M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. L’idée de cet amendement est tout à fait intéressante, mais le mode opératoire proposé pose un certain nombre de questions.
Ainsi, il y aurait un droit de priorité pour les propriétaires voisins de parcelles forestières situées en zone de montagne, dès lors que ce bien a été acquis selon la procédure relative aux biens sans maître. Cela crée une inégalité dans le droit de propriété en fonction de la procédure d’acquisition d’un bien : un voisin serait prioritaire, mais seulement si la parcelle a été acquise en tant que bien sans maître.
Seconde difficulté, il est prévu que cette possibilité d’acquisition soit encore facilitée en cas de projet d’intérêt collectif. Nous avons déjà évoqué cette notion : il peut s’agir, par exemple, d’un département qui a besoin d’une parcelle pour réaliser une route – nous sommes bien en l’occurrence sur un projet d’intérêt général porté par une collectivité.
Dans cet amendement, l’intérêt collectif relèverait de l’appréciation portée par une commune sur le projet d’un propriétaire privé, ce qui est plus contestable.
Pour résumer, je dirai que l’idée est pertinente, mais que le dispositif ne fonctionne pas en pratique. Je crois qu’il est important de continuer de travailler sur ce sujet afin de lutter contre le morcellement forestier, qui est un véritable problème.
C’est pourquoi, sauf si Mme la ministre nous donne des arguments différents, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. René-Paul Savary. C’est un droit de préférence !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Oui, vous avez raison, il s’agit d’un droit de préférence.
Il bénéficie aux propriétaires de terrains boisés, quel que soit le statut du vendeur, mais seules les ventes de terrains de moins de quatre hectares sont concernées.
Cette disposition ne peut évidemment pas résoudre tous les problèmes, mais elle m’amène, en plus des raisons avancées par Mme la rapporteure, à donner un avis défavorable sur cet amendement : il est partiellement satisfait par le droit en vigueur et il pose d’importantes questions juridiques.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Le morcellement de la propriété forestière est une question importante, qui dépasse, il est vrai, le cadre du présent projet de loi.
Je peux vous dire, madame la ministre, que l’application du droit de préférence est assez difficile dans la vraie vie.
D’une part, il est limité aux terrains de moins de quatre hectares. D’autre part, il s’agit souvent, notamment en zone de montagne, de petits propriétaires qui ont hérité d’une parcelle, éventuellement de plusieurs, et qui la vendent. Et lorsque le nombre de propriétaires voisins est égal ou supérieur à dix, ce qui est fréquent, la publicité foncière se fait par voie d’affichage, si bien qu’aucun voisin n’est en fait au courant que la parcelle limitrophe à la leur est en vente. Voilà comment les choses se passent ! Il faut donc réfléchir à cette procédure parce qu’elle pose encore un certain nombre de problèmes.
Autre difficulté, il s’agit souvent, notamment en zone de montagne, de biens mixtes – il y a aussi un morceau de prairie ou de pré – et, dans ce cas, le droit de préférence ne s’applique pas.
Vous le voyez, le droit de préférence peut assez facilement être contourné. C’est pourquoi je trouve que cet amendement est particulièrement important. Il permet de lutter contre le morcellement de la propriété forestière et va dans le sens d’une meilleure gestion des forêts, ce qui contribue par excellence au développement durable. Voilà pourquoi je le soutiens.
Pour autant, il ne me semble pas pertinent de limiter son champ aux zones de montagne. D’autres territoires forestiers sont également concernés par la question des biens sans maître.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Absolument !
M. René-Paul Savary. Mme Loisier, qui est présidente du groupe d’études du Sénat « Forêt et filière bois », pourrait vous en parler. J’irais donc volontiers jusqu’à sous-amender la proposition de Bernard Delcros.
En tout cas, il me semble important d’adopter cet amendement pour que les discussions puissent se poursuivre durant la navette parlementaire, ce qui permettrait d’améliorer la mise en œuvre sur le terrain du droit de préférence en cas de vente de propriétés forestières.
M. le président. Monsieur Delcros, l’amendement n° 697 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Bernard Delcros. Je suis sensible aux arguments qui ont été avancés par les uns et par les autres et je le retire, monsieur le président.
Cependant, j’insiste sur le fait que nous devons absolument travailler sur ce sujet. Ainsi, limiter le droit de préférence aux terrains de moins de quatre hectares ne répond pas aux problèmes qui se posent. L’effet de seuil est beaucoup trop important, tout en étant peu pertinent.
Tous les outils qui permettent de lutter contre le morcellement de la forêt privée doivent être mis en œuvre. C’est une question d’intérêt général, si nous voulons gérer nos forêts de manière cohérente et durable. Et pour cela, nous devons disposer de parcelles suffisamment grandes, à l’échelle des massifs quand c’est possible.
Même si je retire cet amendement aujourd’hui, je continuerai de travailler sur ce sujet et je vous présenterai une autre proposition à l’occasion de l’examen d’un prochain texte.
M. le président. L’amendement n° 697 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 1622 rectifié bis, présenté par MM. Mohamed Soilihi, Richard, Haye, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 323-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « ainsi que les locataires ou preneurs commerçants, artisans, industriels ou agricoles » sont supprimés ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les locataires ou preneurs commerçants, artisans, industriels ou agricoles d’un bien dont la propriété a été transférée à une entité expropriante en vertu d’une ordonnance d’expropriation ou d’une cession amiable postérieure à une déclaration d’utilité publique ou, lorsqu’il en a été donné acte par le juge, antérieure à cette déclaration, peuvent obtenir le paiement d’un acompte dans les mêmes conditions. »
La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.
M. Thani Mohamed Soilihi. L’article L. 323-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 6 novembre 2014 relative à la partie législative du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, prévoit le principe du versement d’une avance sur indemnité d’expropriation ou d’éviction, due au propriétaire ou au locataire affecté par l’opération, dès lors que les parties n’ont pu s’accorder sur le montant de l’indemnisation et que la juridiction de l’expropriation est saisie pour le fixer.
L’objectif de cette mesure est de faciliter la réinstallation des personnes dans de nouveaux locaux, afin de limiter l’aggravation de leurs préjudices.
Ce texte, en ce qu’il conditionne l’octroi d’un acompte à l’existence d’une ordonnance d’expropriation, exclut de fait du bénéfice de cet acompte les locataires de biens qui ont fait l’objet d’une cession amiable postérieurement à une déclaration d’utilité publique. Cette inégalité a motivé la censure de l’article par le Conseil constitutionnel et son abrogation à compter du 1er mars 2022.
En conséquence, afin de respecter les principes constitutionnels et de s’assurer que chaque locataire est en mesure de retrouver au plus vite et dans les meilleures conditions un nouveau logement ou un nouveau local commercial, le présent amendement propose une nouvelle rédaction de l’article L. 323-3 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique. Celle-ci permettrait d’étendre à tous les locataires la possibilité d’obtenir un acompte, peu importe que le transfert de propriété du bien qu’ils louent ait eu lieu en vertu d’une cession amiable ou d’une ordonnance d’expropriation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Cet amendement vient corriger une disposition qui a fait l’objet d’une censure par le Conseil constitutionnel. Il tend à restaurer l’égalité entre les locataires de biens, que ces derniers aient fait l’objet d’une expropriation ou non.
L’avis est donc favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 27.
L’amendement n° 1086 rectifié ter, présenté par M. Féraud, Mmes de La Gontrie et Blatrix Contat, MM. Bourgi et Cozic, Mme Harribey, M. Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly, Lozach, Lurel et Pla, Mme Préville et MM. Redon-Sarrazy et Stanzione, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 17-1 de la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, il est inséré un article 17-… ainsi rédigé :
« Art. L. 17-…. – Lorsqu’elles sont nécessaires à la préparation, à l’organisation et au déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, et nonobstant l’article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales, le maire peut prendre les décisions relatives à la délivrance et à la modification des titres d’occupation des dépendances du domaine public prévus à l’article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques.
« Le maire informe sans délai et par tout moyen les conseillers municipaux des décisions prises sur le fondement de l’alinéa précédent dès leur entrée en vigueur. Il en rend compte également à la prochaine réunion du conseil municipal. »
La parole est à M. Rémi Féraud.
M. Rémi Féraud. Cet amendement vise à adapter les règles d’occupation du domaine public dans le cadre de la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
En effet, les communes auront à délivrer et à adapter, très probablement dans des délais contraints, des titres d’occupation du domaine public, notamment dans le cadre des enceintes sportives dédiées aux jeux.
Il est donc proposé que, dans ce cadre, les maires aient la compétence pour délivrer de plein droit ces titres d’occupation du domaine public, sans devoir passer préalablement par une délibération du conseil municipal. Le contrôle de légalité sera naturellement exercé par le préfet et l’amendement prévoit en outre l’information « au fil de l’eau » des membres des assemblées délibérantes et la possibilité pour elles de modifier ces attributions par une délibération, sous réserve bien sûr des droits acquis par les bénéficiaires.
Dans le prolongement de la loi de 2018, cet amendement tend à mettre en place une disposition qui est nécessaire dans le cadre de la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Cet amendement vise à ce que soit déléguée aux maires la compétence d’attribuer des autorisations d’occupation du domaine public en lien avec les jeux Olympiques.
J’entends votre préoccupation, mon cher collègue. Toutefois, des engagements ont été pris dans le contrat de ville hôte signé avec le Comité international olympique (CIO) pour l’obtention des jeux et une traduction en a été faite dans la loi de 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Je m’interroge sur la compatibilité de votre demande avec cette loi. C’est pourquoi je sollicite l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je ne suis pas favorable à cet amendement parce qu’il tend, en fait, à dessaisir le conseil municipal de ses attributions.
En effet, le conseil municipal peut tout à fait adopter une délibération générale pour permettre aux maires de délivrer les titres d’occupation du domaine public qui sont nécessaires aux jeux Olympiques.
Je comprends l’esprit de votre proposition, mais il me semble préférable de passer par une délibération du conseil municipal.
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Défavorable, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1086 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 150 rectifié, présenté par M. Mizzon, Mme Vermeillet, MM. Henno, Masson, Kern, Canévet, Calvet et Bouchet, Mme Sollogoub, M. Longeot, Mme Belrhiti et MM. Chauvet, P. Martin et L. Hervé, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation à l’article L. 103 du livre des procédures fiscales, les informations nécessaires à l’acquisition des biens visés par cet article sont communicables aux collectivités territoriales.
La parole est à M. Jean-Marie Mizzon.
M. Jean-Marie Mizzon. Cet amendement concerne la procédure d’acquisition des biens sans maître.
Lorsqu’un maire veut mettre en œuvre cette procédure, qui est prévue par l’article L. 1123-1 du code général de la propriété des personnes publiques, il doit démontrer que l’impôt foncier correspondant n’est pas payé depuis au moins trois ans.
Pour cela, le maire doit se tourner vers la direction générale des finances publiques, qui se retranche quasi systématiquement derrière le secret professionnel.
Par conséquent, le maire n’a pas de réponse et la procédure ne peut se poursuivre. C’est d’ailleurs ce qu’a répondu le ministre en charge des comptes publics, M. Dussopt, à une question que je lui ai adressée : « La procédure d’incorporation des biens présumés sans maître pour les immeubles assujettis à la taxe foncière sur les propriétés bâties ne fait l’objet d’aucune dérogation au secret professionnel. »
Dans ce contexte, cet amendement entend simplifier – un des maîtres-mots du texte que nous examinons depuis plusieurs jours maintenant – la procédure des biens sans maître, en permettant la levée du secret professionnel lorsque – et uniquement dans ce cas – le maire d’une commune interroge les services fiscaux pour savoir si l’impôt a été payé ou non durant les trois dernières années.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Notre collègue Jean-Marie Mizzon pose une question intéressante, mais il me semble que l’administration est déjà censée, en vertu de l’article L. 135 B du code des procédures fiscales, communiquer au maire les rôles généraux des impôts directs locaux, ainsi que le montant de l’impôt non recouvré par redevable.
Nul besoin, par conséquent, d’une simplification, me semble-t-il ; ou alors il faut réveiller celle qui est déjà prévue dans les textes… Peut-être faudrait-il tout simplement rappeler à M. Dussopt que son administration doit communiquer aux maires ces informations.
C’est pourquoi je demande le retrait de cet amendement qui me semble satisfait par le droit existant.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. J’ajoute aux arguments de Mme la rapporteure que, tel qu’il est rédigé, cet amendement ouvre un champ de dérogation très large à la règle du secret professionnel et qu’il n’encadre pas suffisamment la liste des données qui pourraient être communiquées, ce qui présente un réel risque d’inconstitutionnalité.
Comme vient de le dire Françoise Gatel, il serait peut-être intéressant de saisir le ministre en charge des comptes publics pour avancer sur cette question.
M. le président. Monsieur Mizzon, l’amendement n° 150 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Marie Mizzon. Je ne partage pas du tout l’avis de Mme la rapporteure. En effet, il faut montrer soit que l’impôt n’a pas été payé pendant trois ans, soit qu’il n’a pas été payé par un tiers. Or les services fiscaux communiquent uniquement des données anonymes ; on ne peut donc pas les utiliser dans le cas d’espèce.
C’est pourquoi je souhaitais, pour simplifier la vie des élus, singulièrement celle des maires, et uniquement dans le cadre de cette procédure spécifique, qu’une exception au secret professionnel soit ménagée.
La simplification doit finir par triompher ! Aujourd’hui, la seule solution du maire est de saisir la direction générale des finances publiques, mais elle lui répond qu’elle ne peut pas lui fournir d’informations en raison du secret professionnel. Il faut qu’on sorte de ce blocage !
C’est pourquoi je maintiens cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 150 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 27 bis (nouveau) (précédemment réservé)
I. – Après l’article L. 161-6 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 161-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 161-6-1. – Le conseil municipal peut, par délibération, décider le recensement des chemins ruraux situés sur le territoire de la commune. Cette délibération interrompt le délai de prescription pour l’acquisition des parcelles comportant ces chemins.
« L’interruption produit ses effets jusqu’à la délibération arrêtant le tableau récapitulatif des chemins ruraux, prise après enquête publique réalisée conformément au code de l’expropriation pour cause d’utilité publique et selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État. Cette délibération ne peut intervenir plus de deux ans après la délibération prévue au premier alinéa.
« L’interruption est non avenue à l’égard des chemins que la commune aura choisis de ne pas faire figurer au tableau récapitulatif. »
II. – Le délai de prescription pour l’acquisition d’une parcelle comportant un chemin rural est suspendu pendant deux ans à compter de la publication de la présente loi. – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 27 bis (précédemment réservé)
M. le président. L’amendement n° 694 rectifié bis, présenté par MM. Folliot, Bonnecarrère, Henno, Canévet et Kern, Mmes Vermeillet et Doineau et MM. Hingray, de Belenet, Levi, P. Martin, L. Hervé, Moga et Duffourg, est ainsi libellé :
Après l’article 27 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La délibération concernant la vente du chemin rural est dispensée d’enquête publique préalable sauf lorsque l’opération envisagée a pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurées par le chemin. »
La parole est à M. Philippe Folliot.
M. Philippe Folliot. Dans nombre de communes rurales, il existe des chemins ruraux, qui étaient utilisés dans la vie d’avant pour aller d’une ferme à une autre, d’un hameau à un autre, d’une ferme au village, etc. À l’époque, il fallait marcher !
Nombre de communes se trouvent encore aujourd’hui avec des dizaines de kilomètres de chemins ruraux, dont certains n’existent plus – c’est souvent le cas. Certains de ces chemins ont connu une heureuse reconversion en devenant des sentiers de randonnée ; c’est une très bonne chose, dont on ne peut que se féliciter. Mais d’autres ont totalement disparu, parfois enfouis sous la végétation.
C’est pourquoi il serait intéressant, dans un souci de simplification, de faciliter la cession par les communes de ces chemins qui ne sont plus utilisés et qui ne répondent plus à leur vocation originelle.
Une telle cession est aujourd’hui possible, mais la procédure est lourde : il faut par exemple une enquête d’utilité publique qui entraîne des complexités administratives, notamment pour les plus petites communes qui n’ont pas de services administratifs très importants, mais aussi des coûts indirects, parce qu’il faut rémunérer le commissaire enquêteur.
Cet amendement de simplification est donc attendu par les élus. Il tend à prévoir que la délibération concernant la vente d’un chemin rural est dispensée d’enquête publique préalable, sauf lorsque l’opération envisagée a pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurées par ce chemin. Le dispositif est donc suffisamment encadré.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. La question, fort compliquée et parfois même très délicate, des chemins ruraux se pose de façon récurrente. Nous avons tous eu vent d’histoires de famille portant sur un chemin de village que tout le monde a oublié, mais qui est l’objet d’un conflit transmis de génération en génération.
La commission a adopté quelques amendements relatifs aux chemins ruraux, déposés par notre collègue Philippe Bonnecarrère, et visant à reprendre la proposition de loi que le Sénat avait votée en 2015 mais qui n’a pas prospéré jusqu’à son terme.
Vous proposez, cher Philippe Folliot, que l’on se dispense d’une enquête pour la vente d’un chemin rural. Je comprends votre préoccupation. Dans nombre de communes, il y a des chemins ruraux qui semblent n’avoir jamais été empruntés depuis dix ou quinze ans par un piéton, un cheval ou un tracteur. Vous voudriez donc simplifier la procédure de cession.
Toutefois, je le répète, dans les communes rurales, à cause de cette mémoire familiale que l’on s’est transmise, il arrive que surgisse un héritier s’intéressant à l’un de ces chemins.
Je rappelle que la cession de chemins ruraux ne se fait pas à la suite d’une enquête publique compliquée. Il appartient seulement au maire de mettre en demeure publiquement les propriétaires riverains d’acquérir le chemin. Après cette publicité, qui dure un mois, s’il n’y a pas de réponse, le maire procède à une enquête qui dure quinze jours. Cela veut dire que la procédure peut être réglée en un mois et demi, avant que le conseil municipal ne délibère sur le sujet.
Sincèrement, je comprends bien la question. Mais je mets en face de votre souhait légitime de simplification le risque que l’on ferait courir à un maire si jamais il arrivait des Amériques, ou de je ne sais où, un héritier désireux de réveiller soudainement la clause de propriété…
Dans un souci de sagesse, je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Si les chemins ruraux appartiennent au domaine privé de la commune, ils ne peuvent être vendus comme de simples biens privés. Je ne vais pas répéter ce qu’a très bien dit Françoise Gatel, mais pour qu’ils puissent être aliénés, il faut prévoir une enquête. Il s’agit non pas d’une enquête publique au sens du code de l’environnement, mais d’une procédure très simplifiée.
Pour résumer, l’aliénation n’est possible que si le chemin n’est plus affecté à l’usage du public : c’est ce que doit montrer cette enquête.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour explication de vote.
M. Philippe Folliot. J’ai bien entendu, madame la rapporteure, votre injonction motivée par le recours possible d’un lointain cousin d’Amérique… (Sourires.)
Je souscris à votre démonstration et vais retirer l’amendement, d’autant que les textes ont été complétés, comme vous l’avez dit, par des amendements déposés en commission par mon collègue et ami Philippe Bonnecarrère. Je pense que ces modifications vont dans le bon sens.
M. le président. L’amendement n° 694 rectifié bis est retiré.
Article 27 ter (nouveau) (précédemment réservé)
I. – Après l’article L. 161-10-1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 161-10-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 161-10-2. – Lorsqu’un échange de parcelles a pour objet de modifier le tracé ou l’emprise d’un chemin rural, la parcelle sur laquelle est sis le chemin rural peut être échangée dans les conditions prévues aux articles L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques et à L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales. L’acte d’échange comporte des clauses permettant de garantir la continuité du chemin rural.
« L’échange respecte, pour le chemin créé, la largeur et la qualité environnementale du chemin remplacé. La portion de terrain cédée à la commune est incorporée de plein droit dans son réseau des chemins ruraux.
« L’échange des terrains ayant abouti à rétablir la continuité d’un chemin rural ne donne lieu à aucune perception au profit du Trésor. »
II. – L’article L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’échange d’une parcelle sur laquelle se situe un chemin rural n’est autorisé que dans les conditions prévues à l’article L. 161-10-2 du code rural et de la pêche maritime. »
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. – (Adopté.)
Article 27 quater (nouveau) (précédemment réservé)
Dans les conditions prévues à l’article L. 361-1 du code de l’environnement, le département révise le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée pour tenir compte du recensement des chemins ruraux mené par les communes. – (Adopté.)
Article 29 (précédemment réservé)
Après l’article L. 302-2 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 302-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 302-2-1. – Le département peut mettre à la disposition des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui ne bénéficient pas des moyens suffisants pour l’élaboration du programme local de l’habitat une assistance technique dans des conditions déterminées par convention. »