M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le sénateur Henri Cabanel, l’étude que vous mentionnez a débuté en 2018, elle est arrivée dans sa phase de déploiement et va durer trois ans ; ses résultats sont donc attendus pour 2024.
Comme toute étude scientifique, celle-ci se doit d’être objective, neutre et rigoureuse. En aucune manière elle ne doit conduire à jeter l’opprobre – pour reprendre vos propos – sur une profession.
J’y suis extrêmement attentif, pour deux raisons.
Première raison : jeter l’opprobre serait terriblement injuste.
Mesdames, messieurs les sénateurs, les produits qui sont utilisés aujourd’hui par les viticulteurs ou par les agriculteurs sont d’abord validés par l’EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments) avant que l’Anses ne permette leur mise sur le marché. Ils sont donc autorisés par les autorités sanitaires. Il faut le dire, car, parfois, certains l’oublient.
Deuxième raison : jeter l’opprobre ne serait absolument pas conforme à la réalité.
J’ai eu l’occasion de présenter ce matin en conseil des ministres les avancées sur les dynamiques d’agroécologie. Figurez-vous que la surface cultivée en bio dans notre pays a doublé depuis 2017. Nous sommes devenus le pays européen avec la plus grande surface biologique.
Le label HVE est très utilisé dans le domaine viticole. Le nombre d’exploitations qui s’y soumettent a été multiplié par vingt en trois ans et les quantités vendues de substances CMR 1, c’est-à-dire les produits les plus dangereux, ont été réduites de 93 % depuis 2017.
Après cela, certains continuent à dire que l’agroécologie ne serait pas une réalité sur le terrain !
Monsieur le sénateur, soyez certain que la science doit être là pour éclairer, pour progresser et jamais pour caricaturer. Telle devra être la ligne de conduite à suivre au moment de la publication des résultats de cette étude, en 2024. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour la réplique.
M. Henri Cabanel. Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse. Je vous ai dit tous les efforts que fournissent les agriculteurs. Comprenez cependant que nous restions très inquiets sur l’interprétation qui sera faite de cette étude.
La viticulture a particulièrement souffert : après la pandémie, elle a dû faire face à un épisode de gel, le 8 avril dernier, de sorte que l’on annonce une récolte inférieure en moyenne de 30 % à celle de l’année précédente, dans l’ensemble de la France.
Monsieur le ministre, les viticulteurs n’ont pas besoin d’être une nouvelle fois montrés du doigt ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
concentration dans les médias
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Sophie Taillé-Polian. Madame la ministre de la culture, à six mois d’une séquence électorale majeure, la situation des médias dans notre pays est extrêmement préoccupante.
Premièrement, à plusieurs reprises, le Gouvernement a pris des dispositions qui entravent le travail des journalistes. On se souvient de la loi relative à la protection du secret des affaires, en 2018, et plus récemment de la loi Sécurité globale.
Deuxièmement – le phénomène est certainement très lourd et massif –, la concentration des médias entre les mains de quelques milliardaires s’accélère. C’est un grave danger pour la démocratie. Les Français ne s’y trompent pas et vont chercher l’information ailleurs, au risque de favoriser la propagation de visions déformées, voire complotistes.
Troisièmement, les Français vont chercher ces informations sur les réseaux sociaux, qui sont eux aussi aux mains de quelques milliardaires et dont les algorithmes sont incontrôlables, ainsi que le révèlent les Facebook files.
Dans ce contexte, nous vous attendions sur divers fronts, notamment en soutien des salariés d’Europe 1, l’été dernier. Vous avez préféré soutenir la fusion de TF1 et de M6… Le Président de la République a même été jusqu’à débarquer la directrice de l’Autorité de la concurrence, il y a quelques jours, brutalement et sans explication, car elle ne semblait pas assez encline à laisser faire ce projet.
Madame la ministre, à l’heure du bilan, qu’avez-vous fait pour respecter l’engagement pris par Emmanuel Macron en 2017 de protéger l’indépendance éditoriale des médias ? Qu’avez-vous fait pour lutter contre la concentration des médias, préservant ainsi une condition essentielle pour la démocratie et un débat public apaisé ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER. – M. Éric Bocquet applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture.
Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture. Madame la sénatrice, vous constatez avec justesse des phénomènes de concentration dans les médias. Outre la concurrence exacerbée qui règne habituellement, l’apparition des grandes plateformes numériques et des réseaux sociaux y participe aussi.
Nous avons besoin de champions nationaux forts pour pouvoir investir massivement dans la création, à la fois française et européenne. Les évolutions doivent toutefois se dérouler dans le respect du pluralisme et de la diversité de l’offre, qui sont d’ailleurs des principes garantis par la Constitution. Pour y veiller, nous disposons d’autorités administratives indépendantes : d’une part, l’Autorité de la concurrence ; d’autre part, le Conseil supérieur de l’audiovisuel.
Cependant, il nous faut bien constater – nous partageons ce diagnostic – que les textes qui assurent cette régulation sont déjà anciens et présentent des lacunes. Pour l’audiovisuel, ils ne portent que sur la diffusion hertzienne et, pour l’édition, que sur la diffusion papier.
C’est la raison pour laquelle M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances, et moi-même avons mandaté les inspections de nos ministères respectifs pour dresser un diagnostic et proposer des outils de diffusion de régulation publique destinés à mieux contrôler ces phénomènes.
Madame la sénatrice, je peux vous assurer de notre détermination à nous doter d’instruments de régulation puissants,…
Voix à gauche. Quand ?
Mme Roselyne Bachelot, ministre. … pour faire face à ces évolutions et, plus largement, au phénomène de concentration verticale dans les médias. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour la réplique.
Mme Sophie Taillé-Polian. J’avoue que je reste sur ma faim !
Madame la ministre, nous avons besoin d’une presse libre et diverse. Nous disposons certes des autorités indépendantes, mais elles ont subi quelques pressions. Nous venons d’assister au débarquement de la directrice de l’Autorité de la concurrence. Son intérim sera assuré par une personne qui doit recevoir la Légion d’honneur des mains du Président de la République !
Madame la ministre, il faut assurer l’indépendance de ces autorités et la renforcer en mettant fin, notamment, à la nomination par le Président de la République de ceux qui occupent ces hauts postes.
Il faut réformer les aides publiques pour qu’elles soient concentrées uniquement sur les grands groupes et soutenir la presse indépendante, qui souffre, qui a besoin de nous et qui est une nécessité pour la démocratie. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur les travées du groupe SER.)
stratégie européenne « farm to fork »
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur les travées du groupe UC.)
M. Franck Menonville. Ma question, qui s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, porte sur la stratégie Farm to Fork.
Déclinaison du Pacte vert européen, cette stratégie vise à porter à 25 % la part de l’agriculture biologique, à l’horizon de 2030, à réduire de moitié les usages des produits phytosanitaires et, surtout, à diminuer de 10 % les surfaces cultivées sur notre continent. De nombreuses études, dont celle du Centre commun de recherche de la Commission européenne, mettent en avant les effets potentiellement négatifs de cette stratégie.
La Commission a malheureusement maintenu sa ligne directrice initiale, sans mener d’étude d’impact sérieuse. On estime les pertes de production entre 15 % et 20 %, ce qui aura des conséquences sur le revenu des agriculteurs.
De plus, l’Europe devrait faire face à une situation de dépendance alimentaire. D’exportateurs, nous pourrions devenir importateurs net.
Toujours selon la même étude, l’impact sur la lutte contre le changement climatique serait très faible. C’est un comble, car il s’agit là, bien évidemment, de l’objectif recherché !
Monsieur le ministre, ces propositions font fi de la situation géopolitique et sont à contre-courant des ambitions que nous portons pour l’agriculture européenne. Ce renoncement stratégique reviendrait à sacrifier soixante ans de politique agricole commune. Les conditions fixées ignorent les besoins actuels d’autonomie et les risques de pénurie que la crise sanitaire a pourtant mis en exergue.
Ne faisons pas à notre agriculture ce que nous avons fait à certains pans de notre industrie !
Mme Sophie Primas. Très bien !
M. Franck Menonville. L’agriculture doit poursuivre sa transition progressive, sans brutalité, en mobilisant la recherche et l’innovation.
Monsieur le ministre, vous aurez dans quelques semaines la lourde responsabilité de présider le conseil des ministres de l’agriculture de l’Union européenne. Quelle ligne défendrez-vous pour garantir durablement la souveraineté alimentaire de l’Europe ? (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le sénateur, je veux tout d’abord vous dire que, dans ma vision de la politique, il n’y a pas de renoncement. Il y a toujours une volonté d’action (« C’est beau ! » sur les travées du groupe SER.), même quand la situation est difficile, comme vous l’avez très bien exprimé.
L’étude à laquelle vous faites référence, menée par le bureau d’études de la Commission européenne, doit provoquer un réveil des consciences chez toutes celles et tous ceux qui considèrent que l’on ne fait jamais assez pour la transition agroécologique.
La nouvelle politique agricole commune va tellement loin que, comme vous l’avez dit, monsieur le sénateur, la production diminuera de 13 % au niveau européen, tandis que les importations augmenteront de 20 % et que les deux tiers des émissions de CO2 que l’on réduira en Europe seront réimportées. Où est le sens d’une telle politique quand elle va aussi loin ? (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Bruno Sido applaudit également.)
Il faut aussi que le réveil des consciences porte sur la finalité de notre agriculture, dont certains oublient la mission d’abord nourricière. Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, l’Europe a un rôle nourricier qu’elle doit assumer tant pour notre souveraineté que vis-à-vis du reste du monde ! Cela est d’autant plus vrai que, sous l’effet du changement climatique, les zones où la production agricole ne sera plus possible risquent de se multiplier. L’Europe doit assumer ce rôle nourricier. Il y va d’un certain nombre d’équilibres à l’international.
Avec mes collègues, notamment Clément Beaune, je vais me battre au niveau européen pour que l’étude d’impact soit réalisée, car les parlementaires européens l’ont votée. Nous nous battrons aussi pour que l’on instaure enfin des clauses miroir dans la réciprocité des échanges, car sans elles nous ne pourrons pas continuer d’avancer aussi rapidement que nos concitoyens le demandent.
La ligne que nous défendrons est extrêmement claire : il n’y aura pas de renoncement, mais il y aura une volonté de poursuivre dans la voie que j’ai tracée. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Bruno Sido applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État chargé du tourisme.
Monsieur le secrétaire d’État, « les remontées mécaniques seront accessibles sans passe sanitaire et donc sans limite de personnes », avez-vous déclaré sans ambiguïté, le 30 septembre dernier, lors d’un congrès à Chambéry. Cela n’avait pas manqué de réjouir les acteurs de la montagne, après plus d’un an d’arrêt et la perte importante de leur chiffre d’affaires.
Quelques semaines plus tard, vous changez de pied, illustrant le « en même temps » cher à votre majorité ! Vous avez déclaré, il y a quelques jours, qu’aucune décision n’était prise concernant le passe sanitaire.
Qui croire ? Le Jean-Baptiste Lemoyne qui parlait en septembre dernier, à Chambéry, devant les professionnels de la montagne, ou bien celui qui s’exprime en ce mois d’octobre, à Paris ? (Marques d’amusement sur les travées du groupe Les Républicains.)
Nous sommes le 27 octobre, la saison a démarré, comme vous le savez, et les professionnels ne connaissent toujours pas les conditions d’accès aux remontées mécaniques, alors que vous vous étiez engagé à leur apporter des réponses claires avant la mi-octobre.
Les maires des stations de montagne, les dirigeants des remontées mécaniques sont désabusés. Ils ont à présent besoin de savoir de manière extrêmement claire quel sera leur mode de fonctionnement.
Élue des Alpes-Maritimes, je compte dans mon département sept stations de ski, dont certaines se remettent à peine de la tempête Alex. Les professionnels qui y travaillent attendent autre chose du Gouvernement qu’un discours contradictoire.
Ils veulent savoir où vous en êtes sur la question du passe sanitaire – mais peut-être ne le savez-vous pas vous-même ? (Nouvelles marques d’amusement sur les travées du groupe Les Républicains.)
Monsieur le ministre, pour vous aider à prendre votre décision, je vous rappelle que le ski est un sport d’extérieur. Lorsque l’on est skis aux pieds, casqué, ganté et souvent masqué, on reste évidemment bien plus éloigné des autres que sur une plage, dans un centre commercial ou dans une rame de métro. (Marques d’approbation sur les travées du groupe Les Républicains.)
Les acteurs du tourisme hivernal comptent sur cette saison pour rebondir. Ils sont las de vos atermoiements et de votre manque d’anticipation et de lisibilité – ce sont décidément les éléments caractéristiques de votre gestion de crise. Peut-être préférez-vous, une fois de plus, annoncer vos décisions aux directeurs des remontées mécaniques, quelques heures avant leur mise en application ?
Monsieur le ministre, pouvez-vous définitivement nous rassurer, cet après-midi, dans l’hémicycle, quant à l’avenir de nos stations de ski ? (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, chargé du tourisme, des Français de l’étranger et de la francophonie.
Plusieurs sénateurs Les Républicains. Sujet glissant !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du tourisme, des Français de l’étranger et de la francophonie. Madame la sénatrice, je peux naturellement vous rassurer sur l’avenir de nos stations de ski, car, comme vous le savez, depuis dix-huit mois, le Gouvernement agit matin, midi et soir, pour que le tourisme français reste debout malgré les conditions extrêmement difficiles qu’a imposées la crise sanitaire.
Cela vaut en particulier pour la montagne puisque, sous l’égide de M. le Premier ministre, nous avons mis en place un plan d’urgence de 6 milliards d’euros visant à indemniser les remontées mécaniques et les commerces. Un dispositif a également été prévu en faveur des moniteurs de ski.
Quant au plan Avenir montagne, contractualisé avec les régions, il prévoit de dégager 300 millions d’euros d’investissements. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
Madame la sénatrice, j’en viens à l’objet précis de votre question. (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.) Je crains que vous ne m’ayez pas écouté attentivement, ni à l’occasion du congrès des domaines skiables de France – vous n’y étiez pas, me semble-t-il – ni à l’occasion de mes déclarations à l’ANEM (Association nationale des élus de la montagne), la semaine dernière, puisque j’ai eu à cœur d’avoir un dialogue nourri avec les élus et les acteurs de la montagne.
Des stations ont ouvert, comme le glacier de Tignes et les Deux Alpes. À ce stade, le protocole ne prévoit pas de passe sanitaire. Néanmoins, comme je l’ai toujours dit, nous devons être vigilants quant à l’évolution de l’épidémie. Le passe sanitaire est la solution qui permet de maintenir ouvert un certain nombre d’activités, comme on l’a constaté l’été dernier en pleine quatrième vague.
Par conséquent, à la demande des professionnels, nous mènerons une concertation dans les prochains jours. Nous souhaitons leur donner de la visibilité, dès le début du mois de novembre, afin qu’ils puissent s’adapter et surtout que la saison soit réussie. Nous avons pour seul mot d’ordre que la montagne française soit de retour cet hiver. Nous y mettons les moyens, y compris sous la forme de campagnes de promotion. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp, pour la réplique.
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Monsieur le secrétaire d’État, je regrette que vous n’ayez pas saisi cette opportunité pour rassurer les professionnels de nos stations de ski et pour leur envoyer un message clair.
Ma question était simple ; votre réponse aurait dû l’être tout autant ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
situation de la papeterie chapelle darblay
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Didier Marie. Ma question s’adresse à Mme la ministre déléguée chargée de l’industrie.
Le 15 octobre dernier, le groupe finlandais UPM a annoncé son choix de céder le site de Chapelle Darblay, à Grand-Couronne, en Seine-Maritime.
L’avenir de ce site n’est pas une affaire locale. L’usine est la dernière en France à être en capacité de produire du papier 100 % recyclé. Elle dispose d’une puissance de recyclage de 480 000 tonnes par an, soit la collecte effectuée auprès de 24 millions de Français, dans un périmètre de 400 kilomètres incluant l’Île-de-France.
Le projet retenu par UPM, celui du groupement Samfi-Paprec, comprend une activité de tri des déchets sans recyclage, l’utilisation d’une chaudière biomasse et l’hypothétique mise en place, d’ici trois à cinq ans, d’une unité de production d’hydrogène.
Une offre alternative, portée par Veolia et Fibre Excellence, a été écartée. Pourtant, celle-ci prévoit la production de 400 000 tonnes de cartons d’emballage, dont la demande explose, à partir des papiers et cartons usagés, collectés en France. Elle permet la préservation du site industriel, des machines, des compétences et recrée 250 emplois. Elle utilise la voie fluviale et constitue un projet cohérent d’économie circulaire. Elle a le soutien des syndicats, qui ont fait preuve de responsabilité dans ce dossier, et des élus locaux.
La métropole Rouen Normandie entend faire valoir son droit de préemption.
Madame la ministre, il faut préserver l’outil industriel et éviter le démantèlement des machines. Comment le Gouvernement compte-t-il intervenir et appuyer la démarche de la collectivité ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Éric Bocquet applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’industrie.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Monsieur le sénateur Marie, Bruno Le Maire et moi-même suivons la situation de Chapelle Darblay avec la plus grande attention. Nous avons pour unique boussole de redévelopper le maximum d’emplois industriels sur ce site, qui a fermé il y a presque deux ans et où les 228 salariés qu’il comptait ont arrêté de travailler. Cette boussole, je le sais, est aussi celle des élus du territoire, des représentants du personnel et des anciens salariés.
Grâce à notre mobilisation, le site a été maintenu en l’état pendant deux ans, ce qui a permis la recherche de repreneurs. Deux solutions portées par des grands groupes français ont émergé, ce qui est une très bonne nouvelle.
La première solution, portée par Samfi-Paprec, a été déposée l’été dernier. La deuxième, portée à ce stade uniquement par Veolia, a été remise il y a deux semaines.
Après avoir examiné ces offres, UPM a choisi celle de Samfi-Paprec. Avec Bruno Le Maire, j’ai regretté que le groupe finlandais n’ait pas retardé sa décision pour réexaminer en détail les deux offres.
Le droit de préemption que la métropole Rouen Normandie souhaite exercer relève de sa propre compétence. Je peux toutefois vous confirmer que nous serons au rendez-vous pour accompagner toute solution de nature à maximiser le nombre d’emplois industriels recréés dans des activités au service de la transformation environnementale.
Nous l’avons déjà fait dans le secteur du papier-carton, pour le site Fibre Excellence de Tarascon, il y a quelques mois, et pour celui de Norske Skog à Golbey, ou bien en sécurisant le site d’Alizay, situé à une vingtaine de kilomètres de Grand-Couronne, qui fabriquera du papier carton recyclé.
Nous ferons de même pour recréer de l’emploi industriel à Chapelle Darblay, comme j’ai eu l’occasion de le redire, ce matin, à Nicolas Mayer-Rossignol, président de la métropole Rouen Normandie. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour la réplique.
M. Didier Marie. Madame la ministre, depuis l’arrêt des machines, 480 000 tonnes de papier ont été envoyées à l’étranger, incinérées ou enfouies. Dans sa présentation du plan France 2030, le Président de la République a insisté sur la nécessité d’investir dans le recyclage et il a fait de l’économie circulaire une priorité.
L’initiative de la métropole Rouen Normandie doit donc être appuyée par le Gouvernement. Des instructions doivent être données pour éviter le démantèlement du site. Des discussions doivent être de nouveau engagées avec UPM pour que l’offre alternative soit sérieusement examinée.
La réindustrialisation du pays et le développement de l’économie circulaire nécessitent que le Gouvernement passe des paroles aux actes. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
dysfonctionnement de bloctel à la suite de la nomination d’un nouveau président
M. le président. La parole est à M. Hugues Saury, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nadia Sollogoub et M. Olivier Cigolotti applaudissent également.)
M. Hugues Saury. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Le démarchage téléphonique peut être un véritable fléau et confiner au harcèlement.
C’est la raison pour laquelle le système concessif nommé « Bloctel » a été mis en service en 2016. Plus de 4 millions de foyers y ont recours, pour environ 11 millions de numéros de téléphone. Malgré des critiques liées au contournement du dispositif, 350 milliards de numéros ont été traités, et 13 milliards d’appels bloqués depuis son lancement.
La DGCCRF (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a lancé l’appel d’offres et attribué le marché pour renouveler la concession. Depuis quatre ans, et contractuellement jusqu’à mai 2021, la société Opposetel avait la charge de ce service. Avec plus de cinq mois de retard, la société Wordline a finalement été désignée pour une durée de cinq années.
Le service est devenu inaccessible, puis est passé en mode dégradé et sera maintenu tel jusque dans le courant du mois de novembre, selon les indications qui figurent sur le site de Bloctel depuis le 1er octobre dernier.
Cette dégradation a d’abord pour conséquence que nos concitoyens sont dans l’impossibilité de s’inscrire pour bénéficier du service. Ensuite, il semblerait que les consommateurs inscrits sur cette liste constatent une recrudescence d’appels intempestifs. Enfin, les entreprises qui adhèrent au dispositif et paient un abonnement ne parviennent plus, quant à elles, à identifier les numéros qui leur sont interdits et risquent, dès lors, de se voir infliger une sanction pouvant aller jusqu’à 75 000 euros d’amende.
Monsieur le ministre, comment expliquez-vous cette négligence ? Quand le service sera-t-il fiable et totalement opérant ? Quelles garanties pouvez-vous apporter aux entreprises dans cette situation de non-droit ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Stéphane Demilly applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.
M. Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des petites et moyennes entreprises. Monsieur le sénateur Saury, je veux tout d’abord vous assurer de la détermination du Gouvernement à protéger les consommateurs dans leur vie quotidienne.
Cette mobilisation s’applique en particulier à la lutte contre les sollicitations téléphoniques indésirables. Le démarchage téléphonique non sollicité est un désagrément majeur pour nos concitoyens, parfois dérangés plusieurs fois par jour. Je suis, comme vous, pleinement conscient de l’attente extrêmement forte des Français dans ce domaine.
Pour améliorer le service tant pour les consommateurs que pour les entreprises, un nouveau prestataire a été récemment retenu à l’issue d’un appel d’offres. Mis en place depuis le 1er octobre dernier, ce nouveau prestataire modernise le service pour proposer davantage de fonctionnalités à un coût nettement plus limité pour les entreprises, en particulier les plus petites.
Ce changement de prestataire et les travaux de modernisation en cours ont une incidence logique, mais temporaire sur le service, même si tout est fait pour qu’elle reste la plus limitée possible.
M. François Bonhomme. C’est inefficace !
M. Alain Griset, ministre délégué. Dès le début de l’opération, les consommateurs inscrits sur Bloctel ont continué d’être couverts par le service, puisque leurs numéros avaient été retirés des listes de démarchage traitées au mois de septembre. Le 8 octobre dernier, les entreprises effectuant du démarchage téléphonique ont de nouveau pu soumettre leurs listes au nouveau prestataire. Par conséquent, pour les consommateurs inscrits sur Bloctel, la situation est revenue à la normale depuis bientôt trois semaines. (M. François Bonhomme le conteste.)
Depuis le 25 octobre, il est de nouveau possible de s’inscrire pour protéger son numéro. Les services de la DGCCRF sont en contact régulier avec les associations de consommateurs et les entreprises du secteur pour les tenir informées en toute transparence de l’avancée des travaux.
Monsieur le sénateur, je peux vous assurer que les services de la DGCCRF sont totalement mobilisés pour faire, par ailleurs, cesser le démarchage abusif.