M. le président. Veuillez conclure !
Mme Frédérique Espagnac, rapporteure spéciale. Je laisse donc la parole à mon collègue Thierry Cozic pour vous présenter la seconde partie de cette mission.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Thierry Cozic, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Économie » porte les crédits des principales administrations économiques du ministère de l’économie, des finances et de la relance.
Dans le contexte de la crise actuelle, nous ne pouvons que saluer la diminution des réductions d’effectifs que nous constatons pour 2021. La pression diminue en particulier sur les administrations du programme 134, la baisse des effectifs passant de 155 suppressions en 2020 à seulement 22 en 2021.
Tout d’abord, la réduction des effectifs de la direction générale des entreprises (DGE) devrait être moindre, avec une baisse de 19 équivalents temps plein (ETP) en 2021. Ces derniers mois, les services déconcentrés ont été particulièrement mobilisés, de sorte que la priorité est à la gestion de crise et que la finalisation du projet de services économiques de l’État en région a été retardée à 2022. L’activité des services doit pouvoir continuer à se focaliser sur l’accompagnement des entreprises en difficulté, ainsi que sur les filières stratégiques et l’innovation.
La réduction des effectifs de la direction générale du Trésor se poursuivra en 2021 à un rythme moins soutenu qu’auparavant, avec la suppression de 13 ETP. La rationalisation du réseau a été particulièrement forte au cours des dernières années, l’effectif des services économiques à l’étranger étant passé de 1 339 agents à 603 entre 2009 et 2020, soit une baisse de 55 %.
Pour la deuxième année consécutive, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) verra ses effectifs préservés en 2021, avec une baisse de seulement 5 ETP. L’exécution de ses missions en matière de sécurité sanitaire et de lutte contre les fraudes doit ainsi être mieux garantie. Nous considérons que l’effort produit par le Gouvernement reste important.
Quant au fonds de péréquation postale, les conséquences de la réforme des impôts de production sur son financement n’ont pas été suffisamment anticipées par le Gouvernement. (Marques d’approbation de Mmes Christine Lavarde et Sophie Primas.) Les ressources, issues de l’allégement de fiscalité locale dont le groupe La Poste bénéficie, reviennent aux commissions départementales de la présence postale territoriale et au financement des points de contact éligibles.
La Poste garantit l’accessibilité de services indispensables pour nombre de nos concitoyens. Je pense en particulier à l’accès au compte et à l’accessibilité numérique.
Pour cette raison, la commission propose un amendement qui crédite le fonds de péréquation postale de 66 millions d’euros pour compenser la perte de ressources liée à la réforme des impôts de production.
Enfin, les prêts garantis par l’État (PGE) ont constitué un outil indispensable, qui a permis aux entreprises de trouver rapidement des liquidités et de traverser ainsi la première vague de l’épidémie.
À ce jour, le bilan des PGE reste positif : les entreprises ont pu emprunter grâce à ces prêts un total de 124,3 milliards d’euros. La sinistralité envisagée avant la mise en œuvre de nouvelles restrictions pour faire face à la deuxième vague épidémique impliquait un coût global du dispositif de l’ordre de 3 à 4 milliards d’euros, soit un niveau relativement limité au regard des apports du dispositif en termes de soutien aux entreprises. La deuxième vague de l’épidémie et les nouvelles restrictions pourraient cependant faire évoluer ce coût de façon très significative.
Le compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers et à des organismes privés » comprend les crédits de deux dispositifs qui permettent également de pallier les difficultés de financement des entreprises.
Il s’agit, d’une part, du fonds de développement économique et social (FDES), d’autre part, des avances remboursables et prêts bonifiés gérés par la direction générale des entreprises.
La mobilisation du FDES dans le cadre de l’épidémie de covid-19 a donné lieu à un dédoublement de sa doctrine d’intervention. En parallèle du fonds classique, qui sert d’outil de soutien aux restructurations et qui suppose une contribution importante de financeurs privés, une doctrine d’intervention spécifique, dite « covid-19 », a été déployée. Ce FDES « covid-19 » n’a pas été conditionné à des cofinancements et à une procédure de restructuration.
Les deux dispositifs ont permis d’octroyer un nombre assez limité de prêts. En effet, à peine plus de 20 % du milliard d’euros prévu pour 2020 a été consommé, de sorte que l’intégralité des crédits sera reportée en 2021, avec une ouverture de crédits complémentaire de 75 millions d’euros.
Pour ce qui est des prêts bonifiés et des avances remboursables, la consommation des crédits a été encore plus limitée, puisque, au 31 août, seulement 19,4 millions d’euros ont été consommés sur les 500 millions d’euros ouverts. D’après les informations transmises, une soixantaine de dossiers resterait en instance.
Pour conclure, je souhaite aborder la question du concours de l’État au financement des fonds de garantie de Bpifrance. En effet, depuis plusieurs années, Mme Espagnac et mon prédécesseur, Bernard Lalande, déplorent l’absence de budgétisation des crédits dédiés aux fonds de garantie, qui résultent de redéploiements de crédits ou de recyclages internes à Bpifrance.
Ces débudgétisations sont en contradiction avec le principe d’universalité budgétaire et nuisent à la sincérité des comptes publics. De plus, pour 2021, des crédits dédiés à ces garanties classiques ont été rangés au sein du plan de relance, alors qu’ils auraient dû être retracés dans le programme 134.
C’est la raison pour laquelle nous proposerons un amendement symbolique de 10 000 euros, visant à assurer le maintien du lien entre le programme 134 et les activités de garantie de Bpifrance.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Serge Babary, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon propos sera essentiellement centré sur les crédits qui concernent le volet « Commerce et artisanat ».
Si le plan de relance dédié à ces secteurs regroupe environ 200 millions d’euros de crédits, la mission « Économie », quant à elle, n’en retrace quasiment plus aucun. C’est pourquoi la commission des affaires économiques a adopté quatre amendements.
Le premier concerne le Fisac, fonds qu’il ne nous semble pas raisonnable de supprimer, alors même que les autres dispositifs censés le remplacer ne sont pas encore suffisamment opérationnels. Je pense par exemple à l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), qui n’a qu’un an d’existence, ou au plan « Action cœur de ville », qui ne concerne que les villes moyennes. Je vous proposerai donc d’augmenter le Fisac de 30 millions d’euros.
Le deuxième amendement porte sur l’Institut national des métiers d’art (INMA). Le Gouvernement diminue progressivement le soutien public dont la structure bénéficie, et envisage son autofinancement en 2022. Or la crise actuelle a des conséquences lourdes sur les ressources propres de cette association reconnue d’utilité publique. Le mécénat et les prestations, comme les salons, sont en effet en baisse. Je vous présenterai donc un amendement qui vise à rétablir la dotation de l’INMA au niveau qu’elle atteignait l’an passé.
Le troisième amendement concerne l’initiative France Num, devenue la pierre angulaire de la politique publique de numérisation des PME. Bien qu’utile, l’initiative souffre d’une notoriété insuffisante et d’une absence totale de suivi de ses actions et de mesure de leur efficacité.
Il nous paraît essentiel, à un moment où la transition numérique semble enfin considérée comme primordiale, de financer une vaste campagne de communication qui ne soit pas ciblée sur les entrepreneurs déjà familiers du sujet, mais au contraire sur tous ceux qui en sont éloignés.
La commission a donc adopté un amendement qui tend à augmenter de 5 millions d’euros la dotation de France Num, dans l’objectif de financer également la mise en œuvre d’un dispositif de suivi des actions de numérisation mises en place grâce à son entremise.
Si nous saluons les mesures du plan de relance qui visent à accélérer la numérisation des PME, nous constatons qu’elles butent sur l’écueil que représente le financement concret du virage numérique.
C’est pourquoi, à l’occasion de l’examen des articles non rattachés aux crédits, nous vous présenterons un amendement, déjà adopté par le Sénat lors de l’examen du troisième projet de loi de finances rectificative, mais rejeté par l’Assemblée nationale, tendant à créer un crédit d’impôt à la numérisation et à l’équipement. Son taux serait de 50 % des dépenses engagées dans la limite de 10 000 euros par an.
Il est urgent d’agir fort et de penser la numérisation comme relevant de l’intérêt général. Sans cela, malgré toutes les bonnes intentions, les mesures mises en œuvre échoueront à trouver leur public.
En conclusion, la commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Économie », sous réserve de l’adoption des amendements qu’elle a déposés. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission des affaires économiques saisie pour avis sur le volet « Numérique et postes » de la mission « Économie » a émis un avis favorable, essentiellement motivé par l’abondement des crédits du plan de relance, sous réserve toutefois de l’adoption d’un amendement sur La Poste.
Depuis plusieurs années, le Sénat plaide pour un cap clair et des financements conséquents pour développer les réseaux d’initiative publique sur tous les territoires. L’enjeu d’inclusion numérique est bien connu et son caractère essentiel a été ravivé par les confinements successifs.
Nous avions proposé une rallonge de 322 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2020, mais n’avions obtenu que 30 millions dans le PLFR 3. Grâce au plan de relance, une enveloppe supplémentaire de 240 millions d’euros sera disponible en 2021. Le Gouvernement recycle des crédits qui ne sont pas nouveaux, mais ils permettent de mobiliser un total de 550 millions d’euros.
Il était temps, madame la ministre, car nous sommes malheureusement toujours les bons derniers de l’Union européenne en matière de très haut débit fixe !
Une étape a donc été franchie, en ce qui concerne le soutien aux territoires. Il conviendra à présent de nous assurer que le cahier des charges du plan France Très haut débit permette de financer tous les raccordements, y compris les plus longs et les plus complexes.
La gestion du dossier de La Poste est un autre sujet d’incompréhension, voire de mécontentement. En effet, malgré les alertes, le Gouvernement n’a pas anticipé les conséquences de la réforme des impôts de production sur la mission d’aménagement du territoire de La Poste. Pas plus d’ailleurs qu’il n’a prévu les difficultés du service universel postal. Ces missions sont pourtant essentielles, et la crise de ces derniers mois l’a encore prouvé.
Dans ce budget, madame la ministre, vous proposez comme seule réponse de diminuer la compensation du service de transport et de distribution de la presse, à moins de 90 millions d’euros. Quand on connaît l’équivalent dont dispose La Poste belge, à savoir 170 millions d’euros, on se demande comment La Poste française pourrait poursuivre une mission de qualité sur un territoire vingt fois plus grand et avec moitié moins d’argent !
Le Sénat a voté un amendement d’appel en première partie du projet de loi de finances. Nous vous proposons de revenir sur le sujet dans cette seconde partie et d’abonder de 66 millions d’euros l’enveloppe consacrée à l’aménagement du territoire.
Nous avions cru comprendre jusqu’alors que c’était une solution acceptable pour le Gouvernement, mais il semblerait que la question ne soit pas encore tranchée et qu’elle reste suspendue à l’arbitrage du Premier ministre.
Nous espérons donc, madame la ministre, que vous pourrez nous annoncer une bonne nouvelle, après plusieurs semaines de débat, et alors que nous sommes en plein examen du PLF. Les Français attendent du Gouvernement qu’il tienne les engagements qu’il a pris auprès des différentes commissions départementales de présence postale.
Notre amendement propose un minimum, sur lequel nous devrions pouvoir nous accorder, pour assurer la pérennité du service public de La Poste, auquel les Français tiennent tant.
La responsabilité nous reviendra ensuite de préparer l’avenir et de réfléchir à la forme que devra revêtir un service universel adapté aux réalités nouvelles, le contexte ayant particulièrement évolué ces derniers mois. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Franck Montaugé, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le choc économique que nous subissons depuis mars a eu pour conséquence d’exacerber les faiblesses structurelles de notre industrie à au moins quatre niveaux.
D’abord, l’endettement s’est accru de 13 % et, en septembre dernier, l’encours total de dette de l’industrie était proche de 150 milliards d’euros, ce qui est d’autant plus problématique que les entreprises industrielles françaises sont faibles en fonds propres.
Ensuite, l’investissement a chuté de 14 % par rapport à 2019, alors que notre outil industriel a dix-neuf ans d’âge moyen. Il est deux fois plus ancien qu’en Allemagne, et bien moins robotisé et numérisé.
En matière environnementale, 40 % de l’énergie consommée par l’industrie en France est le fait d’équipements vieux de plus de trente ans, et dont les performances énergétiques sont mauvaises.
La crise a aussi révélé l’importante dépendance de notre économie à certains grands secteurs exportateurs comme l’aéronautique et, dans une moindre mesure, l’automobile. Au-delà du seul déficit de notre commerce extérieur, le risque est que nous perdions durablement des parts de marchés à l’international.
Enfin, l’industrie a déjà perdu près de 53 000 emplois en 2020, alors que des plans sociaux restent à venir. En France, ce secteur représente 13 % des emplois contre 21 % en Allemagne et 20 % en Italie.
Comment le budget pour 2021 répond-il à ces enjeux ? Si les orientations de long terme sont intéressantes, elles présentent des carences à court terme.
Tout d’abord, un soutien plus conséquent à la demande sera nécessaire, car la crise qui se profile fera des dégâts dans l’ensemble de l’industrie.
Plusieurs leviers existent, dont le soutien à des secteurs oubliés du plan de relance, comme la construction neuve, qui encourage en particulier la production métallurgique. La commande publique en est un autre, mais encore faudrait-il que les collectivités qui représentent 60 % de l’investissement public disposent des ressources nécessaires. Enfin, la réouverture des commerces est un impératif pour l’industrie.
Pour relancer la demande, on ne pourra éviter la question de la mobilisation de la considérable épargne que les Français ont accumulée depuis mars dernier, soit environ 90 milliards d’euros. Aucune piste ne nous a été exposée à ce sujet.
Ensuite, le Gouvernement ne semble pas prendre correctement la mesure du mur de la dette, qui s’élève à près de 150 milliards d’euros dans l’industrie.
En conclusion, mes chers collègues, la relance offre une opportunité longtemps attendue de penser une politique industrielle souveraine, ambitieuse et réaliste, qui utilise tous les leviers de transformation de notre industrie.
Les orientations stratégiques de la réindustrialisation du pays devraient faire l’objet d’une implication directe du Parlement, en concertation avec les filières et les régions.
Si le plan de relance identifie bien les enjeux de long terme, il doit être renforcé à court terme pour pallier une crise de la demande et mieux anticiper le problème de l’endettement.
La commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Économie ». (Applaudissements sur des travées des groupes SER et Les Républicains.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Franck Menonville.
M. Franck Menonville. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la question de la juste intervention publique dans la sphère économique nourrit d’intenses débats depuis plusieurs siècles. En cette année 2020, et dans les circonstances que nous connaissons, elle est plus que jamais d’actualité.
La mission « Économie » se compose de quatre programmes principalement orientés vers l’accompagnement des entreprises, notamment pour la transition numérique de l’artisanat et des petites entreprises. L’enjeu est essentiel dans le contexte actuel.
Alors que les petits commerces rouvrent leurs portes aujourd’hui – et nous nous en félicitons –, les difficultés rencontrées lors des dernières semaines, voire des dernières années, demeurent. Cela devrait suffire à nous convaincre qu’il faut accélérer la transition numérique des territoires, notamment la numérisation des PME et des commerces. Le groupe Les Indépendants est donc très favorable au crédit d’impôt à la numérisation qui sera proposé.
Je partage aussi les analyses de Mme la rapporteure spéciale sur le plan France Très haut débit : il gagnerait à être mis en œuvre plus rapidement. Madame la ministre, même si je connais votre détermination sur ce dossier, je crois qu’il est encore possible de gagner en efficacité, en simplifiant certaines procédures.
La commission des finances et celle des affaires économiques proposent d’abonder les crédits du Fisac à hauteur de 30 millions d’euros. Si l’amendement est adopté, cette enveloppe contribuera à redynamiser les centres-bourgs et les centres-villes, sans grever les finances publiques.
Le groupe Les Indépendants accueille donc très favorablement cette proposition. Il ne s’agit pas de donner au Fisac un blanc-seing sur le long terme, mais de reconnaître que sa mission est essentielle dans le contexte actuel et qu’aucun autre dispositif ne peut le remplacer à ce stade, comme l’a rappelé M. Serge Babary.
La pertinence du Fisac se justifie aussi par le fait qu’il s’agit d’un outil pérenne et structurel qui complétera utilement le fonds de solidarité, instrument qui à l’inverse est exceptionnel et conjoncturel. La bonne articulation des deux fonds renforcera notre politique de cohésion des territoires.
La contribution de La Poste à cette dynamique sera également déterminante, même si son rôle reste encore à définir. Il ne faut pas affaiblir sa présence sur les territoires, car nous devons pérenniser tout autant que renouveler ce service universel.
Nous étudierons prochainement l’opportunité de prolonger de deux ans le dispositif des zones de revitalisation rurale (ZRR). Dans le contexte de crise que nous traversons, le rôle des ZRR est comparable à celui du Fisac. Nous gagnerions à capitaliser sur de tels dispositifs, existants et éprouvés. C’est en cultivant la stabilité et en préservant la continuité des instruments dont nous disposons que nous éviterons les temps morts.
En conclusion, nous ne pourrons pas faire l’économie d’une réflexion plus globale sur la stratégie à mettre en œuvre pour redynamiser le tissu des entreprises de nos territoires. Il y va de la cohésion nationale.
Le groupe Les Indépendants votera les crédits de la mission « Économie », ainsi que les amendements présentés par les rapporteurs.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon.
M. Daniel Salmon. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous le savons, l’examen de cette mission intervient, comme celui de l’ensemble du budget pour 2021, dans un contexte de crise sanitaire et économique inédit.
Si nous saluons les efforts financiers tout à fait nécessaires engagés depuis le début de la crise pour aider les entreprises, des réponses plus fortes doivent être apportées pour accompagner le tissu économique dans son ensemble.
Concernant les crédits de la mission, la hausse que nous constatons cette année résulte de la nette augmentation des crédits du dispositif de compensation carbone des sites électro-intensifs et du programme 343, « Plan France Très haut débit » – les crédits de paiement de ce programme progressent de 41 %. À ce sujet, il nous paraît nécessaire de donner la priorité à la couverture des zones blanches demeurant en France avant d’achever la couverture en très haut débit.
Nous regrettons par ailleurs le manque de lisibilité globale de cette mission du fait du plan de relance qui fait l’objet d’une mission spécifique, ce qui, si cela se justifie d’un point de vue opérationnel, complique la lecture des crédits que nous examinons.
Permettez-moi de revenir sur un certain nombre de points spécifiques que nous déplorons.
D’abord, la suppression définitive du Fisac – le sujet me paraît faire l’unanimité ce soir –, voulue par le Gouvernement, n’a pas de sens. La crise actuelle affecte en premier lieu l’artisanat et le commerce. Il est indispensable de disposer de crédits d’intervention, afin de maintenir ces activités dans nos territoires les plus fragiles, notamment ruraux. C’est pourquoi nous soutiendrons les amendements visant à rétablir les crédits du Fisac à hauteur de 30 millions d’euros.
Nous regrettons bien entendu l’absence de conditionnalité pour les aides versées aux entreprises dans le cadre de cette mission, comme d’ailleurs dans le cadre du plan de relance, qu’elles soient écologiques, sociales, de relocalisation ou encore d’assainissement fiscal.
Globalement, les aides de l’État profitent surtout aux grandes entreprises qui bénéficient davantage en valeur de la baisse des impôts de production. À côté, le soutien de l’État paraît bien insuffisant pour les TPE et les PME qui subissent la crise de plein fouet.
Plus largement, nous regrettons l’opposition de ce gouvernement à toutes nos propositions tendant à instaurer des solidarités économiques nouvelles, comme la contribution exceptionnelle sur les géants de la vente en ligne. Mettre fin à la distorsion de concurrence entre le commerce de proximité et le commerce en ligne est un enjeu d’équité et de justice sociale et fiscale – c’est une question qui est au cœur des préoccupations des acteurs du tissu économique local cher à nos concitoyens.
Une réflexion de fond doit aujourd’hui être menée en vue d’inventer une fiscalité du commerce répondant aux enjeux écologiques du XXIe siècle et permettant de lutter réellement contre les stratégies d’évitement de l’impôt mises en place par certains géants du numérique.
Vous parlez de souveraineté et de relocalisation, mais nous attendons toujours les actes nous assurant de reprendre la maîtrise de notre système productif. Garder le monopole sur nos fleurons nationaux est également essentiel : nous attendons le retour d’un État stratège. Utilisons si nécessaire la nationalisation provisoire pour conserver sur le sol français des capacités en matière de production stratégique. Je pense par exemple à Luxfer, dernière unité de production en Europe de bouteilles d’oxygène médical, une entreprise menacée de fermeture définitive.
Pour conclure, on ne retrouve pas les grands objectifs décrétés par le Gouvernement – la relance verte et la relocalisation stratégique – dans ce projet de loi de finances, particulièrement dans cette mission qui est pourtant le véhicule clé pour intégrer des dispositifs de régulation.
Si nous ne nous opposons pas à l’ensemble des mesures, nous ne pouvons pas approuver un budget conçu selon une doctrine néolibérale fondée sur la compétitivité des entreprises et la consommation à tout prix, objectifs qui ne répondent pas aux enjeux d’aujourd’hui et de demain.
C’est pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera contre les crédits de cette mission.
M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet.
Mme Nadège Havet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, répondre à la crise sanitaire, c’est aussi soutenir plus que jamais notre économie, en particulier les secteurs les plus durement touchés et les plus stratégiques. C’était d’ailleurs l’objet de nos échanges sur le plan de relance, ici même jeudi dernier, échanges qui se poursuivront ce soir.
Les crédits de la mission « Économie » que nous examinons aujourd’hui ne peuvent être étudiés isolément, puisqu’ils seront complétés par les 6 milliards d’euros de crédits déjà votés, qui viennent en soutien de la compétitivité des entreprises et de la résilience économique de la France.
Pour la mission « Économie » en tant que telle, les crédits sont en augmentation de près de 14 %. Cette hausse est liée à l’évolution du montant de la compensation carbone accordée à certaines entreprises, d’une part, et au déploiement du plan France Très haut débit au titre du programme 343, d’autre part.
En début de mandature, le Président de la République a fixé l’objectif d’une couverture intégrale du territoire national en haut débit d’ici à 2020, et en très haut débit d’ici à 2022.
Afin d’y parvenir, le programme d’investissements d’avenir (PIA) piloté par le secrétariat général pour l’investissement représente la première source de financement. À cela viennent s’ajouter plusieurs ressources complémentaires prévues dans ce programme, en soutien aux réseaux d’initiative publique des collectivités. Les projets sont quasi finalisés : leur intervention doit garantir l’utilisation partagée du réseau et respecter le principe d’égalité et de libre concurrence sur les marchés.
Les crises sanitaire et économique que nous traversons impliquent en effet la sécurisation et la généralisation de la couverture en fibre optique sur l’ensemble du territoire, mais elles nécessitent aussi de prendre en compte la dégradation des conditions financières et le cofinancement des raccordements coûteux pour les sites les plus isolés.
En parallèle, saluons l’initiative de former 4 000 médiatrices et médiateurs, afin de lutter contre l’illettrisme et la fracture numériques ; cette politique est d’autant plus nécessaire que la période de confinement a accru l’usage des services numériques pour l’accès à des services essentiels de la vie quotidienne.
Les politiques publiques financées par le programme 134 visent, quant à elles, à redynamiser l’environnement économique, en ciblant trois objectifs stratégiques : développer les PME et les entreprises de taille intermédiaire, en renforçant l’offre classique de garantie des prêts de Bpifrance ; renforcer le soutien à l’international des entreprises à l’export, en particulier grâce au travail de Business France ; enfin, réguler et sécuriser les marchés pour s’assurer du respect des règles de concurrence, ainsi que de la qualité et de la sécurité des produits mis sur le marché.
Alors que l’ensemble de nos politiques de relance devra s’appuyer sur des données fiables, nous nous félicitons que l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), qui collecte, produit, analyse et diffuse des informations socioéconomiques dans le débat public, bénéficie également d’un budget solide, légèrement en hausse.
Enfin, le programme 305 prévoit les moyens de fonctionnement de la direction générale du Trésor. Son action de conception et de mise en œuvre des politiques économiques et financières visera un objectif essentiel, celui de retrouver dès 2022 un niveau de richesse nationale équivalent à celui d’avant la crise, mais aussi l’objectif de soutenir la consommation des ménages.
Le groupe RDPI se prononcera donc en faveur des crédits de cette mission.