M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles. (Marques d’étonnement sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Madame la sénatrice, sans que j’aie moi non plus, vous vous en doutez, d’arrière-pensée politique, je veux dire quelque chose qui vous fera plaisir.
Les membres du Gouvernement sont convaincus que la campagne de vaccination se fera main dans la main avec les maires. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Depuis la fin du mois de décembre, par l’intermédiaire notamment des cellules départementales de vaccination, nous avons demandé à ces derniers de proposer des lieux adaptés à l’ouverture de centres vaccinaux et de prendre l’attache des personnes vulnérables concernées par la nouvelle étape de vaccination qui a débuté lundi, à savoir nos concitoyens de plus de 75 ans.
Je tiens ici à les remercier d’avoir contribué, par leur expertise, à la création et à l’ouverture de plus de 800 centres à ce jour. Nous savons pouvoir leur faire confiance. Comme vous l’avez rappelé, le rôle des maires sera central, notamment dans le transport des personnes vulnérables vers ces centres. Cela a été réaffirmé encore récemment par le ministre des solidarités et de la santé auprès du président de l’Association des maires de France.
Depuis le démarrage de la campagne, les maires, les préfets, les ARS connaissent précisément le nombre de doses disponibles. (Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.) Il leur appartient de ne pas ouvrir davantage de centres que ceux que nous leur avons demandé d’ouvrir. (Vives protestations sur les mêmes travées.) Il appartient aux autorités locales de ne pas ouvrir davantage de créneaux que de doses de vaccin disponibles.
Madame la sénatrice, quand j’entends la présidente de la région française dont dépend votre département se plaindre que les collectivités doivent prendre en charge les seringues et les aiguilles, je pense, pour filer la métaphore de mon collègue Gabriel Attal, que, si elle avait été chargée des stocks au moment du Débarquement (Mêmes mouvements.), les militaires auraient débarqué la fleur au fusil, mais sans munitions dans leur barillet ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour la réplique.
Mme Sophie Primas. Monsieur le secrétaire d’État, je suis outrée par vos propos : renvoyer la responsabilité aux maires, que nous représentons ici, n’est pas digne de cet hémicycle. Nous ne connaissons pas le nombre de doses de vaccins disponibles. Et vous aurez beau le répéter comme un mantra, cela reste un mensonge ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP, SER et CRCE.)
crise de la filière aéronautique
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Stéphane Demilly. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Les conséquences de la crise sanitaire sont dramatiques pour le monde économique, et spécifiquement pour l’industrie aéronautique.
La chute du trafic aérien, inédite depuis la Seconde Guerre mondiale, a mis en péril les compagnies aériennes et, par effet domino, toute la filière de construction d’avions. Boeing a annoncé 30 000 suppressions d’emplois et Airbus 15 000, dont 5 000 en France, pour faire face à la baisse de près de 40 % de ses commandes.
Traduction concrète : des bassins d’emploi spécialisés, comme le bassin historique d’Albert, dans la Somme, et ses 3 000 salariés, vivent un séisme économique, et donc social, d’une amplitude inimaginable.
Le plan de sauvegarde initié par votre gouvernement a permis de limiter ou de ralentir les effets de cette crise aussi violente qu’imprévisible. Mais nous sommes maintenant « entrés dans le dur » avec une adaptation des capacités industrielles à la réalité « cassée » du marché.
Nous ne pouvons pas, nous ne devons pas laisser ce bassin de vie s’effondrer, une histoire industrielle s’évaporer et un avenir nous échapper. Les élus, les chefs d’entreprise et les salariés souhaitent que cette force de compétences, structurée au fil de dizaines d’années, soit toujours opérationnelle quand la reprise, attendue en 2023, deviendra réalité et qu’elle devra se décliner industriellement.
Personne n’est responsable de la déflagration vécue et de la perte des 1 000 emplois dans ce bassin picard. Mais si nous ne maintenons pas en vie le tissu de la supply chain partout en France, le jour où le soleil brillera de nouveau sur l’aéronautique mondiale, cette sous-traitance se fera définitivement dans des pays low cost. Et là, en revanche, nous aurons notre part de responsabilité.
Il faut donc courber l’échine et attendre. Mais cette résilience et cette volonté de rebondir ne sont possibles, monsieur le ministre, qu’avec un concours puissant et sans faille de l’État. Ce brutal effondrement de notre excellence aéronautique doit être conjoncturel et non définitif. Les sous-traitants vous le demandent. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la relance. Monsieur le sénateur Demilly, je veux vous assurer que nous serons aux côtés du bassin picard, aux côtés du département de la Somme, aux côtés du bassin normand, aux côtés du bassin occitan, à Toulouse, où je me rendrai vendredi prochain, pour soutenir la filière aéronautique et les sous-traitants.
La crise touche de manière très inégalitaire les différents secteurs économiques français. Dans le fond, il y a deux économies aujourd’hui en France : une économie qui se porte bien, et c’est tant mieux – je pense notamment au bâtiment, aux travaux publics, à l’agroalimentaire – et des secteurs très durement touchés, plus qu’ils ne l’ont jamais été dans leur existence économique, comme la filière aéronautique.
Avec le Premier ministre, nous avons mis en place une stratégie globale qui vise à maintenir l’ensemble du secteur aéronautique, lequel représente près de 400 000 emplois dans notre pays et 58 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
Nous soutenons bien évidemment notre fleuron industriel, Airbus – c’est le sens de mon déplacement à Toulouse, vendredi prochain. Nous soutenons également l’ensemble des compagnies aériennes : non seulement notre compagnie nationale, mais également toutes les compagnies étrangères qui ont continué d’acheter des Airbus avec des garanties export. En 2020, nous aurons ainsi réussi à limiter la casse avec 566 ventes, grâce au soutien de l’État.
En ce qui concerne les sous-traitants, nous avons mis en place, à la demande du Président de la République, un fonds d’investissement pour permettre d’occuper les ingénieurs, de les faire travailler sur un certain nombre de projets, de développer les investissements dans l’innovation. Ce fonds de soutien est doté de 15 milliards d’euros. Le département de la Somme va pouvoir bénéficier d’un certain nombre de projets industriels intéressant la filière aéronautique.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur Demilly, le maintien de notre filière aéronautique parmi les plus performantes et les plus capables de réussir au XXIe siècle, avec le soutien de l’État, est une préoccupation absolument prioritaire du Gouvernement. Croyez-moi, nous y arriverons et nous aiderons la filière à passer ce moment particulièrement difficile. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour la réplique.
M. Stéphane Demilly. Monsieur le ministre, venez nous voir dans le bassin de la Somme pour en parler.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Pascal Savoldelli. Le laboratoire Sanofi a annoncé la suppression 1 000 emplois en France, dont 400 dans la recherche et développement. De 2008 à 2021, le nombre de sites de Sanofi est passé de onze à quatre. Avec ces dernières annonces, il descendra encore à trois.
En Val-de-Marne, madame la ministre de l’industrie, j’ai connu, sous votre gouvernement, la fermeture du site d’Alfortville, dédié à la sécurité du médicament, qui s’est traduite par la suppression de 300 emplois. Allez voir ces 300 femmes et hommes et dites-leur que la perte de leur emploi n’était pas contrainte ! Ces décisions du groupe Sanofi ont chaque fois écœuré les chercheurs.
Ma collègue Laurence Cohen vous avait interpellée la semaine dernière pour savoir quelles mesures ce gouvernement comptait prendre pour préserver l’emploi dans ce secteur, alors même que nous traversons une épidémie mondiale.
Vous nous dites que le vaccin est une prouesse technique – bien sûr que nous nous en réjouissons ! –, que la France produit trois des six vaccins validés à l’échelle européenne – très bien ! –, mais que faites-vous des centaines de suppressions d’emplois prévues par Sanofi, alors même que l’entreprise a touché près de 1 milliard d’aides publiques en dix ans et qu’elle a versé 4 milliards d’euros à ses actionnaires ?
Madame la ministre, pouvez-vous nous donner l’assurance que Sanofi va investir en France ou en Europe les 2 milliards que vous évoquiez voilà quelques instants ? Touchera-t-elle des aides publiques ? Qu’allez-vous faire face aux choix stratégiques de Sanofi, en train de rater un rendez-vous sanitaire, social et démocratique ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’industrie.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Monsieur le sénateur, je crois qu’il n’y a aucune ambiguïté sur le fait que la santé est un secteur prioritaire de notre politique économique et de notre politique industrielle.
Je veux redire ici que c’est ce gouvernement et ce Président de la République qui ont mis en place le Comité stratégique des industries de santé. Pendant des années, les industries pharmaceutiques n’ont pas été suffisamment soutenues en France. Les productions se sont déplacées dans d’autres pays, notamment en Allemagne.
Un chiffre est particulièrement frappant : notre production de produits pharmaceutiques en parts de marché mondial a été divisée par deux entre 2005 et 2015. C’est contre cela que nous sommes en train de lutter, monsieur Savoldelli, tant sur le plan de la recherche et du développement que sur le plan industriel.
Vous évoquez Sanofi. J’aurais aimé que vous citiez les projets de création d’emplois que cette entreprise a pour le vaccin. Le site de production de Marcy-l’Étoile a pu voir le jour grâce à l’action du Gouvernement, alors que ce projet était en compétition avec Singapour.
J’aurais aussi aimé que vous rappeliez qu’Olivier Véran et moi-même avons lancé en juin dernier un appel à projets pour accompagner le déploiement de nouvelles capacités de production. Aujourd’hui, si trois sites français fabriquent le vaccin avec Récipharm, Delpharm et Fareva, ce n’est pas par l’opération du Saint-Esprit, mais grâce à l’action déterminée du Gouvernement.
Dans le plan de relance que nous menons avec Bruno Le Maire, avec le Premier ministre et avec le Président de la République, 35 milliards d’euros sont consacrés à l’industrie, à l’innovation, à la reconquête industrielle.
Aujourd’hui, nous nous donnons les moyens d’avancer pour faire en sorte que cette crise ne soit pas une saignée industrielle, comme en 2008, et pouvoir rebondir le plus rapidement possible. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour la réplique.
M. Pascal Savoldelli. Madame la ministre, j’ai discuté avec des salariés, des chercheurs. Sanofi peut d’ores et déjà organiser la fabrication des vaccins en France. Demandez-lui de le faire !
Par ailleurs, il faut avoir une vision stratégique. Pourquoi l’État ne privilégie-t-il pas certaines actions à destination de Sanofi ? Pourquoi avoir refusé la création d’un pôle public du médicament ? Il faut une grande ambition pour la santé en France.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Pascal Savoldelli. On ne vous demande pas de faire appel au Saint-Esprit ; seulement d’avoir cette ambition pour la France et de surmonter cette crise sanitaire. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER et sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
charte pour l’islam de France
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Lundi, à l’Élysée, et sur l’initiative du Président de la République, ce qui peut déjà interroger, une partie des membres du Conseil français du culte musulman (CFCM) a signé la « charte des principes pour l’islam de France » qui semble satisfaire le Gouvernement, mais qui soulève de nombreuses interrogations.
Madame la ministre chargée de la citoyenneté, est-il normal que l’État s’invite dans l’organisation d’un culte en lui demandant par écrit de respecter des principes de la République qui s’imposent à tout citoyen comme l’égalité homme-femme, la laïcité, la liberté de renoncer à une religion sans être menacé, le respect des orientations sexuelles, « l’adhésion à la cohésion nationale » ?
Par ailleurs, madame la ministre, cette charte a été rédigée non pas par l’État, mais par le CFCM, ce qui en fait une sorte de règlement intérieur de cette organisation, affaiblissant ainsi totalement la démarche initiale dans laquelle l’État s’est immiscé.
Ce document n’a été signé que par cinq des neuf fédérations composant le CFCM. Cela pose une vraie question sur la légitimité de cet organisme qui accueille en son sein des organisations qui refusent de respecter les lois de la République. On peut d’ailleurs se demander comment la branche Musulmans de France, dont on connaît la proximité idéologique avec les Frères musulmans, a pu finalement accepter de signer ce texte.
Madame la ministre, comment va se comporter l’État face à ces fédérations qui, depuis des années, refusent ostensiblement d’obéir aux lois de la République et d’en respecter les valeurs ? Êtes-vous prête à dissoudre ces associations qui affichent aujourd’hui clairement leur opposition à nos principes républicains ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice, comme vous l’avez rappelé, la majorité des fédérations qui constituent le Conseil français du culte musulman a formellement approuvé, dimanche soir, cette charte des principes pour l’islam de France, qui a ensuite été signée à l’Élysée par cinq fédérations du CFCM. Il reste encore quelques jours à celles qui ne l’ont pas encore fait pour rejoindre cette démarche. (Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.)
La signature de cette charte montre une volonté forte de l’islam de France de se structurer autour et dans le respect des principes de la République. Tel est d’ailleurs l’objet du projet de loi étudié en ce moment même en commission spéciale, à l’Assemblée nationale.
Comme l’a souligné le Président de la République, c’est un engagement clair, net et précis envers la République, un acte fondateur pour l’islam de France. Ce texte engage non seulement les fédérations signataires, mais aussi leurs imams. Il prévoit expressément, à travers ses dix articles, que les convictions religieuses ne sauraient supplanter les principes qui fondent le droit et la Constitution de la République, que l’égalité femme-homme, le rejet de l’instrumentalisation de l’islam et d’autres principes que vous avez mentionnés, ainsi que le rejet de certaines pratiques coutumières, seront parmi les éléments centraux de la structuration de cet islam de France.
Le Président de la République et son ministre de l’intérieur ont par là même prouvé qu’ils avaient gagné le pari qu’ils avaient fait de constituer les premières bases d’un islam en France. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie rit.) Ils l’ont accompagné sans pour autant en organiser la structuration. C’est une ligne de crête, mais c’est aussi un premier pas vers l’islam des Lumières en France. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI – M. Jérôme Bascher s’exclame.)
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour la réplique.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Comme d’habitude, madame la ministre, vous ne répondez pas à la question précise qui vous est posée.
Aujourd’hui les choses sont claires : vous avez face à vous des organisations séparatistes. Êtes-vous prête à aller plus loin que la « com’ des tweets » ? Notre pays n’est pas un amalgame de communautés et nous serons toujours là pour vous rappeler que la France est une, indivisible et laïque – mots que vous semblez parfois oublier. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe RDPI.)
accompagnement du secteur viticole touché par les sanctions commerciales américaines (i)
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Franck Montaugé. Le conflit Airbus-Boeing continue de peser très lourdement sur les filières françaises des vins et spiritueux, qui en sont des victimes collatérales.
En octobre 2019, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) arbitrait une première fois ce contentieux en autorisant les USA à taxer les produits européens à hauteur de près de 7,5 milliards de dollars. Dans la foulée, le président Trump instaurait une taxe de 25 % visant notamment les vins tranquilles.
En octobre 2020, l’OMC autorisait à l’inverse l’Union européenne à sanctionner les USA pour 4 milliards. En représailles, fin 2020, M. Trump étendait cette taxe de 25 % à tous les vins et aux spiritueux. Elle est appliquée depuis le 12 janvier dernier.
Les USA représentent pour la France le premier marché des vins et spiritueux. Entre 2019 et octobre 2020, les importations américaines de vins français surtaxés ont été divisées par deux, soit une perte de 600 millions d’euros de chiffre d’affaires. Dans mon département du Gers, les vins de Plaimont, des côtes de Gascogne, les eaux de vie d’Armagnac sont très pénalisés.
Monsieur le ministre, au-delà du fonds de soutien renforcé que vous venez de proposer aux filières viticoles dans le cadre de la crise sanitaire, quels sont vos objectifs, votre stratégie et votre calendrier pour lever les sanctions douanières exorbitantes dont sont victimes les viticulteurs français ?
L’entrée en fonction aujourd’hui du président Biden ouvre une fenêtre de négociation qu’il ne faut pas rater. Les sanctions sur le vin, l’armagnac, le cognac doivent être à l’ordre du jour des premiers échanges entre le Président de la République et son homologue américain. Le seront-elles ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER – M. Henri Cabanel applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la relance. Monsieur Montaugé, je partage totalement votre appréciation : les viticulteurs français n’ont pas à être les victimes collatérales du conflit commercial entre Airbus et Boeing. Ils sont aujourd’hui pris en otage et doivent supporter des taxes de 25 %.
Comme vous l’avez souligné, le ministre de l’agriculture et moi-même avons pris, à la demande du Premier ministre, un certain nombre de mesures immédiates pour les soutenir financièrement : aide au stockage, aide à la distillation de crise, exonération de charges sociales et – dernière mesure en date – ouverture du fonds de solidarité à tous les viticulteurs dès lors qu’ils ont perdu 50 % de leur chiffre d’affaires à hauteur de 200 000 et non plus 10 000 euros par mois, comme dans le précédent dispositif. Ils seront également éligibles à la prise en charge des coûts fixes à hauteur de 3 millions d’euros.
Je pense que nous leur apportons aujourd’hui un dispositif de soutien franc et massif, immédiatement disponible.
Julien Denormandie et moi-même avons également entrepris des démarches auprès de la Commission européenne. Je me suis entretenu au téléphone hier avec la commissaire Margrethe Vestager pour lui rappeler que nous attendions de l’Union européenne la mise en place, dans les meilleurs délais, d’un fonds de compensation.
Quand les choses vont mal pour les agriculteurs français, pour les viticulteurs, pour les responsables de distillation dont vous avez parlé, il est légitime et nécessaire que la Commission européenne vienne à leur secours et mette en place, sans délai, ce fonds de compensation.
Mais la vraie solution, vous l’avez souligné, c’est d’aller le plus rapidement possible à Washington. Avec l’accord du Premier ministre et du Président de la République, je m’engage à me rendre, avec Franck Riester, aux États-Unis pour négocier avec les nouvelles autorités américaines la levée de ces sanctions sur les viticulteurs. Il faut que nous sortions de cette guerre commerciale entre les États-Unis et l’Europe qui ne fait qu’un seul vainqueur : la Chine. Nous sommes alliés, nous devons sortir de ces sanctions et retrouver la voie d’un commerce équitable entre nos deux continents. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. François Patriat. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour la réplique.
M. Franck Montaugé. L’enjeu fondamental, dans la durée, c’est de ne pas perdre définitivement les marchés et les clients qui avaient été conquis, séduits au fil des décennies, avec beaucoup de patience et de talent.
Il faut aller très vite si nous ne voulons pas que la France et le peuple des vignerons fassent définitivement les frais de ce conflit, alors qu’ils n’y sont rien. Le Président de la République doit normaliser très vite les relations commerciales entre la France et les États-Unis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
accords de pêche après le brexit
M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Rapin. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord adresser mes condoléances et celles de mon groupe aux familles des marins pêcheurs décédés en Manche voilà quelques jours. Je m’associe au deuil de la communauté maritime.
Madame la ministre, nous sommes le 20 janvier et nos pêcheurs en Manche se morfondent, car ils n’ont toujours pas de licence pour travailler dans la zone fatidique des 6-12 milles. La plupart des bateaux sont à quai et ceux qui sortent se partagent nos eaux dans lesquelles, selon leurs dires, on peut déjà craindre la surpêche.
Que se passe-t-il, alors que le Premier ministre avait promis aux marins pêcheurs de France et des Hauts-de-France, le 3 décembre dernier à Boulogne-sur-Mer, la garantie de la poursuite de leur activité dans les meilleures conditions possible après le Brexit ? Que se passe-t-il, alors que votre collègue Clément Beaune, ici présent, m’appelait dans la soirée du 24 décembre dernier pour me dire qu’un accord était trouvé et que l’accès aux eaux anglaises était préservé pour nos marins pêcheurs ? Que se passe-t-il, alors qu’Olivier Dussopt et Clément Beaune, en déplacement dans les Hauts-de-France maritimes le 1er janvier dernier, annonçaient l’arrivée imminente des licences – soit le 3 janvier – pour les navires habilités à pêcher dans cette zone essentielle ?
J’ai lu, madame la ministre, que vous ne souhaitiez pas que la pression monte. Mes derniers contacts très récents – encore ce matin – avec les représentants des marins pêcheurs me font penser qu’il faut la faire redescendre. Éclairez-nous, madame la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la mer.
Mme Annick Girardin, ministre de la mer. Monsieur Rapin, l’accord sur la pêche est un compromis raisonnable. C’est ainsi qu’il faut le définir.
Sa mise en œuvre peut certes poser quelques problèmes, comme vous l’avez souligné, mais souvenons-nous d’où nous nous sommes partis : le Royaume-Uni voulait récupérer 100 % des quotas que nous pêchions dans leurs eaux, alors que nous n’en avons rendu que 25 % ; le Royaume-Uni voulait nous exclure de l’ensemble de ses zones et accès, alors que nous avons préservé l’ensemble de ces accès aux trois zones – zone économique exclusive (ZEE), zone des 6-12 milles et zone de Jersey et Guernesey, laquelle concerne moins les Hauts-de-France.
En ce qui concerne la ZEE, les autorisations de pêche ont été données à tous les pêcheurs – les 1 400 navires européens et les 1 100 navires britanniques. Je viens d’apprendre ce matin du commissaire européen que les licences provisoires seront prolongées de trois semaines.
En ce qui concerne les 6-12 milles, nous avons communiqué à la Commission une liste de navires pouvant démontrer leur antériorité : 172 ont été validés ; il reste encore 23 navires de remplacement direct – c’est-à-dire des bateaux ayant pêché à la place de ceux ayant une antériorité – à valider.
Oui, des difficultés subsistent. Ce matin, avec le commissaire, avec Michel Barnier et avec l’ensemble des pêcheurs européens nous avons fait un point. Les choses avancent insuffisamment vite. Pour lutter contre la rumeur des quais, il faut être transparent et rencontrer régulièrement les professionnels. Je les verrai demain matin lors du Comité national des pêches pour leur donner les mêmes informations et j’assisterai lundi prochain au Conseil de l’agriculture et de la pêche lors duquel nous évoquerons les quotas – question tout aussi importante pour nos marins pêcheurs.
M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre.
Mme Annick Girardin, ministre. Soyez assurés que nous sommes sur les quais aux côtés des marins pêcheurs. Comme l’avait demandé le Premier ministre, nous avons aussi prévu un plan d’accompagnement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. François Patriat. Bravo !
M. Jérôme Bascher. Vous noyez le poisson !
M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour la réplique.
M. Jean-François Rapin. Madame la ministre, je ne doute pas de votre volonté d’aboutir. Le problème est qu’il nous faut des échéances fixes : un marin qui ne pêche pas ne gagne pas d’argent. Il s’agit d’un vrai drame, surtout dans la zone que vous avez définie.
Madame la ministre, j’insiste encore pour que les choses aillent au plus vite. Cela fait plusieurs années que les marins pêcheurs ne peuvent plus mener la vie sereine qu’ils méritent. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
difficultés des cantines scolaires face au protocole sanitaire renforcé