M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Madame la sénatrice Florence Lassarade, à ce jour, un lit de réanimation sur cinq est encore occupé par un patient atteint de la covid-19. Si cette part continue de baisser, fruit des efforts consentis par les Français, on en conviendra, l’émergence de nouveaux variants, plus contagieux et potentiellement plus mortels, nous oblige à redoubler de vigilance, vous avez raison.
Dans ce contexte, la protection des plus vulnérables, quel que soit leur statut, est vitale et, donc, prioritaire. Leurs soignants et leurs accompagnants doivent se faire vacciner, nous en sommes convaincus. C’est un impératif qu’il me semble nécessaire de rappeler. Pourtant, la couverture vaccinale des soignants est plus faible que celle de la population générale.
Alors que 81 % des résidents des Ehpad sont vaccinés – nous avons choisi sciemment de commencer par eux cette campagne vaccinale –, seulement 60 % des professionnels de santé, même s’il y a eu un rebond ce mois-ci, sont vaccinés. Malgré une forte progression, ce taux est nettement insuffisant, vous avez raison de le souligner. Par ailleurs, il existe de très grandes disparités d’un établissement à l’autre.
Je lance de nouveau en cet instant un appel solennel aux soignants, notamment en Ehpad, à se faire vacciner. C’est un sujet de responsabilité qui nous oblige tous. La situation pourrait nous contraindre à une obligation vaccinale, par voie légale, des soignants.
À cet égard, nous avons souhaité lancer une large concertation, car cette obligation vaccinale ne se fera pas sans consensus. À ce titre, je recevrai cet après-midi avec Olivier Véran les ordres professionnels, les fédérations hospitalières et les Ehpad. Le Premier ministre recevra jeudi, sur ce sujet, l’ensemble des présidents des groupes parlementaires et des associations d’élus.
Pour autant, je crois utile de le rappeler, la vaccination obligatoire, vous l’avez dit, n’est pas nouvelle, puisqu’elle concerne déjà les soignants. C’est d’ailleurs une mesure de bon sens. Ainsi, quatre vaccins sont obligatoires – il s’agit de la diphtérie, du tétanos, de la poliomyélite et de l’hépatite B –, tandis que six autres sont très fortement recommandés – la rougeole, la rubéole, la varicelle, la coqueluche et la grippe. (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Je vous invite donc de nouveau à relayer cet appel à vacciner. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour la réplique.
Mme Florence Lassarade. La concertation, c’est bien. La décision et l’action, c’est tout de même beaucoup mieux, et impératif désormais ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
dissolution de l’établissement public du haras du pin
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question concerne le Versailles du cheval, le Haras national du Pin, bien évidemment cher au cœur des Normands et de notre président Gérard Larcher. (Sourires.)
Je voudrais d’abord remercier les ministres Jacqueline Gourault et Julien Denormandie d’avoir engagé, par lettre rectificative au projet de loi 3DS, projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique, la dissolution de l’établissement public administratif du Haras du Pin, qui ne donnait pas satisfaction.
Ils ont ainsi répondu à l’appel du député Jérôme Nury du président du conseil départemental de l’Orne, Christophe de Balorre et du président de la région, Hervé Morin. Les collectivités – département et région – ont ainsi souhaité reprendre en main la mise en place d’un projet ambitieux touristique et sportif.
Ce texte est discret sur les délais d’exécution. Compte tenu de l’importance de ce dossier pour le département de l’Orne, mais aussi pour l’Institut français du cheval et de l’équitation et pour l’Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, il est important que le Gouvernement s’engage sur un calendrier précis.
Monsieur le ministre, pouvez-vous vous engager sur la dissolution effective de l’établissement public au plus tard dans les six mois de la promulgation de la loi, avec un transfert concomitant des biens immobiliers à l’État et des biens mobiliers au département de l’Orne ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Madame la sénatrice Nathalie Goulet, ma réponse sera très claire.
Premièrement, le Gouvernement soutient pleinement le projet, et je vous remercie de vos propos.
Deuxièmement, ce projet devra se faire le plus rapidement possible. La date précise sera d’ailleurs discutée dans le cadre des amendements déposés sur le projet de loi 3DS.
Troisièmement, ce calendrier devra être compatible avec l’ensemble des échéances à court et moyen terme que nous devons respecter. Il implique le beau territoire normand, mais aussi l’Institut français du cheval et de l’équitation et la renommée internationale de notre pays. Je pense notamment à des sujets que vous suivez de près, comme les championnats mondiaux qui se tiendront dans les prochaines années.
Je le répète donc très clairement : ce projet doit se faire, et le plus rapidement possible. J’en veux pour preuve la lettre rectificative au projet de loi, qui a été présentée par le Gouvernement en conseil des ministres. Il s’agit en effet de veiller à ce que l’insertion d’une telle disposition au sein du projet de loi ne puisse être remise en cause.
C’est la preuve la plus précise, la plus forte, du soutien du Gouvernement à ce projet. Pourquoi un tel soutien ? Deux raisons y président.
Tout d’abord, je voudrais le souligner, les élus locaux, les collectivités locales, de ce beau département de l’Orne et de cette région Normandie soutiennent depuis des années ce projet ; et ils ont raison ! Je voudrais leur rendre hommage.
Ensuite, le haras du Pin – je le connais bien, y compris à titre personnel – est un joyau qui date de plusieurs siècles, un lieu d’exception et d’expertise, qui a connu de grands vétérinaires, monsieur le président (Exclamations amusées.), et des heures de gloire. Il nous faut absolument le faire perdurer.
Ce projet est un très beau projet ; nous le soutiendrons totalement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour la réplique.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le ministre, j’ai rappelé votre engagement ; je vous ai d’ailleurs remercié, ainsi que Jacqueline Gourault. Mais une grande confiance n’exclut pas une petite méfiance ! C’est la raison pour laquelle je posais de nouveau la question.
Vous avez évoqué les événements internationaux qui vont se dérouler au haras du Pin, dont les championnats du monde. De ce point de vue, tout retard sera extrêmement préjudiciable. Vous savez que faire et défaire, c’est toujours travailler : nous avions défendu les mêmes arguments au moment de la création de l’établissement public à caractère administratif, qui s’est avéré ne pas fonctionner.
C’est vraiment très important. Nous vous faisons confiance, mais il faudra assurer la mise en place de ce projet dans un délai qui ne soit pas celui du refroidissement du fût du canon ! (Sourires. – Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
législation russe relative à l’appellation du champagne
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Antoine Lefèvre. Ma question, à laquelle j’associe l’ensemble des sénateurs des départements de l’appellation « champagne », s’adresse à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Monsieur le ministre, d’aucuns se souviendront de la condamnation, en 1993, par la cour d’appel de Paris, d’une grande maison de couture française, jugée coupable d’avoir nommé l’un de ses parfums Champagne.
Trente ans plus tard, la question de la protection de l’intégrité de cette appellation est de retour dans l’actualité.
En effet, une loi signée le 2 juillet dernier par le président de la Fédération de Russie interdit désormais aux bouteilles importées de l’étranger de faire figurer la mention traduite en russe du mot « champagne » et en laisse l’usage exclusif aux producteurs russes, tout en reléguant l’original français au rang de « vin mousseux ». C’est un comble pour cette appellation d’origine contrôlée, dont la reconnaissance de la paternité champenoise a pris plusieurs siècles !
Le comité interprofessionnel du vin de Champagne a annoncé suspendre ses exportations vers la Russie tant que ce conflit commercial n’aura pas trouvé de résolution satisfaisante.
En s’arrogeant un patrimoine vinicole dont la France est l’exclusive titulaire, la Russie contrevient allègrement aux conventions du commerce international et exerce une pratique concurrentielle déloyale à l’égard de son troisième partenaire économique.
Les producteurs français n’auraient pas la prétention de s’arroger la paternité de la production de bortsch, de vodka ou de caviar de saumon russe ; de même, les producteurs russes sont tenus de respecter le patrimoine étranger protégé et ne sauraient contrevenir aux règles élémentaires du droit du commerce sans encourir les sanctions légalement applicables.
Voici ma question : quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre à l’encontre de la Russie dans le but de garantir l’exclusivité française de l’appellation « champagne » et de restaurer la pleine application du droit du commerce ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Alain Richard applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Lefèvre, vous avez raison ; votre diagnostic est juste et vos inquiétudes légitimes quant à cette nouvelle loi russe, qui est très récente – elle date de vendredi dernier.
Julien Denormandie, Franck Riester et moi-même sommes extrêmement mobilisés, tant pour l’analyser très concrètement – c’est un prérequis – que pour en enrayer les conséquences sur les professionnels des vins et spiritueux, en particulier sur nos exportations de champagne. Substituer, même en cyrillique, le mot « mousseux » au mot « champagne », ce n’est pas très convenable, avouons-le ! (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Loïc Hervé. C’est honteux !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Je remarque d’ailleurs qu’il ne s’agit pas de la première initiative protectionniste russe dans ce domaine viti-vinicole : nous avons déjà eu l’occasion, au cours des derniers mois, d’exprimer au niveau européen nos préoccupations en matière de respect de nos indications géographiques protégées.
Face à cette situation, nous avons engagé des discussions avec les professionnels. Nous allons dans les jours qui viennent prendre les contacts nécessaires et organiser les rencontres qui doivent l’être avec les autorités russes. Et nous allons agir au niveau européen pour faire en sorte que les intérêts de nos producteurs et nos indications géographiques soient protégés. Nous avons prévu de le faire dès la semaine prochaine lors d’une réunion sur les obstacles à l’accès aux marchés auxquels sont confrontées nos entreprises.
Dans un premier temps, nous allons parler. Si d’aventure c’était nécessaire, c’est-à-dire si aucune solution rapide n’émergeait et si cette loi s’avérait contraire aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), nous n’hésiterions pas à en tirer toutes les conséquences, donc à faire appel devant l’organe de règlement des différends de l’OMC pour faire valoir le respect de nos droits et de nos indications géographiques.
M. Bruno Sido. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour la réplique.
M. Antoine Lefèvre. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour cet engagement et pour cette réponse.
Le Gouvernement a récemment affirmé son engagement aux côtés des viticulteurs français, en deux occasions : lorsque l’administration Trump a brandi la menace d’une augmentation des taxes sur les vins français et au moment de la discorde entre Airbus et Boeing. Sachez maintenir ce soutien !
Il est primordial en effet que ce sujet ne soit pas considéré comme une tempête dans un verre d’eau, mais bien comme un ouragan dans une flûte de champagne ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDSE. – M. Franck Menonville applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Viviane Artigalas. Quatre millions de pièces justificatives en attente, des allocataires en difficulté et des agents excédés : vous n’êtes pas sans savoir, madame la ministre chargée du logement, que la mise en œuvre de la réforme des aides personnalisées au logement (APL) connaît de telles difficultés techniques que les personnels des caisses d’allocations familiales (CAF) ont fait grève le 29 juin dernier.
Nous avons tous été alertés par leurs syndicats concernant les nombreux dysfonctionnements techniques que subissent leurs logiciels de traitement, ceux-ci s’ajoutant à une situation déjà fortement dégradée en raison de l’obsolescence de leur système informatique.
Ces difficultés entraînent des retards de traitement et un allongement des délais de versement des prestations familiales, qui représentent souvent une part importante des revenus des allocataires. Elles sont particulièrement prégnantes dans le contexte de crise que nous connaissons ; surtout, elles confirment que la réforme des APL était dès son origine une mesure inadéquate et mal préparée, à défaut d’étude d’impact.
Prévue pour janvier 2020, cette réforme a déjà été reportée de six mois compte tenu de la difficulté de sa mise en œuvre par les CAF. La pandémie de covid-19 a finalement porté ce décalage à un an sans que les moyens qui auraient dû l’être soient pour autant déployés.
Madame la ministre, quand allez-vous accorder aux agents les moyens techniques et humains nécessaires à l’application de cette réforme ? Et quelle compensation prévoyez-vous pour les allocataires sortis trop vite du système ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Jacques Fernique applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du logement.
Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. Madame la sénatrice Viviane Artigalas, la réforme du calcul des APL en temps réel est une réforme indispensable de modernisation de notre système de protection sociale, qu’elle vise à rendre plus juste et plus réactif.
Elle a effectivement été reportée : elle a été mise en œuvre, opérationnellement parlant, au 1er janvier dernier. Le recalcul d’avril et celui de juillet ont pu avoir lieu dans des conditions globalement satisfaisantes pour les allocataires.
Tout d’abord, les déclarations sont désormais préremplies, ce qui veut dire que les allocataires n’ont plus besoin de transférer les données relatives aux ressources prises en compte depuis la base de l’administration fiscale vers celle des CAF ; ainsi lutte-t-on contre le non-recours en en faisant diminuer le taux.
Ensuite, je partage votre constat quant aux difficultés opérationnelles rencontrées : il y a eu des bugs. Mais ils ont finalement été peu préjudiciables aux allocataires, grâce à un investissement, à une mobilisation et à un engagement très forts des agents des CAF et de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), que je salue.
Nous accompagnons ces agents dans la modernisation des systèmes d’information et dans la montée des compétences. Un plan d’action est prévu, placé sous l’égide du directeur général de la CNAF.
Enfin, pour ce qui est du bilan général de la réforme, nous serons en mesure de publier des chiffres dans le courant du mois de juillet concernant à la fois l’évolution de la dépense que représentent les APL, qui est en phase avec nos prévisions initiales, et l’impact sur les allocataires. Nous avons fait très attention à préserver les étudiants et les alternants, jeunes en contrat d’apprentissage et personnes en contrat de professionnalisation. Les ressources des étudiants sont d’ailleurs neutralisées par la réforme, ce qui améliore la situation des étudiants qui travaillent.
Croyez bien que nous suivons attentivement, avec la CNAF, le pilotage au quotidien de cette réforme sur le plan opérationnel. Cette réforme permet d’ajuster au plus près la protection sociale à la situation des assurés. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI et UC.)
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour la réplique.
Mme Viviane Artigalas. Madame la ministre, comme d’habitude, tout va bien !
Mais si les moyens étaient à la hauteur des enjeux, il n’y aurait pas autant d’alertes à ce sujet. Les CAF doivent bénéficier des moyens adéquats à l’exercice de leurs missions auprès des usagers. C’est la question de l’accès aux droits des allocataires que nous soulevons ici.
Il n’est pas normal que certains passent d’un seul coup de 192 euros à 14 euros mensuels, puis plus rien, du jour au lendemain, sans compensation – c’est arrivé ! Il n’est pas normal que les retards soient si nombreux alors que la réforme était censée permettre un traitement des dossiers en temps réel !
Il devient usant de constater que ce gouvernement ne reconnaît jamais ses erreurs et que ce sont toujours nos concitoyens les plus précaires qui en paient les conséquences ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Éliane Assassi applaudit également.)
conditions d’accès au master à l’université
M. le président. La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Sandy, une licence de droit, quatre stages, deux contrats de travail, deux mandats associatifs, vingt candidatures en master… zéro admission !
Laurent, quarante-neuf demandes en master et, à ce jour,… zéro admission, c’est-à-dire zéro chance de réussir à concrétiser ses ambitions.
Ce n’est là, madame la ministre, qu’un aperçu de la détresse dont nous sommes témoins depuis des années, et en particulier ces jours-ci : après les cours à distance et la détresse psychologique, l’échec incompris !
Combien d’étudiants tiraillés entre l’angoisse de ne pouvoir construire un avenir et la colère – la frustration, aussi – de voir que leurs efforts étaient vains ? Beaucoup trop, et toujours plus !
Cela, vous le saviez déjà : en 2017, vous aviez même promis de répondre aux conséquences du baby-boom de 2000 en assurant que « tout le monde trouverait sa place ». Eh bien non, « tout le monde » n’a pas trouvé sa place !
Si le processus de sélection ne fait pas débat, la République ne peut tolérer un système nébuleux qui explique à cette jeunesse qu’elle n’est pas à la hauteur !
Vous n’avez su ni anticiper ni gérer, pour ce qui est du nombre de places en particulier – il est insuffisant.
En droit, à Nice, on compte 15 000 candidatures pour… 1 200 places ! Vous annoncez la création de 34 000 places supplémentaires ; c’est bien. Aucune ne concerne la quatrième année.
Que direz-vous à ces étudiants pleins d’espoir lorsqu’ils se retrouveront face aux portes fermées du master ? Cessons cette hypocrisie ! C’est un gâchis monumental que de stopper net l’élan d’étudiants qui ne demandent qu’à poursuivre leurs études.
Le droit au master ne s’envisage plus sans le dépôt d’un recours – le nombre de saisines a crû de 129 % en un an. Dans le meilleur des cas, les étudiants sont obligés d’accepter l’unique « chance » offerte ; ainsi de Patrick, étudiant en psychologie à Nice, contraint d’accepter un master en audiovisuel à Angers !
Soyez la ministre qu’ils attendent : agissez ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – MM. Daniel Chasseing et Franck Menonville applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Monsieur le président, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord, au nom de l’ensemble du Gouvernement et en mon nom propre, de m’associer à l’hommage que vous avez rendu au sénateur Laffitte. Vous le savez, je suis particulièrement attachée à la technopole de Sophia Antipolis qu’en véritable visionnaire il avait imaginée.
Vous m’interrogez, madame la sénatrice, sur les conditions d’accès au master. Vous le savez, en 2016, la sélection à l’entrée du master a été consacrée ; le Sénat avait d’ailleurs évidemment voté pour cette proposition. Dans le même temps a été créé, initiative intéressante, un droit à l’accompagnement à la poursuite d’études en master. Autrement dit, la loi prévoit une sélection à l’entrée du master, mais dispose que les étudiants qui le souhaitent doivent être accompagnés afin que leur accès au master soit facilité.
C’est exactement ce que nous faisons, madame la sénatrice. Et, contrairement à ce que vous venez de dire, plus de 4 000 places seront créées en master. Il est très important de rappeler, une fois de plus, que c’est une prise en charge humaine qui prévaudra : ce sont les recteurs qui, en lien avec les établissements et en tenant compte des résultats des étudiants – c’est bien normal, madame la sénatrice –, examinent ce qui peut être proposé. Comme le Gouvernement s’y était engagé, des places seront créées dans les masters les plus sélectifs.
Vous évoquez les masters de droit ; vous n’ignorez sans doute pas que les formations de droit, malgré la réforme du master de 2016, continuaient à accueillir des étudiants en master 1 sans aucune sélection. La sélection n’intervenait qu’entre le M1 et le M2, laissant ainsi les étudiants en plein milieu d’un cursus, d’un cycle. À cette situation aussi c’est ce gouvernement qui aura mis fin ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp, pour la réplique.
Mme Alexandra Borchio Fontimp. J’avais pensé, naïvement, qu’en vous donnant à l’avance le sujet de ma question j’obtiendrais des réponses claires susceptibles de rassurer nos étudiants… (Mme Laurence Rossignol applaudit.)
Une seule réponse s’impose : créons des places en master !
J’ai bien écouté vos annonces et resterai bien sûr attentive à leur concrétisation. Vous avez dit que les recteurs étudiaient « ce qui peut être proposé » aux étudiants. Espérons que cette possibilité devienne pour eux quelque chose de vraiment concret : ils sont représentés en tribune aujourd’hui et ont besoin de votre soutien plein et entier. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)
impact de la taxe carbone européenne sur la filière aluminium
M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Dominique Vérien. J’associe à ma question mes collègues Stéphane Demilly et Valérie Létard.
La filière aluminium, en France, est en plein développement. Ce matériau est un produit vertueux, car il se recycle à l’infini. Mais 50 % seulement de l’aluminium primaire est produit en France. Or l’Union européenne entend créer un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières qu’elle devrait présenter dans les prochains jours.
Cette nouvelle taxe devrait permettre d’aider nos filières de l’acier et du ciment, dont la matière première est produite en France, mais elle viendrait sérieusement peser sur la compétitivité de notre filière aluminium, qui, comme je l’ai dit, importe 50 % de sa matière première.
Très concrètement, cette taxe entraînerait l’augmentation du coût des produits fabriqués en France. Comme elle ne s’appliquerait pas sur les produits transformés, il deviendrait plus économique d’importer le produit fini directement depuis la Chine.
Madame la ministre, c’est donc bien toute la filière de l’aluminium français qui risque d’être sacrifiée au nom d’une taxe qui n’aurait même pas les effets désirés sur le climat, puisque la production serait tout simplement délocalisée en dehors de l’Union européenne, à l’abri de nos règles environnementales !
Que comptez-vous faire pour sauvegarder cette filière d’avenir et protéger la souveraineté industrielle française ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’industrie.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Madame la sénatrice Vérien, vous le savez, le Président de la République défend des positions ambitieuses en matière industrielle devant la Commission européenne et le Conseil européen.
Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières compte parmi ces positions ambitieuses ; il doit permettre aux États membres de protéger leurs industries, qui, produisant en Europe, respectent des contraintes environnementales fortes, contre la concurrence déloyale de pays massivement exportateurs en Europe de produits à fort contenu carbone. C’est particulièrement le cas de l’aluminium, de l’acier et du ciment – vous l’avez dit. Des entreprises comme Aluminium Dunkerque, par exemple, bénéficieraient très fortement de ce mécanisme.
Vous avez raison : l’enjeu est de mettre au point un mécanisme qui permette, à l’intérieur de l’Union européenne, de faire payer leur impact sur l’environnement aux producteurs de marchandises dont la fabrication a causé des émissions carbone qui n’ont été payées par personne. Il faut être attentif, ce faisant, à ce que nos produits réalisés à l’aide de ces matériaux de base – acier, aluminium, ciment – puissent rester compétitifs à l’export.
C’est tout le travail que nous sommes en train de mener avec la Commission européenne : nous portons au niveau européen cette volonté de rompre avec le cercle vicieux qui nous a conduits à augmenter notre empreinte carbone du fait d’importations massives tout en réduisant, en France, notre industrie. C’est bien contre ce cercle vicieux que nous luttons.
Nous serons évidemment attentifs à la situation de l’aluminium ; nous sommes d’ailleurs en discussion avec la filière afin qu’elle puisse bénéficier de ce mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. Je rappelle que ce mécanisme crée des recettes pour l’Union européenne et que celles-ci peuvent être utilement employées, par exemple, pour accompagner les filières exportatrices – c’est un des sujets sur lesquels nous travaillons.