés par les mots : « trois ans, sans préjudice de la mise en œuvre des dispositions du b du 3 du I et du 1° du III après la fin de cette période ».
IV. – Les 1° et 5° du I s’appliquent aux déclarations réalisées au titre des périodes d’emploi de salariés à domicile par des particuliers employeurs courant à compter du 1er janvier 2022 pour les activités de service à la personne mentionnées aux 2° et 3° de l’article L. 7231-1 du code du travail, et à compter du 1er janvier 2024 pour les activités de garde d’enfant à domicile mentionnées au 1° du même article L. 7231-1 et pour l’accueil des enfants réalisés par les assistants maternels agréés mentionnés à l’article L. 421-1 du code de l’action sociale et des familles.
Les 4° et 5° du I du présent article s’appliquent aux prestations de service à la personne mentionnées aux 2° et 3° de l’article L. 7231-1 du code du travail réalisées par des personnes morales ou des entreprises individuelles à compter du 1er avril 2022 et aux activités de garde d’enfant à domicile mentionnées au 1° du même article L. 7231-1 ainsi qu’aux prestations d’accueil des enfants réalisées par les assistants maternels agréés mentionnés à l’article L. 421-1 du code de l’action sociale et des familles à compter du 1er janvier 2024.
Le 3° du I du présent article s’applique aux déclarations réalisées au titre des périodes d’emploi de salariés à domicile courant à compter du 1er janvier 2023. Le 6° du I entre en vigueur le 1er janvier 2024.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.
Mme Cathy Apourceau-Poly. L’article 11 traite du versement immédiat des aides sociales et fiscales en faveur des services à la personne.
À l’instar de nos collègues ayant déposé des amendements sur cet article, nous éprouvons des inquiétudes quant à la mise en place du mécanisme de contemporanéisation des aides.
Monsieur le ministre, avec un versement anticipé, vous préservez, certes, le budget des familles, mais vous prenez le risque d’une augmentation du nombre d’erreurs, de rectifications ou de trop-perçus. En effet, en 2022, les familles bénéficieront d’exonérations de cotisations sociales calculées sur les aides versées et déclarées en 2021. Par conséquent, les familles dont le mode de garde des enfants est modifié entre-temps percevront un crédit, avant qu’une rectification ne soit exigée.
Le Gouvernement a annoncé une revalorisation des aides pour les services à domicile. Je souhaite donc savoir, monsieur le ministre, comment fonctionnera le dispositif du versement immédiat pour les particuliers employeurs qui bénéficieront cette année du crédit d’impôt au titre de 2021 : l’administration fiscale leur demandera-t-elle le remboursement d’une partie de l’avance faite pour 2022 ?
Telle est la question que je vous adresse, monsieur le ministre, car ce mécanisme soulève dans nos territoires de nombreuses inquiétudes, que nous relayons dans l’hémicycle.
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, sur l’article.
M. Martin Lévrier. Cet article prévoit de généraliser et de pérenniser l’expérimentation prévue à l’article 20 de la loi du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020, qui consiste à verser les aides fiscales et sociales aux particuliers employeurs ou aux clients de prestataires entrant dans le champ des services à la personne.
Cette mesure permettra de limiter l’avance de trésorerie qui peut parfois représenter, pour nombre de citoyens, un obstacle à l’utilisation de services pourtant essentiels. Simplifier les outils existants dans le domaine des services à domicile était au cœur de la loi du 8 juin 2021 visant à sécuriser les droits à protection sociale des assistants maternels et des salariés des particuliers employeurs, dont j’étais rapporteur et qui a été adoptée à l’unanimité par la Haute Assemblée.
Ces mesures sont centrales pour le déploiement dans notre société de ces services, qui permettent d’assurer un soutien à domicile à tous ceux qui en ont besoin, sans que cela n’ajoute à des situations souvent complexes des difficultés inutiles.
Je me félicite donc que le PLFSS 2022 comporte une telle disposition, que la Haute Assemblée adoptera – je n’en doute pas un instant, monsieur le ministre ! – avec enthousiasme. (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Je souhaite répondre en quelques mots à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Il y a deux aspects, dans votre question.
Le premier concerne la revalorisation des aides pour les interventions à domicile, qui relève du maintien à domicile et de la prise en charge de personnes en difficulté en raison de la dépendance ou de la perte d’autonomie. Cela renvoie au tarif plancher et à un mode d’intervention s’inscrivant très généralement – pas toujours mais très souvent – dans un conventionnement lié à l’allocation personnalisée d’autonomie (APA).
Or l’article 11 du présent texte, qui fait écho à l’article 3 du projet de loi de finances pour 2022, concerne le champ beaucoup plus large des services à la personne, qui s’étend des chambres médicalisées ou liées à une situation de dépendance à la garde d’enfants, des opérations d’entretien ou des tâches ménagères sans lien avec une situation de dépendance ou avec une pathologie, aux cours du soir et au soutien scolaire, en passant par l’entretien d’espaces extérieurs.
Je ne voudrais donc pas que s’installe une confusion entre le débat sur la revalorisation du tarif d’intervention des personnes qui accompagnent des personnes en situation de dépendance ou de perte d’autonomie et la discussion sur la contemporanéisation du crédit d’impôt relatif aux services à la personne, dont le champ est plus large et qui constitue le second aspect de votre question.
J’ai eu l’occasion de l’indiquer précédemment, nous allons procéder par étapes pour instaurer la contemporanéité des aides relatives aux services à la personne. La première étape, intervenant au 1er janvier 2022, vise à permettre le bénéfice contemporain du crédit d’impôt lié au recours à des services à la personne pour les employeurs particuliers qui ont recours au CESU+. Votre question me donne d’ailleurs l’occasion d’appeler tous ceux qui nous écoutent et qui utilisent le CESU à basculer vers le CESU+, qui est la clef de l’accès au versement contemporain.
Nous inclurons les services intermédiés par mandataire, par prestataire ou par association intermédiaire le 1er avril 2022, pour des raisons purement techniques. Puis, le 1er janvier 2023 – nous avons besoin d’un délai pour conclure des conventions de gestion et de partenariat avec chacun des conseils départementaux –, nous inclurons les publics bénéficiaires de l’APA et de la PCH (prestation de compensation du handicap) et nous retrouverons alors des intervenants relevant du tarif plancher que j’évoquais.
Enfin, nous avons prévu l’élargissement, le 1er janvier 2024, toujours pour des questions techniques, aux services disponibles sur Pajemploi relatifs à la garde d’enfants. Si nous pouvons aller plus vite pour la garde d’enfants et faire cela en 2023, nous le ferons, mais la prudence commande de prévoir une échéance en 2024.
Le principal intérêt de cette contemporanéisation du crédit d’impôt lié au recours aux services à la personne réside, d’une part, dans le gain de trésorerie que cela entraîne pour les particuliers employeurs, qui n’auront plus à attendre entre un an et dix-huit mois pour bénéficier du crédit d’impôt, et, d’autre part, puisque ce gain de trésorerie conduit à une diminution du coût immédiatement supporté par le particulier employeur, dans l’incitation au recours au travail déclaré plutôt qu’au travail clandestin. Or le recours au travail déclaré représente des droits pour les assurés que sont les employés à domicile et la possibilité de garantir des droits aux intervenants.
Le Gouvernement est donc très attaché à cet article, en ce qu’il permet de sanctuariser le périmètre du crédit d’impôt « services à la personne » (Cisap), ainsi qu’à l’article 3 du PLF pour 2022 qui en tire les conséquences en sanctuarisant et en consolidant, à la suite d’une décision du Conseil d’État, ce périmètre, permettant de faire avancer la contemporanéisation.
Je sépare donc le débat entre le tarif plancher et la prise en charge de la dépendance de la discussion de cet article, auquel nous sommes attachés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, sur l’article.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je vous remercie, monsieur le ministre, de bien préciser que le calendrier est déterminé par des problèmes techniques,…
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
Mme Raymonde Poncet Monge. … et que vous seriez prêt à l’accélérer si ces difficultés techniques étaient résolues.
Or j’avais déposé un amendement relatif au resserrement de ce calendrier, parce que, là encore – comme avec le Ségur I et le Ségur II, ou les actes I et II des mesures Laforcade –, ledit calendrier induit des perturbations concurrentielles : vous commencez par le « gré à gré », puis vous poursuivez par les mandataires et les prestataires.
Vous avez raison, l’effet de trésorerie peut influencer les particuliers. Justement, mon amendement tendait à resserrer le calendrier afin de limiter les perturbations induites sur les choix individuels. Je pense notamment aux assistantes maternelles, qui ne sont pas très contentes d’être les dernières concernées…
Mme Cathy Apourceau-Poly. Tout à fait !
Mme Raymonde Poncet Monge. … alors qu’elles sont en concurrence avec d’autres modes de garde, comme les microcrèches.
Néanmoins, mon amendement a été déclaré irrecevable au motif que son adoption aurait engendré une avance de trésorerie de la part de la direction générale des finances publiques ; or, selon vos propres termes, il s’agit d’une question « purement technique ».
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr !
Mme Raymonde Poncet Monge. Voilà donc pour mon petit message adressé à la commission des finances…
Mme la présidente. L’amendement n° 129, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 26, première phrase
Après les mots :
exerçant l’activité mentionnée
remplacer le mot :
à
par la référence :
au 1° de
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Monsieur le ministre, à titre personnel, je trouve cet article tout à fait intéressant, car la contemporanéité du versement évitera aux employeurs d’avancer les sommes dues et permettra de développer les services à la personne, notamment pour favoriser l’autonomie.
Si vous me le permettez, madame la présidente, je présenterai en même temps les amendements suivants nos 130 et 131.
Mme la présidente. J’appelle donc en discussion les amendements nos 130 et 131.
L’amendement n° 130, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 29
Après le mot :
organismes
insérer le mot :
prestataires
L’amendement n° 131, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 88
1° Remplacer les mots :
l’accueil
par les mots :
les activités d’accueil
2° Remplacer le mot :
réalisés
par le mot :
réalisées
Veuillez poursuivre, madame la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Les amendements nos 129 et 130 sont des amendements de clarification, qui visent à préciser le champ d’application de la mesure.
L’amendement n° 129 tend ainsi à préciser que le dispositif CESU tiers payant ne concerne que les particuliers employeurs et les particuliers recourant à un mandataire, à l’exclusion des particuliers clients de prestataires.
Le CESU tiers payant permet aux conseils départementaux de prendre en charge les cotisations et contributions sociales dues au titre de l’emploi d’un salarié à domicile par un allocataire de l’APA à domicile ou de la PCH sous forme de titre préfinancé, au lieu de lui verser ces aides par virement postérieur au paiement du salaire.
L’amendement n° 130 a pour objet de préciser que le nouveau dispositif de déclaration et de paiement des organismes de services à la personne, créé à l’article 11 du présent texte, concerne uniquement les prestataires.
Quant à l’amendement n° 131, il est rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis favorable sur les amendements nos 129 et 131.
En revanche, son avis sera différent sur l’amendement n° 130.
Le CESU+ permettra la contemporanéité du versement à partir du 1er janvier 2022 et nous avons décalé au 1er avril suivant le versement du crédit d’impôt pour tous les services à la personne intermédiés, c’est-à-dire qui passent par des prestataires, des mandataires ou des plateformes.
Nous avons bien étudié votre amendement. Néanmoins, nous discutons actuellement avec les fédérations d’organismes et de particuliers employeurs et je crains que celui-ci ne soit, d’une certaine manière, anxiogène. En effet, en limitant le champ aux prestataires, vous excluez les mandataires, alors que, au 1er avril prochain, d’autres intervenants seront concernés.
Même si j’entends votre demande de précision, je vous propose, s’il y a une difficulté rédactionnelle, que celle-ci soit examinée dans le cadre de la navette, quelle que soit d’ailleurs l’issue de la commission mixte paritaire. Encore une fois, la restriction du champ que vous proposez me paraît plus anxiogène que rassurante pour les acteurs du secteur.
Le Gouvernement demande donc le retrait de l’amendement n° 130.
Mme la présidente. Madame la rapporteure générale, l’amendement n° 130 est-il maintenu ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je suis d’accord avec vous pour en débattre et revoir la rédaction, monsieur le ministre, parce que j’ai bien senti que le sujet était anxiogène ; nous sommes plusieurs à avoir été alertés sur le sujet.
Je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 130 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 129.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 4 rectifié, présenté par MM. Bonne, Belin et Bonhomme, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Burgoa et Charon, Mmes Chauvin, de Cidrac, Delmont-Koropoulis et Estrosi Sassone, MM. B. Fournier, Genet, Gremillet, Hugonet, Klinger et Laménie, Mme Lassarade, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mme M. Mercier, MM. Milon et Pointereau, Mmes Puissat et Richer et MM. Sautarel, Savary, Sido et Sol, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 88
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Les structures assurant des services à la personne intermédiés peuvent, à compter du 1er avril 2022, solliciter les aides sociales et fiscales correspondant aux dépenses effectuées par les particuliers au titre des services qu’elles délivrent facturés à compter du 1er janvier 2022.
La parole est à M. Bernard Bonne.
M. Bernard Bonne. Cet article traite de la généralisation de la contemporanéité du crédit d’impôt pour les particuliers employeurs. Cette généralisation n’est annoncée qu’au 1er avril 2022 pour les entreprises de services à la personne.
Cet amendement vise à permettre à tous les foyers ayant recours à des services à la personne de bénéficier de cette mesure dès le 1er janvier 2022. Il s’agirait d’autoriser les structures de services à la personne à mettre en place un processus transitoire leur permettant d’offrir, dès le 1er janvier 2022, un équivalent du crédit d’impôt instantané à leurs clients.
Pour ce faire, elles consentiraient, sur les trois premiers mois de l’année 2022, à faire l’avance de trésorerie du crédit d’impôt auquel auraient droit leurs clients, puis auraient la possibilité de se faire rembourser cette avance dès le crédit d’impôt immédiat généralisé, à partir du 1er avril 2022.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. J’entends bien votre préoccupation, mon cher collègue, mais seule l’avance du crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile sera généralisée aux particuliers recourant à un mandataire ou à un prestataire au 1er avril 2022, tandis que les aides sociales ne leur seront avancées qu’à partir de 2023.
Aussi n’est-il pas envisageable de rembourser les sommes prises en charge au titre de ces dernières dès le 1er avril 2022.
Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement pour les mêmes raisons.
Notre objectif est d’intégrer, au 1er janvier 2023, les publics bénéficiaires de l’APA et de la PCH. En 2020 et au début de l’année 2021, j’ai constitué avec l’Assemblée des départements de France (ADF), dans le cadre des départements retenus pour l’expérimentation, le Nord et le département de Paris, des groupes de travail chargés de la préparation des conventions, afin de tenir compte dans le processus de contemporanéisation de la compétence des conseils départementaux en matière de gestion de l’APA et de la PCH.
Cet amendement pose donc un problème technique de ce point de vue.
Au-delà de cette difficulté technique concernant les bénéficiaires des prestations APA et PCH, l’objectif plus fondamentalement recherché est peut-être de contemporanéiser le crédit d’impôt au titre des services à la personne, hors APA et PCH, pour les particuliers employeurs et ceux ayant recours à des structures intermédiaires.
Malheureusement, cette difficulté purement technique nous amène à proposer une mise en œuvre décalée – de trois mois seulement, ce qui relativise les questions de distorsion de concurrence. Je m’en suis expliqué à de nombreuses reprises avec les différents acteurs : nous ne saurions le faire plus tôt sans risque. Lorsqu’on met en place une contemporanéisation, qu’il s’agisse d’un prélèvement ou d’un crédit d’impôt, à l’instar de ce que nous avons fait avec le prélèvement à la source, lequel sert aujourd’hui de socle à ce dispositif, la première nécessité est de garantir la faisabilité technique. Or, en l’espèce, je ne saurais le faire pour les services intermédiaires au 1er janvier.
C’est la raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Bonne, l’amendement n° 4 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Bonne. Au bénéfice de ces excellentes explications, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 4 rectifié est retiré.
L’amendement n° 132, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 89
Remplacer le mot :
activités
par le mot :
prestations
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 11, modifié.
(L’article 11 est adopté.)
Après l’article 11
Mme la présidente. L’amendement n° 358 rectifié quater, présenté par MM. Klinger, Haye et Reichardt, Mmes Drexler, Muller-Bronn et Schillinger, M. Savary, Mme Belrhiti, MM. Chatillon, Somon et Houpert, Mme Dumont, MM. Levi et Charon, Mme Gruny, M. Kern, Mmes Chauvin, Perrot et Delmont-Koropoulis, MM. Piednoir, de Nicolaÿ, Brisson, Burgoa et Favreau, Mmes Lavarde, Bourrat, Sollogoub, Joseph, Herzog et Raimond-Pavero et MM. Belin, Lefèvre, J.M. Arnaud, Laménie, Rapin, Mandelli, Longuet et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le f du 4° du III de l’article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« f) Les rémunérations et indemnités perçues par les employés des organismes permanents à caractère social des collectivités locales et des entreprises ainsi que des associations et fondations sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée au sens du d du 1° du 7 de l’article 261 du code général des impôts, à l’occasion d’au plus six manifestations de bienfaisance ou de soutien organisées dans l’année à leur profit exclusif, mentionnées au c du 1° du 7 de l’article 261 du même code ; ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Christian Klinger.
M. Christian Klinger. Il s’agit d’accompagner le monde associatif, qui mérite de véritables encouragements au regard de son implication bénévole qui contribue efficacement à la cohésion sociale et à l’animation locale.
À ce jour, les réglementations sociale et fiscale des associations sans but lucratif diffèrent. Les auteurs de cet amendement proposent donc de les harmoniser en alignant la réglementation sociale sur le cadre fiscal déjà ancien.
En effet, la loi permet d’exonérer d’impôts – TVA et impôts commerciaux –, sans déclaration préalable ou a posteriori, les recettes des associations sans but lucratif dans la limite de six manifestations annuelles de bienfaisance ou de soutien.
L’idée est donc d’étendre cette réglementation fiscale au plan social. En effet, à la suite de contrôles Urssaf, certaines associations ont subi des redressements de cotisations sociales pour de petites sommes – 40 ou 50 euros – versées à des personnes physiques venues une journée en renfort des bénévoles pour la logistique des manifestations – garder un parking, surveiller une tribune…
L’exonération sociale proposée ne serait valable que pour six manifestations annuelles de bienfaisance ou de soutien, à l’instar de ce qui se passe en matière fiscale, et ne concernerait que des associations sans but lucratif loi 1901 ou de droit local d’Alsace-Moselle. Bien évidemment, comme l’exige la loi, les déclarations et paiements seront maintenus pour les professionnels du spectacle vivant et les intermittents du spectacle.
Cet amendement fait suite à de nombreux échanges avec la Fédération nationale des comités et organisateurs de festivités (FNCOF) et la Ronde des fêtes. Son adoption permettrait une nécessaire simplification et une harmonisation du dispositif fiscal et de celui des cotisations sociales auxquelles sont assujetties les associations à but non lucratif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous savons bien, mon cher collègue, qu’il faut entreprendre un certain nombre de démarches administratives pour obtenir parfois très peu. Mais vous savez aussi que la commission est spontanément peu favorable à la création de niches au sein de la contribution sociale généralisée (CSG).
Toutefois, dans la mesure où il s’agit d’un petit problème essentiellement administratif de déclaration, avec un enjeu financier sans doute très faible pour la sécurité sociale, le Gouvernement pourrait peut-être nous éclairer sur ce qu’il conviendrait d’entreprendre pour faciliter la vie des organismes et associations concernés.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Cet amendement pose tout d’abord une question de principe : il est utile que ces emplois, même ponctuels et restreints au secteur associatif, soient encadrés et que leurs titulaires bénéficient des droits sociaux afférents, ce que ne permettraient pas les dispositifs d’exonération proposés.
En outre, nous avons mis en place le chèque emploi associatif (CEA), sur le modèle du CESU, qui permet aux associations, même aux plus petites d’entre elles, de recruter des personnes pour une courte durée et pour un événement particulier via une plateforme unique et en ne faisant qu’une seule déclaration.
Enfin, comme Mme la rapporteure générale, le Gouvernement n’est pas favorable à la création de niches fiscales ou sociales.
Dans la mesure où les réponses techniques existent déjà et qu’il lui semble nécessaire d’assurer les droits sociaux de ces salariés ponctuels, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable également, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 358 rectifié quater.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 654 rectifié bis, présenté par Mme Renaud-Garabedian, M. Bansard, Mme Raimond-Pavero, M. D. Laurent, Mme Dumont, MM. Charon et de Nicolaÿ et Mmes Belrhiti et Joseph, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 136-6 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, les mots : « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de certains de leurs revenus et simultanément assujettis à quelque titre que ce soit à un régime obligatoire français d’assurance maladie » ;
b) Les I bis et I ter sont abrogés ;
c) À la première phrase du premier alinéa du III, la première occurrence du mot : « à » est remplacée par le mot : « et » ;
2° L’article L. 136-7 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
- au premier alinéa, les mots : « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de certains de leurs revenus et simultanément assujettis, à quelque titre que ce soit, à un régime obligatoire français d’assurance maladie » ;
- à la première phrase du 1° , les mots : « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France, à raison de l’origine de certains de leurs revenus et simultanément assujettis à un régime obligatoire français d’assurance maladie » ;
b) Les I bis et I ter sont abrogés ;
c) Le deuxième alinéa du VI est supprimé.
II. - L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
1° Au premier alinéa du I de l’article 15, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I » ;
2° À la première phrase du I de l’article 16, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I ».
III. - Le 1° du I du présent article s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2021.
IV. - Le 1° du même I s’applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2021.
V. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Inlassablement, monsieur le ministre, je présente tous les ans le même amendement.
Depuis 2019, la situation fiscale de nos compatriotes résidant à l’étranger se traduit par une grande iniquité : les non-résidents européens sont exonérés de CSG et de CRDS (contribution pour le remboursement de la dette sociale) sur les revenus fonciers des immeubles encaissés en France, et non les Français vivant en dehors de l’Europe. Cette exonération est la conséquence d’une mise en conformité avec le droit européen à laquelle le Gouvernement a dû se résigner.
Cet assujettissement aux prélèvements sociaux des non-résidents d’un État tiers à l’Europe constitue une réelle discrimination face à l’impôt et décourage l’investissement en France de nos compatriotes installés à l’étranger.
Dans la majorité des cas, les non-résidents s’acquittent, en sus de la CSG et de la CRDS, d’une cotisation soit à une caisse de sécurité sociale à adhésion volontaire, comme la Caisse des Français de l’étranger (CFE), soit au système de protection sociale de leur pays de résidence. Cette situation les conduit donc à subir une double imposition à finalité sociale, alors même qu’ils ne bénéficient d’aucune prestation en contrepartie, ce que rejette le juge européen.
Nos compatriotes vivant hors de l’Union européenne ont le sentiment qu’il existe deux catégories de Français de l’étranger : les Européens et les autres, ces derniers étant moins bien traités et considérés. Ils vivent cette décision comme une grave injustice.
Au nom du principe d’équité fiscale, l’exonération de CSG et de CRDS devrait être généralisée à tous les non-résidents, où qu’ils habitent.
Je tiens enfin à rappeler que nous avions, l’année dernière, adopté un amendement identique avec le soutien et l’appui de M. Retailleau.
Mme la présidente. L’amendement n° 635 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 920 rectifié ter, présenté par MM. Leconte et Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le I ter est ainsi rédigé :
« I ter. – Par dérogation aux I et I bis, ne sont pas redevables de la contribution les personnes qui ne sont pas à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français. » ;
2° À la première phase du premier alinéa du III, la première occurrence du mot : « à » est remplacée par le mot : « et ».
II. – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
1° Le dernier alinéa du I de l’article 15 est supprimé ;
2° À la première phrase du I de l’article 16, les références : « aux I et I bis » sont remplacées par la référence : « au I ».
III. – Le I s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2012.
IV. – Le 1° du II s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2012.
V. – Le 2° du II s’applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2012.
VI. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à IV est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement concerne non seulement la CSG-CRDS qui s’applique aux revenus, notamment immobiliers, des non-résidents, mais aussi le respect du droit européen, de nos engagements conventionnels et de nos principes constitutionnels.
Le juge européen a considéré qu’un non-résident ne pouvait être assujetti, hors de France, à la CSG ou à la CRDS, dans la mesure où ces contributions ne servent pas à financer des prestations auxquelles il aurait droit. Vous ne payez donc pas cette CSG si vous habitez à Zagreb, mais vous devez vous en acquitter si vous habitez à Belgrade, où vous ne bénéficiez pas du règlement européen de 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale.
Cette situation engendre ainsi une atteinte au principe constitutionnel d’égalité devant l’impôt. Car oui, il s’agit bien d’un impôt – vous l’avez vous-même souligné, monsieur le ministre, dans un certain nombre de courriers adressés à vos homologues étrangers pour qualifier cette CSG-CRDS.
Dès lors, pourquoi nos compatriotes de l’étranger y seraient-ils assujettis lorsqu’ils résident en dehors de l’Europe quand ceux qui habitent en Europe en sont exonérés ? Nous proposons donc de supprimer ce prélèvement pour l’ensemble des non-résidents.
Je tiens enfin à souligner que la rédaction de cet amendement reprend les dispositions d’une proposition de loi du groupe Les Républicains, adoptée en mai 2020, avec notre soutien. Cela devrait faciliter son adoption…
Mme la présidente. L’amendement n° 2 rectifié, présenté par MM. Frassa, Le Gleut et Retailleau, Mmes Lavarde et Procaccia, M. Bascher, Mmes L. Darcos et V. Boyer, M. Burgoa, Mmes Lassarade et Gruny, M. Charon, Mme Dumont, M. Genet, Mme Eustache-Brinio, M. D. Laurent, Mmes Raimond-Pavero et Delmont-Koropoulis et M. Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le I ter de l’article L. 136-6, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« I quater. – Par dérogation aux I et I bis du présent article, ne sont pas redevables de la contribution les personnes, qui sont redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de revenus de source française et simultanément assujettis à quelque titre que ce soit à un régime obligatoire français d’assurance maladie. » ;
2° Après le I ter de l’article L. 136-7, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« I quater. – Par dérogation aux I et I bis, ne sont pas redevables de la contribution les personnes, redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de revenus de source française et simultanément assujettis à quelque titre que ce soit à un régime obligatoire français d’assurance maladie.
« L’établissement payeur mentionné au 1 du IV ne prélève pas la contribution assise sur les revenus de placement dès lors que les personnes titulaires de ces revenus justifient, selon des modalités définies par décret, des conditions définies au premier alinéa du présent I quater.
« En cas de prélèvement indu par l’établissement payeur, ce dernier peut restituer le trop-perçu à la personne concernée et régulariser l’opération sur sa déclaration ou la personne concernée peut solliciter auprès de l’administration fiscale la restitution de la contribution prélevée par l’établissement payeur.
« La contribution assise sur les plus-values mentionnées au 2° du I n’est pas due dès lors que les personnes titulaires de ces plus-values justifient, selon des modalités définies par décret, des conditions définies au premier alinéa du présent I quater. »
II. – À la première phrase du I de l’article 16 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, les mots : « au I ter » sont remplacés par les mots : « aux I ter et I quater ».
III. – Le présent article s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2022 et aux plus-values réalisées au titre de cessions intervenues à compter de cette même date.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Ronan Le Gleut.
M. Ronan Le Gleut. Comment justifier qu’un Français de Djibouti paie plus d’impôts qu’un Français de Barcelone avec les mêmes sources de revenus en France ? Cela n’a aucun sens. En termes d’équité fiscale, c’est totalement indéfendable.
Or c’est bien ce dont il s’agit ici : les uns paient la GSG-CRDS ; les autres pas. C’est injustifiable. Ces amendements visent tous à rétablir l’équité fiscale entre Français établis hors de France.
L’amendement n° 2 rectifié, porté par Christophe-André Frassa, s’inspire des travaux de la proposition de loi, déposée par Bruno Retailleau, relative aux Français établis hors de France, dont Mme Jacky Deromedi était le rapporteur. La rédaction retenue tient compte des observations de la commission des affaires sociales du 12 novembre 2020.
Le dispositif proposé semble donc parfaitement correspondre à nos travaux. Nous voulons faire en sorte que les Français vivant hors de l’Union européenne, de l’Espace économique européen et de la Suisse bénéficient enfin des mêmes droits que les autres.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Certes, le Sénat a déjà voté cette disposition, mais la commission tient à rappeler sa position de principe : pour qu’elles ne deviennent pas, à l’instar de l’impôt sur le revenu, des contributions à taux élevé et à l’assiette émiettée, il convient de préserver l’assiette de la CSG et de la CRDS.
Les dispositifs proposés coûteront 300 millions d’euros. Gardez bien à l’esprit qu’il ne s’agit pas seulement de procurer un avantage aux non-résidents français en dehors de l’Europe, mais aussi aux étrangers installés en France. Tel doit particulièrement être le cas de la CSG et de la CRDS sur les revenus patrimoniaux, qui permettent de faire participer le capital au financement de la solidarité. De ce point de vue, la cohérence de certains signataires d’amendements prête d’ailleurs à interrogation.
Un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) contraint la France à exonérer les personnes relevant d’un autre régime de sécurité sociale européen. Mais un autre arrêt de la même Cour souligne expressément qu’il est loisible à la France de faire participer à la solidarité nationale les autres personnes non inscrites à sa sécurité sociale.
La commission préfère donc s’en tenir aux obligations juridiques de la France, sans aller plus loin. Je ne fais sans doute pas le poids face au président Retailleau,…
M. Martin Lévrier. Mais si !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. … mais la commission est très attachée au maintien de l’assiette de la CSG et de la CRDS. Le moment n’est pas encore aux cadeaux de 300 millions d’euros.
La commission est défavorable à ces trois amendements.
Mme Catherine Procaccia. Il ne s’agit pas d’un cadeau !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement n’ose pas dire combien il partage l’avis de Mme la rapporteure générale pour ne pas nuire à sa démonstration (Sourires.), mais il est en total accord avec ses propos.
Le Gouvernement a été contraint – c’est le bon terme – d’appliquer la jurisprudence dite « de Ruyter ». Nous ne partageons pas nécessairement cette philosophie, mais nous respectons la jurisprudence. Pour autant, nous ne souhaitons pas qu’elle soit élargie.
Mme Renaud-Garabedian a dit, voilà quelques instants, qu’elle défendait cet amendement, avec d’autres de ses collègues sénateurs représentant les Français de l’étranger, de manière inlassable. Le Gouvernement, quant à lui, défend sa position de manière tout aussi inlassable : avis défavorable à ces trois amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Mme la rapporteure générale, je comprends le principe que vous évoquez, mais il ne s’agit pas ici de faire un cadeau : il s’agit de savoir si l’on respecte le droit.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Le droit est respecté ! (M. le ministre délégué et M. Martin Lévrier acquiescent.)
M. Jean-Yves Leconte. La dernière fois que la France n’a pas respecté le droit en la matière, cela lui a coûté des centaines de millions d’euros !
C’est aussi la raison pour laquelle le Gouvernement a revu sa copie en 2019, de peur d’être de nouveau condamné par la Cour de justice de l’Union européenne. La France a ainsi dû rembourser plusieurs années de cotisations indûment perçues.
Les non-résidents établis hors d’Europe ne pourront saisir la CJUE pour non-respect du principe d’égalité devant l’impôt. Par contre, le jour où le Conseil constitutionnel sera saisi d’une question aussi évidente, il faudra bien rendre ces centaines de millions.
Il me semble donc préférable de respecter le droit le plus rapidement possible. Notre assemblée a déjà adopté cette disposition voilà un peu plus d’un an. Soyons fidèles à notre position et votons cet amendement !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11, et les amendements nos 920 rectifié ter et 2 rectifié n’ont plus d’objet.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 783, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 2° du I de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, le taux : « 9,2 % » est remplacé par le taux : « 12 % ».
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Cet amendement de bon sens vise à aligner le taux de la CSG applicable aux revenus du capital sur celui des revenus d’activité. L’adoption de cet amendement permettrait d’apporter 3 milliards d’euros supplémentaires aux caisses de la sécurité sociale.
J’espère que vous saurez nous expliquer, madame la rapporteure générale, monsieur le ministre, pourquoi les entreprises devraient être en partie exonérées du coût de la reproduction de la force de travail, ce qui ampute les ressources propres de la protection sociale et entraîne une budgétisation croissante du financement de la protection sociale…
Mme la présidente. L’amendement n° 979 rectifié bis, présenté par Mme Le Houerou, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 2° du I de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, le taux : « 9,2 % » est remplacé par le taux : « 10,6 % ».
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise à proposer une hausse exceptionnelle, pour l’année 2022, de la taxation des revenus du capital – produits de placement et patrimoine – pour répondre aux besoins de financement de la crise sanitaire.
Alors que la CSG des revenus d’activité et de remplacement – salaires et pensions de retraite – a augmenté de 1,7 point en 2018 pour financer la baisse de cotisations sociales chômage et maladie, le taux applicable aux revenus du capital – produits de placement et patrimoine – n’a augmenté que de 1 point.
Les auteurs de l’amendement proposent donc d’augmenter la CSG sur les revenus du capital de 1,4 point. Une telle progression permettrait un rendement supplémentaire de 1,5 milliard d’euros au profit des organismes de sécurité sociale. Ces sommes pourraient être exceptionnellement affectées à la gestion de la crise sanitaire et au financement, à long terme, des besoins de la sécurité sociale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission est défavorable à ces deux amendements : afin de rester efficace et de ne pas multiplier les demandes de niche et d’exemption, il importe que les taux de la CSG et de la CRDS restent mesurés.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. On peut se montrer mesuré en politique, madame la rapporteure générale, mais prétendre que les taux de taxation du capital sont mesurés et que leur augmentation ferait courir un risque, cela ne passe pas la rampe !
Il faut se dire la vérité : le rapport de France Stratégie du 14 octobre dernier souligne que la réforme a favorisé l’augmentation des dividendes versés aux ménages et accru leur concentration sur une minorité de foyers fiscaux. En 2020, en pleine crise sanitaire, 24 milliards d’euros de dividendes ont été versés, contre 14 milliards d’euros en 2017, au profit de 0,1 % des foyers fiscaux. Je pense donc qu’il faut être « mesuré » quand on appelle à conserver des taux « mesurés » sur les revenus du capital !
Laissez-moi vous donner un autre exemple – c’est que M. le ministre ne vous a pas beaucoup aidé… (Sourires.)
Le Gouvernement a non seulement supprimé l’impôt de solidarité sur la fortune, mais aussi abaissé l’imposition des produits de placement. Je veux bien que l’on tombe sur les retraités ou que l’on parle de la situation des salariés, mais le taux d’imposition des produits de placement est passé de 24 % à 12,8 %. Et ça, ce n’est pas une baisse modérée ! (Mmes Marie-Noëlle Lienemann et Émilienne Poumirol applaudissent.)
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bravo !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 783. (Moment de flottement au cours du vote.)
Mes chers collègues, exprimez-vous clairement : j’ai l’impression que seuls ceux qui souhaitent voir l’amendement adopté se sont exprimés…
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 979 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 981 rectifié bis, présenté par Mme Le Houerou, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le III de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« III. – Par dérogation aux I et II, sont assujettis à la contribution sociale au taux de 6,3 % les revenus mentionnés aux 1° et 2° du III de l’article L. 136-2, perçus par les personnes dont les revenus de l’avant-dernière année, définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts :
« 1° D’une part, excèdent 14 375 € pour la première part de quotient familial, majorée de 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 15 726 € pour la première part, majorés de 4 221 € pour la première demi-part et 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 16 474 €, 4 414 € et 3 838 € ;
« 2° D’autre part sont inférieurs à 33 000 € pour la première part de quotient familial, majorée de 8 810 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 36 101 € pour la première part, majorés de 9 6891 € pour la première demi-part et 8 810 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 37 819 €, 10 133 € et 8 810 € ;
« 3° D’autre part sont inférieurs à 14 375 € pour la première part de quotient familial, majorée de 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 15 726 € pour la première part, majorés de 4 221 € pour la première demi-part et 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 16 474 €, 4 414 € et 3 838 €. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement du groupe vise à revenir sur la hausse injuste de CSG votée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018. En effet, le Gouvernement avait alors augmenté de 1,7 point la CSG, entraînant une perte de pouvoir d’achat importante, notamment pour les retraités et les agents publics.
Après la crise sociale de 2019, le Gouvernement a fixé un seuil de 2 000 euros mensuels en deçà duquel les retraités ne sont pas assujettis au taux de CSG revalorisé – 6,6 % au lieu de 8,3 %.
Nous proposons de retenir un seuil de 3 000 euros mensuels, ce qui permettrait de redonner du pouvoir d’achat aux retraités, qui en ont besoin en ce moment.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Le principal problème que pose cette proposition est son coût de plusieurs centaines de millions d’euros, voire davantage.
Des mesures d’atténuation en faveur des retraités modestes ont déjà été adoptées en 2018. Par ailleurs, le Sénat a toujours œuvré, sur toutes les travées, pour préserver le niveau de vie des retraités. Pour autant, il n’est pas d’interdit d’observer que ce sont les revenus des actifs, et non ceux des retraités, qui ont subi les conséquences de la récente crise.
Il est donc difficile d’augmenter l’écart, à revenu égal, entre la CSG acquittée par les actifs et celle acquittée par les retraités, ainsi que le proposent les auteurs de cet amendement.
Pour ces raisons, la commission y est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le revenu médian des actifs, qui s’établit à 1 940 euros, est taxé à 9,2 % au titre de la CSG, soit un taux supérieur aux 8,2 % applicables aux retraites de plus de 2 000 euros.
Au-delà du fait que cette disposition concernerait en définitive assez peu de retraités, elle reviendrait à accorder aux retraites de plus de 2 000 euros un taux d’assujettissement à la CSG inférieur d’un point à celui du salaire médian des actifs.
Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il y sera défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 981 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 237 rectifié bis, présenté par MM. Pointereau et Sido, Mmes Chauvin et L. Darcos, M. Pellevat, Mme Belrhiti, M. Charon, Mme Bellurot, M. Brisson, Mme Jacques, M. Joyandet, Mme Gruny, MM. Grand et Genet, Mme Malet, MM. Louault, Chaize, Burgoa et Favreau, Mmes Garnier, Guidez et Richer, MM. Hingray, Cambon, Chauvet, Laménie, Klinger, S. Demilly, Lefèvre, D. Laurent et Chatillon, Mme Gosselin, MM. Daubresse et Savin, Mmes Joseph, Vermeillet et M. Mercier, MM. Rojouan et Anglars, Mme Borchio Fontimp, MM. Gremillet, Détraigne, B. Fournier, Rietmann, Perrin et Longuet, Mmes Billon et Drexler, MM. Duffourg et Bouchet, Mme Saint-Pé, MM. Longeot et Belin, Mmes Delmont-Koropoulis et Perrot, MM. Piednoir et Tabarot, Mme Raimond-Pavero, M. Rapin, Mme Dumont, M. Le Nay, Mmes Di Folco et Renaud-Garabedian et MM. Babary, Bouloux et Bansard, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le a du I de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsqu’ils proviennent de la location d’une exploitation ou d’une entreprise agricole par une personne bénéficiant d’une pension de retraite en application des articles L. 732-24 ou L. 732-34 du code rural et de la pêche maritime, ces revenus donnent lieu à un abattement de 25 % dans la limite de 20 000 € ; ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-Pierre Richer.
Mme Marie-Pierre Richer. Cet amendement tend à créer un abattement fiscal au profit des retraités agricoles qui décident de mettre en location une partie ou l’intégralité de leurs exploitations – opération plus communément appelée « fermage ».
En effet, nul n’ignore que les agriculteurs perçoivent un très faible niveau de retraite. La loi du 3 juillet 2020 visant à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricoles en France continentale et dans les outre-mer souligne que leur niveau de pension est « en deçà du seuil de pauvreté ».
Aussi, le fermage est devenu une option pour les agriculteurs retraités qui cherchent à obtenir un complément à la faible pension de retraite qu’ils perçoivent. Toutefois, cette option se heurte à un niveau d’imposition très important pouvant atteindre 60 %.
C’est la raison pour laquelle nous proposons de faire bénéficier les agriculteurs retraités d’un abattement de 25 % de la CSG sur les revenus du patrimoine, composante de la CSG qui frappe les revenus fonciers, avec un plafond de 20 000 euros, pour la location de leur exploitation agricole.
Mme la présidente. L’amendement n° 831 rectifié bis, présenté par MM. Menonville, Decool et Guerriau, Mme Paoli-Gagin, MM. A. Marc et Chasseing, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Capus et Malhuret, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au III ter, les mots : « III et III bis » sont remplacés par les mots : « III, III bis, IV et V » ;
2° Le IV est ainsi rétabli :
« IV. – Par dérogation aux I et au V, sont également assujettis à la contribution sociale au taux de 3,8 %, les revenus mentionnés au a du I de l’article L. 136-6 perçus par les personnes percevant par ailleurs des revenus mentionnés aux 1° et 4° du II de l’article L. 136-1-2 et dont :
« 1° D’une part, les revenus définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts perçus l’avant-dernière année excèdent 11 128 € pour la première part de quotient familial, majorés de 2 971 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 13 167 € pour la première part, majorés de 3 268 € pour la première demi-part et 2 971 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 13 768 €, 3 417 € et 2 971 € ;
« 2° D’autre part, les revenus définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts perçus l’avant-dernière ou l’antépénultième année sont inférieurs à 14 548 € pour la première part de quotient familial, majorés de 3 884 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 15 915 € pour la première part, majorés de 4 271 € pour la première demi-part et 3 884 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 16 672 €, 4 467 € et 3 884 €. » ;
3° Le V est ainsi rétabli :
« V. – Par dérogation au I, sont assujettis à la contribution sociale au taux de 6,6 %, les revenus mentionnés au a du I de l’article L. 136-6 du présent code perçus par les personnes dont les revenus de l’avant-dernière année, définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts :
« 1° D’une part, excèdent 14 548 € pour la première part de quotient familial, majorés de 3 884 € pour chaque demi-part supplémentaire. Pour la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion, les montants des revenus sont fixés à 15 915 € pour la première part, majorés de 4 271 € pour la première demi-part et 3 884 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane et Mayotte, ces montants sont fixés, respectivement, à 16 672 €, 4 467 € et 3 884 € ;
« 2° D’autre part, sont inférieurs à 22 580 € pour la première part de quotient familial, majorés de 6 028 € pour chaque demi-part supplémentaire. »
II. – Le 1° du I de l’article 235 ter du code général des impôts est complété par les mots : « , à l’exception des revenus du patrimoine bénéficiant des dispositions des IV et V de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale ».
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Il s’agit d’un amendement porté par Franck Menonville.
Le foncier non bâti, dans sa diversité, constitue une ressource très précieuse pour le maintien de la biodiversité. Toutefois, il fait l’objet d’une taxation défavorable, qui conduit à une tentation de plus en plus grande d’artificialiser ces terres, dans l’optique de vendre au prix des terrains à bâtir.
Or, pour un grand nombre de retraités agricoles à la pension très modeste, ces terres ont représenté, pendant leur période d’activité, leur outil de travail, et représentent désormais un complément de revenu indispensable.
Franck Menonville demande l’alignement des taux de prélèvements sociaux de ces revenus fonciers sur ceux appliqués aux retraités, ce qui permettrait de reconnaître la véritable nature de ces revenus, à savoir celle d’un complément de retraite et non d’un investissement à caractère patrimonial.
Pour ne pas dénaturer la mesure et faire en sorte qu’elle ne profite qu’aux propriétaires les plus modestes, il est important de circonscrire le bénéfice de ces taux réduits de CSG aux revenus fonciers inclus dans un seuil de revenu global.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La CSG est une contribution dont l’assiette, à la différence de l’impôt sur le revenu, n’est encore pas trop entamée par les niches sociales. Il importe de préserver cet état de fait pour conserver l’intelligibilité et l’efficacité de cet impôt.
En outre, l’instrument le plus à même de soutenir les revenus des retraités agricoles n’est pas un abattement de CSG, qui entamerait l’équilibre déjà très fragile des comptes de la sécurité sociale, mais une hausse des petites pensions. C’est d’ailleurs bien ce que fait le Sénat en soutenant les dispositifs Chassaigne.
Pour ces raisons, la commission est défavorable à l’amendement n° 237 rectifié bis.
L’amendement n° 831 rectifié bis tend à aligner le taux de CSG applicable aux revenus fonciers sur celui applicable aux pensions de retraite et aux allocations chômage.
La détention de biens fonciers accroît la capacité contributive de leur propriétaire, ce qui ne justifie pas l’application de taux réduit de CSG en fonction du revenu fiscal de référence.
L’avis est donc également défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. J’ai du mal à comprendre ce qui est en train de se passer.
Précédemment, nous avons imposé de manière assez importante les mutuelles, et j’étais solidaire d’une telle décision. Or, nous le savons très bien, l’imposition des mutuelles à hauteur de 1 milliard d’euros aura une répercussion sur les cotisations des classes moyennes.
Nous avons accepté une exonération d’impôt sur les propriétés bâties des Français de l’étranger, alors que ces derniers peuvent, à mon avis, payer.
Nous avons refusé d’imposer le capital, et vous avez pu remarquer que je me suis volontairement abstenu sur cette question.
Avec cet amendement, qui concerne les agriculteurs, dont les retraites sont faibles, on refuse l’exonération d’impôt sur leurs propriétés foncières. Je regrette, mais je ne comprends plus !
M. Pascal Savoldelli. C’est la droite !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 237 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 831 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 978 rectifié ter, présenté par M. Jomier, Mmes Meunier, Le Houerou et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 137-41 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Il est institué une contribution de solidarité de la finance pour l’autonomie au taux de 1 %, assise sur les revenus distribués au sens des articles 109 et 120 du code général des impôts. »
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Notre assemblée a effectivement refusé, pour répondre à la préoccupation de notre rapporteure générale, une hausse très modérée de la CSG sur les revenus du capital.
Avec cet amendement, nous proposons, soucieux de l’équilibre de nos comptes sociaux, une contribution de 1 % assise sur les revenus des capitaux mobiliers, pour financer la cinquième branche.
En effet, la création de cette branche n’a pas donné lieu à un financement pérenne. Le rapport Libault faisait état d’un besoin de financement d’environ 6 milliards d’euros en 2024 et de 9 milliards d’euros à partir de 2030 pour l’autonomie. Il est donc nécessaire de doter cette branche de financements propres, qui reposent aujourd’hui à plus de 90 % sur les salariés.
Nous proposons cette contribution de 1 % assise sur les revenus des capitaux mobiliers, ce qui permettrait un rendement annuel d’environ 1,5 milliard d’euros, évitant ainsi le déficit de la branche.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous sommes unanimes pour regretter une grande loi permettant de fixer le périmètre de la branche autonomie.
En définitive, nous le voyons bien, c’est compliqué parce que cette branche enregistre, dès sa création, un déficit. Cependant, une petite part de la CSG lui sera attribuée en 2024. Mais cela ne suffira pas ! En effet, à la lecture du rapport Vachey, on comprend que des moyens considérables, comparés à ce qui est aujourd’hui mis sur la table, devront être mobilisés.
Sur ce point, je partage votre regret, mon cher collègue. Toutefois, Philippe Mouiller, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’autonomie, a souligné la nécessité de disposer d’une vision claire des besoins de la cinquième branche. Une telle loi nous aurait permis de les configurer.
Nous aurions également pu examiner les moyens de financement les plus pertinents. Selon moi, c’est uniquement dans le cadre d’une vision globale que nous aurions pu établir une « contribution de solidarité de la finance pour l’autonomie ». Je ne comprends d’ailleurs pas très bien cette appellation, qui m’a quelque peu embarrassée.
Je le répète, la loi promise sur l’autonomie aurait permis d’évaluer tous ces champs et, surtout, les probables ou futurs moyens de cette branche.
La commission des affaires sociales est donc défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. La branche sera équilibrée d’ici à 2030, y compris en intégrant les mesures du projet de loi de financement de la sécurité sociale, notamment le tarif plancher et la dotation qualité, qui s’appuient sur l’augmentation de 0,15 point de CSG.
Avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je comprends notre rapporteure générale lorsqu’elle parle d’une situation « compliquée ». Certes, mais c’est un choix !
Dans la mesure où ne disposons pas d’une loi-cadre, nous n’allons pas attendre 2030 pour équilibrer les comptes… Je ne reviendrai pas sur ce que j’ai dit lors de la discussion générale, mais les propos de M. le ministre ne sont pas acceptables.
Le financement repose presque exclusivement sur les apports des salariés, que ce soit par le biais des cotisations ou de la CSG. Or nous proposons d’ouvrir une autre piste de financement permettant à la branche d’atteindre beaucoup plus rapidement l’équilibre. Le prélèvement envisagé est très modéré, puisqu’il est bien inférieur aux économies que les grandes fortunes ont réalisées dans le cadre de la flat tax en 2017. Il y a là un facteur de modération et de diversification, visant à conduire cette branche vers l’équilibre.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. Monsieur le ministre, je veux réagir à vos propos. Vous avez évoqué un équilibre obtenu grâce à l’outil existant, à savoir la CSG, alors que nous sommes dans l’incapacité d’estimer réellement les besoins. Nous n’avons pas de vision globale, le contour de la branche n’étant pas défini. Le rapport Vachey donne simplement une orientation. Concernant le handicap, nous ne disposons d’aucune donnée.
Nous sommes donc bien loin d’avoir une véritable vision des besoins financiers ! Si vous considérez que le financement pourra se faire par le biais de ce seul outil, cela signifie que vous conservez le périmètre en l’état : c’est extrêmement inquiétant au regard de l’ensemble des prestations qui ne sont pas prises en charge.
Je soutiens l’intervention de Mme la rapporteure. Très clairement, aujourd’hui, l’urgence est d’avoir une mise à plat complète de toute l’opération.
Malgré l’opportunité qui se présente, vous faites un choix politique, et on comprend quelle sensibilité vous inspire. La vision n’est pas claire. Or, pour faire les choses correctement, il faut analyser les besoins, faire des estimations financières et étudier toutes les pistes. Ensuite, nous pourrons envisager une contribution. Pour le moment, une telle décision me paraît largement prématurée.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre, vous dites que la branche sera à l’équilibre en 2024, grâce à la fraction de CSG dont elle bénéficiera. Mais cela ne sera possible que dans le périmètre des mesures présentées dans ce PLFSS pour 2022. Il ne s’agit pas là d’une grande loi pour l’autonomie, qu’il s’agisse des métiers ou des prestations.
Vous nous inquiétez, surtout si vous devez garder le pouvoir ! (Sourires.) Cela signifie que les mesures prises aujourd’hui le sont pour solde de tout compte…
Selon le rapport Libault, il faudrait débloquer 6,5 milliards d’euros dès 2024. L’amendement que nous nous apprêtons à voter ne constitue que l’une des multiples propositions de financement visant à porter les ambitions dudit rapport.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Comment ne pas soutenir la proposition claire, limpide et juste que vient de présenter Bernard Jomier ? S’agissant de la cinquième branche, compte tenu de tous les discours, engagements, annonces et promesses faits depuis près de cinq ans, comment en êtes-vous arrivé, monsieur le ministre, à ce que vous nous présentez ?
Tout est reporté à 2030 : c’est totalement contradictoire avec tout ce qui a été dit par les membres de ce gouvernement, et vous le savez fort bien.
Madame la rapporteure générale, vos explications étaient très confuses. Finalement, cet amendement vous semble aller dans le bon sens, mais toutefois, néanmoins… Cela me fait penser à ce que Charles Péguy appelait le « poil de chien battu » ! Vous n’y croyez pas, vous prenez simplement acte du fait qu’on n’y arrive pas et que c’est un échec.
Les propos de M. Jomier sont très importants. Le financement ne peut pas seulement s’appuyer sur les revenus du salariat. Lorsqu’on a eu le courage de créer la CSG, à une certaine époque, tous les revenus étaient sollicités, ce qui est très bien.
Aujourd’hui, il faut trouver une autre source de revenus, et tel est l’objet de cet amendement. Selon moi, c’est une question très importante. L’attente est telle que nous ne pouvons pas nous en tenir à ces discours confus.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je suis désolée d’avoir été confuse… J’adore Charles Péguy, mais je trouve votre remarque quelque peu inélégante, mon cher collègue !
Les rapports Vachey, Libault, Broussy et El Khomri ont défini tous les besoins liés à la cinquième branche. Nous avons cru à cette promesse, et que le temps était venu de débattre d’une loi. Je le rappelle, il existe une ministre déléguée chargée de l’autonomie ! C’est un rendez-vous manqué.
Il est quelque peu difficile, au détour d’un amendement, de prévoir le financement de cette cinquième branche. Il n’y a pas de confusion de ma part sur cette question ; je me suis contentée d’exprimer un regret.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Tout d’abord, monsieur Sueur, s’il faut considérer ce qui a été dit et ce qui a été fait en matière d’autonomie, je vous invite à faire la comparaison non pas sur cinq ans, mais plutôt sur dix ans.
En effet, ce gouvernement met en place le tarif plancher pour les interventions à domicile, des revalorisations et la dotation qualité. Les amendements portés dans ce PLFSS représentent davantage en termes de volume financier que la loi que portait Michèle Delaunay – une bonne loi que nous avions beaucoup étudiée et soutenue. Aujourd’hui, l’effort financier est sans commune mesure !
La trajectoire de financement proposée permettra à la branche autonomie d’être équilibrée dès 2024, et excédentaire en 2030.
Il y a une différence entre l’amendement qui vient d’être défendu par M. Jomier et notre projet. Cet amendement reprend l’intégralité ou presque des préconisations du rapport Libault. Pour notre part, nous avons fait le choix du virage domiciliaire : toutes les mesures prévues dans l’avant-projet de loi de Brigitte Bourguignon relatif à l’autonomie et à la dépendance s’inscrivent dans ce cadre, ce qui permettrait à la cinquième branche d’être équilibrée en 2024 et excédentaire en 2030 ; cela paraît de bonne politique.
Considérant que le cadre financier prévu est suffisant, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous sommes là au cœur du débat. La fameuse loi sur l’autonomie qui nous a été promise pendant cinq ans n’a pas abouti, mais se retrouve dans quatre articles de ce PLFSS.
Cette cinquième branche est à nos yeux une coquille complètement vide, dans la mesure où nous n’avons jamais discuté ni de gouvernance ni de moyens financiers. Cela a d’ailleurs été dit à plusieurs reprises – et pas uniquement par des membres de notre groupe – au sein de la commission des affaires sociales. Nous sommes aujourd’hui confrontés au problème, et il faut trouver des ressources.
Bien que nous ne soyons pas d’accord avec le principe même de cette cinquième branche, il en sera ainsi demain. Nous nous apprêtons donc à voter l’amendement de Bernard Jomier parce qu’il faut taxer les plus riches pour financer cette branche.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. M. le ministre vient d’apporter quelques clarifications aux questions que je souhaitais poser.
Le rapport Libault, confirmé par le rapport El Khomri, a estimé les besoins de financement à 6 milliards d’euros en 2024 et à 9 milliards d’euros en 2030. Quant au rapport Vachey, il comportait des propositions multiples et variées empilant des dispositifs acceptables ou moins acceptables. Nous n’avons jamais débattu de ces rapports pour aboutir à une proposition.
En revanche, j’ai entendu Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, nous dire que 1,5 milliard d’euros avait été consacré l’an dernier à la cinquième branche pour financer notamment les augmentations de salaire, que 2,5 milliards d’euros bénéficieraient à l’investissement, sans autre indication de temps, et que 2,3 à 2,5 milliards d’euros sont prévus, grâce à l’augmentation de 0,15 point de la CSG.
Si les 2,5 milliards d’euros dédiés à l’investissement sont effectivement dépensés en 2024, on aura les 6 milliards d’euros attendus. Toutefois, cela reste de la spéculation intellectuelle, sur la base des chiffres qui ont été avancés par Mme la ministre déléguée et, dans une moindre mesure, par vous-même, monsieur le ministre. D’où la nécessité, que nous ressentons tous, d’une loi précisant non seulement le périmètre et la gouvernance, mais aussi les financements. Celle-ci est indispensable ! Pourrez-vous nous dire quand nous aurons la possibilité d’en débattre ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. L’heure tardive me permet, madame la présidente, d’être un peu malicieux. En réponse aux inquiétudes, que je ne partage pas mais qui sont peut-être prémonitoires, de Mme Poncet Monge, j’ai envie de vous répondre, monsieur Vanlerenberghe : tout de suite après avril 2022 ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Monsieur le ministre, vous avez indiqué au sujet de la dépendance que vous commenciez par vous occuper de la prise en charge à domicile.
Selon moi, il convient d’abord de renforcer les Ehpad, où les personnes sont très dépendantes. Or vous n’avez rien prévu pour ces établissements, sinon l’embauche d’infirmières d’astreinte la nuit ! Or on ne trouvera pas d’infirmières et l’astreinte n’apporte pas grand-chose… Vous proposez également de créer quelques heures supplémentaires pour les médecins coordinateurs.
Dans les Ehpad, lorsque les équipes d’aides-soignantes ou d’infirmières doivent faire les changes, c’est souvent la course. Cette question est prioritaire : il faut créer des postes d’aides-soignantes et d’infirmières. Je parle non pas de 200 000 emplois, mais de 40 000 emplois en trois ans. Cela représente en moyenne cinq emplois par Ehpad, ces établissements comptant en moyenne 80 lits. Voilà ce qui est urgent !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 985 rectifié bis, présenté par Mmes Le Houerou, Meunier et Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 137-41 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Il est créé une contribution dénommée contribution sur les successions et les donations, dont la mission est de financer une partie des besoins de dépenses en autonomie.
« Cette contribution est fixée sur l’actif net taxable comme suit :
«
De 0 à 150 000 € inclus |
0 % |
De 150 000 € à 1 000 000 € |
1 % |
Au-delà de 1 000 000 € |
2 % |
« Les modalités de recouvrement sont réalisées dans les conditions déterminées par l’article 750 ter du code général des impôts.
« La contribution sur les successions et les donations est affectée à la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie telle que mentionnée à l’article L. 14-10-1 du code de l’action sociale et des familles. »
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Nous poursuivons sur le même sujet, à savoir les recettes et le financement de la branche autonomie.
Nous regrettons tous que le Gouvernement ait renoncé à une loi spécifique sur l’autonomie : elle était très attendue par les Français et les Françaises, qui sont confrontés à des besoins de services. Cela a été dit, le financement ne pourra pas être uniquement basé sur les revenus du salariat. De nombreux rapports présentent d’autres sources de financement.
Cet amendement vise à reprendre l’une des propositions du rapport Vachey pour financer l’autonomie, à savoir la mise en place d’une contribution assise sur les droits de succession et de donation les plus importants, c’est-à-dire lorsque l’actif net taxable est supérieur à 150 000 euros.
La cinquième branche relative à l’autonomie n’a aujourd’hui pas fait l’objet d’un mode de financement. Il nous paraît donc important de créer cette nouvelle source de recettes.
Mme la présidente. L’amendement n° 988 rectifié, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 2° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Une contribution au taux de 1 % sur les successions et les donations, définies à l’article 779 du code général des impôts, dont l’actif successoral net est supérieur à 150 000 euros ; ».
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre, le virage domiciliaire, c’est très bien, mais les mesures qui nous sont proposées ne font pas système. Il faut un changement de modèle. Le soutien à l’autonomie à domicile nécessitera des moyens plus importants que ceux définis aujourd’hui. Il conviendra notamment d’ouvrir les enveloppes fermées de l’APA…
Cet amendement ne vise pas à revenir sur les dates de 2024 et 2030, au regard de la démographie des personnes en perte d’autonomie, du nombre de résidences autonomie, qu’il faudra multiplier, et des 300 000 emplois qui devront être créés dans le secteur de l’aide à domicile.
On nous répondra que nous voulons taxer les petits retraités… Je vous invite à lire l’ouvrage de M. Piketty sur les inégalités de patrimoine et leur transmission, qui crée un effet boule de neige.
Cet amendement concerne les successions et donations supérieures à 150 000 euros d’actif successoral net. En effet, 45 % des ménages français déclarent avoir bénéficié d’un héritage, dont le montant médian est de 41 000 euros. Seuls 13 % des héritages sont supérieurs à 100 000 euros. Et seulement 6 % des employés touchent un héritage supérieur à 100 000 euros. Il s’agit donc de taxer des patrimoines qui ne sont pas ceux des classes moyennes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Certes, les successions et donations pourraient constituer l’un des leviers de financement de la cinquième branche, même s’il ne s’agit pas d’une recette classique de la sécurité sociale.
En tout état de cause, je l’ai dit, c’est dans le cadre d’une vision globale que nous pourrons définir les ressources à créer pour financer cette cinquième branche.
Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 985 rectifié bis.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 24 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 328 |
Pour l’adoption | 91 |
Contre | 237 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 988 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 786 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale est complété par une section ainsi rédigée :
« Section…
« Contribution des revenus financiers des sociétés financières et non financières
« Art. L. 242-… – Les revenus financiers des sociétés tenues à l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus, sont assujettis à une contribution dont le taux est égal à la somme des taux des cotisations patronales assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement s’inscrit dans la continuité de notre amendement n° 783, lequel – je veux le souligner – avait été adopté dans un premier temps, puis resoumis au vote de façon assez inattendue, madame la présidente ; cela a permis à notre assemblée de se ressaisir et de modifier son vote, ce qui n’est pas habituel dans cet hémicycle…
Il s’agit de soumettre à cotisation sociale les revenus financiers des sociétés. Face à l’urgence sanitaire et à la nécessité de trouver de nouvelles recettes pour financer notre système de santé, nous proposons de mettre à contribution les montants versés aux actionnaires aux taux actuels des cotisations sociales employeurs de la sécurité sociale.
Il n’y a pas de raison d’opérer une discrimination entre les cotisations sociales employeurs et les montants versés aux actionnaires, lesquels se font pas mal d’argent en période de crise.
Il s’agit aussi d’une incitation forte, pour les entreprises, à privilégier le facteur travail, sujet sur lequel nous pouvons tous nous retrouver.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Une telle contribution pénaliserait les entreprises. En fin de crise, le moment est particulièrement mal choisi.
Quel que soit le contexte, la politique d’investissement des entreprises permet de diversifier leurs ressources, de renforcer la solidité de leur situation financière et de soutenir la croissance de l’économie.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 786 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 25 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 91 |
Contre | 251 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 789 rectifié bis, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La première phrase de l’article L. 137-40 du code de la sécurité sociale est complétée par les mots : « et une contribution de solidarité des actionnaires d’un taux de 2 % sur l’ensemble des dividendes des entreprises ».
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est le troisième amendement que nous présentons sur la mise à contribution des revenus financiers pour le financement de la sécurité sociale.
Après vous avoir proposé d’augmenter le taux de la CSG sur les revenus du capital, puis de créer une cotisation patronale sur les revenus financiers, nous souhaitons cette fois mettre à contribution les dividendes des entreprises dans la prise en charge de la perte d’autonomie. Nous espérons avoir plus de réussite avec ce dernier amendement qu’avec les deux précédents, car il s’agit d’assurer la prise en charge de la perte d’autonomie au sein du régime général de l’assurance maladie.
La perte d’autonomie ne constitue pas à nos yeux un risque spécifique. Si l’on crée une branche nouvelle pour ce risque, faudra-t-il aussi, demain, une branche pour la jeunesse, une branche pour l’accompagnement des naissances, et ainsi de suite ?…
Cet amendement de repli vise donc à créer une contribution de 2 % sur les dividendes versés aux actionnaires. Il nous paraît juste de mettre à contribution les actionnaires plutôt que les salariés et les retraités, l’enjeu étant d’utiliser les recettes dégagées pour financer un tarif national de l’heure d’aide à domicile à 25 euros, une augmentation de l’APA et de la PCH, ainsi que la revalorisation des métiers du secteur de l’aide à domicile.
M. Pascal Savoldelli. Très bien !
Mme la présidente. L’amendement n° 380, présenté par Mmes Taillé-Polian et Poncet Monge, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Gontard, Fernique et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Une contribution de solidarité des actionnaires d’un taux de 1 % est prélevée sur l’ensemble des dividendes des entreprises.
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement, qui va dans le même sens que le précédent, vise à établir une contribution financière au taux de 1 % sur l’ensemble des dividendes versés par les entreprises afin que celles-ci participent à l’adaptation de la société au vieillissement.
L’objectif est d’augmenter le budget de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie afin de mieux prendre en charge les situations de perte d’autonomie, tout en garantissant une égalité de traitement sur le territoire national.
Je rappelle que les dividendes ne sont que rarement réinvestis en France : ils enrichissent des fonds de pension, des gestionnaires d’actifs et des fonds vautours. Ces dividendes sont symptomatiques d’un modèle qui repose sur la création de valeur actionnariale à court terme et néglige bien trop souvent toute responsabilité sociale, pour ne rien dire des responsabilités environnementales.
Les grandes entreprises et leurs actionnaires doivent participer à l’effort commun de solidarité et les plus riches ne doivent pas en être exemptés. Par ailleurs, nos aînés ne sauraient être considérés plus longtemps comme une charge pour la société ; ils sont, au contraire, un maillon essentiel de la cohésion sociale.
Quant aux personnes en situation de handicap, il faut qu’elles cessent de subir marginalisation et exclusion. Elles doivent faire l’objet d’un accompagnement humain et matériel à la hauteur de l’enjeu qu’elles représentent pour notre société. En d’autres termes, la priorité est aujourd’hui d’octroyer davantage de moyens à l’accompagnement des personnes âgées en perte d’autonomie et des personnes en situation de handicap.
Voilà donc, faute d’un texte plus global, une nouvelle piste de financement pérenne, autre que les revenus, pour la prise en charge du handicap et de la perte d’autonomie.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, j’entends votre souhait de rechercher des moyens de financement pour cette cinquième branche.
Néanmoins, comme nous l’avons dit précédemment, nous aurions préféré une vision globale, c’est-à-dire une loi Autonomie dont l’examen aurait permis de réfléchir au périmètre, au financement et à la gouvernance de cette branche.
Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 789 rectifié bis.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 26 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 91 |
Contre | 251 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 380.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 320 rectifié, présenté par MM. Savin, Brisson et Kern, Mme Billon, MM. Burgoa, Anglars et D. Laurent, Mmes Muller-Bronn, Chauvin, Puissat et Belrhiti, M. Laugier, Mme Malet, M. Regnard, Mme Berthet, MM. Bouchet et B. Fournier, Mme Gosselin, M. Darnaud, Mme Joseph, MM. Babary et Klinger, Mme L. Darcos, MM. Gremillet, Longuet, Charon, Belin, Houpert, Levi, Genet, Wattebled, Laménie et Tabarot, Mme Bonfanti-Dossat, M. Allizard, Mme Canayer, M. Saury, Mme Ventalon, MM. Mandelli et P. Martin, Mme N. Delattre, MM. Cambon, Sido et Somon, Mmes Lopez et Di Folco, MM. Rapin et Pellevat, Mmes Mélot, Gruny et Thomas et MM. Savary et Capus, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 4° du II bis de l’article L. 862-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° À 5 % pour les garanties supplémentaires permettant le remboursement de thérapeutiques non médicamenteuses, validées par la Haute Autorité de santé, non prises en charge par le régime obligatoire d’assurance maladie français, sous réserve que l’organisme ne recueille pas, au titre de ce contrat, d’informations médicales auprès de l’assuré ou des personnes souhaitant bénéficier de cette couverture et que les cotisations ou primes ne soient pas fixées en fonction de l’état de santé de l’assuré, et à 20,27 % si ces conditions ne sont pas respectées. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Frédérique Puissat.
Mme Frédérique Puissat. Après cette série de votes par scrutin public, je vous invite, mes chers collègues, à lever la main en faveur de cet amendement. (Sourires.)
Il s’agit d’abaisser le taux de la taxe de solidarité additionnelle à 5 % sur les garanties supplémentaires dont bénéficient les adhérents de contrats de complémentaires santé qui intègrent une prise en charge financière de thérapeutiques non médicamenteuses – séances de diététique, psychologie, activité physique adaptée.
Un tel dispositif a vocation à encourager le développement de la prise en charge par les organismes d’assurance maladie complémentaire de thérapeutiques non médicamenteuses.
Mme la présidente. L’amendement n° 321 rectifié, présenté par MM. Savin, Brisson et Kern, Mme Billon, MM. Burgoa, Anglars et D. Laurent, Mmes Muller-Bronn, Chauvin, Puissat et Belrhiti, M. Laugier, Mme Malet, M. Regnard, Mme Berthet, MM. Bouchet et B. Fournier, Mme Gosselin, M. Darnaud, Mme Joseph, MM. Babary et Klinger, Mme L. Darcos, MM. Gremillet, Longuet, Charon, Belin, Houpert, Levi, Genet, Wattebled, Laménie et Tabarot, Mme Bonfanti-Dossat, M. Allizard, Mme Canayer, M. Saury, Mme Ventalon, MM. Mandelli et P. Martin, Mme N. Delattre, MM. Cambon, Sido, Somon et Capus, Mmes Lopez, Borchio Fontimp et Di Folco, MM. Rapin et Pellevat, Mmes Mélot, Lassarade et Thomas et M. Savary, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 4° du II bis de l’article L. 862-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° À 5 % pour les garanties supplémentaires permettant le remboursement des prescriptions prévues à l’article L. 1172-1 du code de la santé publique, validées par la Haute Autorité de santé et non prises en charge par le régime obligatoire d’assurance maladie, sous réserve que l’organisme ne recueille pas, au titre de ce contrat, d’informations médicales auprès de l’assuré ou des personnes souhaitant bénéficier de cette couverture et que les cotisations ou primes ne soient pas fixées en fonction de l’état de santé de l’assuré, et à 20,27 % si ces conditions ne sont pas respectées. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Frédérique Puissat.
Mme Frédérique Puissat. Cet amendement de repli ne vise, pour l’essentiel, que les activités physiques adaptées.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Si le développement de la prise en charge des séances de diététique, de psychologie et d’activité physique adaptée par les complémentaires santé doit être encouragé – nous sommes unanimes sur ce point –, il convient de rappeler que la taxe de solidarité additionnelle finance la complémentaire santé solidaire et que les dépenses des complémentaires santé ont été réduites par la crise sanitaire.
Il ne semble donc pas judicieux de prévoir des allégements de TSA à l’heure où les complémentaires santé vont prendre toute leur place dans le redressement des comptes de la sécurité sociale.
Avis défavorable, par conséquent, sur l’amendement n° 320 rectifié.
Quant à l’amendement de repli n° 321 rectifié, il a pour objet de créer un taux réduit de taxe de solidarité additionnelle sur les garanties supplémentaires offertes par les complémentaires santé permettant la prise en charge de l’activité physique adaptée.
Dans une logique de solidarité et s’agissant d’instaurer un juste partage de l’effort de réduction des déficits de la sécurité sociale, il n’est pas souhaitable de prévoir des allégements de TSA.
Avis défavorable également.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 321 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 11 bis (nouveau)
I. – Au premier alinéa de l’article L. 152 du livre des procédures fiscales, après la dernière occurrence du mot : « sociale, », sont insérés les mots : « aux organismes mentionnés à l’article 1er de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques, ».
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2025.
Mme la présidente. L’amendement n° 133, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
et les mots : « même code » sont remplacés par les mots : « code de la sécurité sociale ».
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 11 bis, modifié.
(L’article 11 bis est adopté.)
Article 11 ter (nouveau)
Au premier alinéa du IV de l’article 8 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021, les mots : « de l’année 2021 » sont remplacés par les mots : « des années 2021 et 2022 ». – (Adopté.)
Article 12
I. – Le premier alinéa du 1° quater de l’article 83 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il en va de même des cotisations ou primes versées par les employeurs publics et leurs agents aux contrats collectifs de protection sociale complémentaire pour lesquels la souscription des agents est rendue obligatoire en application d’un accord prévu au II de l’article 22 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ou en application de l’arrêté mentionné au II de l’article L. 4123-3 du code de la défense. »
II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le 4° du II de l’article L. 242-1, il est inséré un 4° bis ainsi rédigé :
« 4° bis Dans des limites fixées par décret, la participation d’un employeur public au titre d’un contrat collectif de protection sociale complémentaire, versée obligatoirement en application d’un accord prévu au II de l’article 22 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ou en application de l’arrêté mentionné au II de l’article L. 4123-3 du code de la défense, destinée au financement des garanties de protection sociale complémentaire. Cette participation est exclue de l’assiette des cotisations lorsque les agents de l’employeur public qu’il assure souscrivent obligatoirement à ce contrat ; »
2° Le neuvième alinéa de l’article L. 137-15 est complété par les mots : « , ni les employeurs publics de moins de onze agents au titre de la participation mentionnée au 4° bis du II de l’article L. 242-1 du présent code » ;
3° Au deuxième alinéa de l’article L. 137-16, après le mot : « droit, », sont insérés les mots : « pour les contributions des employeurs publics mentionnées au 4° bis du II de l’article L. 242-1 du présent code ».
III. – Jusqu’à la date d’entrée en vigueur des contrats sélectionnés en application du III de l’article 22 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, le 4° bis du II de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, le neuvième alinéa de l’article L. 137-15 du même code et le deuxième alinéa de l’article L. 137-16 dudit code sont applicables au remboursement mentionné au II de l’article 4 de l’ordonnance n° 2021-175 du 17 février 2021 relative à la protection sociale complémentaire dans la fonction publique versé aux agents publics de l’État et aux militaires.
IV. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2022.
Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L’amendement n° 46 rectifié est présenté par MM. Michau, Pla, P. Joly, Gillé, Antiste et Bourgi.
L’amendement n° 395 rectifié est présenté par M. J.M. Arnaud, Mmes Billon et Devésa, MM. Levi et Moga et Mme Herzog.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 1
Supprimer les mots :
aux contrats collectifs de protection sociale complémentaire pour lesquels la souscription des agents est rendue obligatoire
II. – Alinéa 4
1° Première phrase
Supprimer les mots :
au titre d’un contrat collectif de protection sociale complémentaire, versée obligatoirement en application d’un accord prévu au II de l’article 22 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ou en application de l’arrêté mentionné au II de l’article L. 4123-3 du code de la défense,
2° Seconde phrase
Supprimer le mot :
obligatoirement
La parole est à M. Sebastien Pla, pour présenter l’amendement n° 46 rectifié.
M. Sebastien Pla. Cet amendement tend à établir une nouvelle rédaction de l’article 12, conforme à l’ordonnance n° 2021-175 du 17 février 2021. Celle-ci dispose que la participation financière des employeurs publics au financement des garanties de protection sociale complémentaire est réservée aux contrats à caractère collectif ou individuel sélectionnés au terme d’une procédure de mise en concurrence.
L’article 12 restreint la portée de l’ordonnance aux seuls contrats collectifs obligatoires, réservant ainsi le régime social et fiscal afférent aux seuls agents dont les employeurs auront fait le choix de cet unique dispositif de couverture.
Là où l’ordonnance visait à réduire les inégalités entre agents publics et salariés du secteur privé, l’application de l’article 12 du PLFSS ainsi rédigé reviendrait, à terme, à créer des inégalités entre agents de la fonction publique.
Aussi cet amendement a-t-il pour objet de rétablir l’équité aussi bien entre dispositifs de couverture qu’entre agents publics. Son adoption permettrait de respecter l’esprit de la réforme de la protection sociale complémentaire (PSC) en cours dans la fonction publique.
Mme la présidente. L’amendement n° 395 rectifié n’est pas soutenu.
Les cinq amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 1 rectifié quater est présenté par MM. Favreau, Belin, D. Laurent, Genet, Karoutchi, Charon et Saury, Mmes Joseph et Dumont, MM. Brisson, Bouchet et Klinger, Mme Gosselin, MM. Burgoa, Savary et Mandelli et Mme Estrosi Sassone.
L’amendement n° 44 rectifié est présenté par MM. Michau, Pla et P. Joly, Mme Poumirol et MM. Gillé, Antiste et Bourgi.
L’amendement n° 443 rectifié ter est présenté par M. Milon, Mme L. Darcos, MM. Chatillon, Daubresse, B. Fournier, Bonne et J.B. Blanc, Mme Bourrat, MM. Darnaud, Laménie et Longuet, Mmes Malet, Puissat et Ventalon et MM. J.P. Vogel, Sol, Gremillet et Sido.
L’amendement n° 614 rectifié est présenté par Mme Havet et MM. Mohamed Soilihi, Rambaud et Théophile.
L’amendement n° 768 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 1
Supprimer les mots :
pour lesquels la souscription des agents est rendue obligatoire en application d’un accord prévu au II de l’article 22 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ou en application de l’arrêté mentionné au II de l’article L. 4123-3 du code de la défense
II. – Alinéa 4, seconde phrase
1° Après le mot :
participation
insérer le mot :
obligatoire
2° Supprimer le mot :
obligatoirement
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié quater.
M. René-Paul Savary. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. Sebastien Pla, pour présenter l’amendement n° 44 rectifié.
M. Sebastien Pla. La protection sociale complémentaire dans la fonction publique telle qu’elle est prévue par l’ordonnance du 17 février 2021 est organisée de façon spécifique, distincte de celle qui existe au sein du secteur privé. Or la rédaction actuelle du texte qui nous est soumis comporte une ambiguïté, qu’il convient de lever.
Il est ainsi proposé d’indiquer de façon explicite que le dispositif d’exonération prévu est bien lié à la participation obligatoire de l’employeur à la protection sociale complémentaire de ses agents, et non à un seul type de contrat.
Il s’agit de respecter le principal objectif de l’ordonnance du 17 février, à savoir encourager la couverture de l’ensemble des agents de la fonction publique, sans distinction de statut.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Bonne, pour présenter l’amendement n° 443 rectifié ter.
M. Bernard Bonne. L’ordonnance du 17 février 2021 rend obligatoire la participation des employeurs publics à la protection sociale complémentaire de leurs agents.
Si une telle participation financière est rendue obligatoire pour les employeurs publics sur les cotisations des garanties santé des agents, et possible sur leurs garanties de prévoyance, la nature du contrat portant ces garanties est ouverte et peut aussi bien être collective qu’individuelle, à adhésion obligatoire qu’à adhésion facultative.
La rédaction actuelle de l’article 12 étant insuffisante, il convient de l’éclaircir.
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 614 rectifié.
M. Dominique Théophile. Défendu !
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° 768.
M. Pascal Savoldelli. Cet amendement étant le dernier d’une liasse d’amendements similaires, dont certains sont identiques, nous voterons pour tous ceux qui viennent d’être présentés.
Un accord interprofessionnel, en 2015, a rendu obligatoire la participation des employeurs privés à la protection sociale des salariés. Vous le savez, pour notre part, nous attendons avec impatience la mise en place d’un « 100 % santé ». Il nous semble inacceptable que 5,6 millions d’agents publics doivent encore payer intégralement leur complémentaire santé.
L’ordonnance du 17 février 2021 apporte une amélioration certes réelle – il faut le reconnaître –, mais timide, puisque l’obligation de prise en charge par l’employeur public du coût de la complémentaire santé pourra n’être, dans un premier temps, que de 20 %. La participation obligatoire à 50 % ne s’appliquera qu’à compter de 2024 pour les agents de la fonction publique d’État et de 2026 pour les agents hospitaliers et territoriaux.
Un horizon plus proche, pour ne pas dire immédiat, serait apprécié par l’ensemble des agents des trois fonctions publiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je voudrais commencer par rappeler que l’article 12 met fin à une inégalité entre le secteur privé, au sein duquel les employeurs financent le coût des cotisations de complémentaire santé de leurs salariés à hauteur d’au moins 50 % depuis 2016, et le secteur public.
Sur ces amendements qui émanent de nombreuses travées, la commission a émis un avis défavorable. Ils ont été très bien défendus ; il me sera donc difficile d’avoir autorité sur votre vote, mes chers collègues…
Quelques éléments d’explication, néanmoins. Dans le privé, c’est bien le caractère obligatoire de l’adhésion qui justifie l’assimilation des cotisations de complémentaires santé à des cotisations sociales, et par conséquent l’exonération fiscale et sociale qui leur est appliquée.
En outre, les contrats collectifs obligatoires sont objectivement les plus solidaires. Si l’adhésion n’est que facultative, en effet, les plus jeunes et les mieux portants, dont le risque est minoré et qui font baisser la prime de tout le monde, ne souscriront pas.
Dès lors, je soutiens l’équilibre qui a été trouvé dans l’ordonnance. J’en rappelle le dispositif : d’une part, tous les agents publics adhérant à une complémentaire bénéficient d’une participation de leur employeur, étant entendu que tout le monde est avantagé dans le nouveau système par rapport à la situation antérieure ; d’autre part, lorsqu’un contrat collectif à adhésion obligatoire est mis en place, cet avantage est renforcé par une exonération fiscale et sociale sur les adhésions.
Je ne sais, mes chers collègues, si ces éléments suffiront à emporter la vôtre, d’adhésion (Sourires.) ; voilà en tout cas les raisons qui motivent l’avis défavorable de la commission.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Avis défavorable, pour les raisons invoquées par Mme la rapporteure.
Notre volonté est d’instaurer dans le secteur public un système très similaire à celui qui prévaut dans le secteur privé depuis 2016. Effectivement, monsieur Savoldelli, nous organisons une montée en puissance progressive : un premier plancher est fixé à 15 euros par mois au 1er janvier 2022 ; lui succédera un deuxième plancher au 1er janvier 2023, avant l’entrée en vigueur de la prise en charge à 50 % au 1er janvier 2024 pour les agents de l’État.
Je tiens à préciser que cet engagement des employeurs publics représente plus d’un milliard d’euros par an et que nous avons mis en place cette trajectoire progressive en accord avec les représentants des employeurs de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière. L’ordonnance du 17 février 2021 a été prise en application de la loi de 2019, que j’avais eu l’honneur de présenter devant le Parlement, de transformation de la fonction publique.
Il nous est apparu logique de prévoir une montée en charge progressive, d’autant plus que la coordination des employeurs de la fonction publique territoriale a accepté, à l’occasion de la rédaction de l’ordonnance, d’adopter une position favorable aux mesures qu’elle contient sans solliciter de compensation de la part de l’État, considérant que cette prise en charge s’inscrit dans une dynamique de convergence entre les droits des agents publics et ceux des salariés du secteur privé, et, corrélativement, entre les devoirs respectifs des employeurs publics et privés.
Nous sommes attachés, nous aussi, à l’équilibre trouvé dans l’ordonnance de 2021 et à cette montée en charge progressive, étant entendu que les dispositions relatives à l’exonération fiscale et sociale applicable aux contrats de complémentaire santé souscrits par les agents publics sont convergentes avec celles qui prévalent dans le secteur privé, comme l’a rappelé Mme la rapporteure.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Si le calendrier prévu pour faire « converger », comme vous dites, le secteur public et le secteur privé, me semble à moi aussi un peu lent, je suis d’accord avec Mme la rapporteure sur un point : il faut que les contrats soient obligatoires et collectifs. C’est essentiel !
J’ai beaucoup travaillé dans le secteur de l’aide à domicile. Je peux vous dire que tant que la convention collective nationale de la branche n’avait pas rendu obligatoire la mutuelle, un certain nombre d’aides à domicile, souvent des femmes, n’étaient couvertes que par leur mari ; quant aux familles monoparentales, elles n’avaient d’autre choix, pour s’assurer, que de souscrire un contrat à un tarif individuel beaucoup plus coûteux, bien entendu, que le tarif collectif.
La solidarité, c’est la mutualisation ! À chaque fois que l’on a morcelé la solidarité, en traitant différemment les actifs et les retraités, ou les actifs eux-mêmes selon qu’ils ont un enfant, deux enfants, trois enfants ou pas d’enfant, selon une logique d’inflation dans la différence, on a porté un coup au système mutualiste et cassé, en réalité, cette solidarité.
Je suis pour une complémentaire santé collective et obligatoire dans le secteur public, comme dans le secteur privé !
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Une question, monsieur le ministre, sur la modération, la lenteur, la progressivité : pourquoi la participation à 50 % de l’employeur public au financement des complémentaires sera-t-elle effective en 2024 pour les agents de la fonction publique d’État mais seulement en 2026 pour les agents hospitaliers et territoriaux ?
Cette distinction ne nous semble pas légitime. Pour quelles raisons différez-vous la mise en œuvre de la réforme dans deux des trois fonctions publiques ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Il y a deux raisons à cela, monsieur le sénateur, dont la première, très pratique, n’est pas une raison de principe. Dans la fonction publique hospitalière, les systèmes de prise en charge des soins – je ne parle pas de la prévoyance – peuvent être spécifiques à chaque établissement. Mais je n’alléguerai pas ces particularismes locaux à l’appui de ma position.
La deuxième raison est plus importante à mes yeux : comme je l’ai indiqué voilà un instant, la rédaction de cette ordonnance s’est faite en concertation avec les employeurs publics territoriaux et hospitaliers – quant à l’État, il tâche d’être cohérent avec lui-même…
Là où il s’est agi de mettre en place ce nouveau droit et cette convergence avec le secteur privé, favorable aux agents publics, il a été dit et démontré par lesdits employeurs que le caractère soutenable de la montée en puissance nécessitait ces deux ans.
J’entends votre argument, monsieur le sénateur Savoldelli : on peut regretter la différence faite entre deux des volets de la fonction publique, d’un côté, et un troisième, à savoir l’État, de l’autre. Mais il fallait pourvoir au besoin de soutenabilité, les engagements financiers afférents étant extrêmement importants, tant d’un point de vue global que, a fortiori, d’un point de vue individuel.
Les états des lieux réalisés au moment de la loi de 2019 et au moment de la préparation de l’ordonnance montrent en effet une extraordinaire hétérogénéité : hétérogénéité des employeurs publics territoriaux ; hétérogénéité, à un degré un peu moindre, des employeurs publics hospitaliers ; et malheureusement – cela paraît difficilement concevable –, extrême hétérogénéité de l’employeur public qu’est l’État, lequel, loin d’avoir une position unitaire, adopte des positions très différentes d’un ministère à l’autre. Certains ministères ne prennent pas part, ou quasiment pas, pour des montants si symboliques qu’ils en deviennent dérisoires, au financement de la protection sociale complémentaire, quand d’autres font bénéficier leurs agents d’un taux de prise en charge atteignant 30 % – c’est le cas d’un ministère en particulier.
Une telle hétérogénéité ainsi que le « saut » financier qu’implique cette réforme nous ont conduits à prévoir cette montée en puissance progressive. Celle-ci n’est peut-être pas satisfaisante au regard du principe d’égalité, mais elle nous semble la plus soutenable.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. J’ai compris les explications qui ont été données : il faut un certain temps pour mettre sur pied un dispositif. Mais le tout est d’arriver quelque part !
Je précise que la solidarité de ce dispositif collectif est toute relative, dans la mesure où les personnes âgées, qui, elles, sont soumises à des contrats individuels, sont par définition mises de côté. Et on sait comment, ensuite, les choses se passent : les organismes complémentaires n’hésitent pas à répercuter sur les contrats individuels des retraités les charges de fonctionnement supplémentaires qu’ils supportent pour avoir concouru à des appels d’offres ayant pour objet la conclusion d’un contrat collectif…
Soyons-y attentifs. Au bénéfice des explications qui ont été données, je retire l’amendement n° 1 rectifié quater.
Mme la présidente. L’amendement n° 1 rectifié quater est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 46 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 44 rectifié, 443 rectifié ter, 614 rectifié et 768.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 15 rectifié quater est présenté par MM. Favreau, Belin, D. Laurent, Karoutchi, Genet, Charon, Bouchet, Savary et Klinger, Mme Gosselin, MM. Burgoa et Brisson, Mmes Dumont et Joseph, MM. Saury et Mandelli et Mme Estrosi Sassone.
L’amendement n° 45 rectifié est présenté par MM. Michau, Pla, Bourgi, Antiste, P. Joly et Gillé.
L’amendement n° 403 rectifié bis est présenté par Mme Préville, MM. Montaugé, Tissot et Chantrel, Mmes Monier et Conway-Mouret, M. Redon-Sarrazy et Mmes Poumirol, Meunier et Jasmin.
L’amendement n° 637 rectifié bis est présenté par Mmes Le Houerou et Blatrix Contat et MM. Bouad et Jeansannetas.
L’amendement n° 1025 rectifié est présenté par MM. Théophile et Iacovelli.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Au plus tard douze mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport permettant d’évaluer l’impact des exonérations fiscales et sociales des différents types de contrats de protection sociale complémentaire souscrits par les agents de la fonction publique.
La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° 15 rectifié quater.
M. René-Paul Savary. Il est défendu.
Mme la présidente. La parole est à M. Sebastien Pla, pour présenter l’amendement n° 45 rectifié.
M. Sebastien Pla. L’harmonisation du régime fiscal et social des contributions des employeurs publics à la protection sociale complémentaire des agents et la création d’un mécanisme d’exonération fiscale et sociale en la matière rendent nécessaire une évaluation quantitative afin, si besoin est, d’adapter le dispositif et d’encourager la couverture la plus large des agents de la fonction publique, indépendamment du type de contrat de PSC retenu par l’employeur public.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 403 rectifié bis.
Mme Michelle Meunier. Défendu !
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 637 rectifié bis.
Mme Annie Le Houerou. Défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 1025 rectifié.
M. Dominique Théophile. Il est défendu également.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Chacun connaît l’avis traditionnel de la commission sur les demandes de rapport. Je m’interroge, de surcroît, sur l’opportunité de dresser un bilan de la réforme dans douze mois alors que son déploiement se fera progressivement jusqu’en 2026…
Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 15 rectifié quater, 45 rectifié, 403 rectifié bis, 637 rectifié bis et 1025 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 599 rectifié, présenté par Mme Guidez, MM. Henno et Vanlerenberghe, Mmes Sollogoub et Jacquemet, M. Duffourg, Mme Devésa et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À l’article L. 911-2, les mots : « et du risque chômage » sont remplacés par les mots : « , du risque chômage et du risque de perte d’autonomie chez un proche au sens des articles L. 1225-62 et L. 3142-16 du code du travail » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 911-8, après le mot : « maternité », sont insérés les mots : « ou à la perte d’autonomie chez un proche au sens des articles L. 1225-62 et L. 3142-16 du code du travail ».
II. – Au premier alinéa des articles L. 141-1 et L. 145-1 du code des assurances, après le mot : « maternité », sont insérés les mots : « ou à la perte d’autonomie chez un proche au sens des articles L. 1225-62 et L. 3142-16 du code du travail ».
III. – À l’article 11 de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques, après le mot : « maternité », sont insérés les mots : « ou à la perte d’autonomie chez un proche au sens des articles L. 1225-62 et L. 3142-16 du code du travail ».
IV. – Au titre des garanties collectives mentionnées à l’article L. 911-2 du code de la sécurité sociale, les personnes mentionnées à l’article L. 168-8 du même code bénéficiant d’un congé de proche aidant bénéficient d’une indemnité complémentaire à l’allocation prévue au même article. Elle est servie pendant une période ne pouvant excéder la durée de versement de cette même allocation selon les dispositions prévues à l’article L. 3142-26 du code du travail ou, à défaut d’accord, par le 1° de l’article L. 3142-27 du même code.
Le montant mensuel de l’indemnité est égal à la différence entre d’une part le montant de la rémunération nette mensuelle que percevait la personne et d’autre part le montant de l’allocation prévue à l’article L. 168-8 du même code et les avantages éventuels prévus au titre d’un accord collectif, ou le cas échéant des indemnités servies aux demandeurs d’emploi.
Le cas échéant, les contributions des personnes mentionnées à l’article L. 168-8 du même code bénéficiant d’un congé de proche aidant destinées au financement des prestations de protection sociale complémentaire entrant dans le champ des articles L. 911-1 et L. 911-2 du présent code, sont exclues de l’assiette des cotisations de sécurité sociale propre à chaque assuré, pour une fraction de 5 % du montant du plafond de la sécurité sociale.
Un décret fixe les conditions d’application du présent paragraphe.
V. – Au titre des garanties collectives mentionnées à l’article L. 911-2 du code de la sécurité sociale, les personnes mentionnées à l’article L. 544-1 du même code bénéficiant d’un congé de présence parentale bénéficient d’une indemnité complémentaire à l’allocation prévue au même article. Elle est servie pendant une période ne pouvant excéder la durée de versement de cette même allocation.
Le montant mensuel de l’indemnité est égal à la différence entre d’une part le montant de la rémunération nette mensuelle que percevait la personne et d’autre part le montant de l’allocation prévue à l’article L. 168-8 du même code et les avantages éventuels prévus au titre d’un accord collectif, ou le cas échéant des indemnités servies aux demandeurs d’emploi.
Le cas échéant, les contributions des personnes mentionnées à l’article L. 544-1 du même code bénéficiant d’un congé de présence parentale destinées au financement des prestations de protection sociale complémentaire entrant dans le champ des articles L. 911-1 et L. 911-2 du présent code, sont exclues de l’assiette des cotisations de sécurité sociale propre à chaque assuré, pour une fraction de 5 % du montant du plafond de la sécurité sociale.
Un décret fixe les conditions d’application du présent paragraphe.
VI. – La perte de recettes résultant du présent article pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
VII. – La perte de recettes résultant du présent article pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
VIII. – Le présent article entre en vigueur à la date d’application des dispositions de l’article 32 sexies de la présente loi.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. Cet amendement tend à prévoir que les contrats collectifs santé prennent en charge la différence entre la rémunération nette du travailleur et l’allocation journalière du proche aidant (AJPA) ou l’allocation journalière de présence parentale (AJPP), que ce PLFSS revalorise au niveau du SMIC.
Monsieur le ministre, nous saluons cette démarche de revalorisation, mais, au demeurant, elle est surtout l’aveu d’un niveau d’allocation précédemment bien trop faible pour rendre le congé de proche aidant attractif. Il convient, en la matière, de lever tout frein d’ordre financier ; or votre mesure reste au milieu du gué. Nous considérons que l’État a pris sa part de cet effort.
L’objet de cet amendement est de garantir un maintien de la rémunération pour les personnes qui assumeraient la charge d’un proche en perte d’autonomie. Ce dispositif s’imposerait aux conventions et aux accords collectifs, comme le prévoit l’article L. 911-1 du code de la sécurité sociale.
Les prestations versées feront l’objet d’une exonération sociale qui tiendrait lieu de compensation au cas où les assureurs, bien que le risque soit pour eux quasiment nul, décideraient d’augmenter leurs primes. Avant l’extension des contrats collectifs santé aux trois fonctions publiques, qui va encore élargir l’assiette, les cotisants sont au nombre de 25 millions, pour 400 000 potentiels bénéficiaires de l’AJPA, sachant que cette allocation indemnise le congé de proche aidant dans la limite de soixante-six jours sur l’ensemble de la carrière professionnelle. Bref, le risque est proche de zéro pour les assureurs.
Ainsi, mes chers collègues, et par cohérence avec l’adoption à l’unanimité par notre assemblée de ma proposition de loi visant à favoriser la reconnaissance des proches aidants, je vous invite à soutenir cet amendement d’humanité.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je voudrais souligner la constance de notre collègue Jocelyne Guidez, qui cherche par tous les moyens, dès qu’un projet ou une proposition de loi lui en donne l’occasion, à améliorer l’accompagnement, notamment financier, des aidants.
Le dispositif qu’elle propose mérite à mon avis d’être débattu, comme toute proposition relative à la dépendance et à l’aide apportée aux aidants, quoiqu’il ne trouve sa place dans un PLFSS que par le biais d’une mesure d’abattement d’assiette des cotisations que la commission pourrait ne pas soutenir sur le fond.
Mme Guidez souhaitant sans doute un éclairage sur l’état de la réflexion du Gouvernement à ce sujet, la commission demande l’avis de ce dernier sur l’amendement de notre collègue.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement a souhaité, par un amendement qui a été adopté, élargir le champ des bénéficiaires de l’AJPA, d’une part, et, d’autre part, revaloriser le montant de cette allocation pour le rehausser à hauteur du SMIC, garantissant ainsi la pleine effectivité de ce nouveau droit en consolidant le niveau de son indemnisation.
La situation des personnes en congé de proche aidant va donc connaître une amélioration significative et le recours à cette prestation devrait augmenter.
Il nous paraît par ailleurs prématuré d’envisager une prise en charge de la perte de revenu non couverte par l’AJPA ou par l’AJPP puisque l’impact d’une telle réforme sur le secteur de la protection sociale complémentaire ne peut pas être connu pour le moment.
De surcroît, si le champ des garanties collectives devait être étendu, à terme, à la perte de revenu des proches aidants, il faudrait que les modalités et le montant de la prise en charge soient définis au niveau de la branche sur la base d’une négociation collective, ce que l’adoption immédiate de dispositions législatives ne permettrait pas.
Je tiens à préciser à l’attention de Mme la sénatrice Guidez et de Mme la rapporteure que nous avons confié une mission à la plateforme RSE, la plateforme nationale d’actions globales pour la responsabilité sociétale des entreprises, sur la conciliation des vies personnelle et professionnelle des aidants en emploi. Cette mission devra notamment formuler des recommandations pour améliorer le recours au congé de proche aidant par des solutions mises en place par les entreprises. Il nous semble donc logique d’attendre les conclusions de cette mission.
Je salue, comme Mme la rapporteure, la persévérance de Mme Guidez. Les dispositions introduites par amendement dans le texte que nous vous proposons représentent une première avancée, qu’il nous paraît nécessaire de consolider avant de songer à l’élargir comme vous le proposez.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Après les explications données par M. le ministre, il me semble plus sage de demander également le retrait de cet amendement, même si j’entends bien que notre collègue y est attachée.
Mme la présidente. Madame Guidez, l’amendement n° 599 rectifié est-il maintenu ?
Mme Jocelyne Guidez. Oui, je le maintiens. Il s’agit au contraire d’une avancée. Il est grand temps que l’on puisse faire des propositions sérieuses !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 314 rectifié quater est présenté par Mme Deseyne, M. Milon, Mmes Lassarade, Micouleau et Belrhiti, MM. D. Laurent, Longuet, Cardoux, Panunzi, Cadec, Lefèvre, Pellevat, Burgoa, B. Fournier, Brisson et Perrin, Mmes Raimond-Pavero et Bonfanti-Dossat, MM. Belin et Charon, Mme Estrosi Sassone, MM. Darnaud, Bonne et Gremillet, Mmes Thomas et Borchio Fontimp, MM. Rapin et Bouchet, Mmes Puissat et Gruny, MM. J.P. Vogel, Mandelli et Cambon, Mme Di Folco, M. Klinger et Mme Joseph.
L’amendement n° 566 rectifié ter est présenté par MM. Chasseing, Menonville, Guerriau, Médevielle et A. Marc, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Wattebled et Decool, Mme Paoli-Gagin, MM. Capus, Malhuret, Détraigne, Longeot, Levi et Laménie, Mme Dumont et M. Grand.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l’article L. 862-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ce taux est applicable aux contrats d’assurance maladie complémentaire relatifs à des opérations individuelles et collectives à adhésion obligatoire ou facultative, sous réserve que l’organisme ne module pas, au-delà d’un seuil fixé par décret et au titre de ce contrat, le niveau de prise en charge des actes et prestations médicaux en fonction du choix de l’assuré de recourir ou non à tout professionnel de santé ayant conclu une convention mentionnée à l’article L. 863-8 du présent code. » ;
2° Au quatrième alinéa, les mots : « deuxième ou troisième » sont remplacés par les mots : « deuxième, troisième ou quatrième ».
La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour présenter l’amendement n° 314 rectifié quater.
Mme Chantal Deseyne. Cet amendement vise à encadrer la pratique du remboursement différencié dans le cadre du contrat solidaire et responsable afin de lutter contre toutes les formes de reste à charge subies.
Cette pratique permet aux complémentaires de moins bien rembourser leurs assurés qui ne se rendraient pas chez un professionnel de santé affilié à leur réseau de soins. Ce n’est pas sans conséquence pour les assurés, qui voient leur reste à charge varier en fonction du professionnel auquel ils s’adressent.
C’est pourquoi il est proposé, au travers de cet amendement, de conditionner les avantages fiscaux accordés aux complémentaires santé par une limitation du niveau possible de différenciation des remboursements.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 566 rectifié ter.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement est identique à celui qui vient d’être présenté. Il y a quelques jours, une complémentaire a demandé à une personne qui n’a pas de voiture de parcourir 50 kilomètres pour être prise en charge alors qu’un opticien se trouve à 10 ou 20 kilomètres de chez elle. Les assurés doivent-ils prendre un taxi ou faire appel à une tierce personne pour être correctement remboursés ? C’est inadmissible !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à revenir à la logique initiale du contrat solidaire et responsable en mettant surtout fin aux avantages fiscaux dont peuvent bénéficier les organismes complémentaires sur la taxe de solidarité additionnelle.
Il convient de ne plus inciter la pratique consistant à moduler le remboursement selon le choix de l’assuré, qu’il opte ou non pour un médecin conventionné.
La commission a donc émis un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Ces amendements nous paraissent redondants avec un certain nombre de dispositions du code de la sécurité sociale.
J’émets donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 314 rectifié quater et 566 rectifié ter.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12.
Je suis saisie de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 407 rectifié est présenté par Mmes Létard, Férat et les membres du groupe Union Centriste.
L’amendement n° 408 rectifié est présenté par MM. Menonville, Decool, Guerriau et A. Marc, Mmes Paoli-Gagin et Mélot et MM. Lagourgue, Chasseing, Capus et Malhuret.
L’amendement n° 861 rectifié est présenté par M. Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
L’amendement n° 1019 rectifié est présenté par MM. Duplomb, J.M. Boyer, Retailleau, Anglars, Babary, Bacci, Bas, Bascher, Bazin et Belin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, MM. E. Blanc, Bonne et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet et Bouloux, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Burgoa, Cadec et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Charon et Chatillon, Mme Chauvin, MM. Chevrollier et Courtial, Mme L. Darcos, M. Darnaud, Mme de Cidrac, MM. de Legge et de Nicolaÿ, Mmes Delmont-Koropoulis, Demas, Deseyne, Di Folco, Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. B. Fournier et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Hugonet et Husson, Mmes Imbert, Jacques et Joseph, MM. Karoutchi, Klinger et Laménie, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Le Gleut, Le Rudulier, Lefèvre, H. Leroy et Longuet, Mme Malet, M. Mandelli, Mme M. Mercier, M. Meurant, Mme Micouleau, MM. Milon et Mouiller, Mmes Muller-Bronn et Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Perrin et Piednoir, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas, Procaccia, Puissat et Raimond-Pavero, MM. Rapin et Regnard, Mme Richer, MM. Rietmann, Rojouan, Saury, Sautarel, Savary et Savin, Mme Schalck, MM. Segouin, Sido, Sol et Tabarot, Mme Ventalon et MM. C. Vial et J.P. Vogel.
L’amendement n° 1024 rectifié ter est présenté par MM. Tissot, Pla, Montaugé et Antiste, Mme Blatrix Contat, MM. Bouad et Bourgi, Mme Conway-Mouret, MM. Fichet et Houllegatte, Mme Jasmin, M. P. Joly, Mmes G. Jourda et Monier, MM. Leconte et Redon-Sarrazy, Mme Van Heghe, MM. Vaugrenard et Stanzione, Mmes Le Houerou, Lubin et Féret, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne, Meunier, Poumirol, Rossignol, Bonnefoy et Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin, Lurel, Mérillou et Michau, Mmes Préville et S. Robert, MM. Sueur, Temal, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 4° du III de l’article 8 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 et l’article 16 de la loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021 sont abrogés.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 407 rectifié.
M. Olivier Henno. Lors de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 nous avions déjà reporté la suppression du dispositif d’exonération lié à l’emploi de travailleurs occasionnels-demandeurs d’emploi (TO-DE).
Compte tenu de la difficulté d’embaucher, en particulier pour les agriculteurs, il s’agit de pérenniser le dispositif TO-DE, notamment via des exonérations de charges patronales.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 408 rectifié.
M. Daniel Chasseing. Il est défendu.
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 861 rectifié.
Mme Véronique Guillotin. Il est également défendu.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° 1019 rectifié.
M. René-Paul Savary. Défendu !
Mme la présidente. La parole est à M. Sebastien Pla, pour présenter l’amendement n° 1024 rectifié ter.
M. Sebastien Pla. Le coût du travail saisonnier en France est 27 % plus élevé qu’en Allemagne, 37 % plus élevé qu’en Italie et 75 % plus élevé qu’en Pologne. Les fruits et légumes, majoritairement importés en France, proviennent de pays qui n’ont pas les mêmes règles et les mêmes contraintes environnementales que nous. La problématique du secteur agroalimentaire est donc claire en termes de compétitivité !
Si nous ne sommes pas en mesure de soutenir ces filières à travers l’exonération des TO-DE, nous n’y arriverons pas, d’autant qu’aujourd’hui nous sommes tous d’accord pour changer de modèle agricole et de paradigme en allant vers davantage d’agroécologie et d’agriculture bio.
Or le développement de l’agriculture bio nécessite plus d’huile de coude et moins de produits phytosanitaires ! Il importe donc de voter ces amendements pour pouvoir continuer à exonérer de charges patronales l’emploi des travailleurs occasionnels agricoles.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission rejoint M. Pla et l’ensemble de nos collègues qui défendent la pérennisation du dispositif TO-DE, dispositif que j’ai moi-même eu l’occasion de soutenir l’année dernière, car il participe à l’économie de certaines filières agricoles.
J’émets donc un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable au bornage dans le temps des exonérations fiscales et sociales pour permettre une évaluation, ce qui ne préjuge en rien le maintien ou l’abrogation du dispositif TO-DE auquel, à titre personnel, j’ai eu l’occasion il y a deux ans de dire mon attachement.
J’émets donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 407 rectifié, 408 rectifié, 861 rectifié, 1019 rectifié et 1024 rectifié ter.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12.
L’amendement n° 26 rectifié, présenté par M. Pla, Mmes Féret et Poumirol, MM. Bourgi et Antiste, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret et MM. Redon-Sarrazy, Stanzione et Michau, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le V de l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est abrogé.
II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du maintien du profil de l’exonération actuellement définie à l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est compensée à due concurrence par la majoration des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Sebastien Pla.
M. Sebastien Pla. Il existe en France 11 510 coopératives d’utilisation de matériel agricole (CUMA). À ce jour, un agriculteur sur deux y est adhérent. Ces coopératives ont permis de promouvoir diverses formes de mutualisations et ont été pionnières pour le développement des groupements d’employeurs dans la coopération agricole. Cependant, elles sont toujours exclues du bénéfice de l’exonération visée à l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime.
Cette exclusion est un obstacle au développement de l’agriculture de groupe sur les territoires – tous mes collègues ici présents le savent dans leurs départements respectifs – et constitue une rupture d’égalité. C’est pourquoi je vous invite à voter cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Si la commission est favorable à la pérennisation du dispositif TO-DE, elle est aussi soucieuse de préserver son périmètre et son paramétrage actuels. Ce serait sans doute une erreur de l’ouvrir à d’autres filières, moins directement concernées dans leur équilibre économique par ce dispositif.
J’émets donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 935 rectifié bis, présenté par Mme Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 133-4-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette procédure est conditionnée à un bilan social de l’assuré qui pose les capacités de remboursement sans porter atteinte à la sécurité de la famille de l’assuré. »
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Nous avons déjà présenté un amendement similaire l’année dernière.
Il arrive régulièrement que les organismes versant les prestations de solidarité commettent des erreurs, soit de leur propre fait, soit en raison des difficultés de déclaration des bénéficiaires. Or la récupération de ces sommes peut s’avérer violente pour certaines familles, tout simplement parce qu’il s’agit pour elles de sommes importantes – même si elles ne paraissent pas telles pour la caisse en question – à rembourser en une ou deux fois.
Pour prévenir ces situations délicates, nous demandons qu’un bilan social soit réalisé afin d’évaluer les capacités de remboursement de la dette en veillant à la protection de la famille et de l’allocataire.
D’aucuns nous répondront que cette pratique existe déjà, mais ce n’est pas exact. Nous recevons d’ailleurs tous régulièrement dans nos permanences des personnes qui viennent nous faire part des difficultés qu’elles rencontrent pour rembourser une dette à laquelle elles n’arrivent pas à faire face.
Nous demandons non pas une annulation systématique de la dette, mais un allongement des délais afin de mieux prendre en compte et de respecter les capacités de remboursement des familles.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je comprends parfaitement votre préoccupation, ma chère collègue. Néanmoins, de tels bilans sociaux existent, et sont notamment réalisés par les assistants de service social des départements.
Les récupérations d’indus, en particulier ceux qui sont relatifs à la CAF, font déjà l’objet d’une vision globale de la situation des familles. Il en va de même pour les autres organismes.
Le mécanisme proposé au travers de cet amendement semble lourd à mettre en place. Comment vérifier toutes les situations ?
J’émets donc un avis défavorable, même si j’approuve l’idée d’un étalement de la dette au regard de la situation des familles.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 935 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 794 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est complété par sept alinéas ainsi rédigés :
« La réduction dont bénéficie chaque employeur peut être minorée en fonction :
« 1° Du nombre de fins de contrat de travail, à l’exclusion des démissions ;
« 2° De la nature du contrat de travail et de sa durée ;
« 3° De la politique d’investissement de l’entreprise ;
« 4° De l’impact de l’entreprise sur l’environnement ;
« 5° De la taille de l’entreprise ;
« Un décret précise les modalités de calcul de la minoration de la réduction du taux des cotisations d’assurance maladie. »
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Vous connaissez l’opinion du groupe CRCE sur les allégements de cotisations sociales de la branche famille pour les employeurs – ex-CICE.
Quand bien même nous les accepterions, comment expliquer l’absence de conditionnalité, contrairement à ce qui est prévu pour toutes les allocations ? Nous reviendrons dans le cadre du PLFR sur la question du revenu d’engagement, devenu aujourd’hui un contrat d’engagement.
Nous nous proposons donc de poser trois conditions à l’allégement des cotisations patronales : l’égalité salariale entre les femmes et les hommes ; l’interdiction de délocaliser des activités à l’étranger si cela entraîne une diminution du nombre d’emplois en France ; et la remise d’un rapport annuel faisant état de la trajectoire de la réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon de 2030 pour atteindre les objectifs fixés par le plafond national.
L’égalité salariale entre les femmes et les hommes a été récemment débattue ici. Selon une estimation de la Fondation Concorde, imposer cette conditionnalité et atteindre l’égalité salariale, monsieur le ministre, impliquerait d’enrichir l’économie de 62 milliards d’euros supplémentaires sous plusieurs formes, en particulier en termes de consommation et de cotisations.
En tout état de cause, pourquoi ne serait-il pas possible qu’une exonération de 20 milliards d’euros pour les employeurs s’accompagne de contreparties, dans un esprit de responsabilité et d’équité par rapport aux efforts demandés à d’autres ? Nous attendons quelques explications…
Mme la présidente. L’amendement n° 729, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est complété par deux paragraphes ainsi rédigés :
« II. – Pour les entreprises soumises à l’obligation de déclaration de performance extra financière prévue à l’article L. 225-102-1 du code de commerce, le bénéfice des réductions de cotisations prévues par le présent article est subordonné aux contreparties climatiques et sociales suivantes :
« 1° La publication, au plus tard le 1er juillet de chaque année, et à partir du 1er juillet 2021, d’un « rapport climat » qui :
« a) Intègre le bilan des émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre de l’entreprise, en amont et en aval de leurs activités ;
« b) Élabore une stratégie de réduction des émissions des gaz à effet de serre qui ne doit pas prendre en compte les émissions évitées et compensées. Elle fixe des objectifs annuels de réduction des émissions de gaz à effet sur un horizon de dix ans, notamment en précisant les plans d’investissements nécessaires pour les atteindre. Ce rapport s’appuie sur les informations fournies dans le cadre des obligations de l’article L. 225-102-1 du code de commerce et de l’article L. 229-25 du code de l’environnement.
« Le ministre chargé de l’environnement définit, en concertation avec le Haut conseil pour le climat, la trajectoire minimale de réduction des émissions de gaz à effet de serre à mettre en œuvre par lesdites entreprises, en fonction du secteur d’activité et en conformité avec les budgets carbones fixés par la stratégie nationale bas-carbone.
« Les détails de la méthodologie sont fixés par décret ;
« 2° L’obligation de ne pas délocaliser et de ne pas transférer volontairement à l’étranger une partie ou de la totalité des activités de l’entreprise entraînant une diminution du nombre d’emplois en France, que ce soit au travers de filiales appartenant à la même entreprise ou par l’intermédiaire de sous-traitants auprès d’entreprises non affiliées.
« 3° L’obligation d’atteindre, avant le 1er janvier 2023, un index d’égalité entre les femmes et les hommes prévu par l’article L. 1142-8 du code du travail égal au moins à 75 points.
« III. – Le non-respect par les entreprises mentionnées au II des obligations mentionnées aux 1°, 2° et 3° est passible d’une sanction pécuniaire définie par décret. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous, écologistes, doutons de l’efficience des exonérations sociales. C’est d’ailleurs un euphémisme de dire qu’elles ont créé très peu d’emplois ! À défaut de pouvoir les supprimer, puisque vous y êtes très attachés, nous souhaiterions les conditionner à des critères environnementaux et sociaux, pour ne pas dire sociétaux.
On a beaucoup évoqué 2030 et le rapport Libault au sujet de la branche autonomie. Mais si l’on ne fait rien pour le volet climat, le dernier rapport du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) conclut à une hausse des températures de 1,5 degré en 2030. La canicule de 2001 fera alors pâle figure et il faudra prévoir des mesures d’adaptation !
C’est pourquoi nous proposons d’obliger les entreprises à mesurer leurs émissions de CO2, ce que moins d’une entreprise sur dix réalise aujourd’hui. Sur les 1 300 entreprises étudiées, seulement 9 % mesureraient précisément l’ensemble de leurs émissions.
De plus, l’écart salarial en 2020 entre les hommes et les femmes s’élève toujours à 19 %. Selon une étude du ministère du travail réalisée auprès de 40 000 entreprises, seules 6 % versaient des salaires égaux à leurs employés.
Cet amendement vise donc à responsabiliser les entreprises en conditionnant l’accès à l’allégement des cotisations patronales pour l’assurance maladie à des critères sociaux et écologiques afin d’engager toutes les forces productives dans une transition sociale et écologique, vers une société plus juste et vivable pour les générations futures.
Mme la présidente. L’amendement n° 638 rectifié, présenté par Mme Le Houerou, MM. Bourgi et Pla, Mme Blatrix Contat, M. Redon-Sarrazy, Mme Conway-Mouret, MM. Bouad, Tissot, Montaugé, Raynal et Jeansannetas et Mme Monier, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est complété par dix alinéas ainsi rédigés :
« A. – Pour les entreprises soumises à l’obligation de déclaration de performance extra-financière prévue à l’article L. 225-102-1 du code de commerce, le bénéfice des réductions de cotisations prévues par le présent article est subordonné aux contreparties climatiques et sociales suivantes :
« 1° La publication, au plus tard le 1er juillet de chaque année, et à partir du 1er juillet 2022, d’un “rapport climat” qui :
« a) Intègre le bilan des émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre de l’entreprise, en amont et en aval de leurs activités ;
« b) Élabore une stratégie de réduction des émissions des gaz à effet de serre dans les conditions définies au B, qui ne doit pas prendre en compte les émissions évitées et compensées. Elle fixe des objectifs annuels de réduction des émissions de gaz à effet de serre sur un horizon de dix ans, notamment en précisant les plans d’investissements nécessaires pour les atteindre. Ce rapport s’appuie sur les informations fournies dans le cadre des obligations de l’article L. 225-102-1 du code de commerce et de l’article L. 229-25 du code de l’environnement ;
« Le ministre chargé de l’environnement définit, en concertation avec le Haut Conseil pour le climat, la trajectoire minimale de réduction des émissions de gaz à effet de serre à mettre en œuvre par lesdites entreprises, en fonction du secteur d’activité et en conformité avec les budgets carbones fixés par la stratégie nationale bas-carbone ;
« Les détails de la méthodologie sont fixés par décret ;
« 2° L’obligation de ne pas délocaliser et de ne pas transférer volontairement à l’étranger une partie ou de la totalité des activités de l’entreprise entraînant d’une diminution du nombre d’emplois en France, que ce soit au travers de filiales appartenant à la même entreprise ou par l’intermédiaire de sous-traitant auprès d’entreprises non affiliées ;
« Cette obligation s’applique jusqu’à ce que l’allégement de cotisation prévue par le présent article soit compensée par une hausse équivalente de la fiscalité sur les entreprises concernées ;
« 3° L’obligation d’atteindre, avant le 1er janvier 2023, un index d’égalité entre les femmes et les hommes prévu par l’article L. 1142-8 du code du travail à un niveau inférieur à 75 points.
« B. – Le non-respect par les entreprises mentionnées au A des obligations mentionnées aux 1°, 2° et 3° est passible d’une sanction pécuniaire définie par décret. »
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise également à conditionner les allégements de cotisation patronale à des obligations en matière sociale, environnementale et fiscale pour les entreprises dont la taille correspond ou excède le seuil européen de l’entreprise moyenne.
Ces obligations sont les suivantes : premièrement, la remise d’un rapport annuel faisant état de la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon de 2030 pour atteindre les objectifs fixés par le plafond national des émissions de gaz à effet de serre ; deuxièmement, l’obligation de ne pas délocaliser des activités à l’étranger entraînant une diminution des emplois en France ; troisièmement, la mise en place d’une égalité salariale entre les femmes et les hommes.
Le non-respect d’au moins l’une de ces trois obligations entraînerait un remboursement du bénéfice de l’allégement de cotisation patronale et le paiement d’une sanction pécuniaire définie par décret.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La réduction du taux des cotisations maladie définie à l’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale a remplacé le CICE. Son objet est de renforcer la compétitivité des bénéficiaires ainsi que l’emploi.
Comme pour les critères environnementaux et tous les critères que vous avez énoncés, qui sont parfaitement légitimes, il paraît peu opportun de mélanger les objectifs, au risque de compromettre la lisibilité et l’intelligibilité du droit, notamment le droit de la sécurité sociale.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le débat sur la conditionnalité des aides sociales, comme des aides fiscales, d’ailleurs, a eu lieu à plusieurs reprises à l’occasion de chacun des textes financiers. J’ai donc déjà eu l’occasion de dire pourquoi le Gouvernement était favorable à des dispositifs sans conditionnalité excessive.
Concernant les allégements de charges en particulier, le Gouvernement, lorsqu’il a transformé ce crédit d’impôt en allégement général, s’est inspiré du dispositif qui préexistait depuis 2013, c’est-à-dire l’absence de conditionnalité.
J’émets donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 794 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 27 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 91 |
Contre | 252 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 729.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 788 rectifié bis, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 241-2. – I. – Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont également constituées par des cotisations assises sur :
« 1° Les avantages de retraite, soit qu’ils aient été financés en tout ou partie par une contribution de l’employeur, soit qu’ils aient donné lieu à rachat de cotisations ainsi que les avantages de retraite versés au titre des articles L. 381-1 et L. 742-1, à l’exclusion des bonifications ou majorations pour enfants autres que les annuités supplémentaires ;
« 2° Les allocations et revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 131-2 ;
« 3° Le produit de la contribution additionnelle à la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés, prévue par l’article L. 245-13 ;
« 4° Le produit de la contribution mentionnée à l’article L. 137-15.
« Des cotisations forfaitaires peuvent être fixées par arrêté ministériel pour certaines catégories de travailleurs salariés ou assimilés.
« Les cotisations dues au titre des branches maladie, maternité, invalidité et décès sont à la charge des employeurs et des travailleurs salariés et personnes assimilées ainsi que des titulaires des avantages de retraite et des allocations et revenus de remplacement mentionnés aux 1° et 2° du présent I.
« II. – Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont en outre constituées par le remboursement par la caisse nationale des allocations familiales des indemnités versées en application des articles L. 331-8 et L. 722-8-3 du présent code. »
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Mon collègue Pascal Savoldelli a proposé, dans notre amendement précédent, de fixer des contreparties à la suppression des cotisations sociales à la branche famille. C’était en quelque sorte notre amendement de repli puisque celui-ci vise à rétablir complètement les cotisations des entreprises à la branche famille de la sécurité sociale.
Ce manque à gagner, évalué à 20 milliards d’euros, remet en cause le principe même des cotisations des entreprises à la sécurité sociale. Surtout, cette suppression des cotisations patronales en deçà du SMIC remet en question le fondement idéologique de notre système de protection sociale, qui consiste à partager la valeur créée au sein de l’entreprise.
Les cotisations sociales sont la part socialisée du salaire. La suppression des cotisations patronales revient sur le principe du paritarisme de financement de la sécurité sociale.
En rétablissant ces cotisations à la branche famille, la sécurité sociale pourrait ainsi envisager l’indemnisation à 100 % au niveau des salaires des congés de maternité et de paternité, ou la création de 100 000 places en crèche supplémentaires. Voilà des exemples d’une utilisation plus efficace et pertinente de ces 20 milliards d’euros !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. En sortie de crise, ce serait un message assez ennuyeux pour les entreprises, qui cherchent actuellement à redresser ou à conforter leur situation. J’émets donc un avis défavorable, en particulier du fait du choc que pourrait constituer pour elles un alourdissement soudain de 8 milliards d’euros, pour reprendre vos propres estimations.
Cet amendement pose néanmoins une vraie question sur l’efficacité d’un allégement de cotisations allant aussi loin dans l’échelle des salaires. Le Gouvernement pourrait sans doute engager une réflexion utile sur le reformatage des allégements, éventuellement à produit constant.
Le groupe CRCE a fait aujourd’hui des propositions. Ce n’est certes pas le bon moment pour l’entreprise, mais une réflexion en ce sens pourrait être enclenchée.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 788 rectifié bis.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 28 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 279 |
Pour l’adoption | 27 |
Contre | 252 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 769 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 937 rectifié bis est présenté par Mme Le Houerou, M. Pla, Mmes Lubin, Féret et Jasmin, MM. Jomier et Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale, le nombre : « 3,5 » est remplacé par le nombre : « 2 ».
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 769.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement de repli vise à limiter le champ d’application de l’allégement de cotisations patronales familiales – allégement issu du pacte de responsabilité – aux salaires ne dépassant pas deux fois le SMIC.
Comme l’a démontré le conseil d’analyse économique, dans une note de janvier 2019 intitulée Baisses de charges : stop ou encore ?, ce dispositif, qui s’applique aux rémunérations jusqu’à 3,5 fois le SMIC, est inefficace en termes de créations d’emplois et de compétitivité. Il est également coûteux pour les finances sociales, avec une perte de recettes de 8 milliards d’euros pour la branche famille. Je pense, madame la rapporteure générale, que vous êtes sensible à ce manque à gagner.
Les auteurs de ce rapport recommandent de limiter cette exonération aux bas salaires. Tel est le sens de cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 937 rectifié bis.
Mme Annie Le Houerou. Mêmes arguments : il est défendu !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable, pour les raisons invoquées précédemment.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 769 et 937 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 970 rectifié ter, présenté par Mmes Lubin et Le Houerou, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Stanzione, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-5 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Il est instauré un malus, fixé par voie réglementaire, sur les cotisations des employeurs dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles pour les entreprises n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour éliminer un risque avéré de maladie professionnelle.
« La détermination de l’effort de l’employeur en matière de prévention et de lutte contre les maladies professionnelles se fait sur la base de critères définis par voie réglementaire à partir du bilan social de l’entreprise, défini aux articles L. 2312-28 à L. 2312-33 du code du travail. »
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. En février 2017, un rapport d’information soulignait les carences de la prise en charge en France du burn-out et insistait sur la priorité que constitue la prévention plus efficace de l’apparition des souffrances liées au travail.
Nous proposons, au travers de cet amendement, de meilleures évaluation et prévention du burn-out grâce à un mécanisme de malus pour les employeurs n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour éliminer le risque avéré d’épuisement professionnel.
Nous proposons également de relever les taux de cotisations auprès de la branche AT-MP des entreprises, qui présente une sinistralité anormalement élevée.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Si je partage la volonté des auteurs de l’amendement de diminuer les risques professionnels dans l’entreprise, je rappelle que les cotisations que versent les employeurs pour financer la branche AT-MP dépendent déjà de la sinistralité des entreprises.
Ces cotisations augmentent donc avec le risque, dans une logique incitative. La part variable du taux de cotisation AT-MP atteint presque 70 % en moyenne.
Plutôt que de pénaliser les employeurs, qui remplissent déjà un document unique d’évaluation des risques professionnels substantiel, il importerait de mieux les accompagner en matière de prévention, comme l’a rappelé Pascale Gruny dans son rapport. C’est en ce sens qu’a été adoptée la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail, qui a notamment transformé les services de santé au travail en services de prévention et de santé au travail.
Enfin, les entreprises supportent un poids manifestement excessif en matière de cotisations AT-MP : les excédents cumulés devraient dépasser les 5 milliards d’euros fin 2022. Par ailleurs, elles supportent déjà une série de majorations, dont celle destinée à financer le transfert à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des AT-MP.
Pour toutes ces raisons, l’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 970 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 883 rectifié bis, présenté par MM. Gold, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 2° du III de l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « ainsi que les établissements publics de coopération intercommunale ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Éric Gold.
M. Éric Gold. Je ne reviendrai pas sur l’importance des services d’aide à domicile, qui permettent à nos aînés de vieillir le plus longtemps possible chez eux et dans de bonnes conditions, en toute sécurité. Ces services font preuve d’un fort engagement d’adaptation et d’abnégation durant la crise sanitaire que nous traversons.
Ces structures d’aide employant des salariés qui interviennent au domicile des personnes fragiles peuvent bénéficier d’une exonération des cotisations patronales, à condition d’être gérées par des centres communaux (CCAS) ou intercommunaux d’action sociale (CIAS).
Quand ces services sont gérés en régie par une commune, un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ou un syndicat de communes, ils en sont exclus. Cela conduit à une situation injuste et inégalitaire. Ces structures doivent acquitter des charges supplémentaires, alors même que leur équilibre budgétaire est fragile et qu’elles assurent au quotidien les mêmes missions au service d’un même public avec des agents au même statut.
L’objet de cet amendement est de donner de la cohérence entre les différents modes de gestion, et donc de rendre éligibles aux exonérations de charges patronales les agents travaillant pour des services d’aide à domicile gérés par des communes ou par des EPCI.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Je comprends l’objectif visé au travers de cet amendement, mais j’émets un avis défavorable.
Les centres communaux et intercommunaux d’action sociale bénéficient de l’exonération d’aide à domicile pour ne pas désavantager les agents de ces organismes par rapport aux autres secteurs, notamment au secteur privé. Le champ d’application a été validé par le Conseil constitutionnel dans une décision le 5 août 2011.
Dans sa décision, le Conseil a considéré que le législateur entendait ainsi favoriser la coopération intercommunale spécialisée en matière d’aide sociale.
Je ne conteste évidemment pas que les agents des EPCI peuvent remplir les mêmes tâches d’aide à domicile que ceux des CCAS et des CIAS. Il n’en reste pas moins que les EPCI sont des établissements à vocation multiple, tandis que les CCAS et les CIAS sont des organismes spécialisés en matière d’action sociale.
Nous estimons qu’il faut en rester à la décision rendue par le Conseil constitutionnel, c’est-à-dire une limitation du bénéfice de la mesure aux seuls centres communaux et intercommunaux d’action sociale.
C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à l’amendement.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 728 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 795 rectifié est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est abrogé.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 728.
Mme Raymonde Poncet Monge. Puisque notre assemblée n’a pas voté en faveur de la conditionnalité des exonérations sociales, nous allons de nouveau en demander la suppression.
De 2013 à 2019, nous l’avons dit, le CICE a représenté une perte de recettes annuelle de près de 20 milliards d’euros. Malgré son inefficacité, ce dispositif, qui n’a contribué à créer que 100 000 emplois entre 2014 et 2016, selon le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), a été transformé en une réduction de cotisations patronales sans aucune conditionnalité.
Il continue de représenter un manque à gagner très important pour les recettes de l’État, qui n’est pas toujours compensé à sa juste valeur à la sécurité sociale, sans aucun gain pour la société. Or les prévisions jointes au présent PLFSS font état d’un déficit de l’assurance maladie, qui s’améliore mais restera élevé puisqu’il s’établira à 13 milliards d’euros en 2024.
Pour nous, le rôle de l’État est tout autre : ce dernier doit garantir la juste participation de toutes et tous à l’élaboration d’un projet collectif qui profite à l’ensemble de la société, ce qui implique de garantir un service public permettant à chacun de jouir de ses droits fondamentaux, en l’occurrence le droit à un égal accès aux soins.
Si nous ne luttons pas contre ce manque à gagner, nous ne serons pas en mesure de renforcer la résilience de notre système de santé face aux prochaines pandémies et de préparer l’ensemble du système de soins à affronter le vieillissement de la population.
Nous demandons la fin de la transposition du CICE dans le droit, parce que ce dispositif s’est montré inopérant socialement et parce qu’il faut rendre à l’État les moyens de maintenir nos structures de soins et de garantir l’investissement dans la santé.
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour présenter l’amendement n° 795 rectifié.
M. Pascal Savoldelli. Nous proposons de mettre fin à l’exonération de cotisations sociales patronales sur les bas salaires, dans la mesure où ces allégements créent des effets pervers, qui sont connus de tous.
Tout d’abord, on maintient ainsi une masse croissante de travailleurs autour du SMIC : les employeurs, de peur de perdre le bénéfice de ces exonérations, ne sont pas incités à augmenter les salaires, ce qui limite de fait les revalorisations salariales.
Ensuite, le nombre d’heures prévu dans les contrats de travail tend à croître. Autrement dit, ce type de dispositif soumet les salariés à une course au moins-disant social.
Dernier point, tous les emplois sont concernés par les allégements dits « Fillon » – tout le monde s’en souvient. Rappelons-nous également que, depuis le 1er octobre 2019, les cotisations sociales ont été supprimées au niveau du SMIC.
Le renforcement des allégements généraux de cotisations patronales sur les plus bas salaires, prévu par le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, aura donc pour conséquence de tasser les salaires en deçà de 1,4 SMIC dans les entreprises qui bénéficient des exonérations de charges sociales.
Peut-on au moins faire en sorte que ces exonérations n’affectent pas les bas salaires ?
Mme la présidente. L’amendement n° 796 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« .… – La réduction est supprimée lorsque l’employeur n’a pas conclu d’accord relatif à l’égalité professionnelle dans le cadre des obligations définies aux articles L. 2242-5 et L. 2242-8 du code du travail dans les conditions prévues aux articles L. 2242-1 à L. 2242-4 du même code ou qu’il n’a pas établi le plan d’action mentionné à l’article L. 2323-47 dudit code. Cette diminution de 100 % du montant de la réduction est cumulable avec la pénalité prévue à l’article L. 2242-7 du même code. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. En France, le salaire moyen d’une femme est inférieur de 24 % à celui d’un homme. À situation égale, l’écart de rémunération atteint 15,5 %. Aussi, on estimait l’an dernier qu’à compter du 4 novembre et jusqu’à la fin de l’année les femmes travaillaient gratuitement – cela vaut d’ailleurs aussi pour cette année.
Nous avons eu l’occasion de discuter de ce sujet lors de l’examen de la proposition de loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle il y a quelques semaines. Mais la problématique de l’égalité professionnelle dépasse la seule question de l’index de l’égalité professionnelle. Nous estimons que les dispositifs d’exonération de cotisations sociales favorisent les contrats courts imposés aux femmes. Pour y remédier, il nous faut être un peu plus fermes.
Nous proposons, dans une logique de contrepartie, de supprimer les exonérations de cotisations sociales patronales dans les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations en matière d’égalité salariale. J’insiste sur le fait que ces entreprises, en ne respectant pas la réglementation, se mettent véritablement hors la loi.
Les années précédentes, puisque cet amendement est similaire à des amendements que nous présentons régulièrement – nous espérons d’ailleurs qu’à un moment donné nous finirons par vous convaincre, car le temps nous semble un peu long –, on nous a répondu que des pénalités s’appliquaient déjà dans ce genre de situation. C’est vrai, mais on voit bien que ces sanctions ne sont pas suffisantes.
À un moment donné, même si je veux bien admettre que certaines entreprises sont en grande difficulté, il faut arrêter de dire que ce n’est pas le moment de mettre fin à ces allégements de charges. En réalité, ce n’est jamais le bon moment ! Or, quand il enfreint la loi, le commun des mortels est sanctionné, et d’autant plus quand il récidive ! Je ne vois pas pourquoi il y aurait deux poids deux mesures, surtout lorsqu’il est question, comme par hasard, d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Mme la présidente. L’amendement n° 939 rectifié bis, présenté par Mme Le Houerou, M. Pla, Mmes Lubin, Féret et Jasmin, MM. Jomier et Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mmes Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Antiste, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, MM. Chantrel, Durain, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Leconte, Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Préville, M. Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal, Tissot, Vaugrenard, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, insérer un article L. 241-13-… ainsi rédigé :
« Art. L. 241-13-…. - Les laboratoires définis à l’article L. 2215-8 du code général des collectivités territoriales bénéficient des exonérations de cotisations mentionnées à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Dès lors que certaines entreprises bénéficient d’allégements de cotisations sociales patronales, toutes les structures employeuses doivent pouvoir en bénéficier dans les mêmes conditions.
Or les 74 laboratoires départementaux d’analyse vétérinaire situés en France se sont, pour certains, regroupés en groupements d’intérêt public (GIP), afin de gagner en efficacité dans un cadre de plus en plus concurrentiel, puisqu’ils sont soumis à de nombreux appels d’offres.
Plusieurs groupements d’intérêt public ont vu le jour, comme Labéo en Normandie, Aveyron Labo dans l’Aveyron, ou Labocéa dans ma circonscription, en Bretagne, avec à la fois du personnel mis à disposition par les conseils départementaux pour exercer des missions traditionnellement d’intérêt général et de plus en plus de salariés sous contrat de droit privé.
Certains de ces laboratoires ont légitimement et très logiquement appliqué la réduction générale de cotisations patronales, dite « Fillon », pour leurs collaborateurs recrutés sous statut privé. Or ce dispositif, qui profite à la quasi-totalité des acteurs de ce secteur très concurrentiel, a été remis en cause par la Cour de cassation au motif que, si l’on se place sur le strict plan juridique, il n’aurait pas dû s’appliquer aux salariés des GIP relevant du droit privé.
Avec cet amendement, nous proposons une mesure de justice consistant à rétablir une équité de traitement entre les salariés des GIP et ceux des autres entreprises privées.
Mme la présidente. Il faut conclure.
Mme Annie Le Houerou. Vous l’aurez compris, nous souhaitons étendre le bénéfice de ces allégements généraux de cotisations patronales aux salariés des GIP.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission est défavorable aux deux amendements identiques nos 728 et 795 rectifié, parce que la suppression de la réduction générale de cotisations patronales engendrerait un alourdissement immédiat du coût du travail, de l’ordre de 50 à 60 milliards d’euros. Je ne sais pas, madame Cohen, si ce n’est jamais le bon moment de mettre fin à ce dispositif, mais en tout cas, si le Sénat votait ces amendements, il n’enverrait pas un bon signal aux entreprises en cette période de sortie de crise.
La commission est également défavorable à l’amendement n° 796 rectifié. En effet, les allégements généraux de cotisations sociales sont un élément de compétitivité pour l’ensemble des employeurs. Par ailleurs, la non-conclusion d’un accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes fait déjà l’objet de sanctions spécifiques.
Mme Laurence Cohen. Cela ne fonctionne pas !
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Peut-être, mais les sanctions sont bel et bien prévues par les textes en vigueur.
Enfin, nous demanderons l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 939 rectifié bis, car nous n’avons pas eu le temps d’expertiser, dans un si court délai, la question très précise que soulève notre collègue.
Il semble toutefois que la situation actuelle pose un problème d’équité si, réellement, les laboratoires départementaux d’analyse vétérinaire emploient des salariés de droit privé sans pour autant pouvoir bénéficier des allégements généraux de charges. Un tel « trou dans la raquette » leur serait préjudiciable, puisqu’ils sont en concurrence avec des structures qui, elles, en bénéficient.
Nous souhaiterions que le Gouvernement nous éclaire sur ce point afin de rétablir, si besoin en est, l’équité.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 728, 795 rectifié et 796 rectifié, pour les raisons exposées par Mme la rapporteure générale.
S’agissant de l’amendement n° 939 rectifié bis, nous considérons que le bénéfice des allégements généraux de cotisations patronales doit cibler le secteur privé et non le secteur public. Il existe quelques dérogations très précises pour certains employeurs publics que nous ne souhaitons pas étendre, notamment par crainte des effets reconventionnels.
Par ailleurs, madame Le Houerou, le champ d’application de cette mesure serait bien plus large que ce que vous souhaitez puisqu’elle concernerait tous les GIP, et pas seulement les organismes que vous visez, notamment les laboratoires.
Sachez que je me suis engagé récemment à travailler sur la question de l’extension des allégements de cotisations patronales à ces laboratoires. En effet, le député Fabrice Le Vigoureux a défendu un amendement analogue au vôtre à l’Assemblée nationale. Il en a présenté les principaux aspects sans pouvoir le déposer de manière concrète, puisque cet amendement avait été jugé irrecevable.
Nous allons poursuivre la réflexion dans le cadre plus global de la revue générale des allégements de cotisations mais, en l’état, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 939 rectifié bis.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Puisqu’une réflexion est engagée, nous pourrions peut-être vous y associer, madame Le Houerou, afin de parvenir à une forme d’équité entre tous les salariés et d’obtenir une mesure de justice pour les laboratoires.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 728 et 795 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 939 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 283 rectifié bis, présenté par MM. Henno, Moga et Capo-Canellas, Mme Létard, MM. S. Demilly et Le Nay, Mme Dindar, M. Janssens, Mme Perrot, MM. Détraigne, Canévet, Duffourg et J.M. Arnaud, Mmes Jacquemet et Billon et MM. Mizzon et Maurey, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au 1° du II de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, après le mot : « sommes » sont insérés les mots : « augmentées de 10 % ».
II. – Le I s’applique pour les sommes versées dans le cadre de contrats d’intéressement conclus du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2025.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. La reprise de la croissance, qui a été favorisée notamment par la mise en œuvre de dispositifs d’urgence et de relance financés grâce à de l’argent public, appelle un partage plus juste de ses fruits, au bénéfice des salariés en particulier.
Malheureusement, on recourt encore trop timidement aux divers dispositifs d’intéressement. C’est pourquoi nous proposons, avec cet amendement, d’encourager les entreprises à les utiliser, en augmentant de 10 % les sommes allouées aux salariés au titre de l’intéressement qui sont exclues de l’assiette des cotisations de sécurité sociale, ainsi que la déduction d’impôt pour les sommes versées au même titre.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Vous avez raison, mon cher collègue, il faut encourager l’intéressement des salariés à la réussite de l’entreprise.
Toutefois, au-delà du seul intéressement, de très nombreux dispositifs offrant la possibilité aux salariés de percevoir des primes intégralement exonérées ont fleuri ces dernières années. Or il convient de préserver, comme je le rappelle fréquemment, les recettes de la sécurité sociale.
En outre, le dispositif de votre amendement, tel qu’il est rédigé, semble techniquement difficile à mettre en place de manière concrète.
Je vous demanderai donc, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement est du même avis que la commission.
J’ajoute qu’avec cet amendement M. Henno pourrait manquer son objectif puisque les sommes exonérées, via le mécanisme d’exemption d’assiette de cotisations sociales prévu au titre de l’intéressement, ne sont pas plafonnées.
En revanche, le plafond des primes d’intéressement versées aux salariés est très élevé – il atteint 2 571 euros par mois –, car très peu de salariés touchent de telles sommes. Si votre assemblée adoptait cet amendement, il ne s’appliquerait qu’aux primes de plus de 2 571 euros par mois : je ne suis pas certain que ce soit votre objectif, monsieur le sénateur.
En outre, nous avons déjà beaucoup encouragé l’intéressement des salariés aux résultats de leur entreprise, notamment par la suppression du forfait social.
J’ajoute que le député Philippe Vigier avait déposé un amendement similaire dans le cadre de l’examen de ce texte à l’Assemblée nationale et l’avait finalement retiré au bénéfice de ces quelques explications. Je vous invite également, monsieur le sénateur, à retirer le vôtre.
M. Olivier Henno. Je le retire !
Mme la présidente. L’amendement n° 283 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 843 rectifié, présenté par MM. Moga et Longeot, Mmes Sollogoub et de La Provôté, MM. Laugier et A. Marc, Mme Dindar, MM. Guerriau et S. Demilly, Mme Paoli-Gagin, M. Le Nay, Mmes Herzog et Billon, M. Chasseing, Mme Perrot, MM. Duffourg, J.M. Arnaud, Canévet, Decool, P. Martin et Chauvet et Mme Férat, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 161-22-1 A du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 161-22-1…. ainsi rédigé :
« Art. L. 161-22-1…. – L’article L. 161-22 ne fait pas obstacle à l’exercice par un médecin retraité d’une activité de remplacement. Les revenus perçus par le médecin retraité au titre de son activité de remplacement sont exonérés de la totalité des cotisations sociales et de retraite dès lors qu’ils n’excèdent pas 40 000 € annuels. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nadia Sollogoub.
Mme Nadia Sollogoub. Dans nos territoires, nous connaissons tous le rôle très important que jouent les médecins retraités continuant à exercer.
Le Parlement, dans sa grande sagesse, avait bien compris qu’il serait difficile de demander aux médecins retraités qui souhaitent poursuivre leur activité de continuer à cotiser pour leur retraite, si bien que, d’une façon générale, ces médecins retraités bénéficient depuis janvier 2020 d’une exonération de cotisations de retraite lorsque leurs revenus n’excèdent pas 80 000 euros.
Néanmoins, un problème demeure : dans le cas particulier où ces médecins remplacent un collègue en exercice, les revenus qu’ils perçoivent au titre de leur activité de remplacement doivent être inférieurs au seuil de 12 500 euros par an pour être éligibles au dispositif d’exonération de cotisations. Ce plafond est dissuasif, car il est très rapidement atteint.
L’amendement de notre collègue Jean-Pierre Moga a pour objet de porter ce plafond d’exonération à 40 000 euros par an pour les médecins retraités qui souhaitent poursuivre leur activité sous la forme de remplacements, ce qui contribuerait, on le sait tous, au maintien d’une offre de soins de proximité.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission partage votre préoccupation, ma chère collègue, comme vous pourrez le constater lorsqu’elle motivera sa position sur l’amendement n° 317 rectifié bis de notre collègue Chantal Deseyne.
Le Sénat a adopté ces deux dernières années, avec le soutien de la commission des affaires sociales, un dispositif de calibrage analogue à celui que propose Mme Deseyne, et qui était auparavant défendu par M. Cardoux.
Par fidélité à ses engagements passés, et parce qu’il satisfait votre demande, ma chère collègue, la commission vous demandera de bien vouloir retirer votre amendement au profit de l’amendement n° 317 rectifié bis ; à défaut, elle y sera défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Sollogoub, l’amendement n° 843 rectifié est-il maintenu ?
Mme Nadia Sollogoub. Il suffit de jeter un coup d’œil rapide sur l’amendement de Mme Deseyne, dont l’objet est par ailleurs très intéressant, pour s’apercevoir qu’il ne s’agit pas du même dispositif. Ce dernier prévoit une exonération fiscale, quand le nôtre tend à exonérer les revenus des médecins retraités exerçant une activité de remplacement de cotisations de retraite et à relever un plafond qui nous semble trop bas.
Je maintiens donc notre amendement.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 547 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Menonville, Guerriau, Médevielle et A. Marc, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Verzelen, Wattebled et Decool, Mme Paoli-Gagin, MM. Capus, Malhuret, Joyandet et Détraigne, Mme Billon, M. Longeot, Mme de La Provôté, MM. Gremillet, Laménie, Levi et Pointereau, Mme Dumont, MM. Moga et Grand, Mme Renaud-Garabedian et M. Bansard, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 161-22-1 A du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 161-22-1… ainsi rédigé :
« Art. L. 161-22-1…. – L’article L. 161-22 ne fait pas obstacle à l’exercice par un médecin retraité d’une activité dans une zone définie sous-dense par l’agence régionale de santé. Les revenus perçus par le médecin retraité au titre de son activité sont exonérés de la totalité des cotisations sociales et de retraite. »
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Le présent amendement, presque identique à celui qui vient d’être défendu, vise à renforcer l’accès aux soins dans les déserts médicaux en autorisant les médecins retraités qui le souhaitent – il y en a, heureusement ! – à poursuivre ou à reprendre leur activité dans les zones sous-dotées, tout en bénéficiant d’une exonération fiscale. En effet, dans ce cas spécifique, lorsque les médecins cotisent pour leur retraite, ils ne bénéficient pas de revenus supplémentaires.
J’indique que certains médecins retraités seraient prêts à effectuer des vacations, pendant une demi-journée ou une journée, par exemple, mais qu’ils ne veulent plus cotiser à leur régime de retraite sans contrepartie.
Par ailleurs, je déplore l’aggravation actuelle des déserts médicaux, en zone rurale, mais pas seulement. Jusqu’à présent, j’avais toujours été défavorable à ce que nous votions des mesures contraignantes pour y remédier – on en parle depuis longtemps. Mais, cette année, j’ai déposé un amendement, qui a hélas ! été déclaré irrecevable, visant à contraindre les jeunes médecins, à la fin de leurs études, à exercer dans un désert médical.
Enfin, je rappelle qu’il n’y a pas si longtemps notre commission, alors présidée par Alain Milon, avait adopté une mesure, également votée par l’Assemblée nationale, ayant pour objet d’obliger les futurs médecins, lors du troisième cycle des études de médecine, à réaliser un stage de six mois dans un désert médical sous l’égide d’un médecin référent ou d’un maître de stage. Monsieur le ministre délégué, où en est-on de l’application de cette disposition dont personne n’entend plus parler ?
Mme la présidente. L’amendement n° 317 rectifié bis, présenté par Mme Deseyne, MM. Retailleau et Milon, Mmes Lassarade et Belrhiti, M. D. Laurent, Mme Micouleau, MM. Cardoux, Pellevat, Burgoa, Lefèvre, J.P. Vogel et Sol, Mmes Pluchet, Gruny et Puissat, MM. Joyandet et Bouchet, Mmes Ventalon et Thomas, MM. Savary, Longuet, Gremillet, Bonne et Darnaud, Mme Estrosi Sassone, MM. Charon et Belin, Mmes Bonfanti-Dossat et Raimond-Pavero, MM. Perrin et Brisson, Mme Schalck, MM. Rojouan, B. Fournier, Rapin et Mandelli, Mme Di Folco, MM. Cambon, Babary, Bouloux et Klinger et Mme Joseph, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 161-22-1 A du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 161-22-1 … ainsi rédigé :
« Art. L. 161-22-1 …. – L’article L. 161-22 ne fait pas obstacle à l’exercice par un médecin retraité d’une activité de remplacement dans une zone définie sous-dense par l’agence régionale de santé pour une durée cumulée n’excédant pas vingt-quatre mois.
« Les revenus perçus par le médecin retraité au titre de son activité de remplacement sont exonérés de la totalité des cotisations sociales et de retraite dès lors qu’ils n’excèdent pas 90 000 € annuels. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Mme Chantal Deseyne. Avec cet amendement, nous proposons une exonération fiscale en faveur des médecins retraités, qui serait limitée à une période cumulée de vingt-quatre mois.
Comme l’a rappelé notre collègue Daniel Chasseing, les déserts médicaux concernent désormais toute la France, et plus seulement les zones rurales. De très nombreux médecins, en particulier les médecins généralistes, cesseront bientôt leur activité parce qu’ils partent à la retraite. Cette mesure serait une première réponse, un dispositif d’urgence permettant de maintenir l’offre de soins dans nos territoires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. S’agissant des amendements nos 547 rectifié et 317 rectifié bis, je veux redire combien cette question est au cœur des préoccupations des Françaises et des Français. L’accès aux soins est une priorité, quel que soit le territoire concerné, rural comme urbain : dans certains quartiers, il est aussi difficile d’obtenir un rendez-vous chez le médecin que dans des territoires plus reculés.
Je regarde toujours ce type de propositions avec beaucoup d’attention. Je l’ai dit, je soutiens l’amendement de Mme Deseyne, mais je tiens à rappeler à l’ensemble de nos collègues qu’il ne s’agit en aucun cas de dispositifs d’exonération fiscale – sinon, ils auraient été jugés irrecevables dans le cadre de l’examen du présent PLFSS –, mais bien d’allégements de cotisations sociales, qui auront des répercussions sur le budget de la sécurité sociale.
La commission est favorable, je le redis, à l’amendement n° 317 rectifié bis. Par conséquent, elle vous demandera, monsieur Chasseing, de bien vouloir retirer l’amendement n° 547 rectifié.
Mme la présidente. Monsieur Chasseing, l’amendement n° 547 rectifié est-il maintenu ?
M. Daniel Chasseing. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 547 rectifié est retiré.
Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement restant en discussion ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 317 rectifié bis, parce qu’il considère que les plafonds existants en cas de cumul d’activité sont suffisants et qu’il existe déjà de nombreux outils pour promouvoir l’attractivité des zones sous-dotées.
Comme je l’indiquais précédemment, je me suis rendu, pas plus tard que ce matin, dans le département dont j’ai été élu député : les médecins que j’y ai rencontrés m’ont dit que la réponse financière ne suffirait pas à elle seule à résoudre le problème d’attractivité de certaines zones ; il faut aussi améliorer les conditions d’exercice des métiers et transformer les communautés de soins.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Nous ne voterons pas cet amendement.
Tout d’abord, comme vient de le rappeler M. le ministre délégué, plusieurs dispositifs ayant prouvé leur efficacité ont déjà été mis en place ces dernières années. Je pense à certaines mesures visant à favoriser le cumul entre emploi et retraite ou la reprise d’activité des médecins retraités.
Ensuite, le dispositif proposé par Mme Deseyne nous paraît excessif.
D’une part, il prévoit une exonération totale de cotisations sociales. Nous aurions compris si on nous avait proposé une exonération des seules cotisations de retraite, mais l’exonération générale de cotisations sociales nous semble, elle, beaucoup plus discutable.
D’autre part, il fixe un plafond de 90 000 euros par an, ce qui nous paraît démesuré. Pardonnez-moi, mais ce montant correspond davantage aux revenus d’activité perçus par un médecin exerçant à plein temps, voire davantage, qu’à ceux d’un médecin retraité !
Par ailleurs, comme l’a indiqué Daniel Chasseing, les outils incitant les médecins à exercer en zone sous-dense sont légion. Ils ont même été listés dans un rapport établi au nom de la commission des affaires sociales il y a trois ans environ.
Ces dispositifs incitatifs ont certes produit des effets, mais ils sont désormais insuffisants : il faut par conséquent imaginer d’autres dispositions.
Notre collègue a mentionné la mesure votée par le Sénat, qui oblige les jeunes médecins à exercer en zone sous-dotée à la fin de leurs études. Le Gouvernement a été interpellé dans cet hémicycle sur la non-application de cette obligation et sur les raisons pour lesquelles il ne publiait pas les textes d’application. L’exécutif a décidé de pas les faire paraître. Dont acte. On rediscutera de ce sujet dans un autre cadre.
On pourrait aussi imaginer la mise en place de dispositifs en lien avec les collectivités territoriales, par exemple.
Nous n’avons pas encore exploré toutes les solutions possibles. Ce qui est certain, c’est que la démarche qui consiste à envisager un dispositif d’allégement de cotisations sociales reposant sur un plafond d’exonération très élevé, pour inciter à la poursuite d’une activité médicale, est déraisonnable.
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Comme le sénateur Jomier, et pour des raisons proches de celles qu’il vient d’évoquer, nous ne voterons pas cet amendement.
Je ne reviendrai pas sur les propos de notre collègue. Simplement, 90 000 euros divisés par 12, cela fait 7 500 euros de revenus par mois. En comparaison, on l’évoquait tout à l’heure, le revenu médian des Français s’élève à 1 900 euros par mois. Je crois qu’il faut être très prudent quand on manipule des chiffres de cette ampleur, car certains Français pourraient le vivre comme une forme d’indécence.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. En dépit des arguments avancés par les uns et les autres, je comprends qu’un médecin retraité ait un peu mal au cœur quand on lui demande de cotiser pour sa retraite.
Ce qui me fait personnellement mal au cœur, c’est que vous débattiez, les uns et les autres, de ce plafond de 90 000 euros : je regrette que vous n’ayez pas voté l’amendement de mon collègue Jean-Pierre Moga, qui avait pour objet de proposer une disposition analogue, mais avec un seuil à 40 000 euros !
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Lorsqu’un salarié retraité reprend du service pour une raison ou pour une autre, s’il ne peut plus cumuler de droits au titre de sa retraite, il cotise, lui aussi, au titre de la solidarité nationale et pas pour lui !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 317 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons examiné 84 amendements au cours de la journée ; il en reste 482.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
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Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 9 novembre 2021 :
À quatorze heures trente, le soir et la nuit :
Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, adopté par l’Assemblée nationale, (texte n° 118, 2021-2022).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mardi 9 novembre 2021, à une heure vingt-cinq.)
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER