M. Alain Richard. Il est ici question de la sécurité qu’il convient de réinstaurer dans les centres de rétention administrative (CRA), à savoir les lieux où sont retenus pendant quelques jours ou semaines les personnes qui sont en voie de reconduite à la frontière – nous parlons de reconduite forcée. Ces personnes ont d’ailleurs démontré par leur comportement antérieur qu’elles souhaitaient échapper à la reconduite prononcée à leur encontre.

Ces centres sont des lieux de tension et de danger. Les incidents y sont relativement fréquents : on y relève des tentatives de suicide, des automutilations ou encore des agressions entre personnes détenues ou contre les agents de surveillance et de sécurité.

De fait, les services chargés de ces centres se sont efforcés d’instaurer des systèmes de vidéosurveillance visant à prévenir de tels incidents ou situations d’agression. Aujourd’hui, ces installations ne répondent à aucune norme légale ; il me semble qu’il est temps, comme cela a été fait en milieu pénitentiaire dans les cas où cela était justifié, de prévoir un système de vidéosurveillance inscrit dans le cadre légal, avec l’ensemble des garanties que cela implique.

Les garanties prévues dans cet amendement sont multiples : la durée de conservation des images est limitée à un mois ; le procureur est avisé, dès que la surveillance est déclenchée ; des dispositifs de floutage permettent la protection de l’intimité de la personne ; enfin, ces images ne pourront être utilisées que dans le cadre d’une enquête. Les modalités d’application de ce dispositif devraient évidemment être fixées par un décret en Conseil d’État, pris après avis de la CNIL.

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 359.

M. Gérald Darmanin, ministre. M. Richard a très bien défendu l’esprit de ces amendements qui sont identiques.

M. le président. Le sous-amendement n° 370, présenté par MM. L. Hervé et Daubresse, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Amendement 359

1° Alinéa 8

a) Après le mot :

informé

insérer les mots :

sans délai

b) Après le mot :

mesure

insérer les mots :

ainsi que de son renouvellement

2° Alinéa 12

Supprimer cet alinéa.

3° Alinéa 13

Après le mot :

biométrique

insérer les mots :

ou de captation du son

4° Alinéa 14

Rédiger ainsi cet alinéa :

Hors le cas où ils sont utilisés dans le cadre d’une procédure judiciaire, administrative ou disciplinaire, les enregistrements comportant des données à caractère personnel sont effacés au bout de trente jours.

5° Alinéa 15, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

pour les seules finalités mentionnées au I et s’il existe des raisons sérieuses de penser que la personne détenue présente des risques de passage à l’acte suicidaire ou d’évasion

6° Alinéa 16

Supprimer cet alinéa.

7° Après l’alinéa 16

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

L’autorité responsable tient un registre des traitements mis en œuvre précisant la durée des enregistrements réalisés ainsi que les personnes ayant accès aux images.

8° Compléter cet amendement par un alinéa ainsi rédigé :

Ce décret précise les dispositifs permettant de préserver l’intimité des personnes retenues ou gardées à vue ainsi que les mesures techniques mises en œuvre pour garantir la sécurité des enregistrements et assurer la traçabilité des accès aux images.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Loïc Hervé, rapporteur. Il s’agit d’un sous-amendement de précision qui vise à renforcer plusieurs garanties prévues par le nouveau régime de vidéosurveillance des personnes retenues ou gardées à vue proposé dans ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 330 rectifié bis et 359 ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Favorable, sous réserve de l’adoption du sous-amendement de la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 370 ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Favorable.

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.

Mme Esther Benbassa. Avant d’envisager d’installer la vidéosurveillance dans les CRA, j’aimerais bien que l’on y change les conditions de rétention ! Les membres de mon groupe et moi-même nous y rendons régulièrement, partout dans le pays : nous connaissons les traitements qu’y subissent les personnes retenues et leurs conditions de vie.

Peut-être faudrait-il d’abord se demander pourquoi ces personnes tentent de se suicider, pourquoi elles se révoltent, pourquoi, chaque fois que nous visitons un CRA, elles nous parlent des mauvaises conditions médicales et des traitements cruels qu’elles subissent parfois. Elles vivent dans des cellules couvertes de graffiti, où les toilettes ne fonctionnent pas : posons-nous d’abord ces questions !

La vidéosurveillance ne changera absolument rien à la situation dans les CRA ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Il faudrait que vous alliez en visiter, mes chers collègues : on y apprend beaucoup !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Je peux partager avec Mme Benbassa l’idée que les conditions peuvent être largement améliorées dans les centres de rétention administrative, comme dans les prisons françaises, voire dans les locaux de garde à vue ou de dégrisement – chacun le sait. Néanmoins, beaucoup de travail est fourni pour améliorer la situation dans ces locaux.

En ce qui concerne les CRA ou les maisons d’arrêt, tout le monde souhaite évidemment améliorer l’accueil des personnes retenues ou détenues – vous avez raison, madame la sénatrice, c’est notre devoir –, mais encore faut-il que les élus acceptent l’installation de tels établissements sur leur territoire ! Lorsqu’on annonce la création de nouveaux CRA ou de nouvelles maisons d’arrêt, peu de personnes lèvent la main pour que l’installation se fasse sur leur territoire – je vois que même M. Retailleau ne lève pas la main. (Sourires.)

N’hésitez pas, mesdames, messieurs les sénateurs ! Je suis tout à fait d’accord pour débloquer des crédits – nous avons d’ailleurs de l’argent pour construire des CRA. (Plusieurs sénateurs du groupe GEST se manifestent.) Je prendrai les coordonnées des volontaires avec grand plaisir ! Encore faut-il que les élus accompagnent le mouvement. Même si je l’ai fait sous forme de boutade, les difficultés de construction sont réelles.

Cela dit, madame Benbassa, vous avez raison : nous devons un traitement digne à tous les êtres humains, y compris lorsque nous les reconduisons à la frontière – c’est bien naturel. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai souhaité, dans le cadre de l’épidémie de covid-19, qu’il n’y ait pas de surpopulation dans les centres de rétention administrative et qu’on y applique correctement les règles de distanciation sociale.

Pour autant, madame Benbassa, je ne peux pas vous laisser dire qu’il y a des traitements cruels dans les CRA.

Mme Esther Benbassa. Dans certains, si !

M. Gérald Darmanin, ministre. De tels traitements constitueraient des actes de torture ou de barbarie : cela voudrait dire que des agents de la police aux frontières, notamment, pourraient avoir des comportements contraires à la dignité de la personne humaine.

Mme Esther Benbassa. Tout à fait !

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est une accusation extrêmement grave. Dans ce cas, madame la sénatrice, n’hésitez pas à me communiquer où, selon vous, de tels traitements ont lieu !

Lorsqu’il s’avère que des personnes ont commis des dérives, elles sont poursuivies et condamnées par la justice de notre pays. Pour autant, les signalements sont extrêmement peu nombreux.

À cet égard, la présence de caméras nous aidera, à l’instar de ce qui s’est passé pour les locaux de garde à vue : tous ces locaux font maintenant l’objet d’une telle surveillance, comme l’avait demandé Mme Adeline Hazan, alors Contrôleure générale des lieux de privation de liberté. Les installer dans les CRA sera de ce point de vue une avancée.

En tout cas, ne laissons pas dire que la police se livre à des traitements cruels sur les étrangers dans les centres de rétention administrative : c’est à tout le moins un procès scandaleux ! (Protestations sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.

Mme Sophie Taillé-Polian. Monsieur le ministre, je ne crois pas que quiconque ici ait affirmé que le problème des CRA était qu’il n’y en avait pas assez ! Vous demandez qui est candidat pour accueillir un CRA, mais ce n’est pas le sujet !

Le sujet, ce sont les conditions dans lesquelles les personnes sont aujourd’hui retenues, alors qu’elles restent, parfois jusqu’à quatre-vingt-dix jours, dans des cellules où il n’y a rien à faire, dans un état de désœuvrement total et de dénuement. Ces conditions de vie sont extrêmement dures ; je dirai même qu’il y a dans ces lieux, de manière globale, une forme de cruauté institutionnelle. C’est très clair, cela se voit quand on les visite et vous le savez très bien !

Par conséquent, améliorer les conditions de vie dans ces lieux est absolument indispensable, d’autant que, comme nous le disons tous, ces personnes ne sont pas détenues, mais retenues.

Mme Valérie Boyer. Ce sont surtout des obligations de quitter le territoire non exécutées !

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. Si je peux me permettre, mes chers collègues, ne nous trompons pas, à nouveau, de sujet ! Les amendements dont nous débattons ne nous invitent pas à nous prononcer pour ou contre les centres de rétention administrative.

Personnellement, je suis pour la disparition totale de ces centres. Je l’ai même écrit dans un rapport que j’ai commis avec François-Noël Buffet qui n’était pas alors président de la commission des lois. J’y ai émis un avis personnel : je suis défavorable aux centres de rétention. Que cela vous plaise ou non, monsieur le ministre, il y a des gens qui s’opposent à l’existence de certaines structures synonymes d’enfermement, d’autant que les conditions de cet enfermement n’y sont pas toujours complètement… acceptables, pour le dire gentiment.

Encore une fois, être pour ou contre les centres de rétention, ce n’est pas le sujet ce soir. Ce qui nous est proposé par ces amendements, c’est de créer les conditions d’une captation d’images dans ces lieux. Pourquoi pas ? Cela peut avoir un avantage en termes de prévention.

En revanche, ce que je reproche aux auteurs de ces amendements, c’est qu’ils ne vont pas au bout de ce qu’ils pensent vraiment. On nous dit que cela permettrait de diminuer, notamment, les risques de suicide, d’automutilation, d’agression ou d’évasion. Mais il n’y a pas que cela : les gens qui sont retenus dans les CRA n’ont pas tous envie de se mutiler, de se suicider, d’agresser les autres ou de s’évader. Il faut aussi poser la question des conditions de rétention.

Si des caméras peuvent permettre de révéler à la France tout entière les conditions de rétention dans ces centres – je ne les qualifierai pas ici ce soir, pour éviter que tout le monde se lève en poussant des cris d’orfraie, je dirai simplement qu’elles peuvent s’avérer indignes –, pourquoi pas ? Mais il serait bon d’aller au bout de la logique, sans en rester à la seule motivation de protéger des personnes retenues contre le risque de suicide.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 370.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 330 rectifié bis et 359, modifiés.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 20.

Articles additionnels après l'article 20 - Amendements n° 330 rectifié bis et n° 359
Dossier législatif : proposition de loi pour une sécurité globale préservant les libertés
Article additionnel après l'article 20 bis A - Amendement n° 5 rectifié

Article 20 bis A

Le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° A (nouveau) À l’intitulé de la section 4 du chapitre II du titre III du livre Ier, après le mot : « intercommunale », sont insérés les mots : « et des syndicats mixtes » ;

1° L’article L. 132-14 est ainsi rédigé :

« Art. L. 132-14. – I. – Lorsqu’un établissement public de coopération intercommunale exerce la compétence relative aux dispositifs locaux de prévention de la délinquance, il peut décider, sous réserve de l’accord de la commune d’implantation, autorité publique compétente au sens de l’article L. 251-2, d’acquérir, d’installer et d’entretenir des dispositifs de vidéoprotection.

« Il peut mettre à disposition des communes concernées du personnel pour visionner les images.

« II. – Un syndicat mixte défini à l’article L. 5711-1 du code général des collectivités territoriales composé exclusivement de communes et d’établissements publics de coopération intercommunale qui exercent la compétence relative aux dispositifs locaux de prévention de la délinquance, lorsqu’il y est expressément autorisé par ses statuts, peut décider, sous réserve de l’accord de la commune d’implantation, autorité publique compétente au sens de l’article L. 251-2 du présent code, d’acquérir, d’installer et d’entretenir des dispositifs de vidéoprotection.

« Il peut mettre à disposition des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre concernés du personnel pour visionner les images.

« III. – Un syndicat mixte défini à l’article L. 5721-8 du code général des collectivités territoriales composé exclusivement de communes et d’établissements publics de coopération intercommunale qui exercent la compétence relative aux dispositifs locaux de prévention de la délinquance et d’un ou deux départements, lorsqu’il y est expressément autorisé par ses statuts, peut décider, sous réserve de l’accord de la commune d’implantation, autorité publique compétente au sens de l’article L. 251-2 du présent code, d’acquérir, d’installer et d’entretenir des dispositifs de vidéoprotection.

« Il peut mettre à disposition des communes, des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ou du ou des départements concernés du personnel pour visionner les images.

« IV. – Dans les cas prévus aux I à III du présent article, une convention conclue entre l’établissement public de coopération intercommunale ou le syndicat mixte et chacun de ses membres concernés fixe les modalités d’acquisition, d’installation, d’entretien et de mise à disposition des dispositifs de vidéoprotection et les modalités de mise à disposition du personnel chargé du visionnage. » ;

2° Il est ajouté un article L. 132-14-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 132-14-1. – Les agents des établissements publics de coopération intercommunale et des syndicats mixtes mentionnés respectivement aux I, II et III de l’article L. 132-14 peuvent être chargés du visionnage des images dans les conditions prévues à l’article L. 251-5, dès lors que ce visionnage ne nécessite pas de leur part d’actes de police judiciaire.

« Pendant le visionnage des images prises sur le territoire d’une commune, ces agents sont placés sous l’autorité exclusive du maire de cette commune. Pendant le visionnage des images prises sur le domaine public départemental, les agents des syndicats mixtes mentionnés au III de l’article L. 132-14 sont placés sous l’autorité exclusive du président du conseil départemental. » ;

3° (nouveau) Après le premier alinéa de l’article L. 252-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sans préjudice de la compétence des agents mentionnés à la première phrase de l’article L. 252-3, les agents des autorités publiques compétentes chargés du visionnage des images prises sur la voie publique au moyen d’un dispositif de vidéoprotection dont la mise en œuvre est prévue à l’article L. 251-2 sont agréés par le représentant de l’État dans le département. L’agrément peut être retiré ou suspendu par le représentant de l’État après consultation de l’autorité publique compétente ainsi que, le cas échéant, de l’autorité d’emploi. Toutefois, en cas d’urgence, l’agrément peut être suspendu sans qu’il soit procédé à cette consultation. »

M. le président. L’amendement n° 338, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

La section 4 du chapitre II du titre III du livre Ier du code de la sécurité intérieure est ainsi modifiée :

1° L’article L. 132-14 est ainsi rédigé :

« Art. L. 132-14. – I. – Lorsqu’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre exerce la compétence relative aux dispositifs locaux de prévention de la délinquance, il peut décider, sous réserve de l’accord de la commune d’implantation, autorité publique compétente au sens de l’article L. 251-2, d’acquérir, d’installer et d’entretenir des dispositifs de vidéoprotection.

« Il peut mettre à disposition des communes concernées du personnel pour visionner les images, dans les conditions prévues à l’article L. 512-2 s’agissant des agents de police municipale, et dans les conditions prévues à l’article L. 132-14-1 s’agissant des autres agents.

« II. – Lorsqu’un syndicat mixte défini à l’article L. 5711-1 du code général des collectivités territoriales est composé exclusivement de communes et d’établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui exercent la compétence relative aux dispositifs locaux de prévention de la délinquance, il peut décider, sous réserve de leur accord, d’acquérir, d’installer et d’entretenir des dispositifs de vidéoprotection.

« Il peut mettre à disposition des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre concernés du personnel pour visionner les images, dans les conditions prévues à l’article L. 132-14-1 du présent code.

« III. – Lorsqu’un syndicat mixte défini à l’article L. 5721-8 du code général des collectivités territoriales est composé exclusivement de communes et d’établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui exercent la compétence relative aux dispositifs locaux de prévention de la délinquance et d’un ou deux départements limitrophes, il peut décider, sous réserve de leur accord, d’acquérir, d’installer et d’entretenir des dispositifs de vidéoprotection.

« Il peut mettre à disposition des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre concernés du personnel pour visionner les images, dans les conditions prévues à l’article L. 132-14-1 du présent code.

« Dans ce cas, par dérogation aux dispositions de l’article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales, il est présidé par le maire d’une des communes ou par le président d’un des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre membres.

« IV. – Dans les cas prévus aux I à III du présent article, une convention conclue entre l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou le syndicat mixte et chacun de ses membres concernés fixe les modalités d’acquisition, d’installation, d’entretien et de mise à disposition des dispositifs de vidéoprotection et les modalités de mise à disposition du personnel chargé du visionnage.

« Dans le cas prévu au III, une convention conclue entre le syndicat mixte et chacun de ses membres concernés fixe les modalités d’acquisition, d’installation, d’entretien et de mise à disposition des dispositifs de vidéoprotection. » ;

2° Il est ajouté un article L. 132-14-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 132-14-1. – Sans préjudice de la compétence des agents de police municipale, les agents des communes et les agents des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et des syndicats mixtes mentionnés respectivement aux I, II et III de l’article L. 132-14 peuvent être chargés du visionnage des images prises sur la voie publique au moyen d’un dispositif de vidéoprotection dont la mise en œuvre est prévue par l’article L. 251-2, dès lors que ce visionnage ne nécessite pas de leur part d’actes de police judiciaire.

« Ils sont agréés par le ou les représentants de l’État dans le ou les départements concernés. L’agrément peut être retiré ou suspendu par le ou les représentants de l’État après consultation du maire, du président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou du président du syndicat mixte. Toutefois, en cas d’urgence, l’agrément peut être suspendu sans qu’il soit procédé à cette consultation.

« Pendant le visionnage des images prises sur le territoire d’une commune, ces agents sont placés sous l’autorité exclusive du maire de cette commune. »

La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Nous sommes défavorables à cet amendement. Le Gouvernement propose de rétablir l’article 20 bis A dans la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale, en y intégrant la possibilité de mutualisation au niveau d’un syndicat mixte dont le territoire s’étendrait sur deux départements limitrophes.

Cela supprimerait toutefois les possibilités existantes de mutualisation des dispositifs de vidéoprotection au niveau des syndicats de communes, ainsi que la nécessité d’un accord de la commune d’implantation. Le syndicat mixte concerné ne pourrait pas non plus mettre du personnel à la disposition du président du département afin de surveiller le domaine public départemental. Enfin, cela rétablirait l’obligation pour un syndicat mixte ouvert restreint qui mettrait en œuvre ce dispositif de mutualisation d’être présidé par un maire ou un président d’EPCI, ce qui serait en opposition, de notre point de vue, avec le principe de libre administration des collectivités territoriales.

Pour l’ensemble de ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Le principe de libre administration des collectivités territoriales n’est pas extensible à l’infini ! Il est d’ailleurs précisé à l’article 72 de la Constitution qu’il s’exerce « dans les conditions prévues par la loi ». Je veux le dire à l’assemblée qui représente les collectivités territoriales et, singulièrement, les maires de France : le pouvoir de police appartient au maire ; les présidents de département et de région n’ont pas de pouvoir de police.

Je le dis avec la simplicité de celui qui, comme vous l’aurez compris, monsieur le rapporteur, essaie de trouver les meilleures mutualisations possible ; il n’y a pas là de position doctrinale du ministère de l’intérieur. J’essaie de vous le dire en tant qu’élu : je crois que ce serait un grand danger, si le Parlement ouvrait la voie à ce que d’autres personnes que le maire exercent le pouvoir de police.

L’amendement du Gouvernement vise à redonner au maire son pouvoir de police, qu’il peut éventuellement déléguer ensuite, bien évidemment.

M. Loïc Hervé, rapporteur. Mais non !

M. Gérald Darmanin, ministre. Si ! Nous entendons remettre dans le texte cette précision : le maire et le préfet disposent d’un pouvoir de police administrative générale, leur permettant d’assurer la surveillance générale de la voie publique, mais il ne peut pas y avoir d’autre élu que le maire qui dispose de ce pouvoir de police.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

M. Jérôme Bascher. Une fois n’est pas coutume, je vais être d’accord avec le Gouvernement ! M. le ministre le sait bien, parce que l’idée qui est à l’origine de cet amendement vient assez largement du département de l’Oise.

Nous avons besoin de pouvoir transférer aux syndicats mixtes un certain pouvoir, mais il est vrai que le pouvoir d’officier de police judiciaire, dont nous avons beaucoup parlé, relève du maire.

Je le dis très simplement, cela ne m’arrange pas ; cela n’arrange pas non plus le département de l’Oise qui est à l’origine de cet amendement gouvernemental. En effet, le président actuel du syndicat mixte n’est pas maire et je ne l’étais pas, lorsque j’occupais cette fonction.

Il me semble vraiment logique et nullement problématique – je suis obligé de le dire et de le défendre devant vous – que de réserver ce pouvoir aux maires : il s’en trouve assez dans les instances des conseils généraux et régionaux pour qu’on puisse trouver une solution.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 338.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 20 bis A est ainsi rédigé, et les amendements nos 371, 173 rectifié et 345 n’ont plus d’objet.

Article 20 bis A
Dossier législatif : proposition de loi pour une sécurité globale préservant les libertés
Article additionnel après l'article 20 bis A - Amendement n° 21 rectifié octies

Articles additionnels après l’article 20 bis A

M. le président. L’amendement n° 5 rectifié, présenté par MM. Folliot, Bonnecarrère, Maurey, Canevet, Laugier, Kern et Levi, Mme Dindar, M. Delahaye, Mme Billon, M. Détraigne, Mme Doineau, MM. Le Nay, Henno et Longeot, Mmes Herzog et Jacquemet, MM. Lafon, Chauvet, J.M. Arnaud et Duffourg et Mme Morin-Desailly, est ainsi libellé :

Après l’article 20 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 253-2 du code de la sécurité intérieure, il est inséré un article L. 253-… ainsi rédigé :

« Art. L. 253-. – Les députés et les sénateurs ainsi que les représentants au Parlement européen élus en France sont autorisés à visiter à tout moment, sur présentation de leur carte d’identité professionnelle, les locaux dédiés au visionnage des images provenant de la vidéoprotection. »

La parole est à M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Les débats que nous avons eus ont montré que la vidéoprotection suscite un certain nombre de réserves et même, parfois, de fantasmes.

À cet égard, il me paraît important de se projeter dans l’avenir. Aujourd’hui, la vidéoprotection est ce qu’elle est ; demain, elle sera certainement différente, ne serait-ce que du fait des outils modernes qui sont déjà utilisés dans certains pays – je pense notamment à la reconnaissance faciale.

Dès lors, mettre en place des garde-fous ou des éléments de contrôle démocratique constitue une avancée éminemment positive.

Le dispositif de cet amendement se suffit à lui-même pour expliquer son objet : « Les députés et les sénateurs, ainsi que les représentants au Parlement européen élus en France sont autorisés à visiter à tout moment, sur présentation de leur carte d’identité professionnelle, les locaux dédiés au visionnage des images provenant de la vidéoprotection. »

En fait, il s’agit de donner un nouveau droit aux parlementaires, à l’instar de ce qui a été fait par la loi du 15 juin 2000 qui nous donne, en tant que parlementaires, le droit de visiter les centres de rétention administrative et les lieux de détention.

L’extension de cette possibilité, comme je le propose, peut constituer un élément important pour l’avenir. Certes, nous n’utilisons pas tous les jours ce droit de visiter les prisons et les centres de rétention administrative, mais le seul fait que les personnes qui gèrent ces établissements savent qu’à tout moment un parlementaire peut venir…