Sommaire
Présidence de M. Roger Karoutchi
Secrétaires :
Mmes Jacqueline Eustache-Brinio, Martine Filleul.
2. Financement de la sécurité sociale pour 2021. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Articles additionnels après l’article 17 (suite)
Amendement n° 960 rectifié ter de M. Olivier Henno. – Adoption.
Amendement n° 288 rectifié quater de M. Alain Milon. – Devenu sans objet.
Amendement n° 260 rectifié ter de M. Alain Milon. – Devenu sans objet.
Adoption de l’article modifié.
Article 17 ter (nouveau) – Adoption.
Article additionnel après l’article 17 quater
Amendement n° 160 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 1064 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 18
Amendement n° 981 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 971 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 923 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 925 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 972 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 924 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Amendement n° 967 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 968 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 571 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
Amendement n° 964 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 973 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 961 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 962 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 19
Amendement n° 965 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Article 20 et annexe C – Adoption.
Amendement n° 1041 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 985 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 161 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 1072 du Gouvernement – Adoption.
Adoption de l’ensemble de l’article et de l’annexe, modifié.
Vote sur l’ensemble de la troisième partie
Adoption, par scrutin public n° 19, de l’ensemble de la troisième partie du projet de loi, modifié.
Articles additionnels avant l’article 25 A
Amendement n° 12 rectifié ter de M. Alain Milon. – Retrait.
Amendement n° 11 rectifié ter de M. Alain Milon. – Retrait.
Amendement n° 926 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Adoption.
Amendement n° 271 rectifié ter de M. Alain Milon. – Retrait.
Amendement n° 444 rectifié bis de M. Jean-François Rapin. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 25 A
Amendement n° 30 rectifié ter de M. Alain Milon. – Retrait.
Amendement n° 488 rectifié ter de Mme Monique Lubin. – Retrait.
Amendement n° 846 rectifié de M. Daniel Gremillet. – Retrait.
Amendement n° 847 rectifié de M. Daniel Gremillet. – Retrait.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 25
Amendement n° 1042 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 575 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
4. Retrait de l’ordre du jour d’une proposition de loi
5. Candidatures à une commission mixte paritaire
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
7. Financement de la sécurité sociale pour 2021. – Suite de la discussion d’un projet de loi
quatrième partie (suite)
Amendement n° 162 rectifié de la commission. – Adoption.
Amendement n° 384 rectifié de M. Jean Sol. – Rejet.
Amendement n° 906 rectifié de M. Jean-Yves Roux. – Retrait.
Amendement n° 676 rectifié ter de Mme Valérie Boyer. – Rejet.
Amendement n° 699 rectifié de M. Martin Lévrier. – Adoption.
Amendement n° 329 rectifié de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Amendement n° 883 rectifié ter de Mme Véronique Guillotin. – Rejet.
Amendement n° 814 rectifié de M. Dominique Théophile. – Rejet.
Amendement n° 53 de M. Bernard Bonne. – Retrait.
Amendement n° 728 rectifié de M. Patrice Joly. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l’assurance maladie
Amendement n° 556 de M. Victorin Lurel. – Devenu sans objet.
Amendement n° 815 de M. Dominique Théophile. – Devenu sans objet.
Amendement n° 491 de Mme Victoire Jasmin. – Devenu sans objet.
Amendement n° 555 de M. Victorin Lurel. – Devenu sans objet.
Amendement n° 473 rectifié bis de M. Patrice Joly. – Devenu sans objet.
Amendements nos 1043 et 1007 de Mme Laurence Cohen. – Devenus sans objet.
Amendement n° 1058 du Gouvernement. – Devenu sans objet.
Amendement n° 789 rectifié de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Amendement n° 1015 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 840 rectifié bis de Mme Annie Le Houerou. – Rejet.
Amendement n° 1016 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 1044 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 1073 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 677 rectifié de Mme Valérie Boyer. – Devenu sans objet.
Amendement n° 17 rectifié ter de M. Alain Milon. – Devenu sans objet.
Amendement n° 531 rectifié quater de M. Martin Lévrier. – Devenu sans objet.
Amendement n° 749 rectifié de M. Bernard Jomier. – Adoption.
Amendement n° 18 rectifié ter de M. Alain Milon. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 28
Amendement n° 579 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
Amendement n° 820 rectifié bis de M. Dominique Théophile. – Retrait.
Amendement n° 20 rectifié ter de M. Alain Milon. – Retrait.
Amendement n° 578 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
Articles 28 bis et 28 ter (nouveaux) – Adoption.
Amendement n° 164 de la commission. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.
Amendement n° 806 rectifié de M. Xavier Iacovelli. – Devenu sans objet.
Article 28 quinquies (nouveau)
Amendement n° 165 de la commission. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.
Amendement n° 166 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 1068 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 277 rectifié quater de M. Alain Milon. – Devenu sans objet.
Amendement n° 297 rectifié ter de M. Olivier Henno. – Devenu sans objet.
Amendement n° 626 de M. François Bonhomme. – Non soutenu.
Amendement n° 492 rectifié de Mme Victoire Jasmin. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 29
Amendement n° 112 rectifié de Mme Viviane Malet. – Retrait.
Amendement n° 884 rectifié ter de Mme Véronique Guillotin. – Retrait.
Amendement n° 252 rectifié quater de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Amendement n° 434 rectifié bis de Mme Annick Billon. – Adoption.
Amendement n° 380 de M. Dominique Théophile. – Adoption.
Amendement n° 558 de M. Victorin Lurel. – Devenu sans objet.
Amendement n° 349 rectifié bis de Mme Élisabeth Doineau. – Devenu sans objet.
Amendement n° 2 rectifié de M. Dominique Théophile. – Devenu sans objet.
Amendement n° 347 rectifié bis de Mme Élisabeth Doineau. – Adoption.
Amendement n° 751 rectifié de M. Bernard Jomier. – Devenu sans objet.
Amendement n° 345 rectifié bis de Mme Élisabeth Doineau. – Adoption.
Amendement n° 1017 de Mme Laurence Cohen. – Devenu sans objet.
Amendement n° 344 rectifié bis de Mme Élisabeth Doineau. – Rejet.
Amendement n° 378 rectifié ter de Mme Florence Lassarade. – Adoption.
Amendement n° 557 de M. Victorin Lurel. – Retrait.
Amendement n° 752 rectifié de M. Bernard Jomier. – Retrait.
Amendement n° 810 rectifié de M. Dominique Théophile. – Retrait.
Amendement n° 348 rectifié bis de Mme Élisabeth Doineau. – Adoption.
Amendement n° 754 rectifié de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 30
Amendement n° 1018 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 1019 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 494 rectifié de Mme Victoire Jasmin. – Adoption.
Amendement n° 876 rectifié bis de Mme Michelle Meunier. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 31
Amendement n° 860 rectifié de M. Martin Lévrier. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 450 rectifié bis de M. Olivier Henno. – Devenu sans objet.
Amendement n° 756 rectifié de Mme Michelle Meunier. – Devenu sans objet.
Amendement n° 757 rectifié de Mme Michelle Meunier. – Rejet.
Amendement n° 931 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Retrait.
Amendement n° 630 de M. François Bonhomme. – Non soutenu.
Amendement n° 123 rectifié quinquies de Mme Isabelle Raimond-Pavero. – Rejet.
Amendement n° 836 rectifié de M. Pierre-Antoine Levi. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 32
Amendement n° 343 rectifié bis de Mme Élisabeth Doineau. – Retrait.
Amendement n° 409 rectifié de M. Olivier Henno. – Retrait.
Amendement n° 125 rectifié quinquies de Mme Isabelle Raimond-Pavero. – Devenu sans objet.
Amendement n° 228 rectifié ter de Mme Florence Lassarade. – Retrait.
Amendement n° 257 rectifié de M. Hervé Maurey. – Devenu sans objet.
Amendement n° 794 rectifié de M. Bernard Jomier. – Devenu Retrait.
Amendement n° 1075 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 33
Amendement n° 1003 de Mme Laurence Cohen. – Retrait.
Amendement n° 96 rectifié bis de M. Jean-Luc Fichet. – Rejet.
Amendement n° 95 rectifié bis de M. Jean-Luc Fichet. – Rejet.
Amendement n° 991 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 472 rectifié bis de M. Patrice Joly. – Rejet.
Amendement n° 541 rectifié de Mme Gisèle Jourda. – Non soutenu.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme laurence rossignol
Amendement n° 169 de la commission. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 33 bis
Amendement n° 796 rectifié de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.
Amendement n° 992 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 1056 de Mme Laurence Cohen. – Rejet par scrutin public n° 20.
Amendement n° 170 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 33 ter
Amendement n° 993 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 231 rectifié ter de Mme Chantal Deseyne. – Retrait.
Amendement n° 68 rectifié ter de Mme Chantal Deseyne. – Retrait.
Amendement n° 650 rectifié de Mme Élisabeth Doineau. – Adoption.
Amendement n° 907 rectifié de M. Jean-Yves Roux. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 33 quater
Amendement n° 429 rectifié de Mme Valérie Létard. – Retrait.
Amendement n° 171 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles 34 bis et 34 ter (nouveaux) – Adoption.
Amendement n° 229 rectifié de M. Jean Bizet. – Rejet.
Amendement n° 172 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article 34 quinquies (nouveau)
Amendement n° 173 de la commission. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.
Amendement n° 174 de la commission. – Rejet.
Amendement n° 379 rectifié de M. Michel Savin. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 175 de la commission. – Rejet.
Amendement n° 432 rectifié de Mme Annick Billon. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 34 septies
Amendement n° 408 rectifié ter de M. Olivier Henno. – Retrait.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure de la commission des affaires sociales pour la famille
Amendement n° 312 rectifié bis de Mme Frédérique Puissat. – Retrait.
Amendement n° 1020 de Mme Laurence Cohen. – Retrait.
Amendement n° 449 rectifié quinquies de Mme Chantal Deseyne. – Rejet par scrutin public n° 21.
Amendement n° 602 rectifié de M. Jean-Baptiste Blanc. – Rejet.
Amendement n° 896 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Rejet.
Amendement n° 936 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales
Mme Marie-Pierre de La Gontrie
Adoption, par scrutin public n° 22, de l’article.
Renvoi de la suite de la discussion.
Nomination de membres d’une commission mixte paritaire
compte rendu intégral
Présidence de M. Roger Karoutchi
vice-président
Secrétaires :
Mme Jacqueline Eustache-Brinio,
Mme Martine Filleul.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Financement de la sécurité sociale pour 2021
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2021 (projet n° 101, rapport n° 107, avis n° 106).
Dans la discussion des articles de la troisième partie, nous poursuivons l’examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 17.
TROISIÈME PARTIE (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2021
TITRE IER (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE
Chapitre IV (suite)
Assurer la soutenabilité des dépenses de médicaments
Articles additionnels après l’article 17 (suite)
M. le président. L’amendement n° 262 rectifié ter, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, M. Sautarel, Mme L. Darcos, MM. J.B. Blanc et Bonne, Mmes Puissat et Malet, MM. Piednoir, Savary et Houpert, Mmes Di Folco et Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 165-2 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La fixation des prix des produits inscrits sur la liste mentionnée à l’article L. 165-1 tient compte de considérations de politique industrielle tels que les investissements réalisés par les entreprises pour le maintien, la modernisation et le développement de l’outil de production en France et dans l’Union européenne, les étapes de fabrication de ces produits dans des sites de production situés dans l’Union européenne, le ratio d’emplois liés à la fabrication de ces produits en France et dans l’Union Européenne. »
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Monsieur le président, mes chers collègues, je vous souhaite à tous bon courage pour cette longue journée de débats !
La crise de la covid-19 a mis en lumière de graves problèmes de dépendance de notre pays à l’égard de pays tiers en matière de médicament, mais aussi de dispositifs médicaux. Les conséquences en sont nombreuses sur l’emploi, l’attractivité de notre pays et la santé de nos concitoyens.
Composé à 92 % de PME qui investissent et innovent dans ce domaine hautement stratégique et compétitif, le secteur des dispositifs médicaux, marqué par une très forte hétérogénéité, est durement affecté par la crise sanitaire, en raison de la diminution nette des actes médicaux liée aux restrictions destinées à contrer la pandémie.
Si la baisse de prix de 150 millions d’euros sur les dispositifs médicaux prévue dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) obéit à une perspective légitime et nécessaire de rééquilibrage des dépenses publiques, elle ne saurait ignorer des considérations de politique industrielle devenues fondamentales pour notre souveraineté, notre compétitivité et l’emploi en France et dans l’Union européenne, dans un secteur hautement stratégique pour notre pays et bouleversé par la crise sanitaire et ses répercussions industrielles.
Une politique tarifaire différenciée en fonction de la localisation des activités de production des entreprises concernées, à laquelle s’ajoute la clause de sauvegarde sur les dispositifs médicaux de la liste en sus, introduite par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 et dont nous avons débattu hier, permet de circonscrire l’incidence de cette mesure sur les comptes sociaux.
Le présent amendement a pour objet d’inciter par la voie législative le Comité économique des produits de santé (CEPS) à intégrer systématiquement ces considérations industrielles dans le cadre des négociations conventionnelles avec le secteur des dispositifs médicaux.
M. le président. Le sous-amendement n° 1071, présenté par Mme Imbert, est ainsi libellé :
Amendement n° 262, alinéa 4
1° Remplacer les mots :
en France et dans l’Union européenne
par les mots :
dans l’Union européenne, au Royaume-Uni et en Suisse
2° Après les mots :
situés dans l’Union européenne
insérer les mots :
, au Royaume-Uni et en Suisse
La parole est à Mme Corinne Imbert.
Mme Corinne Imbert. Déposé en accord avec Alain Milon, ce sous-amendement tend à élargir l’aire géographique visée par son amendement au Royaume-Uni et à la Suisse. L’esprit est le même que celui de l’amendement adopté hier soir après avoir été défendu par René-Paul Savary.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Double avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. L’amendement n° 262 rectifié ter vise à prendre en considération de nouveaux critères de fixation des prix des produits de santé, inspirés de considérations de politique industrielle. Le sous-amendement n° 1071 tend à intégrer le Royaume-Uni et la Suisse dans la liste des pays considérés pour apprécier les engagements industriels des laboratoires.
Modifié par ce sous-amendement, l’amendement deviendrait identique à l’amendement n° 351 rectifié ter, de M. Savary, adopté hier soir contre l’avis du Gouvernement. Que la liste des pays considérés soit bornée à l’Union européenne ou étendue à la Suisse et au Royaume-Uni, nous restons défavorables, sur le fond, au dispositif proposé.
En effet, la tarification des produits de santé repose sur leur valeur thérapeutique et leur apport clinique pour les patients. Le schéma de tarification envisagé risquerait de conduire à des surcoûts indus pour l’assurance maladie, dans la mesure où il reposerait sur des déclarations non contre-expertisables des entreprises : les laboratoires seraient incités à déclarer des investissements de plus en plus élevés pour le seul maintien de leur implantation. Or il ne faudrait pas payer cher un médicament inutile, au seul motif que le laboratoire qui le produit a investi dans l’Union européenne, en Suisse ou au Royaume-Uni.
Oui, la localisation de produits en France peut aider à la sécurisation des approvisionnements ; nous mesurons pleinement l’importance de cet enjeu, mis en évidence par la crise actuelle. Néanmoins, il n’est pas souhaitable d’établir un lien direct entre fixation du prix et implantation des entreprises en France.
Bien sûr, nous travaillons pour qu’il y ait des industries de santé en France – c’est un engagement du Gouvernement. Mais cela doit passer par une approche globale et des leviers appropriés, et non pas nécessairement par la loi. Bien au-delà des prix, les leviers sont divers : financement de projets de recherche ambitieux, soutien des essais cliniques, crédit d’impôt recherche, enjeux de main-d’œuvre et de taxes applicables aux entreprises, notamment.
L’enjeu des implantations nationales du point de vue de la sécurisation des approvisionnements sera traité dans l’accord-cadre en cours de négociation avec l’industrie.
Pour ces raisons, l’avis est défavorable sur le sous-amendement et l’amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 262 rectifié ter, modifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
L’amendement n° 272 rectifié bis, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, M. Sautarel, Mme Malet, MM. Sol, Piednoir et Savary, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet et Regnard, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le II de l’article L. 245-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le 3°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4° A un abattement d’un montant égal à 30 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France métropolitaine et dans les départements d’outre-mer au titre des médicaments biologiques similaires définis à l’article L. 5121-1 du code de la santé publique bénéficiant d’une autorisation de mise sur le marché et inscrits sur la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 162-17 du présent code ou sur la liste mentionnée à l’article L. 5123-2 du code de la santé publique. » ;
2° Au dernier alinéa, les références : « 2° et 3° », sont remplacés par les références : « 2°, 3° et 4° ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Alors que les biosimilaires contribuent à dégager des marges de manœuvre financières pour le système de santé, leur pénétration, notamment en ville, est en deçà des objectifs comme des niveaux atteints dans les autres pays européens.
La promotion des biosimilaires réalisée par les industriels qui les produisent relève d’un accompagnement à la recherche d’économies. Le potentiel d’économies supplémentaires liées à l’amélioration de la pénétration des biosimilaires est considérable : pour 2019, les économies totales induites par ces produits sont estimées à 696 millions d’euros !
Il est donc proposé d’instaurer pour les biosimilaires le même abattement que pour les spécialités dites génériques – les secondes, monsieur le rapporteur général, n’ayant rien à voir avec les premiers…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Quoique sensible à l’intention dont procède cet amendement, la commission le trouve un peu contestable.
Il est écrit dans son objet : « Si l’on ne peut assimiler scientifiquement les biosimilaires aux génériques, leur vocation est la même : créer des économies pour le système de santé. » Les économies, très bien ; mais cet objectif reste subsidiaire par rapport à l’impératif de protection de la santé des patients. Or si la santé des patients n’est pas menacée par l’identité thérapeutique d’un princeps et d’un générique, cette identité, comme les auteurs de l’amendement le soulignent eux-mêmes, n’est pas réalisée en ce qui concerne les bioprinceps et les biosimilaires.
Les mesures d’économie financière sur les produits de santé ne me paraissent souhaitables qu’en cas de parfaite substituabilité entre les produits qu’elles concernent. Telle est la raison de l’avis défavorable de la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Même avis que le rapporteur général, pour la même raison. Le Gouvernement se mobilise pour travailler sur cette question.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. J’entends bien l’argument du rapporteur général, mais je répète que d’autres pays européens réalisent beaucoup plus d’économies que nous grâce aux génériques et aux biosimilaires.
Certes, on ne peut pas exactement les comparer : les génériques relèvent de la chimie pure, et en chimie on peut reproduire des molécules à l’identique. Il n’en demeure pas moins que les biosimilaires ont, de toute évidence, une activité thérapeutique aussi bonne que le princeps. Il faut donc les considérer comme tels.
J’insiste : ces produits sont sources d’économies à intérêt thérapeutique égal !
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. J’entends moi aussi ce que dit le rapporteur général, mais je partage l’avis d’Alain Milon. Madame la ministre, voilà trois ans que, à chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement nous répond qu’il travaille sur les biosimilaires… Ces produits et les entreprises qui les fabriquent méritent d’être pris en considération !
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Au sein de la commission des affaires sociales, plusieurs auditions ont été organisées sur ce thème. Nous voyons bien qu’il y a un sujet important à creuser.
Madame la ministre, on ne peut pas, d’un côté, prétendre faire des économies, toujours sur les mêmes, et, de l’autre, ne pas être sensible aux solutions proposées !
Si nous voulons développer les biosimilaires et susciter une prise de conscience chez les patients susceptibles d’en bénéficier, il faut que nous soyons unanimes pour soutenir ces traitements. Je voterai l’amendement.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour explication de vote.
Mme Corinne Imbert. On parle abondamment et régulièrement de ruptures de médicament. Voilà quelques mois, nous avons subi la rupture d’une insuline, pour laquelle un biosimilaire existe. Que pensez-vous qu’il s’est produit ? Dans l’intérêt des patients, nous avons délivré le biosimilaire – en accord avec le médecin, bien sûr, puisque ces médicaments ne sont pas substituables. À méditer ! Je voterai l’amendement.
M. le président. Méditons… mais votons !
Je mets aux voix l’amendement n° 272 rectifié bis.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
L’amendement n° 302 rectifié bis, présenté par M. Henno, Mme Létard, M. P. Martin, Mme Dindar, MM. Kern, Janssens, Delcros et Moga, Mme Guidez, M. Levi, Mme Vermeillet, MM. Laugier, S. Demilly, Delahaye, Détraigne, Maurey, Hingray, Lafon, Le Nay et Cazabonne et Mmes Morin-Desailly et de La Provôté, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 3° du III de l’article L. 245-6 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« 3° Tous les médicaments dérivés du sang. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, les médicaments dérivés du sang font partie des spécialités exclues de l’assiette de la contribution sur le chiffre d’affaires versée par les entreprises pharmaceutiques au profit de la Caisse nationale de l’assurance maladie, tout comme certains médicaments génériques et orphelins.
Pour la plupart sans alternative thérapeutique, ces médicaments sont destinés au traitement de maladies rares et graves. Le législateur a souhaité les exonérer pour que l’approvisionnement du marché français ne soit pas perturbé, dans l’intérêt des malades.
Or seuls certains médicaments dérivés du sang disponibles sur le marché sont aujourd’hui exclus de l’assiette de la contribution. Une grande partie ne bénéficie pas de cette exonération, notamment les médicaments qui ont obtenu une autorisation de mise sur le marché centralisée européenne.
Ces médicaments sont pourtant tout aussi essentiels à la couverture des besoins des patients que les médicaments actuellement exonérés. Afin de mettre un terme à cette discrimination et de stabiliser l’approvisionnement, le présent amendement vise à exonérer de la contribution l’ensemble des médicaments dérivés du sang.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’entends bien l’argumentation d’Olivier Henno, mais nous considérons qu’il ne serait pas souhaitable de retirer à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) la détermination des médicaments dérivés du sang susceptibles d’être exonérés de la contribution sur le chiffre d’affaires dont les industriels sont redevables.
De fait, comme le rappelle régulièrement l’ANSM dans ses décisions sur la sécurité transfusionnelle, tous les médicaments dérivés du sang ne présentent pas un intérêt thérapeutique majeur propre à les rendre éligibles à cette exonération.
La commission penche donc plutôt vers un avis défavorable. Pour ma part, j’attends pour me prononcer les éclaircissements du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Il est vrai que la croissance de la demande nationale et mondiale provoque une forte tension sur ce marché.
Néanmoins, toute mesure visant à modifier les dispositions législatives actuelles en ce qui concerne les médicaments dérivés du sang ne peut s’entendre que dans le cadre d’une réflexion stratégique et concertée, plus globale, avec l’ensemble des acteurs de la filière sang-plasma. En effet, le modèle éthique français du don du sang est en jeu. Comme vous le savez, il revêt un caractère très sensible pour les associations de donneurs, fournisseurs de la matière première, comme pour les associations de malades.
Dès lors, en toute prudence, je ne puis être que défavorable à cet amendement. Toute mesure qui serait insuffisamment préparée dans ce domaine ferait courir le risque d’un effondrement du don, comme le soulignent les associations, et menacerait donc l’autosuffisance globale de la France en produits sanguins.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Dans le cadre d’un groupe interne à notre commission, Corinne Imbert, René-Paul Savary et moi-même, ainsi que d’autres collègues issus des professions de santé, entendons régulièrement soulever le problème que vient d’exposer Olivier Henno. J’entends l’argument de Mme la ministre sur la dimension éthique, mais, une fois de plus, on nous répond : on va voir… Comme pour les biosimilaires, c’est la même chose depuis plusieurs années !
M. le président. Monsieur le rapporteur général, quel est donc l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission a émis un avis défavorable, mais qui me paraît fondé sur l’avis de l’ANSM, laquelle aurait l’impression de se voir retirer une prérogative. Pour ma part, j’estime que l’Agence européenne des médicaments (EMA) est extrêmement compétente, tout autant que l’ANSM. À la vérité, il y a dans cette affaire un conflit d’intérêts entre le niveau national et le niveau européen. Avis de sagesse.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
L’amendement n° 804 rectifié bis, présenté par M. Jomier, Mmes Poumirol et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier et Rossignol, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Bouad, Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le deuxième alinéa de l’article L. 5121-29 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après les mots : « Espace économique européen », la fin de la première phrase est supprimée ;
2° Après la première phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « Pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur mentionnés à l’article L. 5111-4, ce stock correspond à quatre mois de couverture des besoins en médicament, calculés sur la base du volume des ventes de la spécialité au cours des douze derniers mois glissants. Pour les autres médicaments, ce stock doit être constitué dans une limite fixée dans des conditions définies par décret en Conseil d’État et qui ne peut excéder quatre mois de couverture des besoins en médicament, calculés sur la même base. »
II. – L’article L. 138-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le cas échéant, le stock légal de sécurité prévu par le deuxième alinéa de l’article L. 5121-29 du code de la santé publique donne lieu à une diminution de l’assiette de la contribution pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur. Le montant de cette diminution est fixé à 20 % de la valeur totale des médicaments stockés, dans la limite des quatre mois obligatoires de couverture des besoins, calculée en fonction des prix de vente hors taxes aux officines. »
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. L’article 34 que nous avions voté dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’an dernier était présenté comme mettant en place des stocks de sécurité de médicaments de quatre mois, afin de lutter contre l’augmentation très forte des pénuries. Or le projet de décret d’application envisage, au mieux, deux mois de stocks pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur et seulement un mois pour les autres.
Quatre mois, au vu des données relatives aux durées de pénurie, c’était déjà un compromis… Deux mois, c’est nettement insuffisant. D’autant que les indicateurs dont nous disposons en matière de pénurie de médicaments sont au rouge !
Dès 2018, nos collègues Decool et Daudigny avaient tiré la sonnette d’alarme dans un rapport d’information. Cette semaine encore, l’UFC-Que Choisir en appelle à l’État, annonçant une multiplication par trois du nombre de pénuries de médicament d’intérêt thérapeutique majeur par rapport à 2016. Si l’on remonte plus loin dans le temps, l’augmentation est encore plus spectaculaire : de 44 en 2008, les médicaments touchés par une pénurie sont passés à plus de 1 200 en 2018 ; ils seront, à n’en pas douter, plus nombreux encore l’année prochaine.
Devant la gravité de la situation, il y a lieu d’agir utilement pour répondre à ce problème réel par des moyens appropriés, c’est-à-dire en constituant des stocks de sécurité. C’est pourquoi nous proposons de fixer une durée légale de stockage obligatoire de quatre mois pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur. Dans une démarche constructive envers les entreprises de vente de médicaments, nous proposons, en nous inspirant de la Finlande, de compenser une partie de la charge résultant de ces stocks.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La question posée par M. Jomier est d’une actualité brûlante. Je suis évidemment favorable à ce qu’elle fasse l’objet d’un examen approfondi, sur la base des travaux de nos collègues Jean-Pierre Decool et Yves Daudigny. Pour autant, je pense que la formule proposée se heurte à plusieurs problèmes.
Il y a, d’abord, un problème de faisabilité : contraindre chaque entreprise pharmaceutique, quelle que soit sa taille, à constituer un stock de quatre mois pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur et d’une durée déterminée par décret pour les autres spécialités induirait d’importants coûts logistiques, que toutes ces entreprises ne pourront pas absorber.
Ensuite, de manière bien paradoxale, inscrire dans le droit commun l’impératif de stockage présente le risque non négligeable d’organiser la pénurie : en immobilisant la production par site industriel, nous enverrions des signaux délétères à nos différents partenaires commerciaux et prendrions le risque de gripper, en les rigidifiant, les canaux de distribution, dont les situations de crise nous ont montré qu’ils devaient rester souples.
Pour toutes ces raisons, et tout en comprenant leur intention, nous demandons aux auteurs de l’amendement de le retirer. Il faut trouver d’autres solutions.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. En complément des explications du rapporteur général, je vous ai apporté le projet de décret pris en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, transmis au Conseil d’État et notifié à la Commission européenne.
Le caractère proportionné de ce décret est fondamental, car la Commission européenne demande à la France de prouver qu’elle ne lèse pas les autres États membres par une mesure disproportionnée de stockage de médicaments destinés au seul marché national. C’est pourquoi il a été retenu une durée de stocks de deux mois pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur et d’un mois pour les autres médicaments, avec des modulations possibles jusqu’à quatre mois.
Il est déjà prévu que 20 % des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur feront l’objet d’un stock de quatre mois par décision du directeur général de l’ANSM. Cette liste de médicaments sera régulièrement réévaluée par l’ANSM.
Par ailleurs, le décret sera examiné un an après sa publication pour vérifier qu’il est proportionné et équilibré, et le faire évoluer si nécessaire.
Pour ces raisons, j’appelle au rejet de l’amendement.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je remercie Mme la ministre de ses explications.
Nous nous réjouissons que l’amendement de nos collègues socialistes ait pu être déposé. Celui de notre groupe, pourtant identique, a été déclaré irrecevable… C’est encore le mystère de l’irrecevabilité : je le répète, il faut vraiment que nous, sénatrices et sénateurs, ayons notre mot à dire sur l’irrecevabilité de nos amendements, parce que, là, on marche un peu sur la tête !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
Mme Laurence Cohen. Mon collègue vient de développer l’objet de son amendement, et donc du nôtre, puisque identique. Je suis un peu choquée par vos explications, monsieur le rapporteur général : à vous écouter, il faudrait toujours attendre pour agir, même si vous jugez le sujet important. Si nous avions eu le temps de débattre en commission, nous aurions pu sous-amender cet amendement ; nous ne l’avons pas fait.
Par ailleurs, madame la ministre, les éléments pourtant importants que vous nous avez communiqués ne suffisent pas à me convaincre. En effet, cela fait des années que nous subissons des pénuries de médicaments. Notre chambre haute a publié énormément de rapports très fouillés, dans lesquels elle formulait des recommandations.
Or nous en sommes toujours au même point : alors que nous vivons une pandémie extrêmement grave, des pénuries de médicaments nous sont révélées, y compris pour des traitements classiques de pathologies connues. En tant que sénatrices et sénateurs, nous sommes régulièrement saisis de ce sujet.
La loi prévoyait des réserves de quatre mois. On nous dit : « Ce sera finalement deux mois, mais ne vous inquiétez pas, nous vérifierons régulièrement l’application de ce décret. » J’estime que c’est largement insuffisant, et j’en appelle à appliquer la loi, c’est-à-dire à prévoir des réserves de quatre mois.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je vous remercie, madame la ministre, pour vos explications relatives au décret qui va paraître.
Notre rapporteur général a évoqué la question du coût. En Finlande, une discussion entre les entreprises du médicament et les autorités a permis d’aboutir à un accord prévoyant une prise en charge partielle négociée des coûts de stockage par les pouvoirs publics, qui demandent la constitution de ces stocks de sécurité pour protéger leur population. Par l’amendement n° 804 rectifié bis, je vous propose exactement le même type de dispositif, non pas unilatéral, mais négocié avec les entreprises du médicament.
Madame la ministre, vous avez indiqué que le décret prévoit une procédure dérogatoire permettant de porter le stock à quatre mois. Je rappelle toutefois que les durées moyennes de pénurie sont bien supérieures, et que le choix de stocks de quatre mois résultait d’un compromis adopté pour que chaque partie se sente entendue.
La procédure dérogatoire est complexe. Elle repose sur la décision du directeur général de l’ANSM, qui doit être appliquée dans les six mois suivant sa publication, ce qui peut prolonger la rupture du stock en question pendant une durée qui porte atteinte à la santé de la population.
J’entends les objections relatives au droit européen, mais nous verrons bien ! On ne va pas détricoter d’emblée une mesure de compromis qui a été acceptée par tout le monde et qui améliorerait une situation qui ne cesse de se dégrader. Ou alors, cessons de débattre de la gestion qui a été faite des stocks de masques à l’arrivée de la pandémie : réduisons les stocks à zéro et poursuivons tranquillement le même type de gestion.
Madame la ministre, nous proposons une solution raisonnable et négociée pour remédier à la dégradation des stocks de médicaments d’intérêt thérapeutique majeur, seuls visés dans mon amendement.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Les pénuries de médicaments sont un sujet majeur pour nos concitoyens. Elles angoissent tout le monde. Je suis sollicitée régulièrement par des personnes qui ont peur de ne pas pouvoir continuer leur traitement et qui se trouvent dans des situations scabreuses.
Le Gouvernement avance deux arguments.
Premièrement, cela coûte. De ce point de vue, l’exemple de la Finlande, cité par notre collègue Bernard Jomier, mérite tout à fait d’être étudié.
Deuxièmement, l’Union européenne. Or la Finlande est dans l’Union européenne. Si je suis très critique sur l’Union européenne telle qu’elle existe actuellement, je voudrais être certaine qu’elle est bien le problème. En effet, je connais assez les habitudes de notre grande administration, qui nous explique que telle disposition n’est pas conforme au droit européen, alors que c’est une autre partie du décret, ou même sa transposition qui est contestée. Si ça marche en Finlande, il n’y a pas de raison que ça ne marche pas en France !
Nous devons tenir bon sur cette position, car ce n’est pas la première fois que nous avons ce débat au Sénat. Mme Buzyn nous avait dit que la situation allait s’améliorer, que nous étions excessifs. Or la situation ne cesse de se dégrader, et pas seulement à cause du covid.
Si nous ne tenons pas bon sur cette position, nous allons encore avaliser l’impuissance de l’action publique au motif de l’Union européenne, motif sur lequel, personnellement, j’ai des doutes, vu que dans d’autres pays il n’en va pas ainsi. Je vous propose donc de voter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je voterai cet amendement, qui me semble extrêmement intéressant, et ce pour une raison très simple : dans la crise que nous avons traversée au mois de mars, l’absence de stocks a entraîné une angoisse importante au sein de la population et des difficultés de communication de la part du Gouvernement.
Il est donc nécessaire que nous reprenions les stocks en main. Cela doit passer par une négociation – c’est un point important – entre les autorités politiques et les laboratoires pharmaceutiques qui regardent cet amendement d’un œil un peu sévère.
Les stocks sont toutefois nécessaires pour rassurer l’ensemble de nos concitoyens, mais aussi les personnels soignants, qui, dans le contexte de la crise qui arrive, n’ont pas seulement l’angoisse de soigner, mais aussi celle de manquer de médicaments.
Je voterai donc cet amendement, des deux mains s’il le faut.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La question est bonne, mais la réponse ne l’est pas. Vous proposez de légiférer pour remédier à un problème de gestion des stocks ? Non ! Cela supposerait de disposer des entrepôts, des régulateurs, etc. De plus, il existe une multitude de médicaments, et tout cela ne peut se régler à l’échelon d’une entreprise.
Je suis conscient qu’il faut trouver une solution à ce problème, mais celle qui est proposée au travers de cet amendement n’est pas la bonne.
Cela étant dit, je suis ouvert à la discussion avec les industriels pharmaceutiques, qui seule nous permettra de trouver une réponse appropriée à ce problème de gestion des stocks et, ainsi, d’éviter la pénurie.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Madame Cohen, vous vous êtes élevée contre la non-recevabilité de votre amendement, mais celui-ci n’était pas identique à l’amendement n° 804 rectifié bis de M. Jomier. En effet, M. Jomier a prévu une diminution de l’assiette de contribution pour les médicaments concernés ; cette disposition justifie que l’on puisse discuter cet amendement dans le cadre d’un PLFSS.
Vous nous reprochez de ne pas vous avoir indiqué qu’il fallait rectifier votre amendement, mais, je suis au regret de vous le dire, tel n’est pas le rôle de la commission, qui a dû se prononcer sur la recevabilité de plus de 1 000 amendements. Il y a un droit d’amendement, auquel chacun tient, et ce sont aux auteurs d’un amendement qu’il revient de s’assurer de sa recevabilité.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
Article 17 bis (nouveau)
Le deuxième alinéa de l’article L. 138-19-9 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « La part de ces derniers correspondant aux six premiers mois de l’année civile est communiquée par l’assurance maladie au plus tard le 30 septembre de cette même année. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 960 rectifié ter, présenté par MM. Henno, Marseille et P. Martin, Mme Dindar, MM. Kern, Janssens et Moga, Mme Guidez, M. Levi, Mme Vermeillet, MM. Laugier, S. Demilly, Hingray, Lafon, Le Nay et Cazabonne, Mme Morin-Desailly et MM. Duffourg et Chauvet, est ainsi libellé :
I. – Au début
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Au premier alinéa de l’article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale, après la référence : « L. 162-22-7 » sont insérés les mots : « à l’exception, pour une période de trois ans suivant leur inscription en vue d’une prise en charge au titre de l’article L. 162-22-7, des produits et prestations innovants présentant un niveau d’amélioration du service attendu majeur, important ou modéré ».
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Pour l’année 2021, le montant Z mentionné à l’article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale est fixé à 2,09 milliards d’euros.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Cet amendement relatif aux dispositifs innovants vise à créer une clause de régulation des dispositifs médicaux en lieu et place du régime de la clause de sauvegarde pensé à l’origine pour le secteur du médicament. Loin de vider le mécanisme initial de sa substance, il s’agit essentiellement d’une mesure symbolique et cohérente, portant le signal fort de l’ambition de la France en matière d’innovation.
Les travaux du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS) doivent ainsi trouver leurs premières traductions via un traitement spécifique de la régulation de ce secteur. Actuellement, les dispositifs médicaux se voient appliquer une clause de sauvegarde inadaptée aux spécificités de ce secteur. Le secteur des dispositifs médicaux ne peut être traité avec les mêmes mécanismes budgétaires que ceux qui sont appliqués au médicament, en raison de différences de modèle économique, de processus technologiques et industriels, de tissus d’entreprises, de cycles d’innovation, etc.
Il est donc proposé de créer un régime distinct, conformément aux propositions formulées par le Gouvernement en première lecture à l’Assemblée nationale, en y ajoutant la sanctuarisation des dispositifs les plus innovants, qui représentent à peine 1 % en valeur des montants remboursés.
M. le président. L’amendement n° 288 rectifié quater, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Genet, Mme L. Darcos, MM. Piednoir et Savary, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Au premier alinéa de l’article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale, après la référence : « L. 162-22-7, », sont insérés les mots : « à l’exception, pour une période de deux ans suivant leur première inscription en vue d’une prise en charge au titre du même article L. 162-22-7, des produits et prestations innovants présentant un niveau d’amélioration du service attendu majeur, important ou modéré ».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Le présent amendement vise à exclure, pour une durée limitée, du périmètre d’application de la clause de sauvegarde sur la liste en sus des dispositifs médicaux les produits et prestations répondant aux deux critères suivants : un niveau d’amélioration du service attendu élevé et une inscription récente sur la liste en sus.
Cette exception temporaire permettrait de préserver les nouveaux dispositifs médicaux innovants pouvant nécessiter, dans un premier temps, une diffusion progressive dans les premières années de leur accès au marché, afin de répondre aux besoins d’une population cible qui ne bénéficiait pas auparavant d’une telle innovation.
M. le président. L’amendement n° 260 rectifié ter, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Genet, Mme L. Darcos, MM. Piednoir, Savary et Houpert, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
I. – Au début, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Après le premier alinéa de l’article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les produits et prestations bénéficiant d’une prise en charge au titre de l’article L. 165-1-5 du code de la sécurité sociale, ainsi que ceux présentant, après avis de la Haute Autorité de santé mentionnée à l’article L. 161-37 du même code, un niveau d’amélioration du service attendu majeur, important ou modéré, sont exclus du calcul du montant mentionné au premier alinéa pour une période de trois ans, selon des modalités définies par décret. »
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le présent article est applicable aux produits et prestations pris en charge à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Cet amendement a pour objet de susciter un débat spécifique et objectif sur la régulation des dispositifs médicaux, alors que cet enjeu n’a été jusqu’à présent abordé qu’au prisme du modèle des médicaments dont s’inspire cette régulation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission a émis un avis défavorable sur ces trois amendements, mais, à titre personnel, j’émettrai un avis de sagesse. En effet, il me semble de bon sens de ne pas se bloquer sur la clause de sauvegarde ; il convient au contraire d’assouplir le dispositif, et ce d’autant plus s’il améliore le service attendu.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Les dispositifs médicaux sont souvent assimilés aux médicaments alors qu’ils sont très hétérogènes – même s’il existe aussi d’importantes différences entre les types de médicaments.
Par leurs amendements, Olivier Henno et Alain Milon ciblent des dispositifs médicaux innovants qui contribuent à l’amélioration du service attendu, critère draconien – et sans doute le meilleur – pour juger du caractère innovant d’un dispositif, et qui sont inscrits sur la liste en sus.
Ces amendements me semblent donc de bon sens.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je ne suis pas de votre avis, madame la présidente, tant pour la restriction que pour l’exclusion de la clause de sauvegarde.
Vous souhaitez réduire ou supprimer le périmètre d’application de la clause de sauvegarde. Les dispositifs médicaux présentant un niveau d’amélioration du service attendu majeur à modéré sont la plupart du temps des produits à fort impact budgétaire pour l’assurance maladie. Les exclure du périmètre de la clause ou restreindre le périmètre de celle-ci pour tenir compte uniquement des produits anciens et à faible évolution de dépenses serait antinomique avec l’objectif de cette clause.
La clause de sauvegarde est un dispositif de sécurisation de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam), qui doit se déclencher uniquement en dernier recours. Elle n’a pas vocation à être le levier principal de la régulation des dépenses. Pour rappel, la clause de sauvegarde est plafonnée à 10 % de l’ensemble du chiffre d’affaires de l’entreprise exploitant un dispositif médical, ce qui doit permettre de rassurer les entreprises sur sa portée.
Le Gouvernement ne souhaite pas revenir sur cette mesure, votée l’année dernière, qui permet une régulation lisible et prévisible. La réduction du périmètre ou l’exclusion de certains produits de la clause de sauvegarde ajouterait de la complexité et rendrait plus difficiles les prévisions des entreprises.
J’émets donc un avis défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ces trois amendements n’étant pas identiques, je vous propose d’adopter l’amendement n° 960 rectifié ter, qui, sur le fond, me paraît le plus compatible avec ce que la commission souhaitait. Si nous l’adoptons, les amendements nos 288 rectifié quater et 260 rectifié ter n’auront plus d’objet.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 288 rectifié quater et 260 rectifié ter n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’article 17 bis, modifié.
(L’article 17 bis est adopté.)
Article 17 ter (nouveau)
À la fin du V de l’article L. 245-6 du code de la sécurité sociale, le taux : « 0,17 % » est remplacé par le taux : « 0,18 % ». – (Adopté.)
Article 17 quater (nouveau)
Avant le 1er septembre 2021, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’avenir de la clause de sauvegarde et des mécanismes actuels de soutenabilité des dépenses des médicaments face au développement des biothérapies. Ce rapport étudie l’opportunité de développer comme outil de soutenabilité la mise en place de bioproduction académique et notamment l’impact sur les dépenses de médicaments selon les modes d’organisation de la bioproduction académique.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 159 est présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales.
L’amendement n° 218 rectifié est présenté par Mmes Delmont-Koropoulis et Deromedi, M. Pellevat, Mmes Lassarade et Dumas, MM. Dallier et Milon, Mme Gruny, MM. Savary, Lefèvre et Charon, Mmes L. Darcos, Bonfanti-Dossat et Berthet, MM. Rapin, Bascher, H. Leroy, E. Blanc et Piednoir et Mme Lavarde.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 159.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le présent article prévoit la remise au Gouvernement d’un rapport sur les clauses de sauvegarde et l’opportunité de la bioproduction académique afin de rendre les dépenses relatives aux médicaments plus soutenables. Bien que ces deux sujets puissent être indirectement liés, l’objet de ce rapport semble assez mal « ficelé », si vous me permettez l’expression.
Le présent amendement vise donc à supprimer cet article.
M. le président. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour présenter l’amendement n° 218 rectifié.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Je vais tenter de clarifier le caractère « mal ficelé » de l’objet du rapport visé.
Contrairement à ce qui est réalisé dans la production industrielle, des innovations thérapeutiques ciblées et produites ponctuellement sont mises en place en fonction des spécificités des patients, notamment pour les immunothérapies cellulaires. De nombreux laboratoires et centres de recherche investissent massivement dans le développement de ces innovations, qui permettent de réduire les pertes de chances de survie pour de très nombreux patients.
Ces innovations particulières ont un coût très important de par leur caractère ciblé et personnalisé. C’est la raison pour laquelle nos collègues députés ont adopté un amendement créant cet article 17 quater, qui prévoit la remise par le Gouvernement d’un rapport évaluant l’opportunité de produire des biothérapies traitant de pathologies cancéreuses rares pour une utilisation à plus large échelle, ce qui permettrait de réduire le coût que cela représente pour la collectivité.
Cette disposition me paraît pour le moins bancale, car elle porte confusion entre les propriétés et capacités des produits traitant des cas ponctuels et spécifiques et ceux qui peuvent être produits industriellement. Les conditions du suivi de leur qualité et de leur efficacité, et l’assurance d’une équité de traitement pour l’ensemble des patients ne peuvent être garanties si l’on considère ces deux types de produits comme équivalents ou similaires.
Le présent amendement vise donc à supprimer l’article 17 quater. L’urgence de la maîtrise des comptes sociaux ne doit pas nous amener à voter des mesures contre-productives pour les soignants et les patients.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Lors de la première lecture de ce texte à l’Assemblée nationale, des députés ont demandé la remise d’un rapport analysant les voies de financement qui pourraient permettre l’accès des Français à ces médicaments. L’idée nous paraît pertinente.
J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 159 et 218 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l’article 17 quater est supprimé.
Article additionnel après l’article 17 quater
M. le président. L’amendement n° 808 rectifié, présenté par MM. Théophile, Lévrier, Iacovelli, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 17 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 1221-14 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au septième alinéa, les mots : « il peut directement demander à être garanti des sommes qu’il a versées » sont remplacés par les mots : « ou lorsque les tiers payeurs ont pris en charge des prestations mentionnées aux 1° à 3° de l’article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation, ils peuvent directement demander à être garantis des sommes qu’ils ont versées ou des prestations prises en charges » ;
2° Après le même septième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’office et les tiers payeurs, subrogés dans les droits de la victime, bénéficient dans le cadre de l’action mentionnée au précédent alinéa de la présomption d’imputabilité dans les conditions prévues à l’article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Les assureurs à l’égard desquels il est démontré que la structure qu’ils assurent a fourni au moins un produit sanguin labile ou médicament dérivé du sang, administré à la victime, et dont l’innocuité n’est pas démontrée, sont solidairement tenus de garantir l’office et les tiers payeurs pour l’ensemble des sommes versées et des prestations prises en charge. »
II. – Le I s’applique aux actions juridictionnelles engagées à compter de la date du 1er juin 2010, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée.
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Dans les années 1970 et 1980, nombre de patients ont été transfusés par des produits sanguins qui se sont révélés contaminés, notamment par les virus de l’hépatite C et de l’hépatite B.
Cinquante ans après, l’activité contentieuse continue. Alors que l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (Oniam) peut exercer un recours directement à l’encontre des assureurs des anciens centres de transfusion sanguine sur la base d’un régime de responsabilité sans faute, les organismes d’assurance maladie ne le peuvent pas et sont contraints d’agir contre l’Établissement français du sang, qui se charge d’appeler en garantie les assureurs sans pouvoir bénéficier du même régime de preuves et de responsabilité.
Cette situation met à mal les recours des tiers payeurs, qui ne peuvent que difficilement récupérer les débours, et impose à l’Établissement français du sang un rôle d’intermédiaire qui n’est pas efficient.
Cinquante ans après les faits, cet amendement vise à étendre au tiers payeur le droit d’action directe à l’encontre des assureurs des anciens centres de transfusion sanguine (CTS), droit qui est déjà ouvert à l’Oniam, pour permettre à chacun d’obtenir ce qui lui revient de droit.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17 quater.
TITRE II
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Article 18
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 131-8 est ainsi modifié :
a) Le 1° est ainsi modifié :
– à la fin du troisième alinéa, le taux : « 27,57 % » est remplacé par le taux : « 19,09 % » ;
– à la fin du dernier alinéa, le taux : « 19,06 % » est remplacé par le taux : « 27,54 % » ;
b) Le b du 3° est ainsi modifié :
– au début du deuxième alinéa, le taux : « 5,95 % » est remplacé par le taux : « 4,27 % » ;
– au début du quatrième alinéa, le taux : « 4,65 % » est remplacé par le taux : « 2,74 % » ;
– au début du cinquième alinéa, le taux : « 4,77 % » est remplacé par le taux : « 1,9 % » ;
– au début de l’avant-dernier alinéa, le taux : « 3,2 % » est remplacé par le taux : « 1,29 % » ;
– au début du dernier alinéa, le taux : « 3,07 % » est remplacé par le taux : « 0,2 % » ;
c) À la fin du e du même 3°, le taux : « 1,98 % » est remplacé par le taux : « 2,93 % » ;
d) Au f du 3°, après la référence : « I », sont insérés les mots : « , aux 1° et 2° du II, aux III et III bis » et, à la fin, le taux : « 0,23 % » est remplacé par le taux : « 1,91 % » ;
e) Le 3° bis est ainsi modifié :
– à la fin du a, le taux : « 8,6 % » est remplacé par le taux : « 6,69 % » ;
– il est ajouté un c ainsi rédigé :
« c) À la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, pour la part correspondant à un taux de 1,91 % ; »
f) Le 8° est ainsi rédigé :
« 8° Le produit de la taxe mentionnée au I de l’article L. 862-4 perçue au titre des contrats mentionnés au II bis du même article L. 862-4 est affecté au fonds mentionné à l’article L. 862-1.
« Le produit de la taxe mentionnée au premier alinéa du présent 8° perçue au titre des contrats mentionnés au II de l’article L. 862-4 est affecté :
« a) Au fonds mentionné à l’article L. 862-1, à hauteur de l’écart entre ses charges et ses autres produits ;
« b) Au fonds mentionné à l’article L. 815-26, à hauteur de ses charges ;
« c) À la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2, à hauteur du solde du produit résultant des affectations mentionnées aux a et b du présent 8° ; »
2° Le II de l’article L. 241-2 est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Par les personnes mentionnées à l’article L. 131-9. » ;
3° Au premier alinéa de l’article L. 612-5, les mots : « les branches mentionnées aux 1° et 3° de l’article L. 200-2 et » sont supprimés ;
4° Le second alinéa de l’article L. 635-4-1 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « du régime mentionné à l’article » sont remplacé par les mots : « des régimes mentionnés aux articles L. 632-2 et » ;
b) À la deuxième phrase, les mots : « ce régime » sont remplacés par les mots : « ces régimes ».
II (nouveau). – À compter du 1er janvier 2024, au f du 3° et au c du 3° bis de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, le taux : « 1,91 % » est remplacé par le taux : « 2,06 % ».
III (nouveau). – Le b des 1° et 2° du I de l’article 3 de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie sont abrogés.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, sur l’article.
Mme Michelle Meunier. Soixante-quinze ans après la création de la sécurité sociale, le Parlement créé une cinquième branche dédiée au soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.
Cela fait plus de vingt-cinq ans que les associations attendaient cette réforme. Le Président de la République et vous-même, madame la ministre, avez affirmé que la loi Grand âge et autonomie serait le marqueur de ce mandat. Nous attendons avec impatience sa discussion, dont vous nous avez indiqué qu’elle interviendrait prochainement.
La convergence et la coordination des politiques à destination des personnes âgées dépendantes et des personnes en situation de handicap est bienvenue ; nous l’avons rappelé lors de l’examen de l’article 16.
Outre ses missions, le financement de cette cinquième branche est un enjeu. À eux seuls, les besoins financiers de la perte d’autonomie liée à l’âge sont chiffrés à 6 milliards d’euros à partir de 2024, selon le rapport Libault, et à 9 milliards d’euros à partir de 2030. Dans ce PLFSS, si l’on exclut le transfert de 0,15 point de contribution sociale généralisée (CSG) jusqu’en 2024, les besoins à venir ne sont pas couverts.
Il est pourtant nécessaire de consacrer des moyens plus importants à cette branche, et ce pour deux raisons : pour répondre à l’augmentation démographique des besoins – en France, le nombre de personnes de plus de 75 ans aura augmenté de 15 % d’ici à 2040 ; et parce que nul ne peut se satisfaire des transferts à niveau constant de prise en charge. Les restes à charge pour les personnes âgées dépendantes sont trop élevés, tandis que les moyens dont disposent les personnels qui apportent des soins aux aînés ne le sont pas assez, que ce soit à domicile ou en établissement.
Par conséquent, les transferts de financement opérés des autres branches vers la nouvelle ne doivent pas cacher le fait que les moyens nouveaux sont dérisoires et qu’ils ne permettront pas, par exemple, de répondre au besoin d’augmentation des effectifs de 25 % – soit la création de 20 000 emplois supplémentaires – pour accorder les soins nécessaires et préserver la dignité des personnes en perte d’autonomie, alors même que les contributions nouvelles que nous avons présentées à l’article 16 ont été rejetées.
M. le président. L’amendement n° 160, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéas 18 à 23
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le présent amendement vise à supprimer les alinéas 18 à 23. En effet, la commission vous proposant de refuser, à l’article 37, le transfert à la sécurité sociale de l’allocation supplémentaire d’invalidité (ASI), le présent amendement, par anticipation et dans un souci de cohérence, a pour objet de supprimer l’organisation du financement de l’ASI au sein de la sécurité sociale, ce financement devant rester à la charge de l’État.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Monsieur le rapporteur général, permettez-moi de rappeler le premier alinéa du premier article du code de la sécurité sociale : « La sécurité sociale est fondée sur le principe de solidarité nationale. » Il n’y a donc aucun obstacle de principe à ce que l’allocation supplémentaire d’invalidité, qui relève de la solidarité nationale, soit financée par la sécurité sociale.
De plus, ce transfert à la sécurité sociale est cohérent, car l’ASI complète la pension d’invalidité, ses bénéficiaires remplissant les mêmes conditions médicales et administratives. Ce transfert permet un meilleur pilotage du risque d’invalidité, en ayant une vision unifiée de ces deux dépenses profondément complémentaires.
Pour mettre en œuvre ce transfert, il est nécessaire de prévoir de nouveaux circuits de financement. Les alinéas que vous souhaitez supprimer sont indispensables au transfert de l’ASI à la sécurité sociale.
J’émets donc un avis défavorable sur votre amendement
M. le président. L’amendement n° 1064, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 28
Remplacer la référence :
L. 632-2
par la référence :
L. 631-1
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le présent amendement vise à corriger une erreur de référence.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 18, modifié.
(L’article 18 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 18
M. le président. L’amendement n° 981, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa du I de l’article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle tient également compte des informations transmises par l’entreprise exploitant le médicament au comité, concernant les montants consacrés au financement d’opérations de recherche liées au produit de santé, les montants effectifs consacrés au développement et notamment les montants affectés au financement d’essais cliniques cités lors de l’enregistrement du produit indiquant le nombre d’essais et de patients inclus dans ces essais, les lieux, les crédits d’impôt, les bourses et autres financements publics dont les industriels ont bénéficié en lien avec ces activités de recherche et de développement, les éventuels achats de brevets liés au produit de santé, le coût d’opérations d’acquisition ou de spéculation éventuellement liées à l’acquisition de brevets, les coûts de production du produit de santé, ainsi que les coûts de commercialisation et de promotion engagés par les entreprises. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Le présent amendement vise à renforcer la transparence de l’ensemble des informations transmises par l’entreprise pharmaceutique au Comité économique des produits de santé, en intégrant dans la liste des critères de fixation des prix des médicaments, les montants consacrés au financement d’opérations de recherche liées aux produits de santé ainsi que les crédits d’impôt attribués par l’État.
Actuellement, les investissements réalisés par les industries, notamment en recherche et développement ainsi qu’en production, peuvent être pris en compte dans la définition du prix. Il faut, selon nous, arrêter de faire payer deux fois le prix au contribuable : une première fois avec le financement public de la recherche et développement dans le domaine biomédical ; une deuxième fois dans le prix final du médicament remboursé par l’assurance maladie.
En effet, l’État contribue très largement au développement des médicaments arrivant sur le marché : indirectement, en formant des scientifiques et des chercheurs dans son système d’enseignement supérieur et en investissant dans la recherche publique et le partage des découvertes scientifiques ; et directement, par l’octroi de subventions aux entreprises, telles que le crédit d’impôt recherche – dont nous avons beaucoup parlé –, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) ou encore le crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires (CITS).
En 2020, l’État a versé 5 milliards d’euros au seul titre du crédit d’impôt recherche, 20 milliards d’euros au titre du CICE et 5 milliards d’euros au titre du CITS, soit au total près de 30 milliards d’euros d’aides directes.
Pour ces raisons, nous demandons de prendre en compte, dans la définition du prix, les financements publics qui ont contribué à mettre au point un médicament.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il paraît difficile de tracer les financements qui ont été affectés à chaque médicament. L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. En complément des propos de M. le rapporteur général, j’ajouterai que l’objectif de transparence légitime que vous visez est également le nôtre. L’Assemblée nationale a ainsi adopté à l’unanimité un amendement du rapporteur général et de Mme Fiat tendant à introduire l’article 38 bis, qui prévoit que les entreprises mettent à la disposition du Comité économique des produits de santé (CEPS) le montant des investissements publics de recherche et développement dont elles ont bénéficié.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 971, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Insérer l’article ainsi rédigé :
I. – Après le premier alinéa de l’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2020, le taux des cotisations d’assurance maladie mentionné au premier alinéa est réduit de quatre points.
« Pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2021, le même taux est réduit de 2 points. »
II. – À compter du 1er janvier 2022, l’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement de repli vise à prévoir l’extinction progressive, en deux ans, de l’allégement de cotisations patronales d’assurance maladie, ou allégement CICE, qui représente un coût annuel d’un peu plus de 22 milliards d’euros pour l’assurance maladie.
Il s’agit d’une gabegie pour les comptes publics : ces 22 milliards s’ajoutent aux 40 milliards du CICE, doublés en 2019. En cumulant le crédit d’impôt et l’allégement patronal, ce sont 142 milliards d’euros qui ont ainsi été accordés aux entreprises au cours du quinquennat sans contrepartie, avec des effets pour le moins discutables. Le bénéfice de ce dispositif n’est en effet pas conditionné à des créations d’emplois, à des investissements écologiques, à des augmentations de salaire ou à des investissements dans la recherche ou la formation. Il y a fort à parier qu’il a plutôt servi à rémunérer les dividendes des actionnaires des grands groupes.
Ce gaspillage d’argent public n’a pas eu d’effet significatif, sinon très modeste, sur l’emploi. Le dernier rapport du comité de suivi du CICE de septembre 2020 évoque, au mieux, 100 000 emplois créés ou sauvegardés pour 90 milliards d’euros versés. Il est temps de mettre fin à ce gâchis, et il semble absolument inutile d’attendre un an de plus !
Vous allez évidemment nous répondre que cette mesure alourdira le prétendu coût du travail. Sachez qu’elle augmentera les recettes de la sécurité sociale de manière non négligeable. C’est bien le plus important aujourd’hui !
M. le président. L’amendement n° 923, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le premier alinéa de l’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2021, le taux des cotisations d’assurance maladie mentionné au premier alinéa est réduit de quatre points.
« Pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2022, le même taux est réduit de deux points. »
II. – À compter du 1er janvier 2023, l’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Nous évoquons ici des exonérations pérennes et non des aides exceptionnelles relatives à la crise sanitaire et à la crise économique que nous traversons.
Cet allégement met à mal le lien essentiel entre cotisations sociales et prestations sociales, qui fonde notre modèle de protection sociale.
Comme il a été dit précédemment, cet allégement est accordé aux entreprises sans conditionnalité, ce qui est la voie la plus rapide vers l’effet d’aubaine et, donc, vers l’inefficacité.
L’objet de cet amendement est de mettre fin, progressivement, à l’allégement de cotisations patronales d’assurance maladie, ou CICE. Je suggère que nous adoptions le rythme de décélération identique à celui qui a été pris pour la montée en charge du dispositif, ce qui laissera un temps d’adaptation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous avons largement débattu de ce sujet à maintes et maintes reprises.
M. Fabien Gay. Ça, oui !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vous avez d’ailleurs anticipé, madame Apourceau-Poly, la réponse que vous pensiez que j’allais vous faire, à savoir que le dispositif que vous proposez aboutirait à alourdir le coût du travail. Eh bien, oui ! Je répète également que ces exonérations sont intégralement compensées par l’État. Elles ne privent donc pas la sécurité sociale d’une ressource.
Cela étant, il est vrai que, de ce fait, la proportion entre les cotisations et les impôts change dans le financement de la sécurité sociale. On peut peut-être le regretter, mais il faut tout de même souligner qu’il a été nécessaire à un moment donné d’alléger les charges sur le travail pour maintenir un niveau d’emploi important. Je rappelle que le taux de chômage était aux alentours de 7 % avant la crise, contre 10 % auparavant, ce qui a constitué une baisse non négligeable.
M. Fabien Gay. C’est à mesurer !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Peut-être n’avons-nous pas créé suffisamment d’emplois, quoique ce soit toujours compliqué à mesurer.
Lorsqu’on a réduit le temps de travail, on a aussi entendu tout et son contraire, suivant qu’on était de droite ou de gauche.
M. Fabien Gay. Ça a créé 500 000 emplois !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je le répète, il est très difficile de faire une évaluation de telles mesures. Ce qu’on peut constater, c’est le taux de chômage qui en résulte quelques années après.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Les dispositifs adoptés en 2015, qui avaient leur importance à cette époque, sont encore plus cruciaux en cette période où l’on essaie vainement de conserver une activité économique ou, du moins, de la sauvegarder, de la maintenir à flot.
Mme Laurence Rossignol. Vainement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Ce faisant, on maintient des emplois et, par là même, du pouvoir d’achat.
Ce qui a été jugé valable en 2015 pourrait être considéré aujourd’hui comme d’autant plus nécessaire. (Exclamations sur les travées des groupes CRCE.)
M. le président. L’amendement n° 925, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article ne s’applique pas lorsque les revenus distribués au sens de l’article 109 du code général des impôts sont supérieurs à 10 % du bénéfice imposable du dernier exercice clos. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à l’amendement n° 923, que vous venez de rejeter.
Nous proposons de supprimer l’allégement de cotisations patronales « CICE » accordé aux entreprises qui distribuent un pourcentage du bénéfice supérieur à 10 % sous forme de dividendes ou d’actions gratuites. En cette période de crise sanitaire et sociale, ce dispositif permettrait d’établir un équilibre et une proportionnalité entre l’allégement de cotisations et les bénéfices distribués par les entreprises à leurs actionnaires. Il apporterait aussi un peu de décence !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’avis de la commission est défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 972, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est complété par sept alinéas ainsi rédigés :
« La réduction dont bénéficie chaque employeur peut être minorée en fonction :
« 1° Du nombre de fins de contrat de travail, à l’exclusion des démissions ;
« 2° De la nature du contrat de travail et de sa durée ;
« 3° De la politique d’investissement de l’entreprise ;
« 5° De l’impact de l’entreprise sur l’environnement ;
« 6° De la taille de l’entreprise ;
« Un décret précise les modalités de calcul de la minoration de la réduction du taux des cotisations d’assurance maladie. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement de repli, qui s’inscrit dans la continuité des amendements précédents, vise à prévoir des contreparties aux aides publiques, particulièrement en ce qui concerne la suppression des cotisations sociales de la branche famille pour les employeurs.
Alors que le Gouvernement fait la chasse aux fraudeurs aux allocations sociales et veut réduire le niveau d’indemnisation chômage, 120 milliards d’euros sont versés aux entreprises sans aucune contrepartie. Cela laisse un goût amer.
Il s’agit d’une question de principe d’efficacité des dépenses publiques ; les exonérations du CICE ont démontré leur échec à créer de l’emploi. Nous demandons a minima que les entreprises qui en bénéficient s’engagent à respecter certaines règles en matière environnementale, d’emploi, de salaires et d’investissement.
Je sais que certains trouvent que le groupe communiste républicain citoyen et écologiste fait toujours les mêmes propositions. Mais c’est parce que la politique menée par ce gouvernement est la même que celle qui est menée depuis des années, pour ne pas dire des décennies ! Je veux bien que M. le rapporteur général affirme que cette politique vise à sauver des emplois, mais, dans son propre département, Bridgestone est menacé de fermeture ! Or c’est une entreprise qui a bénéficié du CICE. Je veux bien qu’on parle du pouvoir d’achat, mais en quoi on améliore le pouvoir d’achat quand on refuse d’augmenter les salaires ?
Si nous faisons toujours les mêmes propositions, c’est parce qu’elles ont une logique : quand on emploie des recettes qui échouent, on en change ! Or, vous, vous continuez ! Vous nous dites : regardez autour de vous. Eh bien, justement, nous regardons autour de nous : nous voyons des salariés qui sont privés d’emploi, un pouvoir d’achat en berne et une crise qui s’aggrave et qui touche toutes les catégories sociales. Il faut que cela cesse !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’avis est défavorable, comme s’en doute certainement Laurence Cohen. Je ne vais pas argumenter davantage. Je l’ai déjà largement fait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 924, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est complété par dix alinéas ainsi rédigés :
« A. – Pour les entreprises soumises à l’obligation de déclaration de performance extra-financière prévue à l’article L. 225-102-1 du code de commerce, le bénéfice des réductions de cotisations prévues par le présent article est subordonné aux contreparties climatiques et sociales suivantes :
« 1° La publication, au plus tard le 1er juillet de chaque année, et à partir du 1er juillet 2021, d’un « rapport climat » qui :
« a) Intègre le bilan des émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre de l’entreprise, en amont et en aval de leurs activités ;
« b) Élabore une stratégie de réduction des émissions des gaz à effet de serre dans les conditions définies au B, qui ne doit pas prendre en compte les émissions évitées et compensées. Elle fixe des objectifs annuels de réduction des émissions de gaz à effet sur un horizon de dix ans, notamment en précisant les plans d’investissements nécessaires pour les atteindre. Ce rapport s’appuie sur les informations fournies dans le cadre des obligations de l’article L. 225-102-1 du code de commerce et de l’article L. 229-25 du code de l’environnement.
« Le ministre chargé de l’environnement définit, en concertation avec le Haut Conseil pour le Climat, la trajectoire minimale de réduction des émissions de gaz à effet de serre à mettre en œuvre par lesdites entreprises, en fonction du secteur d’activité et en conformité avec les budgets carbones fixés par la stratégie nationale bas-carbone.
« Les détails de la méthodologie sont fixés par décret ;
« 2° L’obligation de ne pas délocaliser et de ne pas transférer volontairement à l’étranger une partie ou de la totalité des activités de l’entreprise entraînant d’une diminution du nombre d’emplois en France, que ce soit au travers de filiales appartenant à la même entreprise ou par l’intermédiaire de sous-traitant auprès d’entreprises non affiliées.
« Cette obligation s’applique jusqu’à ce que l’allégement de cotisation prévue par le présent article soit compensé par une hausse équivalente de la fiscalité sur les entreprises concernées ;
« 3° L’obligation d’atteindre, avant le 1er janvier 2022, un index d’égalité entre les femmes et les hommes prévu par l’article L. 1142-8 du code du travail égal au moins à 75 points.
« B. – Le non-respect par les entreprises mentionnées au A des obligations mentionnées aux 1°, 2° et 3° est passible d’une sanction pécuniaire définie par décret. »
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Ce dernier amendement de repli a pour objet de conditionner les allégements de cotisations patronales accordés aux entreprises à des obligations en matière sociale, environnementale et fiscale. C’est la voie vertueuse de l’efficacité.
Premièrement, dans le but de respecter les accords de Paris, nous demandons la remise d’un rapport annuel faisant état de la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon de 2030 pour atteindre les objectifs fixés par le plafond national des émissions de gaz à effet de serre.
Deuxièmement, nous prévoyons l’obligation de ne pas délocaliser des activités à l’étranger entraînant une diminution d’emplois en France – ce point est totalement d’actualité, notamment par l’exemple de Bridgestone.
Troisièmement, nous proposons d’accélérer l’égalité salariale entre les femmes et les hommes par la mise en place d’un index d’égalité.
Pour respecter ces trois axes – écologique, social et économique –, nous sommes convaincus du nécessaire développement de mesures plus ambitieuses d’incitation plutôt que de perpétuer un chèque en blanc inopérant en matière de création d’emploi. C’est le sens du récent rapport sur l’évaluation du CICE de France Stratégie. Ces objectifs répondraient en outre à la forte sensibilité écologique et sociale de la société.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. C’est un avis défavorable pour les mêmes raisons : les politiques sociales et environnementales sont distinctes et ne relèvent pas des mêmes instruments juridiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Madame la sénatrice, nous sommes bien sûr attachés aux objectifs que vous évoquez : la réduction des émissions de gaz à effet de serre et l’égalité homme-femme – nous avons mis en place un index à cet effet.
La conditionnalité de certaines des aides accordées aux entreprises est un débat que nous pourrons avoir à moyen terme. Toutefois, dans le contexte actuel, l’adoption de votre amendement aurait pour conséquence de pénaliser fortement certaines entreprises, qui font déjà face à des difficultés très importantes. Notre avis est donc défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Lors de sa première intervention télévisée sur la crise sanitaire et les conséquences qu’il en tirait, le Président de la République a indiqué qu’il était prêt à se remettre en cause. Nous avions compris qu’il s’apprêtait à remettre en cause son soutien au libéralisme comme principal moteur de création de richesses et de régulation de nos sociétés.
Depuis le début de cette discussion, centrale, sur la question du médicament et de l’industrie pharmaceutique, j’observe que tous les amendements proposés sont systématiquement récusés par le Gouvernement. Ils visent pourtant à aider le Président de la République à remettre en cause ses dogmes antérieurs.
Nous pouvons légitimement nous interroger sur la valeur des engagements du Président de la République. Que veut-il dire lorsqu’il évoque l’idée de remettre en cause son addiction au libéralisme, alors que vous ne semblez nullement capable de soutenir des amendements visant justement à réguler la politique de santé ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Le prix du médicament, son accès, sa production en France et l’existence de stocks suffisants, c’est le cœur de la question. Or je ne vois absolument rien dans ce qui nous est proposé aujourd’hui qui va améliorer la situation. Résultat : on va continuer à pleurer sur l’impuissance publique, le déclin de la France, etc. Je ne sais pas si vous vous rendez compte à quel point ça démoralise les Français.
Là, il s’agit des conditionnalités des aides publiques.
On passe son temps à pleurer devant chaque fermeture d’usine, assurant que tout a été fait pour l’éviter. On s’en moque que vous ayez tout fait ! La réalité, madame Bourguignon, c’est qu’il y a une désindustrialisation massive. Et le covid va servir d’accélérateur ! Les entreprises sont déjà en train d’investir ailleurs, mais elles vont nous expliquer que c’est à cause de la crise du covid en France qu’elles sont obligées de fermer leurs usines dans notre pays. On le voit tous les jours !
Dites-nous que la puissance publique ne sert plus à rien, que la France est devenue une vaste terre de libre-échange et que plus on distribuera d’aides publiques plus on va soutenir notre économie. Ce discours, on aurait pu le croire il y a dix ou quinze ans – j’étais déjà dubitative –, mais, aujourd’hui, on ne peut plus le croire ! Chaque fois que vous accordez des aides publiques, ça continue, parce qu’elles ne sont pas conditionnées !
Personnellement, tout ce qu’on peut faire pour aider l’industrie française, je suis pour. Elle est dans un tel état que je n’ai pas d’états d’âme, à condition qu’on soit sûr que ces aides servent à quelque chose et qu’il ne s’agit pas juste de les engranger pour, finalement, ensuite, délocaliser.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Quant à la transition écologique, elle ne va pas se faire par simple prise de conscience. Il est vrai que les entreprises sont en situation de concurrence, mais il nous faut tirer notre compétitivité en nous basant sur ces critères. Ça ne va pas se faire comme ça, spontanément, il faut que la puissance publique conditionne ses aides ! Or, madame Bourguignon,…
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … le Président de la République a tout fait pour qu’il n’y ait plus de contreparties.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il a tout fait pour transformer le CICE en exonération de cotisations sociales.
M. le président. Il faut conclure, madame Lienemann !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Vous savez donc très bien que, actuellement, les aides ne sont pas conditionnées.
M. le président. Mes chers collègues, nous avons royalement examiné vingt amendements en une heure et quart. Si nous continuons à ce rythme, il restera vingt-cinq heures de débat, ce qui veut dire que la séance de demain, samedi, ne suffira pas à tout boucler. Moi, je « m’en tape », je suis Francilien. Je peux donc être là dimanche. Toutefois, je vous invite à respecter votre temps de parole, même si, je le reconnais, ce sont des sujets importants.
La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Les colères exprimées au sein de cet hémicycle par Marie-Noëlle Lienemann, Laurence Cohen, Cathy Apourceau-Poly ou Fabien Gay correspondent à des colères rentrées de la majorité des Français. Elles sont tellement rentrées qu’elles se traduisent par une abstention au moment des élections et, plus généralement, par une défiance envers le politique. Cela mène au populisme et à des aventures extrêmement graves pour notre République.
Madame la ministre, oui, nous critiquons vos choix politiques, mais ce qui vient d’être dit touche tous les courants politiques de cette assemblée. L’État ne peut pas tout, a-t-on entendu, et pas seulement de la part du Président de la République Macron et de ses Premiers ministres. On assiste depuis plusieurs décennies à une déliquescence de la force d’action de l’État, notamment sur ces questions de répartition des richesses. Il est donc normal qu’on aborde le sujet ici.
Précédemment, sur les stocks de médicaments, on nous a dit que l’État n’avait pas tous les leviers. Maintenant, on nous dit qu’on ne peut pas partager les dividendes des entreprises pour financer la protection sociale.
Vous venez d’évoquer, madame la ministre, un débat que nous pourrons avoir à moyen terme sur la conditionnalité des aides. Cela intéresse tous les parlementaires. Que signifie donc ce moyen terme mentionné par le Gouvernement pour poser des conditions à l’ensemble des subventions versées aux entreprises ?
Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
M. Pascal Savoldelli. Merci de nous répondre, madame la ministre !
M. Pascal Savoldelli. Pas de réponse ?
M. le président. Le Gouvernement peut choisir de ne pas répondre.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 967 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est abrogé.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise à supprimer les exonérations de cotisations sociales patronales sur les bas salaires, appelées « zéro cotisation Urssaf ». C’est un autre dispositif très coûteux produisant des effets économiques limités aux secteurs connaissant déjà un haut niveau de main-d’œuvre. Il incite les employeurs à contenir certaines augmentations en bas de l’échelle salariale pour continuer à bénéficier à plein des allégements, conduisant ainsi à ce que certains salariés se trouvent durablement rémunérés au voisinage du SMIC. C’est ce que l’on dénomme la « trappe à bas salaires », depuis le relèvement des exonérations à 3,5 SMIC avec l’intégration du CICE. Il y a un effet d’opportunité pour les postes en bas de l’échelle ; mais lorsque l’on progresse au-dessus du SMIC, les employeurs se refusent à augmenter les salaires.
Ces indications datant d’avant la crise sanitaire et économique, on peut penser que la situation, au contraire de s’améliorer, s’est dégradée.
M. le président. L’amendement n° 968, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° La première phrase du troisième alinéa du III de l’article L. 241-13 est complétée par les mots : « , sans pouvoir excéder 20 % à compter du 1er janvier 2021 et 10 % à compter du 1er janvier 2022 » ;
2° Au II de l’article L. 243-6-1, les mots : « des dispositions relatives à la réduction dégressive de cotisations sociales prévue à l’article L. 241-13, » sont supprimés ;
3° Au II de l’article L. 243-6-2, au premier alinéa du III de l’article L. 243-6-3 à l’article L. 243-6-7, les mots : « sur la législation relative à la réduction dégressive de cotisations sociales mentionnée à l’article L. 241-13, » sont supprimés ;
4° À l’article L. 711-13, les mots : « des articles L. 241-13 et » sont remplacés par les mots : « de l’article ».
II. – Après le taux : « 10 % », la fin de la deuxième phrase de l’article L. 2242-7 du code du travail est ainsi rédigé : « du chiffre d’affaires annuel. »
III. – Aux l’article L. 741-4 et L. 741-15 du code rural et de la pêche maritime, la référence : « L. 241-13, » est supprimée.
IV. – L’article 8-2 de l’ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales est abrogé.
V. – L’article 4 de la loi n° 96-1143 du 26 décembre 1996 relative à la zone franche de Corse est abrogé.
VI. – Au cinquième alinéa du VI de l’article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d’orientation et d’incitation relative à la réduction du temps de travail, les mots : « à l’article L. 241-13 et » sont supprimés.
VII. – L’article 10 de la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l’emploi est abrogé.
VIII. – Les dispositions des II à VII ci-dessus entrent en vigueur le 1er janvier 2022.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. J’invite ceux qui pensent que le moment n’est pas opportun pour remettre en cause les aides publiques aux entreprises à voter le présent amendement. Il vise également à supprimer des exonérations sur les bas salaires, mais de manière progressive, afin de donner le temps aux entreprises de s’y préparer.
M. le président. L’amendement n° 571, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le VIII de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est ainsi rétabli :
« VIII. – La réduction est supprimée lorsque l’employeur n’a pas conclu d’accord ou de plan relatif à l’égalité professionnelle dans le cadre des obligations définies aux articles L. 2242-1 et L. 2242-3 du code du travail. Cette diminution de 100 % du montant de la réduction est cumulable avec la pénalité prévue à l’article L. 2242-5-1 du même code. »
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cet amendement a pour objet de supprimer des exonérations de cotisations pour les entreprises ne respectant pas l’égalité professionnelle et salariale homme-femme.
Une très grande majorité de femmes ont des emplois précaires et vivent avec des salaires au-dessous de celui des hommes à qualification comparable. Cet écart s’est réduit pendant quelques années, mais il stagne depuis quatre ou cinq ans. Le temps de l’action est venu ! Les bonnes intentions ne suffisent plus !
Le name and shame, l’effet de honte, ne marche pas en France – nous ne sommes pas de culture anglo-saxonne – ; d’ailleurs, aux États-Unis, le résultat n’est pas non plus mirobolant. Je préconise donc une sanction pour ceux qui n’appliquent pas la loi, c’est-à-dire la suppression des exonérations de cotisations patronales.
M. le président. L’amendement n° 964, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« .… – La réduction est supprimée lorsque l’employeur n’a pas conclu d’accord relatif à l’égalité professionnelle dans le cadre des obligations définies aux articles L. 2242-5 et L. 2242-8 du code du travail dans les conditions prévues aux articles L. 2242-1 à L. 2242-4 du même code ou qu’il n’a pas établi le plan d’action mentionné à l’article L. 2323-47 dudit code. Cette diminution de 100 % du montant de la réduction est cumulable avec la pénalité prévue à l’article L. 2242-7 du même code. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement est similaire au précédent, ce qui m’amène à poursuivre la démonstration de ma collègue en donnant quelques chiffres.
Depuis mercredi dernier, 16h16, les femmes travaillent gratuitement, et ce jusqu’à la fin de l’année, si on tient compte des écarts de salaires entre les femmes et les hommes. Selon les données de l’office statistique de l’Union européenne, Eurostat, le salaire des Françaises est de 15,5 % inférieur à celui des hommes, contre 15,4 % en 2019. Cela représente, cette année, 39,2 jours ouvrés de travail rémunéré.
Le fossé entre le salaire horaire brut moyen des femmes et des hommes ne se résorbe que fort lentement malgré les lois successives en matière d’égalité professionnelle. Selon une étude du ministère du travail réalisée auprès de 40 000 entreprises françaises de plus de cinquante salariés, seules 6 % des entreprises versent des salaires égaux à leurs employés ; pour les entreprises de 1 000 salariés, seules 1 % d’entre elles sont exemplaires.
Il va sans dire que la crise sanitaire que nous traversons n’est pas facteur d’amélioration en la matière. C’est pourquoi il nous semble important d’aller plus loin que les mesures qui ont été prises contre les inégalités salariales. Nous sommes en 2020 : nous avons suffisamment patienté ! Il faut au minimum conditionner les aides aux entreprises à des critères d’égalité beaucoup plus stricts et beaucoup plus encadrés. Faisons une différence entre les entreprises vertueuses et celles qui ne respectent pas à la loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’avis est défavorable.
La mesure proposée par les deux premiers amendements reviendrait à alourdir de plus de 50 milliards d’euros le coût du travail.
L’absence d’accord ou de plan relatif à l’égalité professionnelle fait déjà l’objet d’une sanction financière, qui peut atteindre 1 % des rémunérations versées. Je pense donc que, de ce point de vue, on ne peut être que satisfait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Même avis que M. le rapporteur général. (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Nous savons qu’il y a une sanction financière qui peut atteindre 1 % des rémunérations. J’ai fait exprès de vous donner des chiffres montrant que cela ne fonctionne pas. Vous nous dites que nous devrions être satisfaits, car il y a la loi. Nous ne le sommes pas, puisque ces remèdes ne fonctionnent pas en matière d’égalité salariale.
Il faut donc aller plus loin ou choisir une autre méthode, c’est ce que nous proposons. Si les mesures prises par le Gouvernement fonctionnaient, ces amendements n’auraient pas lieu d’être.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote. (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je n’en ai rien à faire de vos protestations, chers collègues : j’exerce mon droit de parlementaire ! Je sais que ce débat peut vous gêner,…
Mme Frédérique Puissat. Pas du tout !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … mais pas nous.
Ces amendements apporteraient des recettes à la protection sociale. On a calculé que, s’il y avait l’égalité salariale homme-femme, près de 70 % du déficit de la protection sociale serait résorbé. Ça, pour serrer le kiki aux avantages sociaux, vous êtes toujours là !
Comme je l’ai dit hier, notre République n’est crédible que si l’égalité progresse. Or elle régresse, en tout cas elle n’avance pas assez pour ce qui est de l’égalité homme-femme.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.
Mme Annick Billon. Je vais voter ces amendements, car, effectivement, les inégalités se creusent. Sur ce sujet, nous n’avons pu avancer que par la contrainte.
Mme Laurence Rossignol. Elle est passée où, la grande cause du quinquennat ?
M. le président. L’amendement n° 973, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale, le nombre : « 3,5 » est remplacé par le nombre : « 1,6 ».
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Je sais que nous ne serons pas d’accord sur cet amendement de repli concernant le CICE. Vous pariez sur le ruissellement, tandis que nous vous opposons la question de la conditionnalité.
Permettez-moi de revenir sur ce qu’a dit M. le rapporteur général sur les estimations qu’on peut avoir sur les 35 heures suivant qu’on est de gauche ou de droite.
Eh bien, si, il est possible de les évaluer ! L’Insee ainsi que la Dares, l’outil statistique du ministère du travail, ont évalué les effets des 35 heures entre 300 000 et 400 000 créations nettes d’emplois. Si vous avez une autre étude qui prouve le contraire, nous aimerions en disposer.
Pour en revenir au CICE, je citerai le dernier rapport de France Stratégie – vous entendez, ce n’est pas le groupe communiste, mais une institution rattachée au Premier ministre ! –, particulièrement savoureux sur le sujet : « Les conclusions sont plus riches que celles des rapports précédents grâce à la distinction des effets sur les groupes fiscaux et les entreprises individuelles. Le CICE aurait permis de créer ou sauvegarder » – souvenez-vous du badge « Un million d’emplois », mes chers collègues : on nous avait parlé de créations nettes ! – « environ 115 000 emplois en 2014 et autour de 100 000 en moyenne sur les périodes 2014-2015 et 2014-2016. » On n’a plus les chiffres à partir de 2017, car ils ne sont plus rendus publics.
Je poursuis : « L’effet serait très hétérogène entre les entreprises : l’effet sur l’emploi viendrait uniquement des entreprises individuelles tandis que les groupes fiscaux les plus bénéficiaires du CICE n’auraient pas systématiquement créé plus d’emplois. » Vous comprenez pourquoi nous défendons la conditionnalité des aides accordées aux très grands groupes.
« L’analyse sectorielle reste peu concluante : les résultats ne sont pas robustes sur l’emploi dans l’industrie tandis que l’effet emploi dans le tertiaire n’est pas directement interprétable comme étant lié au CICE. » Et les effets sont quasi nuls sur les prix et les investissements !
Il n’y a pas mieux que la lecture d’un rapport de France Stratégie pour démontrer que le CICE a bénéficié non pas à l’emploi, mais plutôt aux actionnaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Si la question de l’efficacité d’une réduction des cotisations – qui va aussi loin dans l’échelle des salaires que 3,5 fois le SMIC – peut se poser, est-ce bien le meilleur moment de remettre en cause ce dispositif et d’alourdir le coût du travail, alors que nous traversons une période – certes, pour d’autres raisons – de chômage élevé ?
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Fabien Gay. Pas de réponse ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 973.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 19
Est approuvé le montant de 5,3 milliards d’euros correspondant à la compensation des exonérations, réductions ou abattements d’assiette de cotisations ou contributions de sécurité sociale, mentionné à l’annexe 5 jointe au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, sur l’article.
M. Bernard Jomier. Le présent article approuve un montant de 5,3 milliards d’euros, correspondant à la compensation des exonérations, des réductions ou des abattements d’assiette de cotisations ou de contributions de sécurité sociale pour 2021. Je voudrais juste appeler l’attention sur le fait qu’il nous paraît curieux que ce montant n’ait pas bougé d’un iota depuis le début de l’examen de ce texte, d’autant que les incertitudes pour 2021 sont importantes.
Madame la ministre, pouvez-vous nous expliquer comment ce montant a été fixé ? Prend-il en compte l’ensemble des amendements qui prévoient de nouvelles mesures fiscales et qui ont été votés à la fois à l’Assemblée nationale et au Sénat ? En effet, si l’on veut bien entendre que cet article présente un caractère estimatif et informatif, et non normatif, encore faudrait-il qu’il soit vraiment estimatif et informatif !
M. le président. L’amendement n° 961, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Si vous me le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° 962.
M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 962, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, et ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 136-2 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Le montant de la contribution est majoré de 15 % pour tout revenu d’activité ou du patrimoine dépassant un montant dépassant un seuil fixé par un décret en Conseil d’État, sans que ce montant puisse excéder quatre fois le salaire horaire minimum légal. »
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Avec ces deux amendements, nous nous opposons complètement à ce que le Gouvernement défend et, d’abord, à la réponse que le ministre Dussopt a faite à notre motion tendant à opposer la question préalable, réponse qui est évidemment révélatrice de la vision du Gouvernement sur la sécurité sociale.
On peut le dire, il s’agit ici d’un débat politique avec deux visions qui s’affrontent.
D’un côté, les tenants d’une participation plus forte de l’État dans le financement de la sécurité sociale plaident pour le recours à des contributions comme la CSG, qui est payée essentiellement par les salariés et les retraités, parce qu’ils considèrent que la sécurité sociale est finalement l’extension des dépenses sociales de l’État en matière de santé, de famille, de vieillesse, de retraites et de perte d’autonomie.
De l’autre, on trouve les tenants – dont nous faisons partie – d’une vision dans laquelle la sécurité sociale et l’État ont des rôles complémentaires mais distincts. Cette position fait davantage référence aux racines de la sécurité sociale de 1945 : nous considérons que celle-ci est une caisse commune où l’on partage le produit de la valeur ajoutée, une caisse pour laquelle les employeurs et les travailleurs cotisent selon leurs moyens et reçoivent selon leurs besoins.
Ce n’est pas être ringard que de défendre cette sécurité sociale, puisque, contrairement aux start-up et autres entreprises privées qui ont fait faillite, celle-ci a fait la démonstration de sa résistance et de sa capacité d’adaptation durant la pandémie de covid-19.
Alors que l’article 19 prévoit la compensation des exonérations de cotisations sociales par l’État, nous rappelons notre opposition au principe même d’exonérations de cotisations sociales. Pour nous, derrière la participation commune de la cotisation sociale, il y a une grande partie du pacte social. Si l’on continue d’exonérer les entreprises de leur contribution à la sécurité sociale et de remettre en cause l’universalité des prestations sociales, le pacte s’écroulera.
Dans la période actuelle, nous pensons qu’il faudrait renforcer ce pacte et le moderniser. C’est le sens de notre amendement n° 962, qui vise à majorer les cotisations des plus hauts salaires, alors que les écarts de salaires ont fortement augmenté ces dernières années.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission est défavorable à l’amendement n° 961, dans la mesure où l’article 19 ne présente qu’un caractère informatif et non normatif.
Avec l’amendement n° 962, vous proposez de majorer la CSG sur les hauts revenus. Je rappelle que la CSG a été créée à côté de l’impôt sur le revenu, qui est progressif, pour que l’on ait un impôt le plus simple possible, à large assiette, à taux unique et relativement modéré. En faire un impôt progressif entraînerait le mitage de son assiette et diminuerait son rendement à terme. Compte tenu du risque encouru, il convient de conserver ces deux impôts sur leurs bases actuelles.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Vous proposez de supprimer l’article 19, alors qu’il s’agit d’un article obligatoire et prévu par la loi organique, qui approuve le montant de la compensation des exonérations de cotisations sociales par des crédits budgétaires.
L’amendement n° 961 n’aurait aucun effet sur le niveau de la compensation des mesures d’exonération par le budget de l’État. Le montant budgété – M. Jomier me posait la question – correspond au coût des exonérations ciblées, compensé à l’euro près à la sécurité sociale par le budget de l’État.
Conformément au principe de l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, les allégements généraux ne sont pas inclus dans le champ de cette compensation. Pour autant, leur coût est intégralement compensé à la sécurité sociale, et de manière pérenne, par une fraction de TVA affectée à la sécurité sociale.
Concernant l’amendement n° 962, je compléterai l’argumentation du rapporteur général en indiquant que cet amendement s’oppose à des principes constitutionnels, notamment celui d’égalité devant les charges publiques. En effet, madame la sénatrice, vous ne définissez pas le niveau de revenu à partir duquel la majoration serait appliquée. Or, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, la CSG est une imposition de toute nature ; l’ensemble des règles qui la concernent en matière de taux et d’assiette doivent donc être prévues par la loi et ne peuvent être renvoyées à un décret.
Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Je mets aux voix l’article 19.
(L’article 19 est adopté.)
Article additionnel après l’article 19
M. le président. L’amendement n° 965, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À titre expérimental et jusqu’au 31 décembre 2021, un dispositif d’exonération de cotisations, nommé « Objectif 32 heures », est institué. Il est mis en œuvre au bénéfice des entreprises situées sur le territoire national qui embauchent, en contrat à durée déterminée, un salarié pour une durée de trente-deux heures, payée trente-cinq heures, dans des territoires dont la liste est fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de l’emploi, de santé et du budget.
Les conditions de mise en œuvre de ce dispositif sont définies par décret.
Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2021.
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation au plus tard le 15 septembre 2022.
II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. La crise sanitaire a entraîné la suppression de centaines de milliers d’emplois, et, nous le voyons chaque jour, ce n’est malheureusement pas terminé… Il paraît donc urgent de mieux répartir le temps de travail en réduisant le temps hebdomadaire travaillé par toutes et tous.
Nous proposons d’instaurer une expérimentation intitulée « Objectif 32 heures », correspondant à une exonération de cotisations pour les salariés qui auront signé un contrat de 32 heures payées 35. L’expérimentation permettra d’étudier l’impact d’une telle mesure sur la productivité de l’entreprise, la santé des salariés, ainsi que son effet sur les besoins en termes de recrutement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission constate que, pour une fois, vous êtes favorables aux exonérations de cotisations… Mais, comme c’est dans le but de réduire la durée du temps de travail à 32 heures, nous y sommes défavorables.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 965.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 20 et annexe C
Pour l’année 2021, sont approuvées les prévisions de recettes, réparties par catégorie dans l’état figurant en annexe C à la présente loi, et le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :
(En milliards d’euros) |
|||
Recettes |
Dépenses |
Solde |
|
Maladie |
199,4 |
219,1 |
-19,7 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
14,8 |
14,1 |
0,6 |
Vieillesse |
245,5 |
251,9 |
-6,4 |
Famille |
50,5 |
49,3 |
1,1 |
Autonomie |
31,3 |
31,6 |
-0,3 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
527,4 |
552,0 |
-24,6 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse |
525,4 |
552,4 |
-27,0 |
Annexe C
État des recettes, par catégorie et par branche, des régimes obligatoires de base et du régime général ainsi que des recettes, par catégorie, des organismes concourant au financement de ces régimes
I. – Régimes obligatoires de base
(En milliards d’euros) |
||||||||
Maladie |
Vieillesse |
Famille |
Accidents du travail/ maladies profession -nelles |
Auto -nomie |
Régimes de base |
Fonds de solidarité vieillesse |
Régimes de base et Fonds de solidarité vieillesse |
|
Cotisations effectives |
75,1 |
142,1 |
31,0 |
13,7 |
0,0 |
260,1 |
0,0 |
260,1 |
Cotisations prises en charge par l’État |
2,4 |
2,5 |
0,7 |
0,1 |
0,0 |
5,7 |
0,0 |
5,7 |
Cotisations fictives d’employeur |
0,4 |
41,6 |
0,0 |
0,3 |
0,0 |
42,4 |
0,0 |
42,4 |
Contribution sociale généralisée |
48,5 |
0,0 |
12,4 |
0,0 |
28,0 |
88,5 |
16,9 |
105,5 |
Impôts, taxes et autres contributions sociales |
65,2 |
21,1 |
5,5 |
0,0 |
2,8 |
94,6 |
0,0 |
94,6 |
Charges liées au non-recouvrement |
-0,9 |
-1,0 |
-0,1 |
-0,2 |
-0,1 |
-2,2 |
-0,2 |
-2,4 |
Transferts |
1,8 |
38,1 |
0,2 |
0,1 |
0,4 |
28,8 |
0,0 |
10,1 |
Produits financiers |
0,0 |
0,3 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,3 |
0,0 |
0,3 |
Autres produits |
7,0 |
0,5 |
0,8 |
0,6 |
0,0 |
8,8 |
0,0 |
8,8 |
Recettes |
199,5 |
245,2 |
50,4 |
14,7 |
31,2 |
526,9 |
16,7 |
525,0 |
II. – Régime général
(En milliards d’euros) |
||||||||
Maladie |
Vieillesse |
Famille |
Accidents du travail/ maladies profession -nelles |
Auto- nomie |
Régimes de base |
Fonds de solidarité vieillesse |
Régimes de base et Fonds de solidarité vieillesse |
|
Cotisations effectives |
74,4 |
89,7 |
31,0 |
12,7 |
0,0 |
206,1 |
0,0 |
206,1 |
Cotisations prises en charge par l’État |
2,4 |
2,3 |
0,7 |
0,1 |
0,0 |
5,5 |
0,0 |
5,5 |
Cotisations fictives d’employeur |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
Contribution sociale généralisée |
48,4 |
0,0 |
12,4 |
0,0 |
28,0 |
88,5 |
16,9 |
105,4 |
Impôts, taxes et autres contributions sociales |
65,2 |
16,6 |
5,5 |
0,0 |
2,8 |
90,1 |
0,0 |
90,1 |
Charges liées au non-recouvrement |
-0,9 |
-0,7 |
-0,1 |
-0,1 |
-0,1 |
-2,0 |
-0,2 |
-2,2 |
Transferts |
1,8 |
29,1 |
0,2 |
0,0 |
0,4 |
19,7 |
0,0 |
2,2 |
Produits financiers |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
Autres produits |
6,7 |
0,3 |
0,8 |
0,5 |
0,0 |
8,2 |
0,0 |
8,2 |
Recettes |
197,9 |
137,4 |
50,4 |
13,2 |
31,2 |
416,2 |
16,7 |
415,4 |
III. – Fonds de solidarité vieillesse
(En milliards d’euros) |
|
Fonds de solidarité vieillesse |
|
Cotisations effectives |
0,0 |
Cotisations prises en charge par l’État |
0,0 |
Cotisations fictives d’employeur |
0,0 |
Contribution sociale généralisée |
16,9 |
Impôts, taxes et autres contributions sociales |
0,0 |
Charges liées au non-recouvrement |
-0,2 |
Transferts |
0,0 |
Produits financiers |
0,0 |
Autres produits |
0,0 |
Recettes |
16,7 |
– (Adopté.)
Article 21
Pour l’année 2021, sont approuvées les prévisions de recettes, réparties par catégorie dans l’état figurant en annexe C à la présente loi, et le tableau d’équilibre, par branche, du régime général :
(En milliards d’euros) |
|||
Recettes |
Dépenses |
Solde |
|
Maladie |
197,9 |
217,6 |
-19,7 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
13,2 |
12,7 |
0,5 |
Vieillesse |
137,6 |
144,7 |
-7,2 |
Famille |
50,5 |
49,3 |
1,1 |
Autonomie |
31,3 |
31,6 |
-0,3 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) |
416,5 |
442,0 |
-25,4 |
Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse |
415,8 |
443,7 |
-27,9 |
– (Adopté.)
Article 22
I. – Pour l’année 2021, sont approuvées les prévisions de recettes, réparties par catégorie dans l’état figurant en annexe C à la présente loi, des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale.
II. – Pour l’année 2021, l’objectif d’amortissement de la dette sociale par la Caisse d’amortissement de la dette sociale est fixé à 17,1 milliards d’euros.
III. – Pour l’année 2021, les prévisions de recettes par catégorie affectées au Fonds de réserve pour les retraites sont fixées à :
(En milliards d’euros) |
|
Prévisions de recettes |
|
Recettes affectées |
0 |
Total |
0 |
IV. – Pour l’année 2021, les prévisions de recettes par catégorie mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse sont fixées à :
(En milliards d’euros) |
|
Prévisions de recettes |
|
Recettes affectées |
0 |
Total |
0 |
M. le président. L’amendement n° 1041, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Une cotisation spécifique est prélevée sur les revenus générés par les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes privés à but lucratif, dont le taux et l’assiette sont définis par décret.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. La crise sanitaire a mis en lumière les profondes carences des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, en particulier celles des établissements à but lucratif. La surmortalité dans ce type d’Ehpad démontre l’urgence d’encadrer les multinationales, qui préfèrent réaliser des profits sur le dos et la santé de nos aînés, plutôt que d’investir pour protéger la santé des résidents et résidentes.
Après avoir encouragé le secteur privé à investir et à construire des maisons de retraite sans fixer de règles en matière de qualité d’accueil, on constate que, aujourd’hui, dans ces établissements, cette qualité n’est pas supérieure à celle que l’on trouve ailleurs.
En 2018, un reportage de l’émission Envoyé Spécial… (Rires sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme Frédérique Puissat. Quelle référence !
M. le président. Laissez l’oratrice s’exprimer !
Mme Cathy Apourceau-Poly. … sur les conditions d’accueil des personnes âgées a créé un choc. Un tel esclavage moderne n’est pas acceptable, et on doit sérieusement s’interroger sur la philosophie consistant à gagner de l’argent sur le dos des personnes âgées.
Avec notre amendement, nous voulons envoyer un message au Gouvernement comme aux multinationales qui gèrent les résidences pour personnes dépendantes : la santé de nos aînés n’est pas une marchandise comme une autre. Pour s’en convaincre, nous entendons soumettre les revenus tirés des Ehpad privés à but lucratif à une contribution permettant de financer les établissements publics et privés non lucratifs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Instaurer une discrimination en fonction d’un statut pour une même activité n’est pas évident et soulève une question en termes d’égalité devant les charges publiques.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Même avis que la commission sur l’amendement.
En réponse à ce que vous venez de dire, madame la sénatrice, en ces temps de crise sanitaire, je tiens avant tout à rendre hommage aux Ehpad devant la Haute Assemblée et en présence des sénateurs. (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.)
Évoquer un document à charge…
Mme Frédérique Puissat. Exactement !
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. … – on peut tous se procurer des documents de ce genre ! – pour justifier vos propos ne me semble pas une bonne chose. En ce moment, compte tenu de ce que nous vivons, de la crise sanitaire que traversent les soignants et les dirigeants de toutes ces structures, fédérations et établissements, avec lesquels j’étais encore hier, il serait préférable de les soutenir plutôt que de relayer ce genre de documentaire. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Protestations sur les travées des groupes CRCE et SER.)
Mme Frédérique Puissat. Exactement !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Vous plaisantez ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Selon une enquête publiée il y a deux ans par la CNSA, le montant moyen des retraites est de 1 376 euros par mois – le minimum vieillesse s’élève, lui, on le sait, à 803 euros.
Le coût médian d’une chambre dans un Ehpad privé est de 2 620 euros ; à Paris ou dans les Hauts-de-Seine, ce coût atteint même 3 154 euros. L’accueil n’est pas forcément de meilleure qualité, le taux d’encadrement y est généralement inférieur à celui du secteur public et s’élève, selon la CNSA, à 61 personnes pour 100 résidents, contre 80 % dans les établissements publics les mieux dotés, rattachés à un hôpital.
La gestion des maisons de retraite médicalisées est très rentable pour quelques grands groupes privés à but lucratif : Korian, coté en Bourse, a réalisé 15,5 % de marge et un bénéfice de 6 % en 2017. En cinq ans, ce groupe a même doublé le dividende qu’il verse à ses actionnaires. Une maison de retraite est aujourd’hui plus rentable qu’un centre commercial : 4,4 %, contre 4,25 %.
Le secteur privé des Ehpad est devenu un produit d’investissement en tant que tel. Les fonds de pension achètent les murs d’une chambre pour 110 000 euros, car ils savent qu’elle leur rapportera sans grand risque entre 5 % et 6 % par an, soit davantage qu’une assurance vie, avec un statut fiscal très intéressant de loueur meublé non professionnel. Certains opérateurs privés ont vendu des chambres à des prix surestimés, contraignant les exploitants à baisser les loyers versés aux investisseurs.
Les mouvements de fusion et d’acquisition se sont accélérés depuis 2013 dans le secteur privé commercial avec l’émergence de trois mastodontes européens de l’hébergement pour personnes âgées : Korian, Orpéa et DomusVi. La France est le premier investisseur et le premier opérateur européen dans le secteur des résidences pour personnes âgées : vous comprendrez que nous voterons l’amendement de nos collègues.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Madame la ministre, il est un peu trop simple d’affirmer que l’on s’attarde sur un reportage qui serait à charge. Il n’y a pas eu que ce reportage : il y a eu de nombreux témoignages de familles dans les journaux télévisés, sur des chaînes publiques, que nous ne remettons pas en cause et qui montrent la façon dont nos aînés sont traités dans les Ehpad des groupes que mon collègue vient de citer. C’est une réalité que nous ne pouvons absolument pas occulter.
Nous rendons nous aussi hommage à tous les personnels, quels qu’ils soient. Et lorsque notre collègue défend son amendement, elle parle des groupes qui les emploient, et non des soignants eux-mêmes ! Bernard Jomier vient de rappeler le taux de rentabilité de ces structures : à ce niveau-là, on pourrait au moins exiger que les personnes qui sont accueillies dans ces établissements et qui paient très cher soient traitées humainement et à la hauteur de ce que cela leur coûte. Aujourd’hui, dans un grand nombre de ces établissements, tel n’est pas le cas !
Dans ce pays, nous pourrions aussi privilégier le secteur public. C’est tout à fait possible, puisque – je suis désolée de le répéter – mon département ne comprend que des Ehpad publics et qu’il n’en est pas moins parfaitement bien couvert. Là où il y a une volonté, il y a un chemin ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la ministre, je ne partage évidemment pas vos propos. Votre réponse n’était d’ailleurs pas très sympa.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Parce que vous trouvez que ce que vous me dites est sympa ?
Mme Cathy Apourceau-Poly. Vous nous dites avoir fait le tour des Ehpad, mais je vous rappelle que c’est parfaitement normal : vous êtes là pour ça. Il n’y a rien d’extraordinaire à ce qu’un ministre le fasse ! Heureusement !
Vous n’avez pas ce monopole, et vous le savez : nous nous déplaçons aussi dans les Ehpad.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Vous l’avez sous-entendu ! Nous aussi, nous nous rendons dans les Ehpad pour rencontrer les soignants. Je suis du même département que vous,…
Mme Cathy Apourceau-Poly. … et vous savez très bien que les parlementaires communistes ont visité les hôpitaux et les Ehpad. J’ai passé deux mois, pas cet été à cause de la crise sanitaire, mais l’été dernier, à faire le tour du département. Puisque nous nous connaissons, je vous rappelle que vous n’avez pas ce monopole : nous faisons aussi le travail et sommes sur le terrain tout autant que vous !
Vous affirmez que nous interprétons la réalité au travers d’une émission de télévision. Mais enfin, nous rencontrons les soignants !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Que nous disent-ils aujourd’hui ? Qu’ils n’arrivent plus à soigner dans de bonnes conditions, qu’ils maltraitent involontairement les personnes résidant dans les Ehpad, non pas parce qu’ils ne font pas leur travail, mais parce qu’on les oblige à travailler en quelques minutes !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Voilà ce qu’ils nous disent, madame la ministre ! Vous n’avez pas le monopole du cœur,… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jacques Grosperrin. Ça me rappelle quelqu’un…
M. le président. Un peu de calme, mes chers collègues, toute cette tension ne sert pas à grand-chose !
Mme Cathy Apourceau-Poly. … ni celui des Ehpad. Ici, nous sommes des parlementaires, mais nous sommes aussi sur le terrain !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Madame la ministre, vous nous dites que, en ces temps de crise, il faut tous rester unis derrière les Ehpad.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. En tout cas, vous nous invitez à leur rendre hommage. Personnellement, je rends hommage aux personnels des Ehpad, ainsi qu’à la plupart de ces établissements.
Dans cette période de crise, sachez que j’ai reçu un cookie m’informant que le placement le plus rentable, le meilleur investissement à faire aujourd’hui, était dans les Ehpad privés. L’explication était très claire : il s’agit d’un marché sécurisé, avec des loyers en grande partie versés par l’État, dont le rendement est attractif, supérieur à la plupart des autres placements, qui ne présente aucun risque en termes de vacance locative et une fiscalité avantageuse, puisque le nombre de personnes âgées est en constante augmentation. En somme, placez votre argent, ça vous rapportera !
Vous vous rendez compte ? En pleine crise, alors que l’on connaît les difficultés des Ehpad, qui souffrent déjà en temps normal ! Bon nombre d’entre nous l’ont vécu : ce que l’on doit verser aux Ehpad pour que nos parents dépendants puissent subvenir à leurs besoins est souvent considérable.
Je trouve pour ma part que l’amendement de Cathy Apourceau-Poly et du groupe CRCE est trop réformiste (Rires sur les travées du groupe CRCE.), puisqu’il tend seulement à taxer les dividendes. Personnellement, je serais beaucoup plus radicale : je considère que les Ehpad doivent relever du service public et être gérés, soit par des régies publiques, comme dans les Landes, où cela fonctionne très bien, soit par des acteurs de l’économie sociale et solidaire à but non lucratif.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. On ne fait pas de profit sur la gestion de la dépendance ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. Je ne comprends pas vraiment de quoi on parle. On a l’impression que le débat porte sur la maltraitance des personnes âgées. Je ne pensais pas que l’on traitait cette question dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. En plus, à mon avis, il n’existe aucune corrélation entre la rentabilité et la maltraitance.
Enfin, si certains établissements sont rentables, ce n’est pas un gros mot, c’est aussi qu’ils peuvent éventuellement créer de l’emploi ! Ce n’est donc pas très grave à l’heure actuelle. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – Exclamations sur les travées des groupes CRCE et SER.)
M. le président. On se calme ! Cela ne sert à rien de s’énerver ! Rassurez-vous, tout le monde verra midi à sa porte… (Rires.)
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. On semble presque nous reprocher une sorte de bashing contre les Ehpad. Or c’est le sous-effectif structurel, le taux d’encadrement dérisoire dans ces établissements, en comparaison notamment de celui de nos voisins européens ou au Canada, qui expliquent que tout le monde s’accorde pour dire qu’il existe une maltraitance institutionnelle, c’est-à-dire une maltraitance qui touche tout autant les personnes qui n’ont pas les soins de qualité auxquels elles ont droit, surtout dans un secteur privé commercial qui fait d’énormes profits, que les personnels qui sont victimes d’une souffrance au travail. Cette souffrance reflète l’impossibilité pour ces personnels de faire un travail de qualité, répondant aux critères déontologiques et éthiques, dans de bonnes conditions. Vous avez là tout ce qui mène à la souffrance au travail, au burn-out et, bien sûr, aux démissions, à cause de la perte d’attractivité du métier, et aux risques psychosociaux.
Vous vous demandiez quel était le lien entre notre débat et le texte, ma chère collègue. Eh bien, dans la branche AT-MP, seuls les risques psychosociaux ne diminuent pas. On est au cœur du problème ! Pour défendre les soignants, il faut répondre à leurs revendications, par exemple en termes de taux d’encadrement. Vous avez certes fait un premier pas pour les Ehpad, madame la ministre, mais ce n’est que le rattrapage d’un retard très important.
Je partage les propos de Mme Lienemann : la marchandisation de ce secteur du « prendre soin » est un véritable problème. Nous avons effectivement une conception différente : nous pensons que les municipalités, dont les ressources ont été asséchées, au point qu’elles ne leur permettent plus de construire des établissements municipaux, devraient disposer des ressources pour le faire. Cela laisserait moins de place au privé commercial, dont l’importance dans le secteur des Ehpad – mais pas seulement, car les grands groupes européens commencent aussi à investir dans le domaine des soins à domicile – est un véritable scandale, étant donné la profitabilité qu’il en tire. (Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. Il ne s’agit pas pour moi de porter des jugements de valeur, ni sur les Ehpad publics, ni sur les établissements privés, ni sur les personnels, car ces derniers ont beaucoup donné, notamment pendant toute la première vague de la pandémie.
Je tiens simplement à vous rappeler que la première lanceuse d’alerte de cette crise dans un Ehpad privé était une infirmière que sa direction n’a pas crue. On n’est pas là pour faire un procès, mais cet exemple, que vous connaissez d’ailleurs tous, car c’était dans la presse, illustre la réalité. Mme Féret et moi-même avons auditionné l’un des défenseurs de cette personne, qui, aujourd’hui, se trouve en hôpital psychiatrique. Je voulais tout simplement en témoigner.
M. le président. La parole est à M. Bernard Bonne, pour explication de vote.
M. Bernard Bonne. Je voudrais rappeler certaines choses et ne pas laisser dire n’importe quoi concernant les Ehpad. Je parle aussi au nom de René-Paul Savary avec lequel je me suis entretenu.
En tant que président de département ou élu chargé des affaires sociales – je crois que nous sommes assez nombreux dans cet hémicycle à avoir exercé ces fonctions –, on est responsable du contrôle des Ehpad, qu’ils soient publics, privés ou à but lucratif. Notre rôle est justement d’aller les contrôler.
Dans mon département et dans beaucoup d’autres, je sais qu’il existe des contrôles inopinés, qui permettent de juger de la qualité de l’accueil et de la prise en charge des personnes âgées. Que ce soit dans les Ehpad publics, privés ou à but lucratif, il y a évidemment des choses à remettre en ordre, mais aussi certaines qui vont très bien.
Que les personnes âgées puissent aller dans des établissements privés à but lucratif est un choix : je crois que l’on ne peut pas le leur reprocher.
Mme Monique Lubin. Personne ne le leur reproche !
M. Bernard Bonne. Qu’il y ait des bénéfices réalisés au niveau de ces maisons de retraite, c’est aussi un choix.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Non, ce n’est pas un choix !
M. Bernard Bonne. Ce qui importe, c’est la qualité du service rendu aux personnes âgées.
Je rappelle qu’il existe trois forfaits : un forfait « hébergement », un forfait « soins » et un forfait « dépendance ». Nous avons le contrôle sur les deux plus importants, les forfaits « soins » et « dépendance ». Alors, ne laissons pas dire n’importe quoi : il existe certes des maisons de retraite qui méritent d’être sérieusement contrôlées, voire d’être fermées, mais la plupart des établissements – je tiens à ce que l’on puisse le dire ici – s’occupent très bien des personnes âgées. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mme Véronique Guillotin applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Je rebondis sur les propos de M. Bonne : il ne faut absolument pas opposer les Ehpad privés à but lucratif aux établissements privés à but non lucratif ou publics. Dans chacune de ces catégories, il existe des établissements où les choses se passent très bien. J’ai été moi-même médecin coordonnateur pendant des années, et il y a aussi des établissements publics où cela se passe mal.
À mon avis, on ne résoudra pas le problème en créant une quelconque taxe. Il faut avant tout s’interroger : quel modèle voulons-nous aujourd’hui ? Comment faire pour garder nos personnes âgées dans la période la plus digne et, le plus souvent, à domicile ?
Je pense que l’on est au bout d’un système avec ces Ehpad : le reste à charge est tellement important que les personnes y entrent de plus en plus tard et que les patients ont des pathologies de plus en plus lourdes, ont besoin d’une prise en charge de plus en plus importante, pas seulement en termes de soins, mais aussi en termes de moyens médicaux. Nous sommes réellement au bout d’un système, et ce n’est pas une taxe qui changera la donne : je voterai contre cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 22.
(L’article 22 est adopté.)
Article 23
Sont habilités en 2021 à recourir à des ressources non permanentes afin de couvrir leurs besoins de trésorerie les organismes mentionnés dans le tableau ci-dessous, dans les limites indiquées :
(En millions d’euros) |
|
Encours limites |
|
Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) |
95 000 |
Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) |
500 |
Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (CPRP SNCF) - période du 1er au 31 janvier 2021 |
500 |
Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (CPRP SNCF) - période du 1er février au 31 décembre 2021 |
250 |
Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM) |
465 |
Caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG) |
150 |
Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) |
3 600 |
– (Adopté.)
Article 24 et annexe B
Est approuvé le rapport figurant en annexe B à la présente loi décrivant, pour les quatre années à venir (2021 à 2024), les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie.
M. le président. L’amendement n° 985, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. L’article 24 présente la trajectoire pluriannuelle des comptes de la sécurité sociale entre 2021 et 2024. Selon l’annexe B qui lui est joint, l’Ondam devrait atteindre 1,1 % en 2022, 2,4 % en 2023 et 2,3 % en 2024. On peut s’étonner devant de tels chiffres, madame la ministre : ils démontrent que vous n’avez tiré aucun enseignement de la crise.
Considérer que la pandémie de covid-19 a imposé des dépenses exceptionnelles et qu’il n’est pas nécessaire d’aller plus loin ne tient pas la route. Bien sûr, ces dépenses exceptionnelles étaient nécessaires. Mais l’épisode que nous traversons montre surtout que nos hôpitaux ont besoin de moyens humains et financiers pérennes, que les personnels sont à genoux, qu’il manque des lits, que la politique de fermeture de lits est une ineptie pour la santé publique et, donc, que la situation nécessite un relèvement significatif de l’Ondam.
Cette crise, de nombreux scientifiques se sont exprimés sur le sujet, ne sera hélas pas une crise sanitaire isolée. D’autres pandémies vont survenir. Il est donc extrêmement important de consolider, d’améliorer notre système de santé et je pense, notamment, aux hôpitaux publics. Tous les professionnels de santé, de l’aide-soignante au grand professeur, vous le disent !
D’où un certain étonnement, une certaine colère au constat que, pour Bercy, malheureusement, se soigner semble être de l’ordre du coût, plus que de la réponse à des besoins. À peine l’épidémie de covid-19 passée, il faut resserrer les boulons !
Ne partageant évidemment pas cette optique, nous demandons la suppression de cet article 24. J’en appelle également à l’ensemble de mes collègues qui se rendent sur le terrain pour se joindre à nous et réclamer l’arrêt de cette politique de coupes budgétaires, qui nous conduit à la catastrophe.
En guise de conclusion, je voudrais juste signaler que, selon la fondation Concorde, l’établissement d’une stricte égalité salariale entre femmes et hommes permettrait d’injecter 62 milliards d’euros dans l’économie. La Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV, a évalué cet apport à 11 milliards d’euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je ne pense pas que nous soyons dans les coupes budgétaires, madame Cohen… Nous sommes dans les rallonges budgétaires, et très nettement !
La commission a émis un avis défavorable. Elle ne partage pas forcément l’ensemble des orientations figurant dans le rapport, mais a choisi d’amender ce dernier, afin d’affirmer son ambition d’un retour à l’équilibre des comptes sociaux dès que la situation économique le permettra.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 985.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Annexe B
Rapport décrivant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l’objectif national des dépenses d’assurance-maladie pour les quatre années à venir
La présente annexe décrit l’évolution des agrégats de dépenses, de recettes et de soldes du régime général, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse pour la période 2021-2024.
Par rapport aux prévisions du PLFSS pour 2020, le solde de l’ensemble des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) s’est dégradé de manière soudaine et dans des proportions jamais atteintes à la suite du choc d’une ampleur inédite qu’a subi l’économie française du fait de la crise sanitaire liée à l’épidémie de covid-19.
En conséquence de cette situation macro-économique exceptionnelle, la dégradation durable de la trajectoire pluriannuelle ne permet plus d’envisager un retour à l’équilibre à l’horizon 2024 (I). Cette trajectoire tient compte d’un surcroît important de dépenses de la branche Maladie, que celles-ci soient ponctuelles pour faire face à la crise sanitaire, ou structurelles pour rénover le système de soins (II). Dans ce contexte particulier, les branches Vieillesse et surtout maladie seraient dans une situation de déficits élevés et globalement stables durant les années à venir, alors que la branche Famille et la branche Accidents du travail et maladies professionnelles dégageront des excédents dès 2021 à la faveur de la reprise économique anticipée. La nouvelle branche Autonomie, créée par la loi relative à la dette sociale et à l’autonomie présenterait une situation financière pluriannuelle globalement équilibrée avant prise en compte de l’effet démographique et mesures nouvelles (III).
I. – Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 tire les conséquences de la dégradation exceptionnelle de la situation économique en 2020 et de son rebond marqué en 2021
Pour 2021, le Gouvernement retient des hypothèses de croissance du PIB de 8,0 % en volume (après -10,0 % en 2020) et de 6,5 % de la masse salariale du secteur privé (et 6,8 % de la masse salariale privée soumise à cotisations après -7,9 % en 2020) ainsi qu’une hypothèse d’inflation hors tabac (0,6 %) en très légère progression par rapport à l’année précédente. Ce fort rebond d’activité interviendrait après un choc exceptionnel en 2020 mais serait insuffisant pour retrouver le niveau d’activité observé en 2019 (qui serait 2,7 % supérieur).
Pour les années 2022 à 2024, le Gouvernement retient un scénario de poursuite de la reprise économique, avec une croissance soutenue et en légère décélération sur l’ensemble de la trajectoire. L’inflation augmenterait progressivement avec un effet à la hausse sur les salaires nominaux malgré le ralentissement de la croissance de la masse salariale.
Dans le contexte de forte incertitude macroéconomique, lié aux aléas entourant l’évolution de la situation sanitaire aux échelles nationales et internationales, le Haut Conseil des finances publiques a rendu le 21 septembre 2020 un avis sur ces prévisions macroéconomiques dans lequel il estime le niveau d’activité anticipé pour 2021 atteignable. Il estime que le niveau ainsi que les prévisions d’inflation, d’emploi et de masse salariale retenues par le Gouvernement sont cohérentes avec les informations disponibles et plausibles.
Le tableau ci-dessous détaille les principaux éléments retenus pour l’élaboration des prévisions de recettes et objectifs de dépenses décrits dans la présente annexe :
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
|
PIB en volume |
1,7 % |
1,5 % |
-10,0 % |
8,0 % |
3,5 % |
2,0 % |
1,4 % |
Masse salariale privée |
3,5 % |
3,2 % |
-7,9 % |
6,8 % |
4,7 % |
3,7 % |
3,4 % |
Inflation hors tabac |
1,6 % |
0,9 % |
0,2 % |
0,6 % |
1,0 % |
1,4 % |
1,8 % |
ONDAM |
2,2 % |
2,6 % |
7,6 % |
3,5 % |
1,1 % |
2,4 % |
2,3 % |
ONDAM hors covid |
2,2 % |
2,6 % |
3,2 % |
6,0 % |
3,1 % |
2,4 % |
2,3 % |
Affectés par les mesures d’urgence prises fin 2018 et une conjoncture économique moins favorable qu’anticipé initialement, les déficits du régime général et des régimes obligatoires de base en 2019 ont été légèrement plus dégradés que l’année précédente, mais meilleurs que prévus en LFSS 2020 avec une bonne tenue des recettes. Cette situation financière à fin 2019, proche de l’équilibre, est brutalement remise en cause par les effets de la crise sanitaire.
En 2020, la chute d’activité conduirait à une dégradation inédite de près de 45 milliards d’euros des soldes sociaux par rapport à 2019, le régime général portant l’essentiel de cette dégradation, avec un déficit prévisionnel de 41,2 milliards d’euros. Le déficit prévisionnel du régime général et du FSV s’élèverait à 44,4 milliards d’euros en 2020, un niveau très supérieur à celui de 2010 (-28 milliards d’euros) jusqu’ici le plus élevé depuis l’instauration des lois de financement de la sécurité sociale. La branche Maladie aurait à supporter la dégradation la plus forte, puisque son déficit s’établirait à 29,8 milliards d’euros qui, en euros courants, dépasserait à lui seul le déficit de l’ensemble de la sécurité sociale constaté 2010, à la suite de la crise financière. Toutes les branches, à l’exception de la nouvelle branche Autonomie, seraient en déficit, y compris la branche Accidents du travail et maladies professionnelles.
Dans ce contexte, le retour à l’équilibre global du régime général ne serait pas atteint à l’horizon 2024 (-21,3 milliards d’euros), le rebond anticipé ne permettant pas de combler la dégradation observée en 2020. À cet horizon, le déficit du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) serait de 0,8 milliard d’euros et le déficit consolidé régime général et du FSV atteindrait ainsi 22,1 milliards d’euros. De même, les comptes des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et des organismes concourant à leur financement seraient durablement déficitaires, la trajectoire plus dégradée de la CNRACL affectant la situation sur le périmètre de l’ensemble des régimes obligatoires de base. En 2024, le déficit global pour l’ensemble des régimes obligatoires atteindrait 21,2 milliards d’euros.
La trajectoire présentée dans cette annexe repose, à titre conservatoire, sur une convention « hors mesures nouvelles » en économies ou en dépenses, ainsi que le prévoit la loi organique.
De la même manière, la trajectoire d’ONDAM prolonge, dans l’attente des travaux à venir notamment confiés au Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM), celle de la dernière loi de programmation des finances publiques à partir de 2022, soit 2,4 % « hors covid ».
Dans le cadre du rapport économique, social et financier annexé au PLF 2021, le Gouvernement a affiché sa détermination à s’inscrire dans une trajectoire qui permettra de stabiliser le ratio d’endettement public à horizon 2025 autour de 117 % puis d’amorcer sa décrue, afin notamment d’assurer la pérennité du financement de la protection sociale.
II. – La trajectoire financière tient compte des conséquences de la dégradation marquée des recettes de la sécurité sociale en 2020, ainsi que de dépenses nouvelles d’assurance maladie pour répondre de manière exceptionnelle à la crise et adapter structurellement le système de santé
Comme lors de la crise économique et financière de 2008, la sécurité sociale a joué un rôle majeur d’amortisseur économique et social, tant en matière de prélèvements, que de dépenses. Majoritairement proportionnelles au niveau d’activité, les premières se sont fortement contractées alors que les secondes se sont maintenues s’agissant des prestations retraites et famille et ont fortement progressé sur la branche Maladie pour permettre des prises en charge à 100 % d’actes médicaux et le versement d’indemnités journalières en cas d’arrêt de travail, même pour des personnes non malades (arrêts de travail pour garde d’enfants ou personnes vulnérables).
La diminution de l’activité économique s’est traduite par une baisse massive des prélèvements sociaux et des recettes fiscales perçus par la sécurité sociale en 2020. En effet, les ressources de la sécurité sociale proviennent pour une large part des revenus d’activité, qui ont beaucoup souffert de la crise. En outre, la crise sanitaire, les mesures prises pour l’endiguer et le ralentissement marqué de l’activité économique ont conduit de nombreuses entreprises à placer leurs salariés en activité partielle, dont l’indemnité est exonérée de cotisations sociales et soumise, comme les allocations chômage et en tant que revenu de remplacement, à un taux de CSG réduit. Ainsi, le recours à l’activité partielle, massif au cours du deuxième trimestre et encore élevé au cours des mois suivants, associé aux pertes d’emploi consécutives à la crise, a entraîné une forte baisse de la masse salariale privée (estimé à -7,9 % sur l’année) et, par conséquent, des recettes de cotisations et de la CSG.
Pour préserver l’activité économique et l’emploi, le Gouvernement a mis en place un ensemble de mesures pour soutenir les entreprises et les travailleurs indépendants, qui incluent des dispositifs d’exonérations et d’aide au paiement en faveur des secteurs les plus touchés par la crise. Ces dispositifs, estimés à 5,2 milliards d’euros, seront compensés par l’État et n’impactent donc pas les recettes de la sécurité sociale.
Ainsi, au total, les recettes du régime général et du FSV diminueraient de 5 % en 2020, soit 20 milliards d’euros, les fortes baisses sur les revenus d’activité étant quelque peu compensées par l’augmentation des recettes sur les revenus de remplacement (augmentation des indemnités journalières) et par le versement à la CNAV de la soulte des industries électriques et gazières gérée par le Fonds de réserve pour les retraites (FRR) décidée par la loi dette sociale et autonomie du 7 août pour un montant de 5 milliards d’euros.
En 2021, les recettes connaîtraient un fort rebond sous l’effet de la reprise économique, soutenue par le plan de relance. Les cotisations sociales du secteur privé et la CSG augmenteraient fortement, tirées par le dynamisme de la masse salariale privée (+6,5 %, soit +6,8 % pour la masse salariale privée soumise à cotisations). Au total, les recettes du régime général et du FSV rebondiraient de 7 %. Elles retrouveraient un niveau supérieur de 2 % à celui de 2019 mais resteraient durablement et substantiellement plus faibles que le niveau prévu avant la crise.
S’agissant des dépenses, leur évolution entre 2019 et 2020 est conforme à ce qui était prévu en LFSS 2020 pour les branches Famille, Accidents du travail et maladies professionnelles et Vieillesse. En revanche, les dépenses de la branche Maladie ont été très fortement impactées par la crise sanitaire et leur dynamisme va se poursuivre au-delà de la période de crise compte tenu des décisions plus structurelles décidées dans le cadre du Ségur de la santé pour répondre aux enjeux de bon fonctionnement et de modernisation du système de santé. Le PLFSS 2021 prévoit de majorer l’ONDAM 2020 de 10,1 milliards d’euros, soit une progression de +7,6 % par rapport à 2019. Le niveau de l’ONDAM en 2020 s’élève ainsi à 215,7 milliards d’euros (au lieu de 205,6 milliards d’euros prévus en LFSS 2020).
En 2021, en prenant en compte les seuls effets structurels de déploiement des mesures du Ségur de la santé, l’ONDAM progressera de 6 %. En intégrant une nouvelle provision au titre de la gestion de crise covid, les dépenses de l’ONDAM 2021 sont estimées à 224,6 milliards d’euros. Cet objectif de dépenses englobe 4 milliards d’euros de mesures de régulation par rapport à la progression tendancielle. Une contribution exceptionnelle des organismes d’assurance maladie complémentaire permettra de prendre en charge une partie des dépenses auxquelles l’assurance maladie obligatoire fait face dans le cadre de la gestion de l’épidémie. Cette contribution, temporaire, est assise sur le chiffre d’affaires en santé des organismes complémentaires. Fixée à un milliard d’euros en 2020 et 500 millions d’euros en 2021, elle pourra être revue en 2021 en fonction de l’évolution de la situation sanitaire et de l’actualisation du niveau des économies constatées par les organismes complémentaires.
La progression de ces dépenses sera maîtrisée dans les projections pluriannuelles, avec des progressions proches ou moindres que celles de l’activité à compter de 2022, hormis pour les prestations vieillesse, tirées par la reprise modérée de l’inflation.
III. – D’ici 2024, les branches du régime général connaîtraient des évolutions très différenciées, marquées par les effets de la crise
La branche Maladie connaîtra une évolution structurante en 2021 du fait de la création de la branche Autonomie qui sera notamment en charge de dépenses de prestations dont elle assurait jusqu’à présent le financement. De ce fait, le périmètre des dépenses de la branche se réduira de 25,9 milliards d’euros à ce titre, soit d’environ 10 %. Dans une moindre mesure, les dépenses s’accroîtront de 0,3 milliard d’euros sous l’effet du transfert du financement de l’allocation supplémentaire d’invalidité (ASI), compensée par l’affectation d’une fraction de TVA.
Après la forte évolution de la structure du financement de l’assurance maladie en 2019 du fait de la suppression de 6 points de cotisations d’assurance maladie sur les rémunérations salariées inférieures à 2,5 SMIC, qui avait conduit à porter la part de la TVA à 28 % des ressources de la branche Maladie, la création de la branche Autonomie en modifie à nouveau la structure. En effet, la branche Autonomie sera affectataire de ressources de CSG pesant sur l’ensemble des assiettes soumises à cette contribution, principalement en provenance de la CNAM. La CSG affectée à la branche Maladie se réduira donc de 25,5 milliards d’euros. De ce fait, la CSG, qui représentait 45 % des ressources de la branche Maladie en 2018, avant qu’une fraction soit affectée à l’assurance chômage, ne pèsera plus que 25 % des recettes totales, soit une part inférieure à celle des cotisations des employeurs et à celle de la TVA.
La trajectoire pluriannuelle de l’ONDAM au-delà de 2022 conserve les hypothèses de progression prévues en LFSS 2020 hors Ségur. Le HCAAM se voit confier une mission pour réfléchir à la refonte de l’ONDAM et aux moyens d’ajustement de la dépense aux besoins de la population et aux enjeux régulation financière.
En termes de recettes, aucune hausse d’impôts ou de cotisations n’étant prévue, la branche Maladie resterait déficitaire de plus de 17 milliards d’euros en 2024, ce qui pose la question de soutenabilité des dépenses et la stratégie de restauration d’une trajectoire de retour à l’équilibre.
La nouvelle branche Autonomie sera affectataire à compter de 2021, outre ses recettes traditionnelles issues de la contribution de solidarité pour l’autonomie (CSA) et de la contribution additionnelle (CASA) pour 2,8 milliards d’euros, de CSG à hauteur de 1,9 point portant sur l’ensemble des assiettes de la CSG (28 milliards d’euros). À compter de 2024, cette fraction de CSG sera augmentée de 0,15 point supplémentaire (actuellement affecté à la CADES), conformément aux dispositions de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie.
Au total, ces recettes s’élèveront à 31,2 milliards d’euros, soit un niveau identique à celui des dépenses, permettant à la branche de couvrir l’intégralité des besoins de financement des mesures nouvelles, notamment celles liées à la mise en place du Ségur de la santé dans le secteur médico-social (impact de 2,1 milliards d’euros en 2020-2021 au titre des revalorisations salariales et de l’investissement).
La trajectoire en dépenses de la branche Autonomie pour 2022-2024 est conventionnelle et conforme, s’agissant des dépenses pour les établissements et services médico-sociaux, au taux d’ONDAM hors Ségur (2,4 % par an). Elle ne prend pas en compte l’effet démographique ni l’effet des mesures nouvelles qui pourraient être décidées dans la prochaine loi grand âge et autonomie. Elle prévoit toutefois, à compter de 2022, le financement, par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) (0,2 milliard d’euros), aux départements de la PCH parentalité qui entrera en vigueur en 2021. Compte tenu du lien avec la politique familiale et de la situation financière de la branche Famille, la CNSA bénéficie d’un transfert supplémentaire de recettes de la branche Famille à compter de 2022.
Compte tenu du dynamisme des recettes affectées, celles-ci devraient progresser jusqu’à 2023 à un rythme proche de celui des dépenses, permettant un équilibre de la branche Autonomie avant mesures nouvelles. En 2024, elle afficherait un excédent de 2,3 milliards d’euros correspondant à la recette de CSG supplémentaire en provenance de la CADES hors prise en compte de l’effet démographique et de la mise en œuvre d’éventuelles mesures nouvelles.
S’agissant de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles, aucune mesure n’est prévue pour modifier les ressources de la branche en 2021, qui devraient progresser d’un milliard d’euros. Outre la progression de la masse salariale, la branche bénéficiera, de l’effet favorable du Ségur de la santé sur ses recettes de cotisations et contributions sociales, ce qui contribuera à améliorer son solde.
De ce fait, la branche devrait dégager un excédent de 0,5 milliard d’euros en 2021, effaçant son déficit de 0,3 milliard d’euros prévu pour 2020. Cet excédent serait croissant jusqu’en 2024.
La branche Vieillesse du régime général sera à nouveau déficitaire de 7,3 milliards d’euros en 2021, soit un niveau proche de celui de 2020 (-7,8 milliards d’euros). Les recettes, qui reposent presque exclusivement sur les revenus d’activité, progresseraient de 10 % pour s’établir à 108 milliards d’euros sous l’effet du rebond de l’économie. Malgré la progression modérée des dépenses permise par une inflation moindre que prévue sur ces deux exercices, la forte baisse des recettes en 2020 place toutefois leur niveau nettement en dessous de celui des dépenses. En 2021, la branche bénéficiera seulement de l’effet favorable des mesures du Ségur de la santé en termes de revalorisation salariale qui tendront à accroître le niveau des cotisations.
Jusqu’en 2024, les dépenses continueraient de croître à un rythme supérieur à celui des recettes, notamment du fait de la plus forte inflation à compter de 2022, conduisant à un déficit de 9,3 milliards d’euros à cet horizon pour le régime général et 10,6 milliards d’euros sur le périmètre tous régimes et FSV. Si des mesures étaient décidées dans le cadre des concertations sur la réforme des retraites, elles devront permettre de réduire ces déficits.
La branche Famille transférera en 2021 le financement de l’allocation d’éducation d’un enfant handicapé (AEEH) à la nouvelle branche Autonomie, ce qui réduira de 1,2 milliard d’euros le périmètre de ses dépenses et de ses recettes (réduction de la taxe sur les salaires qui lui est affectée au profit de la CNAM, laquelle affecte une part équivalente de CSG à la CNSA). À compter de 2022, un nouveau transfert de recettes au profit de la branche Autonomie interviendra pour financer le coût de la PCH parentalité.
Les recettes de la branche Famille progresseraient de 7 % en 2021 du fait de la reprise économique. La branche bénéficierait aussi pour 0,2 milliard d’euros de l’effet favorable des mesures du Ségur de la santé sur l’assiette des cotisations et contributions qui lui sont affectées.
Les dépenses modérées par la faible inflation seraient néanmoins tirées à la hausse par la réforme du congé paternité (0,2 milliard d’euros en 2021 et 0,4 milliard d’euros à compter de 2022 en ce qui concerne la branche Famille). Sous l’effet de cette faible progression globale la branche renouerait avec un excédent dès 2021 (1,1 milliard d’euros), qui tendrait à s’accroître jusqu’en 2024.
Prévisions des recettes, dépenses et soldes du régime général, de l’ensemble des régimes de base et du FSV
Recettes, dépenses et soldes du régime général |
|||||||
(En milliards d’euros) |
|||||||
2018 |
2019 |
2020(p) |
2021(p) |
2022(p) |
2023(p) |
2024(p) |
|
Maladie |
|||||||
Recettes |
210,8 |
215,2 |
204,8 |
197,9 |
201,3 |
206,8 |
211,8 |
Dépenses |
211,5 |
216,6 |
237,0 |
217,6 |
219,5 |
224,4 |
229,2 |
Solde |
-0,7 |
-1,5 |
-32,2 |
-19,7 |
-18,2 |
-17,6 |
-17,4 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
|||||||
Recettes |
12,7 |
13,2 |
12,1 |
13,2 |
13,8 |
14,3 |
14,8 |
Dépenses |
12,0 |
12,2 |
12,4 |
12,7 |
12,7 |
12,9 |
13,1 |
Solde |
0,7 |
1,0 |
-0,3 |
0,5 |
1,1 |
1,4 |
1,7 |
Famille |
|||||||
Recettes |
50,4 |
51,4 |
47,2 |
50,5 |
51,3 |
52,8 |
54,2 |
Dépenses |
49,9 |
49,9 |
50,4 |
49,3 |
49,7 |
50,2 |
50,8 |
Solde |
0,5 |
1,5 |
-3,2 |
1,1 |
1,6 |
2,6 |
3,4 |
Vieillesse |
|||||||
Recettes |
133,8 |
135,7 |
132,8 |
137,6 |
141,4 |
145,7 |
149,8 |
Dépenses |
133,6 |
137,1 |
140,6 |
144,7 |
148,7 |
153,5 |
159,0 |
Solde |
0,2 |
-1,4 |
-7,8 |
-7,2 |
-7,3 |
-7,8 |
-9,2 |
Autonomie |
|||||||
Recettes |
31,3 |
32,2 |
33,2 |
36,6 |
|||
Dépenses |
31,6 |
32,7 |
33,6 |
34,5 |
|||
Solde |
-0,3 |
-0,5 |
-0,3 |
2,1 |
|||
Régime général consolidé |
|||||||
Recettes |
394,6 |
402,4 |
383,9 |
416,5 |
425,7 |
438,2 |
452,4 |
Dépenses |
394,1 |
402,8 |
427,3 |
442,0 |
449,0 |
460,0 |
471,8 |
Solde |
0,5 |
-0,4 |
-43,5 |
-25,4 |
-23,3 |
-21,7 |
-19,4 |
Recettes, dépenses et soldes de l’ensemble des régimes obligatoires de base |
|||||||
(En milliards d’euros) |
|||||||
2018 |
2019 |
2020(p) |
2021(p) |
2022(p) |
2023(p) |
2024(p) |
|
Maladie |
|||||||
Recettes |
212,3 |
216,6 |
206,3 |
199,4 |
202,8 |
208,3 |
213,4 |
Dépenses |
213,1 |
218,1 |
238,5 |
219,1 |
221,0 |
225,9 |
230,8 |
Solde |
-0,8 |
-1,5 |
-32,2 |
-19,7 |
-18,2 |
-17,6 |
-17,4 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
|||||||
Recettes |
14,1 |
14,7 |
13,6 |
14,8 |
15,4 |
15,8 |
16,3 |
Dépenses |
13,4 |
13,6 |
13,9 |
14,1 |
14,2 |
14,3 |
14,5 |
Solde |
0,7 |
1,1 |
-0,2 |
0,6 |
1,2 |
1,5 |
1,8 |
Famille |
|||||||
Recettes |
50,4 |
51,4 |
47,2 |
50,5 |
51,3 |
52,8 |
54,2 |
Dépenses |
49,9 |
49,9 |
50,4 |
49,3 |
49,7 |
50,2 |
50,8 |
Solde |
0,5 |
1,5 |
-3,2 |
1,1 |
1,6 |
2,6 |
3,4 |
Vieillesse |
|||||||
Recettes |
236,6 |
240,0 |
237,4 |
245,5 |
249,4 |
254,8 |
260,7 |
Dépenses |
236,7 |
241,3 |
247,0 |
251,9 |
257,0 |
263,6 |
271,4 |
Solde |
-0,1 |
-1,3 |
-9,5 |
-6,4 |
-7,6 |
-8,8 |
-10,7 |
Autonomie |
|||||||
Recettes |
31,3 |
32,2 |
33,2 |
36,6 |
|||
Dépenses |
31,6 |
32,7 |
33,6 |
34,5 |
|||
Solde |
-0,3 |
-0,5 |
-0,3 |
2,1 |
|||
Régimes obligatoires de base consolidés |
|||||||
Recettes |
499,9 |
509,1 |
491,0 |
527,4 |
536,7 |
550,4 |
566,4 |
Dépenses |
499,5 |
509,3 |
536,1 |
552,0 |
560,2 |
573,0 |
587,1 |
Solde |
0,3 |
-0,2 |
-45,2 |
-24,6 |
-23,4 |
-22,6 |
-20,8 |
Recettes, dépenses et soldes du Fonds de solidarité vieillesse |
|||||||
(En milliards d’euros) |
|||||||
Recettes |
17,2 |
17,2 |
16,5 |
16,7 |
17,3 |
17,9 |
18,5 |
Dépenses |
19,0 |
18,8 |
19,7 |
19,2 |
19,0 |
19,1 |
19,3 |
Solde |
-1,8 |
-1,6 |
-3,2 |
-2,4 |
-1,7 |
-1,2 |
-0,8 |
Recettes, dépenses et soldes du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse |
|||||||
(En milliards d’euros) |
|||||||
Recettes |
394,6 |
402,6 |
382,4 |
415,8 |
425,8 |
438,8 |
453,4 |
Dépenses |
395,8 |
404,5 |
429,0 |
443,7 |
450,7 |
461,7 |
473,5 |
Solde |
-1,2 |
-1,9 |
-46,6 |
-27,9 |
-25,0 |
-22,9 |
-20,2 |
Recettes, dépenses et soldes des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse |
|||||||
(En milliards d’euros) |
|||||||
Recettes |
498,6 |
508,0 |
488,2 |
525,4 |
535,6 |
549,7 |
566,1 |
Dépenses |
500,0 |
509,7 |
536,6 |
552,4 |
560,7 |
573,5 |
587,6 |
Solde |
-1,4 |
-1,7 |
-48,4 |
-27,0 |
-25,1 |
-23,8 |
-21,6 |
M. le président. L’amendement n° 161, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 15
Rédiger ainsi cet alinéa :
Pour autant, il est indispensable d’amorcer un retour à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale dès que la situation économique le permettra. À cette fin, il convient d’assurer la stabilité des ressources de la sécurité sociale en garantissant le respect du principe de compensation de toute mesure diminuant les recettes des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), du Fonds de réserve pour les retraites (FRR) ou des organismes finançant et gérant des dépenses relevant de l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (Ondam). Il faudra également maîtriser la croissance des dépenses de ces organismes, ce qui passera par des réformes structurelles, notamment en matière de retraites.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement de la commission tend à modifier la rédaction de l’alinéa 15 de l’annexe B, justement pour demander le retour à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Nous partageons, bien sûr, cet objectif de retour à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale.
Si l’équilibre n’est plus d’actualité à court terme, la maîtrise des comptes sociaux demeure évidemment un impératif, et il est indispensable d’amorcer cette trajectoire de retour à l’équilibre dès que la situation le permettra.
À ce titre, le Gouvernement s’est engagé à mettre en place un groupe de travail sur la trajectoire et la gouvernance des finances publiques. Réunissant des experts des finances publiques, notamment des finances sociales, il sera chargé de réfléchir, en particulier, à la fixation de nouvelles ancres de finances publiques à moyen terme. L’objectif est d’assurer la soutenabilité de l’ensemble des finances publiques, y compris des finances sociales.
À ce stade, il apparaît donc prématuré d’introduire des éléments portant sur le retour à une trajectoire d’équilibre dans l’annexe B. Ce serait anticiper sur les conclusions mêmes de ce groupe de travail.
C’est pourquoi je vous demande, monsieur le rapporteur général, de bien vouloir retirer cet amendement, faute de quoi j’exprimerai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.
M. Jean-Noël Cardoux. Cet amendement, que M. le rapporteur général a déposé au nom de la commission, est particulièrement bienvenu. Au sein de cette dernière, cela fait effectivement des années que nous évoquons la complexité de la tuyauterie existante entre la sécurité sociale et l’État – une machinerie absolument incompréhensible !
Le présent amendement contribue à y remettre de l’ordre, à nettoyer à coups de goupillon les tuyaux, à y voir plus clair. C’est indispensable si l’on veut disposer d’une transparence des comptes entre sécurité sociale et État.
Mais j’irai plus loin, mes chers collègues… On sait déjà qu’il va être très difficile d’avoir des prévisions jusqu’en 2024. Même dans les entreprises, c’est extrêmement complexe, du fait du contexte sanitaire : toute prévision publiée est aussitôt contredite par les dernières évolutions de la crise sanitaire.
Mais on sait déjà, aussi, que la trajectoire que nous avons votée à l’été, c’est-à-dire l’augmentation du plafond d’absorption de la Cades à 130 milliards d’euros, avec une échéance fixée à 2033, ne pourra pas être tenue. Il faudra donc, à un moment donné, que nous puissions revoir la question de la pérennité de la Cades.
À cette occasion, et en plus des mesures que vous proposez, monsieur le rapporteur général, nous pourrions dresser un rapide inventaire – sans remonter à dix ans, mais ne serait-ce que sur une période de cinq ans – de toutes les charges et exonérations décidées par l’État qui ont été imputées à la sécurité sociale. Cela nous donnerait une vision nettement plus proche de la réalité des sommes qui, véritablement, auraient dû être transférées à la Cades.
Je pense notamment aux 2,5 milliards d’euros de la crise des gilets jaunes, qui, aux dires du ministre Gérald Darmanin, devaient être compensés, mais qui ne l’ont jamais été. Je pense aussi à un sujet que nous allons aborder par la suite : le transfert à la Cades des 13 milliards d’euros de la dette hospitalière. Ce sont là des acrobaties financières qui ne sont pas justifiées.
C’est pourquoi je voterai cet amendement, tout en précisant qu’il faut sans doute aller plus loin pour « décortiquer » toutes ces articulations.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. En complément des propos de Jean-Noël Cardoux, président de la Mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la Mecss, je soulignerai l’importance de cet article. C’est l’un des plus importants de ce PLFSS, car il permet d’acter de nouveau des perspectives à quatre ans, dans des conditions que nous savons être, cette année, encore plus difficiles que les années précédentes.
Il s’agit, bien sûr, d’adopter une vision comptable. Mais il faut aussi adopter une vision prospective – définir quel modèle de santé, quel modèle médico-social nous voulons –, étant entendu que l’ensemble de ces branches engagent tout de même des sommes considérables et que l’on compte, parmi elles, la branche vieillesse.
À cet égard, madame la ministre, je ne comprends pas bien votre position. Vous pourriez parfaitement émettre un avis favorable sur un amendement de cette nature, puisque vous nous dites avoir en tête le rétablissement des comptes et souhaiter, notamment, réunir un comité d’experts pour traiter le sujet.
Quand se pose la question de la mise en place d’un système universel de retraite – c’est vous qui en avez parlé, pas forcément nous –, vous évoquez une « règle d’or » permettant d’amortir des difficultés conjoncturelles dans un délai raisonnable, autrement dit d’avoir, à la fois, une tactique à court terme et une stratégie à long terme pour garantir un certain nombre de prestations. C’est le même exercice ici ! Je ne vois pas pourquoi on adopterait une « règle d’or » pour certaines branches, et pas pour toutes.
J’invite donc l’ensemble de mes collègues à voter cet amendement du rapporteur général. Il ouvre des pistes de travail que nous pourrions tous, me semble-t-il, partager.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je ne crois vraiment pas, mes chers collègues, que la question du retour à l’équilibre de la sécurité sociale soit l’urgence du moment !
Et même s’il fallait, à moyen terme, envisager de rétablir cet équilibre, j’observe que le traitement de la question fondamentale de savoir comment nous trouvons les financements pour garantir aux Français un système de protection sociale de qualité, répondant à leurs besoins, va être confié à un groupe d’experts financiers, spécialistes des questions sociales ou tout droit sortis de Bercy. On peut être optimiste quant aux solutions innovantes qui vont être trouvées !
Et ce d’autant que, cela ne vous aura pas échappé, la Cour des comptes vient de nous expliquer qu’il fallait poursuivre la recherche d’économies dans le système hospitalier de santé, dans la ligne de ce qui a été fait jusqu’à présent.
Bien sûr, on a résorbé des déficits dans le budget de la sécurité sociale, en procédant à des suppressions massives de lits ou de postes, en revalorisant si faiblement les salaires que nombre de nos métiers, notamment celui d’infirmière, sont aujourd’hui payés beaucoup moins bien qu’ailleurs en Europe. C’est la cause de nos difficultés actuelles.
Personne ne pouvait prévoir le virus, mes chers collègues ; ce qui était prévisible, en revanche, c’est que nous n’étions pas prêts à affronter une pandémie, que nous avions tant asséché nos moyens que nous étions « borderline » ! C’est bien cette politique que nous payons aujourd’hui.
Au mois de septembre, on a écrit à certains hôpitaux qu’on allait fermer leur service de réanimation. Quand on a vu que l’épidémie reprenait, on leur a dit qu’on attendrait en définitive le mois de mars pour procéder à la fermeture. Mais, entretemps, qu’ont fait les salariés, qu’ont fait les infirmières de ces services ? Comme ils n’avaient pas l’intention d’aller déménager à Pétaouchnok-les-Oies, ils ont trouvé du travail ailleurs. Et voilà que ces hôpitaux, aujourd’hui, n’ont plus assez de personnel et que l’on nous explique ne pas avoir pu faire autrement… On pouvait déjà éviter l’hémorragie, c’était le minimum !
Va-t-on fermer de la même manière les urgences pédiatriques dans un certain nombre de départements à fortes populations, notamment d’enfants ? Les gens vont se retrouver à faire des kilomètres et des heures de route…
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … pour une urgence pédiatrique. Est-ce cela, mes chers collègues, le rétablissement que vous voulez ? C’est celui qui se prépare en tous cas !
M. le président. Je veux bien donner la parole à chacun, mes chers collègues, mais je vous demande de respecter les temps de parole. À défaut, nous ne pourrons poursuivre ce débat dans des conditions normales.
Je mets aux voix l’amendement n° 161.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 1072, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 41 à 46
Rédiger ainsi ces alinéas :
Prévisions des recettes, dépenses et soldes du régime général, de l’ensemble des régimes de base et du FSV
Recettes, dépenses et soldes du régime général |
|||||||
(En milliards d’euros) |
|||||||
2018 |
2019 |
2020(p) |
2021(p) |
2022(p) |
2023(p) |
2024(p) |
|
Maladie |
|||||||
Recettes |
210,8 |
215,2 |
204,1 |
197,9 |
201,3 |
206,8 |
211,8 |
Dépenses |
211,5 |
216,6 |
237,8 |
217,6 |
219,5 |
224,4 |
229,2 |
Solde |
-0,7 |
-1,5 |
-33,7 |
-19,7 |
-18,2 |
-17,6 |
-17,4 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
|||||||
Recettes |
12,7 |
13,2 |
12,0 |
13,2 |
13,8 |
14,3 |
14,8 |
Dépenses |
12,0 |
12,2 |
12,4 |
12,7 |
12,7 |
12,9 |
13,1 |
Solde |
0,7 |
1,0 |
-0,4 |
0,5 |
1,1 |
1,4 |
1,7 |
Famille |
|||||||
Recettes |
50,4 |
51,4 |
46,9 |
50,5 |
51,3 |
52,8 |
54,2 |
Dépenses |
49,9 |
49,9 |
50,4 |
49,3 |
49,7 |
50,2 |
50,8 |
Solde |
0,5 |
1,5 |
-3,5 |
1,1 |
1,6 |
2,6 |
3,4 |
Vieillesse |
|||||||
Recettes |
133,8 |
135,7 |
132,0 |
137,6 |
141,4 |
145,7 |
149,8 |
Dépenses |
133,6 |
137,1 |
140,6 |
144,7 |
148,7 |
153,5 |
159,0 |
Solde |
0,2 |
-1,4 |
-8,6 |
-7,2 |
-7,3 |
-7,8 |
-9,2 |
Autonomie |
|||||||
Recettes |
31,3 |
32,2 |
33,2 |
36,6 |
|||
Dépenses |
31,6 |
32,7 |
33,6 |
34,5 |
|||
Solde |
-0,3 |
-0,5 |
-0,3 |
2,1 |
|||
Régime général consolidé |
|||||||
Recettes |
394,6 |
402,4 |
382,0 |
416,5 |
425,7 |
438,2 |
452,4 |
Dépenses |
394,1 |
402,8 |
428,1 |
442,0 |
449,0 |
460,0 |
471,8 |
Solde |
0,5 |
-0,4 |
-46,1 |
-25,4 |
-23,3 |
-21,7 |
-19,4 |
Recettes, dépenses et soldes de l’ensemble des régimes obligatoires de base |
|||||||
(En milliards d’euros) |
|||||||
2018 |
2019 |
2020(p) |
2021(p) |
2022(p) |
2023(p) |
2024(p) |
|
Maladie |
|||||||
Recettes |
212,3 |
216,6 |
205,6 |
199,4 |
202,8 |
208,3 |
213,4 |
Dépenses |
213,1 |
218,1 |
239,3 |
219,1 |
221,0 |
225,9 |
230,8 |
Solde |
-0,8 |
-1,5 |
-33,7 |
-19,7 |
-18,2 |
-17,6 |
-17,4 |
Accidents du travail et maladies professionnelles |
|||||||
Recettes |
14,1 |
14,7 |
13,5 |
14,8 |
15,4 |
15,8 |
16,3 |
Dépenses |
13,4 |
13,6 |
13,9 |
14,1 |
14,2 |
14,3 |
14,5 |
Solde |
0,7 |
1,1 |
-0,4 |
0,6 |
1,2 |
1,5 |
1,8 |
Famille |
|||||||
Recettes |
50,4 |
51,4 |
46,9 |
50,5 |
51,3 |
52,8 |
54,2 |
Dépenses |
49,9 |
49,9 |
50,4 |
49,3 |
49,7 |
50,2 |
50,8 |
Solde |
0,5 |
1,5 |
-3,5 |
1,1 |
1,6 |
2,6 |
3,4 |
Vieillesse |
|||||||
Recettes |
236,6 |
240,0 |
236,6 |
245,5 |
249,4 |
254,8 |
260,7 |
Dépenses |
236,7 |
241,3 |
247,0 |
251,9 |
257,0 |
263,6 |
271,4 |
Solde |
-0,1 |
-1,3 |
-10,3 |
-6,4 |
-7,6 |
-8,8 |
-10,7 |
Autonomie |
|||||||
Recettes |
31,3 |
32,2 |
33,2 |
36,6 |
|||
Dépenses |
31,6 |
32,7 |
33,6 |
34,5 |
|||
Solde |
-0,3 |
-0,5 |
-0,3 |
2,1 |
|||
Régimes obligatoires de base consolidés |
|||||||
Recettes |
499,9 |
509,1 |
489,1 |
527,4 |
536,7 |
550,4 |
566,4 |
Dépenses |
499,5 |
509,3 |
536,9 |
552,0 |
560,2 |
573,0 |
587,1 |
Solde |
0,3 |
-0,2 |
-47,8 |
-24,6 |
-23,4 |
-22,6 |
-20,8 |
Recettes, dépenses et soldes du Fonds de solidarité vieillesse |
|||||||
(En milliards d’euros) |
|||||||
2018 |
2019 |
2020(p) |
2021(p) |
2022(p) |
2023(p) |
2024(p) |
|
Recettes |
17,2 |
17,2 |
16,7 |
16,7 |
17,3 |
17,9 |
18,5 |
Dépenses |
19,0 |
18,8 |
19,7 |
19,2 |
19,0 |
19,1 |
19,3 |
Solde |
-1,8 |
-1,6 |
-2,9 |
-2,4 |
-1,7 |
-1,2 |
-0,8 |
Recettes, dépenses et soldes du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse |
|||||||
(En milliards d’euros) |
|||||||
2018 |
2019 |
2020(p) |
2021(p) |
2022(p) |
2023(p) |
2024(p) |
|
Recettes |
394,6 |
402,6 |
380,8 |
415,8 |
425,8 |
438,8 |
453,4 |
Dépenses |
395,8 |
404,5 |
429,8 |
443,7 |
450,7 |
461,7 |
473,5 |
Solde |
-1,2 |
-1,9 |
-49,0 |
-27,9 |
-25,0 |
-22,9 |
-20,2 |
Recettes, dépenses et soldes des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse |
|||||||
(En milliards d’euros) |
|||||||
2018 |
2019 |
2020(p) |
2021(p) |
2022(p) |
2023(p) |
2024(p) |
|
Recettes |
498,6 |
508,0 |
486,7 |
525,4 |
535,6 |
549,7 |
566,1 |
Dépenses |
500,0 |
509,7 |
537,4 |
552,4 |
560,7 |
573,5 |
587,6 |
Solde |
-1,4 |
-1,7 |
-50,7 |
-27,0 |
-25,1 |
-23,8 |
-21,6 |
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Cet amendement tend à rectifier l’évolution pluriannuelle du financement de la sécurité sociale figurant à l’annexe B.
Dans un souci de sincérité, il tire les conséquences de la hausse de l’Ondam liée aux surcoûts engendrés par la crise – équipements de protection individuelle, tests, etc. – et des hypothèses de dégradation dues au deuxième confinement et au rebond de la crise sanitaire. Sont affectés les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre par branche de l’ensemble des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale pour 2020.
Il s’agit donc d’un amendement de cohérence permettant d’intégrer, dans l’annexe B portant sur les perspectives pluriannuelles, les modifications votées au niveau des dépenses de l’Ondam et des prévisions de recettes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission n’a pas émis d’avis sur cet amendement, mais, comme vous venez de l’entendre, mes chers collègues, celui-ci tend à rectifier, par pure cohérence, les comptes de la sécurité sociale jusqu’en 2024. J’exprimerai donc, à titre personnel, un avis favorable.
Notons d’ailleurs que cet amendement ne change en rien l’analyse de la commission, qui, à travers l’amendement n° 161 que nous venons d’adopter, exprime la même volonté de rééquilibrage des comptes de la sécurité sociale. Je n’ai pas compris, madame la ministre, que le Gouvernement ne soutienne pas notre proposition. Notre amendement n’exprimait rien d’autre que ce que vous venez de dire.
S’agissant du comité d’experts, je précise qu’il existe déjà un Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS). On pourrait y avoir recours, cela ferait des économies !
M. le président. Je mets aux voix l’ensemble constitué de l’article 24 et de l’annexe B, modifié.
(L’article 24 et l’annexe B sont adoptés.)
Vote sur l’ensemble de la troisième partie
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale, je rappelle que, en application de l’article 47 bis-1 A, alinéa 2, du règlement, si le Sénat n’adopte pas les dispositions de cette partie, la quatrième partie du projet de loi sera considérée comme rejetée.
Y a-t-il des demandes d’explication de vote ?…
Je mets aux voix, modifié, l’ensemble de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 19 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 247 |
Contre | 93 |
Le Sénat a adopté.
QUATRIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2021
Chapitre Ier
Mettre en œuvre les engagements du Ségur de la santé
Articles additionnels avant l’article 25 A
M. le président. L’amendement n° 12 rectifié ter, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel, Genet, Rapin et Piednoir, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Avant l’article 25 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au II de l’article L. 162-14-1-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « de dépassement de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie au sens du dernier alinéa de l’article L. 114-4-1, et dès lors qu’il apparaît que ce risque de dépassement est en tout ou partie imputable à l’évolution de celui » sont supprimés.
La parole est à M. Laurent Burgoa.
M. Laurent Burgoa. Depuis plusieurs années, la maîtrise insuffisante des dépenses de soins de ville conduit à une mobilisation des mises en réserve des dépenses des établissements de santé. Les efforts d’efficience de ces établissements sont ainsi absorbés par le dynamisme immodéré des dépenses de soins de ville. L’Ondam exécuté s’avère ainsi éloigné de celui qui a été initialement soumis à l’approbation du Parlement.
Comme l’a constaté la Cour des comptes dans son rapport d’octobre 2018 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, la progression toujours vive des dépenses de soins de ville rend nécessaire l’adoption de mécanismes de régulation propres aux dépenses de ce sous-objectif, mécanismes actuellement inexistants à l’exception des dépenses de médicaments.
La Cour des comptes a ainsi réitéré sa recommandation d’instaurer des dispositifs plus complets de suivi et de régulation infra-annuels des dépenses de soins de ville.
Dans cette optique, la Fédération hospitalière de France (FHF) souhaite l’introduction d’un mécanisme de régulation au sein de la sous-enveloppe des soins de ville : les augmentations tarifaires en cours d’exercice pourraient être différées en cas de non-respect de l’objectif prévisionnel de dépenses pour ces soins. Ce mécanisme de gel permettrait de contenir l’accroissement des dépenses et ne pas propager la tension de la maîtrise du sous-objectif des soins de ville aux autres sous-objectifs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l’assurance maladie. Je partage l’objectif visé par les auteurs de l’amendement, mais le dispositif proposé ne me semble pas présenter de réel intérêt.
Il existe déjà une procédure d’alerte permettant de suspendre des revalorisations tarifaires, en cas de risque de dépassement de l’enveloppe de soins de ville. Il s’agirait ici d’enclencher cette procédure plus systématiquement. Rien n’assure, toutefois, qu’elle sera effectivement déclenchée. Il serait plus opérationnel de travailler en amont sur des leviers, comme l’incitation à la pertinence des soins ou à la prévention, qui peuvent concourir à modérer les dépenses de soins de ville.
Différents facteurs peuvent en outre être à l’origine du dépassement de cette enveloppe : le renchérissement du prix des médicaments, les effets du virage ambulatoire ou la dynamique naturelle des dépenses liées au vieillissement démographique.
Il serait dommage d’avoir pour seule réponse des coupes sur les revalorisations tarifaires. La logique de concertation sur les objectifs stratégiques de l’Ondam promue par l’amendement n° 8 rectifié quater, que nous allons examiner en suivant, me semble plus vertueuse.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je partage les préoccupations des auteurs de l’amendement et de Mme la rapporteure.
J’ajouterai simplement qu’au début du mois de septembre, dans le cadre du Ségur de la santé, le Gouvernement a missionné le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) pour proposer des pistes de réforme de l’Ondam, qui nécessite d’être rénové et adapté à une politique de santé pluriannuelle et de long terme.
Pour ces raisons, l’avis est défavorable.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Puisque vous proposez, madame la ministre, de réformer l’Ondam – cela nous paraît tout à fait intéressant –, sachez que nous avons commis, avec Catherine Deroche, un rapport qui évoquait un certain nombre d’évolutions.
Lorsque l’on consulte l’ensemble des acteurs, on se rend compte que les choses ne sont pas si évidentes… Ici, nous avons un amendement proposé par la FHF. Mais la Fédération des cliniques et hôpitaux privés de France, la FHP, ou la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer, Unicancer, auraient proposé autre chose.
Il faut s’atteler à replacer le patient au sein du dispositif, si l’on veut vraiment parler de parcours de soins. En effet, le patient est soigné, un jour en ville, un jour à l’hôpital ou en clinique et, s’il entre un jour dans un dispositif de dépendance, en médico-social. Il faut donc, effectivement, une certaine fongibilité entre tous ces secteurs, un décloisonnement permettant ce replacement du patient au cœur du dispositif.
Mais ces évolutions appellent une grande réflexion. Par conséquent, madame la ministre, n’hésitez pas à vous inspirer des propositions que nous avions avancées dans le cadre de notre rapport !
M. le président. Monsieur Burgoa, l’amendement n° 12 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Laurent Burgoa. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 12 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 8 rectifié quater, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier, D. Laurent, de Legge et H. Leroy, Mme Garriaud-Maylam, M. Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel, Genet, Bouloux et Bonne, Mmes Puissat et Malet, MM. Sol, Bonhomme, Rapin, Piednoir, Savary et Pointereau, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard, Babary et B. Fournier, est ainsi libellé :
Avant l’article 25 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article L. 162-21-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le comité est également chargé de concerter les représentants des professionnels de santé exerçant en ville et des établissements de santé sur les objectifs stratégiques assignés à l’objectif national de dépenses d’assurance maladie en fonction des prévisions épidémiologiques et démographiques disponibles. À cette fin, il se réunit une fois par an dans sa composition habituelle élargie aux représentants des professionnels de santé exerçant en ville. »
La parole est à M. Bernard Bonne.
M. Bernard Bonne. Le Ségur de la santé a conclu à la nécessité de revoir profondément la place, la régulation, les objectifs et les responsabilités de chacun dans le cadre de l’Ondam.
Le ministre des solidarités et de la santé a adressé à cette fin une lettre de mission au Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM). D’ores et déjà, il est proposé d’associer, dans un cadre commun de discussion stratégique, l’ensemble des acteurs de ville et les représentants des établissements de santé. Ce cadre pourrait être l’Observatoire économique de l’hospitalisation publique et privée, ou le HCAAM lui-même.
L’objet de cette discussion associant l’ensemble des acteurs de la santé serait de réfléchir aux priorités médicales de l’Ondam en s’appuyant sur des données épidémiologiques et démographiques. Concrètement, il s’agirait de réfléchir au financement des parcours de soins dans une logique décloisonnée et de proposer des évolutions structurantes.
Conformément à l’esprit du Ségur de la santé, cette discussion traduirait la sortie d’une logique comptable de l’Ondam au profit d’une logique médicalisée et de santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Nous partageons l’objectif de rendre à l’Ondam son rôle d’outil de pilotage stratégique de la dépense de santé. C’était le sens du rapport d’information sur l’Ondam de Catherine Deroche et René-Paul Savary, tout juste mentionné par ce dernier, et que la commission des affaires sociales a adopté l’an passé.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 a organisé, dans le cadre de l’Observatoire économique de l’hospitalisation publique et privée, la discussion d’un protocole pluriannuel sur les ressources des établissements de santé publics et privés pour leur donner plus de visibilité. Cette instance serait ici étendue aux professionnels de ville pour prolonger la concertation sur un plus large champ des dépenses de santé, concertation qui devrait évidemment intégrer les enjeux de coordination et les parcours de soins.
Alors que le Gouvernement a souhaité engager une réflexion sur l’avenir de l’Ondam, la commission partage l’objectif que cet amendement tend à assigner à la concertation. C’est pourquoi elle a émis un avis favorable
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. J’évoquerai de nouveau le travail en cours qui a été confié au HCAAM. Il a été demandé que soit intégrée à cette réflexion la démarche des acteurs territoriaux et des acteurs du système de santé. La question de l’association de ces acteurs à la gouvernance de l’Ondam rénové sera donc examinée dans le cadre de cette mission, qui devrait aboutir au printemps 2021. L’avis est défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l’article 25 A.
L’amendement n° 11 rectifié ter, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Bonne, Mmes Puissat et Malet, MM. Sol, Rapin et Piednoir, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Avant l’article 25 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° La première phrase du 1° de l’article L. 1435-9 est complété par les mots : « ainsi que d’une mise en réserve constituée sur le sous-objectif relatif aux dépenses de soins de ville, dans les conditions définies à l’article L. 1435-10 du présent code » ;
2° Le second alinéa de l’article L. 1435-10 est ainsi rédigé :
« La répartition régionale des crédits, ainsi que les modalités de constitution et d’utilisation de la mise en réserve mentionnée au 1° de l’article L. 1435-9 du présent code, sont fixées chaque année par arrêté des ministres chargés de la santé, du budget, de la sécurité sociale, des personnes âgées et des personnes handicapées, après avis du Conseil national de pilotage des agences régionales de santé et au regard de l’avis mentionné au sixième alinéa de l’article L. 114-4-1 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à M. Bernard Bonne.
M. Bernard Bonne. Cet amendement vise à ce que les mises en réserve prudentielles du PLFSS, elles-mêmes issues de la loi de programmation des finances publiques, portent de manière équilibrée sur les différents sous-objectifs susceptibles de connaître un dépassement, notamment l’enveloppe des soins de ville, au regard de son importance.
Le respect de l’Ondam s’inscrit en effet dans une nécessité dont les contraintes doivent être partagées par l’ensemble des sous-objectifs qui le constituent. La Cour des comptes, dans son rapport d’octobre 2018 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, réitère son appel à « une mise à contribution de l’ensemble des secteurs de l’offre de soins afin d’en assurer le respect, y compris les soins de ville qui en ont été à ce jour exemptés pour l’essentiel ».
Aujourd’hui, alors que le montant des mises en réserve est calculé sur l’ensemble de l’Ondam, seul un mécanisme prudentiel est mis en œuvre sur les sous-objectifs hospitaliers, soit par des mises en réserve, soit par des annulations de crédits, alourdissant l’effort demandé aux établissements de santé.
Lorsque les efforts sont partagés par tous, ils s’avèrent alors moins lourds et disproportionnés pour chacune des composantes assujetties à l’Ondam.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement tend à abonder le fonds d’intervention régional (FIR) d’une mise en réserve sur les dépenses de l’Ondam relatives aux soins de ville. Si je comprends l’objectif – inciter, comme à l’amendement n° 12 rectifié ter déjà examiné, à la régulation des dépenses de ville –, je ne suis pas certaine que le dispositif proposé apporte une réponse satisfaisante. Il ne me semble pas de bonne gestion que le FIR soit abondé par une enveloppe prudentielle pesant sur un autre sous-objectif.
À défaut d’un retrait, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Bonne. Je retire l’amendement !
M. le président. L’amendement n° 11 rectifié ter est retiré.
Article 25 A (nouveau)
I. – Afin de contribuer à l’attractivité et à la dignité des métiers des professionnels des services d’accompagnement et d’aide à domicile mentionnés aux 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie verse une aide aux départements finançant un dispositif de soutien à ces professionnels.
Cette aide est versée chaque année par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie dans la limite de 200 millions d’euros par an.
Elle est répartie entre les départements en fonction des dernières données disponibles portant sur le volume total d’activité réalisée par les services d’aide et d’accompagnement à domicile au titre des allocations prévues aux articles L. 231-1, L. 232-1 et L. 245-1 du code de l’action sociale et des familles.
Les paramètres du dispositif et les modalités du versement de l’aide aux départements qui le financent sont fixés par décret.
II. – A. – Le I du présent article entre en vigueur le 1er avril 2021.
B. – Par dérogation au deuxième alinéa du I, la limite est ramenée à 150 millions d’euros pour l’année 2021.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Dans son rapport, notre collègue Philippe Mouiller a justement rappelé que l’article 25 A, qui porte sur les services d’aide et d’accompagnement à domicile, nous laissait un sentiment mitigé.
En effet, Mme la ministre a proposé, devant la commission des affaires sociales, qu’une enveloppe de 150 millions d’euros supplémentaires soit accordée par l’État aux services d’aide à domicile.
Donner davantage de moyens à ces services, dont les métiers, à très forte pénibilité, bénéficient d’une faible reconnaissance, notamment salariale, est évidemment une bonne mesure. Mais ces 150 millions d’euros, voire 200 millions en année pleine, sont largement insuffisants et conditionnés au versement par les départements d’un montant équivalent à celui qui leur sera alloué.
Voilà bientôt dix ans que les gouvernements passent par le dépôt d’amendements pour financer les services d’aide à domicile, plutôt que d’intégrer aux prévisions budgétaires les moyens nécessaires à l’accompagnement du vieillissement de la population. Il serait temps de mettre en œuvre une politique ambitieuse, qui organise la transformation de notre système d’aide à domicile pour l’adapter au vieillissement, en revalorisant les métiers et salaires, et en accroissant le nombre de professionnels formés.
M. le président. La parole est à Mme Monique Lubin, sur l’article.
Mme Monique Lubin. L’aide destinée aux départements pour développer l’attractivité des métiers de l’aide à domicile, qui est prévue par cet article 25 A, sera forcément bien accueillie – c’est un premier pas.
Mais, nous souhaitons tout de même le rappeler, les aides à domicile ne comprennent toujours pas pourquoi elles ont été et continuent d’être les grandes oubliées – j’emploie le féminin car, pour l’essentiel, il s’agit de femmes – du Ségur de la santé. Elles sont pourtant la représentation « type » de ces métiers qui ont été en première ligne et dont on a absolument besoin au quotidien.
Bien évidemment, la compétence incombe aux départements. Mais il est évident que ceux-ci ne pourront pas, seuls, financer de manière pérenne de véritables augmentations de salaire et revalorisations de carrière.
Nous souhaiterions donc que le Gouvernement travaille avec eux sur un plan de revalorisation salariale de ces personnels, mais également d’amélioration de leurs conditions de travail. Les salaires, c’est une chose, mais il faut aussi considérer la façon dont ces personnes travaillent : utilisation du véhicule personnel ou autre, etc. ; je ne dresserai pas une liste détaillée, madame la ministre, car vous connaissez parfaitement ces conditions de travail.
Je me pose enfin une question sur cet article : que devient la réforme de la tarification à domicile, laquelle avait été engagée puisqu’une partie des fonds que vous aviez prévus à cette fin est redirigée vers cette aide nouvelle aux départements ?
M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, sur l’article.
Mme Nadège Havet. Il y a un mois, le Gouvernement annonçait vouloir débloquer 200 millions d’euros pour que les aides à domicile qui interviennent chez des personnes âgées ou atteintes de handicap bénéficient d’une hausse de salaire d’environ 15 %.
Inséré par l’Assemblée nationale en première lecture, l’article 25 A traduit dans la loi cette volonté. D’une part, il vient reconnaître des professionnels très impliqués dans la crise sanitaire que nous connaissons, d’autre part, il entend favoriser l’attractivité des métiers de l’aide à domicile. Cela, nous le savons, est nécessaire.
Ce dispositif consiste en un cofinancement avec les conseils départementaux, effectivement compétents en matière d’aide à domicile. Ainsi, l’enveloppe débloquée par le Gouvernement doit financer la moitié de cette revalorisation, à charge pour le département qui accepterait d’entrer dans cette démarche de financer l’autre moitié. Les crédits seront répartis entre les départements en fonction des dernières données disponibles portant sur le volume total d’activités réalisées par les services.
Il s’agit de la même méthode que celle adoptée pour octroyer aux aides à domicile une prime covid exceptionnelle de 1 000 euros par salarié, en vertu d’un dispositif annoncé en août par le Président de la République.
Une remarque, pour finir, sur le caractère universel de cette aide : je suis opposée à la discrimination entre privé et public, alors que certains départements, dont le Finistère, ne versent pas la prime covid aux salariés du privé. J’ai rencontré les représentants des entreprises de services à la personne à ce propos et je les ai assurés de mon soutien. Il s’agit de prendre en compte l’ensemble des assistants qui aident les personnes ayant besoin d’une aide à domicile. Nous voterons ce dispositif.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 926, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer les mots :
dignité
par les mots :
juste rémunération
et les mots :
verse une aide aux départements finançant
par le mot :
finance
II. – Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
Ce financement de 200 millions d’euros par an est versé chaque année par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie au titre du 1° de l’article L. 14-10-5 du code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction issue de la présente loi.
III. – Alinéa 3
Remplacer les mots :
Elle est répartie
par les mots :
Il est réparti
IV. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
l’aide aux départements qui le financent
par les mots :
ce financement
V. – Alinéa 6
Remplacer les mots :
la limite est ramenée
par les mots :
ce financement est ramené
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Après des années de déflation salariale, la problématique majeure que rencontrent les services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD), et qui a été mise en exergue par la crise sanitaire, c’est bien le recrutement et le maintien dans l’emploi des salariés d’intervention et, plus largement, le manque d’attractivité des métiers du domicile. Cette situation obère de plus en plus leur possibilité d’accompagner les personnes en perte d’autonomie.
S’il convient de reconnaître l’amorce de l’engagement de l’État à hauteur de 200 millions d’euros par an, tout en regrettant sa mise en œuvre au 1er avril 2021, ce qui le réduit à 150 millions d’euros, il nous apparaît tout aussi nécessaire d’émettre certaines réserves.
Le dispositif prévu par cet article ne doit pas s’appuyer sur les mêmes principes que ceux retenus par le Gouvernement pour le cofinancement de la prime covid à destination des SAAD. Ce dispositif n’est pas adapté aux revalorisations salariales, notamment à la suite de l’agrément des accords de branche. C’est source d’une réelle confusion, qui, par analogie avec la prime covid, donne à penser que ces 200 millions représentent la moitié du coût de la mesure. Or pas du tout ! On le sait bien, entre 600 et 800 millions d’euros seront nécessaires pour financer les SAAD, en particulier une fois que l’avenant à l’accord de branche aura été agréé.
La prime covid était un dispositif facultatif. Il revenait à chaque gestionnaire de fixer son montant et les conditions de son versement au regard des possibilités financières du département. À l’inverse, la revalorisation salariale, fixée par accord collectif national étendu, s’imposera de manière homogène à tous les SAAD de France relevant des mêmes accords de branche. Par la suite, les accords collectifs qui seront agréés seront opposables aux financeurs.
Tel qu’il est rédigé, l’article 25 A remet en cause ou, du moins, fragilise largement cette opposabilité en permettant à chaque département de financer, ou non, le soutien aux professionnels. Cela n’est pas cohérent avec le principe légal de l’agrément national des accords collectifs et de l’opposabilité de ceux-ci.
Enfin, cet accord fixe non pas un montant fixe, mais uniquement un plafond : le montant final annuel dépendra des engagements financiers de chaque département. Or ce n’est pas possible puisque ce montant doit s’appuyer sur le volume d’activité.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Raymonde Poncet Monge. Cela n’est donc pas conforme aux missions de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), qui doivent garantir l’équité territoriale et la promesse d’universalité d’une cinquième branche.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 52 rectifié est présenté par MM. Bonne et Bascher, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bonhomme, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Cardoux et Courtial, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Deromedi et Dumas, M. B. Fournier, Mme F. Gerbaud, M. Gremillet, Mme Gruny, M. D. Laurent, Mme Lavarde, M. Lefèvre, Mme Micouleau, M. Moga, Mmes Noël, Puissat et Richer et MM. Saury, Sautarel, Sol, Vogel, Rapin, H. Leroy et Charon.
L’amendement n° 646 est présenté par Mme Lienemann.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 1
Remplacer les mots :
verse une aide aux départements finançant
par le mot :
finance
II. – Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
Ce financement de 200 millions d’euros par an est versé chaque année par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie au titre du 1° de l’article L. 14-10-5 du code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction issue de la présente loi.
III. – Alinéa 3
Remplacer les mots :
Elle est répartie
par les mots :
Il est réparti
IV. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
l’aide aux départements qui le financent
par les mots :
ce financement
V. – Alinéa 6
Remplacer les mots :
la limite est ramenée
par les mots :
ce financement est ramené
La parole est à M. Bernard Bonne, pour présenter l’amendement n° 52 rectifié.
M. Bernard Bonne. Cela a été dit, la problématique majeure que rencontrent les SAAD depuis plusieurs années, et qui a été mise en exergue par l’épidémie de covid-19, concerne le recrutement et le maintien dans l’emploi des salariés d’intervention et, plus largement, le manque d’attractivité des métiers du domicile. Pour y remédier, le dispositif prévu à l’article 25 A se fonde sur les mêmes principes que ceux retenus par le Gouvernement en vue du déploiement du cofinancement de la prime covid pour les SAAD.
Or ce dispositif n’est pas adapté aux revalorisations salariales. Aussi, par cet amendement, nous proposons de rationaliser le dispositif gouvernemental en rendant son déploiement uniforme et en précisant que la somme de 200 millions d’euros est un montant fixe réparti entre tous les départements.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 646.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je partage l’argumentaire de mes collègues, notamment celui de Mme Poncet Monge.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la branche autonomie. L’amendement n° 926 vise à garantir l’équité dans la distribution de l’aide aux départements destinée à soutenir les SAAD.
Le dispositif est clair. Il ne modifie ni l’objet de ce financement, ni ses destinataires, qui demeurent les départements, ni ses critères de répartition, soit le volume d’activité réalisé par les SAAD d’après les dernières données disponibles. En outre, les paramètres du dispositif, sur lesquels le Parlement devra se montrer vigilant, resteront fixés par décret.
La commission émet un avis favorable sur cet amendement n° 926, et demande le retrait des amendements identiques nos 52 rectifié et 646, dont la rédaction diffère légèrement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Cet article 25 A m’est cher. Je crois que vous êtes tous, ici, convaincus de la nécessité de revaloriser les salaires dans le secteur de l’aide à domicile. Cela étant dit, je souhaite apporter une ou deux précisions au sujet de cette prime et sur la manière dont nous avons travaillé avec les départements.
Les choses se sont déroulées très simplement. Comme cela vient d’être indiqué, son financement sera assuré à parts égales entre l’État et les départements. Le travail engagé par certains conseils départementaux sur la qualité des SAAD ne sera pas remis en cause ; j’en prends l’engagement devant vous, comme je l’ai fait à l’Assemblée nationale.
Lorsque j’ai pris mes fonctions, en juillet dernier, seuls 19 départements s’étaient engagés dans cette démarche d’attribution d’une prime, tandis que d’autres y réfléchissaient ; à ce jour, ils sont au nombre de 99. Par ailleurs, sur le plan qualitatif – cela a été vérifié –, nous versons cette compensation aux départements uniquement lorsque le montant de la prime est de 1 000 euros pour un équivalent temps plein.
J’en viens à la question des revalorisations salariales, qui est une revendication parmi d’autres du secteur de l’aide à domicile. De fait, nous travaillons sur un plan métier beaucoup plus complet à partir du rapport El Khomri, qui donne matière à réflexion et dont nous partageons nombre de constats – nous n’allons pas réinventer la poudre.
Pour ma part, je défends à la fois l’aide à domicile et les départements. Nous ne travaillons pas seuls. Récemment encore, je me suis entretenue avec le président de l’Assemblée des départements de France (ADF), qui sera partie prenante à la négociation.
Vous parlez de 150 millions d’euros « plus » 50 millions. C’est donc bien de 200 millions d’euros dont il faut parler, montant qui sera reconduit à l’identique l’an prochain. Je peux en attester, nous n’avons jamais mis autant d’argent sur la table pour une négociation salariale : les années précédentes, ce sont au maximum 25 millions d’euros que l’État avait débloqués.
On me dit que ces 200 millions d’euros ne sont pas suffisants pour amorcer une négociation. Pour ma part, je vous affirme le contraire ; j’en ai d’ailleurs discuté avec M. Frédéric Bierry, président de la commission solidarités et affaires sociales de l’ADF. Ces 200 millions d’euros représentent quasiment 50 % de la base d’une renégociation salariale.
Autant, sur la prime, le travail a été conduit de façon quelque peu aléatoire, autant sur ce point précis la négociation est construite autour de l’avenant 43, bien connu et réclamé par toutes les fédérations de l’aide à domicile. Quant à l’avenant 44, il est acté – or personne ne le dit –, ce qui répond à leur revendication.
Cet argent que nous mettons sur la table est destiné à faciliter la négociation salariale qui sera menée en novembre. Faisons cause commune en faveur de cette avancée, attendue par le secteur. Cette première pierre sera déterrminante pour atteindre l’objectif de revalorisation des salaires.
L’avis est défavorable sur ces amendements.
M. le président. En conséquence, les amendements identiques nos 52 rectifié et 646 n’ont plus d’objet.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 271 rectifié ter, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Genet, Mmes Puissat et Malet, MM. Piednoir et Savary, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Après le mot :
familles
insérer les mots :
et des personnes morales ou des entreprises individuelles d’un service d’aide à domicile agréées en application des dispositions de l’article L. 7231-1 du code du travail
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. L’article 25 A crée un dispositif de soutien à l’attractivité des métiers du domicile abondé par la CNSA à hauteur de 200 millions d’euros. Sur cette base, le Gouvernement souhaite ouvrir une concertation avec les conseils départementaux pour convenir de l’effort global et dessiner les contours et la méthode de ce soutien. Toutefois, plusieurs questions demeurent.
D’une part, ce dispositif exclut de facto les intervenants à domicile au titre d’autres aides que la prestation de compensation du handicap (PCH) et l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) allouées par les caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) ou la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV). Des salariés dont la mission et les compétences sont identiques à celles des salariés intervenant au titre de la PCH et de l’APA allouées par les conseils départementaux ne sont, ainsi, pas considérés.
D’autre part, un doute demeure, au sein des dispositifs APA et PCH sur l’ouverture de cette enveloppe à l’ensemble des modes d’intervention. En effet, les salariés de l’aide à domicile peuvent certes intervenir selon différentes allocations, mais également selon différents modes d’interventions – gré à gré, accueillant familial, mandataire, etc.
Par conséquent, l’accès aux dispositifs doit comprendre l’intégralité des salariés du secteur selon leurs fonctions, et non selon le système d’allocation ou le mode d’intervention. Sans prétendre reconfigurer l’ensemble du financement de l’aide à domicile, cet amendement vise à lever le doute sur ce second point.
M. le président. L’amendement n° 444 rectifié bis, présenté par M. Rapin, Mme Lavarde, M. Daubresse, Mmes Noël, Gruny, Dumas, M. Mercier et Goy-Chavent, MM. D. Laurent, Courtial et Lefèvre, Mme Richer, MM. Sautarel, Vogel, de Nicolaÿ, Cambon, Savary et Calvet, Mme Deromedi, MM. Pellevat, Belin, Bonne et Charon, Mme L. Darcos, MM. Savin, Le Gleut, Perrin, Rietmann, Bizet, Somon, Brisson, Babary, Bascher, H. Leroy, Piednoir, de Legge et Meurant, Mmes Boulay-Espéronnier et Garriaud-Maylam, M. Mandelli, Mmes Estrosi Sassone et Canayer, M. Gremillet, Mme Delmont-Koropoulis, M. Darnaud et Mmes de Cidrac et Di Folco, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
exerçant au sein d’organismes mentionnés à l’article L. 7232-6 du code du travail
La parole est à Mme Christine Lavarde.
Mme Christine Lavarde. Cet amendement, qui s’inscrit dans la même philosophie que le précédent, vise à apporter une clarification sur le périmètre de la cible des professionnels visés par le dispositif de soutien financier explicité dans le présent article. Il s’agit de préciser que le public visé concerne bien les salariés exerçant au sein d’une association ou d’une structure intervenant selon les modalités de l’article L. 7232-6 du code du travail, c’est-à-dire à la fois les prestataires et les mandataires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Je comprends tout à fait les motifs des auteurs des deux amendements, et je partage leur objectif. Néanmoins, l’adoption de ceux-ci conduirait à étendre le bénéfice de l’aide versée par la CNSA à un ensemble plus large d’activités incluant, par exemple, la garde d’enfants. De fait, l’ensemble des intervenants seraient concernés par une telle extension du champ, y compris ceux qui n’interviennent pas dans le cadre de la crise de la covid.
Or l’aide versée par la CNSA vise à aider les départements dans leur politique d’accompagnement des personnes vulnérables. Elle participe donc d’une politique médico-sociale, et non pas d’une politique de l’emploi dans les services à la personne d’une manière générale.
De plus, à trop élargir la cible des bénéficiaires, on augmente le risque de saupoudrage des crédits.
L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Milon. Je retire l’amendement n° 271 rectifié ter, monsieur le président.
Mme Christine Lavarde. Et moi l’amendement n° 444 rectifié bis !
M. le président. Les amendements nos 271 rectifié ter et 444 rectifié bis sont retirés.
Je mets aux voix l’article 25 A, modifié.
(L’article 25 A est adopté.)
Articles additionnels après l’article 25 A
M. le président. L’amendement n° 34 rectifié ter, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Genet, Mme Malet, M. Savary, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 25 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 162-22-8-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les activités de soins de médecine, chirurgie, obstétrique, de soins de suite et de réadaptation et de psychiatrie, à seuil de rentabilité économique faible en outre-mer et en Corse bénéficient, dans le cadre des crédits du fonds d’intervention régional, d’un financement complémentaire aux produits de la tarification à l’activité, afin de garantir l’équilibre médico-économique des activités autorisées et de les maintenir dans les établissements de santé désignés par arrêté du directeur général de l’agence régionale de santé. »
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Cet amendement a pour objet d’introduire un dispositif complémentaire compensatoire permettant d’aménager le cadre juridique et financier actuel aux spécificités auxquelles sont confrontés, dans leurs activités de soins, notamment de recours, les établissements d’outre-mer et de Corse, sans alourdir les charges publiques à l’intérieur de l’Ondam hospitalier et sans baisse tarifaire associée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Je partage la préoccupation exprimée par Alain Milon s’agissant de l’avenir d’activités de soins ayant un seuil de rentabilité faible.
L’article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 a prévu, dans le même esprit, un rapport sur le financement des établissements hospitaliers dans les collectivités d’outre-mer et de Corse afin d’évaluer les coefficients géographiques liés aux facteurs spécifiques de ces territoires et les différents modes de financement dont ils font l’objet.
Ce rapport n’ayant toujours pas été transmis au Parlement, nous vous demanderons ce qu’il en est, madame la ministre.
En revanche, je ne suis pas certain qu’il appartienne au FIR, déjà fortement mobilisé, de porter un tel financement complémentaire. Une réflexion sur la révision des coefficients géographiques mériterait d’être menée.
Dans l’attente d’éléments sur ce sujet, la commission souhaite recueillir l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Ne disposant pas d’éléments d’information sur le rapport, je ne puis vous donner d’indications à cet instant.
S’agissant de l’amendement, j’indique que les recettes des établissements de santé de ces territoires sont majorées, notamment selon un coefficient géographique, afin de tenir compte des contraintes propres qui pèsent sur eux.
Par ailleurs, le Gouvernement s’est engagé dans une réforme globale de la tarification à l’activité (T2A) dont les effets seront plus importants qu’une accumulation de dispositions correctives, comme vous le proposez.
Considérant que l’amendement est satisfait, j’émets un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour explication de vote.
M. Dominique Théophile. La question du coefficient géographique applicable aux établissements d’outre-mer est une ancienne et longue revendication. D’ailleurs, il existe des disparités entre les différentes collectivités, le taux en Guyane étant différent de celui en vigueur à La Réunion ou en Guadeloupe – 27 % à ce jour.
À l’époque où je présidais la Fédération hospitalière de Guadeloupe, nous revendiquions déjà le principe de la T2A, au vu de notre volume d’activité et des difficultés de nos établissements. Les fédérations hospitalières de Martinique, de Guadeloupe et de Guyane mènent actuellement une étude pour envisager de porter de 27 % à 32 % le coefficient correcteur géographique. C’est une nécessité.
J’ai cru comprendre que le Gouvernement envisageait une refonte du financement des hôpitaux : certes, mais il faut aller très vite car la situation ne cesse de se dégrader, compte tenu de l’augmentation des charges d’environ 5 à 6 % consécutive à la hausse de 2 % de l’activité. De fait, le déficit cumulé des établissements publics de ces départements ne cesse de se creuser.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 25 A.
L’amendement n° 30 rectifié ter, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel, Genet et Bouloux, Mmes L. Darcos et Malet, MM. Piednoir et Savary, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 25 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, une étude sur les écarts de rémunération entre les carrières des secteurs hospitaliers publics et privés au regard de leurs missions. Cette étude porte notamment sur le différentiel de rémunération à l’embauche et tout au long de la carrière, en fonction du lieu et des modalités d’exercice et, pour les professions paramédicales, sur les perspectives de promotion professionnelle par métier et sur l’accès à la protection sociale complémentaire.
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Cet amendement vise à solliciter du Gouvernement la publication d’une étude sur le sujet cité en référence. Or le rapporteur n’est pas tombé dans le piège et a pu constater que, plutôt que d’une étude, il était bien question d’un rapport. (Sourires.) Par conséquent, je retire cet amendement.
M. le président. Il faut parfois faire preuve de prudence…
L’amendement n° 30 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 488 rectifié ter, présenté par Mme Lubin, MM. Fichet et Antiste, Mmes Van Heghe, Lepage et Jasmin, MM. Jeansannetas et Kerrouche, Mme Préville, M. Vaugrenard, Mmes Féret et Poumirol, MM. Bourgi, Montaugé, Redon-Sarrazy, Cozic, Tissot, Temal et Dagbert, Mme Monier et M. P. Joly, est ainsi libellé :
Après l’article 25 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement dépose au Parlement un rapport détaillant les conséquences sur l’attractivité des métiers des établissements sociaux et médico-sociaux du Ségur de la Santé et proposant les mesures à prendre pour assurer l’égalité de traitement entre les professionnels.
La parole est à Mme Monique Lubin.
Mme Monique Lubin. Nous formulons nous aussi une demande de rapport, et nous savons quelle suite lui sera réservée… Mais c’est le seul moyen que j’ai trouvé pour appeler votre attention, madame la ministre, sur une demande du Collectif Handicaps. Celui-ci craint que les personnels des établissements sociaux et médico-sociaux du champ du handicap ne soient exclus des mesures de revalorisation salariale, malgré les demandes répétées des associations d’élargir les discussions engagées dans le cadre du Ségur de la santé.
Le Collectif Handicaps nous a demandé d’être son relais auprès du Gouvernement afin de solliciter l’engagement d’une négociation avec les professionnels du secteur. Cela étant dit, je retire mon amendement.
M. le président. Quelle prudence ! (Sourires.)
L’amendement n° 488 rectifie ter est retiré.
Article 25
I. – Un complément de traitement indiciaire est versé dans des conditions fixées par décret, à compter du 1er septembre 2020, aux fonctionnaires et militaires exerçant leurs fonctions au sein :
1° Des établissements publics de santé mentionnés à l’article L. 6141-1 du code de la santé publique, à l’exception des structures créées en application de l’article L. 6111-3 du même code ;
2° Des groupements de coopération sanitaire mentionnés à l’article L. 6133-1 dudit code ;
3° Des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, y compris rattachés aux établissements publics de santé, mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles ;
4° Des hôpitaux des armées mentionnés à l’article L. 6147-7 du code de la santé publique ;
5° De l’établissement public mentionné à l’article L. 621-1 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre.
Une indemnité équivalente au complément de traitement indiciaire est versée dans des conditions fixées par décret, à compter du 1er septembre 2020, aux agents contractuels de droit public et aux ouvriers des établissements industriels de l’État exerçant leurs fonctions au sein des structures mentionnées aux 1° à 5° du présent I.
Les dispositions du présent I ne sont applicables ni aux personnes qui exercent la profession de médecin, de chirurgien-dentiste ou de pharmacien, ni aux internes des hôpitaux des armées, ni aux élèves des écoles du service de santé des armées, ni aux personnes relevant de l’ordonnance n° 58-696 du 6 août 1958 relative au statut spécial des fonctionnaires des services déconcentrés de l’administration pénitentiaire.
II. – Les fonctionnaires de l’État et les militaires admis à faire valoir leurs droits à la retraite à compter du 1er septembre 2020 ont droit à un supplément de pension au titre du complément de traitement indiciaire mentionné au I du présent article, qui s’ajoute à la pension liquidée en application des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite.
Ce supplément de pension est calculé dans les conditions prévues au I de l’article L. 15 du même code en retenant, au titre du traitement ou de la solde, le complément de traitement indiciaire mentionné au I du présent article perçu par le fonctionnaire ou le militaire au moins une fois au cours des six derniers mois précédant la cessation des services valables pour la retraite. Les conditions de jouissance et de réversion de ce supplément de pension sont identiques à celles de la pension elle-même. Ce supplément est revalorisé dans les conditions prévues à l’article L. 16 du code des pensions civiles et militaires de retraite.
Le complément de traitement indiciaire mentionné au I du présent article est soumis aux contributions et cotisations prévues à l’article L. 61 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans les conditions fixées pour le traitement ou la solde.
III. – Le complément de traitement indiciaire ou l’indemnité équivalente à ce complément versé aux fonctionnaires territoriaux et hospitaliers ainsi qu’aux ouvriers des établissements industriels de l’État est pris en compte lors de la liquidation de leur pension dans des conditions analogues à celles définies au II. Les modalités de cette prise en compte sont définies par décret en Conseil d’État.
IV. – Après la troisième phrase du 1° du I de l’article L. 314-2 du code de l’action sociale et des familles, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il peut financer des mesures de revalorisation salariale de personnels dont les rémunérations sont financées, en tout ou partie, par les forfaits mentionnés aux 2° et 3° du présent I. »
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, sur l’article.
M. Jean-Luc Fichet. Monsieur le président, madame la ministre, les temps ont changé, et ce que l’on vit depuis plusieurs mois a mis en évidence l’importance des professionnels des secteurs social, médico-social et hospitalier. Tous se sont fortement mobilisés pour faire face à cette épidémie aux effets absolument terribles.
Nous avons pu observer dans quelles conditions travaillaient ces professionnels et quel était leur niveau de rémunération. Force est de constater que leurs salaires sont très faibles dans la grande majorité des cas.
Des dispositions ont été prises au moyen de primes. Pour ma part, je pense que les primes ne sont pas appropriées ; elles font certes quelques contents, mais surtout de nombreux mécontents, d’autant qu’elles sont distribuées de façon inéquitable.
Il est vrai qu’il a été procédé à des revalorisations salariales dans les secteurs hospitalier et sanitaire, ce qui est une bonne chose, mais celles-ci ne concernent pas le secteur médico-social public, et ses agents en sont fort marris. La façon dont ils acceptent cet état de fait force le respect, car ils accomplissent un travail tout à fait important.
Le secteur médico-social, public ou privé non lucratif, a besoin de reconnaissance et ses agents méritent aussi cette revalorisation salariale qui bénéficie aux seuls agents titulaires du secteur public. Il faut travailler à mieux prendre en compte ces professionnels, qui ne déméritent pas.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Cet article prévoit la revalorisation du traitement des personnels non médicaux, notamment des infirmières et des aides-soignantes des établissements publics de santé et des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).
La forte mobilisation de ces personnels a conduit effectivement au plan Ségur, qui a permis une augmentation de 183 euros net mensuels. C’est un pas en avant qu’on ne peut que saluer, mais, en même temps, soulignons que la revendication des personnels allait bien au-delà, à savoir 300 euros au titre de la reconnaissance du travail effectué, des conditions de travail et de l’attractivité des métiers.
Madame la ministre, il faut entendre ces revendications au moment où l’on constate un manque de personnel dans les établissements publics de santé. Faute de relever les salaires de manière plus significative, le personnel hospitalier demeurera en nombre insuffisant.
Il faut aussi veiller à n’oublier personne et à ne laisser personne sur le côté de la route. Près de 40 000 soignants ne sont pas concernés par cette augmentation de salaire : ce sont les oubliés du Ségur de la santé.
Comme nombre de nos collègues siégeant sur toutes les travées, nous avons été sollicités par des personnels médico-sociaux, comme ceux des services de soins infirmiers à domicile, qui travaillent à l’hôpital et n’ont pas bénéficié de cette revalorisation salariale.
Il me semble important, et même essentiel, d’entendre ces personnels du secteur médico-social, qui sont laissés pour compte. Ils ont besoin de cette revalorisation salariale qui donnerait un coup de pouce à leur pouvoir d’achat. Cela leur apportera la preuve, en plus des applaudissements, que leur métier est au cœur de notre société car il permet de répondre aux besoins sanitaires, d’accompagnement, de suivi psychologique, si essentiels en cette période de pandémie.
Il est important de le souligner, et j’espère, madame la ministre, que vous pourrez intervenir afin de mettre fin à ces injustices.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, sur l’article.
Mme Annie Le Houerou. Monsieur le président, madame la ministre, pour faire suite aux interventions de mes deux collègues, je voudrais vous alerter sur cet article 25, qui donne une base législative aux compléments de traitement indiciaire.
Vous parlez d’exclusion ; or ce texte exclut de son champ d’application les agents des groupements d’intérêt public (GIP) qui sont fonctionnaires hospitaliers et qui ont une activité dans le domaine sanitaire. Il prévoit, en revanche, expressément que les agents mis à disposition ou les agents contractuels des groupements de coopération sanitaire (GCS) bénéficient de cette mesure.
Cette exclusion des GIP crée une différence de traitement entre les agents publics selon que les activités logistiques sont assurées en régie, portées par un GCS ou encore par un GIP.
La mutualisation au sein des GIP d’activités de logistique hospitalière s’est développée, soutenue d’ailleurs par l’État, afin d’améliorer l’efficience du dispositif hospitalier.
Pour prendre l’exemple de mon département des Côtes-d’Armor, deux structures interhospitalières traitent le linge de l’ensemble des établissements membres du groupement hospitalier de territoire (GHT) d’Armor et emploient des fonctionnaires hospitaliers. Les agents fonctionnaires mis à disposition de l’un, organisé sous forme de GCS, bénéficient de la mesure de revalorisation, tandis que les agents fonctionnaires mis à disposition de l’autre, organisé sous forme de GIP, n’en bénéficient pas.
Il s’agit, selon nous, d’une injustice incompréhensible pour les agents concernés. Ils ont le sentiment que leur métier est méprisé, non reconnu, alors qu’ils contribuent comme les autres agents hospitaliers à la lutte contre la covid. Ils sont les invisibles de la chaîne, pourtant essentiels à la bonne marche de l’hôpital.
Rectifiez cet oubli malencontreux que vous n’aviez pas anticipé et dont le coût, je pense, est marginal au regard des sommes en jeu. Quoi qu’il en coûte, merci de prendre en compte cette situation particulière !
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, sur l’article.
M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais profiter de cet article pour donner un point de vue général sur ce projet de loi de financement de la sécurité sociale et sur les revalorisations qui y sont proposées.
On croyait avoir le système de santé le plus performant au monde ; la crise a montré que ce n’était pas vrai. En revanche, il est le plus cher en Europe – cela paraît évident – et aussi au niveau mondial.
Contrairement à ce qui est souvent dit, nous sommes confrontés à un problème non pas de moyens – j’y insiste, notre système, qui est le plus cher, n’est pas le plus performant –, mais de répartition de moyens.
D’abord, le système français est très centré sur l’hôpital public, et sans doute la commission d’enquête sur la gestion la crise sanitaire le dira-t-elle. Surtout, l’administration est trop développée. C’est la bureaucratie française : le taux de personnel administratif à l’hôpital public est de 35 %, contre 24 % en Allemagne. Et les Allemands obtiennent de meilleurs résultats !
Il faudrait consacrer moins de moyens à l’administratif – cela implique de réduire en partie l’administration hospitalière – et donner plus de moyens aux soignants, ce qui nécessite de lancer une véritable étude comparative au niveau européen sur les rémunérations de nos soignants, le temps de travail hebdomadaire, l’absentéisme, et d’établir une comparaison avec le PIB par habitant.
Au mois de mai dernier, j’avais demandé au ministre des solidarités et de la santé qu’une telle étude soit réalisée. Je n’ai pas eu de réponse – ce n’est ni la première fois ni, sans doute, la dernière. Je le regrette, parce qu’une telle étude aurait permis d’objectiver tant soit peu nos propositions. J’entends bien sûr ceux qui disent que ce n’est pas assez, qu’il y a des oubliés, cependant que d’autres disent que c’est trop… Pour ma part, j’ignore ce qu’il en est, faute de disposer des éléments me permettant d’en juger.
Il est fort dommage que nous ne puissions pas juger objectivement des propositions de revalorisation que nous formulons pour ce personnel dévoué et compétent, qu’il faut saluer. Au-delà des applaudissements, il faudrait leur proposer une solution basée sur des études concrètes.
La gestion à l’aveuglette pratiquée aujourd’hui n’est pas une bonne gestion.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, sur l’article.
Mme Corinne Féret. Mes chers collègues, le secteur social et médico-social est essentiel à la cohésion sociale de notre pays. Il s’occupe de nos concitoyens les plus fragiles. Le Ségur de la santé aurait pu être l’occasion de le reconnaître à sa juste valeur : force est de constater que ce n’est pas le cas.
De nombreux professionnels ont été oubliés. En effet, ce sont près de 40 000 agents de la fonction publique hospitalière qui ne bénéficieront pas de la revalorisation de 183 euros mensuels net. Ainsi, les personnels des établissements sociaux et médico-sociaux en sont exclus. Pourtant, les aides médico-psychologiques, les aides-soignants, les personnels affectés au soutien gérontologique ou à l’accompagnement du handicap, comme les autres professions de ces établissements, ont été en première ligne dès le début de l’épidémie de covid-19. Ils s’y trouvent encore aujourd’hui.
Cette différence de traitement inspire un sentiment d’injustice auquel il faut répondre. Les élus du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain avaient proposé un amendement en ce sens, mais il a été déclaré irrecevable.
Les précédents orateurs ont cité plusieurs exemples concrets car ces situations sont nombreuses, sur l’ensemble du territoire. Pour ma part, je citerai les personnels de l’établissement public en santé mentale (EPSM) de Caen, dans le Calvados, département dont je suis l’élue. Ils ne comprennent pas cette situation et ils ne sont pas les seuls : je tenais à vous alerter en le soulignant une fois encore !
Mme Laurence Rossignol. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, sur l’article.
Mme Colette Mélot. Les accords du Ségur de la santé ont été signés le 13 juillet dernier par le Gouvernement et une majorité d’organisations syndicales. Ils bénéficieront à 1,5 million de professionnels. C’est une reconnaissance méritée de leur dévouement au service des patients et résidents des divers établissements.
À cet égard, je salue l’action du Gouvernement : elle permettra de rendre les métiers d’infirmier et d’aide-soignant plus attractifs. Les augmentations de salaire devraient également concerner les personnels des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad), des maisons d’accueil spécialisées (MAS), des établissements et services d’aide par le travail (ÉSAT), des Ehpad et le secteur du handicap tout entier, dont le travail est méritoire, notamment en cette période de crise sanitaire.
Madame la ministre, le Gouvernement a également apporté une aide aux départements. C’est un « plus » pour lutter contre la précarité du personnel à domicile, mais il faut aller plus loin.
Il est important de faire un effort pour le maintien à domicile dans le cadre du plan Grand âge. En 2019, notre pays dénombrait 2,5 millions de personnes dépendantes : il en comptera 4,5 millions en 2050. Ces personnes souhaitent, et souhaiteront, rester à domicile le plus longtemps possible. Pour les accompagner, il faut aussi consolider et rendre plus attractifs tous les métiers de l’aide à la personne !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, sur l’article.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Mes chers collègues, c’est l’ensemble du secteur social et médico-social qui mérite aujourd’hui un coup de booster. Ces professionnels doivent reprendre confiance et se sentir parties prenantes du projet de la Nation. Il faut qu’ils se sentent en situation de bien faire leur travail.
Le secteur social et médico-social a été oublié lors des débats du Ségur, alors qu’il connaît une crise profonde et que ses professionnels sont au premier front de notre République. Je pense aux instituts médico-éducatifs (IME), aux foyers d’accueil des ÉSAT ou encore aux différentes structures d’hébergement destinées aux personnes les plus en difficulté. Il est donc fondamental de revaloriser leurs conditions de travail, leur salaire et leur parcours.
On l’a vu il y a quelques années, dans de telles circonstances, on a tendance à dire que ces propositions coûtent trop cher, qu’elles sont démagogiques. Pour se décider à réagir, on attend qu’une crise survienne, que le doute s’instille partout, que le système soit totalement déstabilisé.
Faisons très attention : de nombreux secteurs connaissent d’immenses difficultés à recruter des personnels, en particulier des personnels qualifiés. Il me paraît urgent d’engager une revalorisation.
On l’a vu, pour diverses raisons techniques, il a été très difficile de déposer des amendements d’une véritable portée dans ce débat. Mais nous devons donner l’alerte au Gouvernement : au moins, qu’il écoute un peu les professionnels des différents secteurs ! Leurs propos ne sont pas toujours irresponsables, démagogiques ou corporatistes.
Alors que nous sommes de nouveau en pleine crise sanitaire, les personnels sociaux et médico-sociaux manifesteront le 3 décembre prochain, à l’appel des syndicats. Pourquoi toujours attendre de telles tensions au lieu d’élaborer de véritables stratégies de négociation, inscrites dans la durée ?
L’importance de cet enjeu fait consensus parmi nous, et j’espère que le Gouvernement entendra le Sénat !
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, sur l’article.
M. Patrice Joly. Mes chers collègues, au terme de ces échanges, je tiens à apporter ma contribution au débat : je ne crois pas que notre système de santé soit beaucoup plus coûteux que le système américain.
La France consacre un peu plus de 10 % du PIB à la santé – c’est à peu près la moyenne des pays de l’OCDE. Les États-Unis y consacrent, quant à eux, presque 17 % de leur PIB ! Vous le savez, leur système de santé repose sur le secteur privé. Or plus de 50 millions d’Américains ne sont pas couverts correctement, faute de pouvoir bénéficier de ces services onéreux !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 319 rectifié quater est présenté par Mmes Bonfanti-Dossat et Lherbier, MM. Cambon, Sido, H. Leroy et Charon, Mmes Richer et Puissat, MM. Piednoir et Cuypers, Mme Deromedi, M. Bascher, Mmes Micouleau et Garriaud-Maylam, M. Bonne, Mme Malet, M. Brisson, Mmes Raimond-Pavero et V. Boyer, MM. de Nicolaÿ, B. Fournier, Sol et Mandelli, Mme Delmont-Koropoulis et M. Gremillet.
L’amendement n° 430 rectifié bis est présenté par Mme Létard, MM. Henno, Louault et Levi, Mme Férat, M. Duffourg, Mme Billon, MM. Détraigne, Kern et Cazabonne, Mmes Saint-Pé et Gatel, M. Delcros, Mmes Guidez, Sollogoub et de La Provôté, M. P. Martin, Mme C. Fournier, M. Cadic, Mme Jacquemet et MM. Canevet, Capo-Canellas, Le Nay, Hingray, Poadja, Longeot et Chauvet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport d’information ayant pour objectif d’analyser la prise en compte dans le champ d’application du décret n° 2020-1152 du 19 septembre 2020 relatif au versement d’un complément de traitement indiciaire aux agents des établissements publics de santé, des groupements de coopération sanitaire et des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes de la fonction publique hospitalière, des agents de la fonction publique hospitalière intégrés dans les services de soins infirmiers à domicile et des agents des établissements et des services sociaux et médico-sociaux.
La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, pour présenter l’amendement n° 319 rectifié quater.
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Je pressens déjà le sort qui sera réservé à cet amendement, puisqu’il vise à demander un rapport… Il s’agit d’étudier le possible ajout des agents des services de soins infirmiers à domicile, ainsi que des agents des établissements et des services sociaux et médico-sociaux, dans le champ d’application du décret du 19 septembre 2020, qui a fait suite aux négociations du Ségur de la santé.
Chaque jour, ces professionnels accompagnent et soutiennent à domicile des personnes âgées ou en situation de handicap. Leur travail est indispensable et leur engagement exemplaire, notamment dans le contexte sanitaire que nous connaissons actuellement.
Or les agents des établissements et des services sociaux et médico-sociaux ainsi que les agents des Ssiad sont évincés du champ d’application du décret. Pour l’heure, ce dernier accorde un complément de traitement indiciaire aux agents des établissements publics de santé, des groupements de coopération sanitaire et des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes de la fonction publique hospitalière.
Pour davantage d’équité, il faut envisager l’extension du champ d’application de ce décret par une connaissance accrue de la situation, grâce à un rapport d’information projetant l’intégration des agents des Ssiad, ainsi que des agents des établissements et des services sociaux et médico-sociaux !
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° 430 rectifié bis.
Mme Annick Billon. Ces dispositions viennent d’être défendues comme il se doit par Mme Bonfanti-Dossat, mais le sort de notre amendement nous inspire également quelques craintes.
Je rappellerai simplement ce chiffre, qui a déjà été cité : rien que pour les 2 000 Ssiad de France, 40 000 salariés sont oubliés, alors que près de 100 000 personnes sont accueillies dans ces services !
De telles situations ne sont pas acceptables, qu’il s’agisse des personnels ou des directeurs de ces établissements, qui ont à gérer des situations conflictuelles. Le directeur du centre hospitalier Georges-Mazurelle, en Vendée, m’alertait encore sur ce sujet il y a quelques jours.
Il s’agit certes d’une demande de rapport, mais notre assemblée sait bien que tous les rapports ne se valent pas !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Les auteurs de ces amendements demandent la remise d’un rapport sur l’extension des revalorisations aux personnels des services sociaux et médico-sociaux ainsi que des Ssiad.
Bien entendu, j’ai conscience de la difficulté de tous ces métiers : ils ont besoin de reconnaissance et nous devons favoriser leur attractivité. D’ailleurs, la revalorisation indiciaire pour les professionnels des établissements de santé et des Ehpad est intervenue dans le contexte de la covid-19 – ce constat a été rappelé. Au-delà, on l’a dit également, tous ces secteurs font face à des questions d’organisation structurelle ; il faudra y travailler.
Madame Bonfanti-Dossat, madame Billon, vous l’avez deviné : ces amendements reçoivent un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, les 8 milliards d’euros de revalorisations salariales constituent un effort sans précédent. Les oubliés du Ségur, que les uns et les autres relèvent aujourd’hui, sont, à mon sens, les oubliés de très nombreuses années de politiques.
Mme Laurence Cohen. C’est sûr !
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Bien sûr, en ces temps de crise, il est normal de relayer leurs demandes. Nous sommes à leurs côtés, avec vous ! Mais il faut tout de même replacer les faits dans leur contexte.
Le Ségur, cela fut aussi 90 participants, 100 réunions bilatérales, 200 réunions territoriales, 118 407 participants qui ont remis des avis en ligne. Le Ségur, ce n’est pas seulement le complément de traitement indiciaire, dont nous sommes en train de débattre : c’est aussi la revalorisation des grilles indiciaires, qui bénéficiera très largement aux professionnels de santé, y compris dans les établissements médico-sociaux. Ces personnels méritent évidemment de tels engagements.
Avec Olivier Véran, nous avons demandé aux services du ministère un point complet sur la situation au sein de ces établissements. Ce travail, qui a déjà commencé, ne dépend pas que de nous. Aussi, une première rencontre avec les partenaires sociaux de la fonction publique, notamment hospitalière, a été organisée le 12 octobre dernier. L’expertise en cours permettra de réunir tous les éléments nécessaires sans passer par le rapport proposé.
J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 319 rectifié quater et 430 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 846 rectifié, présenté par MM. Gremillet, Bonnus, Calvet, Bacci, Cambon et Duplomb, Mmes M. Mercier, Goy-Chavent et Micouleau, MM. Chaize, D. Laurent et Bouloux, Mme Malet, MM. Piednoir, H. Leroy et Perrin, Mme Drexler, MM. Bascher et Paccaud, Mme Thomas, M. Rietmann, Mmes Chauvin, Deromedi et L. Darcos, MM. Belin, de Nicolaÿ et Savin, Mmes Raimond-Pavero, Garriaud-Maylam et Ventalon, MM. Darnaud, Regnard et Cuypers, Mme Dumont, MM. Pointereau, Houpert et Babary et Mme Noël, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport d’information ayant pour objectif d’analyser la prise en compte de la « Prime Ségur » issue des accords du Ségur de la santé au sein de la fonction publique territoriale et plus précisément au sein des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes territoriaux. Il étudie, notamment, les possibilités de financement de cette prime par l’agence régionale de santé.
La parole est à Mme Viviane Malet.
Mme Viviane Malet. À la suite de la première vague de covid-19, au printemps dernier, en reconnaissance de la forte mobilisation des personnels soignants, une concertation entre le ministère des solidarités et de la santé, d’une part, et les acteurs du monde de la santé, de l’autre, a abordé largement la question des métiers, des carrières et de la revalorisation des rémunérations.
Ces travaux ont abouti aux accords du Ségur de la santé, en juillet 2020. Dans ce cadre, la fonction publique territoriale doit bénéficier d’une revalorisation spécifique ; mais encore faut-il qu’elle soit financée ! Il faut étudier les possibilités de financement de cette prime par les ARS. Il convient notamment d’examiner les moyens de la verser pendant l’année en cours, sur la base d’un déclaratif arrêté en début d’année ou inclus dans la circulaire budgétaire.
A priori, la prime Ségur pourrait représenter 200 000 à 250 000 euros pour un Ehpad territorial de soixante lits, soit l’équivalent de cinq infirmières ou de sept aides-soignantes en fonction des fluctuations d’effectifs sur un an, ce qui représente presque 25 % d’une dotation de soins. Cela étant, beaucoup d’Ehpad sont déjà sous-dotés !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Évidemment, ces sujets sont intéressants, mais il s’agit d’une demande de rapport.
La commission émet, en conséquence, un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Madame la sénatrice, la prime Ségur est déjà prévue pour tous les personnels des Ehpad, quel que soit leur statut.
Avis défavorable.
Mme Viviane Malet. Je retire cet amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 846 rectifié est retiré.
L’amendement n° 847 rectifié, présenté par MM. Gremillet, Bonnus, Calvet, Bacci, Cambon et Duplomb, Mmes M. Mercier, Goy-Chavent et Micouleau, MM. Chaize, D. Laurent et Bouloux, Mme Malet, MM. Piednoir, H. Leroy et Perrin, Mme Drexler, M. Paccaud, Mme Thomas, M. Rietmann, Mmes Chauvin, Deromedi et L. Darcos, MM. Belin, de Nicolaÿ et Savin, Mmes Raimond-Pavero, Garriaud-Maylam et Ventalon, MM. Darnaud, Regnard, Houpert et Pointereau, Mme Dumont, MM. Cuypers et Babary et Mme Noël, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport d’information ayant pour objectif d’analyser la prise en compte dans le champ d’application du décret n° 2020-1189 du 29 septembre 2020 portant création d’une prime « Grand âge » pour certains personnels de la fonction publique territoriale des possibilités de financement de cette prime par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie ou l’agence régionale de santé.
La parole est à Mme Viviane Malet.
Mme Viviane Malet. Il est défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Malet, l’amendement n° 847 rectifié est-il maintenu ?
Mme Viviane Malet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 847 rectifié est retiré.
La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, j’attire votre attention sur les négociations en cours avec les centres de lutte contre le cancer. Au sein de ces établissements, les personnels non médicaux ont obtenu des revalorisations, mais les médecins restent dans l’attente.
Je rappelle que ces praticiens assument un exercice public exclusif : ils renoncent à toute activité libérale. Ils ont été particulièrement mobilisés, et ils le sont encore, en cette période très difficile pour les patientes et patients atteints de cancer ; je pense notamment aux déprogrammations, aux retards de diagnostic et de prise en charge.
Je souhaite réellement que les négociations aboutissent : la revalorisation de ces carrières est nécessaire. Il y va de la pérennité des centres de lutte contre le cancer ! (Mme la ministre déléguée acquiesce.) Je n’ai pas sollicité de rapport sur le sujet – même en rebaptisant ce document « étude », comme l’a fait M. Milon (Sourires.) –, car je connais le sort réservé à de telles demandes. Mais je tenais à attirer votre attention sur ce point !
M. le président. Je mets aux voix l’article 25.
(L’article 25 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 25
M. le président. L’amendement n° 475 rectifié, présenté par MM. Bonne et Babary, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bouchet et Brisson, Mmes Chauvin et L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Deromedi, Dumas et Estrosi Sassone, M. B. Fournier, Mmes Gruny et Guidez, MM. Henno, D. Laurent et Lefèvre, Mme M. Mercier, M. Moga, Mme Puissat, MM. Canevet et de Legge, Mme Garriaud-Maylam et MM. Laménie, Mandelli, P. Martin, Piednoir, Somon, Tabarot, H. Leroy, Charon et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les conventions prévues à l’article L. 162-9 du code de la sécurité sociale définissant les conditions dans lesquelles les caisses d’assurance maladie participent au financement des cotisations dues par les professionnels de santé, mentionnées au 5° de l’article L. 162-14-1 du même code, peuvent être révisées avant l’arrivée de leur terme à la demande d’au moins cinq organisations syndicales nationales les plus représentatives adressée au directeur général de la caisse nationale d’assurance maladie. Un décret fixe les conditions de cette négociation.
La parole est à M. Bernard Bonne.
M. Bernard Bonne. L’avantage social vieillesse (ASV) est un régime surcomplémentaire de retraite créé en 1960 pour inciter les professionnels de santé libéraux à être conventionnés. Il vient compenser les honoraires contraints par la convention avec l’assurance maladie par le biais d’une participation de l’assurance maladie aux cotisations de retraite.
Rendu obligatoire en 1975, ce régime a été réformé en 2008. Depuis, il fonctionne sur le mode de la répartition, qui a permis de réduire le niveau des cotisations et d’augmenter l’allocation perçue.
Pour les auxiliaires médicaux libéraux, l’assurance maladie prend ainsi en charge les deux tiers de la part forfaitaire de la cotisation annuelle et 60 % de la cotisation proportionnelle aux revenus. Des négociations pluriprofessionnelles avaient été lancées à l’occasion des débats sur la réforme du système de retraite, afin d’offrir une solution à la hausse des cotisations ainsi engendrée.
Cet amendement d’appel vise à rendre possible la réouverture de ces négociations pluriprofessionnelles, brutalement interrompues du fait de la crise sanitaire.
En août dernier, dans la lettre de mission du nouveau directeur général de la CNAM, le ministre des solidarités et de la santé a souligné la mobilisation exceptionnelle des professionnels de santé, qui a permis de faire face à la première vague de l’épidémie de covid-19.
Certes, le PLFSS pour 2021 met en œuvre les engagements du Ségur de la santé liés à la revalorisation des carrières des personnels non médicaux dans les établissements de santé et les Ehpad. Mais il est également temps de saluer la large participation des praticiens de santé libéraux à la continuité des soins sur l’ensemble du territoire auprès de personnes isolées et fragilisées dans ce contexte sanitaire.
Il faut donc inscrire l’ASV au cœur des futures négociations conventionnelles pluriprofessionnelles afin de renforcer les engagements réciproques entre les professionnels de santé et l’assurance maladie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à permettre l’ouverture anticipée de renégociations relatives à l’ASV.
Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer le calendrier que le Gouvernement entend retenir ?
Mon cher collègue, comme vous le dites vous-même, il s’agit d’un amendement d’appel. Je souhaite moi aussi la réouverture des négociations, mais il ne me paraît pas souhaitable d’inscrire cette disposition dans la loi de financement de la sécurité sociale. Voilà pourquoi je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, ce choix est laissé aux organisations syndicales représentatives : l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam) peut rouvrir les négociations à tout moment avant expiration du délai de cinq ans. Comme vous le savez, ces dernières feront alors l’objet d’un avenant à la convention.
À ce stade, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Bonne, l’amendement n° 475 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Bonne. Je suis tout à fait prêt à retirer mon amendement, à condition de disposer d’une date. Ainsi aura-t-on la certitude que les négociations seront rouvertes.
M. Bernard Bonne. Dans ces conditions, je maintiens mon amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 25.
L’amendement n° 1042, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement relatif aux nouvelles embauches nécessaires dans l’hôpital public.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement vise lui aussi à demander un rapport au Gouvernement. En l’occurrence, il s’agit des embauches nécessaires pour remettre à flot le secteur public hospitalier !
Nous avons longuement débattu et, dans les prochaines heures, nous allons encore beaucoup parler des capacités de notre système hospitalier. Ce dernier est sous tension, et même au bord de la rupture, c’est pourquoi on a été obligé d’instaurer un second confinement après avoir activé le Plan blanc.
Madame la ministre, cette situation ne date pas tout à fait d’aujourd’hui – sur ce point, je peux vous rejoindre. Par le passé, certaines décisions ont été lourdes de conséquences…
Mme Laurence Rossignol. La loi Bachelot !
Mme Céline Brulin. Absolument ! On pourrait même remonter plus loin, avec l’instauration du numerus clausus. Mais nous n’allons pas refaire l’histoire contemporaine du système hospitalier…
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Non, non ! (Sourires.)
Mme Céline Brulin. En tout cas, comme l’a dit un de nos collègues sur un autre sujet, il semblerait utile d’objectiver la nécessité d’embaucher – nous le proposons aussi – dans le secteur hospitalier. Par la même occasion, on ferait un peu de prospective.
Je pense notamment aux régions, qui sont appelées à financer les instituts de formation en soins infirmiers (IFSI) ou les instituts de formation d’aides-soignants (IFAS), et ont besoin pour élaborer leurs plans de formation de connaître le volume des futurs recrutements.
La suppression du numerus clausus est une très bonne chose ; mais, pour les universités, elle implique vraisemblablement d’ouvrir des formations supplémentaires.
Il serait donc utile de dresser un état des lieux de la situation actuelle. Bien sûr, ce travail suppose d’écouter les personnels, qui sont mobilisés depuis des mois pour exiger des revalorisations salariales. Nous sommes face à un véritable enjeu d’attractivité. De nombreux postes sont à pourvoir, mais le besoin de recrutement est plus large : il exige une stratégie, dont ce rapport serait la première étape !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à demander au Gouvernement un rapport sur les besoins humains supplémentaires nécessaires dans l’hôpital public.
Ma chère collègue, évidemment, cette question se pose, on l’a constaté lors du Ségur. Mais, comme je vous l’ai dit précédemment, au-delà des effectifs, il faut prendre en compte à la fois les enjeux organisationnels et l’attractivité des métiers.
Vous le savez déjà, la commission est défavorable à votre demande de rapport. J’ajoute à cet avis une remarque tout à fait personnelle, que j’adresse également à Mme la ministre : au-delà des moyens humains et des conditions de travail, en particulier à l’hôpital public, il faut s’inquiéter de la perte de sens de l’engagement qu’éprouvent les professionnels de santé. (Marques d’approbation sur les travées du groupe CRCE. – Mme Laurence Rossignol opine également.) Je pense notamment aux médecins.
Les départs que l’on observe dans certains hôpitaux ne s’expliquent pas seulement par les conditions salariales. J’y insiste, ils traduisent une perte de sens. Enfin, les soignants ont parfois le sentiment d’être infantilisés par l’administration hospitalière. Ce qu’ils demandent, c’est tout simplement de pouvoir exercer leur métier, de faire ce pour quoi ils ont choisi le métier de médecin, d’aide-soignant ou encore d’infirmer !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Madame la sénatrice, le suivi des effectifs doit être assuré dans le cadre du dialogue social.
Vous évoquez l’accord relatif au personnel de la fonction publique hospitalière conclu dans le cadre du Ségur de la santé avec les organisations syndicales ; mais cet accord vise déjà à couvrir les besoins en effectifs dans les établissements. J’ajoute que cette mesure prévoit la réalisation d’études d’impact par les établissements hospitaliers.
Les établissements devront réaliser ces études d’impact en lien avec les organisations syndicales au niveau local, pour aboutir à un diagnostic partagé de la situation des effectifs. En conséquence, un tel rapport n’ajouterait rien.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° 575, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement évaluant les effets sur la loi de financement de la sécurité sociale d’une embauche massive de personnel dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Ces embauches doivent permettre d’assurer un taux d’encadrement auprès des résidents d’au moins un personnel pour un résident et 0,6 soignant pour un résident. Elles doivent également permettre d’anticiper l’augmentation du nombre de personnes âgées dans les années à venir.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’une demande de rapport : la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 575.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 26
I. – L’article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000) est ainsi modifié :
1° À la fin de la première phrase du I, les mots : « des établissements de santé publics et privés » sont remplacés par les mots : « et l’investissement en santé » ;
2° Le III est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « sanitaire », sont insérés les mots : « , des structures d’exercice coordonné mentionnées aux articles L. 1411-11-1, L. 1434-12, L. 6323-1 et L. 6323-3 du code de la santé publique ainsi que des établissements et services médico-sociaux mentionnés à l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles » ;
b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le fonds peut financer l’ensemble des dépenses engagées dans le cadre d’actions ayant pour objet la modernisation, l’adaptation ou la restructuration des systèmes d’information de l’offre de soins et de l’offre médico-sociale. » ;
3° Le III bis est abrogé ;
3° bis (nouveau) Après le III quinquies, sont insérés des III sexies et III septies ainsi rédigé :
« III sexies. – L’interopérabilité des logiciels informatiques est une condition au financement des dépenses engagées pour la transformation et la modernisation des systèmes informatiques.
« III septies. – Lors de l’utilisation de ces financements pour l’achat de logiciels informatiques, les établissements publics de santé disposent du droit de refuser le paiement de la facture lorsque les référentiels d’interopérabilité ne sont pas respectés. » ;
4° À la première phrase du premier alinéa du IV, les mots : « d’un an » sont remplacés par les mots : « , fixé par décret, d’au moins un an » et les mots : « de trois ans » sont remplacés par les mots : « , fixé par décret, d’au moins un an » ;
5° La première phrase du premier alinéa du V est ainsi rédigée : « Les ressources du fonds sont notamment constituées par le reversement des avances remboursables mentionnées au III ainsi que par des participations des régimes obligatoires d’assurance maladie et de la branche mentionnée au 5° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale. »
II (nouveau). – Au premier alinéa de l’article L. 6161-3-2 du code de la santé publique et au second alinéa du II de l’article 49 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, les mots : « des établissements de santé publics et privés » sont remplacés par les mots : « et l’investissement en santé ».
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Mes chers collègues, les dispositions de cet article dépendent pour partie du financement européen du plan de relance. En effet, près de la moitié du plan de 100 milliards d’euros repose sur les engagements de l’Union européenne. Mais les États partisans de l’austérité sont toujours aux commandes, malgré la remise en cause permanente du capitalisme et particulièrement du libéralisme financiarisé.
Nous n’accepterons pas davantage l’argent de l’Union européenne soumis, en contrepartie, à des mesures régressives comme la réforme des retraites ou la suppression de postes de fonctionnaires.
L’article 26 est justement le bras armé du Gouvernement pour imposer des plans d’austérité dans les hôpitaux qui bénéficieront de la reprise partielle de leur dette.
De la même manière, nous refuserons le chantage à l’emploi, selon lequel l’État reprendrait 100 millions d’euros de dette en échange d’un plan social et, au total, de la réduction des capacités hospitalières.
Nous défendons une politique alternative : l’État doit assumer intégralement la reprise de la dette des hôpitaux et profiter des taux d’intérêt négatifs pour rembourser aux établissements une dette qui n’est pas la leur, en leur apportant au passage une bouffée d’oxygène !
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, sur l’article.
Mme Annie Le Houerou. Nous voterons cet article, qui contient un plan de 6 milliards d’euros d’investissements pour l’hôpital.
Ces fonds viendront financer des projets hospitaliers, des investissements numériques en santé et la rénovation d’établissements médico-sociaux. L’effort est incontestable, à défaut d’être historique, comme l’affirme M. le ministre : 10 milliards d’euros avaient été consacrés au plan Hôpital 2012.
Ces sommes sont évidemment les bienvenues, mais elles ne permettront pas de faire face à l’état d’obsolescence et de vétusté dans lequel se trouvent de nombreux établissements de santé dans notre pays. Les capacités d’autofinancement sont dégradées, voire négatives, pour plus du tiers de nos hôpitaux. Les investissements ont chuté de plus de 50 % dans nos hôpitaux ces dernières années.
Nous nous interrogeons sur les critères retenus, notamment pour l’enveloppe de 2,5 milliards d’euros consacrée à ce que le Gouvernement appelle « les projets hospitaliers prioritaires » sans les définir, sans même donner d’indications à cet égard.
Cette somme de 2,5 milliards d’euros paraît considérable à l’échelle du pays, mais elle ne permettra pas de couvrir tous les besoins, qui sont immenses.
Madame la ministre, nous comptons sur une procédure claire et transparente pour la répartition de ces crédits. Pour leur attribution, comment comptez-vous garantir l’équité territoriale ? Pouvez-vous nous assurer que les hôpitaux des zones rurales, qui jouent un rôle essentiel dans l’accès aux soins, ne seront pas oubliés au profit des hôpitaux de référence ?
Plus les invités sont nombreux autour de la table, plus les parts du gâteau s’amenuisent. Il ne faudrait pas l’émietter ! Bref, pouvez-vous nous éclairer sur la mise en œuvre de ces aides et leur attribution ? Quelles instances participeront aux décisions d’orientation et aux choix d’investissement ?
3
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour un rappel au règlement.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en ce 13 novembre, je tiens à rendre hommage à toutes les victimes – 130 morts, 413 blessés – des terribles attentats perpétrés il y a cinq ans.
Chacun d’entre nous se souvient encore de l’endroit où il était ce jour-là.
Depuis cinq ans, la France est sous la menace terroriste. Nous sommes tous concernés, nous sommes tous mobilisés et nous sommes tous déterminés à lutter contre l’islamisme radical sous toutes ses formes !
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.
4
Retrait de l’ordre du jour d’une proposition de loi
M. le président. Par lettre en date du 12 novembre 2020, M. Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains, demande le retrait de l’ordre du jour du mardi 17 novembre 2020 de la proposition de loi tendant à adapter les règles de passation des marchés publics locaux, conséquence de la crise sanitaire.
Acte est donné de cette demande.
5
Candidatures à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au retour de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
6
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour un rappel au règlement.
M. Bernard Jomier. Ce rappel au règlement s’appuie sur l’article 32 de notre règlement, relatif à l’organisation des séances.
Ce matin, nous avons été invités à plusieurs reprises à accélérer le rythme des débats ; or la matinée s’est déroulée sur un rythme horaire de discussion des amendements parfaitement conforme à la moyenne habituelle de notre assemblée. Malheureusement, ce budget de la sécurité sociale est discuté durant une semaine de trois jours et demi, ce qui est insuffisant.
De plus, nous nous trouvons dans des circonstances particulières et, ainsi que nous l’avons dénoncé, il n’y a pas eu de loi de financement rectificative de la sécurité sociale depuis le début de la crise sanitaire, alors que nous en sommes au quatrième projet de loi de finances rectificative.
Il y a beaucoup de matière à discuter et nos échanges de ce matin ont encore montré que la variété des sujets abordés nécessitait que nous y consacrions un minimum de temps.
Nous en sommes presque arrivés à nous autocensurer en partie ; j’ai notamment à l’esprit des amendements très importants présentés par Alain Milon et concernant l’organisation du système de soins et son financement, qui ont été adoptés presque sans débat.
Nous ne freinons en aucune manière les débats pour quelque raison que ce soit, mais nous considérons que le vote du budget de la sécurité sociale est un acte parlementaire important et nous avons besoin de temps, simplement, pour en débattre.
J’appelle donc le Gouvernement et la conférence des présidents à considérer la nécessité de prévoir, l’année prochaine, un temps suffisant à cette fin.
Il n’est évidemment pas raisonnable de prétendre terminer l’examen de ce projet de loi ce soir. Il nous faudra donc siéger demain et, s’il nous fallait poursuivre au-delà, cela ne découlerait que de la nécessité du débat.
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.
7
Financement de la sécurité sociale pour 2021
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. Mes chers collègues, nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2021.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’examen des amendements à l’article 26.
Article 26 (suite)
M. le président. L’amendement n° 162 rectifié, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 2
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
…° Le II est ainsi rétabli :
« II. – Le Conseil national de l’investissement en santé définit des orientations nationales en matière de modernisation et d’investissement en santé. Il peut prévoir des déclinaisons territoriales des orientations retenues au niveau national, tenant compte des spécificités et priorités locales.
« Les demandes adressées au fonds prévu au I doivent s’inscrire dans les orientations nationales définies par le Conseil. Le Conseil assure la sélection des seuls projets dont le financement dépasse des seuils précisés par voie réglementaire.
« Les missions du Conseil, sa composition ainsi que les modalités de son fonctionnement sont fixées en tant que de besoin par voie réglementaire. » ;
II. – Après l’alinéa 12
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au IX, après le mot : « Mayotte » sont insérés les mots : « , Saint-Barthélemy, Saint-Martin ».
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l’assurance maladie. Pour présenter cet amendement, je voudrais faire un point sur ce qui nous est proposé, au-delà des seules dispositions présentes à cet article.
Si celui-ci ne vise, juridiquement, qu’à transformer le fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP) en fonds pour la modernisation et l’investissement en santé (FMIS), il en modifie ainsi le champ comme les dépenses éligibles. Il s’agit bien d’une concrétisation du Ségur que l’on nous demande de mettre en œuvre, concernant, notamment, les 6 milliards d’euros d’investissements structurants promis pour la santé, pour l’hôpital, mais aussi pour le secteur médico-social.
Or force est de constater que, sur ces éléments financiers qui sont pourtant le nerf de la guerre, l’étude d’impact du PLFSS est relativement imprécise, voire parfois contradictoire. Ainsi, je me propose de vous présenter quelques éléments qui ont pu nuire, à mon sens, à la clarté des débats.
Le FMIS ne portera pas les 6 milliards d’euros d’investissement, mais 3,9 milliards d’euros. La ventilation de ce grand plan entre les trois grands piliers que sont la santé, le numérique et le médico-social ne reprend néanmoins pas totalement ce qui relève du FMIS.
En outre, l’assurance maladie, contributeur du FMIS, continuera d’apporter une dotation annuelle au-delà du Grand plan, mais les fonds que la CNAM apportera, au titre des 6 milliards d’euros, seront, quant à eux, remboursés par l’Union européenne, à travers le plan de relance européen. L’assurance maladie sert donc d’avance à des crédits du plan de relance européen. Nous considérons que cela est original, pour ne pas dire mal venu.
On nous promet un fonds transversal visant à lancer des passerelles entre la ville et l’hôpital, entre le sanitaire et le médico-social. Soit, nous signons. Le Grand plan d’investissement contient lui-même, toutefois, trois sous-enveloppes qui distinguent bien entre sanitaire et médico-social.
Bref, vous l’aurez compris, si nous soutenons l’effort massif fait en destination des investissements de modernisation de la santé, nous sommes circonspects quant à la feuille de route financière qui nous est présentée. Je tenais à le souligner.
J’en viens à l’amendement déposé par notre commission, laquelle a souhaité, sur cet article au dispositif purement juridique de constitution du fonds, s’intéresser davantage à la gouvernance de celui-ci. Nous entendons le souhait du Gouvernement que cette gouvernance soit territorialisée et nous attendons que les contours du futur Conseil national de l’investissement en santé (CNIS) soient précisés.
La commission a ainsi souhaité inscrire dans la loi le rôle général du CNIS. Notre préoccupation est bien que la future stratégie d’investissement en santé s’appuie sur les territoires, et, au-delà de la composition du CNIS, nous entendons que la feuille de route nationale appuie des priorités locales et tienne compte des spécificités de certains de nos territoires, notamment les territoires ruraux, mais aussi les outre-mer.
Aussi l’amendement que je vous propose vise-t-il à satisfaire certaines préoccupations qui se font jour dans les amendements relatifs au CNIS, notamment les amendements nos 883 rectifié ter et 814 rectifié, dont je demanderai le retrait en faveur de la rédaction que je vous soumets ici.
Enfin, nous avons souhaité préciser que les dispositions relatives au FMIS sont applicables dans l’ensemble des territoires ultramarins dans lesquels s’applique le droit commun de la santé.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l’autonomie. Vous entendez fixer dans la loi le rôle du Conseil national de l’investissement en santé, prévu par le Ségur.
Compte tenu des enjeux relatifs à ce plan d’investissements massifs et à sa gouvernance, je souhaite, quant à moi, que l’on prenne le temps de la concertation afin de recueillir au préalable l’avis de l’ensemble des acteurs nationaux et locaux concernés.
Le Comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins hospitaliers (Copermo) ne s’occupait que de la question de l’hôpital, quand la vocation du CNIS est beaucoup plus large : elle embrasse l’hôpital, le médico-social et le numérique.
Nous devons donc aller au bout de cette concertation, dont je vous informe qu’elle a débuté et qu’elle se prolongera jusqu’à la fin de l’année. Quand elle sera terminée, le rôle du CNIS sera fixé par voie réglementaire et/ou par circulaire. Cela nous semble être la norme la plus pertinente, qui facilitera également d’éventuelles adaptations ultérieures visant à tenir compte des retours d’expérience des acteurs concernés.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 384 rectifié, présenté par M. Sol, Mme Garriaud-Maylam, MM. Brisson et Daubresse, Mmes Joseph et L. Darcos, MM. Calvet, Regnard, Grand et Savary, Mmes Goy-Chavent, Raimond-Pavero, V. Boyer et Puissat, MM. Cambon, Pellevat et B. Fournier, Mmes Deromedi, Bonfanti-Dossat et Drexler, MM. Bascher, E. Blanc, Laménie et Mandelli, Mme Lherbier et MM. Pointereau, H. Leroy, Charon et Saury, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
a) Au premier alinéa, les mots : « et des groupements de coopération sanitaire, » sont remplacés par les mots : « , des groupements de coopération sanitaire, des structures d’exercice coordonné et des établissements et services médico-sociaux » ;
La parole est à M. Jean Sol.
M. Jean Sol. Cet article prévoit que le FMIS, qui sera doté de 6 milliards d’euros et dont la moitié sera consacrée à l’investissement en santé, soit réservé, en sus des établissements de santé, des services médico-sociaux et des groupements de coopération sanitaire, aux structures d’exercice coordonné de type communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), aux équipes de soins primaires et aux équipes de soins spécialisés.
Limiter l’accompagnement aux structures d’exercice coordonné ne serait pas favorable au développement du dossier médical partagé (DMP), au sujet duquel il faudrait d’ailleurs faire un point d’étape.
En outre, l’exclusion des cabinets libéraux hors CPTS, équipes de soins primaires et équipes de soins spécialisés, aurait pour conséquence le ralentissement de la modernisation des systèmes d’informatisation en médecine de ville et n’encouragerait pas les médecins à s’investir dans la synthèse du volet médical.
Cet amendement vise donc à rétablir cet équilibre.
M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 40 rectifié ter est présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel, Genet, Bonne, Piednoir et Savary, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard et B. Fournier.
L’amendement n° 104 rectifié quater est présenté par Mmes Lassarade, Bonfanti-Dossat et Malet, M. Bonhomme, Mme F. Gerbaud et MM. Rapin, Cuypers et Babary.
L’amendement n° 126 rectifié quater est présenté par Mme Raimond-Pavero et MM. Pellevat, Courtial, Lefèvre, Saury, Paccaud, Perrin, Rietmann et Bouloux.
L’amendement n° 593 est présenté par Mme Lienemann.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
1° Remplacer les mots :
mentionnées aux articles L. 1411-11-1, L. 1434-12, L. 6323-1 et L. 6323-3 du code de la santé publique ainsi que
par le mot :
et
2° Après le mot :
médico-sociaux
supprimer la fin de cet alinéa.
La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 40 rectifié ter.
M. Alain Milon. Il est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour présenter l’amendement n° 104 rectifié quater.
Mme Florence Lassarade. Il est défendu.
M. le président. Les amendements nos 126 rectifié quater et 593 ne sont pas soutenus.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces amendements visent à élargir le champ des bénéficiaires du FMIS, afin, notamment, de permettre à des cabinets libéraux d’y avoir accès.
La rédaction actuelle comprend les équipes de soins primaires, les équipes de soins spécialisés, les CPTS, les centres de santé et les maisons de santé. Certains des amendements visant à l’intégration de ces structures sont donc satisfaits sur ce point.
La suppression des références vise à élargir le champ des structures d’exercice coordonné. Il s’agit, ici, de prévoir l’éligibilité des cabinets libéraux au FMIS. Je partage cette préoccupation : beaucoup de cabinets libéraux font aujourd’hui des efforts et investissent pour répondre aux besoins en matière de numérique ; notre intention est bien de fluidifier l’usage du numérique à tous les niveaux de la prise en charge du patient. Je suis donc favorable à ce que le fonds leur soit accessible.
Je peine, en revanche, à distinguer la pertinence d’une suppression de la référence retenue pour les établissements médico-sociaux, dans la mesure où celle-ci n’exclut aucun établissement.
L’avis de la commission est donc défavorable sur l’amendement n° 384 rectifié, et favorable sur les amendements identiques nos 40 rectifié ter et 104 rectifié quater.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Madame la rapporteure, à mon sens, ces trois amendements sont satisfaits et leur adoption irait à l’encontre de la philosophie même de l’article, lequel concerne bien la médecine coordonnée, une pratique que nous souhaitons soutenir à l’avenir. Personne n’est donc exclu, mais nous retenons tout de même une forme d’exercice, les CPTS et les équipes coordonnées, que nous entendons déployer et soutenir.
L’avis du Gouvernement est défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 40 rectifié ter et 104 rectifié quater.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 906 rectifié, présenté par MM. Roux, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et M. Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après le mot :
objet
insérer les mots :
l’équipement,
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Cet amendement, présenté par Jean-Yves Roux, tend à ajouter un fléchage du fonds permettant aux maisons de santé et aux centres de santé de s’équiper de plateaux techniques – ce qui vient d’être dit me laisse penser que cette partie est satisfaite –, mais aussi de disposer d’une couverture numérique suffisante pour assurer la transmission des informations vers les hôpitaux et pour renforcer le lien entre la ville et l’hôpital ainsi que les processus de télésanté ou de e-santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement porte en effet sur un alinéa relatif aux systèmes d’information. Il me semble donc satisfait.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Guillotin, l’amendement n° 906 rectifié est-il maintenu ?
Mme Véronique Guillotin. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 906 rectifié est retiré.
L’amendement n° 676 rectifié ter, présenté par Mme V. Boyer, MM. Boré, Le Rudulier et Frassa, Mme Micouleau, M. Daubresse, Mmes Dumas, Deromedi et Joseph, MM. B. Fournier et Bouchet, Mmes Garriaud-Maylam, Raimond-Pavero et Lavarde, M. Houpert, Mmes Drexler et Thomas et MM. Cuypers, Rapin, Sautarel, Gremillet, Genet et Charon, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« …. – Les demandes de financement de projets mentionnés au III du présent article sont reçues au cours de périodes déterminées par voie réglementaire. Elles sont examinées sans qu’il soit tenu compte de l’ordre de leur dépôt.
« Les projets sont sélectionnés par le directeur général de l’agence régionale de santé après avis du comité consultatif d’allocation des ressources. La décision relative à l’allocation de ressources issues du fonds mentionné au I est motivée et publiée.
« Le présent paragraphe est précisé, en tant que de besoin, par décret en Conseil d’État.
La parole est à Mme Valérie Boyer.
Mme Valérie Boyer. Les conclusions du Ségur ont acté la mise en place d’aides à l’investissement à hauteur de 19 milliards d’euros, dont 13 milliards d’euros consacrés au désendettement des établissements de santé relevant du service public hospitalier.
Les autres investissements seront prioritairement dédiés à la transformation, à la rénovation et à l’équipement des établissements médico-sociaux, pour 2,1 milliards d’euros, aux projets hospitaliers prioritaires et investissements ville-hôpital, à hauteur de 2,5 milliards d’euros, ainsi qu’aux enjeux sur le numérique, pour 1,4 milliard d’euros.
Il ne s’agit malheureusement pas du premier plan de relance. Je vous rappelle qu’en 2012, ce sont 10 milliards d’euros qui ont été consacrés à l’hôpital. Pourtant, nous rencontrons toujours des difficultés.
La répartition de ces aides à l’investissement sera, pour la plus grande part, pilotée au niveau régional en accord avec les objectifs des projets régionaux de santé et sur la base de critères définis par les agences régionales de santé (ARS).
Compte tenu des enjeux majeurs que représentent les chantiers visés par ces aides et du caractère particulièrement structurant de ceux-ci pour l’offre de soins, il convient de garantir aux acteurs une visibilité du dispositif.
À cette fin, cet amendement vise à mettre en place une procédure spécifique d’attribution de ces aides permettant à tous les acteurs éligibles de déposer des dossiers de demande à des périodes déterminées.
Il est également proposé que le comité consultatif d’allocation des ressources, le nouveau Copermo, puisse être consulté sur la conformité des missions et des projets sélectionnés par les ARS aux critères définis par les dispositions réglementaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à préciser les modalités d’examen et de sélection des demandes de financement adressées au FMIS.
Je soutiens le principe selon lequel il ne doit pas être tenu compte de l’ordre d’arrivée des demandes, ainsi que la nécessité de leur motivation. Je doute, en revanche, de l’opportunité de l’inscription de ces modalités dans la loi.
En outre, les rôles du directeur de l’ARS et du comité consultatif d’allocation des ressources tels qu’ils apparaissent dans cet amendement me semblent trop contraignants, alors que les dispositions concernant ledit comité ne sont pas encore stabilisées.
Aussi, il me paraît plus pertinent de laisser au champ réglementaire la compétence de précision des modalités de traitement et de sélection des demandes.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je partage l’avis de Mme la rapporteure.
J’ajoute que 2,5 milliards d’euros, ajoutés à la reprise de la dette des hôpitaux, cela correspond à 50 % du plan Hôpital 2007, plus le plan Hôpital 2012, soit deux plans cumulés. On ne saurait donc minimiser cet effort, que nous devons porter tous ensemble.
Sur la méthode, je rejoins l’avis de la commission.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 676 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 699 rectifié, présenté par MM. Lévrier, Iacovelli, Théophile, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. L’alinéa 10 du présent article vise à permettre aux établissements publics de santé de refuser le paiement des factures de leurs prestataires informatiques lorsque les référentiels d’interopérabilité ne sont pas respectés.
L’objectif d’interopérabilité des logiciels en santé est partagé par tous ; celle-ci constitue d’ailleurs une condition au financement des dépenses engagées dans le cadre du volet numérique du FMIS.
Il convient ainsi de s’assurer a priori – c’est important ! – du respect des exigences d’interopérabilité des logiciels, lesquelles doivent être intégrées par les professionnels et les structures dans leur stratégie d’achat et comme critères dans les cahiers des charges d’achat de logiciels, avant tout paiement.
En permettant a posteriori aux établissements de s’exonérer du paiement de leurs factures de logiciels, l’alinéa discuté paraît redondant avec les dispositifs déjà prévus et, surtout, contraire aux principes de la commande publique, dans la mesure où il va à l’encontre d’une relation contractuelle existante entre l’établissement public de santé et son prestataire.
M. le président. L’amendement n° 329 rectifié, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Malhuret, Menonville, Decool, Lagourgue et Médevielle, Mme Paoli-Gagin, MM. A. Marc, Guerriau, Wattebled, Capus, Verzelen et Daubresse, Mme Joseph, MM. Pellevat, Longeot, Guérini et E. Blanc, Mme Garriaud-Maylam et MM. Fialaire et Gremillet, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Après le mot :
santé
insérer les mots :
et les structures mentionnées à l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. La transformation du fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP) en fonds pour la modernisation et l’investissement en santé (FMIS) permet d’inscrire le secteur médico-social comme bénéficiaire de ses actions.
Aussi proposons-nous d’étendre la faculté accordée aux établissements de santé de refuser le paiement de factures pour non-respect des référentiels d’interopérabilité au champ médico-social, cette garantie ayant la même importance pour les deux secteurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’amendement n° 699 rectifié vise à supprimer un ajout de l’Assemblée nationale ouvrant un droit de refus de paiement des factures dans le cas où les logiciels commandés ne satisferaient pas aux conditions d’interopérabilité.
J’avais émis des réserves, dans mon rapport, quant à la conformité de ces dispositions au regard du droit de la commande publique et du respect des obligations contractuelles. Ces réserves me semblant fondées, l’avis de la commission est favorable sur cet amendement.
L’amendement n° 329 rectifié vise, au contraire, à étendre le droit de refus de paiement des factures dans le cas où les logiciels ne satisferaient pas aux conditions d’interopérabilité. L’avis de la commission y est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. L’avis sera favorable sur l’amendement n° 699 rectifié, parce que nous souhaitons supprimer la possibilité pour un établissement de ne pas honorer ses factures si les logiciels ne sont pas interopérables. Cette possibilité, dénuée de validité juridique, permettrait de revenir sur une relation contractuelle entre un établissement et son prestataire.
C’est en amont de la délibération, de l’élaboration du cahier des charges et de la conclusion du contrat que les établissements doivent exiger l’interopérabilité.
Je suis donc favorable à cet amendement.
En revanche, je partage l’avis de Mme la rapporteure sur l’amendement n° 329 rectifié. La partie qui concerne les Ehpad relève bien du champ du Ségur, et donc du FMIS, alors que les établissements médico-sociaux, qui ne sont pas financés par l’assurance maladie et qui ne le seront pas plus, à l’avenir, par la nouvelle branche autonomie, ne relèvent pas du champ de l’Ondam, et donc pas du Ségur.
J’émets un avis défavorable sur cet amendement.
Mme Colette Mélot. Je retire mon amendement !
M. le président. L’amendement n° 329 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 883 rectifié ter, présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, Menonville et Decool, Mme Mélot et MM. Lagourgue, A. Marc, Wattebled et Chasseing, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 12
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
….- Le chapitre 4 du titre I du livre Ier du code de la sécurité sociale, est complété par une section ainsi rédigée :
« Section…
« Conseil national d’investissement en santé
« Art. L. 144-4-2. – Il est créé un Conseil national d’investissement en santé.
« Il est chargé de fixer les grandes orientations nationales de l’investissement en santé ainsi que les critères de répartition des ressources qui y sont consacrées.
« Il accompagne les établissements de santé publics et privés sur tout projet représentant un investissement supérieur à cent millions d’euros en s’appuyant sur les recommandations du conseil scientifique et technique.
« Il accompagne, sur demande motivée des établissements de santé ou de l’agence régionale de santé compétente, les établissements de santé publics et privés sur tout projet représentant un investissement inférieur à cent millions d’euros.
« Les établissements de santé publics et privés s’assurent de la fiabilité des données transmises au Conseil national d’investissement en santé.
« Chaque année le conseil remet un rapport d’activité au Parlement. Son activité est contrôlée par la Cour des comptes.
« Il est composé :
« 1° De représentants des services de l’État ;
« 2° De représentants des organisations nationales les plus représentatives des établissements de santé publics et privés ;
« 3° De représentants des organismes nationaux de l’assurance maladie ;
« 4° De représentants des usagers ;
« 5° D’élus locaux.
« Les règles relatives à la constitution, à la composition et au fonctionnement du conseil sont définies par décret. »
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Mme Véronique Guillotin. Le Ségur de la santé a prévu la disparition du Copermo au profit d’un Conseil national de l’investissement en santé (CNIS) qui accompagnera les établissements sur les projets d’investissement les plus importants, en s’appuyant sur les recommandations d’un conseil scientifique et technique.
Afin de permettre l’exercice d’une pleine démocratie sanitaire sur des décisions structurantes pour notre système de santé et pour nos territoires, il est proposé que le CNIS intègre des représentants des fédérations les plus représentatives des établissements de santé publics et privés, ainsi que des représentants des usagers du système de santé et des élus locaux, qui en font la demande dans la perspective d’une décentralisation plus importante au plus près des territoires.
Un rapport d’activité sera remis au Parlement chaque année ; l’activité du CNIS sera, en outre, contrôlée par la Cour des comptes.
M. le président. L’amendement n° 814 rectifié, présenté par MM. Théophile et Iacovelli, Mme Schillinger, MM. Rohfritsch et Dennemont, Mme Duranton et MM. Buis et Patient, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 12
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le chapitre 4 du titre Ier du livre Ier du code de la sécurité sociale complété par une section rédigée :
« Section …
« Conseil national d’investissement en santé
« Art. L. 144-4-2. – Il est créé un Conseil national d’investissement en santé.
« Il est chargé de fixer les grandes orientations nationales de l’investissement en santé ainsi que les critères de répartition des ressources qui y sont consacrées.
« Il accompagne les établissements de santé publics et privés sur tout projet représentant un investissement supérieur à 100 millions d’euros en s’appuyant sur les recommandations du conseil scientifique et technique.
« Il accompagne, sur demande motivée des établissements de santé ou de l’agence régionale de santé compétente, les établissements de santé publics et privés sur tout projet représentant un investissement inférieur à 100 millions d’euros.
« Les établissements de santé publics et privés s’assurent de la fiabilité des données transmises au Conseil national d’investissement en santé.
« Chaque année le conseil remet un rapport d’activité au Parlement. Son activité est contrôlée par la Cour des comptes.
« Il est composé :
« 1° De représentants des services de l’État ;
« 2° De représentants des organisations nationales les plus représentatives des établissements de santé publics et privés ;
« 3° De représentants des organismes nationaux de l’assurance maladie ;
« 4° De représentants des usagers.
« Les règles relatives à la constitution, à la composition et au fonctionnement du conseil sont définies par décret. »
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Le Gouvernement s’est engagé, à l’issue du Ségur de la santé, à mieux ancrer les politiques de santé dans les territoires et à associer davantage les élus locaux aux décisions d’investissement, en particulier.
Il est ainsi prévu que le Copermo disparaisse au profit d’un Conseil national de l’investissement en santé (CNIS), lequel a vocation à accompagner les établissements sur les projets d’investissements les plus importants et devrait offrir un cadre de pilotage intéressant et, de ce fait, une meilleure lisibilité en ce qui concerne, notamment, la répartition des ressources.
Cet amendement vise donc à préciser dès à présent le rôle et la composition de cette nouvelle instance et à associer, aux représentants des services de l’État et des organismes nationaux de l’assurance maladie, des représentants des usagers et des organisations nationales les plus représentatives des établissements de santé.
Il tend, enfin, à prévoir qu’un rapport d’activité soit remis chaque année au Parlement et que l’activité du CNIS soit contrôlée par la Cour des comptes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Si je suis favorable à l’inscription du rôle du CNIS dans la loi, la codification de son existence ne me paraît pas pertinente.
En outre, les précisions apportées quant au fonctionnement du CNIS, sa composition et ses compétences, jusqu’aux modalités de traitement des demandes, excèdent largement ce qu’il est nécessaire d’inscrire dans le champ législatif. Je rappelle que le Copermo n’était pas prévu par la loi.
Alors qu’une concertation est en cours et que les préoccupations soulevées par ces amendements sont satisfaites, adopter ces dispositions reviendrait à figer des procédures et des modalités qui doivent être adaptables et souples.
Mes chers collègues, je vous propose donc de vous rallier à l’amendement de la commission et j’émets un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 883 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 53, présenté par M. Bonne, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 12
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Afin de pouvoir financer des mesures entrant dans le cadre d’une restructuration des systèmes d’information numériques, une fraction du fond pour la modernisation et l’investissement en santé tel que défini par l’article présent est allouée au fonds d’intervention régional défini par l’article L. 1435-8 du code de la santé publique en vue de la rediriger vers des projets visant à améliorer le lien ville-hôpital. Le montant annuel attribué par région et les modalités de calcul de celui-ci sont définis par arrêté.
La parole est à M. Bernard Bonne.
M. Bernard Bonne. Je vous remercie d’avoir remis dans le circuit cet amendement, qui avait d’abord été jugé irrecevable. Est-ce le fait que j’en sois le seul signataire qui m’a valu ce privilège ?
J’en profite pour m’étonner un peu : certains amendements sont retoqués parce qu’ils ne relèvent pas du champ des lois de financement, mais, si l’on aborde des sujets relatifs au financement, on subit le couperet de l’article 40 de la Constitution. Il est parfois bien difficile de déposer des amendements !
Cet amendement vise à allouer une fraction du fonds pour la modernisation et l’investissement en santé (FMIS) au fonds d’intervention régional (FIR), géré par les agences régionales de santé, afin d’apporter un soutien aux initiatives locales qui sont des sources d’innovation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement tend à flécher une fraction du FMIS vers le FIR, ce qui ne me paraît pas pertinent.
En effet, le FMIS est financé aujourd’hui par une dotation de l’assurance maladie et le FIR fait l’objet d’un sous-objectif de l’Ondam. L’adoption de cet amendement conduirait ainsi à établir, au sein de l’assurance maladie, des circuits de financement mal lisibles et peu opérants.
Si l’intention de son auteur est de faire bénéficier un échelon local des crédits du FMIS abondés par le plan de relance, il est préférable de s’inscrire dans les négociations menées par le Gouvernement en ce moment. Je vous rappelle que le FMIS doit faire l’objet d’une gouvernance territoriale.
Je vous propose donc le retrait de cet amendement ; à défaut l’avis serait défavorable.
M. Bernard Bonne. Je le retire !
M. le président. L’amendement n° 53 est retiré.
L’amendement n° 728 rectifié, présenté par MM. P. Joly et Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’information, au plus tard le 1er septembre 2021, recensant et détaillant les investissements dans les services hospitaliers, situés dans les zones de revitalisation rurales, identifiés pour bénéficier immédiatement de ce fonds pour la modernisation et l’investissement en santé. Il s’agit d’évaluer les effets immédiats de ce fonds opéré à l’occasion de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. Les territoires ruraux sont confrontés à des fermetures d’établissements et de services, aux départs à la retraite de professionnels de santé sans remplacement et, d’une manière plus générale, à l’impossibilité de permettre un égal accès aux soins à leurs habitants.
La création du FMIS offre une opportunité pour ces territoires. Il est proposé, pour s’assurer que celle-ci est saisie, qu’un rapport soit présenté au Parlement au 1er septembre 2021, recensant et détaillant les investissements dans les services hospitaliers situés dans les zones de revitalisation rurale (ZRR), afin que ceux-ci bénéficient immédiatement de ces fonds.
Il s’agit donc d’évaluer dès 2021 les effets immédiats du fonds. Il me semble que c’est une solution possible, à défaut d’envisager que des crédits soient sanctuarisés pour ces territoires ruraux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je partage évidemment la préoccupation de notre collègue, mais, s’agissant d’une demande de rapport, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 26, modifié.
(L’article 26 est adopté.)
Article 27
I. – Afin de concourir à la compensation des charges nécessaires à la continuité, la qualité et la sécurité du service public hospitalier et à la transformation de celui-ci, les organismes de la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale peuvent verser une dotation annuelle aux établissements mentionnés à l’article L. 6112-3 du code de la santé publique.
Le versement de cette dotation est soumis à la conclusion par chaque établissement concerné d’un contrat avec l’agence régionale de santé avant le 31 décembre 2021.
La somme de ces dotations est fixée par décret et ne peut excéder 13 milliards d’euros, correspondant au montant maximal prévu au C du II septies de l’article 4 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.
Les sommes transférées par la Caisse d’amortissement de la dette sociale en application du même C sont inscrites au bilan de la Caisse nationale de l’assurance maladie au moment du transfert à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Elles sont constatées en produits au compte de résultat de la Caisse nationale de l’assurance maladie au même rythme que l’ordonnancement des dotations annuelles mentionnées au premier alinéa du présent I dont elles assurent le financement.
II. – Pour déterminer le montant de la dotation mentionnée au I versée à chaque établissement contractant, sont notamment pris en compte les ratios d’analyse financière et les marges financières nécessaires à l’investissement.
III. – Les contrats mentionnés au I sont signés pour une durée maximale de dix ans par le directeur général de l’agence régionale de santé et les représentants légaux des établissements mentionnés au même I. Ils peuvent faire l’objet d’une révision par voie d’avenant pendant toute la durée du contrat. Les stipulations de ces contrats font l’objet d’un suivi par le conseil territorial de santé concerné. Ces contrats précisent :
1° Le mandat confié à l’établissement, notamment en matière de désendettement, d’investissement, d’amélioration de la situation financière et de transformation, et les charges mentionnées au I dont le financement est assuré par la dotation ;
2° Le montant de la dotation et les paramètres retenus pour son calcul ;
3° L’échéancier des versements annuels ;
4° Les indicateurs de suivi, les modalités d’évaluation et de contrôle ainsi que le mécanisme de reprise de financements en cas de surcompensation des charges mentionnées au I ou de non-respect des engagements pris par l’établissement dans le contrat. Les montants repris ne peuvent excéder, pour une année donnée, le montant de la dotation mentionnée au même I pour cette même année.
IV. – Lors du renouvellement des contrats mentionnés à l’article L. 6114-1 du code de la santé publique, les agences régionales de santé s’assurent qu’ils sont cohérents avec les engagements et les moyens fixés dans le contrat mentionné aux I et III du présent article.
V. – La dotation qui sera versée à l’établissement est comptabilisée en capitaux propres en une fois et pour sa totalité, dès la signature du contrat.
VI. – Les conditions d’application du présent article sont définies par décret en Conseil d’État, notamment :
1° Les paramètres servant à déterminer les compensations des obligations de service public hospitalier ;
2° Les modalités de détermination du montant des dotations mentionnées au I ainsi que de la publication par l’agence régionale de santé des modalités retenues le cas échéant ;
3° Les conditions de mise en œuvre et les modalités d’application du contrat mentionné au I et III ;
4° Les modalités de contrôle et de récupération des éventuelles surcompensations.
VII. – Le C du II septies de l’article 4 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi rédigé :
« C. – La couverture de dotations de la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale couvrant un soutien exceptionnel, qui ne peut excéder 13 milliards d’euros, au titre du désendettement pour favoriser les investissements dans les établissements de santé assurant le service public hospitalier est assurée par des transferts de la Caisse d’amortissement de la dette sociale à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Les dates et montants de ces transferts sont fixés par décret. »
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le Sénat avait rejeté la reprise de la dette hospitalière par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) à l’occasion de l’examen de la loi relative à la dette sociale et à l’autonomie. Il avait alors estimé que cette dette, essentiellement immobilière et résultant de plans d’initiative gouvernementale, ne relevait pas de la dette sociale et, partant, n’avait pas à être amortie par la Cades. Le Gouvernement n’a cessé de soutenir sa position initiale au cours de la discussion parlementaire et le présent article vise à mettre en œuvre cette reprise.
Je rappelle que la commission ne rejette pas le principe de la reprise d’une partie de la dette hospitalière et que nous partageons le souci de rétablissement d’une bonne capacité d’autofinancement des hôpitaux. Cependant, nous estimons que les modalités retenues et traduites dans cet article ne sont pas toujours conformes aux exigences organiques. Il appartiendra au Conseil constitutionnel d’en juger.
Ces modalités conduisant à faire financer par la Cades la reprise d’une dette des établissements de santé qui relève, par essence, de l’État, elles privent la sécurité sociale d’une ressource nécessaire à son équilibre financier.
Ainsi la rédaction transmise par l’Assemblée nationale tend-elle à effacer le lien entre les dotations de la CNAM et les encours de dette des établissements au profit d’une mise en valeur de l’investissement. Le Gouvernement précise que la référence à des investissements futurs vise à garantir la conformité du dispositif à la réglementation européenne relative aux aides d’État, laquelle ne saurait admettre qu’une aide en vue d’investissements à venir.
Cet article donne donc lieu à un « en même temps » qui nous semble très gênant : cette reprise concernerait, selon le Gouvernement, une dette passée devant légitimement être amortie par la Cades et, en même temps, tout sauf une dette passée, de sorte qu’elle soit conforme à la réglementation européenne.
Cela renforce la démarche qui nous a conduits à demander la suppression de ces dispositions. La présentation de cet article après le raisonnement soutenu cet été sur la loi relative à la dette sociale est donc toujours paradoxale et contribue, je le dis de nouveau, à transformer dans les faits la Cades en fonds d’investissement pour les hôpitaux, ce qu’elle n’a pas vocation à être.
Pour l’ensemble de ces raisons, la commission a déposé un amendement de suppression de cet article.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Nous soutenons cette demande de suppression exprimée par notre rapporteure Corinne Imbert, qui émane d’ailleurs de la commission des affaires sociales comme de la commission des finances. Cela nous semble cohérent avec la position exprimée par le Sénat lors de l’examen de la loi relative à la dette sociale.
La reprise partielle de la dette fait partie des annonces importantes du Gouvernement ces derniers mois. Cela aurait dû constituer une réponse au besoin d’amélioration de notre système de santé, mais cela n’a pas été le cas, j’y reviendrai.
Selon les chiffres donnés par l’inspection générale des affaires sociales (IGAS), l’encours de la dette des établissements de santé publics et privés d’intérêt collectif s’élève à 32 milliards d’euros en 2018. Ce sont 41 % des établissements qui se trouvent en situation d’endettement à la suite des plans Hôpital 2007 et 2012 et en raison des funestes emprunts toxiques.
Nous en connaissons tous les conséquences : les investissements et les modernisations ont chuté dans de nombreux établissements, laissant des bâtiments en mauvais état, voire délabrés, et entraînant des manques de matériels et d’équipements pourtant indispensables pour les soignants.
L’exemple de l’hôpital André-Grégoire de Montreuil est parlant. Le maire, mon ami Patrice Bessac, se bat depuis des mois pour faire annuler la totalité des 98 millions d’euros de dette qui pèsent sur le fonctionnement quotidien et sur l’attractivité de cet hôpital de Seine-Saint-Denis.
Cet article 27 pose problème pour deux raisons supplémentaires. Non seulement le Gouvernement ne reprend qu’un tiers de la dette, ce qui est insuffisant, mais, comme l’a dit Corinne Imbert, il se défausse sur la Cades, ce que dénonce à juste titre l’ensemble de la commission. Pourquoi l’État n’a-t-il pas fait le choix de mobiliser des crédits supplémentaires, plutôt que d’alourdir une nouvelle fois les déficits sociaux ?
De plus, cette reprise de la dette est conditionnée à la signature d’un contrat avec les ARS et nous craignons fortement que cette contractualisation ne serve de prétexte pour justifier de futures coupes budgétaires dans les établissements.
On le voit, cette mesure n’améliorera ni la situation dans les établissements ni les conditions de travail des soignants, pas plus que la prise en charge des patients. C’est pourquoi nous soutenons cet amendement de suppression.
Mme Victoire Jasmin. Madame la ministre, il est vrai que beaucoup d’établissements sont en situation très difficile par rapport à leurs dettes. Mais il faut savoir également que les établissements sont contraints à des normes, à des exigences, à la certification, à l’accréditation. Tout cela nécessite des dépenses. Il faut des systèmes de backup pour certains équipements. Il faut également former les professionnels pour qu’ils soient habilités. Il y a des référentiels métiers qui entraînent des dépenses supplémentaires.
Par ailleurs, il y a des surcoûts, particulièrement en outre-mer, liés à l’insularité. Je défendrai un amendement dans le prolongement de celui qui a été présenté par Alain Milon précédemment concernant les coefficients géographiques. Mettez tout cela sur la table et examinez les tarifs pratiqués par certaines firmes !
J’ai évoqué en commission des affaires sociales les difficultés relatives aux équipements fermés pour lesquels il y a des certificats d’exclusivité, que ce soit au niveau de la maintenance préventive ou au niveau de la maintenance curative. Les experts visiteurs qui viennent chez nous, dans les outre-mer, ne prennent pas un train ni leur voiture personnelle. Ils prennent l’avion et leur billet est payé par les établissements, tout comme l’hébergement dans les hôtels. Cela entraîne des surcoûts, vous devez le savoir !
Les établissements sont, de fait, soumis à des règles, à des normes, ils doivent se mettre en conformité avec la législation, mais cela engendre des surcoûts considérables.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 93 est présenté par M. Klinger, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° 163 est présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales.
L’amendement n° 425 est présenté par Mme N. Goulet.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 93.
M. Christian Klinger, rapporteur pour avis de la commission des finances. Cet amendement, que je présente au nom de la commission des finances, tend à supprimer l’article 27 du PLFSS.
Cet article vise à préciser les modalités de reprise de la dette des hôpitaux par la Cades, qui a comme mission de financer la dette cumulée du régime général de la sécurité sociale.
Or l’essentiel de la dette hospitalière est lié à des investissements immobiliers et ne relève pas a priori de dépenses d’assurance maladie. Je vous rappelle qu’il y a un an le Gouvernement avait présenté les contours d’un programme massif de reprise de dette de 10 milliards d’euros sur trois ans, soit plus de 3,3 milliards d’euros par an destinés à restaurer l’équilibre financier des établissements.
Un projet de loi devait être présenté au premier semestre 2020 en même temps que la loi de programmation des finances publiques pour préciser les modalités de cette reprise.
Mes chers collègues, il semblait à l’époque que c’était à l’État et non à la Cades d’opérer cette reprise. Aux termes de deux lois du 7 août 2020, l’intervention de la Cades était en effet en priorité dédiée au désendettement des hôpitaux afin d’éviter, selon l’étude d’impact, que le niveau d’endettement ne menace dans certains cas la pérennité de leur mission permanente de service public à laquelle ils ne peuvent se soustraire.
La rédaction de l’article 27 tend pourtant à orienter davantage cette intervention vers le soutien à l’investissement et à la transformation de l’offre, en redonnant aux établissements des marges financières nécessaires.
Cet article contribue donc à créer les conditions d’un nouveau cercle vicieux au terme duquel la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) va financer un nouvel endettement, alors qu’un plan d’investissement devrait être supporté par le budget de l’État et par non celui de la sécurité sociale.
Mes chers collègues, la suppression de l’article 27, c’est simplement du bon sens et le respect des périmètres budgétaires !
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure, pour présenter l’amendement n° 163.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il est défendu.
Je me réjouis que la commission des finances ait le même avis sur cet article que la commission des affaires sociales !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l’amendement n° 425.
Mme Nathalie Goulet. Ayant été rapporteur jusqu’à cette année des engagements financiers de l’État, les promesses qui avaient été faites l’année dernière et les engagements du Gouvernement pour rembourser la dette de l’hôpital ne m’avaient pas échappé puisque tout cela entrait en partie dans ma mission de contrôle de la dette. Nous nous posions la question, comme d’ailleurs pour la SNCF, de savoir où allaient tomber ces 10 milliards d’euros que l’on avait prévus pour l’hôpital à la suite de la crise de l’hôpital, mais aussi de celle des gilets jaunes l’année dernière.
C’est tout naturellement en voyant le PLFSS pour 2020 tel qu’il résulte de la lecture à l’Assemblée nationale que j’ai déposé cet amendement de suppression. Compte tenu des débats que nous avons eus en commission des finances l’an passé et que vient de rappeler notre collègue, il me semble parfaitement évident que cette dette n’a pas à être imputée à la Cades, on l’a dit et répété.
J’en profite pour attirer l’attention du Gouvernement et du Sénat sur les engagements hors bilan de l’État. À force de promettre, il va falloir un jour tenir. Or nous en sommes à plus de 4 000 milliards d’engagements hors bilan. Toutes ces dettes accumulées vont finir par devoir être payées. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé à titre personnel cet amendement de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. La reprise de la dette des hôpitaux par la Cades à hauteur de 13 milliards d’euros est non pas une fuite en avant, mais une mesure de solidarité et de refinancement.
C’est une mesure de solidarité, car elle vise à aider les établissements les plus fragilisés. C’est une mesure de refinancement, car elle permet aussi de s’appuyer sur des taux actuellement très bas. Les conditions de financement de la Cades sont en effet beaucoup plus favorables que pour les établissements de santé, surtout lorsque la durée d’amortissement est limitée.
Le Gouvernement a fait évoluer la mesure initialement prévue pour la réorienter plus explicitement vers l’investissement, vers la transformation de l’offre du service public hospitalier. Néanmoins, il sera évidemment tenu compte de la situation financière des établissements, notamment du poids de l’endettement, afin de ne pas pénaliser les plus vertueux.
Par conséquent, le dispositif tel qu’il est prévu vise à la fois à accompagner et à favoriser le désendettement. Il s’agit d’améliorer la situation financière des établissements concernés afin de leur redonner des marges de capacité nouvelles pour investir.
L’avis est défavorable.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain se joint volontiers à ces trois amendements et les votera. Les explications données ont été claires : ce n’est pas à la Cades de rembourser ce type de dette, c’est à l’État de faire son travail.
Je voterai aussi ces amendements pour une raison un peu personnelle, que les sénateurs d’outre-mer comprendront. Cette reprise de dette n’est dédiée qu’au financement de l’investissement, avec des aides en capital. C’est un cercle vicieux et les établissements reprendront la même trajectoire de dettes. Victoire Jasmin vient d’expliquer qu’il existe des surcoûts en outre-mer. Or vous ne proposez pas de reprendre la part de dette relevant du fonctionnement. Il y a donc moult raisons pour que le Sénat vote unanimement ces amendements de suppression.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je constate que l’on a parfois tort d’avoir raison trop tôt ! Le document sur lequel on se base pour reprendre la dette immobilière des hôpitaux est un rapport sénatorial de 2009 rédigé par Jacky Le Menn, alors sénateur d’Ille-et-Vilaine, et par moi-même.
Nous préconisions que la dette immobilière des hôpitaux ne soit plus incluse dans le budget des hôpitaux, mais qu’elle soit reprise par l’État d’une manière ou d’une autre. À l’époque, nous n’avions pas défini exactement les modalités de cette reprise, mais nous considérions que cette dette ne devait pas être prise en charge par la santé sur le territoire national.
Lorsque Mme Buzyn a déclaré l’année passée ici même, en tant que ministre de la santé, qu’une partie de la dette des hôpitaux serait reprise par l’État, j’étais évidemment, comme beaucoup de mes collègues, particulièrement satisfait. Quelle ne fut pas notre surprise ensuite d’apprendre que cette dette avait été reportée sur la Cades !
Je rappelle que la Cades a été créée dans les années 1990 pour rembourser la dette sociale. Reprendre une partie de la dette immobilière des hôpitaux pour la transférer dans la dette sociale, c’est considérer, encore une fois, que l’immobilier des hôpitaux est une dette sociale. Or nous estimons que les hôpitaux appartiennent non pas à l’assurance maladie, mais à l’État.
Ce n’est ni à la dette sociale, ni à la Cades, ni à l’assurance maladie de rembourser les intérêts des hôpitaux. Ou alors, comme je l’ai dit dans la discussion générale, il faut, par souci d’égalité, faire payer à l’éducation nationale des loyers pour les écoles, les collèges et les lycées !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 93, 163 et 425.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l’article 27 est supprimé, et les amendements nos 556, 815, 491, 555, 473 rectifié bis, 1043, 1007 et 1058 n’ont plus d’objet.
Article 28
I. – Le titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le chapitre préliminaire est ainsi modifié :
a) Le I de l’article L. 160-13 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La participation de l’assuré aux frais occasionnés par un passage non programmé dans une structure des urgences d’un établissement de santé, autorisée, est fixée à une somme forfaitaire due lorsque ce passage n’est pas suivi d’une hospitalisation dans un service de médecine, de chirurgie, d’obstétrique ou d’odontologie au sein de l’établissement. Le montant de cette participation est défini par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, pris après avis de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie et de l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire. Ce montant peut être réduit dans les cas mentionnés aux 3°, 4° et 13° de l’article L. 160-14 et à l’article L. 371-1 du présent code ainsi qu’à l’article L. 212-1 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre. Cette participation ne peut être supprimée, sauf dans les cas prévus à l’article L. 160-9, aux 11° et 15° de l’article L. 160-14 ainsi qu’aux articles L. 169-1 et L. 16-10-1 du présent code. » ;
b) Au premier alinéa de l’article L. 160-14, après le mot : « supprimée », sont insérés les mots : « , sous réserve des dispositions du dernier alinéa du I de l’article L. 160-13, » ;
2° L’article L. 162-22-8-2 est ainsi modifié :
a) Au début de la première phrase du second alinéa du 1°, les mots : « L’État » sont remplacés par les mots : « Le directeur général de l’agence régionale de santé » ;
b) Le même 1° est complété par un quatrième alinéa ainsi rédigé :
« La répartition de la dotation populationnelle entre les régions a pour objectif de réduire progressivement les inégalités dans l’allocation de ressources régionales. Un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale précise les modalités et la trajectoire de réduction de ces inégalités ; »
c) Après le 3°, il est inséré un 4° ainsi rédigé :
« 4° Des recettes liées à la participation de l’assuré aux frais liés aux actes et prestations réalisés dans une structure de médecine d’urgence, mentionnée au dernier alinéa du I de l’article L. 160-13. » ;
3° À la première phrase du I de l’article L. 162-22-9-1, après la référence : « L. 162-22-6 », sont insérés les mots : « , à l’exception des forfaits déterminés en application du 2° de l’article L. 162-22-8-2, » ;
4° Au 3° de l’article L. 162-22-10, après le mot : « nationaux, », sont insérés les mots : « à l’exception des forfaits déterminés en application du 2° de l’article L. 162-22-8-2, » et, après la référence : « 2° », sont insérés les mots : « du présent I » ;
5° Le 2° de l’article L. 162-22-11-1 est complété par les mots : « ou la participation forfaitaire mentionnée au dernier alinéa du I de l’article L. 160-13 » ;
6° Au 4° de l’article L. 169-2, les mots : « au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « aux premier et dernier alinéas ».
II. – A. – Le livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 162-20-1 est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – Lorsqu’un patient relevant d’un système de sécurité sociale coordonné avec le régime français de sécurité sociale bénéficie d’une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques, produits et prestations mentionnés à l’article L. 162-22-7, la facturation de ses soins est majorée du coût de ces spécialités, produits et prestations. » ;
2° L’article L. 162-22-6-1 est abrogé ;
3° À la deuxième phrase du I de l’article L. 162-23-16, les mots : « , tels que définis par le projet régional de santé et ses déclinaisons territoriales, » sont supprimés ;
3° bis (nouveau) Au a du 1° du II de l’article L. 162-31-1, la référence : « L. 162-22-6-1, » est supprimée ;
4° Au premier alinéa de l’article L. 174-15, la référence : « L. 162-22-6-1, » est supprimée.
B. – Le II de l’article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 (n° 2003-1199 du 18 décembre 2003) est ainsi modifié :
1° La première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « Jusqu’au 31 décembre 2021, par dérogation à l’article L. 162-20-1 du code de la sécurité sociale, les tarifs applicables en 2020 dans chaque établissement de santé restent en vigueur et servent de base au calcul de la participation du patient, en ce qui concerne les activités mentionnées aux 2° et 4° de l’article L. 162-22 du même code. » ;
2° Le second alinéa est supprimé.
C. – L’article 35 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020 est ainsi modifié :
1° Le V est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, la référence : « au 2° » est remplacée par les références : « aux 2° et 4° » ;
b) À la fin du même deuxième alinéa, les mots : « à la date prévue au VI de l’article 34 de la présente loi » sont remplacés par les mots : « le 1er janvier 2022 » ;
c) Le dernier alinéa est supprimé ;
2° Le VI est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est remplacé par sept alinéas ainsi rédigés :
« VI. – À compter du 1er janvier 2021 et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2023, les tarifs servant de base au calcul de la participation du patient des établissements mentionnés aux a, b et c de l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale exerçant des activités mentionnées au 1° de l’article L. 162-22 du même code sont affectés d’un coefficient de transition.
« Ce coefficient de transition est calculé pour chaque établissement afin de tenir compte des conséquences, sur ses recettes, de l’application de la tarification nationale journalière des prestations définie à l’article L. 162-20-1 dudit code en comparaison de la tarification journalière des prestations appliquée dans l’établissement concerné.
« Les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent les modalités de calcul du coefficient de transition ainsi que, pour chaque année de la période concernée, le taux national de convergence des tarifs journaliers des prestations servant au calcul des coefficients de transition des établissements de santé concernés.
« La valeur du coefficient de transition ainsi que la valeur des tarifs journaliers des prestations de chaque établissement en découlant sont fixées par le directeur général de l’agence régionale de santé et prennent effet au 1er janvier de l’année en cours.
« Pour les hôpitaux d’instruction des armées, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale et le ministre de la défense sont compétents pour fixer la valeur du coefficient de transition ainsi que la valeur des tarifs journaliers des prestations.
« Ce coefficient doit atteindre la valeur 1 au plus tard le 1er janvier 2024.
« Les modalités d’application du coefficient de transition sont fixées par un décret en Conseil d’État. » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « de la date prévue au B du III de l’article 78 de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 précitée, dans sa rédaction résultant de la présente loi, à compter de laquelle les prestations d’hospitalisation mentionnées au 1° de l’article L. 162-23-1 du code de la sécurité sociale sont prises en charge par les régimes obligatoires d’assurance maladie sur la base des tarifs mentionnés à l’article L. 162-23-4 du même code, » sont remplacés par les mots : « du 1er janvier 2022 » ;
c) Au dernier alinéa, les mots : « de la date prévue au VI de l’article 34 de la présente loi » sont remplacés par les mots : « du 1er janvier 2022 » ;
3° Il est ajouté un VII ainsi rédigé :
« VII. – Par dérogation au II de l’article L. 162-20-1 du code de la sécurité sociale, du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2021, pour les activités mentionnées aux 2° et 4° de l’article L. 162-22 du même code exercées par les établissements mentionnés aux d et e de l’article L. 162-22-6 dudit code, la base de calcul de la participation du patient demeure les tarifs des prestations d’hospitalisation ou les tarifs de responsabilité fixés par le directeur général de l’agence régionale de santé en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020.
« Du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2021, pour les établissements mentionnés aux mêmes d et e exerçant des activités mentionnées au 2° de l’article L. 162-22 du même code, les mêmes tarifs servent également de base au calcul de la dotation tenant compte de l’activité de l’établissement mentionnée à l’article L. 162-22-19 du même code. »
III. – Au I de l’article 66 de la loi n° 2011-1906 du 24 décembre 2011 de financement de la sécurité sociale pour 2012, le mot : « neuf » est remplacé par le mot : « dix ».
IV. – Le III de l’article 78 de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016 est ainsi modifié :
1° Le B est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 » ;
– les références : « aux articles L. 162-23-2 et L. 162-23-3 » sont remplacées par la référence : « à l’article L. 162-23-2 » ;
b) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « définies aux articles L. 162-23-2, L. 162-23-3 et L. 162-23-4 » sont remplacés par les mots : « liées aux recettes directement issues de l’activité mentionnées à l’article L. 162-23-3 » ;
– à la deuxième phrase, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 ».
2° Le F est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, la date : « 28 février 2023 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2020 » et sont ajoutés les mots : « et, du 1er janvier 2021 au 28 février 2023, le montant lié aux recettes directement issues de l’activité mentionnées à l’article L. 162-23-3 du code de la sécurité sociale n’est pas facturé par les établissements mentionnés aux d et e de l’article L. 162-22-6 du même code à la caisse désignée en application de l’article L. 174-2 dudit code » ;
b) Au quatrième alinéa, les mots : « du montant forfaitaire prévu au b du 2° du E du présent III » sont remplacés par les mots : « des montants mentionnés au premier alinéa du présent F ».
V. – La loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020 est ainsi modifiée :
1° Le IV de l’article 57 est ainsi modifié :
a) À la fin du deuxième alinéa et au troisième alinéa, la date : « 1er janvier 2021 » est remplacée par la date : « 1er septembre 2021 » ;
b) Au troisième alinéa, la date : « 30 juin 2020 » est remplacée par la date : « 1er mars 2021 » ;
2° Au III de l’article 64, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 ».
VI. – Les établissements de santé figurant sur la liste mentionnée à l’article L. 6111-3-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, ne satisfaisant pas, au titre de l’année 2021, aux conditions fixées, en application du même article L. 6111-3-1, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 précitée, pour relever des dispositions applicables aux hôpitaux de proximité continuent de bénéficier, pour l’année 2021, du régime de financement dérogatoire prévu à l’article L. 162-23-16 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020.
VII. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2021, à l’exception du 1°, du c du 2° et des 3° à 6°, qui entrent en vigueur le 1er septembre 2021.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, sur l’article.
Mme Corinne Féret. Cet article vise à introduire une participation forfaitaire de l’assuré, le « forfait patient urgences » (FPU).
De mon point de vue, cette mesure fragilisera encore davantage les publics en difficulté, malheureusement de plus en plus nombreux en cette période. Elle n’est absolument pas opportune dans un moment de crise sanitaire et sociale, et pénalisera certains patients qui n’ont parfois pas d’autre choix que de consulter les urgences. Elle pourrait ainsi limiter l’accessibilité des soins aux personnes précaires dans un contexte d’aggravation des inégalités sociales et de santé.
Au lieu d’apporter une réponse structurelle au désengorgement des urgences, le Gouvernement se limite une fois de plus à apporter une réponse d’ordre financier. Une telle mesure me semble inefficace et ne répond pas aux besoins des urgences aujourd’hui.
M. Bernard Jomier. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de dix amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 789 rectifié, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1 à 15
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. La réforme du financement de l’hôpital que vous nous présentez au travers de cet article 28 est d’une complexité confondante.
On parle de cet enjeu depuis plusieurs années et vous nous proposez une nouvelle expérimentation de cinq ans dont on peine à comprendre la mise en place concrète et les effets sur les finances des établissements. Comment sera déterminée la répartition entre la dotation socle et la part récente de tarification à l’activité (T2A) ? Quels critères présideront à la fixation des dotations socles ? Comment imaginez-vous l’évolution de cette dotation et celle de la T2A ? Quels critères présideront à la fixation de la dotation populationnelle ?
La T2A finançait jusqu’à maintenant l’année dite de « docteur junior », pendant le troisième cycle d’études médicales. Nous éprouvons quelques craintes quant à ce financement.
En outre, et j’en viens à mon amendement, nous ne trouvons rien dans ce PLFSS qui permettrait de travailler à une meilleure coordination entre la médecine de ville et l’hôpital. C’est pourtant un sujet dont nous discutons également depuis de nombreuses années.
En revanche, vous nous proposez encore une fois un dispositif de financement sur les urgences : pas de surprise, il y en a un à chaque PLFSS !
En 2019, nous avions eu droit au forfait de réorientation, ajouté par Olivier Véran en tant que rapporteur général de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale – nous espérons d’ailleurs qu’il viendra devant nous comme ministre de la santé à un moment ou un autre de notre discussion….
En 2020, c’est le député Thomas Mesnier qui proposait un dispositif de financement. Cette année vous nous présentez le « forfait patient urgences », immédiatement amendé à l’Assemblée nationale pour exonérer, à juste titre, un certain nombre de publics, pour envisager un coefficient de transition afin d’assurer la mise en place du dispositif voté l’année dernière – les dispositifs sont tellement complexes qu’il faut maintenant des coefficients de transition ! – et pour prévoir in fine une entrée en vigueur de ce nouveau forfait au 1er septembre 2021.
Madame la ministre, tout cela témoigne d’une façon d’aborder la question des urgences qui ne change rien ! C’est non par des mesures financières que l’on régulera l’accès de nos concitoyens aux urgences, mais par des mesures d’organisation. En aval, cela a déjà été fait, depuis le rapport Carli-Mesnier notamment. Mais en amont, vous vous obstinez à ne présenter aucune mesure. C’est la raison pour laquelle nous ne validons pas ce nouveau dispositif d’ordre financier.
M. le président. L’amendement n° 1015, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 5
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. L’article 28 tend à remplacer le ticket modérateur par un forfait patient urgences sous la forme d’une participation forfaitaire d’un montant de 18 euros, à la charge des patients qui passent aux urgences sans être hospitalisés.
Je citerai Philippe Batifoulier, professeur d’université en santé et protection sociale : il estime que le nouveau forfait, comme la plupart des forfaits, est une aberration économique et pose un problème de santé publique. C’est une analyse que nous partageons.
Déplorant que le nombre de passages annuels aux urgences ait doublé depuis vingt ans, le Gouvernement ne dresse pas de bilan de son incapacité à construire une offre de soins cohérente sur le territoire. Au contraire, il élabore une réforme visant à modifier le comportement des usagers en ce qui concerne le recours aux urgences, réforme basée sur l’idée que les personnes iraient aux urgences sans motif valable, seulement en raison de leur gratuité. Il imagine ainsi que le fait d’introduire une incitation financière permettra sans doute à ces usagers d’être plus rationnels dans leur choix de consultation.
Cette mesure est en totale déconnexion avec le terrain. Étant donné les conditions d’accueil et les temps d’attente aux urgences, toujours plus catastrophiques en raison du manque de moyens criant des services et de la déficience des permanences de soins de la médecine de ville, comment peut-on voir un quelconque opportunisme des assurés dans leur choix d’aller aux urgences ?
De plus, cette mesure consiste à faire supporter aux individus des problèmes anciens de moyens structurels que le Gouvernement refuse de traiter autrement que par des politiques incitatives vouées à l’échec, comme le montrent toutes les évaluations.
Faire payer le passage aux urgences, c’est revenir sur le principe fondamental d’égalité des soins, lequel est au cœur du projet de l’hôpital public. Les conséquences risquent d’être dramatiques, avec une augmentation du renoncement aux soins indispensables, notamment de la part des personnes les plus fragiles. Pour rappel, 5 millions de personnes n’ont pas de complémentaire santé. On sait qu’aller se faire soigner est toujours une démarche difficile pour ces publics.
Cette mesure ouvre donc la porte à des reports de soins qui, in fine, engendreront des coûts importants pour la sécurité sociale. Elle ouvre aussi, bien évidemment, un nouveau marché aux complémentaires et constitue un pas de plus vers la marchandisation des soins. Une solution : le 100 % sécu pour tous et pour l’ensemble des soins !
M. le président. L’amendement n° 840 rectifié bis, présenté par Mme Le Houerou, MM. Jeansannetas, Bourgi, P. Joly et Antiste, Mmes Jasmin et Féret, M. Fichet, Mme Van Heghe, MM. Lurel et Tissot, Mme Bonnefoy, MM. Redon-Sarrazy et Kerrouche et Mme Conway-Mouret, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« La participation de l’assuré aux frais occasionnés par son passage non programmé dans une structure des urgences autorisée est fixée à un montant forfaitaire défini par arrêté pris après avis de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie et de l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire.
« Nonobstant toute disposition contraire, cette participation ne peut être supprimée, sauf dans les cas mentionnés aux articles L. 160-9, aux 3° , 4° , 13° et 18° de l’article L. 160-14, à l’article L. 371-1, à l’article L. 16-10-1 et L. 169-1 et 15° de l’article L. 160-14. Cette participation est due pour chaque passage aux urgences dès lors que ce passage n’est pas suivi d’une hospitalisation en service de médecine, de chirurgie, d’obstétrique ou d’odontologie au sein de l’établissement.
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Il est défendu.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 246 rectifié quater est présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Capus, Decool, Guerriau, Lagourgue, Malhuret, A. Marc, Médevielle et Menonville, Mme Paoli-Gagin, MM. Verzelen et Wattebled, Mmes Guillotin et Garriaud-Maylam, M. E. Blanc, Mme Joseph, MM. Daubresse, Pellevat et Fialaire et Mme N. Delattre.
L’amendement n° 613 est présenté par Mme Lienemann.
L’amendement n° 928 est présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4, avant-dernière et dernière phrases
Remplacer ces phrases par une phrase ainsi rédigée :
Cette participation est supprimée dans les cas prévus aux 3°, 4°, et 13° et 18° de l’article L. 160-14 et à l’article L. 371-1 du présent code ainsi qu’à l’article L. 212-1 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre, à l’article L. 160-9, aux 11° et 15° de l’article L. 160-14 ainsi qu’aux articles L. 169-1 et L. 16-10-1 du présent code.
La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 246 rectifié quater.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise à maintenir les situations d’exonérations existantes concernant le forfait unique, nouvellement créé, de passage aux urgences sans hospitalisation.
La simplification de la tarification des urgences par la création d’un forfait unique remplaçant les différents tickets modérateurs existants ne saurait se traduire par un recul de droits pour les usagers. Or cette disposition vient créer un reste à charge jusqu’à présent inexistant, notamment pour les personnes bénéficiaires du dispositif de l’affection longue durée (ALD) lorsque leur passage aux urgences est lié à un soin relevant de leur ALD, pour les donneurs en ce qui concerne l’ensemble des frais engagés au titre du prélèvement d’éléments du corps humain et de la collecte de ces produits, ou encore pour les titulaires d’une pension d’invalidité.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 613.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Laurence Cohen et d’autres l’ont souligné, il paraît inconcevable de faire payer les urgences par les individuellement. Vous allez voir, les Français vont se révolter !
La régulation par l’argent en matière de santé, on connaît, hélas ! depuis un certain temps. Rappelez-vous, c’était en réduisant le nombre de médecins qu’on allait diminuer les dépenses… Bilan des courses, on n’a plus de médecins !
Ici, on nous explique que les gens abuseraient moins des urgences s’ils devaient payer. Il faut distinguer deux catégories. D’une part, il y a ceux qui, de toute façon, ne sont pas arrêtés par le prix. S’ils veulent « abuser », ce qui n’est tout de même pas le cas de figure le plus fréquent, ils pourront le faire. D’autre part, i y a ceux qui, avec ce mécanisme d’entrée financière, ne pourront plus accéder aux urgences, avec toutes les complications et les conséquences dramatiques que l’on connaît. C’est une aberration !
Néanmoins, partant du principe qu’éventuellement l’Assemblée nationale consolidera cette aberration, gardons a minima les droits constants. Mon amendement concerne les ALD.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 928.
M. Guillaume Gontard. J’insisterai plus particulièrement sur le manque de consultations en amont.
Cette réforme, qui impacte les complémentaires d’assurance maladie, aurait dû faire l’objet d’une concertation. Elle touche aussi les usagers de la santé, en particulier les 3 millions de Français qui n’ont pas de mutuelle, soit près de 12 % de la population la plus précaire. La consultation de l’association France Assos Santé s’imposait également pour évaluer l’impact de cette mesure sur les inégalités de santé, le renoncement aux soins ou leurs reports.
Le principe de forfaitisation n’est pas en cause. Les tickets modérateurs à l’acte, même plafonnés, comportaient le risque de leur multiplication non pertinente et donc de gaspillage. Le risque est bien celui la hausse régulière de ce type de forfait qui ne saurait participer d’un report plus grand des frais de santé sur les usagers, directement ou via leurs mutuelles, qui se traduit par l’augmentation constante des tarifs.
Cependant, en n’excluant pas de ce forfait tous les patients précédemment exonérés de ticket modérateur, pour lesquels est prévu un forfait réduit, cette modification participe à l’augmentation du reste à charge dans un contexte particulièrement inopportun de crise sanitaire et sociale.
Cet amendement vise donc à maintenir leurs situations d’exonération en les excluant du paiement du forfait unique urgences, afin de ne pas altérer leurs accès aux soins.
Quel que soit le dispositif, l’amélioration de l’accès aux droits et à la santé est une préoccupation constante du groupe écologiste, ce qui explique son soutien aux politiques de lutte contre le non-recours.
Le modèle de financement des structures des urgences sera fondamentalement régulé par la réduction des causes du recours aux urgences pour des raisons sociales ou de carence de l’offre en ville, estimées à plus de 30 % par certains urgentistes.
Cela nécessite une réforme ambitieuse de l’organisation des soins en ville et sur l’ensemble du territoire, réforme qui devrait s’accompagner, à défaut de la précéder, d’une réforme du financement.
M. le président. L’amendement n° 1016, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 4
1° Troisième phrase
Supprimer cette phrase.
2° Dernière phrase
Après la référence :
L. 16-10-1
rédiger ainsi la fin de cette phrase :
et L. 160-9, aux 3° , 4° , 13° et 15° de l’article L. 160-14 et aux articles L. 169-1 et L. 371-1.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement de repli vise à exclure de l’application du FPU les patients bénéficiaires du dispositif de l’ALD.
Le remplacement du ticket modérateur par le « forfait patient urgences » semble créer un reste à charge jusqu’ici inexistant pour ces personnes. Actuellement, les bénéficiaires d’une ALD sont totalement exonérés du ticket modérateur. Avec le FPU, ils seront soumis uniquement au tarif réduit du forfait.
Cela revient à nier le principe même du régime de l’ALD, dont les bénéficiaires sont déjà soumis, en valeur absolue, aux restes à charge les plus élevés du fait de leurs besoins de santé.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 386 rectifié est présenté par M. Sol, Mme Garriaud-Maylam, MM. Brisson et Daubresse, Mmes Joseph et L. Darcos, MM. Calvet, Regnard, Grand et Savary, Mmes Goy-Chavent, Raimond-Pavero, V. Boyer et Puissat, MM. Cambon, Pellevat, B. Fournier et Houpert, Mmes Deromedi et Bonfanti-Dossat, M. Rapin, Mme Drexler, MM. Bascher, E. Blanc, Laménie et Mandelli, Mme Lherbier et MM. Pointereau, H. Leroy, Charon et Saury.
L’amendement n° 530 rectifié quinquies est présenté par MM. Lévrier, Théophile et Iacovelli, Mme Schillinger, MM. Guerriau, Buis et Bargeton, Mme N. Goulet, M. Rambaud, Mme Havet et MM. Longeot, Yung, Patient et Hassani.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
1° Troisième phrase
Supprimer les mots :
aux 3° , 4° et 13° de l’article L. 160-14 et à l’article L. 371-1 du présent code ainsi qu’
2° Dernière phrase
a) Remplacer la référence :
11°
par les références :
3° , 4° , 11° , 13°
2° Après la référence :
L. 169-1
insérer la référence :
, L. 371-1
La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° 386 rectifié.
M. René-Paul Savary. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour présenter l’amendement n° 530 rectifié quinquies.
M. Martin Lévrier. Il est également défendu.
M. le président. L’amendement n° 1044, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 4, dernière phrase
Après le mot :
prévus
insérer les mots :
à l’article L. 115 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Les amendements nos 789 rectifié et 1015 visent à revenir sur la participation forfaitaire créée par le projet de loi de financement de la sécurité sociale, en lieu et place du ticket modérateur pour le passage aux urgences non suivies d’une hospitalisation.
Je partage le sentiment de perte de sens lié à des réformes par petites touches. Je souscris également au fait que le remplacement du ticket modérateur par une participation forfaitaire ne constitue pas une réforme structurelle pour les urgences hospitalières, comme l’a rappelé M. Jomier, sujet sur lequel nos collègues Laurence Cohen et René-Paul Savary ont travaillé de manière approfondie en 2017.
Cette réforme, avant tout technique, représente toutefois une simplification pour les hôpitaux alors qu’aujourd’hui une part significative des factures n’est pas recouvrée. C’est aussi un gage de meilleure lisibilité pour les patients. ¨Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
Les autres amendements tendent, avec quelques nuances, à revenir sur le champ des exonérations à cette nouvelle participation forfaitaire « urgences ». Il s’agit de proposer l’exonération totale de forfait pour les personnes qui bénéficient à l’heure actuelle d’une exonération du ticket modérateur.
L’Assemblée nationale a déjà engagé une évolution en ce sens concernant les femmes enceintes ou les nouveau-nés. Je comprends que l’intention du Gouvernement était d’instaurer une plus grande mutualisation puisque les personnes en ALD, quand elles vont aux urgences pour un problème sans lien avec cette affection, ont en général un reste à charge élevé. Celui-ci serait plafonné avec le principe de forfaitisation.
Toutefois, la commission soutient, au nom d’une certaine équité, le maintien d’une exonération totale pour certaines catégories de patients aujourd’hui déjà exonérés, notamment ceux qui sont en ALD.
En revanche, l’exonération pour les donneurs d’organes prévue par les amendements identiques nos 246 rectifié quater, 613 et 928 ne me semble pas pertinente s’agissant d’un passage non programmé aux urgences.
Au final, la commission a émis un avis favorable sur les amendements identiques nos 386 rectifié et 530 rectifié quinquies. Par conséquent, elle demande aux auteurs des autres amendements, en large partie satisfaits, de s’y rallier. Elle demande donc le retrait des amendements nos 840 rectifié bis, 246 rectifié quater, 613, 928 et 1016. À défaut elle émettra un avis défavorable.
Demande de retrait ou avis défavorable, également, pour l’amendement n° 1044 de Mme Cohen, celui-ci étant déjà satisfait par le fait de viser l’article L. 212-1 du code des pensions militaires.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. L’avis est défavorable sur l’ensemble de ces amendements, qui tendent à supprimer le forfait de passage aux urgences. Je rappelle que cette mesure a été demandée par les urgentistes et validée par l’association France Assos Santé, qui représente les usagers. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
M. Bernard Jomier. Pas du tout !
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Cette mesure vise trois objectifs.
Premièrement, elle vise la réduction des inégalités constatées puisque le montant de cette participation forfaitaire évite les restes à charge plus importants supportés aujourd’hui par certains patients. Par ailleurs, son montant est minoré pour les patients qui bénéficient d’un régime d’exonération.
Deuxièmement, elle vise la lisibilité du coût des passages aux urgences et du montant du reste à charge des patients.
Troisièmement, elle vise la simplification administrative, qui permet des gains de temps et de gestion pour les établissements. Ces derniers réclament ces simplifications afin de pouvoir se recentrer sur leurs missions essentielles, au profit de l’ensemble des patients.
Enfin, je rappelle que 96 % des assurés disposent d’une couverture complémentaire. Cette participation forfaitaire sera également prise en charge.
De surcroît, pour les ALD, c’est bien le forfait patient urgences bas, plus favorable que le régime actuel, qui s’appliquera.
Le forfait de réorientation a pour objectif d’alléger les services d’urgences. Par ailleurs, le FPU est une mesure de simplification et d’équité.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Madame la ministre, vous nous dites que les urgentistes vont pouvoir se consacrer à leur mission essentielle grâce au FPU : c’est une plaisanterie ! En quoi cela allégera-t-il leur travail ? Soyons sérieux !
M. Bernard Jomier. D’ailleurs, leurs organisations ne soutiennent pas la mise en place de ce forfait, non pas pour des raisons philosophiques, mais tout simplement parce que c’est un outil inefficace.
Ce forfait est présenté dans ce projet de loi comme devant permettre une meilleure régulation de l’accès aux urgences. Or, vous le savez, cela n’aura aucun effet en la matière. Ces mesures sont vouées à l’échec. Le plus désolant, encore une fois, c’est que vous ne nous proposez aucune mesure structurelle de coopération entre la ville et l’hôpital, en amont des urgences, ou d’organisation de la permanence des soins ambulatoires (PDSA) qui, elle, aurait un impact sur la fréquentation des services d’urgences !
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. J’approuve les propos de mon collègue. Nous demandons qu’aucun usager bénéficiant d’une exonération ne paie ce forfait.
Vous venez de confirmer, madame la ministre, que le forfait réduit s’appliquerait aux « trous dans la raquette ». On veut exclure les ALD, telle ou telle catégorie… Mais ce qu’il faut, c’est exclure toute personne exonérée aujourd’hui du ticket modérateur du paiement du forfait. Au lieu de quoi, vous leur faites l’aumône d’un forfait réduit ; or celui-ci s’applique aux personnes exonérées aujourd’hui, qui paieront demain !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 840 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 246 rectifié quater, 613 et 928.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 386 rectifié et 530 rectifié quinquies.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1073, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 27
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Au premier alinéa, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 » ;
II. – Alinéa 33
Remplacer les mots :
À compter du 1er janvier 2021 et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2023
par les mots :
À compter du 1er janvier 2022 et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2025
III. – Alinéa 38
Remplacer l’année :
2024
par l’année :
2026
IV. – Alinéas 42 à 44
Supprimer ces alinéas.
V. – Après l’alinéa 53
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Le E est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du 2° et au 6°, l’année : « 2020 » est remplacée par l’année : « 2021 » ;
b) À la fin des a et b du 3° , l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 » ;
VI. – Alinéa 55
Remplacer l’année :
2020
par l’année :
2021
et l’année :
2021
par l’année :
2022
VII. – Après l’alinéa 56
Insérer un alinéa et un paragraphe ainsi rédigés :
…° Au H, l’année : « 2020 » est remplacée par l’année : « 2021 ».
…. – Aux V et VI de l’article 78 de la loi n° 2015-1702 précitée, l’année : « 2020 » est remplacée par l’année : « 2021 ».
VIII. – Après l’alinéa 57
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au VI de l’article 34, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 » ;
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Cet amendement vise à reporter au 1er janvier 2022 la mise en œuvre des réformes de financement des activités de soins de suite et de réadaptation (SSR) et de psychiatrie, et la réforme du ticket modérateur en médecine, chirurgie obstétrique (MCO).
Nous avons, comme vous le savez, engagé une réforme en profondeur du mode de financement des établissements de santé. Il s’agit, notamment, de remplacer progressivement la tarification à l’activité par des modes de financement plus mixtes, qui tiennent davantage compte de la pertinence et de la qualité des prises en charge.
Si le Ségur de la santé nous a conduits à réaffirmer cet objectif, la deuxième vague de la covid-19 et la crise sanitaire que nous traversons nous obligent à reporter cette réforme. Toutefois, report ne signifie pas suppression.
La réforme est présente dans nos esprits et reste au cœur de nos préoccupations. Je puis vous assurer que nous serons au rendez-vous et que nous poursuivons nos travaux pour la faire aboutir. Cependant, comprenez que les contraintes actuelles affectent la méthode de concertation et de travail des ARS, qui doivent se concentrer sur d’autres objectifs et sur d’autres urgences.
M. le président. L’amendement n° 677 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Boré, Le Rudulier et Frassa, Mme Micouleau, M. Daubresse, Mmes Dumas, Deromedi et Joseph, MM. B. Fournier et Bouchet, Mmes Garriaud-Maylam et Raimond-Pavero, M. Houpert, Mmes Drexler et Thomas et MM. Cuypers, Genet et Charon, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 57
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le VI de l’article 34 est complété par les mots : « , à l’exception des établissements de santé mentionnés aux d et e de l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale et autorisés à exercer l’activité de soins de psychiatrie en application des dispositions du 4° de l’article R. 6122-25 du code de la santé publique, pour lesquels les mêmes dispositions entrent en vigueur le 1er janvier 2022. » ;
La parole est à Mme Valérie Boyer.
Mme Valérie Boyer. Cet amendement vise à décaler d’un an la réforme du financement de la psychiatrie des établissements privés à but lucratif. En effet, l’année 2020 a été fortement marquée par la lutte contre l’épidémie de covid-19, à tel point que toutes les catégories d’établissements de santé ont été mobilisées, afin de faire face à l’urgence de la situation sanitaire.
L’année 2021 ne s’annonce pas moins préoccupante, et la mobilisation de tous les établissements de santé restera encore, ô combien nécessaire ! Pourtant, dans cette perspective de lutte prolongée contre l’épidémie, le projet de loi de financement de la sécurité sociale maintient la mise en œuvre de la réforme du financement des activités de soins psychiatriques, dès le 1er janvier 2021. Une telle précipitation, en pleine période de gestion de crise sanitaire, n’apparaît ni raisonnable ni opportune, alors que nous voyons poindre chez nos concitoyens la multiplication des problèmes de santé mentale.
Cette réforme n’a été inscrite dans le droit positif qu’à la faveur de l’article 34 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, qui a été promulgué le 24 décembre 2019. Compte tenu des événements sanitaires exceptionnels qui ont émaillé l’année 2020, il ne paraît pas opportun de la mettre en œuvre à la date prévue, aussi nécessaire et ambitieuse soit-elle. Un report d’un an laisserait le temps aux établissements de s’y préparer dans un contexte que nous espérons apaisé.
M. le président. L’amendement n° 17 rectifié ter, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel, Genet, J.B. Blanc et Bonne, Mme Puissat, MM. Rapin, Piednoir, Savary, Pointereau et Houpert, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 57
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au premier alinéa du VI de l’article 35, l’année : « 2023 » est remplacée par l’année : « 2024 ».
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Défendu !
M. le président. L’amendement n° 531 rectifié quater, présenté par MM. Lévrier, Théophile, Iacovelli, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Yung et Guerriau, Mme N. Goulet, M. Longeot, Mme Garriaud-Maylam, M. Regnard et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 62
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Au plus tard jusqu’au 1er mars 2022, les établissements privés relevant du d de l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale et qui, à la date de promulgation de la présente loi, par exception aux dispositions de l’article L. 162-2 du même code et de l’article L. 4113-5 du code de la santé publique, dérogent au paiement direct des honoraires médicaux et des auxiliaires médicaux et sont habilités au service public hospitalier, dans les conditions fixées par l’article L. 6112-3 du même code, peuvent exercer un droit d’option pour être rattachés à l’échelle des dotations et tarifs des établissements mentionnés au b et au c de l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale.
La demande doit être formulée auprès de l’Agence régionale de santé compétente, au plus tard le 15 janvier de l’année de prise d’effet du droit d’option.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. La mise en œuvre de la réforme du financement des activités de soins de suite et de réadaptation, prévue à partir de 2021, avec des mesures transitoires, s’effectuera par étapes.
Pour accompagner la réforme et dans un souci de simplification, cet amendement prévoit que les établissements de santé privés sans but lucratif, sous objectif quantifié national (OQN), avec des « tarifs tout compris » incluant les honoraires médicaux des praticiens, pourront se rattacher au mode de financement des établissements de santé privés d’intérêt collectif (Espic) admis à participer au service public hospitalier.
En effet, les établissements qui bénéficient du prix de journée « tout compris » sont dans une situation tarifaire dérogatoire, car ils ne peuvent pas facturer d’honoraires médicaux. Pour rappel, ce régime dérogatoire a été mis en place dans certaines régions, sous l’impulsion des ARS.
La moitié de ces établissements sont financés par un prix de journée qui couvre la rémunération de médecins salariés, avec une totale absence de facturation aux patients. L’autre moitié fait intervenir des médecins et auxiliaires médicaux libéraux dont les honoraires sont facturés en sus du prix de journée.
Ce rattachement à la tarification des Espic admis à participer au service public hospitalier permet de simplifier les modes de financement des activités de soins de suite et de réadaptation, et de rétablir l’égalité tarifaire avec les autres catégories d’établissements de santé privés qui participent au service public hospitalier.
Cet amendement vise donc à mettre en œuvre un mécanisme transitoire, sur la base d’un droit d’option qui s’exercera d’ici à 2022. Les établissements concernés pourront ainsi être rattachés à l’échelle des tarifs qui s’appliquaient dans les établissements antérieurement sous dotation globale, puisque leur périmètre tarifaire est identique, avec des missions et obligations similaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission n’a pas pu se réunir pour examiner l’amendement du Gouvernement, puisqu’il a été déposé jeudi après- midi.
Cet amendement reporte plusieurs réformes, dont celle sur le reste à charge hospitalier, et celle sur le financement des activités de psychiatrie et de SSR.
Il revient sur des dispositions que le Gouvernement a introduites à l’Assemblée nationale, et qui portent sur la réforme du reste à charge hospitalier votée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2020. Il reporte cette réforme à 2022, et prolonge de deux ans la période de lissage prévue, en en portant le terme à 2026 au lieu de 2024.
Cet amendement décale aussi, une nouvelle fois, d’un an le modèle transitoire de financement des activités de SSR, issu de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.
Enfin, il reporte d’un an, à 2022, l’entrée en vigueur de la réforme du financement des activités de psychiatrie votée en loi de financement de la sécurité sociale pour 2020.
J’ai entendu les préoccupations des fédérations hospitalières, notamment celles du secteur privé, sur l’opportunité de mener ces réformes dans le contexte sanitaire actuel. Ces fédérations regrettent aussi l’absence de visibilité sur l’impact qu’auront ces réformes, et le manque de simulations à quelques semaines de leur entrée en vigueur.
Par conséquent, alors que la commission avait donné un avis favorable à l’amendement n° 677 rectifié de Mme Boyer qui reporte la réforme de la psychiatrie pour les établissements privés, j’ai entendu les attentes que le secteur public nourrissait également à l’égard de réformes nécessaires du mode de financement des établissements de santé.
Je regrette, évidemment, que le Gouvernement ait déposé son amendement aussi tardivement, d’autant plus qu’il est conséquent. Dans la mesure où la commission n’a pas pu l’examiner, je vous propose de nous en remettre à la sagesse du Sénat, sans avoir à titre personnel d’opposition sur le fond.
Si cet amendement du Gouvernement était voté, les autres amendements en discussion commune seraient satisfaits, qu’il s’agisse de l’amendement n° 17 rectifié ter de M. Milon sur le report de la réforme du reste à charge hospitalier, de l’amendement n° 677 rectifié de Mme Boyer sur le report de la réforme de la psychiatrie dans le secteur privé, ou de l’amendement n° 531 rectifié quater de M. Lévrier qui porte sur la réforme des SSR.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements, faute de quoi il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Mme la ministre et nos collègues partagent le même constat, à savoir que la crise sanitaire a largement perturbé le fonctionnement des établissements, de sorte qu’il n’a pas été possible d’anticiper ou de préparer les réformes.
Quant au groupe CRCE, il est opposé à la réforme du financement de la psychiatrie. En effet, nous avions expliqué l’an dernier, combien il nous paraissait aberrant d’introduire une dose de T2A dans ce financement. C’est encore plus vrai, aujourd’hui, où tout le monde s’accorde à dire que la T2A n’est pas ou plus adaptée, d’une manière générale.
De même, nous avions dénoncé le recours à la « dotation qualité » comme l’une des composantes du nouveau mode de financement. À cet égard, nous avions relayé l’inquiétude des professionnels dans un secteur particulièrement sinistré. En effet, la mesure de la qualité des soins dépend de protocoles qui sont plus technocratiques que médicaux, si bien que tous les professionnels redoutent une standardisation des soins, une perte de temps à répondre à ces protocoles, au détriment du soin personnalisé qu’il faut apporter à chaque patient.
Par conséquent, nous ne voterons pas les amendements qui prévoient de reculer d’un an l’entrée en vigueur de cette réforme. Nous voulons redire ici notre attente d’une grande loi en faveur de la santé mentale, attente que partage l’ensemble du personnel des hôpitaux psychiatriques.
La santé mentale est une nouvelle fois la grande absente de ce PLFSS. Le moment était pourtant propice, puisqu’en pleine crise de la covid-19 le besoin d’un accompagnement psychologique et psychiatrique des patients se fait urgemment ressentir.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 677 rectifié, 17 rectifié ter et 531 rectifié quater n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 749 rectifié, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – L’article 43 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 est abrogé.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Cet amendement vise à supprimer la possibilité d’expérimenter le forfait de réorientation, qui avait été introduit dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, et qui – je le précise – n’a toujours pas été mis en œuvre à ce jour.
Ce forfait de réorientation est dénoncé par l’ensemble du personnel soignant. Je rappelle, en effet, qu’il consiste à rémunérer ceux qui travaillent aux urgences pour ne pas prendre en charge des personnes qui s’y présenteraient. Le dispositif choque le personnel hospitalier, et les professionnels de santé de ville le rejettent clairement. En outre, il ne résout évidemment pas le problème de l’engorgement des services d’urgence.
L’examen du PLFSS nous a donné, à plusieurs reprises, l’occasion de rappeler l’importance d’engager un travail de fond sur les missions de l’hôpital public, en concertation avec les soignants. Toutefois, le ministre de la santé n’a pas souhaité intégrer cette réflexion dans le Ségur de la santé.
C’est pourtant une première pierre indispensable, non seulement pour déterminer le budget nécessaire à la réalisation des missions confiées à l’hôpital public, mais aussi pour améliorer la coopération en amont avec la médecine de ville.
En attendant, il faut cesser d’amonceler des mesures financières décidées sans réflexion ni cohérence, de sorte qu’elles finissent par constituer un maquis où il est bien compliqué de se retrouver.
Nous proposons donc de simplifier la loi en supprimant ce forfait qui n’a jamais été appliqué.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Le Sénat s’était opposé quasi unanimement à cette disposition lors de l’examen du PLFSS pour 2019, et la logique ne nous semble toujours pas vertueuse.
L’arrêté du 27 décembre 2019 a fixé le cahier des charges de l’expérimentation et, sur cette base, des appels à projets ont été lancés en région. Mme la ministre pourra peut-être nous indiquer où en sont ces projets.
Nous restons cependant constants dans l’opposition à ce mécanisme. Dans leur rapport de 2017 sur les urgences hospitalières, nos collègues René-Paul Savary et Laurence Cohen avaient formulé des propositions plus intéressantes.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Vous proposez de supprimer l’expérimentation du forfait de réorientation. Bien évidemment, ce dispositif ne peut suffire à résoudre l’engorgement des services d’urgence, qui sont confrontés depuis une vingtaine d’années à un afflux considérable de patients et à une hausse d’activité énorme.
Désengorger ces structures d’urgences hospitalières reste pourtant un objectif fort du Gouvernement. En effet, le forfait de réorientation s’inscrit dans le plan d’action beaucoup plus global et ambitieux que constitue le pacte de refondation des urgences. Le Ségur de la santé a été l’occasion d’en réaffirmer les mesures clés, avec notamment le lancement du service d’accès aux soins (SAS) qui se déploiera dans les tout prochains mois.
Le forfait de réorientation concourt à cet objectif majeur de recentrage des urgences, né d’un constat fort : selon un rapport de la Cour des comptes, 20 % des patients qui se présentent aux urgences n’auraient pas besoin de recourir à ce service, et pourraient être pris en charge directement en ville.
Vous soulignez à juste titre l’importance qu’il y aurait à mener une réflexion opérationnelle sur la coopération entre la médecine de ville et l’hôpital. Or l’expérimentation de forfaits repose, en premier lieu, sur un travail conjoint entre les urgentistes et les praticiens libéraux pour formaliser ces modalités de réorientation.
Enfin, contrairement à ce que vous dites, ce projet a suscité – contrairement à ce que vous avez dit – un fort intérêt au sein des établissements hospitaliers, puisqu’une cinquantaine d’entre eux ont déposé une candidature pour expérimenter le forfait de réorientation. La liste de ces établissements sera publiée dans les tout prochains jours.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 18 rectifié ter, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel, Genet et Bonne, Mme Malet, M. Sol, Mme F. Gerbaud, MM. Rapin, Piednoir, Savary, Pointereau et Houpert, Mmes Di Folco et Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – L’article L. 162-20-1 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Une tarification forfaitaire nationale des prestations, établie en fonction de catégories d’activité de soins et du niveau de charges des établissements et dont les modalités sont déterminées par voie réglementaire sert de base, à compter du 1er janvier 2022, au calcul de la participation à la charge des assurés mentionnée à l’article L. 160-13 du présent code. Cette participation forfaitaire des assurés est facturée à un guichet unique national assuré par l’assurance maladie obligatoire. »
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Les règles actuelles de calcul du reste à charge en matière de prestations d’hospitalisation sont extrêmement complexes. Ce reste à charge repose sur plusieurs modalités dont les tarifs journaliers de prestation, le forfait journalier et la participation forfaitaire pour les actes coûteux. Les règles de calcul varient en fonction de chacune de ces modalités.
Si le reste à charge qui est effectivement payé par le patient, après intervention des organismes complémentaires, demeure globalement faible à l’hôpital public, les montants sont très variables et peuvent être très élevés dans certaines situations. La crise sanitaire en est un exemple flagrant, puisque les hospitalisations de patients « covid+ » ont pu donner lieu à des factures élevées à la charge de patients.
La répartition du reste à charge est en effet très inégale, avec une forte concentration sur les activités de médecine, les hospitalisations longues, les âges extrêmes de la vie et particulièrement sur les patients âgés.
De plus, ces restes à charge peuvent être très difficiles à supporter pour les patients qui n’ont pas de couverture complémentaire. Ce sont donc les patients les plus âgés, les plus malades et les plus démunis qui doivent s’acquitter des restes à charge les plus lourds, ce qui pose une question de justice sociale et de solidarité collective.
Par conséquent, dans la droite ligne de l’étude menée en 2019 par le ministère de la santé, en concertation avec les fédérations hospitalières, cet amendement prévoit de forfaitiser cette participation, afin de mieux répartir le reste à charge et de simplifier les règles de facturation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La réforme du reste à charge hospitalier que nous avons votée l’an passé manque effectivement d’ambition, si l’on considère l’objectif de simplification que vise cet amendement.
Cependant, l’article 28 prévoit une montée en charge de cette réforme, dont les conditions d’entrée en vigueur seront lissées jusqu’en 2026, puisque nous avons voté l’amendement n° 1073 du Gouvernement.
Rien ne s’oppose à ce que nous poursuivions, dans l’intervalle, la réflexion sur la remise à plat plus globale de ce chantier. La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Nous partageons l’objectif de simplification que vise cet amendement.
Cependant, la réforme de la participation à l’hôpital, introduite à l’article 35 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 tend d’ores et déjà à remplacer les tarifs journaliers de prestations par une nomenclature simplifiée et unifiée au niveau national, pour le calcul du ticket modérateur.
Cette nomenclature, dite « des tarifs nationaux journaliers de prestations », vise à une plus grande équité entre les patients. Elle permettra de simplifier, de manière significative, le processus de facturation.
Je rappelle, en effet, que plus de 96 % des assurés ont signé un contrat de complémentaire santé responsable, qui couvre obligatoirement la participation de l’assuré aux frais liés à la prise en charge de l’hôpital. Ce contrat doit permettre aux assurés de bénéficier du tiers payant sur ces frais, à hauteur du ticket modérateur.
Par conséquent, cet amendement comporte un risque financier réel pour l’assurance maladie, en cas de difficultés de recouvrement de cette avance de frais.
Par ailleurs, je précise que pour tenir compte du contexte actuel, le Gouvernement a déposé un amendement visant à reporter d’un an l’entrée en vigueur de certaines réformes du financement des établissements de santé, prévues en 2021, dont la réforme du calcul du ticket modérateur.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Cet amendement est excellent, car son auteur propose une solution destinée à mettre fin à une situation d’injustice et d’inefficacité qui dure depuis trop d’années, et dont nous sommes tous coresponsables.
Alain Milon ne le précise pas dans l’exposé des motifs, mais je ne doute pas qu’il souscrira à ce que je souhaite ajouter : la concertation doit se faire non seulement avec les fédérations hospitalières, mais aussi avec les associations de patients et le secteur des complémentaires de santé. Rien ne justifie que la prise en charge se fasse à 100 % pour une intervention chirurgicale à l’hôpital, mais que le reste à charge atteigne plusieurs centaines, voire milliers, d’euros, dès lors qu’un patient doit être hospitalisé pendant plusieurs jours.
Nous voterons cet amendement très intéressant.
M. le président. Je mets aux voix l’article 28, modifié.
(L’article 28 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 28
M. le président. L’amendement n° 579, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 162-20-1 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – La prestation d’hébergement en chambre particulière est intégrée dans les tarifs nationaux journaliers de prestation. »
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cet amendement prévoit d’intégrer la prestation d’hébergement en chambre particulière dans les tarifs nationaux journaliers de prestations, afin qu’elle ne soit plus facturée comme prestation hôtelière.
En effet, pendant cette période de covid, il est arrivé très fréquemment que l’on isole des patients dans des chambres particulières, ou bien que l’on transforme des chambres doubles en chambres particulières, pour éviter un risque de contamination. Dans ces conditions, il serait assez anormal que les patients aient à payer une prestation de chambre individuelle au titre de la prestation hôtelière.
En outre, on constate une tendance à privilégier les chambres particulières, dans le cadre de constructions ou de réhabilitations de bâtiments, et il faut l’encourager.
L’évolution tarifaire doit se faire, car les chambres particulières tendent de plus en plus à être considérées comme une prestation normale de qualité de soins.
Cet amendement prévoit une période limitée d’un an pour l’application du dispositif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il est vrai que les règles sanitaires actuelles conduisent à privilégier la chambre individuelle pour les hospitalisations.
Cependant l’amendement, tel qu’il est rédigé, ne me paraît pas répondre de manière satisfaisante au besoin de prise en charge de cette prestation, car il entraînerait une perte de recettes pour les établissements de santé. Il généralise, en outre, une situation qui est aujourd’hui justifiée par le contexte sanitaire de la covid-19.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 678 rectifié ter, présenté par Mme V. Boyer, MM. Boré, Le Rudulier et Frassa, Mme Micouleau, M. Daubresse, Mmes Dumas, Deromedi et Joseph, MM. J.M. Boyer, Anglars, Bonne, B. Fournier et Bouchet, Mmes Garriaud-Maylam et Raimond-Pavero, M. Houpert, Mmes Drexler et Thomas, MM. Cuypers, Rapin, Sautarel, Gremillet, Segouin et Genet, Mme de Cidrac et MM. Charon et Bouloux, est ainsi libellé :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-22-13-… ainsi rédigé :
« Art. L. 162-22-13-…. – Chaque année, les agences régionales de santé présentent un bilan au ministère de la santé sur la répartition financière des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation et des fonds d’intervention régionaux. Ce bilan est présenté par le ministère devant le Parlement. Il est accessible sur le site internet des agences régionales de santé. »
La parole est à Mme Valérie Boyer.
Mme Valérie Boyer. Cet amendement tend à imposer un principe de transparence, car il prévoit que les ARS devront justifier l’utilisation des deniers publics devant la représentation nationale.
Il ne s’agit pas d’une demande de rapport. Je souhaiterais que les ARS présentent, chaque année, au ministre de la santé, un bilan qui pourra porter sur la répartition financière, les missions d’intérêt général, l’aide à la contractualisation et les fonds d’intervention régionaux.
Ce bilan sera ensuite présenté par le ministre devant le Parlement. Il sera également publié sur le site internet des ARS.
Le Parlement pourra ainsi exercer une forme de contrôle pour vérifier la bonne exécution de ce qu’il aura voté. La crise que nous traversons a montré l’importance que nos concitoyens accordent à la bonne utilisation de l’argent public et leur souhait de pouvoir disposer d’informations transparentes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement est satisfait, car il existe déjà un rapport annuel sur l’utilisation du FIR, qui est transmis au Parlement.
De plus, un rapport sur le financement des établissements de santé, établi en application de l’article L. 162-23-14 du code de la sécurité sociale, présente en annexe la ventilation des missions d’intérêt général et d’aides à la contractualisation (Migac).
Bien qu’il n’ait pas été transmis pendant plusieurs années, la version de ce rapport pour l’année 2020 a été adressée au Parlement, en octobre dernier. Ces rapports sont publics.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Même si nous travaillons dans un contexte d’urgence, et si ce texte n’est pas forcément le bon véhicule pour le faire, nous sommes nombreux sur ces travées à considérer qu’il faudrait revoir la gouvernance des ARS au regard de la crise que nous traversons. En effet, les collectivités locales et les élus ont souvent dû intervenir pour corriger les déboires de ces agences.
À cet égard, je présenterai un amendement qui tend à remettre les élus au cœur du dispositif des ARS, car les maires et les collectivités restent les premiers acteurs de la santé. Les maires sont les présidents des conseils d’administration des hôpitaux, qui sont très souvent les premiers employeurs des communes.
Même s’il est satisfait, l’amendement de Mme Boyer est l’occasion de réaffirmer le besoin de transparence de nos concitoyens et la nécessité d’une gouvernance partagée au sein des ARS.
J’espère que la Haute Assemblée veillera à se saisir du débat sur l’avenir des ARS et la recomposition de leur gouvernance, même si ce n’est pas dans le cadre du PLFSS. Les élus le méritent qui se sont impliqués avec toute leur énergie pour faire face à l’épidémie. Quant aux départements, ils ont retrouvé leur raison d’être dans la gestion de la crise.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. En dépit des améliorations rédactionnelles qu’on pourrait lui apporter, cet amendement reste bien fondé, car il pose un vrai problème. Comme l’a dit Nathalie Goulet, cette crise a été l’occasion de constater publiquement les dysfonctionnements de la gouvernance des ARS, tant en termes de régulation que de gestion.
En Guadeloupe, le directeur de l’ARS a sans doute cru qu’il dirigeait une caserne, où nous n’étions rien de plus que des petits soldats de plomb qu’il pouvait déplacer à son gré.
Mme la rapporteure considère que cet amendement est satisfait. Pourtant, en Guadeloupe, l’ARS ne nous a jamais fourni autre chose que de la publicité sur papier glacé, destinée à servir sa politique de communication. Jamais les élus n’ont pu obtenir d’informations les éclairant sur la situation, les investissements ou les répartitions opérées par l’agence.
J’en veux pour preuve le déplacement d’un projet régional de santé (PRS), lié à la décision unilatérale de l’ARS d’annuler l’installation d’un cyclotron et d’une Tep Scan.
Les élus n’ont rien vu venir, car on s’est contenté de leur envoyer des documents parfaitement ésotériques que personne n’a compris. Il fallait aller sur internet pour comprendre qu’on avait supprimé le cyclotron ! Nous avons dénoncé, avec d’autres collègues, et notamment Mme Jasmin, cette méthode un peu sournoise.
Par conséquent, il faut revoir la répartition des compétences entre les ARS et les collectivités, et faire évoluer le style de gouvernance vers plus de transparence. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je ne voterai pas cet amendement. Je vous rappelle que le principe d’existence des ARS et leur façon de fonctionner ont été définis dans la loi qui a également rendu possible la T2A. Quel était l’objectif ? Il s’agissait de distancier les choix hospitaliers de ceux de la société et des élus locaux.
J’ai connu des périodes où les élus avaient un pouvoir beaucoup plus important qu’aujourd’hui, ce qui leur donnait au moins l’impression de participer au processus de décision. Ils savaient pourquoi et comment chaque décision était prise, et cela même s’ils n’étaient pas d’accord.
Ce lien avec les élus s’est effacé devant une gestion technocratique pure, reposant sur l’idée que pour faire des économies, il faut tenir les acteurs locaux à distance et fuir tout ce beau monde qui voudrait vivre comme à Clochemerle, avec « chacun son truc chez soi », etc.
Nous traversons une crise majeure de pilotage de notre système de santé, tant à l’hôpital que dans les ARS. Il existe bien, ici ou là, quelques directeurs d’agence actifs et efficaces. Toutefois, par principe, les choix stratégiques se font à l’écart des élus et de la société, ce qui technocratise le pilotage de notre système.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour explication de vote.
Mme Valérie Boyer. Compte tenu des circonstances et de l’évolution du texte sur la création des ARS, il serait bon que la représentation nationale soit associée au moins une fois dans l’année, à l’échelle régionale ou nationale, aux choix qui se font au sein des ARS.
C’est vrai, nous disposons aujourd’hui d’informations, mais nous les obtenons de façon éparpillée et, vous le savez, avec difficulté ; il est donc extrêmement compliqué pour nous d’avoir une vision globale de ce qui se passe sur le territoire.
Par conséquent, puisque nous demandons de la proximité et que les collectivités territoriales ont été au premier rang – bien avant les ARS –, lors de la crise sanitaire, pour fournir des masques et des tests, voire pour mettre en œuvre des parcours de soins, il me semble nécessaire qu’à la faveur de cette crise très difficile l’on change de paradigme et que les ARS se tournent vers la représentation nationale. Ce serait la moindre des choses, ne serait-ce que pour nous permettre de voir comment les décisions adoptées sont appliquées, à l’échelon tant national que local.
Cette transmission organisée d’informations ne me semble pas exister et cette demande ne me paraît pas indécente, surtout au regard des circonstances actuelles.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je vous prie de m’excuser, mais je vais prendre le contre-pied de tout ce qui vient d’être dit.
Au cours des auditions de la commission d’enquête pour l’évaluation des politiques publiques face aux grandes pandémies à la lumière de la crise sanitaire de la covid-19 et de sa gestion, que j’ai l’honneur de présider, je n’ai pas eu le sentiment que les ARS avaient été au-dessous de tout. Elles ont été convenablement gérées ; elles ont travaillé comme il le fallait avec les préfets et les élus de proximité ont été, me semble-t-il, bien informés des actions mises en place, même si, dans nombre de départements, les préfets ont pris le dessus par rapport à l’ARS ; après tout, les ARS agissent dans la région et les préfets dans les départements.
Par ailleurs, je suis président de la fédération hospitalière de ma région et nous sommes évidemment informés du budget de l’ARS et de la façon dont il est exécuté à l’échelle de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Je n’ai donc pas à me plaindre de cela.
Que les élus de la Nation demandent à être informés de l’utilisation de ces budgets, pourquoi pas ? Mais dans ce cas ce serait plutôt au ministère, qui contrôle l’action et les dépenses des ARS, de nous faire chaque année – par exemple dans le cadre de l’examen du PLFSS ou de la loi de règlement – une présentation de l’action des différentes ARS.
Même si la demande Valérie Boyer me paraît légitime, j’ai l’impression que l’on sous-entend qu’il y aurait, par moments, une utilisation sournoise ou bizarre des finances de l’État.
Mme Valérie Boyer. Non !
M. Alain Milon. Or cela ne me semble pas être le cas. Je veux qu’il soit dit que l’argent est utilisé en fonction des directives données à l’échelon national et des discussions entre les directeurs d’hôpital, les élus locaux et les unions régionales des professionnels de santé (URPS). Tout cela se fait dans la transparence la plus totale.
Mme Valérie Boyer. C’est transparent, mais ce n’est pas organisé !
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Ce sujet prend de l’importance avec la pandémie de covid-19, mais il y avait déjà des signes d’alerte auparavant.
Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est vrai !
M. Pascal Savoldelli. Aussi, je veux vous suggérer une méthode, madame la ministre.
Dès lors que l’on identifie ici, sur différentes travées, qui reflètent des analyses différentes – notre collègue Milon vient de le dire –, un problème relatif au fonctionnement, au rôle et à la transparence du financement des ARS, dès lors donc que ce sujet interpelle tous les élus de la Nation, quelle que soit leur sensibilité, eh bien, madame la ministre, inscrivez un débat à l’ordre du jour du Sénat ! On recueillera ainsi l’avis de l’ensemble des parlementaires et cela vous aidera à être force de proposition pour réformer les ARS.
La démocratie sanitaire requiert un peu de temps, elle doit s’appuyer sur des savoirs et des compétences et elle suppose d’analyser, de façon contradictoire, les processus de décision. Ensuite, nous délibérerons. Je ne dis pas que nous serons unanimes, mais au moins nous aurons une information cohérente et l’ensemble des parlementaires qui siègent dans cet hémicycle seront respectés.
M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.
Mme Pascale Gruny. Je voterai l’amendement de Valérie Boyer.
D’abord, ce qu’elle demande me paraît tout à fait justifié. Ensuite, je ne suis pas du tout d’accord avec notre excellent collègue Alain Milon. Dans ma région, nous n’obtenons jamais de réponse de l’ARS ; même le préfet, qui a pourtant beaucoup d’autorité, n’arrive pas à obtenir d’informations !
Lors du premier confinement, l’ARS des Hauts-de-France avait bloqué – on ne sait toujours pas pourquoi – une cargaison d’alcool d’une sucrerie qui devait être livrée, autour de Lille, à des pharmacies ou des usines fabriquant du gel hydroalcoolique. Le directeur de l’ARS ne me répond même plus à ce jour, alors que je reste assez calme dans mes demandes !
Je souhaite donc que, à tout le moins, ces agences soient placées sous la hiérarchie du préfet ; ou alors elles ne sont pas utiles…
Peut-être les choses se passent-elles mieux dans le Sud, mais il y a de véritables difficultés chez nous. Il me semble donc normal de savoir, au minimum, ce qu’elles font. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Il y a, sur les ARS, un véritable questionnement que l’on ne peut pas éluder.
Ces agences doivent répondre aux élus de la Nation mais également aux élus locaux. Ces derniers, même lorsqu’ils sont membres du conseil de surveillance d’une ARS, n’ont pas, ou ont très peu, de contacts avec celle-ci, alors qu’ils font face à des situations très compliquées.
J’habite un territoire dans lequel on attend depuis plus d’un an la nomination d’un directeur de centre hospitalier, à Morlaix. J’ai sollicité des rendez-vous auprès de l’ARS, mais notre rencontre est reportée de semaine en semaine ; cela fait ainsi plus d’un mois et demi que j’attends un rendez-vous nous permettant d’échanger sur la direction des hôpitaux. Les directeurs d’hôpital sont dans une totale solitude !
M. Jean-Luc Fichet. Quand on interroge les ARS, celles-ci nous disent que les directeurs d’hôpital sont autonomes et libres de leurs décisions. Il y a donc un véritable questionnement sur le fonctionnement et la gouvernance des ARS et l’on ne pourra pas éviter un débat de fond sur cette question.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. J’adhère aux propos de Valérie Boyer, mais je rappelle l’objet de son amendement : il s’agit de demander la transmission d’un bilan des ARS au ministère, qui en ferait une présentation devant le Parlement.
Cela pourrait effectivement se faire, madame la ministre, à l’occasion d’un bilan annuel de votre action devant le Parlement, mais il peut aussi relever des groupes politiques d’organiser un débat sur les ARS dans le cadre de leur espace réservé dans l’ordre du jour.
Pour ce qui concerne les relations avec l’ARS, chacun aura son avis ; en ce qui me concerne, dans la région où je suis élue, les choses fonctionnent très bien. En revanche, ce qui apparaît clairement, c’est la difficulté des ARS à gérer les choses dans les grandes régions ; on voit là les limites de ces nouvelles régions dessinées, un dimanche soir, sur un coin de table… Il faudra donc – ce sera peut-être une proposition de la commission d’enquête sur la covid – travailler sur les délégations départementales.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Il y a un écart entre le dispositif de cet amendement, qui tend simplement à demander la transmission d’un rapport au Parlement, et les propos que je viens d’entendre, qui constituent un véritable tir groupé contre les ARS.
Mme Valérie Boyer. Non, ce n’est pas un tir groupé contre les ARS, c’est une demande d’information !
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Or ces agences sont actuellement sur le pont jour et nuit, et elles nous rendent compte de tout. En ce qui me concerne, en tout cas pour les ARS que je connais, j’ai toujours obtenu les informations que je demandais et ce n’est pas parce que je suis ministre, puisque c’était déjà le cas quand j’étais élue de territoire.
Il faut donc bien doser ses propos. Les ARS sont réquisitionnées en permanence et sont à notre disposition vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
Mme Valérie Boyer. C’est une demande d’information, pas une attaque en règle !
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Pendant le premier confinement et la première vague, il y a eu une articulation parfaite entre les préfets et les ARS. Je ne sais pas pourquoi, chez vous, cela n’a pas fonctionné,…
Mme Valérie Boyer. Ce n’est pas ce que j’ai dit !
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. … mais partout ailleurs, cela a été salué par les élus locaux, notamment par les maires, qui étaient confrontés à la crise.
Nous ne devons pas faire, à l’occasion du débat sur votre amendement, le procès des ARS. J’aimerais bien que ces agences reçoivent un peu de soutien, car nous en avons besoin.
Mme Valérie Boyer. Ça n’a rien à voir !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Madame la ministre, je n’ai pas entendu, en tout cas du côté droit de l’hémicycle, d’attaque en règle des ARS. La question posée est celle de l’information. Le président Milon nous a expliqué que les outils existaient, mais cela dépend des territoires, de leur taille, du comportement de l’ARS et de l’implication des parlementaires ou des élus locaux, qu’ils soient ou non présents au conseil d’administration de structures de santé.
Ainsi, les situations diffèrent selon les territoires et il faut l’entendre, ne pas balayer la question d’un revers de la main. Je suppose que l’amendement sera retiré ou rejeté, mais notre message doit être entendu.
Par ailleurs, il faut savoir pondérer ses réactions…
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 28.
L’amendement n° 14 rectifié quater, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Genet, Mme Puissat, M. Sol, Mme F. Gerbaud, MM. Rapin, Savary, Pointereau et Houpert, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la première phrase du quatrième alinéa de l’article L. 162-30-3, les mots : « peut fixer » sont remplacés par le mot : « fixe » ;
2° Au troisième alinéa de l’article L. 162-30-4, les mots : « ainsi qu’ » sont remplacés par les mots : « et peut fixer » ;
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. La pertinence des soins est un enjeu majeur d’amélioration du système de santé. Il s’agit d’éviter les hospitalisations et actes inutiles, en faisant de la pertinence des soins un sujet de discussion entre les ARS et les établissements, au même titre que l’efficience ou la qualité des soins, afin de réorienter les ressources vers les soins pertinents et les actions de prévention menées au sein des établissements de santé.
Le dispositif du contrat d’amélioration de la qualité et de l’efficience des soins (Caqes) vise à entreprendre localement l’analyse, objectivée avec les ARS, des écarts de pratiques médicales et à engager un dialogue contradictoire avec les acteurs locaux.
Cet amendement tend à renforcer les dispositions existantes en donnant une portée financière systématique à tout manquement objectivé et répété aux critères de pertinence des soins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission, sensible à toute démarche en faveur de l’amélioration de la pertinence des soins, a émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Nous adhérons évidemment à l’objectif de pertinence des soins, puisque nous l’avons inscrit parmi les priorités.
Le dispositif introduit par la loi du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016 est un nouvel outil, aux mains des ARS, de repérage des actes non pertinents et de lutte contre ces soins. Il s’agit de donner la possibilité aux directeurs d’ARS de contractualiser avec certains établissements, lorsqu’ils observent des situations de soins non pertinents. L’établissement en cause doit alors enclencher une démarche d’amélioration de ses pratiques et s’engager à conduire des actions, lesquelles feront l’objet d’évaluations. À l’issue d’une période de deux ans, le directeur de l’ARS procède à une évaluation de l’application du contrat.
Néanmoins, il s’agit d’une possibilité laissée aux mains de l’ARS et cela ne doit pas devenir, ainsi que vous le proposez, systématique, car cela serait contre-productif. En effet, si nous partageons tous votre souhait d’amélioration de la pertinence des soins, les ARS doivent mener une politique de ciblage pertinent, ne pas se disperser sur un nombre trop important d’établissements, afin que les objectifs restent réalistes et adaptés au profil des établissements.
Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 28.
L’amendement n° 820 rectifié bis, présenté par MM. Théophile et Iacovelli, Mme Schillinger, M. Rohfritsch, Mme Duranton et MM. Dennemont, Patient et Buis, est ainsi libellé :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le cinquième alinéa de l’article L. 1431-1 est complété par les mots : « en garantissant la motivation des actes d’allocation de ressources qu’elles prennent » ;
2° Le b du 2° de l’article L. 1431-2 est complété par les mots : « . Elles publient l’ensemble des décisions d’allocation de ressources notamment celles mentionnées à l’article L. 1435-8 et à l’article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale et attribuées aux établissements de santé ».
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Cet amendement est un peu le prolongement de l’amendement relatif aux ARS dont nous avons débattu précédemment.
Madame la ministre, en parlant de ces structures, on ne tape pas sur leur organisation ; on veut leur donner plus de visibilité et de transparence afin de leur permettre de se recentrer sur la mission de régulateur des soins. Puisque nous avons vu quelques exemples de dysfonctionnement, ici ou là – c’est le cas chez nous, même si les choses peuvent se passer très bien ailleurs –, il suffit d’instaurer un cadre donnant plus de lisibilité et de transparence à l’action des ARS.
Quand nous recevons les établissements privés non lucratifs, les cliniques ou les établissements publics, nous entendons des discours très différents sur la façon de répartir les fonds sur tel ou tel chapitre. Tout cela manque donc un peu de cadrage.
Dans la mesure où l’amendement n° 678 rectifié ter, adopté précédemment, répond largement à cet objectif et si vous consentez à faire un effort en ce sens, je retirerai mon amendement.
Néanmoins, j’y insiste, ce qui se passe aujourd’hui dans les ARS n’a rien à voir avec ce que nous évoquons. Ces agences sont effectivement sur le pont et accomplissent, dans l’urgence, un énorme travail. Nous parlons de ce que l’on observe depuis une dizaine d’années, à savoir les rapports très tendus avec les directeurs d’hôpital, certains directeurs d’ARS se comportant parfois comme les directeurs des directeurs d’hôpital, ce qui n’entre pas dans le cadre des missions qui leur sont dévolues.
Je retire donc mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 820 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 816 rectifié bis est présenté par MM. Théophile, Iacovelli, Lévrier, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 887 rectifié ter est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, Menonville et Decool, Mme Mélot et MM. Lagourgue, A. Marc, Wattebled et Chasseing.
L’amendement n° 1045 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le troisième alinéa de l’article L. 1432-2 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il informe au moins deux fois par an la conférence régionale de la santé et de l’autonomie de la mise en œuvre de la politique d’allocation des ressources financières aux activités de santé. »
La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 816 rectifié bis.
M. Dominique Théophile. La réforme du financement des activités d’urgences, de psychiatrie et de soins de suite et de réadaptation s’inscrit dans le cadre d’une régionalisation de l’allocation des ressources financières des activités de santé. La consolidation du rôle des ARS qui s’ensuit nécessite donc une plus grande transparence.
C’est pourquoi le présent amendement vise à fixer dans la loi la nécessité, pour le directeur général de l’agence régionale de santé, d’informer la conférence régionale de la santé et de l’autonomie (CRSA) de l’allocation des ressources.
Les CRSA, créées par la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi « HPST », contribuent, par leurs avis, à la définition et à la mise en œuvre des politiques régionales de santé. L’amélioration de la communication entre cette instance et le directeur de l’ARS conduira à une plus grande transparence, au profit de tous les citoyens.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 887 rectifié ter.
Mme Véronique Guillotin. Il est défendu, mais je veux tout de même rebondir sur le sujet des ARS. Le sujet n’est pas vraiment les agences en elles-mêmes ; ces organismes ont la compétence sanitaire sur leur territoire, personne ne le conteste.
En revanche, quand on ferme ou que l’on ouvre un service hospitalier, on pose effectivement la question du soin mais aussi celle de l’accès aux soins. Cela concerne donc les collectivités territoriales, qui ont la compétence de la mobilité, et les élus, qui sont en première ligne. En effet, quand un centre covid doit ouvrir ou fermer et que la réponse de l’ARS se fait attendre – je suppose qu’elle n’a pas que cela à faire –, les premiers à être interpellés sont les élus locaux.
Il est donc urgent, comme l’a montré le Ségur de la santé, de travailler à une forme de décentralisation, organisée avec les ARS et les collectivités. (Mme la ministre opine.) Cela mérite un débat dédié, sans doute en dehors de l’examen de ce PLFSS. La santé ne doit plus être réservée à l’ARS ; les collectivités et les patients sont également parties prenantes.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 1045.
Mme Laurence Cohen. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces amendements identiques visent à instaurer une obligation d’information, par le directeur général de l’ARS, de la CRSA sur l’allocation des ressources financières en matière d’activités de santé. Cela contribue à la nécessaire transparence.
La commission a émis un avis favorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Ces amendements étant satisfaits, puisque des rapports sont remis par les ARS, le Gouvernement en demande le retrait.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr, tout est toujours satisfait !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 816 rectifié bis, 887 rectifié ter et 1045.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 28.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 817 rectifié bis est présenté par MM. Théophile, Iacovelli, Lévrier, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 886 rectifié ter est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, Menonville et Decool, Mme Mélot et MM. Lagourgue, A. Marc, Wattebled et Chasseing.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 1432-4 du code de la santé publique, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« La conférence régionale de la santé et de l’autonomie est consultée chaque année par le directeur général de l’agence régionale de santé sur les orientations régionales en matière d’allocation de ressources financières des activités de santé.
« La conférence régionale de la santé et de l’autonomie rend un avis annuel sur l’exécution des orientations régionales en matière d’allocation de ressources financières des activités de santé.
« Le directeur général de l’agence régionale de santé transmet un rapport semestriel à la conférence régionale de la santé et de l’autonomie portant sur l’allocation des ressources du fonds d’intervention régional, des aides à la contractualisation, des aides à l’investissement, et la répartition des crédits délégués dans le cadre de la campagne tarifaire et budgétaire des établissements de santé, par bénéficiaire. »
La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 817 rectifié bis.
M. Dominique Théophile. Je l’ai souligné en défendant l’amendement précédent, la CRSA est une institution essentielle pour la définition des politiques de santé à l’échelle régionale. Mais comment cet organe consultatif peut-il émettre des avis éclairés sans disposer de toutes les informations nécessaires ?
La transparence est cruciale pour toute politique publique. Aussi, cet amendement prévoit de donner les moyens à cette conférence d’être un acteur clé de la gouvernance de santé. Cela passerait tout d’abord par la consultation annuelle de cette instance sur les orientations régionales, par le directeur général de l’ARS ; il s’agirait ensuite de lui permettre de rendre un avis annuel sur l’exécution de ces orientations, sur le fondement de rapports semestriels du directeur général de l’ARS.
Ainsi, la conférence pourra prendre efficacement part à la définition et à la mise en œuvre de la politique régionale de santé.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 886 rectifié ter.
Mme Véronique Guillotin. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces deux amendements identiques me semblent alourdir le fonctionnement de la CRSA. Il faut garder un peu de souplesse. En outre, la loi n’a pas vocation à préciser toutes les modalités d’action de cette instance.
La commission, préférant s’en tenir au principe de l’information de la CRSA issu des trois amendements identiques précédents, demande le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Théophile, l’amendement n° 817 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Dominique Théophile. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 817 rectifié bis est retiré.
Madame Véronique Guillotin, l’amendement n° 886 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Véronique Guillotin. Non, je le retire également.
M. le président. L’amendement n° 886 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 20 rectifié ter, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Genet, Mme Malet, M. Sol, Mme F. Gerbaud, M. Savary, Mmes Di Folco et Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 65 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 est abrogé.
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. L’expérimentation, au travers du dispositif de facturation individuelle des établissements de santé (Fides), de la facturation directe à l’assurance maladie, introduite par l’article 54 de la loi du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009, par les « établissements […] mentionnés aux a, b et c de l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale », a connu une montée en charge progressive pour l’activité relative aux consultations et aux actes externes sans hospitalisation.
Ce mode de facturation directe, substitutif d’un envoi mensuel à l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH), semble adapté aux actes et consultations externes, qui représentent une faible part de l’activité hospitalière. En revanche, au regard des risques financiers, organisationnels et techniques inhérents à l’extension de la Fides aux séjours hospitaliers, on demande sa suppression.
Les échanges et débats du Ségur de la santé ont permis de souligner l’extrême complexité de la facturation des prestations hospitalières et la lourdeur de ses circuits. Un objectif unanimement partagé de simplification impérative des règles et des circuits de facturation a été posé et repris dans les conclusions du rapport de Mme Notat.
Dans ce contexte, il paraît contradictoire, voire contre-productif, d’imposer aux établissements publics de santé, contre leur volonté, une facturation individuelle qui alourdirait et complexifierait de façon significative les tâches de facturation, et engendrerait des rejets à traiter et des retards de paiement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Au travers de cet amendement, vous cherchez à répondre à un objectif de simplification des démarches administratives pesant sur les établissements de santé en matière de facturation des actes.
Toutefois, je ne suis pas certaine que le dispositif permette, en l’état, d’atteindre cet objectif de manière satisfaisante. Cet amendement tend en effet à abroger un article de la loi du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018, lequel, justement, prolongeait une nouvelle fois, jusqu’au 1er mars 2022, le dispositif dérogatoire à la facturation directe et individuelle des établissements de santé pour les séjours d’hospitalisation et autres prestations. Ainsi, son adoption aboutirait à supprimer cette dérogation, ce qui me semble contraire à son objectif.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Milon. Je le retire !
M. le président. L’amendement n° 20 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 578, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au plus tard un an après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les potentiels effets sur les assurés d’un passage à 100 % de remboursement par la sécurité sociale des soins de santé et, par conséquent, sur la suppression des complémentaires santé.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Défendu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 578.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 28 bis (nouveau)
La deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale est ainsi modifiée :
1° Après le mot : « publique », sont insérés les mots : « . Elle participe également au financement » ;
2° Après le mot : « médicale », sont insérés les mots : « ou encore de ceux correspondant à la mise en place des dispositifs dédiés de prise en charge des femmes victimes de violences ». – (Adopté.)
Article 28 ter (nouveau)
Après l’article L. 162-23-13 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-23-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 162-23-13-1. – I. – Sans préjudice des autres recours, tout établissement de santé confronté à un différend d’interprétation des règles de facturation des prises en charge de moins d’une journée, établies en application du 1° de l’article L. 162-22-6, peut solliciter une prise de position formelle de l’administration sur sa situation.
« Il ne peut être procédé au prononcé d’une sanction financière en cas de manquement aux règles de facturation en application de l’article L. 162-23-13, pour ces prises en charge, si la cause de la sanction poursuivie par l’administration est un différend sur l’interprétation par l’établissement de santé de bonne foi des règles de facturation des prises en charge de moins d’une journée et s’il est démontré que l’interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l’époque, formellement admise par l’administration.
« Lorsque la situation de fait exposée dans la demande ou la réglementation au regard de laquelle cette situation a été appréciée ont été modifiées, l’établissement de santé ne peut plus se prévaloir de la prise de position qui a été, à l’époque, formellement admise par l’administration.
« II. – L’établissement de santé sollicite l’administration, qui se prononce dans un délai de trois mois lorsqu’elle est saisie d’une demande écrite, précise et complète par un établissement de santé de bonne foi.
« Le silence gardé par l’administration qui n’a pas répondu dans un délai de trois mois à un établissement de santé de bonne foi qui a sollicité de sa part, dans les conditions prévues au présent article, une interprétation des règles de facturation applicables à sa situation de fait ne vaut pas prise de position formelle.
« III. – Un établissement de santé ne peut pas solliciter une prise de position formelle de l’administration sur sa situation dans les cas suivants :
« 1° Lorsqu’un contrôle de la tarification à l’activité, prévu à l’article L. 162-23-13, sur ce séjour, a été engagé ;
« 2° Lorsqu’un contentieux en lien avec un contrôle de la tarification à l’activité, prévu au même article L. 162-23-13, sur ce séjour, est en cours.
« IV. – Une demande mentionnée au I présent article peut également être adressée par une organisation nationale représentative des établissements de santé ou une société savante pour le nom et le compte d’un ou plusieurs établissements de santé, dans les mêmes conditions que celles prévues aux II et III.
« Un décret précise les conditions d’application du présent article. » – (Adopté.)
Article 28 quater (nouveau)
Après le premier alinéa du III de l’article L. 162-23-15 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le développement de l’autodialyse et de la dialyse à domicile figure parmi les catégories d’indicateurs pour lesquels des seuils minimaux de résultats sont requis. »
M. le président. L’amendement n° 164, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’article 28 quater, inséré par l’Assemblée nationale, intègre le développement de l’autodialyse et de la dialyse à domicile parmi les indicateurs de qualité des soins soumis à un seuil minimal de résultat et pris en compte dans le calcul de la dotation IFAQ (incitation financière à l’amélioration de la qualité) des établissements de santé.
Les préoccupations des auteurs de cette disposition quant au développement insuffisant, en France, de l’autodialyse ou de la dialyse à domicile sont légitimes ; à titre personnel, je les partage. Toutefois, le recours à l’une ou l’autre de ces pratiques relève d’abord du colloque singulier entre le médecin et son patient.
De surcroît, la précision apportée ne relève pas du niveau législatif, puisque la définition des indicateurs est fixée par voie réglementaire.
C’est pourquoi cet amendement vise à supprimer cet article.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Le facteur d’autodialyse et de dialyse à domicile nous paraît tout à fait adapté pour inciter au développement de ces prises en charge, et le dispositif de l’IFAQ est le levier idoine.
Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission dans affaires sociales. Mme la rapporteure a expliqué pourquoi elle souhaitait la suppression de l’article 28 quater, en raison notamment du caractère réglementaire des indicateurs de qualité.
Néanmoins, le développement de la dialyse est un véritable sujet. Nous avons entendu en audition sur ce sujet la Cour des comptes, qui avait produit un rapport à la demande de M. Milon, quand il présidait la commission des affaires sociales, et nous avions reçu des responsables de la dialyse à domicile ; enfin, nous sommes plusieurs dans cet hémicycle à avoir signé, cet été, un manifeste encourageant la dialyse à domicile.
J’entends bien les arguments de nature légistique de la rapporteure sur cet article, mais l’insuffisance du nombre de dialyses à domicile est une véritable question…
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je ne voterai pas l’amendement de Mme la rapporteure, pour les raisons que Mme la présidente a exposées.
La dialyse pose un véritable problème sur le territoire national. Nous avons vu ce qui s’est passé à La Réunion ; je ne souhaite pas que cela se produise sur le territoire métropolitain.
Pour côtoyer des insuffisants rénaux, je peux vous affirmer que l’autodialyse est rarement préconisée de façon prioritaire par la plupart des néphrologues, pour des raisons que je ne m’explique pas toujours. Je ne voterai donc pas cet amendement, car je souhaite que l’autodialyse soit promue sur le territoire national. Au-delà, je souhaite que cela conduise à davantage de greffes de rein, car les systèmes varient d’une région à l’autre et ils ne sont pas faciles à comprendre.
M. le président. En conséquence, l’article 28 quater est supprimé, et l’amendement n° 806 rectifié n’a plus d’objet.
Article 28 quinquies (nouveau)
Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’application de l’article 33 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020. Ce rapport présente l’état d’avancement de la mise en œuvre du dispositif de financement des hôpitaux de proximité ainsi que celui de leur labellisation.
M. le président. L’amendement n° 165, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de suppression de cet article, dont la portée se limite à une demande de rapport.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Nous voulons profiter de cet amendement pour revenir sur la définition des hôpitaux de proximité et nous opposer à celle qui est promue par le Gouvernement.
Les Français sont attachés à leurs hôpitaux de proximité. Pour essayer de faire taire la contestation contre leur fermeture programmée, Mme Buzyn, alors ministre des solidarités et de la santé, avait réduit, au travers de la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, les missions de ces établissements, en y maintenant exclusivement une activité de médecine ou de soins de suite et de réadaptation. Par conséquent, le rôle de ces établissements consiste essentiellement à réorienter les patients vers des hôpitaux de niveaux 2 ou 3, en fonction de la gravité des cas et de la spécificité des traitements.
Nous avions dénoncé la création d’un accès aux soins à deux vitesses, avec des hôpitaux de seconde zone dans les territoires ruraux et périurbains, et des services spécialisés de pointe dans les métropoles et les grands pôles urbains. Tel est d’ailleurs le sens de la proposition de loi visant à redéfinir les missions des hôpitaux de proximité que nous avons déposée en juillet 2019.
Le maillage des hôpitaux de proximité doit être, selon nous, totalement différent. Non seulement il doit, évidemment, être maintenu, mais il doit surtout être développé, en l’inscrivant dans une politique d’aménagement du territoire. Tout le monde ressent, sur toutes les travées de la Haute Assemblée, cette nécessité.
Selon nous, l’hôpital de proximité doit être un établissement doté d’un service d’urgences, d’une maternité de niveau 1, au minimum, et de services de médecine. Ces établissements doivent aussi avoir un service de soins de suite et une structure pour les personnes âgées. Enfin, ils doivent être un lien avec la médecine de ville et, éventuellement, avec les centres de santé et la psychiatrie de secteur.
C’est ainsi, me semble-t-il, que nous pourrons redonner envie aux jeunes médecins de venir s’installer dans des territoires plus isolés et de travailler à l’hôpital public.
Cet article est important, car il ne suffit pas d’élaborer de nouvelles dispositions : encore faut-il en dresser le bilan, évaluer leur utilité ou leur nocivité. Il est essentiel, pour les parlementaires que nous sommes, de disposer d’une évaluation de la labellisation et du développement des hôpitaux de proximité.
Aussi, tout en connaissant la position du Sénat sur les demandes de rapport, nous sommes hostiles à cet amendement de suppression, car le rapport prévu par l’article pourrait vraiment nous renseigner à bon escient.
M. le président. En conséquence, l’article 28 quinquies est supprimé.
Article 29
I. – À compter du 1er janvier 2021 et pour la durée de l’expérimentation prévue au II du présent article, les établissements de santé mentionnés à l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale exerçant des activités de médecine au sens de l’article L. 6122-1 du code de la santé publique, à l’exclusion de ceux mentionnés à l’article L. 6111-3-1 du même code, qui en font la demande bénéficient, par dérogation au 1° de l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale, d’une dotation socle.
La liste des établissements volontaires est dressée par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.
Le montant de la dotation socle est calculé sur la base d’un pourcentage des recettes de l’assurance maladie issues de l’activité des séjours de médecine réalisés l’année précédente au sein de l’établissement concerné.
Les recettes résultant de l’activité des séjours de médecine réalisés au sein de l’établissement concerné durant l’année en cours tiennent compte de la dotation socle.
Les modalités d’entrée et de sortie de la liste des établissements volontaires, les modalités de détermination et de calcul de la dotation socle ainsi que son montant sont fixés par décret.
II. – Une expérimentation portant sur un financement des activités de médecine des établissements de santé mentionnés à l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale, composé d’une dotation reposant sur des caractéristiques populationnelles, d’un paiement à l’activité et à l’acte et d’un financement à la qualité est mise en œuvre pour une durée de cinq ans à compter de la publication du décret en Conseil d’État mentionné à l’avant-dernier alinéa du présent II, qui ne peut être postérieure au 31 décembre 2021.
Pour la mise en œuvre de cette expérimentation, il peut être dérogé :
1° Aux règles de financement des établissements de santé, de facturation et de tarification mentionnées aux articles L. 162-22, L. 162-22-6, L. 162-22-8, L. 162-22-8-1, L. 162-22-8-3, L. 162-22-10, L. 162-22-13, L. 162-22-14, L. 162-22-15, L. 162-23-15, L. 162-23-16, L. 162-26 et L. 162-26-1 du code de la sécurité sociale ;
2° À l’article L. 162-2 du même code, en tant qu’il concerne le paiement direct des honoraires par le malade.
Un décret en Conseil d’État précise les modalités de mise en œuvre de cette expérimentation, notamment les conditions d’entrée dans le dispositif, les modalités de financement susceptibles d’être mises en œuvre et les modalités d’évaluation de l’expérimentation.
Un rapport d’évaluation est transmis au Parlement au plus tard le 30 juin 2026.
III. – La dotation prévue au II se substitue à la dotation socle prévue au I lorsque l’établissement de santé qui bénéficie de la dotation socle participe à l’expérimentation prévue au II.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, sur l’article.
Mme Annie Le Houerou. Je rappelle tout d’abord que nous venons de voter un plan d’investissement : le Gouvernement nous proposait une reprise de dette de nos hôpitaux.
L’état de vétusté de nos hôpitaux et leurs difficultés financières s’expliquent par les modalités de financement de nos hôpitaux publics, fondées sur la T2A, laquelle est totalement inadaptée à la prise en compte de la pertinence des soins et de la qualité de la prise en charge globale du patient.
La tarification actuelle ne permet pas de rémunérer les dépenses engagées par l’hôpital public. Le Gouvernement en est conscient. De ce point de vue, la stratégie Ma Santé 2022 était prometteuse, mais il faut passer aux actes.
Ce n’est pas l’expérimentation du modèle mixte de financement des activités de médecine prévu à l’article 29 qui va redonner du souffle à nos hôpitaux publics. Répondre à une prise en charge globale a un coût. Celui-ci n’est pas rémunéré à sa juste valeur. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, vous n’apportez pas, madame la ministre, de réponse structurelle de long terme au problème de financement des hôpitaux.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, sur l’article.
M. Dominique Théophile. Madame la ministre, vous proposez, à l’article 29, une expérimentation, soit les prémices de la réforme du financement des hôpitaux qui va s’engager.
Je veux me faire la voix des territoires, notamment de la Guadeloupe.
Comme je l’ai déjà rappelé, la T2A a fait de nombreux dégâts. Il fut un temps où, à la fédération, nous défendions le principe de cette tarification mais celle-ci n’a pas donné les résultats escomptés, compte tenu du niveau d’activité par rapport aux territoires. D’autres modes de financement existent. Je pense aux Migac, notamment les activités de recherche.
Par ailleurs, certaines pathologies n’entrent pas aujourd’hui dans le cadre de la T2A, comme la drépanocytose, et les urgences dans les territoires d’outre-mer se trouvent dans une situation plus qu’exceptionnelle. La mission « Recherche et enseignement supérieur » étant insuffisamment dotée, nous avons réclamé une Migac aux Antilles pour pouvoir répondre à ces besoins.
Il y aura, semble-t-il, à côté de la T2A, une partie sous forme de dotation. J’aurais souhaité que cette dernière puisse tenir compte des difficultés que j’évoque.
M. le président. Je suis saisi de onze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 166, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer les mots :
et pour la durée de l’expérimentation prévue au II du présent article
par les mots :
et pour une durée de trois ans
II. – Alinéa 3
Remplacer les mots :
l’année précédente
par le mot :
antérieurement
III. – Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce décret précise également les indicateurs de pertinence et de qualité des prises en charge ainsi que de coordination des parcours de soins pris en compte pour l’évaluation de ce mode de financement et l’ajustement du montant annuel de la dotation socle.
IV. – Alinéas 6 à 12
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’article 29 ouvre la voie à une évolution en deux temps et selon deux modalités du mode de financement des activités de médecine des établissements de santé, sur la base du volontariat.
Je vous propose, par cet amendement que je présente au nom de la commission, de circonscrire le champ de cet article qui répond à une ambition louable, mais qui nous semble traduire une certaine impréparation.
En effet, si nous partageons l’objectif d’une diversification des financements de l’hôpital, les contours du dispositif proposé sont, à ce stade, très imprécis.
Je comprends que le Gouvernement entende poursuivre ses travaux. Un travail de coconstruction avec les acteurs concernés est évoqué. Cela est, bien entendu, nécessaire.
Toutefois, rien n’est dit à ce stade sur le champ des activités concernées, la coopération avec le secteur ambulatoire ou encore l’articulation avec d’autres dispositifs sur lesquels nous n’avons pas encore de retour, comme le financement forfaitaire des pathologies chroniques voté en loi de financement de la sécurité sociale pour 2019. Or le contexte actuel me semble peu propice à l’incertitude sur le financement des établissements de santé.
L’amendement vise donc à s’en tenir à la première étape envisagée, à savoir la dotation socle, opérationnelle dès 2021. Cela permettra d’offrir une option aux établissements volontaires, dont le premier bilan sera utile pour se prononcer, dans un prochain PLFSS, sur les contours plus précis de l’expérimentation et d’apprécier son potentiel impact financier.
Cet amendement tend par ailleurs à introduire une évaluation sur la base, notamment, d’indicateurs liés à la pertinence et à la qualité des prises en charge, ainsi qu’à la coordination ville-hôpital-médico-social, critères essentiels, selon nous, à la prise en charge des pathologies chroniques ou des patients âgés.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 10 rectifié ter est présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel, Genet, Bonne et Sol, Mme F. Gerbaud, MM. Rapin, Pointereau et Gremillet, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et B. Fournier.
L’amendement n° 793 rectifié est présenté par Mme Le Houerou, MM. Fichet et Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne, Féret, Jasmin, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Bouad, Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 1
1° Remplacer les mots :
mentionnés à
par les mots :
mentionnés aux a, b, c, d et e de
2° Après le mot :
médecine
insérer les mots :
de chirurgie et d’obstétrique
3° Supprimer les mots :
, à l’exclusion de ceux mentionnés à l’article L. 611-3 du même code,
II. – Alinéa 2
Remplacer le mot :
dressée
par le mot :
fixée
II. – Alinéa 3
1° Après le mot :
socle
insérer les mots :
prévue en application du I
2° Remplacer les mots :
des recettes de l’assurance maladie issues de l’activité des séjours de médecine
par les mots :
de la valorisation économique des séjours de médecine, chirurgie, obstétrique
IV. – Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
La valorisation de l’activité des séjours de médecine, chirurgie, obstétrique réalisée par l’établissement concerné durant l’année en cours tient compte de la dotation socle déterminée en application du présent I.
V. – Alinéa 5
Remplacer le mot :
modalités
par le mot :
conditions
VI. – Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. – L’État peut autoriser, pour une durée de cinq ans et à titre expérimental, un financement des activités de médecine, de chirurgie et d’obstétrique composé d’une dotation reposant sur des caractéristiques populationnelles, d’un paiement à l’activité et à l’acte et d’un financement à la qualité.
VII. – Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
…. – À compter du 1er janvier 2021 et pour la durée de l’expérimentation prévue au II, par dérogation à l’article L. 162-2 du code de la sécurité sociale, les professionnels de santé libéraux qui en font la demande bénéficient d’une dotation socle. Le montant de la dotation est calculé en référence à un pourcentage de leur chiffre d’affaires.
…. – L’évolution du montant de la dotation socle est déterminée en fonction des résultats de chaque acteur dans la mise en œuvre d’un programme de pertinence et de prévention défini en concertation avec l’Agence régionale de santé.
La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 10 rectifié ter.
M. Alain Milon. La dotation populationnelle vise à réduire la part du financement T2A dans les établissements et à réduire les inégalités de ressources entre régions. Elle doit aussi favoriser les coopérations à l’échelle du territoire, au service d’une meilleure pertinence des soins et de la prévention.
À ce titre, cet amendement a pour objet d’étendre le périmètre de la dotation populationnelle aux activités de chirurgie et d’obstétrique pour les établissements, d’une part, et aux acteurs de santé de ville, d’autre part.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 793 rectifié.
Mme Annie Le Houerou. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Les trois amendements suivants sont également identiques.
L’amendement n° 234 rectifié quater est présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Capus, Decool, Guerriau, Lagourgue, A. Marc, Médevielle et Menonville, Mme Paoli-Gagin, MM. Verzelen et Wattebled, Mme Garriaud-Maylam, M. E. Blanc, Mme Joseph et MM. Daubresse, Nougein, Pellevat, Fialaire, Perrin, Rietmann et Gremillet.
L’amendement n° 305 rectifié bis est présenté par M. Henno, Mmes Létard, Guidez et Sollogoub, M. P. Martin, Mme Dindar, MM. Kern, Janssens, Moga et Levi, Mme Vermeillet, MM. Laugier, S. Demilly, Delahaye, Détraigne, Hingray, Lafon, Le Nay et Cazabonne et Mme Morin-Desailly.
L’amendement n° 679 rectifié ter est présenté par Mme V. Boyer, MM. Boré, Le Rudulier et Frassa, Mmes Micouleau, Dumas et Deromedi, MM. Anglars, Bonne, B. Fournier et Bouchet, Mmes Bonfanti-Dossat et Raimond-Pavero, M. Houpert, Mmes Drexler et Thomas et MM. Cuypers, Rapin et Charon.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
Un décret en Conseil d’État précise les modalités de mise en œuvre de cette expérimentation notamment les conditions d’entrée dans le dispositif dont le respect d’objectifs de qualité des prises en charge, et de réponse aux besoins du territoire, les modalités de financement susceptibles d’être mises en œuvre et les modalités d’évaluation de l’expérimentation.
La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 234 rectifié quater.
Mme Colette Mélot. Le présent amendement vise à s’assurer que la contractualisation avec l’ARS sur des objectifs de qualité des prises en charge et de réponse aux besoins du territoire tiendra bien compte de la nécessaire coordination ville-hôpital.
En effet, dans certains territoires, cette coordination dans le domaine de la cancérologie était déjà fragile avant l’épidémie de covid-19. Les structures ambulatoires de soins curatifs et palliatifs étaient inégalement disponibles en fonction des lieux de vie des individus. Par conséquent, a fortiori pendant cette période de crise, certains acteurs de terrain ont témoigné de situations très difficiles pour les personnes malades, contraintes d’être soignées à domicile : isolement extrême, interruption de certains soins pendant la période du confinement, gestion des soins palliatifs par les aidants et difficile coordination entre les services d’hospitalisation à domicile (HAD) et les hôpitaux.
Afin de s’assurer que ce besoin de coordination essentiel aux territoires, et surtout aux personnes malades, sera pris en compte dans les conditions d’entrée dans le dispositif, le présent amendement tend à modifier l’article 29 pour y inclure l’objectif annoncé par le Gouvernement dans son exposé des motifs.
La satisfaction de ce besoin de coordination pourrait notamment s’apprécier au regard des moyens alloués par l’établissement à la création de postes d’infirmiers de coordination.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 305 rectifié bis.
M. Olivier Henno. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour présenter l’amendement n° 679 rectifié ter.
Mme Valérie Boyer. Il est absolument nécessaire de s’assurer de la coordination des soins en cancérologie.
Mon amendement vise à mesurer la prise en compte du besoin de coordination en fonction du nombre d’infirmiers de coordination.
On a vu que les réseaux de soins en cancérologie ont parfois été mis à mal par la crise du covid. Il est absolument indispensable pour cette maladie en particulier, mais aussi pour d’autres, de s’assurer que la coordination ville-hôpital existe.
Même si la situation s’améliore un peu aujourd’hui, on a trop souffert du manque de coordination entre la ville et l’hôpital, et même de l’ignorance de la médecine de ville et du secteur privé par l’hôpital, lors du pic de l’épidémie durant le premier confinement. Les malades du cancer et leur famille sont extrêmement angoissés, voire perdus.
J’espère que cet amendement pourra être adopté, permettant des réalisations sur le terrain.
M. le président. L’amendement n° 1068, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer les mots :
ainsi que son montant
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, qui vise à supprimer la fixation du montant de la dotation sociale du décret simple d’application de l’article 29. Ce montant sera fixé par arrêté, qui est le niveau réglementaire le plus adéquat.
Par conséquent, le décret d’application précisera les modalités d’entrée et de sortie de la liste des établissements volontaires, ainsi que les modalités de détermination et de calcul de la dotation socle.
M. le président. L’amendement n° 277 rectifié quater, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Bouloux, Mme L. Darcos, MM. Bonne, Sol, Piednoir et Savary, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard, Babary et B. Fournier, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Après le mot :
dispositif
insérer les mots :
dont le respect d’objectifs de qualité des prises en charge, et de réponse aux besoins du territoire
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Cet amendement vise à s’assurer que la contractualisation avec l’ARS sur des objectifs de qualité des prises en charge et de réponse aux besoins du territoire tiendra bien compte de la nécessaire coordination ville-hôpital, primordiale lorsqu’un patient est atteint par la maladie du cancer.
M. le président. L’amendement n° 297 rectifié ter, présenté par M. Henno, Mmes Guidez, Sollogoub et Létard, M. P. Martin, Mme Dindar, MM. Kern, Janssens, Moga et Levi, Mme Vermeillet, MM. Laugier, S. Demilly, Détraigne, Hingray, Lafon, Le Nay, Cazabonne et Duffourg et Mmes Doineau et Morin-Desailly, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par les mots :
, ainsi que les modalités de coordination avec les organisations territoriales ambulatoires
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Il s’agit simplement d’ajouter les modalités de coordination avec les organisations territoriales ambulatoires, comme les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).
M. le président. L’amendement n° 626 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 492 rectifié, présenté par Mme Jasmin, M. Lurel, Mme Conconne, M. Antiste, Mme Lepage, M. P. Joly, Mme Préville et MM. Temal et Tissot, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Les dotations prévues aux I et II tiennent compte, pour les établissements concernés, des coefficients géographiques actualisés mentionnés au 3° de l’article L. 162-22-10 du code de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. Je m’associe à ce qu’ont déjà dit mes collègues, dans la mesure où nos amendements se recoupent en partie.
Je souhaite revenir sur la question du coefficient géographique. Un amendement du sénateur Milon a déjà été adopté en ce sens, mais je veux tout de même évoquer la difficulté que représentent les évacuations sanitaires sur les territoires.
Dans certains territoires, il est évidemment facile de se rapprocher d’un établissement socle et de se trouver à proximité des plateaux techniques pertinents pour la prise en charge des patients et la qualité des soins.
Vous devez savoir que les territoires d’outre-mer sont particulièrement touchés par le cancer. Je pense aux cancers consécutifs aux différents essais nucléaires menés en Polynésie française, comme à Mururoa, ou aux nombreux cancers liés au chlordécone. C’est un véritable sujet.
Mais, pour beaucoup de personnes, les plateaux techniques ne sont pas forcément performants, non par manque de compétences mais faute de disposer de tous les moyens nécessaires. Il faut vraiment que nous travaillions à lever ces limites.
Si la commission sollicite le retrait de l’amendement, je le retirerai. Cependant, il faut faire attention aux choix que nous faisons.
Si, aujourd’hui, l’évolution de la médecine permet évidemment à des personnes de vivre mieux et plus longtemps, la covid a permis de montrer jusque dans l’Hexagone les difficultés de nos territoires. Le ministre des solidarités et de la santé a déclaré récemment qu’il fallait aider les familles pour les évacuations sanitaires et l’accompagnement. C’est un problème que nous connaissons depuis très longtemps. Certaines pathologies nécessitent de se déplacer, quelquefois aux frais des familles, parce que tout n’est pas forcément pris en charge.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Les amendements présentés à cet article sont incompatibles avec celui que j’ai présenté au nom de la commission, à l’exception de l’amendement n° 1068 du Gouvernement, sur lequel la commission a émis un avis favorable, puisqu’il vise à apporter une précision bienvenue.
J’invite les auteurs des autres amendements à se rallier à la position de la commission des affaires sociales, donc à retirer leurs amendements au profit de l’amendement n° 166.
Pour ce qui concerne les amendements identiques nos 10 rectifié ter et 793 rectifié, je constate, comme leurs auteurs, le manque d’ambition du dispositif proposé, mais compte tenu de l’imprécision à ce stade de ses contours, il me semble prématuré d’en étendre le périmètre à l’ensemble du champ de la chirurgie et de l’obstétrique. L’amendement de la commission prend toutefois lui aussi en compte la nécessité d’une coordination avec les prises en charge en ville.
Les amendements identiques nos 234 rectifié quater, 305 rectifié bis et 679 rectifié ter me semblent satisfaits, du fait de la prise en compte des objectifs de qualité des prises en charge et de l’évaluation du dispositif de dotation socle.
C’est aussi le cas des amendements nos 277 rectifié quater et 297 rectifié ter, qui insistent à juste raison sur la nécessaire articulation avec les acteurs de l’ambulatoire. Je propose dans mon amendement de définir un critère d’évaluation.
Enfin, l’amendement de Mme Jasmin est effectivement satisfait. Les coefficients géographiques applicables aux établissements d’outre-mer s’appliquent aux tarifs nationaux et aux forfaits annuels. Il semblerait normal que ce soit aussi le cas de la dotation socle.
Pour résumer, la commission sollicite le retrait des amendements nos 10 rectifié ter, 793 rectifié, 234 rectifié quater, 305 rectifié bis, 679 rectifié ter, 277 rectifié quater, 297 rectifié ter et 492 rectifié, faute de quoi elle émettra un avis défavorable. Elle est favorable à l’amendement n° 1068 du Gouvernement.
Mme Victoire Jasmin. Je retire mon amendement, monsieur le président.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Madame la rapporteure, vous voulez supprimer l’article 29, qui prévoit l’expérimentation de la dotation populationnelle, et adapter les modalités de la dotation socle.
L’article 29 n’avait, pour nous, qu’un objectif : répondre à notre volonté de descendre la part de T2A sous la barre des 50 %.
L’approche populationnelle traduit notre recherche d’une plus grande qualité et d’un moindre volume. D’ailleurs, les travaux de coconstruction du modèle avec les établissements volontaires démarrent dès 2021. Ils font partie intégrante de cette expérimentation.
Le décret qui précisera les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation sera publié dans le courant de l’année 2021, ce qui nécessite le maintien de cet article dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Monsieur Théophile, la dotation populationnelle est particulièrement adaptée aux hôpitaux d’outre-mer, dont le caractère insulaire ne permet pas de rentabiliser les activités de médecine.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur tous les amendements.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 10 rectifié ter, 793 rectifié, 234 rectifié quater, 305 rectifié bis, 679 rectifié ter, 277 rectifié quater et 297 rectifié ter n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 1068.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 29, modifié.
(L’article 29 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 29
M. le président. L’amendement n° 275 rectifié quater, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Genet, Mme L. Darcos, M. Bonne, Mmes Puissat et Malet, M. Sol, Mme F. Gerbaud, MM. Piednoir et Savary, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard, Babary et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 162-30-2 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il peut également porter un objectif d’externalisation des soins réalisés en hôpital de jour via l’hospitalisation à domicile, dont les modalités sont précisées à l’article R. 6121-4-1 du code de la santé publique. »
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Cet amendement vise à insérer dans les contrats d’amélioration de la qualité et de l’efficience des soins, les fameux Caqes, un objectif d’externalisation des soins des activités traditionnellement réalisées via l’hospitalisation de jour, particulièrement la chimiothérapie, en les réalisant via l’hospitalisation à domicile.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Le développement de l’hospitalisation à domicile me semble entrer dans le cadre de l’objet des Caqes quand il a pour effet d’améliorer la prise en charge des patients.
Je partage l’objectif de l’amendement, mais je ne sais pas s’il est nécessaire d’inscrire son dispositif dans la loi. Cela étant, comprenant l’esprit de l’amendement, la commission a décidé de s’en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je sollicite le retrait de cet amendement, qui est déjà satisfait.
Cet objectif, que nous partageons, est pris en compte dans les axes stratégiques du développement de l’HAD et décliné dans les travaux menés par les services du ministère concernant le financement des activités de soin.
Pour rappel, le nombre de journées d’hospitalisation à domicile a augmenté de 7 % en 2019, après des années d’évolution positive.
La réforme en cours du financement de l’HAD prévoit la mise en place d’un compartiment incitatif à la qualité. Les modalités financières de prise en compte de ce recours à l’hospitalisation à domicile dans le parcours global du soin du patient doivent être étudiées dans le cadre de cette réforme, ainsi que le niveau et les modalités de la compensation financière éventuelle pour les établissements de santé.
À défaut de retrait, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Milon, l’amendement n° 275 rectifié quater est-il maintenu ?
M. Alain Milon. Oui, monsieur le président.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 29.
L’amendement n° 112 rectifié, présenté par Mmes Malet, Dindar, Dumas et Lopez, MM. Gremillet, Savary et Bascher, Mmes Deromedi et Delmont-Koropoulis, MM. B. Fournier et Moga, Mme Guidez, M. Poadja, Mme Petrus, M. Genet, Mme Jacques et MM. Charon et Lagourgue, est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de quatre mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la revalorisation des coefficients géographiques des outre-mer.
La parole est à Mme Viviane Malet.
Mme Viviane Malet. Cet amendement vise à demander une étude – je n’ose dire « rapport » – sur la révision du coefficient géographique pour les établissements publics de santé ultramarins.
En effet, le coefficient actuel n’est plus adapté aux réalités des coûts locaux.
Pour La Réunion, par exemple, le coefficient a connu une augmentation d’un point en douze ans.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Nous avons déjà prévu, à l’article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, la remise d’un rapport sur le financement des établissements hospitaliers dans les collectivités territoriales définies à l’article 73 de la Constitution et dans la collectivité de Corse, afin justement d’évaluer les coefficients géographiques liés aux facteurs spécifiques de ces territoires et les modes de financement dont ils font l’objet.
L’amendement est donc déjà satisfait… sauf que nous n’avons toujours pas eu le rapport.
La commission sollicite le retrait de l’amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Pour la raison évoquée par Mme la rapporteure, le Gouvernement sollicite le retrait de l’amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
La date de remise du rapport est un peu différée en raison du covid. Je vous prie de m’excuser pour ce retard.
M. le président. Madame Malet, l’amendement n° 112 rectifié est-il maintenu ?
Mme Viviane Malet. Non, je le retire, monsieur le président.
Nous espérons recevoir le rapport rapidement !
M. le président. L’amendement n° 112 rectifié est retiré.
Article 30
I. – Le chapitre III ter du titre II du livre III de la sixième partie du code de la santé publique est ainsi rétabli :
« CHAPITRE III TER
« Maisons de naissance
« Art. L. 6323-4. – Les maisons de naissance sont des structures sanitaires au sein desquelles des sages-femmes, dans les conditions prévues aux articles L. 4151-1 et L. 4151-4 relatifs à l’exercice de leur profession, assurent l’accouchement des femmes dont elles ont suivi la grossesse. Les maisons de naissance s’inscrivent dans une offre de soins diversifiée pour assurer aux femmes le choix de l’accouchement le plus adapté à leurs besoins. La direction médicale des maisons de naissance est assurée par des sages-femmes.
« Chaque maison de naissance doit être à proximité immédiate d’un établissement de santé autorisé pour l’activité de soins de gynécologie-obstétrique, avec lequel elle conclut une convention prévoyant, notamment, les modalités d’un transfert rapide des parturientes ou des nouveau-nés en cas de nécessité.
« Art. L. 6323-4-1. – Les maisons de naissance sont créées et gérées par :
« 1° Plusieurs sages-femmes associées pour leur exercice professionnel ou pour la mise en commun de moyens nécessaires à cet exercice ;
« 2° Un organisme à but non lucratif autre qu’un établissement de santé ;
« 3° Un groupement d’intérêt public, un groupement d’intérêt économique ou un groupement de coopération sanitaire.
« Art. L. 6323-4-2. – Les projets relatifs à la création d’une maison de naissance sont soumis à l’autorisation du directeur général de l’agence régionale de santé. L’autorisation est accordée pour une durée de sept ans renouvelable.
« L’autorisation est accordée lorsque le projet répond aux besoins de la population et permet le respect des conditions de fonctionnement prévues à l’article L. 6323-4-3.
« Art. L. 6323-4-3. – Les conditions techniques de fonctionnement des maisons de naissance sont fixées par décret. La prise en charge des femmes enceintes et des nouveau-nés est conforme aux recommandations de bonnes pratiques professionnelles établies par la Haute Autorité de santé.
« Art. L. 6323-4-4. – Lorsqu’il est constaté un manquement compromettant la qualité ou la sécurité des soins, une méconnaissance des dispositions législatives et réglementaires relatives aux maisons de naissance, ou en cas d’abus ou de fraude à l’égard des organismes de sécurité sociale ou des assurés sociaux, le directeur général de l’agence régionale de santé dispose des pouvoirs et met en œuvre la procédure prévus, pour les centres de santé, à l’article L. 6323-1-12.
« Art. L. 6323-4-5. – Sauf dispositions contraires, les modalités d’application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d’État. »
II. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 1111-7, après les mots : « par des centres de santé, », sont insérés les mots : « par des maisons de naissance, » ;
2° À la fin de la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 1435-3, les mots : « et les maisons de santé » sont remplacés par les mots : « , les maisons de santé et les maisons de naissance » ;
3° À la première phrase de l’article L. 6323-5, après les mots : « maison de santé », sont insérés les mots : « , maisons de naissance ».
III. – À la première phrase du I de l’article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale, après les mots : « en maison de santé », sont insérés les mots : « , en maison de naissance ».
IV. – Le présent article entre en vigueur à une date fixée par le décret prévu à l’article L. 6323-4-5 du code de la santé publique, et au plus tard le 1er novembre 2021.
Les maisons de naissance autorisées sur le fondement la loi n° 2013-1118 du 6 décembre 2013 autorisant l’expérimentation des maisons de naissance, en fonctionnement à la date d’entrée en vigueur du présent article, disposent d’un délai de trois mois à compter de cette date pour demander l’autorisation prévue à l’article L. 6323-4-2 du code de la santé publique. Elles doivent se conformer dans ce délai aux dispositions relatives aux maisons de naissance prévues au chapitre III ter du titre II du livre III de la sixième partie du code de la santé publique. Elles peuvent poursuivre leur activité jusqu’à ce qu’il soit statué sur leur demande. L’absence de notification d’une décision de l’agence régionale de santé dans un délai de quatre mois à compter de la réception de la demande vaut autorisation.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, sur l’article.
Mme Élisabeth Doineau. Nous allons donc parler maintenant de l’expérimentation des maisons de naissance.
Je veux, à cette occasion, rappeler que la loi du 6 décembre 2013 avait été portée par notre ancienne collègue centriste Muguette Dini.
Mme Nathalie Goulet. Une excellente collègue !
Mme Élisabeth Doineau. Au nombre de huit, ces lieux de suivi de grossesse et d’accouchement sont gérés par des sages-femmes libérales dès lors que la grossesse, l’accouchement et le post-partum ne présentent pas de complications. Elles offrent ainsi aux femmes qui ne veulent pas accoucher à l’hôpital la possibilité d’accoucher sans hospitalisation.
L’expérimentation devait se terminer à la fin de cette année. Nous avons été plusieurs sénateurs, notamment la présidente de la commission des affaires sociales, mais aussi Bernard Jomier, à nous émouvoir de la réponse tardive du Gouvernement quant à l’absence de visibilité subie par les huit maisons de naissance. La loi du 17 juin dernier a prolongé leur expérimentation d’un an.
L’article 30 du présent PLFSS vise désormais à pérenniser et à développer ces structures. Je m’en réjouis vraiment, d’autant que les résultats sont très positifs à tous les niveaux : sécurité et pertinence des prises en charge, efficacité des soins, attention particulière accordée à la parentalité, à la logique de prévention et d’accompagnement personnalisé de la mère et de l’enfant.
Loin de se substituer aux maternités classiques, les maisons de naissance renforceront utilement le maillage sanitaire de nos territoires.
Je tiens, pour terminer, à saluer le rôle des sages-femmes, qui sont impliquées à tous les niveaux de gestion et qui ont permis à chaque maison de naissance de s’adapter à son contexte local.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 884 rectifié ter, présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, Menonville et Decool, Mme Mélot et MM. Lagourgue, A. Marc, Wattebled et Malhuret, est ainsi libellé :
Alinéa 4, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Les maisons de naissance peuvent également mener des actions de santé publique, de prévention et d’éducation thérapeutique, notamment en vue de favoriser l’accès aux droits des femmes, et constituer des lieux de stages, le cas échéant universitaires, pour la formation des étudiants sages-femmes et des étudiants en médecine de troisième cycle tels que défini à l’article R. 6153-2 du code de la santé publique.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Si vous me le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° 252 rectifié quater.
M. le président. L’amendement n° 252 rectifié quater, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Capus, Decool, Guerriau, Lagourgue, Malhuret, A. Marc, Médevielle et Menonville, Mme Paoli-Gagin, MM. Verzelen et Wattebled, Mme Garriaud-Maylam, M. E. Blanc, Mme Joseph, MM. Daubresse, Fialaire et Pellevat, Mmes F. Gerbaud et Berthet et M. Gremillet, et ainsi libellé :
Alinéa 4, après la deuxième phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Les maisons de naissance peuvent également mener des actions de santé publique, de prévention et d’éducation thérapeutique notamment en vue de favoriser l’accès aux droits des femmes et constituer des lieux de stages, le cas échéant universitaires, pour la formation des sages-femmes.
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Colette Mélot. L’article 30 prévoit de pérenniser les maisons de naissance, structures autonomes de suivi de la grossesse, de l’accouchement et de ses suites, placées sous la responsabilité exclusive des sages-femmes, propices à la tenue d’actions de prévention et d’éducation thérapeutique.
La pérennisation des maisons de naissance pourrait aussi être une opportunité de suivre les recommandations émises dans le rapport de Nicole Notat. Celle-ci préconisait d’amplifier « la diversification des stages en centres hospitaliers, en Ehpad, en maison de santé pluridisciplinaire, en libéral » pour les étudiants en médecine. Or, dans le cadre de leur formation, ceux-ci doivent assurer le suivi médical des grossesses physiologiques et les soins du post-partum. Ainsi, les maisons de naissance pourraient constituer des lieux de stage en vue de la formation des étudiants sages-femmes, mais aussi des étudiants en médecine de troisième cycle.
Cette mutualisation des compétences favorisera, par ailleurs, un meilleur exercice interprofessionnel futur. Aussi, afin de tirer le plus grand profit de la pérennisation des maisons de naissance, l’amendement n° 884 rectifié ter vise à leur ajouter de nouvelles attributions en matière de prévention et d’accueil de stagiaires.
L’amendement n° 252 rectifié quater a le même objet.
M. le président. L’amendement n° 434 rectifié bis, présenté par Mmes Billon, C. Fournier, Perrot, Jacquemet, Vérien, Vermeillet, Tetuanui et Létard, MM. Cadic, J.M. Arnaud, Longeot, Levi, Détraigne et Kern, Mme Sollogoub, MM. Le Nay, Janssens, Canevet et Delcros, Mmes de La Provôté et Gatel et MM. Lafon, Hingray, Poadja et Duffourg, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 9
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 6323-4-…. – Outre les activités mentionnées à l’article L. 6323-4, les maisons de naissance peuvent :
« 1° Mener des actions de santé publique, de prévention et d’éducation thérapeutique notamment en vue de favoriser l’accès aux droits des femmes ;
« 2° Constituer des lieux de stages, le cas échéant universitaires, pour la formation des sages-femmes.
La parole est à Mme Annick Billon.
Mme Annick Billon. Les maisons de naissance sont des structures au sein desquelles les femmes enceintes ont la possibilité de bénéficier d’un accompagnement global, associant une femme et une sage-femme. Comme Élisabeth Doineau l’a expliqué, leur expérimentation, lancée en 2015, a été prolongée jusqu’en 2021.
À ce jour, il existe seulement huit maisons de naissance, qui offrent une pleine satisfaction aux usagers mais peinent à répondre à toutes les demandes, démontrant qu’elles représentent une diversification de l’offre de soins périnatale attendue par de nombreuses femmes qui souhaitent, en outre, accoucher dans un environnement différent.
Afin de répondre à cette demande croissante, cet amendement tend à offrir aux étudiants et aux sages-femmes qui le demandent la possibilité de se former au sein de ces maisons de naissance, de manière à mieux appréhender les accouchements ainsi que la prise en charge globale des femmes. En effet, ces maisons de naissance constituent aujourd’hui les meilleurs lieux de stage pour se former à cette prise en charge recommandée par la Haute Autorité de santé (HAS).
L’adoption de cet amendement répondrait donc, en réalité, à la fois à la demande des sages-femmes et des professionnels de santé et, surtout, à celle des femmes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 434 rectifié bis. Son adoption permettrait de satisfaire les deux autres amendements, dont je sollicite le retrait.
Autant je partage l’idée de faire des maisons de naissance des lieux de stage pour la formation des sages-femmes, autant en faire des lieux de stage pour les étudiants en médecine, comme le prévoit l’amendement n° 884 rectifié ter, me semble poser plus de questions dans la mesure où il n’y a pas de médecins dans ces structures.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Vous proposez de compléter les missions des maisons de naissance.
L’article 30, tel qu’il vous est soumis, définit avec clarté ce qui fait l’essence même des maisons de naissance : le suivi de la grossesse et la réalisation des accouchements.
Néanmoins, l’expérimentation qui a été menée ces dernières années et qui a fait l’objet d’évaluations a montré que, au-delà de ce socle de missions, d’autres approches pouvaient et devaient être développées par les maisons de naissance, comme le suivi postnatal ou le soutien à la parentalité. Je suis convaincue que c’est l’un des atouts de ce modèle qui va venir compléter l’offre en place.
Ne pas mentionner dans le texte législatif d’autres missions, telles que la prévention ou l’éducation, n’empêchera pas leur réalisation par les sages-femmes et autres professionnels qui exerceront dans ces maisons, dans la mesure où ces missions font partie de leur champ de compétences.
Cette possibilité étant préservée, j’émets un avis défavorable sur les amendements.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je veux d’abord remercier Olivier Véran d’avoir inscrit la pérennisation des maisons de naissance dans le projet de loi.
Élisabeth Doineau l’a rappelé, le parcours des maisons de naissance a débuté au Sénat, avec l’initiative de Muguette Dini, puis s’est poursuivi. Nous avons déposé au printemps dernier une proposition de loi, dont l’essentiel est repris à l’article 30 du PLFSS. Je salue cet engagement du ministre des solidarités et de la santé.
Les amendements qui viennent d’être présentés sont intéressants. Ils portent sur les fonctions des maisons de naissance. Tout le monde s’accorde, y compris Mme la ministre que j’ai bien écoutée, à reconnaître que ces structures ont vocation à les assumer, mais elles n’auront une réalité que si les maisons de naissance se développent réellement, y compris sur le plan de la formation des sages-femmes.
On compte, à l’heure actuelle, huit maisons de naissance sur les territoires, six en métropole et deux outre-mer. C’est extrêmement peu. Le nombre de femmes qui ont accès à ce dispositif est, pour le moment, très réduit.
Je souhaite interroger Mme la ministre sur les intentions du Gouvernement en la matière : sauf erreur de ma part, celui-ci fixe, dans l’exposé des motifs, un objectif de vingt-deux maisons de naissance à créer à l’horizon 2022, soit moins d’une par département. Nos tentatives pour amender cette vitesse de développement se sont évidemment heurtées à l’article 40 de la Constitution. Nous nous y attendions, mais j’aimerais entendre le Gouvernement sur cette question.
Posera-t-il une borne quantitative à ce développement, une fois la procédure d’agrément fixée ? Estimera-t-il au contraire que tous les projets qui respectent la loi et les dispositions qui auront été prises pourront être agréés ? C’est alors que nos amendements feront sens.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je veux partager le plaisir que j’ai à voir cette expérimentation passer dans la loi.
Je ne pense pas que l’offre ambulatoire de santé périnatale complémentaire des maternités soit une offre concurrentielle – j’aurai peut-être l’occasion d’y revenir.
Il faudra peut-être aussi ouvrir un jour le débat nécessaire sur le droit à l’accouchement à domicile. Je pense que ce débat sera plus contradictoire.
En ce qui concerne les maisons de naissance, il conviendra de renforcer le modèle économique, en permettant une juste tarification de la prestation de suivi et d’accompagnement global, ce qui rejoint les demandes des sages-femmes et de leurs syndicats : reconnaissance des astreintes du dernier mois, de la surveillance du travail d’accouchement, du post-partum immédiat, ou encore indemnité de garde…
Il s’agit d’un suivi global, et tous ces éléments de reconnaissance devront être pris en charge dans la tarification, pour que le modèle économique soit viable et pour qu’il s’étende.
Selon nous, l’installation de ces maisons de naissance associées aux maternités vient compléter l’offre de proximité des territoires, ce qui va justement permettre d’endiguer la fermeture des petites maternités, et non bien sûr de l’accélérer.
Seule la pertinence du modèle économique permettra de renforcer le maillage du territoire national et d’installer une ou plusieurs maisons de naissance dans chaque département afin de permettre à chaque femme, à chaque couple, de choisir librement son mode d’accouchement.
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.
Mme Frédérique Puissat. Je voudrais apporter mon témoignage, puisque deux des six maisons de naissance de métropole se trouvent dans le département dans l’Isère.
Adossées à deux hôpitaux – Bourgoin-Jallieu et Grenoble –, nous les avions notamment soutenues pour répondre aux interpellations de médecins libéraux, qui nous expliquaient que les femmes voulaient de plus en plus accoucher chez elles, ce qui constituait une vraie difficulté pour eux.
Je suis très heureuse de voir inscrit dans le texte cet article, qui vise à pérenniser ces structures qui sont financièrement fragiles par essence, puisqu’il s’agissait d’une expérimentation.
Toutefois, il ne faut pas oublier que la sécurisation doit toujours primer dans nos choix (Mme la présidente de la commission approuve.) et que les maternités doivent demeurer. Soyons prudents et rappelons toujours les réalités qui s’imposent en ce qui concerne la sécurité de la mère et du nourrisson. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. Comme plusieurs de nos collègues, je me réjouis que le Gouvernement ait décidé de passer de l’expérimentation à la pérennisation des maisons de naissance dans le PLFSS.
Toutefois, certaines interventions m’obligent à préciser un point : les maisons de naissance ne peuvent être et ne seront en aucun cas une solution de rechange aux maternités.
On ne peut pas expliquer à nos concitoyens, dans les territoires, que l’on va fermer une maternité et la remplacer par une maison de naissance. D’une part, parce que 30 % seulement des femmes qui s’inscrivent dans une maison de naissance y accouchent in fine – la grande majorité a donc relevé, soit au cours de la grossesse, soit au moment de l’accouchement, d’un suivi en structure hospitalière. D’autre part, parce que toute maison de naissance doit être adossée à un hôpital ou à une maternité proche.
Il faut faire très attention à ne pas entretenir une confusion qui pourrait amener les élus locaux à faire preuve de méfiance à l’égard des maisons de naissance, de peur que celles-ci ne provoquent la fermeture des maternités.
Par ailleurs, en matière de santé sexuelle et reproductive des femmes, le fil rouge doit toujours être celui du choix : choix de la contraception, choix du suivi pendant la grossesse, choix du type d’accouchement…
Si des femmes souhaitent effectuer un accouchement physiologique et que celui-ci est possible dans une maison de naissance, elles doivent trouver cet accompagnement. À terme, il est donc nécessaire d’augmenter considérablement le nombre des maisons de naissance.
Le développement de ces maisons a d’ailleurs amené les services de maternité à réfléchir à la place de l’accouchement physiologique par rapport à celle de l’accouchement plus médicalisé et à développer en leur sein des salles physiologiques. Les maisons de naissance doivent donc être d’autant plus soutenues qu’elles font évoluer la pratique hospitalière.
Pour ces raisons, nous voterons à la fois ces amendements et l’article 30.
M. le président. Madame Mélot, les amendements nos 884 rectifié ter et 252 rectifié quater sont-ils maintenus ?
Mme Colette Mélot. Non, je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 884 rectifié ter et 252 rectifié quater sont retirés.
Je mets aux voix l’amendement n° 434 rectifié bis.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 380, présenté par M. Théophile, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4, dernière phrase
1° Après les mots :
direction médicale
insérer les mots :
et la gestion
2° Remplacer les mots :
est assurée
par les mots :
sont assurées
II. - Alinéa 6
Supprimer les mots :
et gérées
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Cet amendement vise à sécuriser la place et le rôle des sages-femmes au sein des maisons de naissance dont elles ont la charge.
Depuis cinq ans, c’est-à-dire depuis le début de l’expérimentation prévue par la loi du 6 décembre 2013, la gestion médicale, technique, administrative et financière de ces structures a été assurée exclusivement par des sages-femmes, dans le respect strict du cahier des charges de la Haute Autorité de santé.
Le rapport de l’Inserm sur la qualité des soins en maison de naissance et celui que le Gouvernement nous a remis en juin dernier ont d’ailleurs dressé un bilan très positif de cette expérimentation.
À l’Assemblée nationale, en première lecture, un amendement du rapporteur général de la commission des affaires sociales est venu préciser que la direction médicale de ces maisons était bien confiée aux seules sages-femmes.
Nous proposons d’aller plus loin, en leur confiant, comme c’est déjà le cas, la direction médicale, mais aussi en leur permettant de profiter d’une vraie sécurité juridique. Il s’agit d’éviter que des investisseurs puissent ouvrir des maisons de naissance, transformant les sages-femmes en simples salariées.
Cet amendement ne vise donc pas à empêcher les maisons de naissance de nouer des partenariats ou d’avoir recours à des acteurs extérieurs, mais bien de garantir aux sages-femmes la place centrale qu’elles méritent.
M. le président. L’amendement n° 558, présenté par M. Lurel, Mmes Conconne et Jasmin, MM. Antiste et Assouline et Mmes Préville et Le Houerou, est ainsi libellé :
Alinéa 4, dernière phrase
Après les mots :
direction médicale
insérer les mots :
, technique, administrative et financière
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Mes propos s’inscrivent dans la continuité de ceux de Dominique Théophile et de Laurence Rossignol.
Nous sommes d’accord sur les trois prismes que sont la liberté, la sécurité et le risque quelque peu rampant de privatisation. Il faut maintenir un équilibre entre ces trois éléments.
Si l’on laisse n’importe quel investisseur prendre la direction de ces maisons de naissance, une privatisation s’opérera peu à peu, quelles que soient les contraintes géographiques ou de sécurité – « proximité » ou « proximité immédiate » d’un hôpital ou d’une maternité…
Si les sages-femmes n’opèrent pas elles-mêmes un contrôle, des occasions d’investissement se présenteront qui, à terme, pourraient emporter les conséquences désagréables évoquées par notre collègue : fermetures de maternité, déclassements, éloignements amenant les investisseurs privés à remplacer le service public de santé, en particulier en néonatalogie.
Au travers de cet amendement, il s’agit donc de préserver l’esprit qui anime aujourd’hui nos travaux.
M. le président. L’amendement n° 349 rectifié bis, présenté par Mme Doineau, M. Bonneau, Mme Vérien, MM. Levi et Détraigne, Mmes Gatel et N. Goulet, M. Laugier, Mmes Férat et Dindar, M. Canevet, Mme Vermeillet, M. Kern, Mmes Loisier et Tetuanui, MM. Duffourg, Louault, Cazabonne, Delcros et Longeot, Mmes Jacquemet, Billon et C. Fournier et MM. P. Martin, Cadic, Capo-Canellas, Poadja, Le Nay et Mizzon, est ainsi libellé :
Alinéa 4, dernière phrase
Après le mot :
médicale
insérer les mots :
, financière et administrative
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 2 rectifié, présenté par MM. Théophile et Iacovelli, Mme Schillinger, MM. Rohfritsch et Dennemont, Mme Duranton et MM. Buis, Patient et Yung, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 9
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 6323-4-1. – Les maisons de naissance sont créées et gérées par plusieurs sages-femmes associées pour leur exercice professionnel ou pour la mise en commun de moyens nécessaires à cet exercice.
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Il est également défendu !
M. le président. L’amendement n° 347 rectifié bis, présenté par Mme Doineau, M. Bonneau, Mme Vérien, MM. Détraigne et Levi, Mmes Gatel et N. Goulet, M. Laugier, Mmes Férat et Dindar, M. Canevet, Mme Vermeillet, M. Kern, Mmes Loisier et Tetuanui, MM. Duffourg, Louault, Cazabonne, Delcros et Longeot, Mmes Jacquemet, Billon et C. Fournier et MM. P. Martin, Cadic, Capo-Canellas, Poadja, Le Nay et Mizzon, est ainsi libellé :
Alinéas 8 et 9
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 751 rectifié, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 8 et 9
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Des organismes à but non lucratif, soit par des collectivités territoriales, soit par des établissements publics de coopération intercommunale, soit par des établissements publics de santé, soit par des personnes morales gestionnaires d’établissements privés de santé, à but non lucratif.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Il me semble que la position du Gouvernement mérite débat sur un point : savoir qui peut gérer une maison de naissance.
J’avais fait le choix, dans la proposition de loi que j’ai présentée, en concertation avec les associations qui gèrent les huit maisons de naissance actuellement, de limiter le champ des organismes pouvant créer et gérer des maisons de naissance à des organismes à but non lucratif. Ce n’est donc pas tant la question du secteur public ou privé que celle du but lucratif ou non qui importe.
Le Gouvernement ne retient pas cette option puisqu’il permet aux groupements d’intérêt public, les GIP, aux groupements d’intérêt économique, les GIE, et aux groupements de coopération sanitaire, les GCS, de créer et de gérer des maisons de naissance. Ces appellations recouvrent un large champ d’acteurs, dont les objectifs peuvent être éloignés de ceux que visent les structures de santé publique à but non lucratif.
D’ailleurs, des dérives s’observent déjà : certaines structures récentes, qui se font appeler « maisons de naissance » hors du cercle des huit maisons officielles, s’éloignent de l’état d’esprit né de l’expérimentation. On constate ainsi une absence de tarifs affichés sur le site internet, un marketing luxueux, et même parfois des demandes de devis…
Je pense qu’il nous faut sécuriser ces nouvelles structures en posant des garde-fous. Les maisons de naissance doivent rester accessibles à toutes les femmes à bas risque obstétrical, sans condition de ressources.
Ne soyons pas naïfs, ce secteur présente une manne financière potentielle. Il nous semble donc important de limiter le champ des acteurs à des organismes soit publics soit privés à but non lucratif exerçant dans le domaine de la santé.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 397 est présenté par M. Théophile.
L’amendement n° 433 rectifié bis est présenté par Mmes Billon, C. Fournier, Perrot, Jacquemet, Vérien, Vermeillet et Tetuanui, MM. Cadic, J.M. Arnaud, Longeot, Levi, Détraigne et Kern, Mme Sollogoub, MM. Le Nay, Janssens, Canevet et Delcros, Mmes Guidez et Gatel et MM. Lafon, Capo-Canellas, Hingray, Poadja et Duffourg.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 9
Supprimer les mots :
Un groupement d’intérêt public, un groupement d’intérêt économique ou
La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 397.
M. Dominique Théophile. Contrairement aux GCS, les GIE et les GIP ne peuvent pas porter une autorisation d’activité de soins et ne constituent pas des formes de coopération adaptées à l’objet même des maisons de naissance ou aux acteurs qui y participent.
Cet amendement vise donc à retirer aux GIE et GIP l’autorisation de créer et de gérer des maisons de naissance.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° 433 rectifié bis.
Mme Annick Billon. Je souhaite que la commission soutienne ces amendements identiques, comme elle l’a fait pour l’amendement n° 434 rectifié bis.
Je souhaiterais surtout que le Gouvernement en fasse de même, car ces amendements sont demandés par les professionnels de santé, notamment les sages-femmes, et par les femmes qui désirent avoir le choix. Madame la ministre, de grâce, montrez-nous que la grande cause du quinquennat s’applique aussi dans cet hémicycle !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission est défavorable à l’ensemble de ces amendements, qui visent à restreindre le type de structures pouvant porter une maison de naissance.
En ce qui concerne les amendements nos 349 rectifié bis, 380 et 558, la direction médicale des maisons de naissance par des sages-femmes est déjà réaffirmée dans le texte, ce qui confirme l’orientation prise dans le cadre de l’expérimentation.
Faut-il ne confier leur gestion qu’à des sages-femmes ? Peut-être est-ce restrictif pour envisager le développement de ces structures… Ouvrir la gestion à d’autres types d’organismes ne me paraît pas mettre en péril l’indépendance des sages-femmes dans leur exercice professionnel.
Les amendements nos 2 rectifié, 347 rectifié bis et 751 rectifié, ainsi que les amendements identiques nos 397 et 433 rectifié bis, visent à restreindre le type de structures susceptibles de créer et de gérer des maisons de naissance.
Dès lors que le rôle central des sages-femmes dans ces structures me semble déjà garanti, je ne vois pas d’obstacle à élargir les possibilités de coopération pour faciliter le montage des projets, ne serait-ce que pour des questions de locaux ou de financement. Le cadre purement associatif des maisons de naissance a présenté certaines limites en phase expérimentale, comme le reconnaissent des représentants de ces structures.
Je rappelle également que le PLFSSS ne prévoit pas encore d’avancées sur le financement pérenne de ces structures, qui doivent pourtant passer de huit à vingt.
Pour ces raisons, mes chers collègues, je vous propose de vous en tenir au texte. Je demande aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. L’esprit des maisons de naissance, comme vous l’avez rappelé, est de permettre la réalisation du suivi des grossesses et des accouchements sous la responsabilité des sages-femmes, dans le respect de leur champ de compétence.
Comme vous l’avez souligné, madame Rossignol, la notion de sécurité est essentielle, avec l’adossement nécessaire de ces structures aux maternités et aux hôpitaux.
En revanche, il ressort de la phase expérimentale que l’implication d’autres professionnels dans la gestion des maisons de naissance peut être une valeur ajoutée et se révéler utile au bon fonctionnement de ces structures. Il me semble donc important de permettre aux sages-femmes de gérer les maisons de naissance sans l’imposer dans tous les cas de figure, pour ne pas bloquer certaines initiatives intéressantes.
Pour ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettrait un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. Les sages-femmes qui ont travaillé dans les huit maisons de naissance ont fait l’objet d’une évaluation de leurs pratiques par l’Inserm, qui a publié un rapport.
On voit bien que ce sont des personnes responsables : elles ont rédigé des procédures, elles ont soumis leurs pratiques aux ARS, comme en Guadeloupe, et elles ont invité les élus à visiter les lieux, pour mieux en comprendre le fonctionnement.
Ces différents amendements tendent tous à encadrer le dispositif. Je crois qu’il faut rassurer les sages-femmes et inscrire leurs souhaits dans le marbre de la loi. Madame la ministre, vous avez évoqué ce qui figure déjà dans le texte. Mais les sages-femmes veulent que leurs demandes soient explicites et tracées dans le PLFSS. Elles ont besoin d’être rassurées.
Les maisons de naissance sont destinées en priorité aux parturientes sans problème de santé ni pathologies particulières et pour lesquelles une naissance presque normale est prévue. Toutefois, il faudrait pouvoir signer des conventions avec les services de néonatologie et de réanimation de proximité, pour assurer la sécurité des patientes et de l’enfant à naître.
Les sages-femmes sont volontaires ; il n’est que de voir le nombre d’écoles de sages-femmes et le nombre de diplômées. Cette solution de rechange leur permettra d’innover et de faire évoluer leurs pratiques. Je crois que nous devrions davantage travailler avec elles et satisfaire leurs demandes.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 558, 349 rectifié bis et 2 rectifié n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 347 rectifié bis.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 751 rectifié et les amendements identiques nos 397 et 433 rectifié bis n’ont plus d’objet.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 345 rectifié bis, présenté par Mme Doineau, M. Bonneau, Mme Vérien, MM. Levi et Détraigne, Mmes Gatel et N. Goulet, M. Laugier, Mmes Férat et Dindar, M. Canevet, Mme Vermeillet, M. Kern, Mmes Loisier et Tetuanui, MM. Duffourg, Louault et Cazabonne, Mme de La Provôté, M. Longeot, Mmes Jacquemet, Billon et C. Fournier, M. P. Martin, Mme Létard et MM. Cadic, Capo-Canellas, Poadja, Le Nay et Mizzon, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L’activité de la maison de naissance est comptabilisée avec celle de la structure partenaire.
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. Toujours dans l’idée qu’il ne s’agit pas de remplacer les maternités, ni même de leur faire concurrence, je propose de compléter l’alinéa 4 par les termes : « L’activité de la maison de naissance est comptabilisée avec celle de la structure partenaire. »
Cette disposition, en œuvre lors de l’expérimentation, permettrait de lever toute ambiguïté concernant une éventuelle concurrence entre maisons de naissance et maternités avoisinantes.
M. le président. L’amendement n° 1017, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les accouchements assurés au sein d’une maison de naissance sont comptabilisés dans le volume d’activité de l’établissement de santé auquel la maison de naissance est rattachée par convention.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Nous soulignons tous qu’il ne faut pas mettre les maternités et les maisons de naissance en rivalité.
En 2013, lors du lancement des maisons de naissance, les membres de notre groupe étaient assez dubitatifs : quelque 40 % des maternités avaient fermé, et nous nous inquiétons du risque d’une accélération des fermetures. On voit bien, aujourd’hui, que ces structures sont complémentaires et qu’elles reposent sur une demande très forte des femmes. La sécurité est assurée par l’adossement des maisons de naissance aux hôpitaux et maternités.
Afin de consolider et de sécuriser encore davantage ces structures, cet amendement vise à compléter l’article en précisant que « Les accouchements assurés au sein d’une maison de naissance sont comptabilisés dans le volume d’activité de l’établissement de santé auquel la maison de naissance est rattachée par conventions. »
Il s’agit d’assurer la sécurité des femmes et des structures dans un souci de bien-être des parturientes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La loi de 2013 ouvrant l’expérimentation avait en effet prévu de comptabiliser l’activité de ces établissements avec celle de la maternité partenaire, comme vous le proposez, afin d’éviter une concurrence entre les structures.
Toutefois, un tel dispositif nous priverait de la visibilité sur l’activité des maisons de naissance pourtant indispensable à leur suivi et à leur évaluation. Ce sont plus les conditions d’implantation des maisons de naissance qui importeront pour prévenir les effets de concurrence.
Or toute maison de naissance devant être adossée à une maternité, il ne me semble pas imaginable qu’elle puisse être installée à côté d’une maternité à l’activité déjà déclinante.
Pour ces raisons, la commission demande le retrait de ces deux amendements ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 1017 n’a plus d’objet.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 344 rectifié bis, présenté par Mme Doineau, M. Bonneau, Mme Vérien, MM. Levi et Détraigne, Mmes Gatel et N. Goulet, M. Laugier, Mmes Férat et Dindar, M. Canevet, Mme Vermeillet, M. Kern, Mmes Loisier et Tetuanui, MM. Duffourg, Louault et Cazabonne, Mme de La Provôté, MM. Delcros et Longeot, Mmes Jacquemet, Billon et C. Fournier et MM. P. Martin, Cadic, Capo-Canellas, Poadja, Le Nay et Mizzon, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Chaque maison de naissance conclut avec un établissement de santé autorisé pour l’activité de soins de gynécologie-obstétrique une convention prévoyant, notamment, les modalités d’un transfert sécurisé, facile et rapide des parturientes ou des nouveau-nés en cas de nécessité. Ces modalités sont fixées par décret et précisées dans les décisions d’autorisation des maisons de naissance.
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. Toutes les données scientifiques dont nous avons connaissance sont positives quant à la qualité des soins en maison de naissance, sans qu’il y ait forcément une obligation de contiguïté.
Le taux de transfert évoqué dans le débat parlementaire porte essentiellement sur des transferts non urgents. Comme l’explique l’étude de l’Inserm, les urgences majeures sont celles qui relèvent de l’hémorragie du post-partum. Pour l’année 2018 sur laquelle porte cette étude, on relève ainsi 31 transferts en post-partum, soit 6 % des accouchements, généralement à la suite d’une hémorragie de la délivrance ou d’une rétention du placenta.
Dans le premier cas, les gestes suffisants ont toujours été effectués par la sage-femme, et il n’est à déplorer aucun cas d’hospitalisation en unité de soins intensifs ou de réanimation. C’est donc non pas la contiguïté, mais le travail des sages-femmes et la qualité du partenariat et de la communication avec la maternité partenaire qui assurent le bon niveau de sécurité.
La condition prévue par le texte actuel d’une convention « prévoyant, notamment, les modalités d’un transfert rapide des parturientes ou des nouveau-nés en cas de nécessité » paraît donc nécessaire et suffisante, sachant que les modalités pratiques permettant d’assurer ce transfert rapide seront cadrées dans les textes réglementaires s’appuyant sur le cahier des charges de la HAS et sachant que les ARS seront attentives sur ce point lors de l’instruction des demandes et lors du contrôle des maisons de naissance.
Aussi, le présent amendement vise à supprimer l’obligation de « proximité immédiate », laquelle n’est pas justifiée scientifiquement par des raisons de sécurité.
M. le président. L’amendement n° 378 rectifié ter, présenté par Mmes Lassarade et V. Boyer, M. B. Fournier, Mmes Deromedi et Dumas, MM. Panunzi et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, M. D. Laurent, Mmes Malet et Raimond-Pavero, MM. H. Leroy et Bonhomme, Mme F. Gerbaud, MM. Rapin, Mandelli et Savary, Mmes Boulay-Espéronnier, Di Folco, Garriaud-Maylam et Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et Cuypers, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
à proximité immédiate d’un
par les mots :
contiguë à
La parole est à Mme Florence Lassarade.
Mme Florence Lassarade. Lors de la première lecture à l’Assemblée nationale du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, l’article 30 relatif aux maisons de naissance a été modifié, afin, notamment, d’assouplir le critère de contiguïté des maisons de naissance à un établissement de santé autorisé pour l’activité de soins de gynécologie-obstétrique, en le remplaçant par les termes « proximité immédiate ».
Or une telle modification est porteuse de risque en cas de complication périnatale. Le rapporteur général de l’Assemblée nationale l’a souligné lors des débats, en indiquant que le critère de la contiguïté est essentiel. En effet, il ressort de l’expérimentation menée depuis 2013 que les transferts d’une maison de naissance vers une maternité concernent en moyenne 22 % des accouchements durant le travail, sans parler des transferts postnataux.
La loi n° 2013-1118 du 6 décembre 2013 autorisant l’expérimentation des maisons de naissance avait bien pris en compte ce risque, en prévoyant que la maison de naissance soit attenante à un établissement de soins. La contiguïté à une maternité disposant d’un plateau technique pouvant gérer les complications éventuelles est indispensable.
Mon expérience de pédiatre de maternité me ramène aux années quatre-vingt : nous étions alors obligés d’aller chercher les nouveau-nés dans plusieurs petites maternités à proximité des hôpitaux ! Aujourd’hui, dans un contexte de pénurie de pédiatres, de réanimateurs et d’obstétriciens, il va devenir difficile de traverser la ville pour aller chercher une femme ou un nouveau-né.
M. le président. L’amendement n° 557, présenté par M. Lurel, Mme Conconne, MM. Antiste, P. Joly et Assouline et Mmes Préville et Le Houerou, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer le mot :
immédiate
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Cet amendement est diamétralement opposé à celui que Mme Lassarade vient de présenter.
J’avoue que l’affaire est délicate, puisqu’il s’agit de trouver un équilibre entre libre-choix, sécurité et gestion des sages-femmes. À l’Assemblée nationale, un amendement de notre collègue Hélène Vainqueur-Christophe visait à remplacer le critère de contiguïté par celui de proximité. Le Gouvernement y a ajouté par voie de sous-amendement le qualificatif d’« immédiate » – je puis le comprendre, mais je me demande tout de même comment cela peut fonctionner…
Dans mon département, par exemple, où il y a deux hôpitaux, les critères de « proximité immédiate » ou de « contiguïté » limiteraient la création de maisons de naissance à deux ou trois. Pour autant, je suis pour le service public et j’ai apprécié les propos de M. Jomier, voilà quelques instants, qui soulignaient l’importance d’assurer une gestion par des groupements à but non lucratif.
Cet amendement vise donc à supprimer l’adjectif « immédiate », laissant le soin aux établissements concernés d’apprécier ensuite la distance de sécurité nécessaire pour donner à chacun la liberté de choisir.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Des sages-femmes exerçant en maison de naissance ont en effet considéré l’exigence de contiguïté avec un service de maternité comme étant parfois une fausse sécurité, notamment dans des situations où le transfert, même rapide, n’est pas possible pour la santé de la femme ou du nouveau-né.
Cependant, il me semble plus sage, dans un premier temps, de maintenir cette exigence. Je rappelle que le taux de transfert en cours d’accouchement est assez élevé, de l’ordre de 22 %.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur les amendements nos 344 rectifié bis et 557, qui tendent à assouplir cette condition.
Selon moi, il n’y a pas une grande différence entre la « proximité immédiate » adoptée par l’Assemblée nationale et la « contigüité immédiate ». Pour autant, je ne vois pas d’obstacle à revenir aux termes de la loi de 2013 : la commission est donc favorable à l’amendement n° 378 rectifié ter.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Le Gouvernement sera défavorable à ces trois amendements.
L’article 30, tel qu’il vous est soumis, mesdames, messieurs les sénateurs, vise à définir les conditions de fonctionnement des maisons de naissance assurant la sécurité des soins dispensés aux parturientes et aux nouveau-nés.
Au-delà des situations d’hémorragie du post-partum que vous avez évoquées et qui composent la majeure partie des urgences maternelles, on ne peut écarter d’autres situations graves pour la mère, comme pour le nouveau-né, qui justifient une proximité immédiate avec la maternité.
À l’occasion des débats à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a accepté de passer de la notion de « contiguïté » à celle, plus souple, de « proximité immédiate », mais la garantie des conditions de sécurité dues aux parturientes et à leur bébé ne permet pas d’envisager d’aller plus loin, avec le recul dont nous disposons aujourd’hui à la suite à l’expérimentation.
Je vous propose donc d’en rester à l’équilibre qui a été trouvé, et j’émets un avis défavorable sur tous ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. « Contiguïté », « proximité » ou « proximité immédiate » : ces notions ont fait l’objet de discussions pointues avec les professionnels et les associations qui portent les maisons de naissance.
Avec la « proximité immédiate », je crois que l’Assemblée nationale a trouvé un bon équilibre. En effet, la contiguïté peut être interprétée de manière très restrictive par les établissements hospitaliers. Il faut tout de même avoir en tête que la création d’une maison de naissance, avec l’exigence bien normale de l’adossement sur une maternité, suppose une certaine bénévolence de la part de l’équipe de la maternité et de la structure hospitalière.
L’exigence de contiguïté – les locaux doivent communiquer de l’intérieur – pourrait conduire à renoncer à la création d’une maison de naissance dans un bâtiment séparé.
C’est souvent le cas dans les établissements hospitaliers un peu anciens, où il y a plusieurs pavillons les uns à côté des autres. Parfois, certains pavillons se trouvent à quelques minutes du service de maternité. Par conséquent, si l’on exige la continuité, on limite la création des maisons de naissance au sein des établissements de caractère hospitalier des maternités.
La « proximité immédiate » me paraît donc constituer un bon équilibre. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre ces trois amendements, afin de conserver l’équilibre trouvé par l’Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Si l’on analyse les données existantes sur les maisons de naissance – elles sont peu nombreuses en France, mais plus fournies en Grande-Bretagne, où les maisons de naissance sont parfois bien plus éloignées des maternités –, les indicateurs de complications graves ou de mortalité ne sont absolument pas dégradés pour ces établissements.
Pour autant, nous sommes en train de créer un nouveau dispositif. Il faut donc entendre les réserves qui peuvent s’exprimer et prendre en compte le fait que la proximité immédiate est demandée, y compris pour une raison évoquée par un certain nombre de collègues, à savoir la crainte que les maisons de naissance finissent par se substituer à des maternités – n’éludons pas cet aspect.
D’après moi, dans la mesure où nous cherchons un accord, nous devrions conserver le choix opéré par l’Assemblée nationale. On peut ouvrir le dictionnaire : Laurence Rossignol a très bien distingué la « contiguïté » de la « proximité immédiate » ; pour autant, la différence entre ces deux notions est ténue.
La formulation retenue par nos collègues députés permet à la fois de poser le principe de lien direct et immédiat avec la maternité de référence et de ne pas imposer un bâtiment commun.
Dès lors, il me paraît raisonnable de ne retenir ni les amendements visant à distendre ce lien – leurs dispositions peuvent se justifier sur le strict plan scientifique de l’analyse du risque, mais posent des questions politiques –, ni ceux qui tendent à le resserrer, car cela compliquerait la suite de la discussion avec nos collègues députés.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Il faut tout de même rappeler que les deux structures de santé, à savoir les maisons de santé et les maternités, concluront une convention. C’est dans ce texte que devra être précisée la juste distance entre les deux établissements, pour respecter la sécurité sans exiger une stricte continuité.
Cette convention sera examinée par l’ARS, au regard des recommandations de bonne pratique. Laissons donc aux deux structures définir ce que doit être la juste distance entre elles.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Ce que je viens d’entendre m’a convaincu. J’étais déjà conscient du caractère délicat de trouver la bonne mesure en matière de proximité, pour éviter les grands business, tout en laissant aux femmes le choix du lieu de naissance.
Je retire donc mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 557 est retiré.
La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. On peut trouver tous les termes que l’on veut, mais, dans un cas d’urgence, lorsque cela se met à saigner et que le tableau est dramatique, il faut prendre ses responsabilités. Dans ces cas-là, il faut agir vite. La maternité ne doit donc pas être loin, afin d’éviter tout transfert. Si l’on commence à mettre un malade dans un camion, avant de le transporter jusqu’à la salle d’opération, c’est fichu !
Il faut donc être réaliste : le malade doit rester sur une table d’accouchement mobile, la structure étant contiguë. On peut faire quelques mètres dans un couloir, mais il faut éviter un transport ou une rupture de charge qui mettrait la personne en péril.
Telle est la raison pour laquelle l’amendement défendu par Florence Lassarade me semble correspondre à la réalité. Les deux établissements doivent être très proches. Ne prenons pas de risques en la matière, car cela pourrait créer des complications très lourdes.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Les maisons de naissance, telles qu’elles ont été conçues et telles qu’elles existent, sont faites pour des accouchements dits « normaux », ce qu’ils sont généralement, sauf quand, à la plus grande surprise, ils ne le sont pas.
Or, si quelque chose n’est pas prévu dans un accouchement – j’en ai fait des centaines –, si quelque chose d’imprévisible arrive, je sais ce que veut dire « contiguïté », mais je ne sais pas ce que signifie « proximité immédiate », et j’aimerais bien qu’on me l’explique.
Si cela signifie que la maison de naissance est située à un kilomètre de l’hôpital, en pleine campagne, ce n’est pas un problème. Mais si cela signifie qu’elle est à un quart d’heure de l’hôpital en pleine ville, c’est un problème insoluble.
Je préfère donc de très loin le terme de « contiguïté » à celui de « proximité ».
M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour explication de vote.
Mme Florence Lassarade. Les hôpitaux, on le sait, ont des difficultés à trouver du personnel médical et paramédical. J’insiste encore sur ce point, nous n’avons que très peu d’obstétriciens, d’anesthésistes et de pédiatres. Plus vous éloignez le professionnel de l’endroit où il doit intervenir, plus vous faites courir de risques à l’enfant.
Je le rappelle, la France se situe, en Europe, au vingt-troisième rang sur vingt-huit pour ce qui concerne la mortalité néonatale. Il s’agit de ne pas aggraver les choses.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Je veux apporter mon soutien à l’amendement de Florence Lassarade.
Je suis vraiment favorable aux maisons de naissance, dont j’avais voté le principe au moment de leur mise en place. Je souhaite que l’expérimentation soit pérennisée. Néanmoins, la sécurité de la mère et de l’enfant est un point essentiel.
On me dit qu’il y aura une proximité, mais on ne connaît pas la distance. On me dit que les collectivités pourront porter les projets… Bon courage aux collectivités qui prendront la responsabilité d’implanter une maison de naissance à une certaine distance d’une maternité !
Les collectivités naviguent déjà dans des zones dangereuses en termes de responsabilité. Nous devons prendre nos propres responsabilités en la matière. C’est la raison pour laquelle je voterai l’amendement de Mme Florence Lassarade.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 344 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 752 rectifié, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les maisons de naissance pratiquent le mécanisme du tiers payant mentionné à l’article L. 160-10 du code de la sécurité sociale.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Cet amendement a pour objet que les maisons de naissance soient accessibles au plus grand nombre de femmes, quel que soit leur niveau de revenu, grâce au mécanisme du tiers payant.
Ce point devrait être une évidence, mais il n’a pas été retenu, à mon grand étonnement, par le Gouvernement. Celui-ci envisage-t-il que les maisons de naissance, à la suite de toute la philosophie dont nous venons de débattre, puissent ne pas pratiquer le tiers payant, pour être des établissements s’adressant à des femmes disposant de revenus plus élevés ? Ou estime-t-il qu’une telle mesure est automatiquement appliquée ? Si tel était le cas, je retirerais bien évidemment mon amendement.
Je souhaiterais donc entendre Mme la ministre sur cette question.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Depuis 2017, les bénéficiaires de l’assurance maternité bénéficient déjà du tiers payant pour la prise en charge par l’assurance maladie obligatoire. C’est inscrit dans le code de la sécurité sociale. Il ne semble donc pas nécessaire de prévoir des dispositions particulières pour les maisons de naissance.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle se verrait contrainte d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Les actes réalisés pour la prise en charge des femmes enceintes relevant de l’assurance maternité à compter du sixième mois sont d’ores et déjà dans le champ du tiers payant obligatoire, qu’il soit réalisé en maison de naissance ou non.
Le Gouvernement est donc également défavorable à cet amendement.
M. le président. Monsieur Jomier, l’amendement n° 752 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Jomier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 752 rectifié est retiré.
L’amendement n° 810 rectifié, présenté par MM. Théophile et Iacovelli, Mme Schillinger, MM. Rohfritsch et Dennemont, Mme Duranton et MM. Buis et Patient, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Remplacer le mot :
sept
par le mot :
huit
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Cet amendement vise à donner plus de visibilité aux gestionnaires des maisons de naissances, en allongeant la période d’autorisation d’une année, ce qui correspond à mon avis au temps d’un retour sur investissement et de l’amortissement des investissements.
Il s’agit donc de faire concorder les investissements réalisés et le temps d’autorisation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La durée de sept ans est cohérente, car elle est calée sur celle des autorisations d’activités de soins.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle se verrait contrainte d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Théophile, l’amendement n° 810 rectifié est-il maintenu ?
M. Dominique Théophile. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 810 rectifié est retiré.
L’amendement n° 348 rectifié bis, présenté par Mme Doineau, M. Bonneau, Mme Vérien, MM. Levi et Détraigne, Mmes Gatel et N. Goulet, M. Laugier, Mmes Férat et Dindar, M. Canevet, Mme Vermeillet, M. Kern, Mmes Loisier et Tetuanui, MM. Duffourg, Louault et Cazabonne, Mme de La Provôté, M. Longeot, Mmes Jacquemet, Billon et C. Fournier et MM. P. Martin, Cadic, Capo-Canellas, Poadja, Le Nay et Mizzon, est ainsi libellé :
Alinéa 12, seconde phrase
1° Supprimer le mot :
enceintes
2° Remplacer les mots :
est conforme aux
par les mots :
s’appuie notamment sur les
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. Selon la Haute Autorité de santé, « les recommandations de bonnes pratiques n’ont pas vocation à décrire l’ensemble de la prise en charge d’un état de santé ou d’une maladie. Elles devraient se limiter aux points d’amélioration de cette prise en charge, identifiés à l’aide d’études de pratiques ou, en l’absence de telles études, à l’aide des avis et de l’expérience des professionnels de santé concernés par le thème. »
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission est favorable à cet amendement de précision rédactionnelle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. La mention de l’opposabilité des recommandations de la HAS relatives aux maisons de naissance, en particulier du cahier des charges qui leur est directement applicable, doit être préservée.
Pour cette raison, je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 754 rectifié, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Après le mot :
chapitre
insérer les mots :
ainsi que les conditions de prise en charge par l’assurance maladie de la rémunération des professionnels
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Il est tout de même curieux que cet article figure dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale, alors qu’il ne comporte aucun élément relatif au financement des maisons de naissance…
Mon amendement tend à préciser que le décret en Conseil d’État doit prendre en compte les conditions de prise en charge par l’assurance maladie de la rémunération des professionnels exerçant dans les maisons de naissance, à savoir les sages-femmes.
En effet, si l’objectif du Gouvernement est non seulement de pérenniser, mais aussi de promouvoir le développement de ces structures essentielles à la diversification de l’offre périnatale et au choix des femmes, il est essentiel de prévoir au plus vite les modalités de leur financement pérenne. Cela passe notamment par la reconnaissance du travail des sages-femmes en maison de naissance, donc par la définition de la rémunération de leurs actes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Comme les auteurs de l’amendement, je regrette que la pérennisation des maisons de naissance ne s’accompagne pas d’un modèle de financement pérenne.
Ces structures devraient rester financées par le FIR, le fonds d’intervention régional, alors que le rapport d’évaluation de l’expérimentation transmis au Parlement a montré le besoin de trouver un meilleur modèle économique. En effet, les astreintes des sages-femmes ne sont pas bien prises en charge par les forfaits de prise en charge.
Néanmoins, cet amendement ne me semble pas pleinement satisfaisant, dans la mesure où les modalités de prise en charge par l’assurance maladie n’ont pas à être fixées par décret.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, je me verrais contrainte d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Il est prévu de déléguer à ces structures des financements complémentaires, par l’intermédiaire du fonds d’intervention régional.
Nous prenons en compte le fait que le financement par l’assurance maladie des actes réalisés par les professionnels ne suffit pas pour assurer l’équilibre économique des maisons de naissance, en raison du poids de certaines dépenses. Un tel dispositif ne remet pas en question, bien au contraire, la pérennité de ces structures.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 30, modifié.
(L’article 30 est adopté.)
Article additionnel après l’article 30
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 566 est présenté par Mme Doineau.
L’amendement n° 857 rectifié est présenté par Mmes Berthet, Dumas et Deromedi, MM. Sol, Brisson et Bonne, Mmes Bonfanti-Dossat, Gruny, Sollogoub et Malet, MM. Rapin, Bascher, Bouloux, Savary et Belin, Mme Thomas, M. Bonhomme, Mme F. Gerbaud, MM. Saury et Mandelli, Mmes Guidez et de La Provôté, M. Decool, Mmes Garriaud-Maylam, Di Folco et Delmont-Koropoulis et M. Gremillet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Lorsque le patient est adressé par une sage-femme à l’occasion des soins qu’il est amené à lui dispenser. »
La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour présenter l’amendement n° 566.
Mme Élisabeth Doineau. Les sages-femmes, à l’occasion du suivi des grossesses ou du suivi gynécologique et de contraception, sont amenées à prescrire des examens, afin, entre autres choses, de dépister d’éventuelles situations pathologiques.
À ce titre, l’article L. 4151-4 du code de la santé publique prévoit que les sages-femmes peuvent prescrire tous les « examens strictement nécessaires à l’exercice de leur profession ».
Or la réforme de l’assurance maladie du 13 août 2004 a instauré un dispositif reposant sur le choix, par chaque assuré ou ayant droit de 16 ans ou plus, d’un médecin traitant dans le cadre d’un parcours de soins coordonnés.
Ce dispositif, louable dans son principe, a totalement oublié les sages-femmes dans le dispositif de suivi normal et banal des femmes. Ces dernières ne doivent pas être pénalisées lorsqu’elles sont orientées par une sage-femme vers un médecin spécialiste. Les sages-femmes doivent pouvoir exercer dans le respect des recommandations professionnelles et de leurs obligations législatives et déontologiques.
L’obligation d’adresser à un médecin en cas de situation pathologique ne concerne pas uniquement le médecin gynécologue ou généraliste.
Cette situation va dans le sens d’une altération du parcours de soins des femmes enceintes et à une non-économie pour les finances de la sécurité sociale. La reconnaissance des sages-femmes dans le cadre du parcours de soins coordonnés s’inscrirait également dans une démarche de maîtrise les dépenses de santé.
M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l’amendement n° 857 rectifié.
Mme Martine Berthet. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces amendements ont pour objet que la majoration pour non-respect du parcours de soins coordonnés ne s’applique pas si le patient est adressé vers le médecin traitant par une sage-femme.
Je ne sais pas si cette précision est utile, dans la mesure où certaines spécialités, notamment la gynécologie, sont déjà en accès direct, sans passer au préalable par le médecin traitant. Pour les autres spécialités, le rôle pivot du médecin traitant me semble important.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle se verrait contrainte d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. J’entends ce que dit Corinne Imbert. Toutefois, ne l’oublions pas, les sages-femmes ont une profession médicale et non pas paramédicale. Par ailleurs, elles sont la première entrée dans le parcours légitime d’une femme en termes de santé sexuelle, et tout particulièrement d’une femme enceinte.
Élisabeth Doineau pointe une faille, un défaut du parcours de soins coordonnés, à savoir la pénalisation des femmes qui entrent dans leur parcours de grossesse par le biais d’une sage-femme.
Pour ma part, je soutiendrai donc l’amendement proposé par Mme Doineau, qui me semble de bon sens.
M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. C’est d’autant plus vrai que, dans certains territoires, il n’y a pas suffisamment de gynécologues-obstétriciens.
Selon moi, il s’agit là d’une très bonne proposition.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 566 et 857 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 30.
Article 31
I. – Après l’article L. 6111-1-5 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 6111-1-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 6111-1-6. – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 6111-1-5, les établissements de santé peuvent mettre en place un dispositif d’hébergement non médicalisé en amont ou en aval d’un séjour hospitalier ou d’une séance de soins pour des patients dont l’état de santé ne nécessite pas d’hébergement hospitalier pour leur prise en charge.
« L’établissement de santé peut déléguer la prestation à un tiers par voie de convention. »
II. – Le b du 2° du II de l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.
III. – Les modalités d’application du présent article, notamment les conditions d’accès et les critères d’éligibilité des patients au dispositif mentionné à l’article L. 6111-1-6 du code de la santé publique, les conditions et les modalités de contribution de l’assurance maladie à son financement, en particulier pour sa mise en place et les conditions de choix et de conventionnement des tiers qui peuvent se voir déléguer par les établissements la réalisation de la prestation d’hébergement, sont fixées par décret en Conseil d’État.
Un cahier des charges fixe les conditions d’accès à ce financement. Son contenu est établi par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation au plus tard le 31 décembre 2022. Ce rapport intègre une évaluation de la prise en charge des publics isolés, notamment dans le cadre de la chirurgie ambulatoire.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, sur l’article.
Mme Élisabeth Doineau. À l’instar des maisons de naissance, dont nous venons de parler, ou de la proposition d’expérimenter l’orientation des patients en amont des urgences par le biais de la téléconsultation, l’article 31 vise à désengorger l’hôpital et à le recentrer sur sa mission de soins médicaux.
Il s’agit de poursuivre le travail amorcé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, qui a lancé l’expérimentation des hôtels hospitaliers. Ce sont 41 sites d’établissements de tous statuts, répartis sur l’ensemble du territoire national, qui ont participé à l’expérimentation dans le cadre d’un appel à projets national.
Les résultats transmis semblent bien répondre aux objectifs et aux enjeux de l’expérimentation. Les hébergements non médicalisés ont bien bénéficié aux patients éloignés géographiquement, dans le cadre de prise en charge en ambulatoire, pour des affections peu sévères.
Le niveau de satisfaction de ces patients est élevé, puisqu’il dépasse 90 %. Leur parcours semble s’être déroulé dans un cadre sécurisé, avec peu de dysfonctionnements signalés.
Aussi l’article 31 tend-il à renforcer le soutien au développement des hôtels hospitaliers, pour rendre ce dispositif plus attractif pour le plus grand nombre d’établissements de santé et plus accessible pour les patients le souhaitant, ce dont je me réjouis.
La montée en puissance du dispositif permettra également de mieux définir son modèle médico-économique à long terme.
Je souhaite cependant appeler l’attention de Mme la ministre, sur le cas de patients en situation de handicap ou en perte d’autonomie, qui ont besoin d’être accompagnés par un aidant pour accomplir leurs démarches.
Dans la perspective d’une société plus inclusive et d’une reconnaissance du rôle crucial des proches aidants, je sollicite votre avis, madame la ministre, sur l’ouverture aux aidants familiaux de l’accès aux hôtels hospitaliers sans reste à charge.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, sur l’article.
Mme Michelle Meunier. L’article 31 entend développer le soutien aux hôtels hospitaliers. Ces structures d’hébergement non médicalisées portent l’ambition de réduire les durées d’hospitalisation, en permettant un séjour avant ou après une intervention programmée à l’hôpital. Ces hôtels hospitaliers sont un appui à la médecine ambulatoire et répondent à la composition de la carte sanitaire.
Si, dorénavant, ce ne sont pas dans les hôpitaux locaux que certains soins sont prodigués, les patients devront se déplacer plus loin, parfois le jour même de leur hospitalisation. Il est donc essentiel de pouvoir compter sur des solutions d’hébergement à proximité des hôpitaux.
Le CHU de Nantes dispose d’ailleurs déjà d’une maison hospitalière, gérée par une association délégataire. On peut aisément penser que les nuitées assurées dans ces hôtels permettront de mieux utiliser les chambres hospitalières et de maîtriser les dépenses de santé.
Toutefois, si nous sommes favorables au développement de ces structures, il nous a semblé nécessaire d’apporter quelques garanties pour ce qui concerne les usagères et les usagers les plus précaires. Ainsi, nous ne pourrions soutenir le recours accru à ces hôtels, s’il s’avérait qu’il introduit une augmentation du reste à charge par rapport à l’hospitalisation classique.
Faute d’avoir été considéré comme recevable, notre amendement visant à permettre la prise en charge du coût de l’hôtellerie hospitalière pour les plus précaires ne pourra pas être examiné. En revanche, nous proposerons, par un autre amendement, que soit évalué le montant de ce reste à charge, notamment pour le public précaire ou isolé.
M. le président. L’amendement n° 1018, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet article sur les hôtels hospitaliers fait suite à un amendement adopté lors du PLFSS 2015, sur l’initiative du ministre de la santé, à une époque où celui-ci était député et appartenait à une autre famille politique.
Plus récemment, le Ségur de la santé a proposé la généralisation de cette expérimentation. À l’époque, on avait vanté une nouvelle manière de réduire la durée d’hospitalisation et de favoriser l’ambulatoire. Aussi séduisants que soient ces arguments, cinq ans plus tard, on ne peut considérer ce dispositif de la même manière.
Bien évidemment, comme tout le monde, je suis sensible au confort des patients et je ne revendique pas le tout-médical. Mais comment ne pas voir que le développement de l’ambulatoire s’accompagne en parallèle d’un large mouvement de fermetures de lits ? Ainsi quelque 100 000 lits ont-ils disparu en vingt ans, mes chers collègues, dont 3 400 en 2019.
Le résultat, nous le connaissons : nos capacités hospitalières explosent et les soignants passent leur temps à chercher des lits disponibles, des lits d’amont et des lits d’aval. Bien souvent, les patients restent des heures sur les brancards.
Ensuite, la saturation des hôpitaux permet de justifier un confinement total de la population, comme nous l’avons vécu au printemps dernier, et comme nous sommes en train de le vivre. Telle est la réalité !
Alors je ne peux m’empêcher de penser que ces hôtels hospitaliers sont une façon d’externaliser nos capacités hospitalières et de les privatiser.
Par ailleurs, je m’interroge sur la pertinence de cette généralisation. Alors que l’objectif quantitatif de ces hôtels hospitaliers avait été fixé à 35 000 séjours et 56 000 nuitées d’hébergement non médicalisées, les résultats sont nettement en deçà, avec seulement 7 800 séjours et 17 500 nuitées, d’après l’annexe 9 du PLFSS.
Bien sûr, j’entends l’argument relatif à la montée en puissance de ce dispositif encore trop méconnu, ainsi que celui sur la satisfaction des patients. Mais quand je constate que les questions de financement ne sont pas réglées, je m’interroge vraiment sur l’aspect prématuré d’une telle généralisation et sur sa dangerosité.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’expérimentation des hôtels hospitaliers permise par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 a néanmoins connu des résultats positifs, avec quelques difficultés, il faut le reconnaître, de montée en charge pour certains hôpitaux.
En effet, ces hôtels hospitaliers améliorent le parcours de soins des patients, en leur offrant un hébergement non médicalisé, en amont ou en aval de leur séjour à l’hôpital. Ils se révèlent également utiles pour des soins itératifs.
Les enquêtes de satisfaction effectuées auprès des patients sont d’ailleurs très positives. Pour les établissements, ces hébergements permettent de rationaliser le parcours de soins et d’offrir, en leur sein, un hébergement médicalisé de meilleure qualité aux patients qui le nécessitent.
Enfin, je le précise, le Gouvernement a engagé des travaux avec les fédérations hospitalières pour proposer un accompagnement financier suffisant permettant aux établissements de déployer les hôtels hospitaliers de façon soutenable.
La commission soutient la généralisation de ce dispositif. Elle a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je partage les remarques de Mme la rapporteure.
Ces hébergements s’inscrivent en effet dans une dynamique de virage ambulatoire, tout en assurant, pour les patients résidant loin des structures de soins, un accès aux services hospitaliers quand ils en ont besoin.
Nous souhaitons généraliser le dispositif des hébergements temporaires non médicalisés, dont l’expérimentation a démontré les bénéfices en termes d’accès aux soins.
Je le souligne, les services d’oncologie ont particulièrement apprécié cette approche. À mes yeux, il s’agit non pas d’un service en moins, mais d’un service en plus. Tout n’est pas fait en vue d’éventuelles diminutions de dépenses ; il s’agit parfois du confort de vie des patients.
S’agissant de la présence des aidants, je suis très sensible à cette question, que vous avez soulevée, madame Meunier. Nous y travaillerons, afin de vous apporter une réponse le plus rapidement possible.
M. le président. L’amendement n° 1019, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il s’agit d’un amendement de repli.
L’alinéa 3 de cet article permet à un hôpital de sous-traiter à un acteur privé la mise en place d’un dispositif d’hébergement non médicalisé pour les soins ambulatoires. Dans un contexte où les établissements de santé ont du mal à assumer leurs dépenses de fonctionnement, cela ouvre la voie à une privatisation rampante du service hospitalier.
Cette mesure s’inscrit également dans la poursuite du virage ambulatoire, à l’origine de la fermeture, dans les hôpitaux, de lits dont nous manquons aujourd’hui pour faire face à la crise sanitaire.
Or le développement des hôtels hospitaliers procède de la même logique, par l’externalisation de capacités hospitalières. Il s’agit en effet de continuer à remplacer les hospitalisations par des séjours en hôtels non médicalisés, afin de réaliser des économies.
Il faut cesser de penser que l’hôpital est une compilation de services que l’on peut décider de privatiser lorsqu’il ne s’agit pas directement de soins.
En réalité, l’hébergement est une composante du soin, car l’hôpital est un tout. Si la qualité des chambres d’hospitalisation est bien moindre à l’hôpital public que dans les hôtels hospitaliers, c’est en raison du désinvestissement financier de l’État depuis de nombreuses années.
Pour toutes ces raisons, nous demandons de limiter le recours à ces hébergements à des opérations simples et à des patients bien identifiés dans un cadre public.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ma chère collègue, votre amendement vise à supprimer la possibilité de recourir à un tiers pour externaliser la prestation d’hébergement hôtelier hors de l’établissement de santé.
Or c’est le principe même de l’hôtel hospitalier : offrir la possibilité aux établissements de santé d’externaliser l’hébergement de patients ne nécessitant pas de prise en charge médicalisée, afin de mieux organiser les parcours de soins. J’ai rappelé précédemment l’intérêt de ce dispositif pour les patients et pour les établissements.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je n’ai rien à ajouter à ce que vient de dire excellemment Mme la rapporteure, si ce n’est que le décret d’application encadrera les conditions d’accueil, qu’il faut bien sûr garantir.
M. le président. L’amendement n° 494 rectifié, présenté par Mme Jasmin, MM. Lurel et Antiste et Mme Conconne, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Après les mots :
en particulier pour sa mise en place
insérer les mots :
, notamment dans les départements ruraux, insulaires ou enclavés
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. Cet amendement vise justement à conforter la pratique des hôtels hospitaliers.
Je vis sur un archipel, celui de la Guadeloupe, qui comprend aussi Marie-Galante, les Saintes et La Désirade ; un service est également fourni à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, comme vous le savez.
Ce genre de structures pourrait permettre, d’une part, de maîtriser les dépenses – cela a été dit par ma collègue Mme Meunier – et, d’autre part, d’anticiper. Très souvent, en effet, il faut recourir à l’Évasan, c’est-à-dire à l’évacuation sanitaire ou médicale, et au Dragon 971 – j’en ai parlé.
Dans un certain nombre de cas, ce sont des urgentistes qui sont obligés de se déplacer pour aller chercher les personnes en attente de soins, pas forcément parce qu’il y avait une urgence, mais tout simplement parce que, faute d’anticipation, les conditions de transfert le nécessitent. Ainsi, depuis la fermeture de la maternité de Marie-Galante, à chaque accouchement dans l’île, il faut que l’hélicoptère aille chercher la parturiente.
Je pense également aux patients qui subissent des chimiothérapies ; certains d’entre eux, faute de solution de rechange, sont obligés, alors qu’ils sont encore malades et vomissent, d’aller tout de suite à l’aéroport et de prendre l’avion pour Saint-Martin ou Saint-Barthélemy.
Ce dispositif est donc une très bonne chose. Nous devons évidemment le codifier comme il se doit, en fonction de l’aménagement du territoire, pour prévenir les dérives. J’ai entendu mes collègues qui se sont précédemment exprimés : il ne s’agit pas de privatiser, mais de rendre un service nécessaire aux populations de territoires enclavés, parfois insulaires, qui n’ont pas de solution de rechange au regard du plateau technique existant sur place.
Il faut donc vraiment que nous puissions travailler pour tenir compte de ces données-là, et non pas procéder n’importe comment et de façon catégorielle.
Nous avons parlé des déserts médicaux ; c’est aussi un vrai sujet. Dans certains endroits, on manque de médecins. Il faut que le cas des patients qui arrivent par bateau ou par avion à leurs rendez-vous médicaux soit pris en compte, ne serait-ce que pour ne pas faire perdre de temps aux médecins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de précision.
Il vise à ce que le décret en Conseil d’État fixant les modalités d’application et de financement du dispositif, en particulier pour sa mise en place, prenne en compte la situation des départements ruraux, insulaires ou enclavés. Rien ne s’oppose, selon moi, à ce que l’on prenne en considération ce type de spécificités.
La commission a donc émis un avis de sagesse sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Cet amendement est satisfait. Il est bien précisé que le financement afférent à cette modalité d’hébergement sera généralisé sur l’ensemble du territoire français, dont les zones éloignées disposant d’une offre de soins limitée. Autrement dit, votre territoire est concerné, madame la sénatrice.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. L’amendement de Mme Jasmin a un mérite : mettre un coup de projecteur sur un rôle de l’hôtel hospitalier dont nous n’avons pas parlé. On a tendance à voir l’hôtel hospitalier comme un simple facteur de raccourcissement de la durée d’hospitalisation.
Toutefois, c’est le domicile que l’hôtel hospitalier, de fait, remplace, en aval de l’hospitalisation, pour des personnes qui vivent dans des territoires éloignés d’une offre de soins : elles ne peuvent tout simplement pas quitter l’hôpital car leur domicile est trop éloigné, et elles ont besoin d’une certaine surveillance. Cette fonction-là de l’hôtel hospitalier est extrêmement importante, particulièrement pour ces territoires.
Au fond, l’hôtel hospitalier, c’est la langue d’Ésope : la meilleure et la pire des choses.
C’est la pire des choses si on le conçoit uniquement comme une source d’économies et de réduction de la durée des séjours hospitaliers. C’est la meilleure des choses, en revanche, s’il représente une transition et une coordination entre la ville et l’hôpital, donc s’il permet, quand c’est possible, de réduire la durée de séjour, parce que personne n’a envie de rester à l’hôpital plus longtemps que nécessaire, mais à la condition qu’en ce lieu s’organise, comme je l’ai dit, la transition entre les soins hospitaliers et les soins de ville.
Alors que cette expérimentation a été lancée en 2015, on peut tout de même regretter le caractère extrêmement faible de son développement : le rapport de juin 2020 porte sur l’existant, c’est-à-dire sur 28 seulement des 41 hôtels hospitaliers dont la création avait été autorisée. Il faut les concevoir comme utiles, à la fois en tant que substituts à l’hôpital quand l’hospitalisation n’est plus nécessaire et en tant qu’appuis au domicile.
De manière générale, penser que le virage ambulatoire est une source majeure d’économies est une erreur : le virage ambulatoire ou la réduction de la durée des séjours nécessite d’investir dans le système de santé et dans la coordination. Si l’on part de l’idée que l’on va s’en servir pour faire des économies, c’est l’échec assuré.
M. le président. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour explication de vote.
Mme Annie Delmont-Koropoulis. Je voterai cet amendement. Des personnes qui, justement, se trouvaient en Guadeloupe m’ont fait part d’expériences de ce type. Je crois donc que cette précision serait bienvenue.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. J’entends Mme la ministre nous dire que cet amendement est satisfait. J’aimerais avoir un peu plus d’explications…
Notre collègue Victoire Jasmin a évoqué les surcoûts inhérents à un territoire comme le nôtre, qui est « archipélique », comme je dis toujours, plutôt qu’« archipélagique ». C’est un archipel : on doit prendre l’avion ou, selon l’urgence, le bateau, par exemple lorsque l’on vient de Marie-Galante. Il faut une régulation des prix pour éviter tout surcoût. En quoi cette exigence est-elle satisfaite ?
Les choses vont mieux, selon moi, en les disant, en les précisant et, s’il le faut, en les codifiant. Si, au cours de la navette, vous vous rendez compte que cette disposition est véritablement satisfaite, le Parlement fera son travail.
Toutefois, il me semble de grande sagesse de voter cet amendement, qui me paraît une disposition de bon sens, tenant compte des réalités géographiques qui sont celles de l’archipel guadeloupéen, mais aussi des autres îles – la Polynésie, qui a certes la compétence en matière de politique de santé, est composée de 118 îles ; et lorsqu’il faut faire des Évasan en Guyane ou en Nouvelle-Calédonie, cela coûte affreusement cher.
Il faudrait une précision, à mon sens, pour que les choses soient claires et non pas sujettes à interprétation. Nous présenterons d’ailleurs tout à l’heure un amendement qui vise à répondre à une situation analogue : sur la base de la simple interprétation d’un décret, on décide de couler tout un secteur, celui des transports sanitaires.
M. le président. L’amendement n° 876 rectifié bis, présenté par Mmes Meunier et Féret, M. Fichet, Mmes Préville et Poumirol, MM. Jeansannetas et Vaugrenard, Mme Van Heghe, M. Gillé, Mme Jasmin, MM. P. Joly, Mérillou, Lurel, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme Artigalas, MM. Antiste et Assouline, Mme Le Houerou et MM. Montaugé et Kerrouche, est ainsi libellé :
Alinéa 7
1° Après le mot :
isolés
insérer les mots :
ou précaires
2° Compléter cet alinéa par les mots :
et évalue les éventuels restes à charge pour les patients par rapport à l’hospitalisation complète
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Il me semblait que cet amendement avait été frappé du sceau de l’irrecevabilité, monsieur le président… Mais je le défends volontiers ! (Sourires.)
Il s’agit d’inclure, dans le rapport, une analyse des éventuels restes à charge pour les personnes isolées et précaires, par rapport à la couverture correspondant à une hospitalisation complète.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Même si ce sujet est important, je ne suis pas certaine, compte tenu de l’absence de normativité des demandes de rapport, qu’il soit utile d’introduire cette précision dans la loi.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michelle Meunier. Je le retire, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 876 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’article 31, modifié.
(L’article 31 est adopté.)
Article additionnel après l’article 31
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 559 est présenté par M. Lurel, Mmes Jasmin et Conconne, MM. Antiste et Assouline, Mme G. Jourda et M. P. Joly.
L’amendement n° 809 rectifié est présenté par MM. Théophile, Iacovelli, Rohfritsch et Buis, Mme Duranton, M. Dennemont, Mme Schillinger, M. Patient et Mme Havet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 31
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 322-5 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En Guadeloupe, les frais d’un transport effectué par une entreprise de transport de personnes à mobilité réduite ne peuvent donner lieu à remboursement que si cette entreprise a préalablement conclu une convention avec l’organisme local d’assurance maladie. Cette convention, conclue pour une durée au plus égale à cinq ans, conforme à une convention type établie par décision du directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie après avis des organisations professionnelles régionales les plus représentatives du secteur, détermine, les tarifs de responsabilité et fixe les conditions dans lesquelles l’assuré peut être dispensé de l’avance des frais. Les modalités d’application du présent alinéa sont fixées par décret en Conseil d’État. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l’amendement n° 559.
M. Victorin Lurel. Voilà une affaire importante et délicate.
Mes chers collègues, vous noterez que ce sont les sénateurs des outre-mer, en particulier de la Martinique et de la Guadeloupe, qui ont signé cet amendement.
Il s’agit en effet d’une spécificité de la Guadeloupe : il y a une vingtaine d’années, la caisse générale de sécurité sociale, la CGSS, avait décidé, pour faire face à la pénurie d’ambulances et de taxis, de passer convention avec des transporteurs privés, qui sont équipés selon des modalités imposées par les textes, pour le transport des personnes à mobilité réduite, le TPMR.
Chaque année, ces contrats individuels étaient renouvelés par tacite reconduction. Or, depuis quelques mois, le directeur général de la CGSS de la Guadeloupe a décidé d’euthanasier toute une filière, une quarantaine d’entreprises, près de 350 salariés. Et jusqu’ici, l’État ne bouge pas.
Quatre jours avant sa nomination, j’ai appelé le directeur de cabinet du Premier ministre, M. Revel, qui m’a répondu que le cabinet s’occuperait de cette affaire et trouverait une solution amiable. Ces jours-ci, un décret est signé – je vous épargne le numéro ! Le directeur général de la CGSS de la Guadeloupe décide, lui, que ce problème n’existe pas, ou plutôt que le décret lui donne le droit de ne pas prendre en compte la vie des entreprises.
Je m’explique en deux mots : l’un de mes amis possédait une entreprise de transports de personnes à mobilité réduite. Il a vendu son fonds de commerce, mais l’entreprise a gardé sa raison sociale et l’équipe est restée la même : seul le gérant a changé.
Or le directeur général de la caisse de sécurité sociale a décidé que l’on ne pouvait pas céder le fonds de commerce, donc que l’entreprise devait mourir. C’est le problème qui, historiquement, se posait en Guadeloupe aux transporteurs de personnes à mobilité réduite : au contraire des taximen, ils ne pouvaient pas vendre leur fonds de commerce.
Or, l’adoption de cet amendement et la pérennisation du secteur des entreprises de transport de personnes à mobilité réduite, pourquoi pas pour cinq ans – nous verrons –, ne changeraient rien à la situation actuelle des ambulanciers et des taximen, du point de vue des coûts notamment – depuis 2015, me semble-t-il, les tarifs n’ont jamais été revalorisés.
Pour couler des entreprises, il faut une base juridique ! Notre question fait l’objet d’un décret, mais le texte en est interprété unilatéralement par ce directeur de la caisse de sécurité sociale.
Voilà l’objet de cet amendement : régulariser une situation et sauver 350 emplois.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 809 rectifié.
M. Dominique Théophile. Mes chers collègues, retenez bien que 350 emplois sont en jeu et que la Guadeloupe est le deuxième ou troisième département le plus âgé de France.
Cette activité fonctionne depuis près d’une dizaine d’années ; il lui faut un cadre juridique pour pouvoir perdurer. À défaut, 350 personnes perdront leur emploi – et, en Guadeloupe, il faut multiplier ce chiffre par quatre ou cinq pour obtenir le nombre de personnes affectées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Le code de la sécurité sociale encadre déjà les relations entre les prestataires de transports sanitaires et les organismes d’assurance maladie.
Vous indiquez d’ailleurs, dans l’objet de votre amendement, que ces entreprises de transport de personnes à mobilité réduite sont déjà soumises à des conventions avec la caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe.
Par conséquent, il ne m’apparaît pas opportun de créer dans la loi un régime dérogatoire et spécifique à la Guadeloupe pour ces entreprises.
À défaut d’un retrait, l’avis de la commission sur ces amendements identiques serait donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Je n’ai pas entendu l’avis de Mme la ministre !
Madame la rapporteure, le régime ainsi créé n’était pas dérogatoire, puisque, pendant près de vingt ans, il n’y avait pas de système vraiment officiel, mais une simple convention, conclue sur l’initiative de la caisse générale de sécurité sociale, renouvelée annuellement.
Curieusement, on décide désormais que l’on ne peut pas vendre le fonds de commerce ; on viole donc cette fois, si j’ose dire, le code de commerce. Et cela ne pose aucun problème budgétaire…
Alors que la DEAL, la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement, a donné l’autorisation de circuler, alors que toutes les autorisations préalables ont été délivrées, comment est-il possible que le directeur de la CGSS décide de ne pas rembourser une entreprise au motif que le gérant a changé ?
Quant à ce que dit Mme la rapporteure, je ne suis pas d’accord : elle interprète les textes, sachant que le décret d’application de la loi n’a pas précisé les choses. Nous demandons, nous, la régularisation. S’il le faut, au cours de la navette, vous rectifierez. Mais il est certain que l’on ne peut pas laisser faire.
Je conclus sur un point : la presse vient d’annoncer que Bridgestone allait fermer son site de Béthune. L’État, dit-on, n’a rien pu faire pour sauver 860 emplois ! Et ici, vous mettriez en cause, dans un petit département qui a 25 % de chômeurs et où 57 % des jeunes de moins de 25 ans ne travaillent pas, 350 salariés et, comme le dit Dominique Théophile, leurs familles, pour des motifs fallacieux ? Le vécu, la réalité, c’est que, par une décision unilatérale et personnelle d’un directeur, on va euthanasier une filière, la filière TPMR, en Guadeloupe !
Je demande à nos collègues de nous aider sur ce sujet, et de voter ces deux amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 559 et 809 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 31 bis (nouveau)
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur la mise en place de la nouvelle tarification des transports bariatriques, dans le cadre du renouvellement de la convention nationale destinée à organiser les rapports entre les entreprises de transports sanitaires privées et les caisses d’assurance maladie, telle que prévue à l’article L. 322-5-2 du code de la sécurité sociale, et devant aboutir à des conclusions au plus tard en décembre 2020. Ce rapport participe de la bonne information du Parlement en ce qui concerne l’égalité d’accès aux soins pour les personnes obèses.
M. le président. L’amendement n° 860 rectifié, présenté par MM. Lévrier, Iacovelli, Théophile, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
I. – Première phrase
Supprimer les mots :
dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi
et les mots :
et devant aboutir à des conclusions au plus tard en décembre 2020
II. – Après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Ce rapport est remis dans un délai d’un an après l’entrée en vigueur de la nouvelle tarification.
La parole est à M. Martin Lévrier.
M. Martin Lévrier. Le rapport demandé dans cet article permettra d’éclairer utilement le Parlement sur le sujet des transports bariatriques.
Toutefois, afin de s’assurer de la montée en charge de la nouvelle tarification, nous proposons, par cet amendement, d’adapter les délais de production de ce rapport. Celui-ci serait ainsi remis dans un délai d’un an après l’entrée en vigueur de la nouvelle tarification, afin que ses auteurs puissent s’appuyer sur des données effectivement disponibles.
La qualité des données étant cruciale pour la qualité du rapport, il semble essentiel de modifier ainsi les délais.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 31 bis, modifié.
(L’article 31 bis est adopté.)
Article 32
La participation de l’assuré mentionnée au premier alinéa du I de l’article L. 160-13 du code de la sécurité sociale relative aux actes de téléconsultation est supprimée jusqu’au 31 décembre 2021.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, sur l’article.
Mme Michelle Meunier. Nous allons parler, à l’article 32, des téléconsultations. La mise en place de la télémédecine ne date pas du confinement. L’assurance maladie en rembourse les actes depuis 2018, au même titre qu’une consultation en cabinet médical, avec ticket modérateur de 30 % pris en charge par les complémentaires.
Néanmoins, c’est bien le confinement qui en a permis l’essor. Ainsi, entre février et avril, le nombre de téléconsultations a été multiplié par plus de cent. Lors du premier confinement, ces actes ont été pris en charge intégralement par la sécurité sociale. C’est probablement le confinement plus que la prise en charge intégrale qui aura permis cet essor, n’en doutons pas.
L’évidence est là : la téléconsultation fait désormais partie des nouvelles pratiques médicales. Pour autant, s’il faut s’en réjouir, la télémédecine ne doit pas devenir l’alpha et l’oméga du suivi de santé de demain.
En effet, le meilleur écran et la meilleure « appli » qui soient ne remplaceront jamais le contact humain, lorsque de mauvais résultats d’analyse doivent être annoncés, par exemple. De même, une bonne télémédecine doit venir compléter la médecine « palpatrice », de chair et d’os, qui constitue la base du soin pratiqué par le médecin traitant, et doit s’insérer dans le cadre du parcours coordonné de soins.
La téléconsultation est aussi un allié des territoires, à condition que les infrastructures numériques soient déployées. Elle peut pallier l’absence de médecins de campagne, et elle permet à tout patient d’avoir recours à la téléexpertise médicale sans avoir à se déplacer.
Enfin, dernière réserve, n’oublions pas qu’un fossé numérique éloigne bon nombre de patients et de patientes du recours à cette médecine. Le Défenseur des droits nous a alertés sur les 13 millions de nos concitoyens qui ne maîtrisent pas les usages numériques. Envoi de documents, forfait téléphonique avec data : restons attentifs à ce qui permet ces consultations et levons les éventuels freins.
Je soutiendrai donc l’initiative présentée par notre rapporteure visant à limiter la prise en charge intégrale aux téléconsultations réalisées dans le parcours de soins, avec une exception pour les consultations rendues nécessaires par la covid-19, qui doivent, elles, être intégralement remboursées, même hors parcours.
M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 450 rectifié bis, présenté par MM. Henno et P. Martin, Mme Dindar, MM. Kern, Janssens et Moga, Mme Guidez, M. Levi, Mme Vermeillet, MM. Laugier, S. Demilly, Delahaye, Hingray, Lafon, Le Nay, Cazabonne et Chauvet et Mme Morin-Desailly, est ainsi libellé :
Après le mot :
téléconsultation
insérer les mots :
conformes au parcours mentionné au cinquième alinéa de l’article L. 162-5-3 du même code ou relatifs à l’épidémie de la covid
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Il s’agit de la régulation de la téléconsultation, dont le développement constitue bien une priorité : elle permet aux Français de disposer d’une offre diversifiée d’accès aux soins.
La téléconsultation a fait, ces derniers mois, la démonstration de sa pertinence, en rendant possibles, en pleine crise pandémique, des consultations en lien avec la covid-19, mais aussi, dans une moindre mesure, des consultations nécessaires aux parcours de soins classiques ou au suivi des maladies chroniques.
Tout prête à croire – cela a été dit – que l’essor de la téléconsultation, à l’usage et l’expérience aidant, sera durable. La mesure proposée, à savoir la prise en charge à 100 % des téléconsultations indépendamment de leur nature, ne nous semble cependant pas totalement pertinente. Elle revient à considérer que cette forme de consultation pourrait se soustraire à la logique du parcours de soins, qui responsabilise le patient en l’invitant à des pratiques vertueuses.
Ainsi le parcours de soins coordonné incite-t-il financièrement les patients à éviter le nomadisme médical et à ne pas multiplier les téléconsultations pour une même pathologie. Rien ne justifie aujourd’hui, ni d’un point de vue sanitaire ni du point de vue des finances publiques, de lever le principe du parcours de soins pour toutes les téléconsultations.
Au contraire, la dématérialisation inhérente à ce type de consultations, possibles depuis chez soi et par le biais de plusieurs opérateurs différents, peut inciter le patient à multiplier les téléconsultations, notamment pour se rassurer sur le diagnostic proposé.
Il est donc nécessaire de considérer que la téléconsultation est une consultation à part entière, qu’elle a toute sa place dans le parcours de soins et que, en conséquence, elle est soumise aux mêmes règles de responsabilisation des patients.
Tel est l’objet de cet amendement, qui vise à rappeler que la participation de l’assuré est liée au respect du parcours de soins et à préciser que les téléconsultations en lien avec la covid-19 sont intégralement prises en charge par la sécurité sociale.
M. le président. L’amendement n° 756 rectifié, présenté par Mme Meunier, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après le mot :
téléconsultation
insérer les mots :
dans le cadre d’un parcours de soins coordonnés, décrit à L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale, ou ceux liés à l’épidémie de covid-19
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Durant le premier confinement, le Gouvernement a fait le choix que la téléconsultation, qui est un acte de médecine, soit prise en charge en totalité par l’assurance maladie.
Cet article prévoit une prolongation de l’application ce dispositif jusqu’au 31 décembre 2021. Nous soutenons cette démarche ; elle est adaptée à l’incertitude sanitaire, qui se poursuit. Nous devons favoriser le recours à la téléconsultation pour ne pas retarder des diagnostics ni reporter des soins.
Cependant, tel qu’il est rédigé, cet article manque d’encadrement ; son application pourrait conduire à des pratiques dégradées de la téléconsultation, éloignées du dialogue habituel entre les patients et leurs médecins traitants.
C’est la raison pour laquelle le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain propose, via cet amendement, que cette prise en charge à 100 % ne soit accordée qu’aux actes de consultation intervenant dans le cadre du parcours de soins coordonné.
Cet encadrement, nous le motivons essentiellement par un souci d’égalité de traitement avec les consultations effectuées en cabinet. Il convient en outre de conserver les garde-fous que les parcours de soins instaurent contre certains comportements marginaux – tendance au nomadisme médical ou à la multiplication des consultations –, qui ne sont pas souhaitables pour la maîtrise des dépenses de santé.
En revanche, compte tenu du contexte pandémique lié à la covid-19, notre groupe précise que les téléconsultations effectuées hors parcours de soins, mais en rapport avec l’épidémie seront, elles, bien prises en charge à 100 %.
M. le président. L’amendement n° 167 rectifié, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
31 décembre 2021
par les mots :
30 juin 2021, pour les actes s’inscrivant dans un parcours de soins coordonné en application de l’article L. 162-5-3 du même code et ceux liés à l’épidémie de la covid-19
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise, d’une part, à réduire la durée de la prise en charge à 100 % des téléconsultations à six mois au lieu d’un an, afin d’en réexaminer l’utilité selon l’évolution de la situation sanitaire, et, d’autre part, à s’assurer du lien essentiel à préserver avec la logique du parcours de soins, afin de garantir la qualité de la pratique, dans le cadre d’organisations territoriales coordonnées.
J’ajoute, comme je l’ai indiqué en commission, que j’ai rectifié l’amendement pour prendre en compte explicitement les actes liés à la covid-19, puisque c’est le contexte sanitaire qui justifie cette mesure dérogatoire.
La téléconsultation, quel que soit son intérêt, notamment dans le contexte sanitaire actuel, ne peut remplacer le contact physique intrinsèque à l’exercice de la médecine – notre collègue Mme Meunier vient de le rappeler.
La prise en charge à 100 % répond par ailleurs davantage à un objectif pratique qu’à une logique de santé publique : alors que cette mesure résulte d’un déploiement insuffisant des outils permettant la facturation des actes à distance, l’étude d’impact ne s’appuie sur aucune perspective quant à la diffusion de ces outils auprès des professionnels de santé.
Cela justifie selon moi de circonscrire la portée de cette mesure dérogatoire.
M. le président. Les cinq amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 97 rectifié bis est présenté par M. Pellevat, Mme Gruny, M. D. Laurent, Mme Micouleau, MM. Segouin, Panunzi et Saury, Mme Deromedi, MM. Karoutchi, Brisson et Charon, Mmes Raimond-Pavero et F. Gerbaud, M. Le Gleut, Mme Dumont, M. Lefèvre, Mme Thomas, MM. Joyandet, Courtial, B. Fournier et Rapin, Mme Dumas, MM. Bouchet, Cuypers, Frassa et Grosperrin, Mme Berthet, M. Bouloux, Mmes Paoli-Gagin, Canayer et Lavarde, M. Genet, Mme Di Folco et MM. Pointereau et Gremillet.
L’amendement n° 263 rectifié quinquies est présenté par MM. Milon, Grand, Burgoa, Calvet, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Retailleau, Mme L. Darcos, MM. Bonne, Sol et Piednoir, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et Babary.
L’amendement n° 507 rectifié est présenté par M. Canevet, Mme N. Goulet, MM. Le Nay, Delahaye et Cadic, Mme Vermeillet et MM. Kern, Moga, Détraigne, P. Martin, Longeot, Cazabonne et Capo-Canellas.
L’amendement n° 525 rectifié quinquies est présenté par MM. Lévrier, Théophile et Iacovelli, Mme Schillinger, MM. Guerriau, Buis, Bargeton et Rambaud, Mme Havet et MM. Yung, Patient, Allizard et Hassani.
L’amendement n° 680 rectifié ter est présenté par Mme V. Boyer, MM. Boré, Le Rudulier et Daubresse, Mme Joseph, MM. J.M. Boyer, Anglars et Houpert et Mme Drexler.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par les mots :
conformément au cinquième alinéa de l’article L. 162-5-3 du même code, ainsi qu’à ceux liés à l’épidémie de la covid-19
La parole est à Mme Pascale Gruny, pour présenter l’amendement n° 97 rectifié bis.
Mme Pascale Gruny. Dans sa rédaction actuelle, l’article 32 ouvre la possibilité d’une prise en charge à 100 % de l’ensemble des téléconsultations par l’assurance maladie, dans le parcours de soins et hors de ce parcours, jusqu’au 31 décembre 2021.
Une telle possibilité constituerait une dérogation aux conditions conventionnelles, qui prévoient que la prise en charge à 100 % par l’assurance maladie est conditionnée notamment au respect du parcours de soins, pour les consultations comme pour les téléconsultations.
En l’état, l’article fait ainsi peser un risque important de dérégulation du secteur de la téléconsultation et d’augmentation des dépenses de santé afférentes. En effet, la prise en charge à 100 % de l’ensemble des téléconsultations par l’assurance maladie risque d’entraîner une déresponsabilisation des patients, ainsi que le développement de pratiques opportunistes de la part de certains professionnels de santé.
Par ailleurs, elle aura pour effet de fragiliser le modèle économique des acteurs de la téléconsultation, qui ont avant tout besoin d’un cadre réglementaire et financier stable.
Pour éviter le risque inhérent à une telle prise en charge, nous proposons, par le présent amendement, de clarifier l’article 32 en précisant que les modalités de remboursement des téléconsultations par l’assurance maladie seront identiques à celles qui président aux consultations en cabinet.
La prise en charge à 100 % des téléconsultations par l’assurance maladie ne s’appliquera donc que pour celles qui sont effectuées dans le cadre du parcours de soins et pour celles qui sont liées à la covid-19.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 263 rectifié quinquies.
M. Alain Milon. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 507 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à M. Martin Lévrier, pour présenter l’amendement n° 525 rectifié quinquies.
M. Martin Lévrier. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour présenter l’amendement n° 680 rectifié ter.
Mme Valérie Boyer. Cet amendement a été excellemment défendu par ma collègue Pascale Gruny. Il faut vraiment préserver le parcours de soins et faire en sorte que la téléconsultation soit considérée comme une véritable consultation, qui, à ce titre, n’a pas à être exclue dudit parcours.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Mes chers collègues, je vous propose de vous rallier à l’amendement n° 167 rectifié de la commission, qui satisfait vos demandes sur l’intégration de ces actes dans un parcours de soins coordonné tout en ciblant les actes liés à l’épidémie de covid-19.
Cet amendement vise de surcroît à restreindre la durée de la dérogation.
Je demande donc aux auteurs des amendements nos 450 rectifié bis et 756 rectifié et des amendements identiques nos 97 rectifié bis, 263 rectifié quinquies, 525 rectifié quinquies et 680 rectifié ter de bien vouloir les retirer, au profit de l’amendement n° 167 rectifié. À défaut, l’avis de la commission serait défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. L’article 32 du présent PLFSS ne déroge pas aux conditions conventionnelles de réalisation et de prise en charge des téléconsultations.
Le respect du parcours de soins coordonné est l’une des conditions fixées par les conventions. Les téléconsultations qui seraient réalisées hors parcours ne seront donc pas prises en charge intégralement ; autrement dit, mesdames, messieurs les sénateurs, vos amendements sont satisfaits sur ce point.
Quant aux téléconsultations en lien avec la covid-19, c’est-à-dire celles qui sont réalisées pour des patients présentant des symptômes de l’infection ou reconnus atteints de la covid-19, elles peuvent être prises en charge à 100 % jusqu’au 31 décembre 2020, même si le parcours de soins coordonné n’est pas respecté. Cette dérogation prévue par décret pourra bien sûr être prolongée en fonction de l’évolution du contexte sanitaire.
Je partage votre vision de la téléconsultation. Elle a rendu de grands services pendant cette crise sanitaire, notamment sur les territoires touchés par la désertification médicale.
Pour autant, le lien humain doit être préservé. Tel est bien le sens de cet article 32, qui, donc, n’est pas dérogatoire.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Un mot pour dire que ce service de téléconsultation, qui est, me semble-t-il, une voie d’avenir, pourrait être adossé aux services de régulation des urgences.
On pourrait imaginer un numéro de téléphone permettant d’accéder à une téléconsultation en cas d’urgence. Les services d’urgence seraient ainsi moins fréquentés par les patients, grâce à une éducation préventive rendue possible par l’utilisation de ces outils modernes. Assortis d’une tarification adaptée, ces outils pourraient permettre de résorber un certain nombre de difficultés bien connues.
Songez-y, madame la ministre, lorsque vous travaillerez sur l’évolution de la prise en charge de la santé.
Demande de priorité
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, pour la clarté de nos débats et en application de notre règlement, la commission demande le vote par priorité de son amendement n° 167 rectifié présenté par Mme Imbert.
M. le président. Je suis donc saisi, par la commission, d’une demande de vote par priorité de l’amendement n° 167 rectifié.
Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, la priorité est de droit lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La priorité est ordonnée.
Je mets aux voix l’amendement n° 167 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 450 rectifié bis et 756 rectifié, ainsi que les amendements identiques nos 97 rectifié bis, 263 rectifié quinquies, 525 rectifié quinquies et 680 rectifié ter n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 757 rectifié, présenté par Mme Meunier, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après le mot :
téléconsultation
insérer les mots :
, à condition que les tarifs pratiqués relèvent des tarifs fixés par la convention médicale,
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Nous proposons de limiter la prise en charge intégrale aux actes de téléconsultation réalisés par des praticiens conventionnés du secteur 1.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Les conditions de prise en charge de la téléconsultation sont définies par l’avenant n° 6 à la convention médicale : ces actes sont rémunérés à hauteur des tarifs des consultations en présentiel.
Si je comprends et partage la volonté de mieux encadrer la prise en charge dérogatoire des téléconsultations prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale, il paraît souhaitable de s’en tenir à ces stipulations, résultant d’un accord conventionnel.
La commission demande le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 931, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après le mot :
supprimée
insérer les mots :
pour les deux premières téléconsultations effectuées par l’assuré
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Si la télémédecine a montré toute son utilité pendant la crise sanitaire, elle ne doit pas se substituer aux consultations en présentiel.
Nous tenons à alerter sur le fait que la dématérialisation de la consultation médicale altère – ou, pour le moins, transforme – le contact humain entre les praticiens et les patients. Ces rapports sont primordiaux : ils ne peuvent être remplacés par la technologie. De plus, certains examens médicaux ne peuvent pas être réalisés à distance.
Alors que, pour être efficace, la télémédecine doit rester complémentaire d’un vrai suivi médical, une tendance au tout-numérique pourrait, d’ailleurs bien au-delà du champ de la santé, se pérenniser à l’issue de la crise sanitaire que nous traversons, ou plutôt, à la faveur de celle-ci. D’aucuns rêvent d’une société sans contact, qui limiterait les relations, tant individuelles que collectives, y compris dans les services publics…
Cet amendement vise à poursuivre l’utilisation de la télémédecine, sans la généraliser. Il s’agit de permettre aux assurés de bénéficier de téléconsultations, tout en limitant le recours à cette modalité de la médecine – hors covid, bien entendu. Le dispositif serait valable jusqu’au 31 décembre 2021.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La condition consistant à rester dans le parcours de soins coordonné répond à votre préoccupation d’éviter des dérives. Vous êtes donc partiellement satisfaite, ma chère collègue.
La commission demande le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Poncet Monge, l’amendement n° 931 est-il maintenu ?
Mme Raymonde Poncet Monge. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 931 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 630 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 123 rectifié quinquies, présenté par Mme Raimond-Pavero, MM. D. Laurent et Pellevat, Mme Deromedi, MM. Courtial, Lefèvre, Saury et Paccaud, Mme Dumas, MM. Sautarel et Calvet, Mme Thomas, M. Cuypers, Mme Lherbier, MM. Babary et Bouloux, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Savin, Bonhomme, Piednoir et H. Leroy, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Au plus tard dix-huit mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les conséquences, pour les comptes sociaux, du présent article.
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. L’article 32, en permettant une prise en charge à 100 % par l’assurance maladie de l’ensemble des téléconsultations jusqu’au 31 décembre 2022, comporte des implications budgétaires qui nécessitent une vigilance, afin d’éviter tout débordement financier.
Cet amendement, dont Mme Raimond-Pavero est la première signataire, vise à faire établir un bilan d’étape – c’est l’autre nom pour « rapport »… – qui rende compte du dispositif au bout d’un an.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Sur cette demande de rapport, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je salue l’effort de sémantique (Sourires.), mais mon avis est défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 123 rectifié quinquies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 91 rectifié ter est présenté par MM. Bonne, Bonhomme, Brisson et Charon, Mme Chauvin, M. Cuypers, Mme Dumas, MM. B. Fournier et Gremillet, Mmes Gruny et Joseph, MM. Laménie et D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, Moga, de Nicolaÿ, Paccaud, Panunzi, Paul et Pellevat, Mme Raimond-Pavero, M. Rapin, Mme Richer, M. Somon, Mmes Thomas et Di Folco et M. H. Leroy.
L’amendement n° 267 rectifié quinquies est présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer et Deromedi, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. Mandelli, Sautarel et Piednoir, Mmes Borchio Fontimp et Delmont-Koropoulis et M. Regnard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le 1° du I de l’article L. 162-14-1 est ainsi modifié :
a) La quatrième phrase est complétée par les mots : « , sauf lorsque l’acte de téléconsultation est réalisé au titre d’un second avis médical tel que prévu à l’article L. 1111-4-1 dudit code et auprès de patients atteints d’une ou des pathologies listées à l’arrêté mentionné au même article L. 1111-4-1 » ;
b) Après la quatrième phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée : « Lorsque l’acte de téléconsultation est délivré dans le cadre d’un second avis médical, sa prise en charge est subordonnée à la transmission au professionnel de santé délivrant l’acte de téléconsultation des documents médicaux lui permettant de prendre connaissance de l’état de santé du patient. » ;
c) La cinquième phrase est complétée par les mots : « , sauf lorsque l’acte de télésoin est effectué auprès de patients atteints d’une ou plusieurs des pathologies listées par arrêté à l’arrêté mentionné à l’article L. 1111-4-1 du même code et à condition que l’auxiliaire médical ait pu prendre connaissance de l’état de santé du patient en consultant les documents médicaux qui lui ont été transmis » ;
2° La deuxième phrase du 15° de l’article L. 162-16-1 est complétée par les mots : « , sauf lorsque l’acte de télésoin est effectué auprès de patients atteints d’une ou plusieurs des pathologies listées par arrêté à l’arrêté mentionné à l’article L. 1111-4-1 dudit code et à condition que le pharmacien ait pu prendre connaissance de l’état de santé du patient en consultant les documents médicaux qui lui ont été transmis ».
La parole est à Mme Christine Lavarde, pour présenter l’amendement n° 91 rectifié ter.
Mme Christine Lavarde. Cet amendement, déposé par Bernard Bonne, a pour objet les conditions de remboursement des téléconsultations.
Il s’agit de déroger à l’obligation de vidéotransmission, qui peut paraître inadaptée dans certains cas, pour les seconds avis médicaux dans le contexte de pathologies graves, en prévoyant que la transmission et l’analyse approfondie du dossier médical s’y substituent.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 267 rectifié quinquies.
M. Alain Milon. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La condition de vidéotransmission pour la prise en charge des actes de téléconsultation ou de télésoin constitue, en effet, un obstacle dans certaines situations.
C’est d’ailleurs ce qui a conduit le Gouvernement à y déroger face à l’épidémie de covid-19, en autorisant la consultation par téléphone dans certaines situations, notamment pour des patients âgés. Je ne vois pas d’obstacle à prolonger ces modalités dans les cas peu nombreux visés par les amendements.
La commission émet donc un avis favorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 91 rectifié ter et 267 rectifié quinquies.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 836 rectifié, présenté par M. Levi, Mme Tetuanui, M. Delahaye, Mmes N. Goulet et Vérien, M. Kern, Mme Vermeillet, M. Moga, Mme Gatel, MM. Détraigne, P. Martin et Lafon, Mme Férat, M. Capo-Canellas, Mme Billon, MM. Hingray et Le Nay, Mmes Guidez et de La Provôté et M. Chauvet, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 5° du I de l’article 83 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé est ainsi rétabli :
« 5° À compter de l’échéance mentionnée au présent I, les professionnels réalisant des actes de téléconsultations doivent appliquer le tiers payant aux bénéficiaires de l’assurance maladie sur la part des dépenses prise en charge par l’assurance maladie obligatoire. »
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Face à la désertification rurale, la télémédecine est une partie de la solution, mais une partie seulement.
C’est pourquoi notre collègue Levi propose que le tiers payant s’applique aux téléconsultations au plus vite et de façon définitive, et non uniquement, comme il est prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, jusqu’au 31 décembre 2021. Il s’agit d’encourager les patients à y avoir recours, notamment les plus précaires, qui pourraient être contraints d’y renoncer pour des raisons financières.
De fait, la situation de précarité de nombre de nos concitoyens, qui va malheureusement s’amplifier avec la crise économique à venir, risque d’en conduire certains à renoncer à des consultations, au risque de voir leur pathologie s’aggraver.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La loi de 2016 de modernisation de notre système de santé permet déjà l’application du tiers payant par les professionnels de santé sur les dépenses relevant de l’assurance maladie obligatoire.
Le présent amendement tend à le généraliser pour les professionnels réalisant des téléconsultations ; contrairement à ce qu’indique son objet, il ne vise pas le tiers payant intégral, qui couvre aussi la part prise en charge par les organismes complémentaires.
Notre commission maintient sa préférence pour une possibilité, plutôt qu’une obligation imposée aux professionnels de ville. En pratique, pour les téléconsultations, le tiers payant est plus commode, et la prise en charge à 100 % en simplifie l’application, sans reste à charge pour les patients.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Goulet, l’amendement n° 836 rectifié est-il maintenu ?
Mme Nathalie Goulet. L’explication est claire. Je retire donc l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 836 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 32, modifié.
(L’article 32 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 32
M. le président. L’amendement n° 343 rectifié bis, présenté par Mme Doineau, M. Bonneau, Mme Vérien, MM. Levi et Détraigne, Mmes Gatel et N. Goulet, M. Laugier, Mmes Férat et Dindar, M. Canevet, Mme Vermeillet, M. Kern, Mmes Loisier et Tetuanui, M. Duffourg, Mme Saint-Pé, MM. Louault, Cazabonne et S. Demilly, Mme de La Provôté, MM. Delcros et Longeot, Mmes Jacquemet, Billon et C. Fournier et MM. P. Martin, Cadic, Capo-Canellas, Poadja, Le Nay et Mizzon, est ainsi libellé :
Après l’article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le 1° de l’article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Aux consultations psychiatriques réalisées en télémédecine ; ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. À titre temporaire, la prise en charge intégrale des actes réalisés en téléconsultation pour l’ensemble des assurés est une mesure bienvenue dans la situation que nous traversons.
Toutefois, elle se révèle insuffisante pour la psychiatrie, spécialité durablement sinistrée. En effet, la prise en charge à 100 % ne dispense pas le patient de respecter le parcours de soins, notamment le critère de territorialité, pour être remboursé de sa téléconsultation.
Cet amendement vise à répondre à des situations de véritable détresse. La psychiatrie est une spécialité très inégalement répartie sur le territoire : la densité des psychiatres libéraux varie de 1 pour 100 000 habitants en Haute-Marne, dans le Cantal ou dans la Meuse à 59 dans le bassin parisien… De ce fait, le délai de consultation dépasse parfois neuf mois dans certains territoires !
Dans ces conditions, il importe de compléter l’article 32 du projet de loi de financement de la sécurité sociale par une mesure spécifique en faveur de la téléconsultation de psychiatrie, dérogatoire à la logique de l’organisation territoriale. Je puis témoigner que, dans les situations de détresse dont je parle, une téléconsultation peut permettre de suivre avec un malade son évolution !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Alors que des discussions conventionnelles sont engagées entre les syndicats de médecins et l’assurance maladie sur la télémédecine, il me paraît préférable de renvoyer ces sujets aux discussions en cours. De manière générale, je considère que la logique d’organisation territoriale coordonnée devrait primer.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Madame la sénatrice, je partage votre constat que les conditions actuellement prévues pour le remboursement des téléconsultations dans certaines spécialités peuvent, notamment dans certaines zones, poser des difficultés.
C’est précisément pour cela que nous avons demandé à l’assurance maladie d’engager des négociations avec l’ensemble des médecins libéraux, y compris les psychiatres. Ces négociations étant en cours, je considère que votre amendement est satisfait.
M. le président. Madame Doineau, l’amendement n° 343 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Élisabeth Doineau. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 343 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 98 rectifié bis est présenté par MM. Pellevat, Sol et D. Laurent, Mme Micouleau, MM. Paccaud, Segouin, Panunzi, Bascher et Saury, Mme Deromedi, M. Karoutchi, Mme Procaccia, MM. Brisson et Charon, Mme Raimond-Pavero, M. Le Gleut, Mme Dumont, M. Lefèvre, Mme Thomas, MM. Joyandet, Courtial, Cuypers, Frassa et Grosperrin, Mme Berthet, M. Bouloux, Mmes Canayer et Lavarde, MM. Genet et Rapin, Mmes Di Folco et de Cidrac et M. Gremillet.
L’amendement n° 243 rectifié bis est présenté par MM. Guerriau et Chasseing, Mme Mélot, MM. Capus, Decool, Lagourgue, A. Marc, Médevielle et Menonville, Mme Paoli-Gagin et MM. Verzelen et Wattebled.
L’amendement n° 264 rectifié quinquies est présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer et Dumas, MM. Grand, Burgoa, Calvet, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, M. Sautarel, Mme L. Darcos, MM. J.B. Blanc et Bonne, Mme F. Gerbaud, MM. Piednoir et Savary, Mmes Borchio Fontimp et Delmont-Koropoulis et MM. Regnard, Babary et B. Fournier.
L’amendement n° 508 rectifié est présenté par M. Canevet, Mme N. Goulet, MM. Le Nay, Delahaye et Cadic, Mme Vermeillet et MM. Kern, Moga, Détraigne, P. Martin, Longeot, Cazabonne et Capo-Canellas.
L’amendement n° 634 est présenté par M. Bonhomme.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 1° du I de l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …) Soutenir le développement de la téléconsultation en amont de la consultation d’une structure d’urgence autorisée ; ».
La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l’amendement n° 98 rectifié bis.
Mme Jacky Deromedi. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 243 rectifié bis.
Mme Colette Mélot. Il s’agit de développer l’offre de téléconsultation en amont du passage dans le service d’urgences d’un établissement de santé. Nous devons trouver des solutions pour désengorger les urgences !
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 264 rectifié quinquies.
M. Alain Milon. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l’amendement n° 508 rectifié.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement de Michel Canevet est défendu.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je souscris à l’objectif d’une meilleure orientation des patients en amont des services d’urgences, dont la fréquentation a plus que doublé en vingt ans.
La Commission a jugé intéressante l’idée proposée et décidé, sur ces amendements identiques, de s’en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Le Gouvernement considère les amendements comme satisfaits. Il émet donc un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 98 rectifié bis, 243 rectifié bis, 264 rectifié quinquies et 508 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 32.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 99 rectifié bis est présenté par MM. Pellevat et D. Laurent, Mme Micouleau, MM. Paccaud, Segouin et Saury, Mme Deromedi, MM. Brisson et Charon, Mme Raimond-Pavero, M. Le Gleut, Mmes Dumont et Thomas, MM. Courtial et Joyandet, Mme Dumas, MM. Bouchet, Cuypers et Grosperrin, Mme Berthet, M. Bouloux, Mmes Canayer et Lavarde et MM. Genet et Gremillet.
L’amendement n° 265 rectifié quinquies est présenté par M. Milon, Mme V. Boyer, MM. Grand, Burgoa, Calvet, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, M. Sautarel, Mme L. Darcos, MM. J.B. Blanc et Bonne, Mme F. Gerbaud, M. Piednoir, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard, Babary et B. Fournier.
L’amendement n° 635 est présenté par M. Bonhomme.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’intérêt, pour la santé publique comme pour les comptes publics, du développement d’un service de téléconsultation intégré aux services d’urgences et destiné à orienter les patients, selon leurs besoins, au sein des urgences ou vers une offre en médecine ambulatoire.
La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l’amendement n° 99 rectifié bis.
Mme Jacky Deromedi. Selon la Cour des comptes, en 2014, près de 3,6 millions de passages aux urgences auraient dû être réorientés vers une prise en charge en ville.
Si le projet de numéro unique prévu dans le cadre du service d’accès aux soins contribuera à la bonne orientation d’une partie des patients, il ne pourra pas éviter les nombreuses arrivées directes de patients au sein des services d’urgence.
À ce titre, la téléconsultation offre l’occasion de faciliter le triage des patients au sein même des établissements de santé disposant de services d’urgence. Les infirmiers organisateurs de l’accueil pourraient ainsi disposer d’une salle spécifique permettant d’effectuer les téléconsultations, afin d’orienter les patients, le cas échéant, vers une offre en de médecine ambulatoire.
Les téléconsultations seraient assurées par des médecins du territoire, candidats pour assurer ce type de prise en charge, renforcés en tant que de besoins par des médecins organisés au sein de plateformes de téléconsultation, en mesure de libérer le temps médical nécessaire à une prise en charge vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. Ces prises en charge devront bien sûr être enregistrées au sein du dossier médical partagé du patient.
Aujourd’hui, le développement de services ou d’expérimentations d’une solution d’orientation des patients aux entrées des urgences par le biais d’un espace attenant de téléconsultation est freiné par le mode de rémunération de l’hôpital.
En effet, ce service attenant, faisant intervenir du personnel hospitalier pour accueillir et orienter les patients et recourant à une plateforme de téléconsultation opérationnelle vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept, ne peut être financé ni par l’hôpital ni par le patient.
Cette innovation organisationnelle destinée à fluidifier les urgences doit s’accompagner d’une innovation structurelle et d’un financement spécifique.
Pour impulser une volonté et une action collectives en faveur d’un tel dispositif, il est nécessaire d’identifier et de valoriser de façon objective les apports de la téléconsultation au sein des services d’accueil d’urgences, pour la santé publique comme pour les comptes publics.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 265 rectifié quinquies.
M. Alain Milon. S’agissant d’une demande de rapport, je connais d’avance la position de notre rapporteure… (Sourires.) Je retire donc l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 265 rectifié quinquies est retiré.
L’amendement n° 635 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Au-delà de la question de la demande d’un rapport, l’adoption des amendements précédents satisfait celui-ci.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Deromedi, l’amendement n° 99 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Jacky Deromedi. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 99 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 409 rectifié, présenté par M. Henno, Mmes Guidez, Doineau, Sollogoub et Jacquemet, MM. Duffourg, Le Nay et Cazabonne, Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le V de l’article 54 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Au plus tard six mois avant le terme de ces expérimentations, un comité scientifique détermine les conditions appropriées pour leur éventuelle pérennisation. »
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Les expérimentations de télémédecine pour l’amélioration des parcours de santé ont été instituées par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 et confirmées en 2018. Ces étapes encouragent et soutiennent financièrement le déploiement de projets de télémédecine sur l’ensemble du territoire.
La loi prévoit qu’un rapport d’évaluation pour l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé sera remis à la fin du mois de juin 2021, après validation par la Haute Autorité de santé.
Les auteurs du présent amendement proposent que, à l’appui de ce rapport d’évaluation, un comité scientifique soit chargé de déterminer les conditions appropriées pour anticiper l’éventuelle pérennisation de ces expérimentations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’article 54 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 a maintenu les actions de télésurveillance dans un cadre expérimental pour quatre ans, soit jusqu’en 2022, alors que la téléconsultation et la téléexpertise entraient dans le droit commun.
Ces dispositions encadrent les conditions d’évaluation de ces expérimentations, en vue de leur éventuelle généralisation.
Une évaluation d’étape devait être réalisée par la Haute Autorité de santé en 2019, en liaison avec les auteurs. En outre, la HAS doit remettre au Parlement avant le 30 juin 2021 un rapport procédant à une évaluation médicale, économique et sociale, qualitative comme quantitative, des expérimentations, en vue d’une généralisation ; ce rapport sera établi en liaison avec les agences régionales de santé, les organismes locaux d’assurance maladie, les professionnels de santé, les centres de santé, les établissements de santé et les établissements médico-sociaux participant à l’expérimentation.
Ce cadre concerté et ouvert issu de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 me paraît suffisant ; un comité scientifique ad hoc n’est pas nécessaire.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Henno. Je retire l’amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 409 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 67 rectifié ter est présenté par Mme Deseyne, M. Cambon, Mme Lassarade, MM. Boré, Le Rudulier et Panunzi, Mme Belrhiti, MM. B. Fournier et Grosperrin, Mmes Dumas et Deromedi, MM. Houpert, Brisson, Cardoux et Duplomb, Mme Gruny, MM. Piednoir, Bascher et Meurant, Mme Thomas, M. Bonhomme, Mme Chauvin, MM. Saury, Rapin, Mandelli et Savary, Mmes Di Folco et Garriaud-Maylam, MM. Daubresse, Gremillet et Regnard et Mme Noël.
L’amendement n° 239 rectifié quinquies est présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Capus, Decool, Guerriau, Lagourgue, Malhuret, A. Marc, Médevielle et Menonville, Mme Paoli-Gagin, MM. Wattebled, Verzelen et E. Blanc, Mme Joseph, M. Nougein, Mmes F. Gerbaud et Berthet et MM. Pellevat et Fialaire.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – l’État peut autoriser, pour une durée de deux ans et à titre expérimental, le financement de protocoles de télémédecine impliquant les opticiens-lunetiers par le fonds régional mentionné à l’article L. 1435-8 du code de la santé publique.
À cet effet, l’État peut autoriser l’utilisation de matériels d’exploration non invasifs automatisés par les opticiens-lunetiers, en autonomie et sous le contrôle des ophtalmologistes.
II. – Les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation prévue au I sont définies par voie réglementaire, au plus tard au 1er juin 2021. Les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent la liste des territoires participant à l’expérimentation mentionnée au premier alinéa du présent article, dans la limite de quatre régions.
III. – Dans un délai de six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport d’évaluation, qui se prononce notamment sur la pertinence d’une généralisation
La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour présenter l’amendement n° 67 rectifié ter.
Mme Chantal Deseyne. Pour répondre aux difficultés d’accès aux soins visuels, les auteurs de cet amendement proposent, à titre expérimental, de développer le recours à la télémédecine en ophtalmologie, en impliquant l’opticien dans les protocoles.
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 239 rectifié quinquies.
Mme Colette Mélot. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Favoriser l’accès aux soins et poursuivre la structuration de la filière visuelle sont des objectifs louables.
Dans un rapport de janvier 2020, l’inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, a avancé plusieurs propositions à cet égard, dont l’extension des matériels d’exploration non invasifs utilisables par les opticiens-lunetiers et les orthoptistes en autonomie, sous le contrôle des ophtalmologistes, et l’élargissement de la téléexpertise aux relations entre ophtalmologistes et orthoptistes ou opticiens-lunetiers.
Plus globalement, l’IGAS préconisait de lancer une réflexion avec les professionnels de la filière sur la façon dont les nouveaux outils pourraient faire évoluer les stratégies de téléexpertise et de dépistage, ainsi que sur l’utilisation des réseaux en place, en particulier celui des opticiens-lunetiers.
L’expérimentation proposée par les auteurs de l’amendement ne consiste qu’en une évolution ponctuelle, concernant les seuls opticiens. Elle mériterait de s’inscrire dans une réflexion plus globale avec les autres acteurs de la filière, notamment les orthoptistes et les ophtalmologistes.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Deseyne, l’amendement n° 67 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Chantal Deseyne. Non, je le retire, monsieur le président.
Mme Colette Mélot. Je retire également le mien !
M. le président. Les amendements nos 67 rectifié ter et 239 rectifié quinquies sont retirés.
Article 33
Par dérogation au premier alinéa du I de l’article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale, l’échéance de la convention nationale prévue à l’article L. 162-5 du même code et régissant les rapports entre l’assurance maladie et les médecins libéraux, conclue le 25 août 2016 et approuvée le 20 octobre 2016, est reportée au 31 mars 2023.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 256 rectifié est présenté par MM. Maurey et Longeot, Mmes Gatel, Loisier et Létard, MM. P. Martin, Détraigne, S. Demilly et Delcros, Mmes Vérien, Férat et Guidez, MM. Kern, Le Nay et Mizzon, Mme N. Goulet, MM. Louault et Poadja, Mme Vermeillet, MM. Levi et Capus, Mme Joseph, MM. de Nicolaÿ, D. Laurent, Pointereau, Belin et Bouchet, Mme Bonfanti-Dossat, M. A. Marc, Mme Canayer, M. Lefèvre, Mme Garriaud-Maylam, MM. Le Gleut, Pellevat, Paccaud, Daubresse, Laugier, Guerriau, Anglars, Decool, Hingray et Vogel, Mmes Paoli-Gagin et Noël, MM. Sautarel et Reichardt et Mme Billon.
L’amendement n° 653 rectifié bis est présenté par Mme Micouleau, M. Chatillon, Mme Boulay-Espéronnier, MM. Bouloux, Brisson, Calvet, Cambon et Charon, Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi, Di Folco, Dumas et Goy-Chavent, M. Gremillet, Mme Jacques, MM. H. Leroy, Rapin et Sido et Mme Thomas.
L’amendement n° 888 rectifié quinquies est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier, Roux et Menonville, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Wattebled, Chasseing et Malhuret.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 256 rectifié.
Mme Jocelyne Guidez. La défense de cet amendement vaudra aussi pour l’amendement n° 257 rectifié, dont les coauteurs sont également Hervé Maurey et Jean-François Longeot.
La loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé prévoit que la convention entre les médecins et l’assurance maladie détermine les conditions dans lesquelles les médecins participent à la réduction des inégalités territoriales dans l’accès aux soins.
L’adoption de cette disposition a été obtenue de haute lutte par le Sénat, sur l’initiative de notre commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
La Haute Assemblée l’avait adoptée une première fois en 2015, sur l’initiative de la commission des affaires sociales, dans le cadre du projet de loi portant modernisation de notre système de santé, mais la disposition avait été supprimée du texte définitif par l’Assemblée nationale.
Cette mesure constitue une solution de substitution à la mise en place d’une régulation de l’installation des médecins par le conventionnement, qu’appellent de leurs vœux nombre de parlementaires et d’associations de patients et même la Cour des comptes, face à l’aggravation particulièrement préoccupante des déserts médicaux dans nos territoires, et compte tenu de l’inefficacité et du coût des dispositifs incitatifs actuels.
Pour les auteurs de cet amendement, l’obligation de négocier sur les installations en zones sous-denses et sur-denses lors du renouvellement de la convention médicale représente un minimum pour marquer la nécessité d’une participation des médecins à l’effort national qui doit être accompli afin de rapprocher l’offre de soins des patients et de lutter contre les déserts médicaux.
La situation dramatique de nos territoires en matière d’accès aux soins n’autorise pas de repousser à plus tard cette négociation, comme le propose le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.
C’est pourquoi cet amendement vise à supprimer le report d’un an et demi, exagérément long, envisagé par le Gouvernement. Son adoption laisserait un délai de six mois à l’issue des élections syndicales pour négocier, comme le prévoit la législation actuelle.
Quant à l’amendement n° 257 rectifié, qui sera appelé en discussion dans quelques instants, il vise à instaurer une marge supplémentaire de trois mois, correspondant à l’étude de représentativité qui, selon le Gouvernement, devrait précéder la négociation.
M. le président. La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l’amendement n° 653 rectifié bis.
Mme Jacky Deromedi. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 653 rectifié bis est retiré.
La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 888 rectifié quinquies.
Mme Véronique Guillotin. L’article 33 prolonge la validité de l’actuelle convention régissant les liens entre l’Union nationale des caisses d’assurance maladie et les médecins libéraux jusqu’au 31 mars 2023.
Un tel report ne nous paraît pas raisonnable.
La médecine libérale n’a pas été la grande gagnante du récent Ségur ni des différents plans qui se sont succédé. Des renégociations de cette convention et des revalorisations nous paraissent donc urgentes. Il est essentiel, particulièrement dans le contexte de la covid, de revaloriser la visite à domicile, qui n’est pas rémunérée comme elle devrait l’être.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces amendements visent à supprimer le report du renouvellement de la convention médicale au 31 mars 2023.
Mes chers collègues, je vous rejoins tout à fait pour considérer que le report à l’échéance, lointaine, de 2023 est injustifié.
Toutefois, il paraît nécessaire de proroger de quelques mois la convention médicale de 2016, qui arrivera normalement à échéance en octobre 2021. En effet, les élections aux unions régionales des professionnels de santé, dont les résultats servent à déterminer la représentativité des syndicats, doivent se tenir en avril 2021.
Or il faut prévoir environ neuf mois avant le renouvellement d’une convention pour procéder à une enquête de représentativité et mener à bien les négociations préalables à la signature de la convention.
La commission propose donc un report au 31 mars 2022, plus court d’un an que celui qui est envisagé par le Gouvernement. J’invite nos collègues à se rallier à notre position et à retirer leurs amendements. S’ils les maintenaient, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Guidez, l’amendement n° 256 rectifié est-il maintenu ?
Mme Jocelyne Guidez. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Madame Guillotin, l’amendement n° 888 rectifié quinquies est-il maintenu ?
Mme Véronique Guillotin. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 888 rectifié quinquies est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 256 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 125 rectifié quinquies, présenté par Mme Raimond-Pavero, MM. D. Laurent et Pellevat, Mme Deromedi, MM. Courtial, Lefèvre, Saury, Paccaud, B. Fournier, Perrin et Rietmann, Mmes F. Gerbaud et Dumas, MM. Sautarel, Calvet et Houpert, Mme Lherbier, MM. Babary et Bouloux, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Piednoir et H. Leroy, est ainsi libellé :
Remplacer l’année :
2023
par l’année :
2021
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Les attentes des médecins libéraux sont légitimes et nombreuses, en matière tant de conditions d’exercice que d’attractivité financière de leur profession. Or ils sont exclus, pour l’instant, de toute vision d’avenir.
De fait, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 repousse l’échéance conventionnelle au 31 mars 2023, ce qui leur semble beaucoup trop tardif. C’est pourquoi Mme Raimond-Pavero vous propose d’avancer cette date au 31 mars 2021.
M. le président. L’amendement n° 228 rectifié ter, présenté par Mmes Lassarade et V. Boyer, M. B. Fournier, Mmes Deromedi et Dumas, M. Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. D. Laurent, H. Leroy, Bonhomme, Rapin et Mandelli, Mmes Garriaud-Maylam et Delmont-Koropoulis et MM. Regnard, Gremillet et Cuypers, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer la date :
31 mars 2023
par la date :
31 décembre 2021
La parole est à Mme Florence Lassarade.
Mme Florence Lassarade. Je retire cet amendement au profit de celui de Mme la rapporteure, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 228 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 257 rectifié, présenté par MM. Maurey et Longeot, Mme Gatel, MM. Détraigne et P. Martin, Mmes Létard, Loisier et Billon, MM. Delcros et S. Demilly, Mmes Vérien, Férat et Guidez, MM. Kern et Mizzon, Mme N. Goulet, M. Louault, Mme Vermeillet, M. Vogel, Mmes Paoli-Gagin et Noël, MM. Sautarel, Reichardt, Pointereau, Levi, Pellevat, Paccaud, Daubresse, Laugier, Guerriau, Anglars, Decool, Hingray, Le Nay et Gremillet, Mme Garriaud-Maylam, M. Capus, Mme Joseph et MM. de Nicolaÿ, D. Laurent, Chasseing, Belin, Bouchet et Poadja, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer la date :
31 mars 2023
par la date :
31 janvier 2022
Cet amendement est déjà défendu.
L’amendement n° 794 rectifié, présenté par M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Bouad, Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
au 31 mars 2023
par les mots :
à une date n’excédant pas douze mois après la tenue des élections des organisations syndicales reconnues représentatives mentionnées à l’article L. 162-33 du code de la sécurité sociale
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Dans cette affaire, nous aimerions comprendre pourquoi le Gouvernement veut reporter cette échéance électorale de deux ans.
Comme l’a expliqué Mme la rapporteure, on comprend qu’il faille attendre le résultat des élections aux unions régionales des professionnels de santé, au printemps prochain, et l’enquête de représentativité qui s’ensuivra pour engager les discussions dans de bonnes conditions. Mais cela ne nécessite qu’un report d’un an. Il y a donc autre chose. Mais quoi ?
En 2022, il y aura une élection présidentielle : au fond, c’est probablement le problème… De fait, comme le disait une ancienne ministre de la santé, dont je tairai le nom, il est très compliqué de faire une convention médicale juste avant une élection présidentielle, parce que, forcément, il y a des mécontents…
Ainsi, comme s’il ne suffisait pas que le rythme politique de notre pays soit entièrement réglé sur l’élection présidentielle, au point que notre démocratie parlementaire est singulièrement affaiblie, voilà maintenant que la démocratie sociale doit aussi être subordonnée à l’élection présidentielle !
S’il existe une autre raison, madame la ministre déléguée, donnez-la-nous. Si l’explication est cohérente, je suis prêt à souscrire au report de deux ans. En tout cas, on n’a pas besoin d’un an et demi pour mener l’enquête de représentativité et les négociations conventionnelles : le report d’un an, certes nécessaire, est aussi largement suffisant.
Peut-être Mme Deroche demandera-t-elle la priorité sur l’amendement de la commission – c’est de bonne guerre… –, mais nous ne retirerons pas le nôtre, vu qu’il a exactement le même objet.
M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 168 est présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales.
L’amendement n° 213 rectifié ter est présenté par MM. Karoutchi et Regnard, Mme Micouleau, MM. Cambon et Daubresse, Mme Jacques, MM. del Picchia, Reichardt, Houpert et Chaize, Mme Belrhiti, MM. Rietmann et Perrin, Mme F. Gerbaud, MM. Sido, Menonville et Courtial, Mme M. Mercier, M. Pellevat, Mme Deromedi, M. Vogel, Mmes Garriaud-Maylam et Dumas, M. Sautarel, Mmes Raimond-Pavero et L. Darcos, MM. Levi, D. Laurent, Panunzi, Bascher, Frassa et Chauvet, Mmes Joseph et Estrosi Sassone, MM. de Nicolaÿ, Lefèvre, B. Fournier, Calvet, Grosperrin et Bacci, Mme Richer, M. Decool, Mme Paoli-Gagin, MM. Bonnus et Belin, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Saury, Le Gleut et Cuypers, Mme Lherbier, MM. Piednoir, Bonhomme, Bouchet, Charon, Wattebled, Genet, Capus, Darnaud, Duplomb, Brisson, Rapin, Babary, Segouin, E. Blanc, H. Leroy, Bouloux, Gremillet et Mandelli et Mme de Cidrac.
L’amendement n° 418 rectifié est présenté par M. Henno, Mmes Guidez, Doineau, Sollogoub et Jacquemet, MM. Duffourg, Le Nay et Cazabonne, Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union Centriste.
L’amendement n° 889 rectifié quinquies est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier et Roux, Mme Mélot et MM. Lagourgue, A. Marc, Chasseing et Malhuret.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Remplacer l’année :
2023
par l’année :
2022
La parole est à Mme la rapporteure, pour présenter l’amendement n° 168.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Voici donc l’amendement que j’ai annoncé tout à l’heure et qui tend à limiter à un an le report du renouvellement de la convention médicale. L’échéance serait avancée du 31 mars 2022 au 31 mars 2023.
M. le président. La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l’amendement n° 213 rectifié ter.
Mme Jacky Deromedi. Nous le retirons au profit de l’amendement identique de la commission, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 213 rectifié ter est retiré.
La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 418 rectifié.
M. Olivier Henno. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 889 rectifié quinquies.
Mme Véronique Guillotin. Il est défendu également.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Le présent article reporte la fin de la convention médicale actuelle au 31 mars 2023.
Cette échéance prend en compte la période propre aux élections aux unions régionales des professionnels de santé et à la campagne électorale, jusqu’en avril 2021, puis le temps nécessaire pour déposer et réaliser les examens de représentativité – au minimum cinq à six mois – et celui nécessaire pour ouvrir et conduire les négociations, soit six à sept mois.
Compte tenu de ce calendrier, il n’est possible ni de maintenir le terme initial de la convention ni de le fixer à la date proposée par les auteurs des amendements.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Demande de priorité
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, en application de notre règlement, la commission demande que les amendements identiques nos 168, 418 rectifié et 889 rectifié quinquies soient mis aux voix par priorité.
M. le président. Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, la priorité est de droit lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La priorité est ordonnée.
La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. J’ai entendu la question de Bernard Jomier ; je n’ai pas entendu la réponse de Mme la ministre…
M. Bernard Jomier. Nous avons l’habitude…
M. Alain Milon. Lorsque les syndicats de médecins et l’Uncam concluent une convention, c’est pour une durée fixée, au terme de laquelle une renégociation doit être ouverte. Il faut, certes, tenir compte des élections aux unions représentatives des professionnels de santé – mais pourquoi cette contrainte n’a-t-elle pas été anticipée lors de la dernière négociation ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je vais retirer mon amendement, non sans regretter, moi aussi, l’absence d’un réel dialogue avec le Gouvernement.
Depuis un certain temps, nous n’obtenons aucune réponse à nos questions. Madame la ministre déléguée, nous n’aspirons qu’à un dialogue sur le fond. Mais il faut pour cela répondre à nos questions !
M. Bernard Jomier. Je retire l’amendement n° 794 rectifié, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 794 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 168, 418 rectifié et 889 rectifié quinquies.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 125 rectifié quinquies et 257 rectifié sont sans objet.
L’amendement n° 1075, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
….- Le délai d’entrée en vigueur mentionné au premier alinéa du I de l’article L. . du code de la sécurité sociale n’est pas applicable aux mesures conventionnelles issues des négociations conclues avant le 31 décembre 2020 et dont la liste est fixée par décret.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Cet amendement vise à permettre de déroger au délai de six mois prévu pour l’entrée en vigueur des dispositions conventionnelles nouvelles.
Les conclusions du Ségur de la santé, dans son volet ambulatoire, ont engagé d’importantes évolutions de l’activité des professionnels de santé libéraux.
En conséquence, les partenaires conventionnels ont été invités à ouvrir des négociations autour des priorités issues du Ségur de la santé, notamment l’accès aux soins non programmés et le renforcement de l’exercice coordonné.
Dans le contexte sanitaire actuel, le service d’accès aux soins, le SAS, qui doit permettre de soulager les services d’urgence, de même que le financement d’une nouvelle mission dédiée à la réponse aux crises sanitaires graves des communautés professionnelles territoriales de santé doivent être activés au plus tôt. Cela nécessite que les mesures conventionnelles qui doivent permettre leur déploiement soient mises en place au plus tôt en 2021.
Or l’article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale prévoit actuellement que toute mesure conventionnelle ayant un impact financier ne peut entrer en vigueur qu’après un délai de six mois après son approbation.
Au vu des enjeux essentiels portés par ces négociations, il convient de lever cette règle pour rendre d’application immédiate les modalités qui seront déclinées dans les conventions, de manière à garantir une montée en charge rapide de ces dispositifs sur le terrain.
Cette dérogation à la règle habituelle permettra aussi une mise en œuvre rapide des mesures conventionnelles actuellement négociées entre les entreprises de transport sanitaire et l’assurance maladie, qui permettront de mettre en œuvre une réforme importante de la garde ambulancière, maillon essentiel de la réponse à l’urgence préhospitalière.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je m’exprimerai à titre personnel, car, le Gouvernement ayant déposé cet amendement aujourd’hui à dix-sept heures, la commission n’a pu l’examiner.
Le présent amendement vise à déroger au délai de six mois qui doit être respecté entre l’approbation et l’application d’une mesure conventionnelle d’ordre financier. Cette dérogation me paraît aller dans le bon sens, puisqu’elle permettra de rendre applicables plus rapidement les mesures décidées par les partenaires conventionnels dans le cadre du Ségur de la santé.
J’émets donc un avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 33, modifié.
(L’article 33 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 33
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 41 rectifié quater est présenté par M. Milon, Mmes Lassarade, V. Boyer, Dumas et Deromedi, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel et Genet, Mme Malet, MM. Rapin, Piednoir et Savary, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et B. Fournier.
L’amendement n° 63 rectifié bis est présenté par MM. Bonne et Bascher, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Courtial, Mme L. Darcos, MM. Daubresse et Gremillet, Mme Gruny, M. Lefèvre, Mmes Noël et Puissat, M. Vogel et Mme Di Folco.
L’amendement n° 654 rectifié bis est présenté par Mme Micouleau, M. Chatillon, Mme Boulay-Espéronnier, M. Cambon, Mmes Goy-Chavent et Jacques et M. Sido.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles L. 162-1-9 et L. 162-1-9-1 du code de la sécurité sociale sont abrogés.
La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 41 rectifié quater.
M. Alain Milon. Le présent amendement vise à abroger les articles L. 162-1-9 et L. 162-1-9-1 du code de la sécurité sociale.
L’article L. 162-1-9 créé une commission des équipements matériels lourds – scanner, IRM, TEP-scan… – auprès du l’Union nationale des caisses d’assurance maladie, l’Uncam. Il fixe également la composition de cette commission.
L’article L. 162-1-9-1 prévoit la procédure de fixation des tarifs et de la classification des équipements matériels lourds, et la nature de l’avis, non conforme, de la commission. Il précise que le directeur général de l’Uncam transmet cet avis aux syndicats médicaux représentatifs, ainsi qu’au ministre de la santé. Faute d’accord avec les syndicats représentatifs, le directeur général fixe unilatéralement les tarifs et la classification des équipements lourds.
Ces deux articles rompent avec les principes de la négociation conventionnelle et les procédures de fixation des tarifs qui en découlent.
Sous couvert d’une concertation entre le directeur général de l’Uncam, les professionnels et les établissements opérant un scanner, une IRM ou un TEP-scan, ainsi qu’avec les syndicats conventionnels, ils confèrent un pouvoir unilatéral au directeur général de l’Uncam dans la fixation des tarifs et des classifications des équipements lourds. Ce faisant, ces articles réduisent le champ de compétence de la convention médicale.
La suppression de ces articles permettrait donc de réintégrer la détermination des tarifs et la classification des scanners, des IRM et des TEP-scans dans la procédure conventionnelle régulière.
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour présenter l’amendement n° 63 rectifié bis.
Mme Frédérique Puissat. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier, pour présenter l’amendement n° 654 rectifié bis.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Il est également défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces amendements identiques visent à supprimer la commission des équipements matériels lourds d’imagerie médicale créée auprès de l’Uncam en 2017, commission qui détermine par une procédure spécifique les forfaits de radiologie.
Lors de l’examen du PLFSS pour 2017, qui a créé cette procédure, le Sénat s’était opposé à ce dispositif dérogatoire à la procédure conventionnelle. En effet, ces articles permettent une détermination unilatérale des forfaits techniques par le directeur général de l’Uncam en l’absence de décision paritaire, ce qui ne semblait souhaitable ni à la commission ni au Sénat.
J’émets donc un avis favorable sur ces trois amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Cette disposition faisait suite à un rapport de la Cour des comptes de 2016, qui mettait en lumière l’inadéquation du mode de tarification de l’imagerie et les très forts effets de rente qui en découlaient, représentant des coûts de plusieurs dizaines, voire centaines de millions d’euros pour l’assurance maladie obligatoire.
Ce dispositif n’a cependant été utilisé qu’une fois, au début de l’année 2017, car Agnès Buzyn a privilégié un protocole d’accord triennal.
Le protocole signé en 2018 entre l’Uncam et la Fédération nationale des médecins radiologues prévoyait la réalisation de 207 millions d’euros d’économie au cours de la période 2018-2020. Toutefois, les résultats obtenus en 2018 et 2019 ont été très décevants et en deçà des objectifs, puisque le taux de réalisation a été de 60 % 2018 et de 30 % en 2019.
Le travail sur une tarification efficiente des équipements matériels lourds reste donc à mener. Pour l’heure, en l’absence d’alternative crédible, il convient de maintenir le dispositif existant.
À ce stade, les engagements du protocole triennal n’ayant pas été tenus, j’émets un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 41 rectifié quater, 63 rectifié bis et 654 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 33.
L’amendement n° 1003, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 162-4-5 est ainsi rédigé :
« Art. L. 162-4-5. - Le médecin qui prescrit un contraceptif à une assurée mineure d’au moins quinze ans mentionnée au 21° de l’article L. 160-14, qui lui prescrit des examens de biologie médicale en vue d’une prescription contraceptive, ou qui lui prescrit des examens de gynécologie médicale, le biologiste médical et le gynécologue qui effectuent ces examens sont tenus de faire bénéficier cette assurée d’une dispense d’avance des frais sur la part des dépenses prise en charge par l’assurance maladie. Le médecin est également tenu de la faire bénéficier de cette dispense pour les actes donnant lieu à la pose, au changement ou au retrait d’un contraceptif ; cette dispense étant prise en charge par l’assurance maladie via la carte professionnelle du praticien. »
2° Après le VIII de l’article L. 245-6, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Une contribution additionnelle à la contribution prévue au I est instituée pour les entreprises assurant l’exploitation en France, au sens de l’article L. 5124-1 du code de la santé publique, des spécialités pharmaceutiques nécessaires aux vaccinations obligatoires prévues par l’article L. 3111-2 du code de la santé publique. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. De nombreuses mineures n’accèdent pas aux examens de gynécologie médicale, soit par manque d’information, soit, plus grave encore, du fait de problèmes financiers. Nous savons pourtant à quel point un suivi gynécologique précoce est important pour la santé actuelle et future des jeunes femmes.
Prendre de bonnes habitudes de consultation se fait dès le plus jeune âge. Aussi la prise en charge à 100 % sans avance de frais représente la garantie d’un accès facilité à ce genre de soins essentiels dans la vie d’une femme, qu’il s’agisse de régler des questions purement sanitaires, des questions de sexualité ou de maternité.
Cette prise en charge serait également un facteur d’émancipation pour les jeunes femmes dans leur rapport à elles-mêmes, à leur propre corps, mais aussi au monde qui les environne, notamment à leur famille proche, qui, dans certains cas, peut être un frein à leur épanouissement ou aux décisions difficiles qu’elles peuvent être amenées à prendre, comme une interruption volontaire de grossesse, forcément délicate à cet âge.
Par cet amendement, nous vous proposons de faire un pas de plus en ce sens, en permettant, en complément du remboursement de la contraception, la prise en charge des examens de gynécologie médicale pour les mineures.
Cette mesure pourrait être financée par la création d’une contribution additionnelle pour les entreprises assurant l’exploitation en France des spécialités pharmaceutiques nécessaires aux vaccinations obligatoires. Tel est le gage que nous proposons.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Le présent amendement vise à étendre le tiers payant aux assurées mineures au titre des examens de gynécologie médicale.
Toutefois, il tend également à restreindre le bénéfice du tiers payant aux mineures âgées d’au moins 15 ans pour ces examens ainsi que pour les autres prescriptions et examens liés à la contraception, alors que celui-ci bénéficie aujourd’hui à toutes les assurées mineures, quel que soit leur âge. Cette restriction d’âge ne me paraît pas opportune. De plus, je rappelle que le tiers payant est déjà largement pratiqué dans les établissements de santé.
En outre, le financement de cet amendement repose sur la création d’une taxe additionnelle à la contribution sur le chiffre d’affaires des entreprises pharmaceutiques, ce qui ne me paraît pas justifié.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Madame la sénatrice, toutes les mineures peuvent bénéficier d’une prise en charge intégrale au tiers payant d’une consultation annuelle réalisée par un médecin ou une sage-femme au cours de laquelle sont prescrits des examens de biologie médicale en vue d’une contraception, et des frais d’acquisition d’un contraceptif, ces consultations et ces prescriptions étant protégées par le secret.
Les contraceptifs remboursables – pilules de première et deuxième générations, implant contraceptif hormonal, stérilet, préservatif –, les actes liés à la pose, au changement ou au retrait d’un dispositif contraceptif sont intégralement pris en charge une fois par an, ainsi que les consultations de suivi réalisées par un médecin ou une sage-femme lors de la première année d’accès à la contraception.
Votre proposition étant satisfaite, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Il nous paraît important que l’examen gynécologique médical des mineures soit protégé par le secret médical. Si vous me donnez cette garantie, madame la ministre, je retirerai mon amendement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je vous confirme que le secret médical est garanti. Je l’ai d’ailleurs précisé dans mon avis.
M. le président. Madame Cohen, l’amendement n° 1003 est-il maintenu ?
Mme Laurence Cohen. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 1003 est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 96 rectifié bis, présenté par M. Fichet, Mme Le Houerou, M. Montaugé, Mmes Bonnefoy et Briquet, MM. Lozach, Jeansannetas, Pla et Sueur, Mmes G. Jourda et Harribey, MM. Temal, P. Joly, Michau, Gillé et Bourgi, Mme Artigalas, MM. Tissot et Mérillou, Mmes Blatrix Contat et Monier, MM. Redon-Sarrazy et Cardon, Mmes Lepage, Préville et Meunier, MM. Marie, Durain et J. Bigot, Mmes Van Heghe et Lubin et MM. Bouad et Kerrouche, est ainsi libellé :
Après l’article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 20° de l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 20° bis Les conditions à remplir pour être conventionné, notamment celles relatives aux zones d’exercice définies par l’agence régionale de santé en application de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique ; ».
II. – Si dans les douze mois suivant la promulgation de la présente loi, aucune mesure de limitation d’accès au conventionnement n’a été instituée dans les conditions prévues au présent II, l’accès des médecins au conventionnement prévu par ledit article est régulé dans les conditions suivantes :
1° Le directeur général de l’agence régionale de santé détermine par arrêté, après concertation avec les représentants des médecins, les zones dans lesquelles le niveau de l’offre de soins est particulièrement élevé ;
2° Dans les zones mentionnées au 1° , un médecin ne peut accéder au conventionnement que concomitamment à la cessation d’activité d’un confrère exerçant dans la même zone. Est assimilé à une cessation d’activité le transfert de la résidence professionnelle du confrère vers une zone mentionnée au 1° de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique ;
3° Le 2° ne s’applique pas au médecin souhaitant adhérer à la convention mentionnée à l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale qui s’engage à respecter les tarifs qui y sont fixés.
Les 1° , 2° et 3° cessent d’avoir effet à la date d’entrée en vigueur des mesures de limitation d’accès au conventionnement instituées dans les conditions prévues au 20° bis de l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale.
III. – Les modalités d’application du II sont fixées par décret en Conseil d’État.
La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Cet amendement tend à redéfinir les conditions du conventionnement des médecins libéraux afin de les encourager à s’installer dans les zones sous-denses.
En effet, l’augmentation du nombre de déserts médicaux témoigne de l’inefficacité des politiques qui ont été mises en œuvre jusqu’à présent. Un nombre préoccupant de Français rencontrent des difficultés à accéder aux soins dans des conditions de proximité et de délais satisfaisantes.
Nous devons aujourd’hui instaurer des règles de régulation territoriale pour l’installation des médecins, à l’instar de ce qui existe déjà pour de nombreuses autres professions de santé, car, si la télémédecine présente des avantages, elle ne saurait faire office de palliatif lorsque le manque de praticiens se fait criant dans les territoires.
Cet amendement vise donc à instaurer un dispositif prévoyant que dans les zones dans lesquelles existe un fort excédent en matière d’offre de soins, un nouveau médecin libéral ne peut s’installer en étant conventionné à l’assurance maladie que lorsqu’un médecin libéral de la même zone cesse son activité.
Ce dispositif ne s’appliquerait pas aux médecins qui souhaitent conventionner avec l’assurance maladie en secteur 1 dans un territoire où l’offre de soins est abondante et où les médecins conventionnés en secteur 2 sont nombreux.
Nous préconisons donc, au travers de cet amendement, une réforme claire de l’installation des médecins libéraux par la mise en place de règles de régulation territoriale efficaces.
M. le président. L’amendement n° 95 rectifié bis, présenté par M. Fichet, Mme Le Houerou, M. Montaugé, Mmes Bonnefoy et Briquet, MM. Lozach, Jeansannetas, Pla et Sueur, Mmes G. Jourda et Harribey, MM. Temal, P. Joly, Michau, Gillé et Bourgi, Mme Artigalas, MM. Tissot et Mérillou, Mmes Blatrix Contat et Monier, MM. Redon-Sarrazy et Cardon, Mmes Lepage, Préville et Meunier, MM. Marie, Durain et J. Bigot, Mmes Van Heghe et Lubin et MM. Bouad et Kerrouche, et ainsi libellé :
Après l’article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 4131-6 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 4131-6-… ainsi rédigé :
« Art. L. 4131-6-…. – Dans les zones définies par les agences régionales de santé en concertation avec les organisations syndicales représentatives des médecins au plan national dans lesquelles est constaté un fort excédent en matière d’offre de soins, le conventionnement à l’assurance maladie d’un médecin libéral ne peut intervenir qu’en concomitance avec la cessation d’activité libérale d’un médecin exerçant dans la même zone. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Cet amendement, dont l’objet est similaire au précédent, tend à souligner les difficultés rencontrées dans les zones désertiques, ainsi que l’effort que réalisent les collectivités territoriales pour financer l’installation de médecins libéraux sur leur territoire.
Force est pourtant de constater que les dispositions qui ont été prises sur le plan financier pour encourager l’installation de médecins libéraux sont inefficaces. Les déserts médicaux perdurent, et c’est un véritable drame dans les territoires ruraux, mais aussi dans les zones périurbaines.
M. le président. L’amendement n° 991 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 4131-6 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 4131-6-… ainsi rédigé :
« Art. L. 4131-6-…. – Dans les zones mentionnées au 2° de l’article L. 1434-4, le conventionnement d’un médecin libéral en application de l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale ne peut intervenir qu’en concomitance avec la cessation d’activité libérale d’un médecin exerçant dans des conditions équivalentes dans la même zone. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Une note récente de Bercy souligne que le nombre de médecins qui choisissent la voie libérale n’est pas compensé par le nombre d’étudiants formés depuis la suppression, en mars dernier, du numerus clausus.
S’y ajoute un double effet de vieillissement défavorable : d’une part, celui des médecins, qui annoncent leur départ en retraite, et, d’autre part, celui, plus général, de la population, qui a pour effet d’accroître la demande de soins.
Cette note souligne que ces différents phénomènes sont accentués médicale inégale sur l’ensemble du territoire.
En effet, selon les experts de Bercy, il n’y a jamais eu autant de médecins en France, mais les disparités territoriales se creusent, malgré les différentes mesures incitatives d’installation, comme les aides financières mises en place depuis 2013 pour inciter les jeunes médecins à s’installer dans les déserts médicaux. Les différentes incitations n’ont pas eu d’effet sur ces déserts médicaux.
Si une adaptation temporaire et ciblée du principe de libre installation dans les zones particulièrement surdotées paraît être une solution partielle, nous avons conscience que les médecins ne doivent pas être punis s’ils exercent dans les territoires où les services publics ont disparu.
Une politique globale est donc nécessaire, le présent amendement ne visant à remédier qu’à l’un des aspects du problème. Il faut revitaliser les territoires, en y réimplantant des services publics pour accueillir les familles des médecins, et investir dans l’hôpital pour favoriser les passerelles entre l’activité libérale et l’activité hospitalière ; enfin, il faut donner les moyens aux universités d’augmenter le nombre d’étudiants formés en médecine.
M. le président. L’amendement n° 472 rectifié bis, présenté par M. P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Todeschini, Montaugé et Sueur, Mme Préville, MM. Temal et Jeansannetas, Mme Lepage, MM. Tissot, Fichet et Lozach, Mme Meunier, M. Pla, Mmes Blatrix Contat, Bonnefoy et Briquet, MM. M. Vallet et Cozic, Mme Le Houerou et MM. Durain, Michau, Devinaz et Kerrouche, est ainsi libellé :
Après l’article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 4131-6 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 4131-6-… ainsi rédigé :
« Art. L. 4131-6-…. – À titre expérimental et pour une durée de trois ans, dans des zones mentionnées au 2° de l’article L. 1434-4 et en concertation avec les agences régionales de santé, en lien avec les conseils territoriaux de santé mentionnés à l’article L. 1434-10 et en concertation avec les organisations syndicales représentatives des médecins au plan national, le conventionnement d’un médecin libéral en application de l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale ne peut intervenir qu’en concomitance avec la cessation d’activité libérale d’un médecin exerçant dans des conditions équivalentes dans la même zone. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »
II. – Les modalités d’application de l’expérimentation sont définies par décret en Conseil d’État.
III. – Au plus tard six mois avant la fin de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un bilan de cette expérimentation, qui porte notamment sur l’opportunité de la généralisation du dispositif.
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. Comme ceux qui viennent d’être défendus, le présent amendement vise à apporter des réponses aux grandes difficultés d’accès à des professionnels de santé que l’on observe dans les territoires ruraux.
Dans le département que je représente, la Nièvre, l’indicateur d’accessibilité potentielle localisée, qui permet de mesurer l’accessibilité aux professionnels de santé, est de 2,5 consultations par an et par habitant, alors que la moyenne nationale est à près de 4 – c’est dire ce que cela représente dans les territoires les plus dotés.
Les incitations financières, à la fois de l’État et des collectivités locales, qui ont été mises en œuvre pour pallier ces difficultés n’ont pas donné de résultats satisfaisants. L’État a tenté de mettre à disposition des médecins salariés recrutés par les hôpitaux de proximité.
Toutefois, alors que l’objectif était de favoriser 600 installations, seules quelques dizaines de médecins salariés se sont installées.
Cette situation ne peut perdurer. C’est pourquoi nous proposons de mettre en place un dispositif de régulation à l’installation, comparable aux dispositifs présentés précédemment, mais plus spécifique. De tels dispositifs existent déjà pour d’autres professionnels de santé, comme les infirmiers ou les kinésithérapeutes.
Nous proposons donc, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, que, dans les zones définies par l’ARS, en concertation avec les syndicats de médecins, pour leurs forts excédents en matière d’offre de soins, un nouveau médecin libéral ne puisse s’installer en étant conventionné que lorsqu’un médecin libéral de la même zone cesse son activité. Le conventionnement ne serait plus possible que de manière sélective pour de nouvelles installations.
Le présent amendement vise ainsi à favoriser l’installation dans des zones sous-dotées. Il a également pour objet une évaluation du dispositif durant les six mois précédant la fin de l’expérimentation, cette dernière étant prévue pour une durée de trois ans.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces amendements tendent à instaurer un conventionnement sélectif des médecins selon que ceux-ci s’installent dans des zones plus ou moins dotées en offre médicale. Je rappelle néanmoins qu’il y a peu de zones surdotées à l’heure actuelle.
M. Patrice Joly. Ce n’est pas vrai !
Mme Corinne Imbert, rapporteur. Certains des dispositifs proposés passent par la voie conventionnelle pour instaurer ce conventionnement sélectif ; d’autres passent par les agences régionales de santé, directement ou à défaut d’accord conventionnel.
Le Sénat, sur proposition de la commission des affaires sociales, s’était déjà opposé, lors de la discussion de la loi Santé en 2019, aux mesures de restriction à la libre installation des médecins libéraux sur le territoire, car ces mesures sont de faible efficacité.
Il existe d’autres dispositifs incitatifs pour l’installation des médecins,…
M. Patrice Joly. Lesquels ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. … notamment ceux qui ont été instaurés dans le cadre de la loi Santé. Il ne nous paraît donc pas opportun d’empiler les dispositifs en y ajoutant des mesures restrictives et peu efficaces.
M. Patrice Joly. La situation est invivable ! (Marques d’agacement sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Corinne Imbert, rapporteure. J’ajoute que, actuellement, on nous expliquerait presque que les étudiants qui commencent leurs études de médecine doivent déjà connaître leurs conditions d’installation. Dans ce contexte, il me paraît qu’une expérimentation de trois ans n’aurait pas beaucoup de sens.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces quatre amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je serais presque tenté de vous dire que vous avez raison.
M. Patrice Joly. Alors prenez les mesures adéquates !
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Néanmoins, ce serait une solution de facilité. (Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.)
J’ai beaucoup milité et travaillé sur ce sujet dans mon propre territoire. J’observe que depuis dix à quinze ans, chacun y est allé de sa mesure incitative, que ce soit pour aider à l’installation, notamment par des primes, ou pour favoriser les contrats d’engagement de service public. Tout a été fait !
M. Patrice Joly. Mais cela ne marche pas, et cela coûte cher !
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Cela frémit, monsieur Joly, quand on observe le terrain ; permettez-moi de vous le dire !
J’ai beaucoup discuté avec les étudiants. Or nombreux sont ceux qui préfèrent – c’est culturel, je n’y peux rien –, s’orienter vers le salariat.
M. Patrice Joly. Et les 600 médecins salariés à recruter ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Je vous fais part de mon expérience et de ce que les étudiants m’ont dit. Comme vous, je souhaite qu’il y ait des étudiants et des médecins dans mon territoire.
M. Patrice Joly. Embauchez-les !
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Les étudiants ne veulent pas qu’on les contraigne : il nous faut l’entendre. Ces étudiants qui, parfois, ne lèvent pas le nez de leurs livres pendant des années n’ont pas envie que, à l’issue de leurs études, on leur impose d’exercer dans tel ou tel territoire sous peine de ne pas être conventionnés. Il faut l’entendre.
Par ailleurs, dans les territoires, les médecins proches de la retraite anticipent que les stagiaires et les internes qui viennent les épauler pendant quelque temps ne voudront pas rester, parce qu’ils jugeront leur cabinet obsolète ou leur patientèle trop importante ; ces jeunes médecins ne veulent pas être corvéables à merci : c’est une évolution que nous devons prendre en compte. Ce n’est plus la médecine d’autrefois, je n’y peux rien !
Certains de ces jeunes médecins souhaitent être salariés, d’autres souhaitent s’installer, mais pas durablement, et d’autres encore veulent exercer à la fois à l’hôpital et en libéral.
J’estime que la contrainte n’est pas la solution pour le moment. Peut-être sera-t-elle à terme une obligation, mais je n’en suis pas sûre, car, comme je l’ai expliqué aux étudiants que j’ai rencontrés, la fin du numerus clausus entraînera un apport de médecins supplémentaires, si bien qu’ils seront contraints, de fait, de s’installer dans les territoires où ils ne seront pas trop nombreux. (Protestations sur les travées du groupe SER.)
Pour l’heure, nous déployons des moyens palliatifs, mais je sens un frémissement. (Protestations sur les travées du groupe SER.) Nous y arriverons, à terme, sans la contrainte.
J’émets donc un avis défavorable sur ces quatre amendements.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, je vais quelque peu freiner votre rythme stakhanoviste – n’y voyez nulle critique ! – dans la tenue de cette séance. (Sourires.)
Depuis plus de dix ans, au Sénat et ailleurs, on a tout essayé ; toutes les propositions y sont passées. Or les résultats sont décevants.
Notre collègue Hervé Maurey a proposé je ne sais combien de dispositifs de contrainte que l’on n’a jamais pu faire fonctionner, à l’exception de l’obligation prévue dans la loi Hôpital, patients, santé et territoires, obligation qui, bien qu’elle n’ait pas survécu très longtemps, a tout de même été appliquée pendant quelques mois.
Il me paraît toutefois difficile de ne pas essayer. Ce que l’on peut dire aujourd’hui, c’est que les collectivités locales font des efforts absolument fous. Dans l’Orne, le conseil départemental a créé une institution ad hoc et salarie lui-même les médecins, de façon à les répartir sur le territoire. Telle est la créativité des collectivités locales.
Actuellement, seules les collectivités sont susceptibles de faire converger les attentes des médecins et celles de la population. Elles réalisent des efforts incroyables pour attirer et retenir des médecins.
Il me paraît donc nécessaire d’aider encore davantage les collectivités locales, notamment les conseils départementaux, qui jouent un rôle essentiel dans le champ social.
J’ai voté tous les textes prévoyant des contraintes, mais je constate qu’aucun n’a véritablement prospéré. Néanmoins, si je conviens que la solution ne passera sans doute pas par la contrainte, madame la ministre, il faut tout de même donner aux collectivités, notamment aux régions et aux départements, des moyens supplémentaires. Les départements sont réellement à l’écoute, et ils font preuve d’une grande créativité pour essayer d’attirer les médecins.
Le recours à des médecins étrangers n’est pas non plus la solution, car ceux-ci s’installent dans les territoires ruraux, mais les quittent ensuite pour s’installer dans des zones plus urbaines.
Nous sommes démunis, et pour l’instant, nous n’avons pas de solution. Pourtant, le besoin est bien là.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Je ne voterai aucun amendement visant à contraindre l’installation des médecins, non pas par posture idéologique, mais tout simplement parce que cela ne fonctionnera pas. (Protestations sur les travées du groupe SER.)
M. Patrice Joly. Mais on n’a pas essayé !
Mme Véronique Guillotin. La première raison, c’est qu’il n’y a plus de surpopulation médicale : tous les territoires sont en situation sous-dense, donc menacés de désertification médicale. Il manque des médecins partout, dans les territoires ruraux comme dans les territoires urbains ou périurbains.
Si l’on contraint l’installation des médecins libéraux, les jeunes médecins exerceront autrement : ils deviendront médecins coordonnateurs ou salariés, ce qui aura pour effet d’accentuer encore la désertification médicale. Je ne crois donc pas à cette solution.
Par ailleurs, je m’inscris quelque peu en faux par rapport à vos propos, madame la ministre : j’estime que les jeunes demeurent attachés à la médecine libérale, mais qu’ils ne veulent pas s’installer tout seuls dans un territoire rural.
C’est pourquoi la seule solution est, à mon avis, de poursuivre et d’accélérer la création des structures d’exercice coordonné qui ont été mises en place dans le plan Ma santé 2022. Pour cela, madame la ministre, il faut absolument que les ARS relâchent leur contrôle, afin de fluidifier le processus de création de ces organisations.
Il n’est plus normal aujourd’hui de mettre cinq ans pour monter une maison de santé pluriprofessionnelle, seul endroit où les jeunes médecins généralistes souhaitent travailler, en y faisant un temps plein à deux, en y travaillant trois fois par semaine ou en complétant cette activité par une activité dans l’hôpital de proximité, à raison par exemple de deux fois par semaine. La médecine d’aujourd’hui n’est plus la médecine d’hier. Cela impose toute une réorganisation.
Pour ces raisons, je voterai contre ces amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Martin Lévrier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Ce débat est ancien, et – j’en donne acte à mes collègues représentant des territoires en situation de sous-densité – nous avançons trop lentement. Il existe pourtant des solutions efficaces, et le travail qui a été fait ces dernières années n’a pas été inutile.
Nathalie Goulet évoquait le dispositif qui vient d’être lancé dans l’Orne. J’ai moi-même reçu le prospectus m’invitant à aller m’installer dans l’Orne, mais, pour l’heure, je reste à Paris. (Sourires.)
Des dispositifs similaires ont été mis en place en Saône-et-Loire et dans d’autres départements,…
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. En Vendée !
M. Bernard Jomier. … où l’on constate qu’ils fonctionnent.
Les jeunes médecins sont attachés à l’attractivité d’un territoire et aux conditions d’exercice, notamment à l’exercice regroupé. Ils sont de plus en plus demandeurs du salariat, qui leur permet de prendre des congés et d’avoir une vie de famille.
Ces dispositifs sont bien conçus, car ils répondent aux préoccupations des jeunes médecins, que ce soit en termes de qualité de leurs conditions d’exercice ou de respect de la vie privée. Ainsi, des territoires où l’on craignait ne pas parvenir à lutter contre la désertification recrutent et voient leur démographie médicale s’améliorer.
D’un point de vue philosophique, je pourrais tout à fait souscrire à l’idée d’un conventionnement sélectif, mais cela ne peut fonctionner que dans un système clos. Il faudrait que les médecins ne puissent pas travailler ailleurs que dans les zones où l’on souhaite favoriser leur installation.
Or la réalité est que nous manquons globalement de ces professionnels, si bien que si, on leur refuse le conventionnement à tel endroit, ils ne s’installeront pas à tel autre endroit où l’on souhaite qu’ils s’installent ; ils choisiront de rejoindre une structure située dans le territoire où ils veulent vivre, et pas à 300 kilomètres.
Ces dispositifs peuvent paraître séduisants, mais ils sont vains. D’autres pays ont essayé de type de solution, y compris l’Algérie qui, dans les années 1960, avait entrepris une planification sanitaire fondée sur les mêmes principes. (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.) Cela a été un échec complet, en Algérie comme dans tant d’autres pays qui ont tenté la même démarche, car ce type de dispositif n’est pas efficace pour pallier une pénurie de personnel qualifié, en l’occurrence, une pénurie de médecins.
C’est pourquoi je ne voterai pas ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Fichet. Je trouve surprenant que l’on ne tente même pas d’expérimenter un tel dispositif, au motif qu’il ne fonctionnera pas !
La formation d’un médecin généraliste coûte 150 000 euros à l’État. (M. Alain Milon s’exclame.) Il ne me semble pas démesuré, eu égard à l’argent public déboursé, d’avoir un minimum d’exigence quant à la localisation du conventionnement des jeunes médecins.
Les médecins généralistes pourraient eux-mêmes se sentir quelque peu redevables et considérer qu’il est normal de s’installer, au moins pour leurs cinq premières années d’exercice, là où l’on a réellement besoin d’eux. Cela ne me semble pas de nature à porter atteinte à la liberté d’installation.
Je pense donc que, si nous n’agissons pas, la situation deviendra extrêmement difficile.
Aujourd’hui, neuf millions de Français n’ont pas de médecin traitant, non seulement dans les zones rurales, mais aussi dans les territoires péri-périurbains et dans les quartiers difficiles. C’est un défi auquel nous devons répondre. À cet égard, la mise en place des maisons de santé et le relèvement du numerus clausus ont été de bonnes initiatives, mais nous devons encore progresser.
Au sein du corps médical, les médecins sont les seuls à n’avoir pas de contrainte à l’installation, contrairement aux professions paramédicales, telles que les pharmaciens ou les kinésithérapeutes. Ces derniers ont un minimum de contrainte, et cela fonctionne assez bien.
C’est pour ces raisons que je souhaite que ces amendements soient adoptés.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Une fois n’est pas coutume, madame la ministre : je suis d’accord avec vous.
Il ne faut pas, selon moi, opposer médecine libérale et médecine salariée. Le fait que les jeunes médecins, qui sortent de leurs études au bout de huit, neuf ou dix ans, reprennent la patientèle de leurs parents eux-mêmes médecins libéraux – c’est le cas dans ma ville –, est une très bonne chose. Mais il faut en même temps développer la médecine salariée, notamment au travers des centres de santé. Certains départements et communes les expérimentent déjà, avec, semble-t-il, un certain succès.
Dans mon département du Pas-de-Calais, qui comporte, vous le savez, de nombreux déserts médicaux, la petite commune d’Annequin – elle compte 2 348 habitants – a fait le pari d’ouvrir un centre de santé. Grâce au maire, qui a racheté pour l’occasion un ancien dispensaire des mines, on est passé d’un à quatre médecins salariés, trois d’entre eux étant des jeunes femmes. Il y a, en effet, de plus en plus de médecins femmes ; elles souhaitent avoir une vie de famille et être salariées.
Il faut valoriser ces centres de santés salariés, qui, d’ailleurs, grâce aux secrétaires mises à disposition, allègent le poids de la charge administrative très lourde qui pèse sur ces jeunes médecins. Dès lors, ces derniers sont tout à fait satisfaits et travaillent dans de bonnes conditions.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour explication de vote.
Mme Élisabeth Doineau. Tout comme vous, je trouve inacceptable que certains Français soient éloignés de l’accès à la santé. Néanmoins, je crois que les solutions que vous proposez ne sont pas les bonnes.
J’ai eu l’occasion de m’intéresser à ce sujet, d’une part, parce que mon département de la Mayenne se trouvait dans une situation très difficile en la matière, d’autre part, parce que j’ai pu prolonger cette étude dans le cadre de la délégation sur l’accès aux soins que j’ai formée, durant deux ans, avec Thomas Mesnier et Sophie Augros. Nous avons beaucoup travaillé la question de l’accueil des médecins dans les territoires.
Je voudrais vous inciter, chers collègues, à appeler notre ancien collègue Jean-Claude Luche, ancien président du conseil départemental de l’Aveyron : il a mené une politique tellement dynamique sur ce plan que son département est l’un des seuls à connaître, depuis quelques années, un flux positif de médecins arrivants. Ces derniers y sont aujourd’hui excédentaires.
Par ailleurs, permettez-moi de préciser une chose : on ne peut pas distribuer ce que l’on n’a pas. Or nous manquons presque partout de médecins. Si cette disposition de conventionnement obligatoire était mise en place, les jeunes risqueraient de se tourner vers la pharmacie, la biologie ou l’industrie. Ils iraient là où se trouve leur famille ou vers des régions où ils souhaitent habiter.
Par ailleurs, il existe de nombreuses solutions à la disposition des élus, notamment la possibilité pour les médecins de se regrouper dans des maisons pluridisciplinaires. Ces lieux sont de plus en plus plébiscités par les jeunes médecins qui y ont été « accrochés » par leur stage.
Dans mon département de la Mayenne, une première année de médecine a été mise en place et, dès la deuxième, l’étudiant a la possibilité de signer un contrat d’engagement de service public lui permettant de poursuivre vers l’exercice médical.
M. le président. Mes chers collègues, je vous demande d’être concis, pour que nous puissions avancer dans l’examen du texte.
La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. Permettez-moi de rappeler que, dans la dernière loi santé, nous avons voté diverses dispositions, dont certaines attendent encore leurs décrets d’application, notamment celles qui concernent les étudiants en médecine. (Mme la présidente de la commission le confirme.) Avant d’aller chercher de nouvelles mesures, il serait bon de mettre en œuvre celles que nous avons votées !
Par ailleurs, je comprends le cri de colère qui monte de la Nièvre, parce que je suis élue de ce département. Nous demandons un juste maillage du territoire ; il s’agit vraiment de répartition territoriale.
J’ai contribué à la rédaction du rapport de Jean-François Longeot sur la désertification médicale. Nous avons évoqué le fait, tout à fait marquant, que chaque fermeture d’hôpital de proximité dissuade les jeunes médecins de venir s’installer en médecine libérale. En effet, pourquoi exercer dans un territoire où un patient ne peut pas être transféré ? Ce maillage est donc directement lié aux fermetures de lits d’hospitalisation et de services, qui dissuadent les installations.
Enfin, les différentes initiatives lancées par les départements ressemblent à un gigantesque mercato, chacun subtilisant les médecins installés dans le département d’à côté ! La raison est toute simple : il n’y en a pas assez, et les cohortes actuellement en formation sont insuffisantes. La seule solution est de former plus de médecins.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. En ce qui me concerne, j’ai toujours été contre le numerus clausus. On m’a expliqué que sa suppression ne résoudrait pas les problèmes et que, par ailleurs, on n’était pas en mesure de bien former les jeunes médecins… Puis, un jour, brusquement, on a décidé de lever ce numerus clausus ! Il a fallu attendre d’être au pied du mur pour que l’on commence à réagir !
Les déserts médicaux ne sont pas nouveaux. Il y aura non pas une seule solution, mais des multitudes de complémentarités d’action, pour garantir l’égalité de la présence des soins sur le territoire de la République.
J’entends, sur ces travées, certains élus vanter le dynamisme de leur département et expliquer les problèmes des territoires voisins par leur nullité.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. C’est absurde !
Je suis pour l’innovation sociale, pour que l’on aide les élus à innover et pour la pratique salariée collective dans certains territoires. En effet, je crois, moi aussi, que cela correspond à de grandes attentes, notamment chez les femmes, qui sont de plus en plus nombreuses et qui, les sondages le montrent, ont tendance à vouloir être salariées. Mais il est vrai que le seul salariat ne peut pas tout régler.
Par ailleurs, la proposition de notre collègue n’est pas d’obliger le médecin d’aller d’un point A à un point B, encore que je me rappelle, madame la ministre, votre position en faveur de cette mesure lorsqu’elle était proposée par M. Fabius.
La proposition de Patrice Joly est de ne pas autoriser de nouveaux conventionnements dans les secteurs où l’on considère qu’il y en a déjà assez. On rendrait, en somme, plus disponibles à aller s’installer ailleurs des médecins qui, par facilité, pourraient s’installer dans des zones considérées comme mieux dotées que les autres.
Cela n’empêcherait nullement de mener des politiques d’incitation à l’installation dans les zones délaissées.
M. le président. Il faut conclure, chère collègue.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. C’est la raison pour laquelle je voterai cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Ce débat, très intéressant, est ardent ! Et il est loin d’être terminé.
Dans un grand pays comme la France, il est anormal d’avoir de telles difficultés à prendre rendez-vous chez un généraliste ou un spécialiste.
Nous devons faire de grands choix. Ayant moi-même des étudiants en médecine dans ma famille, je ne pense pas que l’on puisse leur imposer quelque contrainte que ce soit. Car, dans ce cas, ils voteraient avec leurs pieds.
Au reste, l’histoire montre que la gestion de la pénurie par la contrainte a rarement fonctionné.
Mme Laurence Cohen. Donnez-nous des exemples !
M. Olivier Henno. Vous voulez des exemples ? L’Union soviétique ! (Rires et applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – Exclamations sur les travées du groupe CRCE.) Si la contrainte avait fonctionné, l’URSS serait toujours debout.
Il est certain que la démographie médicale est un problème extrêmement lourd, et nous n’aurons pas d’autre choix que de former plus de médecins. À cet égard, je trouve que notre système de formation, même délesté du numerus clausus, manque un peu d’agilité.
Je terminerai en partageant mon interrogation quant à l’organisation du cloisonnement entre médecine de ville, médecine libérale et hôpital. Tout d’abord, cela induit cette étrangeté que, le week-end, la permanence des soins est uniquement réalisée à l’hôpital. Ensuite, ce cloisonnement ne me semble pas répondre aux attentes des médecins sortant du système de formation, notamment pour ce qui concerne le salariat.
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour explication de vote.
M. Patrice Joly. Je tiens, tout d’abord, à m’excuser auprès de Mme la ministre pour ma réaction un peu vive tout à l’heure.
M. Patrice Joly. En ce qui me concerne, je suis confronté à la réalité d’une population stressée et en désarroi par rapport à ce problème d’accessibilité à la médecine.
Je voudrais bien préciser que nous parlons non pas de coercition, mais simplement de régulation. Il s’agit d’avoir un conventionnement sélectif ; on est tout de même très loin d’un régime soviétique. Je rassure mon collègue Olivier Henno : je n’ai aucune affinité par rapport à ce genre de systèmes !
Si, comme vous le prétendez, il n’y a pas de territoires surdotés en médecins, et si le manque est généralisé, il faut d’autant plus réguler !
En ce qui concerne le salariat, comme vous le soulignez, madame la ministre, il y a effectivement une appétence pour ce modèle. Je me réjouis d’ailleurs que, dans le cadre du dispositif « 400 médecins salariés », un poste ait été ouvert à l’hôpital de Château-Chinon. Je suis prêt à accueillir personnellement le médecin en question.
Rappelons tout de même les efforts consentis par l’État : la subvention de 50 000 euros versée lors de l’installation d’un médecin ; les avantages fiscaux durant cinq ans, à savoir l’exonération totale de charges sociales et d’un certain nombre d’impôts, en particulier locaux, qui remontent ensuite par palier de 20 % chaque année pendant dix ans, ce qui n’est pas rien ; les faibles loyers dans les maisons de santé des collectivités locales ; enfin, les bourses distribuées par l’État et les collectivités locales.
Mon département distribue de telles bourses depuis quatre ou cinq ans, et nous avons pris certaines initiatives dans ce sens lors de ma présidence du conseil général ; aujourd’hui, 33 étudiants en médecine sont conventionnés et vont s’installer prochainement dans le département.
Il nous faut donc vraiment trouver des solutions. L’ensemble des dispositifs mis en place ne fonctionne pas ; d’où l’idée d’expérimenter une nouvelle solution.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je suis d’accord avec ce qui a été dit par Véronique Guillotin, Bernard Jomier ou Olivier Henno – je n’y reviendrai pas.
Monsieur Fichet, je voudrais que l’on se mette à la place des étudiants en médecine. Je trouve scandaleux que vous puissiez reprocher à un étudiant en médecine de coûter à l’État 150 000 euros.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Oui, c’est honteux !
M. Alain Milon. Comment voulez-vous que ces étudiants aient envie de s’engager dans cette voie quand on leur reproche ce genre de choses ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
En outre, vous ignorez quelles économies l’étudiant en médecine en poste à l’hôpital permet à ce dernier de réaliser. (Bravo ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je vous prie donc d’être plus modéré. Et, puisque je suis en colère d’avoir entendu de tels propos, je vous pose la question : combien coûte un sénateur pour reprocher à un étudiant ce qu’il coûte à la Nation ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera ces amendements.
Ce débat a lieu chaque année, sans que l’on progresse. On nous dit que tout a été fait et essayé… La preuve que non ! Et comme le propose le rapport d’information rédigé par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, une dose de coercition et d’encadrement est nécessaire.
Nous proposons de réaliser une expérimentation sur seulement trois ou cinq ans, ce que vous vous refusez à faire. Il me semble que cette expérimentation, qui n’est pas hostile aux médecins, permettrait d’éviter ces débats continuels à l’avenir. On en parle chaque année, mais il s’agirait de la mettre enfin en place. Cela vaut la peine d’essayer : il nous faut pouvoir disposer de médecins répartis sur l’ensemble du territoire.
Enfin, l’argument consistant à dire qu’un tel système ne fonctionne pas dans d’autres pays est contrebalancé par le succès de dispositifs similaires pour les kinésithérapeutes et d’autres professions du secteur médical. La question mérite donc d’être posée.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces débats sont passionnés, car tous nos départements sont concernés par le sujet.
Permettez-moi de rappeler que, l’année dernière, à l’occasion de la loi Santé de 2019, nous avons voté à la quasi-unanimité du Sénat une mesure contraignante à destination des étudiants. Elle consistait à imposer aux internes de médecine générale en dernière année une période d’un an de professionnalisation dans les endroits ayant besoin de médecins.
L’Assemblée nationale est revenue sur cette mesure, ce que je regrette. Nous avons toutefois réussi, Alain Milon et moi-même, à faire en sorte que ces étudiants restent au moins six mois.
Cette période de professionnalisation est importante, parce qu’elle concerne quelque 3 500 internes en médecine générale au niveau national. Elle gomme la nécessité d’avoir un maître de stage pour ces jeunes gens qui sont dans la dernière ligne droite de leurs études et qui, demain, seront médecins. Ils représentent donc un renfort, en moyenne, de 35 futurs médecins chaque année dans chaque département.
En outre, ce dispositif n’est pas applicable dans trois ans ! Madame la ministre, si le décret est publié, il fonctionnera dès le 1er novembre 2021, c’est-à-dire dans moins d’un an. La signature de ce décret est donc fondamentale.
Bien que les étudiants aient dit alors que le Sénat était tombé sur la tête, cela représente, dans chaque département, au moins 35 étudiants, futurs médecins à la veille d’être diplômés, venant travailler en renfort aux côtés de leurs aînés, en maisons de santé ou en cabinets médicaux, et sans l’exigence d’une maîtrise de sage.
Voilà ce que le Sénat a fait, madame la ministre, et je compte sur vous pour que le décret d’application soit publié rapidement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Je souscris aux propos d’Alain Milon : dans la crise que nous vivons, comme tenu de l’implication des étudiants en médecine, qui font tourner les hôpitaux, reprocher à ces jeunes l’argent qu’ils coûtent à la Nation est scandaleux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je le rappelle, ils passent un concours difficile, ils travaillent dur pendant toutes leurs années d’études et ils ne sont en aucune façon, passez-moi l’expression, des « glandeurs » ! Et l’on ne fait pas les mêmes reproches aux autres étudiants.
Comme vous l’avez dit, il n’y a pas de solution miracle. Dans ma région des Pays de la Loire, je suis chargée de la mission Santé. Nous avons mis en place un plan, ainsi que de nombreuses mesures, dont certaines fonctionnent bien. Aucune, toutefois, n’a d’effet miracle.
Nous avons mis en place un centre, à Laval, avec des médecins retraités qui accueillent des internes. Le bilan est extrêmement positif. Par ailleurs, nous venons de mettre en place, avec la faculté de médecine d’Angers, un dispositif faisant en sorte que des chefs de clinique se rendent dans les hôpitaux périphériques pour accueillir des internes.
Ce n’est que par ces solutions d’appui aux centres de santé et aux maisons de santé que l’on peut agir. Je pense que la coercition ne marche pas, car, comme l’a dit Olivier Henno, on ne gère pas la pénurie par la contrainte.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 472 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 541 rectifié n’est pas soutenu.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 58 rectifié bis est présenté par MM. Bonne et Bascher, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bonhomme, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Courtial et Cuypers, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Deromedi et Dumas, MM. B. Fournier et Genet, Mme F. Gerbaud, M. Gremillet, Mmes Gruny, Guidez et Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, M. Lefèvre, Mme Micouleau, M. Moga, Mmes Noël, Procaccia et Puissat, M. Rapin, Mme Richer, MM. Sautarel et Segouin, Mme Thomas, MM. Vogel et Charon, Mme Di Folco, M. H. Leroy et Mme de Cidrac.
L’amendement n° 406 rectifié ter est présenté par MM. Henno et P. Martin, Mme Dindar, MM. Kern, Janssens, Delcros et Levi, Mme Vermeillet, MM. Laugier, S. Demilly, Hingray, Lafon, Le Nay et Cazabonne et Mme Morin-Desailly.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 8° de l’article L. 162-9 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Le cas échéant, les modalités de versement d’une aide financière complémentaire aux chirurgiens-dentistes, aux sages-femmes ou aux auxiliaires médicaux interrompant leur activité médicale pour cause de maternité ou de paternité. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Valérie Boyer, pour présenter l’amendement no 58 rectifié bis.
Mme Valérie Boyer. Cette disposition devrait faire l’unanimité sur ces travées, car elle répond, au moins en partie, aux difficultés des professionnels de santé libéraux, qui ont été évoquées.
Il s’agit de faire en sorte que ces professionnels de santé puissent avoir, dans les règles conventionnelles, de quoi prendre en charge le congé de paternité, de maternité ou le congé d’adoption.
L’avenant n° 3 de la convention médicale a instauré une aide financière complémentaire à destination des médecins libéraux interrompant leur activité pour cause de maternité, de paternité ou de congé d’adoption, afin de les aider, pendant cette période, à faire face aux charges inhérentes à la gestion du cabinet médical. Mais l’arrêt d’activité rend difficile la prise en charge d’un cabinet.
Actuellement, les praticiennes libérales paramédicales perçoivent une indemnité journalière de 56,35 euros, ainsi qu’une allocation forfaitaire unique de repos maternel de 3 428 euros pour leurs congés maternité. Ces montants sont dérisoires, cette dernière allocation ne suffisant même pas à couvrir les charges professionnelles d’un praticien pendant les seize semaines du congé maternité.
L’intégration de cette problématique dans les négociations conventionnelles constituerait donc un alignement des droits de tous les professionnels de santé sur la couverture maternité.
Enfin, je pense que cela permettrait l’installation des femmes en médecine libérale, pour lesquelles vous savez, mes chers collègues, combien c’est compliqué.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 406 rectifié ter.
M. Olivier Henno. Il a été bien défendu. J’ajouterai simplement que l’avantage supplémentaire de maternité est très attendu par un certain nombre de professions médicales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces amendements ont pour objet la possibilité, dans le cadre des négociations conventionnelles, d’accorder une aide financière supplémentaire aux chirurgiens-dentistes, aux sages-femmes ou aux auxiliaires médicaux se trouvant en congé pour cause de maternité ou de paternité.
Cet avantage a été accordé aux médecins libéraux en 2017, par la voie d’un avenant à la convention médicale. Les médecins bénéficient ainsi d’une aide financière pour maternité, paternité ou adoption, en complément des indemnités journalières auxquelles ils sont éligibles.
Il me paraît donc souhaitable d’ouvrir cette possibilité pour ces professionnels de santé dans le cadre des négociations conventionnelles.
La commission émet donc un avis favorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous demandez l’extension de l’aide complémentaire maternité aux auxiliaires médicaux et aux sages-femmes conventionnées. Je rappelle toutefois que des aides financières existent déjà pour les congés maternité ou paternité de ces professionnels.
Les professionnels de santé libéraux peuvent bénéficier d’une allocation forfaitaire de 3 377 euros et d’indemnités journalières forfaitaires.
Ces aides permettent d’indemniser ces professionnels jusqu’à 9 600 euros en cas de congé maternité. La loi de financement de la sécurité sociale de 2019 a d’ailleurs étendu la durée de ce congé maternité pour l’aligner sur celle des salariés, soit 16 semaines pour une naissance simple.
Ces dispositifs permettent d’obtenir des taux de remplacement de leurs revenus importants, compris, en moyenne, entre 82 % et 145 % en fonction des professions paramédicales et sages-femmes. Ces taux peuvent être supérieurs si ces professionnels ont recours à un remplaçant. Votre préoccupation, qui est légitime, est donc déjà prise en compte, me semble-t-il.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 58 rectifié bis et 406 rectifié ter.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 33.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.)
PRÉSIDENCE DE Mme laurence rossignol
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
Article 33 bis (nouveau)
I. – L’article L. 162-1-21 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Bénéficient également du tiers payant sur la part des dépenses prise en charge par l’assurance maladie obligatoire les assurées pour frais relatifs à une interruption volontaire de grossesse mentionnés à l’article L. 160-8. »
II. – L’article L. 2212-10 du code de la santé publique est ainsi rétabli :
« Art. L. 2212-10. – La prise en charge de l’interruption volontaire de grossesse est protégée par le secret afin de pouvoir préserver, le cas échéant, l’anonymat de l’intéressée. »
III. – À l’article 20-4 de l’ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l’amélioration de la santé publique, à l’assurance maladie, maternité, invalidité et décès, au financement de la sécurité sociale à Mayotte et à la caisse de sécurité sociale de Mayotte, après la référence : « L. 161-34 », est insérée la référence : « , L. 162-1-21 ».
IV. – Au quatrième alinéa de l’article 9 de l’ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales, après la référence : « L. 161-15 », est insérée la référence : « , L. 162-1-21 ».
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadège Havet, sur l’article.
Mme Nadège Havet. Aujourd’hui, en France, lorsqu’une interruption volontaire de grossesse, ou IVG, est pratiquée, le forfait de prise en charge des frais causés est remboursé en totalité par l’assurance maladie, mais la dispense d’avance de frais, elle, n’est pas garantie dans tous les cas et pour toutes les assurées.
L’absence de pratique systématique du tiers payant intégral ne permet pas, aujourd’hui, de garantir le respect du secret pour les assurées qui ont la volonté de garder leur parcours confidentiel.
Cet article, introduit par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, tend à mettre fin à cette situation. Nos collègues députés ont en effet voté en faveur du tiers payant intégral systématique en cas d’interruption volontaire de grossesse, avec le souci de permettre cette confidentialité dans tous les cas de figure. Je partage cette volonté !
L’amendement adopté tendait à préciser que la prise en charge de l’interruption volontaire de grossesse était protégée par le secret, afin de pouvoir préserver, le cas échéant, l’anonymat de l’intéressée. Oui, les femmes doivent pouvoir y avoir recours si elles le souhaitent, sans que l’information ne soit révélée à leurs parents ou à leur conjoint !
Mme la présidente. L’amendement n° 169, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de suppression de l’article 33 bis, qui tend à étendre le bénéfice du tiers payant à toutes les assurées au titre des frais relatifs à une interruption volontaire de grossesse et à prévoir que la prise en charge d’une IVG soit protégée par le secret.
Cet article est issu de la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement adoptée par l’Assemblée nationale le 8 octobre dernier.
Rappelons que les interruptions volontaires de grossesse sont intégralement prises en charge par l’assurance maladie et que les assurées les plus vulnérables bénéficient déjà du tiers payant : assurées mineures, bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire, et bénéficiaires de l’aide médicale d’État.
Le tiers payant est, en outre, largement pratiqué dans les établissements de santé. Le dispositif proposé aurait donc essentiellement un effet sur les frais relatifs aux IVG médicamenteuses prescrites en ville.
Concernant la confidentialité entourant la prise en charge des IVG, certaines dispositions permettent déjà de la garantir dans certains cas : la confidentialité est absolue pour la prise en charge des IVG des mineures sans consentement parental. Pour les assurées majeures, la feuille de soins peut être aménagée de façon à préserver la confidentialité des patientes ; le médecin de ville peut aussi les orienter vers un établissement de santé garantissant leur anonymat.
Les évolutions des dispositions encadrant l’IVG, qui doivent assurer un recours effectif au droit à l’avortement, méritent un débat approfondi.
Or la commission n’a pas pu apprécier pleinement la portée des dispositifs proposés, qui ont été introduits par voie d’amendement à l’Assemblée nationale et qui ne relèvent pas tous du champ d’une loi de financement de la sécurité sociale.
Il est préférable d’évaluer l’opportunité de ces mesures dans le cadre d’un texte spécifique. C’est pourquoi la commission présente cet amendement de suppression.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Si je comprends bien les propos de Mme la rapporteure, la commission ne s’oppose pas sur le fond au principe figurant dans cet article. Elle considère simplement qu’une telle mesure devrait plutôt s’inscrire dans le cadre d’un autre véhicule législatif.
Je pense que nous partageons tous ici, sur ces travées, l’objectif de rendre le recours à l’IVG le plus effectif possible pour les femmes, d’une part, et d’être le plus protecteur possible pour ces femmes, d’autre part.
Dès lors, il nous semble opportun de mettre en place le plus rapidement possible le dispositif essentiel prévu par cet article, afin de proposer un accès pleinement effectif à l’IVG pour les femmes majeures qui pourraient subir une pression ou des représailles de la part de leurs proches. Il faut que les femmes puissent effectivement bénéficier de la protection que ce dispositif leur assure.
Enfin, je précise que cette mesure a des implications financières, ce qui explique qu’elle figure dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Pourquoi s’en priver ? Pourquoi retarder la mise en place d’un dispositif qui garantit une plus grande effectivité de l’accès à l’IVG et une meilleure protection des femmes dans notre pays ?
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je vous remercie de vos explications, monsieur le secrétaire d’État.
Sur la forme, je comprends ce que dit notre rapporteure, mais, mon Dieu, ce ne serait pas la première disposition n’ayant pas de lien direct avec la loi de financement de la sécurité sociale que nous adopterions !
Je faisais même remarquer tout à l’heure qu’il manquait des éléments financiers en ce qui concerne les maisons de naissance et que l’existence de cet article, tout à fait bienvenu par ailleurs, pouvait se discuter dans le cadre d’une loi de financement de la sécurité sociale.
Par conséquent, les raisons de forme qui ont été avancées ne me paraissent pas rédhibitoires, et il faut s’en tenir réellement au fond : cet article améliore l’accès des femmes à l’interruption volontaire de grossesse, dans la mesure où celles-ci pourront bénéficier du tiers payant pour l’ensemble des frais occasionnés par une IVG.
Pour notre part, nous ne voterons donc pas cet amendement de suppression, dont l’adoption enverrait un message négatif et, d’une certaine façon, exprimerait une position de fond.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Il est extrêmement important que nous votions cet article.
Je me réjouis d’ailleurs que l’Assemblée nationale ait pu l’adopter sans que cela ait apparemment posé le moindre problème. Il est important que le Sénat puisse également l’adopter, pour toutes les raisons qui viennent d’être exposées.
Il est également important de ne pas s’en tenir uniquement à la forme, car la forme, c’est aussi le fond.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr !
Mme Laurence Cohen. On cherche finalement à faire en sorte que toutes les femmes, qui le souhaitent évidemment, puissent égalitairement avoir accès à l’interruption volontaire de grossesse, dans les meilleures conditions qui soient, y compris en prévoyant les conditions financières leur permettant d’y accéder sans aucun frein d’aucune sorte.
Voilà la question posée à notre Haute Assemblée ; voilà le sujet sur lequel, me semble-t-il, nous devons nous prononcer.
Dans cette période de pandémie, on a vu que l’accès aux soins, d’une manière générale, était difficile ; l’accès à l’IVG l’était donc d’autant plus. À la lumière de tous ces éléments, il serait extrêmement positif que notre assemblée vote majoritairement, voire unanimement, contre cet amendement de suppression.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 169.
(L’amendement n’est pas adopté.) – (Applaudissements sur des travées des groupes SER et CRCE.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 33 bis.
(L’article 33 bis est adopté.)
Articles additionnels après l’article 33 bis
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 441 rectifié bis est présenté par Mme Billon, MM. Poadja, Hingray, Capo-Canellas et Lafon, Mmes de La Provôté et Férat, M. Delcros, Mmes C. Fournier, Perrot, Jacquemet, Vérien, Vermeillet, Tetuanui et Létard, MM. Cadic, J.-M. Arnaud, Longeot, Levi, Détraigne et Kern, Mme Sollogoub et MM. Le Nay, Janssens, Canevet et Duffourg.
L’amendement n° 581 rectifié est présenté par Mme Lienemann.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 33 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, un rapport sur l’extension du dispositif « engagement maternité » à l’ensemble du territoire, son financement par une dotation populationnelle et sur le renouvellement des indicateurs de périnatalité nécessaires.
La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour présenter l’amendement n° 441 rectifié bis.
Mme Nadia Sollogoub. Je présente cet amendement au nom de ma collègue Annick Billon.
Il s’agit d’une demande de rapport, mais peu importe : il arrive en effet que de telles demandes soient acceptées, d’autant plus que cette proposition est réellement très pertinente !
Ma collègue souhaitait attirer l’attention et, surtout, demander un état des lieux très précis du dispositif « engagement maternité », dispositif extrêmement important, dont avait parlé l’ancienne ministre de la santé. Il serait surtout très intéressant qu’on l’étende à tout le territoire.
L’« engagement maternité » a été annoncé pour organiser des schémas de prise en charge des parturientes qui résident à plus de quarante-cinq minutes d’une maternité. En fait, cet engagement semble avoir du mal à prendre corps.
Pourtant, il faudrait qu’il devienne une réalité dans chaque territoire, et ce, finalement, quelle que soit la distance avec la maternité. Un tel engagement devrait définir dans chaque territoire les schémas d’accès aux soins de prévention, les prises en charge pré et post-partum, la permanence des soins périnataux et les mécanismes de prise en charge des urgences.
Je défends très volontiers l’amendement de ma collègue, parce que ces dispositifs constituent un réel enjeu stratégique. Ils soulèvent en effet un problème d’aménagement du territoire.
Je vais parler au nom d’un certain nombre d’élus : on a beau avoir des enveloppes budgétaires au titre de la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, qui augmentent et qui nous permettent de construire des salles fêtes très attractives et un tas d’équipements très intéressants pour faire venir les gens sur nos territoires, il reste compliqué d’attirer les jeunes familles quand la maternité est à plus de quarante-cinq minutes de chez elles.
Si l’on pouvait au moins leur donner accès à ce dispositif, leur expliquer comment agir dans ce genre de circonstances, et faire en sorte que les choses soient extrêmement cadrées, alors ce rapport ferait partie des documents utiles pour le développement et l’essor de l’attractivité de nos territoires.
Mme la présidente. L’amendement n° 581 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Pour les raisons que vous connaissez – les demandes de rapport sont en général peu suivies d’effets –, la commission est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 441 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 796 rectifié, présenté par Mme Rossignol, M. Jomier, Mmes Poumirol et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou et Meunier, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Bouad, Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 33 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport visant à examiner les modalités de prise en charge intégrale de tous les moyens de contraception existants par l’assurance maladie.
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Je présente cet amendement en votre nom, madame la présidente, vous qui en êtes la première signataire, et au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Cet amendement tend à s’inscrire dans une approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes : il vise à réduire une inégalité sexuée spécifique au système de soins en vigueur. Certains moyens de contraception, pourtant indispensables à la santé de leurs usagères, ne sont pas remboursés par l’assurance maladie, ou le sont seulement partiellement.
Cet amendement d’appel vise à inciter le Gouvernement à se pencher sur la persistance de cette inégalité, qui peut être onéreuse, puisqu’elle peut atteindre 500 euros annuels pour certaines contraceptions non remboursées.
M. Alain Milon. Lesquelles ?…
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission est hostile aux demandes de rapport, mais je pense que le Gouvernement aura entendu votre appel, ma chère collègue.
La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Tout d’abord, si l’on est attentif, on s’aperçoit que, depuis lundi, jour où nous avons commencé à examiner ce texte, plus d’une trentaine de rapports ont été demandés. S’ils avaient tous été acceptés, monsieur le secrétaire d’État, je vous aurais souhaité bien du courage !
Il me semble logique de rejeter ces demandes. Au reste, l’année passée, dans le cadre de la loi Ma santé 2022, nous en avions accepté une bonne vingtaine et, au total, seuls deux ou trois ont été publiés.
Ensuite, je voudrais poser une question à Mme Meunier : quels sont les moyens de contraception coûtant plus de 500 euros dont vous parlez ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. J’ai entendu les interventions des uns et des autres à propos des rapports, mais l’ensemble de nos travaux repose souvent sur ce type de documents, qu’on les appelle études ou rapports, et on est très content de pouvoir s’appuyer dessus.
Pour répondre concrètement à votre question, monsieur Milon, je connais de jeunes femmes qui utilisent des éponges contraceptives, des gels ou des crèmes spermicides, qui ne sont pas remboursés par la sécurité sociale. (M. Valérie Boyer s’exclame.)
Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Ce débat est récurrent et, d’une année sur l’autre, on échange toujours à peu près les mêmes arguments au sujet des demandes rapports, que ce soit dans un sens ou dans l’autre.
Personnellement, j’aimerais bien – je crois même l’avoir déjà dit, mais sans succès – que soit enfin définie une doctrine sur les rapports, y compris ceux du Gouvernement. En effet, s’il est inutile de demander trop de rapports, il ne faut pas oublier que ces documents sont nécessaires à l’éclairage de l’action publique.
Il est temps que l’on se réunisse, avec le Gouvernement et l’Assemblée nationale, pour définir une vraie doctrine à ce sujet, fixer un nombre limité de rapports à remettre au parlement et rendre obligatoire l’élaboration desdits rapports par le Gouvernement.
Il me semble avoir déjà fait une intervention de ce genre il y a un ou deux ans, mais, malheureusement, chaque année, on a toujours à peu près les mêmes débats et on n’avance pas.
Il est vraiment temps que l’on établisse une doctrine claire : ne demander aucun rapport n’a pas de sens, mais, à l’inverse, se retrouver avec trop de rapports ne va pas non plus. Je plaide pour un cadrage précis dans ce domaine !
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je ne reviendrai pas sur la problématique des demandes de rapports.
Sur le fond, tous les contraceptifs ne bénéficient pas d’un remboursement, y compris parmi les contraceptifs oraux d’ailleurs. En outre, ma collègue Michèle Meunier a cité des produits qui ne bénéficient pas non plus d’une prise en charge.
Le problème, vous l’avez bien compris, c’est qu’il existe un reste à charge en matière de contraception. Ce n’est certes pas toujours le cas, mais il peut y en avoir un, et ce sont les femmes qui en supportent le coût, ce qui est anormal.
Il est nécessaire, dans un premier temps, d’évaluer l’état réel de la situation pour, éventuellement, si nécessaire, remettre à plat les différents remboursements des contraceptifs.
Actuellement, nous manquons de visibilité et de données complètes sur le coût de la contraception et sur le reste à charge pour les femmes.
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Je voudrais évoquer la question des rapports demandés au Gouvernement dans le cadre de l’examen de textes de loi.
Pourquoi y en a-t-il autant ? En réalité, c’est pour contourner le risque que des amendements soient jugés irrecevables au titre de l’article 40 ou de l’article 41 de la Constitution. Pour aborder le sujet que l’on souhaite en séance publique, la seule solution est alors de formuler une demande de rapport.
C’est ainsi que cela fonctionne, mais il est vrai que l’on ne peut absolument pas accepter tous les rapports : il y en a un nombre incalculable ! Alain Milon l’a dit, seuls deux rapports ont été rendus sur la vingtaine de rapports qui ont été demandés l’an dernier, dont aucun n’avait été accepté par le Sénat.
J’estime que le travail des parlementaires, au-delà de l’examen des textes, consiste aussi à fournir des rapports d’information, qui sont souvent de bien meilleure qualité que ceux que l’on peut attendre.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 796 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 33 ter (nouveau)
La section 7 du chapitre II du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifiée :
1° Après le 4° de l’article L. 162-32-1, il est inséré un 4° bis ainsi rédigé :
« 4° bis Les conditions à remplir par les centres de santé pour être régis par l’accord national, notamment celles relatives aux zones d’exercice, définies par l’agence régionale de santé en application de l’article L. 1434-4 du code la santé publique, concernant l’ouverture des centres de santé ou l’accroissement d’activité par le recrutement d’un nouveau professionnel de santé salarié. Ces conditions peuvent être modulées en fonction de la profession des professionnels de santé salariés exerçant au sein du centre de santé ; »
2° À la seconde phrase du dernier alinéa de l’article L. 162-32-2, après le mot : « dispositions », sont insérés les mots : « ainsi que les conditions relatives aux zones d’exercice définies en application du 4° bis de l’article L. 162-32-1 ».
Mme la présidente. L’amendement n° 992, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Nous souhaitons la suppression de l’article 33 ter.
Tout d’abord, cet article est issu d’un amendement du Gouvernement introduit en séance à l’Assemblée nationale. Il n’a donc pas pu faire l’objet d’un examen approfondi en commission par nos collègues députés, et encore moins d’une analyse de son bien-fondé via l’annexe 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
En fait, cet article a pour objet de réguler l’installation des centres de santé dans les zones prétendument surdotées. L’application des mesures de régulation aux centres de santé, au nom d’une meilleure répartition de l’offre de soins, sur le territoire n’est pas cohérente avec la situation que nous vivons aujourd’hui avec une cruelle acuité.
D’ailleurs, c’était l’objet du débat que nous avions juste avant la suspension de ce soir, lors duquel nous avions tous et toutes constaté le manque de médecins et le besoin de disposer de diverses solutions, dont celle des centres de santé où travaillent des médecins salariés.
Des maires issus de toutes les familles politiques se battent sur leur territoire pour faire en sorte que des centres de santé voient le jour.
Or, avec cet article, on est en train de dresser des obstacles et de limiter l’essor des centres de santé sur nos territoires ! Il y a là quelque chose qui ne va pas : on ne peut pas, d’un côté, constater que l’on manque de médecins, et, de l’autre, faire obstacle et essayer de réguler un dispositif qui pourrait contribuer à ce que des médecins salariés s’installent ensemble.
Avec cet article, ce qui est sûr, c’est que vous allez limiter le développement des centres de santé, à l’opposé de l’exercice coordonné prôné par le plan Ma santé 2022 et plébiscité par les jeunes médecins, qui ne souhaitent plus exercer isolément leur métier.
Pour nous, il faut encourager les aides à la création de centres de santé, qui sont également une excellente réponse en matière d’accès aux soins, car, je vous le rappelle, ces structures pratiquent le tiers payant – le secteur 1 –, ce qui répond aux besoins de la population, notamment des plus fragiles.
La Fédération nationale des centres de santé nous a alertés sur la dangerosité d’une telle disposition : je vous encourage, mes chers collègues, à voter la suppression de cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Je comprends que l’introduction de ce dispositif par le Gouvernement, qui plus est par voie d’amendement, ne soit pas satisfaisante.
Toutefois, cet article me semble répondre à un souci de cohérence entre les règles applicables aux professionnels de santé dans un cadre libéral ou salarié.
L’article renvoie la définition des conditions et modalités à la négociation avec les fédérations de centres de santé dans le cadre de l’accord national. Je ne vois pas d’obstacle à ce que ces discussions puissent aborder cet enjeu. Même si, en l’état, le dispositif soulève des interrogations de la part de ces acteurs, il ne s’oppose pas à des discussions sur le sujet.
La commission a donc émis un avis défavorable sur l’amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je tiens à rassurer Mme la sénatrice Cohen, qui souhaite supprimer un article ouvrant la possibilité aux partenaires conventionnels de négocier sur la régulation démographique au conventionnement des centres de santé, et lui rappeler la nécessité d’en discuter au préalable avec les représentants des centres de santé.
Madame la sénatrice, nous partageons votre souci de prendre en compte les spécificités de l’offre de soins de ces centres de santé, car, vous l’avez dit, celle-ci n’est pas en tout point comparable avec l’offre libérale, en particulier lorsque les centres de santé sont pluriprofessionnels.
C’est la raison pour laquelle cet article renvoie la déclinaison de la limitation de l’accès au conventionnement à la négociation conventionnelle, au lieu d’imposer des régulations existantes pour les professions libérales concernées.
Aujourd’hui, des mesures de régulation au conventionnement existent pour certaines professions de santé libérales.
Or les partenaires conventionnels ne sont pas habilités à négocier sur ce sujet pour les centres de santé, et aucune régulation en zone surdotée n’est donc appliquée pour les professions concernées exerçant en centre de santé, ce qui peut aboutir à des situations incohérentes.
À l’inverse, des mesures d’aide à l’installation en zone sous-dense sont proposées à la fois dans les conventions nationales monoprofessionnelles et dans l’accord national des centres de santé. Il apparaît donc justifié de permettre une négociation sur une mesure de régulation au conventionnement des centres de santé dans les zones surdotées.
Enfin, si, comme vous le mentionnez, la majorité des centres de santé s’installent dans des zones sous-denses, alors la majorité des soins de santé ne sera pas concernée par une éventuelle mesure de régulation et conservera le bénéfice des éventuelles dispositions d’aide à l’installation. Cet article n’aura donc pas l’effet que vous redoutez, madame la sénatrice.
Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le secrétaire d’État, vos explications ne me rassurent que fort peu !
Compte tenu de ce que vous venez de dire, pourquoi vous précipiter ainsi et introduire un tel article dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale ? Depuis le temps que l’on examine ce texte, il y avait tout de même d’autres urgences et d’autres dispositifs à faire figurer dans ce projet de loi de financement. Or, tout à coup, on a l’impression qu’il y a urgence !
Je le répète, quelle que soit notre famille politique, nous savons tous et toutes pertinemment que, dans les communes, il existe une vraie bataille et un véritable engagement pour faire en sorte que les centres de santé s’installent sur les territoires. Je ne prétends pas que c’est la solution à tous les problèmes, mais, ce qui m’inquiète beaucoup, ce sont les propos de Mme la rapporteure, à savoir l’espèce de parallélisme avec l’exercice libéral, parallélisme auquel vous ne nous êtes d’ailleurs pas livré, monsieur le secrétaire d’État.
Pourquoi ce parallélisme avec le secteur libéral ? Les centres de santé ne bénéficient pas des mêmes dispositifs avantageux que le secteur libéral. Je n’en donnerai qu’un exemple, celui des contrats de praticien territorial médical de remplacement.
Pourquoi dresser des obstacles à un système qui peut apparaître comme une solution et qui peut contribuer à un meilleur maillage territorial de notre système de santé ? Il faut l’avouer, ce dispositif est complètement inopérant ; une fois de plus, vous allez susciter le malaise et accentuer le renoncement et les difficultés d’accès aux soins.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. Je ne partage pas votre analyse, madame Cohen.
J’ai été alertée par des professionnels de santé, qui m’ont bien expliqué que ce qui est visé dans l’article, ce sont les zones dans lesquelles le niveau de l’offre de soins est particulièrement élevé. Il ne faudrait pas que des professionnels de santé salariés viennent s’installer en surnombre dans certains centres de santé, là où l’offre de soins est déjà importante.
La version initiale de l’article est déjà meilleure, car elle permet d’éviter une surconcentration des professionnels. Aujourd’hui, je me suis entretenue avec le président d’un ordre : il m’a demandé de ne surtout pas toucher au dispositif introduit par le Gouvernement, car il est protecteur.
Mme Laurence Cohen. Ah, si c’est l’ordre qui le demande…
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 615 est présenté par Mme Lienemann.
L’amendement n° 932 est présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
1° Première phrase
Remplacer les mots :
l’ouverture des centres de santé ou l’accroissement d’activité par le recrutement d’un nouveau professionnel de santé salarié
par les mots :
l’installation des centres de santé
2° Seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et en fonction de l’accessibilité socio-économique de l’offre de soins sur les territoires
L’amendement n° 615 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 932.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je constate un retour de l’appétence pour la régulation. Tout à l’heure, nous avions une discussion semblable au sujet de l’installation des médecins libéraux dans les zones surdenses, et il ne fallait surtout pas les contraindre ! Mais quand il s’agit des centres de santé, tout à coup, on aime la régulation… (Sourires sur les travées des groupes GEST et CRCE.)
Par cet amendement, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires souhaite éviter de freiner le développement des centres de santé et le déploiement de l’ensemble de leurs missions, comme le regroupement de professionnels de santé.
Nous proposons également de prendre en compte dans les mesures de régulation la dimension de l’accès socio-économique aux soins, car les centres de santé, en secteur 1 essentiellement, pratiquent le tiers payant, contrairement à certaines offres libérales sur certains territoires qu’il ne s’agit pas de réguler ; on l’a bien compris.
Par ailleurs, en pleine seconde vague épidémique, alors que les structures d’exercice coordonné sont pleinement mobilisées pour l’accompagnement et la prise en charge des patients, covid-19 comme non-covid-19, alors qu’elles sont impliquées dans le déploiement des stratégies de tests et qu’elles le seront encore demain dans le cadre de la stratégie vaccinale contre la covid-19, ces mesures de régulation nous paraissent précipitées et inopportunes.
Mme la présidente. L’amendement n° 1056, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 3
1° Première phrase
Remplacer les mots :
l’ouverture des centres de santé ou l’accroissement d’activité par le recrutement d’un nouveau professionnel de santé salarié
par les mots :
la création des centres de santé
2° Seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et en fonction de l’accessibilité socio-économique de l’offre de soins sur les territoires, comme l’accès au tiers payant et tarifs de secteur un prenant en compte la vulnérabilité sociale des patients sur le territoire
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Il s’agit d’un amendement de repli, qui vise à ne pas freiner le développement de centres de santé, malgré l’adoption du conventionnement des centres.
Pour ce faire, nous demandons la prise en considération des caractéristiques des centres de santé dans les mesures de régulation.
Ces caractéristiques, qui constituent aussi des principes fondamentaux, sont les suivantes : la dimension de l’accès socio-économique aux soins, car les centres de santé sont bien souvent les dernières structures présentes sur un territoire après la disparition des professionnels libéraux, la pratique du tiers payant et l’absence de dépassements d’honoraires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. J’entends bien les inquiétudes des auteurs de ces amendements, qui relaient celles qui ont été exprimées par le représentant des centres de santé.
Toutefois, les modifications proposées tendent à s’éloigner de la cohérence avec les dispositions applicables aux professionnels libéraux, par exemple dans le cadre des maisons de santé, qui n’ont pas de régime d’exception quand ils proposent le tiers payant ou les tarifs responsables.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Pour les raisons que j’ai exposées tout à l’heure, le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Mes chers collègues, il y a là confusion des genres ! Ou peut-être n’en est-ce pas une, en réalité…
Dans les maisons de santé, l’exercice est libéral ; dans les centres de santé, il est salarié. C’est totalement différent et, au nom d’une sorte de parallélisme, on est en train, en fait, de sanctionner les centres de santé et l’exercice salarié.
Je vous demande de réfléchir : vous allez freiner l’exercice au sein des centres de santé, ce qui m’étonne assez, car nombre d’entre vous ont été moteurs, dans les territoires, pour l’installation de tels centres. Je ne comprends pas comment, à l’heure où nous affrontons une pandémie montrant qu’il n’est vraiment pas nécessaire d’ajouter des freins aux difficultés que nous vivons déjà, vous choisissez d’en introduire dans ce PLFSS.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il y a deux poids, deux mesures !
D’un côté, il ne faut pas imposer de contraintes aux professionnels de santé libéraux, chacun doit pouvoir s’installer où il veut. De l’autre, parce que l’on parle d’un établissement public avec des salariés – comme tout le monde l’a dit, les jeunes médecins sont de plus en plus nombreux à vouloir être salariés –, il faut contrôler et freiner, pour éviter tout abus.
Notons, mes chers collègues, que ces centres de santé sont souvent vivement souhaités par une partie des professionnels de santé libéraux. En moyenne banlieue – c’est là où mes enfants habitent –, il faut, si tout va bien, quatre à cinq jours pour obtenir le moindre rendez-vous chez le généraliste, par exemple pour un enfant qui a de la fièvre.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Absolument !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Pour une famille dans laquelle on se débrouille, qui a un bon niveau culturel et un peu de science médicale, cela passe : on peut relativiser, se dire qu’un peu de fièvre, ce n’est pas si grave, et attendre. Mais les familles extrêmement modestes, celles qui, culturellement, seront mal à l’aise pour évaluer la gravité de la maladie, elles se retrouvent sans rien !
Je connais donc un certain nombre de libéraux, dans ces territoires, qui se réjouissent qu’il y ait des centres de santé. Eux n’y arrivent plus, donc ils sont contents de voir que des structures plus adaptées existent.
Pas de dogmatisme ! Je l’ai dit pour les zones rurales : innovons avec des centres de santé et des maisons de santé. C’est la complémentarité et la diversité qui permettront de répondre à l’offre. C’est précisément cela, d’ailleurs, qui a fait la richesse du système français : une offre publique, une offre privée et la possibilité de choisir son médecin.
Or vous voulez mettre des verrous pour limiter la création de centres de santé… Je trouve cela irresponsable !
Ces centres sont une demande de certains élus. On passe son temps à dire qu’il faut laisser les élus libres ; laissons-les libres ! Et voilà que, par je ne sais quel dogmatisme idéologique, vous voulez vous opposer aux interventions publiques.
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Pour ma part, donc, je plaide pour que l’on soutienne cet amendement de repli.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1056.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 20 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Pour l’adoption | 93 |
Contre | 234 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 170, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 3, seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, sur la base des dispositions applicables aux professionnels de santé libéraux
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à s’assurer de la cohérence entre mesures applicables aux professionnels libéraux et mesures applicables aux professionnels salariés, justement par souci d’équité.
Il ne s’agit donc pas, pour nous, de ne défavoriser les centres de santé ou de nous opposer à leur développement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement va s’évertuer à être cohérent avec lui-même et avec les positions défendues sur les amendements précédents, en exprimant un avis défavorable.
En effet, cet amendement tend à ce que les négociations conventionnelles sur un dispositif de régulation démographique au conventionnement des centres de santé se fondent sur les dispositions applicables aux professionnels de santé libéraux.
Le présent article 33 ter vise à réguler l’offre de soins, notamment à éviter les situations incohérentes dans lesquelles un professionnel de santé libéral ne pourrait pas se conventionner dans une zone surdotée, alors qu’un centre de santé accueillant le même type de professionnels le pourrait.
L’objectif de cette disposition est bien, je le confirme, que la régulation retenue soit cohérente avec celle qui s’applique aux professionnels libéraux. D’ailleurs, dans la plupart des cas, la méthodologie pour réaliser le zonage prend bien en compte, à la fois, les professionnels des centres de santé et les professionnels libéraux.
On peut donc considérer que l’article en lui-même satisfait la demande portée par cet amendement. Pour autant, il est nécessaire que les spécificités des centres de santé puissent être prises en compte dans les négociations et, je le répète, il n’est pas souhaitable que ces négociations soient juridiquement subordonnées aux négociations de conventions monoprofessionnelles.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 33 ter, modifié.
(L’article 33 ter est adopté.)
Article additionnel après l’article 33 ter
Mme la présidente. L’amendement n° 993, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 33 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le i du 2° du II de l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Dans le cadre du PLFSS pour 2019, un amendement autorisant l’expérimentation d’exercer à titre libéral en centre de santé a été adopté. Cela a créé une grande confusion, car cette disposition entrait en contradiction avec l’un des principes fondant l’activité des centres de santé, à savoir le salariat, qui participe de l’efficacité et de la pertinence de ce mode d’exercice regroupé et coordonné.
Avant cette expérimentation, rien n’interdisait à des praticiens libéraux d’exercer dans les centres de santé, en étant salariés de ceux-ci. Comprenons-nous bien : dans ce cas, ils exercent en cabinet en tant que libéraux et, quand ils sont au centre de santé, ils exercent en tant que salariés ; il n’y a pas de mélange des genres au sein de la même structure.
De nombreux praticiens optent pour un tel cadre d’activité mixte libérale salariée. Celui-ci est satisfaisant pour le professionnel, comme pour le centre de santé.
Lors de l’examen de la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, dite « Buzyn », notre groupe avait fait adopter un amendement visant à supprimer ce dispositif expérimental. Cette proposition avait donc recueilli une majorité au sein de notre hémicycle, mais l’expérimentation avait été rétablie par la CMP.
Nous renouvelons, ici, notre demande, pour qu’il soit mis fin à cette expérimentation, brouillant les pistes et, surtout, ouvrant la voie à l’exercice libéral de la médecine à l’intérieur même des centres de santé, ce qui crée un mélange des genres incompatible avec la nature même de ces centres.
Il s’agit non pas de limiter ou d’interdire l’exercice libéral, mais de faire en sorte que celui-ci demeure à l’extérieur des centres de santé. À l’intérieur, l’exercice doit être salarié. Je le répète, cela n’empêche pas un praticien salarié en centre de santé d’exercer en libéral ailleurs, et cela convient à tout le monde.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Comme vous l’avez rappelé, ma chère collègue, la disposition qu’il est proposé de supprimer avait été introduite au Sénat par un amendement voté dans un précédent PLFSS.
Elle nous était apparue comme une souplesse bienvenue, apportée aux praticiens dans les différents modes d’exercice libéral ou salarié. Laissons les acteurs de terrain se saisir, ou non, de cette possibilité d’expérimentation.
L’avis de la commission est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Mes chers collègues, je sais que l’on se lasse parfois des prises de parole quand il ne s’agit pas de ses propres amendements, mais, vraiment, le sujet est ici important.
Pour ma part, je voudrais savoir ce qui pousse à prévoir la possibilité d’un exercice libéral à l’intérieur d’un centre de santé. Quel plus cela apporte au centre ? Dites-moi, mes chers collègues, va-t-on prévoir des tarifications différentes ?
Aujourd’hui, dans un centre de santé, que les soins soient apportés par un médecin généraliste ou par un médecin spécialiste, il y a une stricte égalité : les mêmes tarifications sont appliquées à tous, et il y a le tiers payant. Le professionnel que vous autorisez à exercer, sous forme d’activité libérale, à l’intérieur du centre de santé, va-t-il adopter un tarif de secteur 1, 2 ou 3, alors que le centre est en secteur 1 ?
Je ne comprends pas, ou alors il s’agit vraiment d’un recul par rapport au maillage actuel de nos territoires en termes d’offre de soins !
Si encore on m’apportait une explication, qui permettrait de comprendre en quoi cela va améliorer l’offre de soins et permettre, éventuellement, de développer plus de centres de santé, je pourrais y réfléchir. Mais, en fait, c’est une position que l’on adopte, prétendument pour mettre tout le monde à niveau, qui va complètement ficher en l’air le système des centres de santé.
Veillons tout de même aux mesures que nous prenons, mes chers collègues ! Soyons conscients de leurs effets, aujourd’hui comme demain.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Vous devriez être choqués, mes chers collègues adeptes du libéralisme, par une telle rupture de concurrence !
Mme Cathy Apourceau-Poly. Bien sûr !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. En effet, voilà que des médecins vont pouvoir exercer en libéral dans des centres de santé, en ayant des frais fixes, notamment pour l’utilisation des locaux – la plupart du temps, on ne comptera pas toutes les heures où ils auront exercé, et ils ne seront pas facturés comme les autres.
Il y aura, d’un côté, des médecins libéraux, qui s’installent tout seuls et font vivre leur cabinet, et, de l’autre, des médecins libéraux qui s’installent, tels des bernard-l’hermite, dans une coquille qui est celle du centre de santé. Et l’on est incapable de formuler clairement les avantages que les uns auront par rapport aux autres.
Il est beaucoup plus sain de prévoir que, à l’intérieur du centre de santé, on est salarié, et que, en dehors, on peut être libéral.
D’ailleurs, en général, dès qu’il y a activité mixte, on demande l’étanchéité à Bercy. Là, rien n’a été demandé… Franchement, mes chers collègues, vous mettez le doigt dans un engrenage absurde !
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Pour ma part, je ne vois pas quelle difficulté créerait le fait d’autoriser certains professionnels de santé à exercer à titre libéral dans un centre de santé.
C’est seulement une possibilité supplémentaire qui leur est offerte, et c’est bénéfique pour le praticien, s’il en a envie, et pour le centre de santé. En effet, si celui-ci ne trouve pas de médecin à salarier, pourquoi ne pas permettre au médecin libéral du coin d’aller y faire quelques vacations ?
Sur mon territoire, nous avons un centre de santé. Voilà un an qu’une annonce est posée, et il nous est impossible de trouver un médecin salarié. Si un médecin libéral accepte de venir faire deux après-midi, je ne vois pas trop où est la difficulté.
Nous avons aussi, au sein d’un hôpital privé à but non lucratif, qui fait office d’hôpital public sur le territoire, des chirurgiens venant exercer à titre libéral ; ce sont des Belges, en l’occurrence. Cela ne casse pas le maillage territorial. Cela ne met pas à sac le centre de santé.
Je vois donc, dans cette mesure, une simple chance de plus, pour un exercice différent de l’activité.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je suis assez d’accord pour dire qu’il ne faut pas de mélange des genres.
Si un centre de santé fonctionne avec une médecine salariée, il doit rester centre de santé fonctionnant avec une médecine salariée. Mais, en sens inverse, la médecine libérale doit rester libérale, et il ne faut pas que l’on vienne y apporter des coercitions. Si ces deux logiques sont respectées, alors je n’ai plus rien à dire.
Je voterai l’amendement de Mme Laurence Cohen, parce qu’il me semble intéressant. Arrêtons le mélange des genres ! Respectons la médecine libérale dans sa liberté d’installation, et respectons les centres de santé.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 993.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 33 quater (nouveau)
I. – L’article L. 871-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, les mots : « , qu’elles permettent à l’assuré de bénéficier du mécanisme de tiers payant sur les prestations faisant l’objet de ces garanties, au moins à hauteur des tarifs de responsabilité, » sont supprimés ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Elles prévoient également le bénéfice du mécanisme de tiers payant sur les prestations faisant l’objet de ces garanties, au moins à hauteur des tarifs de responsabilité et de certains niveaux minimaux de prise en charge mentionnés aux deux dernières phrases de l’avant-dernier alinéa du présent article. »
II. – Les dispositions du I s’appliquent aux contrats souscrits ou renouvelés à compter du 1er janvier 2022.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, sur l’article.
M. Bernard Jomier. Où en sommes-nous actuellement en ce qui concerne le déploiement du tiers payant ?
Dans le cadre du PLFSS pour 2018, nous avions eu un long échange avec Agnès Buzyn, à propos de l’article qui revenait sur l’objectif de généralisation fixé dans la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.
La ministre avait développé une argumentation centrée sur deux points.
D’une part, elle avait insisté sur la nécessité de bien identifier les publics en difficulté financière, qui ne peuvent accéder au tiers payant.
D’autre part, elle avait explicité la méthode qu’elle allait privilégier : rendre le tiers payant simple d’accès par la mise en place d’un flux unique, qui permettrait de concilier l’objectif de justice sociale et celui consistant à rendre du temps médical aux médecins.
Nous avions plutôt souscrit au constat. Le tiers payant n’est pas obligatoire, par exemple, pour les pharmaciens ; pourtant, la procédure est si simple qu’elle s’est naturellement généralisée.
La ministre nous avait présenté son calendrier de travail à venir, articulé autour de l’identification des publics prioritaires autres que ceux qui bénéficient déjà du tiers payant – par exemple, les étudiants – et du travail à engager avec les complémentaires de santé pour lever les difficultés techniques. On sait effectivement que ces complémentaires constituent le principal obstacle à la facilitation de la procédure.
Il existe environ deux cent cinquante complémentaires de santé, qui sont différentes et dont les niveaux de contrat sont hétérogènes. Le niveau de remboursement peut évoluer d’une année sur l’autre, en fonction du statut de la personne, si elle change d’entreprise, etc. Tout cela est relativement complexe.
Un rapport précisant le calendrier de cette mise en œuvre opérationnelle devait être remis au Parlement avant le 31 mars 2018. J’espère ne pas me tromper, mais il me semble que nous ne l’avons pas reçu…
Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d’État, où nous en sommes de ce travail, censé répondre à une attente forte et légitime des Français ?
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 231 rectifié ter, présenté par Mme Deseyne, MM. Cambon, Boré, Le Rudulier et Panunzi, Mme Belrhiti, MM. B. Fournier, Houpert et Grosperrin, Mmes Dumas et Deromedi, MM. Brisson, Cardoux et Duplomb, Mme Gruny, MM. Piednoir, Bascher et Meurant, Mme Thomas, MM. Saury, Mandelli et Savary, Mme Garriaud-Maylam, MM. Daubresse, Gremillet et Regnard et Mme Noël, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Elles prévoient également le bénéfice du mécanisme de tiers payant intégral pour les produits et prestations inscrits sur la liste mentionnée à l’article L. 165-1 du présent code. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
– La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Mme Chantal Deseyne. Dans sa version adoptée à l’Assemblée nationale, l’article 33 quater vise à améliorer la réforme du reste à charge zéro, en généralisant le bénéfice du tiers payant intégral pour les prestations de soins visuels, auditifs et dentaires dits « 100 % santé ».
Si cette mesure va dans le bon sens, force est de constater qu’elle peut être améliorée pour pousser encore plus loin la lutte contre le renoncement aux soins pour raisons financières. En effet, une enquête conduite par Ipsos en octobre 2020 montre que 20 % à 30 % des porteurs de lunettes ne bénéficient pas d’avance de frais.
Cet amendement tend donc à étendre le champ de l’article 33 quater à l’ensemble des frais couverts par un contrat responsable.
Mme la présidente. L’amendement n° 68 rectifié ter, présenté par Mme Deseyne, M. Cambon, Mme Lassarade, MM. Boré, Le Rudulier et Panunzi, Mme Belrhiti, MM. B. Fournier, Houpert et Grosperrin, Mmes Dumas et Deromedi, MM. Brisson, Cardoux et Duplomb, Mme Gruny, MM. Piednoir, Bascher et Meurant, Mme Thomas, M. Bonhomme, Mme Chauvin, MM. Mandelli et Savary, Mme Garriaud-Maylam, M. Daubresse, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Gremillet et Regnard et Mme Noël, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le mot :
garanties,
insérer les mots :
y compris lorsqu’elles sont associées à un produit ou prestation appartenant à une autre classe que les classes à prise en charge renforcée,
La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Mme Chantal Deseyne. J’ai défendu cet amendement en même temps que le précédent, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 650 rectifié, présenté par Mmes Doineau et Guidez, M. Henno, Mmes Sollogoub et Jacquemet, M. Duffourg et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
et de certains niveaux minimaux de prise en charge mentionnés aux deux dernières phrases de l’avant-dernier alinéa du présent article
par les mots :
et à hauteur des frais exposés par l’assuré en sus des tarifs de responsabilité dans la limite des prix fixés en application de l’article L. 165-3 pour les produits et prestations relevant des classes à prise en charge renforcée définies en application du deuxième alinéa de l’article L. 165-1 ainsi qu’à hauteur des frais de soins dentaires prothétiques exposés par l’assuré en sus des tarifs de responsabilité et dans la limite des honoraires de facturation fixés par la convention prévue à l’article L. 162-9, pour les actes définis par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. Le présent amendement est un amendement de précision.
L’article 33 quater rend effectif le tiers payant intégral sur les équipements et soins du panier dit « 100 % santé », afin de supprimer l’avance de frais et, ainsi, de lever tout obstacle financier à l’accès à ce panier. Il oblige les organismes de complémentaire de santé proposant des contrats responsables, à compter du 1er janvier 2022, à mettre à la disposition des professionnels de santé des solutions techniques de réalisation du tiers payant qui soient fiables.
Cet amendement tend à clarifier le périmètre des soins sur lequel cette obligation portera, en visant expressément les paniers de soins « 100 % santé » optique, dentaire et d’audiologie.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. S’agissant de l’amendement n° 231 rectifié ter, le tiers payant est déjà obligatoirement garanti pour toutes ces prestations dans le cadre des contrats responsables, au moins à hauteur des tarifs de responsabilité.
L’avis de la commission sera donc défavorable.
L’amendement n° 68 rectifié ter tend à inclure, dans le tiers payant obligatoire, les équipements, notamment optiques, composés pour partie de produits dont le prix dépasse les tarifs plafonds du panier « 100 % santé ».
La rédaction de l’article 33 quater n’exclut pas le tiers payant pour ces équipements. Toutefois, préciser cette obligation pourrait apporter un plus aux assurés dont la complémentaire rembourse les équipements concernés.
La commission souhaite donc s’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée.
Enfin, j’exprime un avis favorable sur l’amendement de clarification n° 650 rectifié.
Précisons tout de même, monsieur le secrétaire d’État, que cette mise en œuvre du tiers payant pour le panier « 100 % santé » s’avère chaotique et qu’elle peut mettre en difficulté certains professionnels de santé, qui, lorsqu’ils l’acceptent, peinent parfois à être remboursés. Il convient donc de ne pas brûler les étapes : il faut évaluer la mise en place du tiers payant sur ce panier « 100 % santé », négocié avec les différentes parties prenantes, avant d’aller plus loin.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Comme la commission, le Gouvernement émettra un avis favorable sur l’amendement n° 650 rectifié, mais il sera défavorable aux amendements nos 231 rectifié ter et 68 rectifié ter.
Le motif en est, justement, qu’il ne faut pas brûler les étapes, comme semblent le proposer les auteurs de ces amendements.
Nous sommes évidemment tout à fait attentifs au déploiement du tiers payant intégral, qui facilite l’accès aux soins en supprimant toute avance de frais.
C’est pourquoi j’ai soutenu l’amendement qui a été adopté en première lecture à l’Assemblée nationale et dont l’objet était de mettre en place une obligation de tiers payant sur les paniers de soins « 100 % santé », qu’il s’agisse de lunettes, d’aides auditives ou de prothèses dentaires, et ce à compter de l’année 2022.
Sur les produits « 100 % santé », la prise en charge est intégralement garantie pour tous les assurés couverts par un contrat responsable ou par la complémentaire de santé solidaire. Le professionnel de santé connaît donc, dans tous les cas, la part prise en charge par la complémentaire de santé, ce qui ne sera pas le cas avec la proposition de Mme la sénatrice Deseyne.
En ce qui concerne les autres produits remboursables, les contrats responsables n’imposent que la couverture du ticket modérateur.
Assurer le tiers payant intégral sur un panier de soins autre que le panier « 100 % santé » est donc techniquement plus complexe. Il nous semble prématuré de vouloir l’imposer dès cette année ; nous jugeons préférable, comme nous y a invités Mme la rapporteure, de traiter en priorité, dans un premier temps, la mise en place du tiers payant intégral sur le panier « 100 % santé ».
Telles sont les raisons des avis défavorables du Gouvernement sur les amendements nos 231 rectifié ter et 68 rectifié ter.
Mme Chantal Deseyne. Je retire ces amendements, madame la présidente !
Mme la présidente. Les amendements nos 231 rectifié ter et 68 rectifié ter sont retirés.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. J’ai juste omis de répondre à M. Bernard Jomier, qui se demandait si le Gouvernement avait bien remis le rapport qu’il avait promis de rendre pour le mois de mars 2018.
C’est le cas : il s’agit d’un rapport de l’inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, qui a été transmis au Parlement en avril 2018.
Mme la présidente. L’amendement n° 907 rectifié, présenté par MM. Roux, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et M. Requier, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. Les dispositions du I s’appliquent dès lors que l’assuré bénéficie en amont du mécanisme de tiers payant par son professionnel de santé.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Stéphane Artano.
M. Stéphane Artano. L’article 33 quater vise à rendre obligatoire, à partir du 1er janvier 2022, le bénéfice du tiers payant dans les contrats responsables des complémentaires santé pour l’ensemble des prothèses optiques, dentaires et auditives. C’est évidemment une bonne chose pour les assurés, en particulier dans le contexte social difficile que nous connaissons.
Par cet amendement, déposé sur l’initiative de mon collègue Jean-Yves Roux, nous souhaitons que le professionnel de santé intervenant en amont propose le tiers payant. Il s’agit, à terme, de relancer la perspective d’un tiers payant généralisable, abandonnée en 2018.
Les difficultés sociales que rencontrent les assurés et les retards de diagnostic engendrés par la première vague de l’épidémie en mars 2020 exigent que l’on facilite les consultations pour tous.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cette mise en application conditionnelle du tiers payant ne semble pas opérante.
La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Artano, l’amendement n° 907 rectifié est-il maintenu ?
M. Stéphane Artano. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 907 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 33 quater, modifié.
(L’article 33 quater est adopté.)
Article additionnel après l’article 33 quater
Mme la présidente. L’amendement n° 429 rectifié, présenté par Mme Létard, MM. Henno et Détraigne, Mmes Billon et Férat, MM. Levi, Cazabonne et Duffourg, Mmes Sollogoub, Gatel, Loisier et de La Provôté, MM. Delcros, Louault et Kern, Mmes Saint-Pé et Guidez, M. P. Martin, Mme C. Fournier, M. Cadic, Mme Jacquemet et MM. Canevet, H. Leroy, Capo-Canellas, Le Nay, Hingray, Poadja, Longeot et Chauvet, est ainsi libellé :
Après l’article 33 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de cette loi, un rapport d’évaluation de la prise en charge des pathologies du lymphœdème, les différents soins et médicalisations associés ainsi que l’accessibilité aux traitements recommandés par la Haute Autorité de santé, afin de définir un panier de soins garantissant une meilleure prise en charge par l’assurance maladie.
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Cet amendement, présenté sur l’initiative de Mme Valérie Létard, est une demande de rapport – formulée, bien évidemment, sans illusion –, mais aussi un moyen, comme Mme la présidente de la commission l’indiquait, d’attirer l’attention sur le problème des lymphœdèmes.
On en compte de deux types : les lymphœdèmes secondaires, après traitement du cancer, et les lymphœdèmes primaires, liés à une anomalie.
Il s’agit d’une pathologie chronique, évolutive et invalidante. Or la prise en charge par l’assurance maladie est partielle, quels que soient les types de lymphœdèmes, et le reste à charge important pour le patient. Il peut représenter 10 % des revenus du quintile le plus pauvre de la population et 3,5 % pour les patients ayant les revenus les plus élevés.
Actuellement, la prise en charge du lymphœdème comme maladie chronique ne répond donc pas aux enjeux de médicalisation de cette maladie et d’accessibilité aux traitements, et contrevient de fait à l’amélioration de la vie des patients, contraints pour certains de renoncer aux soins.
Nous lançons donc un appel, dans la lignée des recommandations de la Haute Autorité de santé, pour que cette pathologie, qui doit être mieux définie, soit prise en charge.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Vous l’avez dit, monsieur Henno, c’est une bonne occasion d’évoquer cette pathologie chronique et invalidante. Je vous remercie donc d’avoir défendu cet amendement.
Néanmoins, s’agissant d’une demande de rapport, l’avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, je vous remercie, ainsi que Mme Létard, d’évoquer les lymphœdèmes. Je vais vous donner quelques éléments de réponse sur le fond puisque, comme nous l’avons bien compris, cette demande de rapport n’aura pas de suite…
Il existe plusieurs types de lymphœdèmes et leur prise en charge implique une association de traitements : physique, pharmacologique ou chirurgical. L’approche doit donc être individualisée en fonction des besoins particuliers des patients.
Pour les formes primaires, qui sont plus rares, il existe un protocole national de diagnostic et de soins, qui a été élaboré par la Haute Autorité de santé, et une étude financée par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, qui a été publiée en avril 2019.
Plusieurs travaux ont été lancés qui devraient permettre d’apporter une réponse aux personnes atteintes de ces pathologies.
La Haute Autorité de santé a été saisie de la question des dispositifs médicaux de contention, qui peuvent, dans certains cas, entraîner un reste à charge pour les patients. Elle a rendu son évaluation, et l’objectif est à présent de travailler à une révision de la nomenclature sur la base de ses recommandations.
Par ailleurs, monsieur le sénateur, sachez que les CHU de Montpellier et de Toulouse ont déposé auprès de l’Agence régionale de santé d’Occitanie un projet sur ce thème, au titre de l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale de 2018, que vous connaissez bien. Ce projet vise à créer un parcours de soins ville-hôpital, l’ambition étant d’améliorer la qualité des soins tout en contrôlant le reste à charge pour les patients. Ce projet est en cours d’instruction par l’ARS.
Tels sont les éléments que je tenais à porter à votre connaissance. Cela étant, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Même s’il s’agit là d’un sujet important, nous ne pouvons être favorables à une demande de rapport.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie des éléments de réponse que vous venez de porter à notre connaissance.
Le groupe d’études sur le cancer avait reçu au début de l’année 2020 le docteur Vignes, lymphologue à la Fondation Cognacq-Jay, qui nous avait alertés sur la question du reste à charge pour les patients atteints de lymphœdèmes. Il visait non pas tant les traitements en tant que tels que les éléments annexes, par exemple les bas de contention, entre autres dispositifs médicaux, qui peuvent sembler secondaires, mais dont le coût est élevé. De ce fait, certains patients n’en portent pas ou les gardent très longtemps. C’est un réel souci.
En juillet dernier, j’avais interrogé le Gouvernement à ce sujet lors d’une séance de questions orales sans débat du mardi ; une réponse identique à celle que vous venez de nous donner m’avait alors été apportée.
Enfin, je rappelle qu’un article relatif au parcours de soins après un cancer a été adopté dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020. J’aimerais savoir où en sont les décrets d’application, sachant qu’ils n’avaient toujours pas été publiés en juillet dernier. Le suivi des personnes ayant été traitées pour un cancer est un sujet important – je pense en particulier aux soins de support.
Mme la présidente. Monsieur Henno, l’amendement n° 429 rectifié est-il maintenu ?
M. Olivier Henno. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 429 rectifié est retiré.
Article 34
I. – À titre expérimental et pour une durée de trois ans, dans le ressort de quatre caisses départementales ou interdépartementales de mutualité sociale agricole, par dérogation aux articles L. 4624-2 et L. 4624-3 du code du travail et dans les conditions fixées par un protocole de coopération établi conformément aux dispositions de l’article L. 4011-1 du code de la santé publique, l’infirmier qualifié en santé au travail relevant des services de santé au travail de ces caisses assure :
1° La réalisation de l’examen périodique du travailleur agricole, dans le cadre du suivi individuel renforcé dont ce dernier bénéficie en application de l’article L. 4624-2 du code du travail ;
2° La réalisation de l’examen de reprise de la travailleuse agricole après son congé de maternité, dès lors qu’elle n’est pas affectée à un poste présentant des risques particuliers, ainsi que l’échange prévu dans ce cadre avec la travailleuse agricole au titre de l’article L. 4624-3 du même code ;
3° Le bilan d’exposition aux risques professionnels effectué lorsque le travailleur agricole atteint l’âge de cinquante ans.
Un décret en Conseil d’État précise les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation. Il précise notamment le rôle de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole dans le pilotage de sa mise en œuvre.
II. – Au plus tard trois mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement présente au Parlement un rapport d’évaluation de celle-ci.
Mme la présidente. L’amendement n° 171, présenté par Mme Gruny, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Après le mot :
ans
insérer les mots :
à compter de la publication de la présente loi
II. – Alinéa 6
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Ce rapport s’attache à mesurer l’évolution de la couverture des obligations légales et réglementaires à la charge des services de santé au travail concernés, l’évolution dans le ressort des services concernés du suivi des salariés les plus à risque et des saisonniers agricoles, ainsi que l’incidence de l’expérimentation sur l’organisation et le fonctionnement des services concernés. Il comporte une analyse comparative avec les services de santé au travail en agriculture non parties à l’expérimentation.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Pascale Gruny, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles. L’article 34 prévoit une expérimentation permettant le transfert d’activités aux infirmiers en santé au travail, dans le cadre de protocoles de coopération, dans des services de sécurité et de santé au travail relevant de plusieurs caisses de mutualité sociale agricole.
Cet amendement vise à préciser les éléments à prendre en compte dans le rapport d’évaluation au regard des objectifs de l’expérimentation, afin d’en tirer des conclusions pertinentes en vue d’une éventuelle généralisation.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Cet amendement nous paraissant satisfait, nous en demandons le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
L’article 34 renvoie à un décret en Conseil d’État la mise en œuvre de l’expérimentation, notamment ses modalités d’évaluation. Il a ainsi été considéré que le choix et le suivi des indicateurs mis en place relèveraient du domaine réglementaire.
Madame la rapporteure, je tiens toutefois à vous rassurer : le Gouvernement entend bien se donner les moyens de suivre les effets de cette expérimentation, tant sur la couverture des obligations à la charge de ces services que sur le suivi des salariés les plus à risques et les saisonniers agricoles, ou encore sur le fonctionnement des services concernés. Ces indicateurs figurent d’ailleurs dans l’étude d’impact de cet article, sauf erreur, et seront mentionnés dans le décret d’application.
Enfin, une analyse comparative avec les autres services de santé au travail en agriculture sera également effectuée pour les besoins de cette expérimentation.
Mme la présidente. Madame le rapporteur, l’amendement n° 171 est-il maintenu ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Je le maintiens, madame la présidente, afin de nous laisser le temps de faire les vérifications nécessaires. On ne sait jamais… (Sourires.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34, modifié.
(L’article 34 est adopté.)
Article 34 bis (nouveau)
I. – Le livre VII du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° À la première phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 732-4, les mots : « , à l’exception de l’avant-dernier alinéa, » sont supprimés ;
2° Le dernier alinéa de l’article L. 752-5-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le délai mentionné à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 752-5 n’est pas applicable pour le versement de cette indemnité. »
II. – Les dispositions du I s’appliquent aux arrêts de travail prescrits à compter du 1er janvier 2021. – (Adopté.)
Article 34 ter (nouveau)
I. – La section 2 du chapitre II du livre VII du titre Ier du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 172-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 172-1-1. – En cas d’incapacité de travail suite à un accident ou à une maladie professionnelle, la personne qui relève du régime d’assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles des non-salariés agricoles défini au chapitre II du titre V du livre VII du code rural et de la pêche maritime et qui exerce simultanément une activité salariée relevant du régime général de sécurité sociale ou du régime des salariés agricoles perçoit, lorsqu’elle est victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle dans le cadre de son activité non salariée agricole, l’indemnité journalière mentionnée à l’article L. 323-1 du présent code, dès lors qu’elle remplit les conditions fixées à l’article L. 313-1 du présent code, le cas échéant selon les modalités prévues à l’article L. 742-3 du code rural et de la pêche maritime, en sus de l’indemnité versée par le régime d’assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles des non-salariés agricoles défini au chapitre II du titre V du livre VII du même code. »
II. – Les dispositions du I sont applicables aux accidents du travail et aux maladies professionnelles déclarés à compter du 1er janvier 2021. – (Adopté.)
Article 34 quater (nouveau)
I. – Le livre VI du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 621-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « entrant dans le champ d’application de l’article L. 622-1 » sont remplacés par les mots : « , à l’exception de ceux mentionnés aux articles L. 640-1 et L. 651-1, » ;
b) Au deuxième alinéa, le mot : « à » est remplacé par les mots : « au premier alinéa de » ;
c) À la dernière phrase du dernier alinéa, la dernière occurrence du mot : « à » est remplacée par les mots : « au premier alinéa de » ;
2° L’article L. 621-2 est ainsi modifié :
a) Les mots : « qui n’entrent pas dans le champ de l’article L. 622-1 » sont remplacés par les mots : « mentionnés aux articles L. 640-1 et L. 651-1 » et, après le mot : « activité », sont insérés les mots : « selon les modalités prévues aux articles L. 131-6 à L. 131-6-2 et L. 613-7 » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les travailleurs indépendants relevant de l’article L. 640-1 sont redevables, pour la couverture de prestations maladie en espèces prévues à l’article L. 622-2, d’une cotisation supplémentaire assise sur les revenus d’activité mentionnés au premier alinéa du présent article, dans la limite d’un plafond. Pour les travailleurs indépendants ne relevant pas de l’article L. 613-7, cette cotisation supplémentaire ne peut être inférieure à un montant fixé par décret. Le taux et le plafond de cette cotisation supplémentaire sont fixés par décret sur proposition du conseil d’administration de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales. » ;
3° À l’article L. 621-3, les mots : « aux articles L. 621-1 et » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 621-1 et au premier alinéa de l’article » ;
4° À l’article L. 622-1, les mots : « aux articles L. 640-1 et » sont remplacés par les mots : « à l’article » ;
5° L’article L. 622-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 622-2. – Les assurés mentionnés à l’article L. 640-1 bénéficient de prestations maladie en espèces dans les conditions prévues à l’article L. 622-1 sous réserve d’adaptations déterminées par décret, pris sur proposition du conseil d’administration de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales, relatives :
« 1° À la limite des revenus servant de base pour le calcul de l’indemnité journalière ;
« 2° Au délai suivant le point de départ de l’incapacité de travail à l’expiration duquel l’indemnité journalière est accordée.
« La durée maximale de versement de l’indemnité journalière au titre d’une même incapacité de travail est déterminée par décret sans préjudice des durées maximales de versement fixées aux 1° et 2° de l’article L. 323-1.
« Le service des prestations maladie en espèces mentionnées au premier alinéa du présent article est confié aux organismes mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 752-4 dans des conditions faisant l’objet d’une convention conclue entre la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales et la Caisse nationale de l’assurance maladie. Cette convention précise notamment les modalités de financement des frais de gestion et de contrôle médical afférents au service de ces indemnités. Elle est approuvée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. À défaut de convention, ces conditions sont déterminées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.
« Si l’équilibre financier entre la cotisation prévue au second alinéa de l’article L. 621-2 et les prestations prévues au présent article vient à être rompu, le conseil d’administration de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales propose soit une augmentation de la cotisation, soit une diminution des prestations. En cas de carence, l’équilibre financier est rétabli dans des conditions fixées par décret. » ;
6° L’article L. 641-2 est ainsi modifié :
a) Après le 7°, il est inséré un 8° ainsi rédigé :
« 8° De proposer, pour les professionnels libéraux relevant de l’article L. 640-1, le taux et le plafond de la cotisation supplémentaire prévue au second alinéa de l’article L. 621-2 ainsi que les paramètres de calcul des prestations maladie en espèces prévues à l’article L. 622-2. Elle remet à l’autorité compétente de l’État, avant le 31 décembre de chaque année, un rapport présentant le bilan de la gestion du dispositif et des projections financières sur cinq ans. » ;
b) À la seconde phrase de l’avant-dernier alinéa, après le mot : « libérales », sont insérés les mots : « et du dispositif de prestations maladie en espèces prévu à l’article L. 622-2 ».
II. – Le I entre en vigueur le 1er juillet 2021.
Mme la présidente. L’amendement n° 229 rectifié, présenté par MM. Bizet et Grand, Mmes Gruny, Dumas et Puissat, MM. Panunzi, Cambon, Cardoux, Chatillon, Cuypers et Rapin, Mme Jacques, M. Courtial, Mme Thomas, M. Charon, Mme F. Gerbaud, M. Bouchet, Mme Deromedi, MM. Calvet, Lefèvre et Belin, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Pellevat, Saury et Le Gleut, Mme Demas, M. Longuet, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Babary, E. Blanc et Gremillet, Mmes Di Folco et de Cidrac, M. Pointereau, Mme Ventalon et M. Houpert, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 9, dernière phrase
Après les mots :
d’administration
insérer les mots :
de chacune des sections professionnelles
II. – Alinéa 13
1° Au début
Ajouter la mention :
I. –
2° Après les mots :
d’administration
insérer les mots :
de chacune des sections professionnelles
III. – Alinéa 16
Après le mot :
décret
insérer les mots :
sur proposition du conseil d’administration de chacune des sections professionnelles de la caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales
IV. – Après l’alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les autres paramètres de calcul de ces indemnités journalières sont fixées par décret sur proposition du conseil d’administration de chacune des sections professionnelles de la caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales.
V. – Alinéa 17, au début
Ajouter la mention :
II. –
VI. – Après l’alinéa 17
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« III. – Chaque section professionnelle de la caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales remet à l’autorité compétente de l’État, avant le 31 décembre de chaque année, un rapport présentant le bilan de la gestion du dispositif et les projections financières sur cinq ans.
VII. – Alinéa 18, première phrase
Après les mots :
d’administration
insérer les mots :
de la section compétente
VIII. – Alinéas 20 et 21
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. En 2018, le Gouvernement a introduit dans le code de la sécurité sociale un article L. 622-2 permettant aux professions libérales qui le souhaitent de créer, section par section, un régime d’indemnités journalières pendant les 90 premiers jours d’incapacité de travail – l’assurance invalidité pouvant prendre le relais au-delà. Ce régime est bien adapté aux professions libérales, dont les besoins en la matière sont très variables.
Toutefois, aucun dispositif d’indemnités journalières n’a été mis en place par les professions libérales sur ce fondement : seul le conseil d’administration de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF) s’est prononcé en faveur de la mise en place de ce régime en juin 2019, mais sa démarche n’a pu aboutir.
Cette absence d’un dispositif d’indemnisation des arrêts de travail a posé problème pendant la crise sanitaire. Selon l’objet de l’amendement n° 2699 déposé par le Gouvernement lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, « l’État a décidé d’accorder de manière tout à fait exceptionnelle des indemnités journalières dérogatoires pour les professionnels libéraux, financées par l’assurance maladie ».
Cette affirmation est parfaitement inexacte : seules les professions de santé ont bénéficié, à titre dérogatoire, d’indemnités journalières si elles ont été amenées à interrompre leur activité professionnelle en raison de la covid-19. Toutes les autres professions libérales ont bénéficié soit d’aménagements du règlement des cotisations sociales, soit d’aides directes financées par les sections professionnelles sur leurs fonds propres au titre de l’action sociale.
Si la création d’un régime obligatoire peut se justifier, la création d’un régime unique, uniforme, n’est pas conforme à la tradition sociale des professions libérales, très attachées à leur autonomie.
Le présent amendement vise donc à conserver la création obligatoire d’un régime d’indemnités journalières dans les professions libérales au 1er juillet 2021, tout en préservant l’autonomie de gestion, de prestations et de cotisations des sections professionnelles.
Ainsi, il tend à confier au conseil d’administration de chacune des sections professionnelles dans le cadre de leur régime invalidité-décès, sous le contrôle de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) et du ministère de la santé par voie de décret, le soin de fixer le taux et le plafond de la cotisation, ainsi que le montant des prestations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à transférer au niveau des sections professionnelles le pilotage que le texte prévoit de confier à la CNAVPL.
Je comprends cette logique qui tend à faire correspondre le régime créé aux réalités de chacune des professions. Je suis consciente également des craintes de voir là un nouveau régime venir alourdir les charges pour des professionnels libéraux qui ne le réclamaient pas tous et qui avaient des besoins inégaux. Rappelons que, depuis deux ans, ils avaient la possibilité de mettre ces indemnités en place, mais que toutes les caisses ne l’ont pas fait.
Cependant, l’approche retenue consistant à confier ce pilotage à la CNAVPL me semble plus opportune. Renvoyer ce pilotage à chacune des sections paraît pertinent à première vue, mais risquerait, me semble-t-il, de freiner considérablement la mise en œuvre de ce dispositif.
La CNAVPL réunit bien la diversité des professions libérales et des différentes sections, tandis que son conseil d’administration est bien chargé de proposer des adaptations.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Comme Mme la rapporteure, le Gouvernement émet un avis défavorable.
La mise en place d’un tel dispositif par section, ainsi que vous le proposez dans cet amendement, ferait peser un risque sur les sections comptant de faibles effectifs et serait plus pénalisante pour les professions aux revenus les plus faibles, par exemple les infirmières.
En outre, madame la sénatrice, contrairement à ce que vous indiquez, des indemnités journalières exceptionnelles ont bien été versées au cours du premier confinement aux professionnels libéraux qui ne pouvaient pas télétravailler et qui assuraient la garde d’un enfant ou qui étaient considérés comme personnes vulnérables. Au total, 176 millions d’euros d’indemnités journalières ont été versés aux professionnels de santé et 72 millions d’euros aux autres professionnels libéraux.
Je confirme donc ce qui est indiqué dans l’exposé des motifs du projet de loi.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. En dépit des deux avis défavorables qu’il a recueillis, cet amendement me paraît intéressant en ce que ses auteurs expriment, à travers lui, une volonté d’unification de l’ensemble des régimes d’indemnités journalières des professions libérales regroupées au sein de la CNAVPL – au nombre de treize, quand même. Ce n’est pas incohérent !
Que certaines professions ne soient pas d’accord et demandent que leur régime d’indemnités journalières continue d’être géré par leur régime complémentaire – les indemnités handicap et décès –, on peut le comprendre. Sauf que confier cette gestion à la CNAVPL, la caisse de base regroupant l’ensemble de ces professions, présente un intérêt : cela permettrait une mutualisation de ces régimes. Je partage la position de la rapporteure, selon qui cette mutualisation ne serait pas inintéressante.
Néanmoins, il ne faudra pas oublier de signaler aux intéressés qu’ils devront s’acquitter d’un surcroît de cotisations de 0,3 %, même si ce n’est pas énorme. Selon l’étude d’impact, que je cite de mémoire, cela représente au minimum 51 euros de cotisations annuelles pour des indemnités journalières à hauteur de 22 euros pendant 90 jours.
Ce n’est pas incohérent dans la mesure où ces professionnels font appel à des assurances privées.
En revanche, il faudra être attentif aux délais de mise en œuvre de cette mesure. Elle ne pourra l’être d’ici à 2021, monsieur le secrétaire d’État, compte tenu du fait que la plupart des professionnels concernés devront résilier leur assurance, sauf à les conserver à titre complémentaire.
Le problème, c’est qu’il n’y a pas eu de concertation : l’Union nationale des professions libérales (UNAPL) était favorable au principe de cette caisse supplémentaire – c’est bien un nouveau régime qui est créé – ; en revanche, la concertation a été insuffisante avec les professions, certaines comme les experts-comptables, les chirurgiens-dentistes et les sages-femmes nous ayant fait part de leur désaccord.
Aussi, je vous invite à vous rapprocher de ces professions de manière à améliorer ce dispositif.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 56 rectifié est présenté par MM. Bonne, Bascher et Bocquet, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bonhomme, Mme V. Boyer, MM. Brisson et Courtial, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Dumas et Deromedi, MM. B. Fournier et Gremillet, Mme Gruny, M. D. Laurent, Mme Lavarde, M. Lefèvre, Mme Micouleau, M. Moga, Mmes Noël et Puissat, M. Rapin, Mme Richer, MM. Sautarel, Segouin et Vogel, Mme Di Folco et MM. Charon et H. Leroy.
L’amendement n° 286 rectifié quater est présenté par MM. Milon, Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. Mandelli, Piednoir, Savary et Houpert, Mme Delmont-Koropoulis et M. Regnard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Alinéa 14
Compléter cet alinéa par les mots :
, cette limite étant égale au plafond de l’assiette de la cotisation supplémentaire prévu au second alinéa de l’article L. 621-2
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour présenter l’amendement n° 56 rectifié.
Mme Frédérique Puissat. Cet amendement s’inscrit lui aussi dans une logique de simplification et d’unification. Il tend en effet à fixer le même plafond de revenu applicable au calcul de la cotisation et de l’indemnité journalière.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 286 rectifié quater.
M. Alain Milon. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces amendements visent à faire correspondre la limite retenue pour les revenus servant au calcul des prestations avec le plafond retenu pour l’assiette des cotisations.
Le problème, c’est que les régimes de sécurité sociale n’ont pas toujours une identité entre l’assiette des cotisations et le plafond retenu pour les prestations. C’est le cas, par exemple, du régime d’indemnités journalières des indépendants rattachés au régime général, qui cotisent sur deux plafonds annuels de la sécurité sociale (PASS) pour des prestations calculées sur un PASS.
C’est aussi l’hypothèse retenue par le Gouvernement pour ce nouveau régime, avec une cotisation sur cinq PASS et des prestations sur trois PASS.
Cette dissociation permet de répondre plus facilement, me semble-t-il, à l’impératif d’équilibre financier en assurant une redistribution.
La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 56 rectifié et 286 rectifié quater.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 172, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 19
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Au début du premier alinéa, la mention :
« I. - » est supprimée ;
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Cet amendement tend à supprimer une coquille figurant dans le code depuis quinze ans : il était temps de la corriger !
Avis favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34 quater, modifié.
(L’article 34 quater est adopté.)
Article 34 quinquies (nouveau)
Après l’article L. 4151-4 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 4151-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 4151-4-1. – I. – À titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la publication de la loi n° … du … de financement de la sécurité sociale pour 2021, par dérogation à l’article L. 2212-2, les sages-femmes ayant réalisé la formation complémentaire obligatoire et justifiant des expériences spécifiques attendues peuvent réaliser des interruptions volontaires de grossesse instrumentales en établissements de santé.
« II. – Un décret précise les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation mentionnée au I du présent article, notamment les caractéristiques de l’appel à projets national, les éléments relatifs à la formation exigée et les expériences attendues des sages-femmes, les conditions de financement de l’expérimentation ainsi que les conditions d’évaluation de l’expérimentation en vue d’une éventuelle généralisation.
« III. – Un arrêté du ministre chargé de la santé précise la liste des établissements de santé retenus pour participer à l’expérimentation au vu des résultats de l’appel à projets national. »
Mme la présidente. L’amendement n° 173, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’article 34 quinquies prévoit d’autoriser, à titre expérimental, les sages-femmes à pratiquer des interruptions volontaires de grossesse instrumentales.
Il convient de rappeler que, depuis la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, les sages-femmes sont autorisées à pratiquer des IVG par voie médicamenteuse. En revanche, les IVG instrumentales ne peuvent être réalisées que par des médecins.
La pratique d’IVG instrumentales par les sages-femmes ne fait pas l’unanimité. Sur la forme, la mesure proposée, qui a trait aux compétences d’une profession de santé, est une disposition non financière, qui ne relève donc pas du champ de la loi de financement de la sécurité sociale.
Pour ces raisons, il vous est proposé de supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable à la suppression de l’article 34, qui nous semble important.
Vous le savez, les sages-femmes s’investissent pleinement dans les questions de santé sexuelle et reproductive, dans une approche globale. À ce titre, elles peuvent, depuis 2016, réaliser des interruptions volontaires de grossesse par voie médicamenteuse. Ouvrir une pleine compétence en orthogénie à ces professionnelles de santé, qui pratiquent déjà des gestes endo-utérins, comme la pose de stérilets, la délivrance artificielle ou la révision utérine, pourrait véritablement renforcer l’accès des femmes à l’IVG en tous points du territoire et leur garantir de pouvoir choisir plus librement entre l’IVG médicamenteuse et l’IVG instrumentale, objectif que nous partageons tous, j’en suis convaincu.
Cet article définit les conditions nécessaires afin d’assurer la qualité et la sécurité des soins dans le cadre de cette expérimentation, notamment en termes de formation et d’expérience professionnelle attendue des sages-femmes. La qualité et la sécurité des soins sont évidemment des exigences avec lesquelles nous ne transigerons jamais.
Bien sûr, l’expérimentation sera, par nature et par définition, évaluée. Elle permettra de décider de manière éclairée si, et dans quelles conditions, nous devons généraliser cette nouvelle compétence.
Enfin, pour répondre au dernier argument de Mme la rapporteure, j’indique qu’une modification du recours à l’IVG instrumentale est à attendre en regard. Au vu des forfaits IVG, qui varient selon les méthodes, la mesure proposée pourrait avoir un impact financier sur les dépenses d’assurance maladie. C’est d’ailleurs ce qui justifie la présence de cet article dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je partage les propos de M. le secrétaire d’État. Notre groupe a d’ailleurs déposé à plusieurs reprises des amendements en faveur d’une telle expérimentation. Nous sommes donc ravis de la voir figurer dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale à l’issue de son examen par l’Assemblée nationale.
Pour rappel, ces professionnels de santé sont habilités à pratiquer des IVG médicamenteuses depuis 2016. Le code de la santé publique garantit aux femmes la liberté de choisir entre ces deux méthodes, mais nous savons bien que, dans les faits, les IVG instrumentales représentent une part minoritaire des IVG, faute de praticiens en nombre suffisant.
J’avoue ne pas comprendre les réticences de certains ou de certaines, qui pensent sans doute que le fait que les sages-femmes ne soient pas des médecins pourrait mettre en danger la vie des femmes. Mais, mes chers collègues, puisque l’IVG médicamenteuse ou instrumentale n’est pas un acte relevant de la pathologie gynécologique, elle est, de fait, de la compétence des sages-femmes !
Cette extension des tâches, qui correspond aux objectifs du plan Ma santé 2022, est d’ailleurs très largement soutenue par nombre de médecins, qui reconnaissent les compétences des sages-femmes.
Elle permettrait par ailleurs de garantir la liberté de choix de la méthode et rendrait plus accessible le recours à l’IVG partout sur le territoire, alors que plus de 130 centres IVG ont fermé en dix ans et que l’accès à celui-ci est rendu encore plus difficile en ces temps de crise sanitaire.
Au-delà de cette question, je regrette que nos deux amendements sur l’IVG, l’un visant à allonger de deux semaines le délai légal, l’autre visant à supprimer la double clause de conscience, aient été déclarés irrecevables, pour des motifs très contestables.
Nous sommes donc tout à fait hostiles à cet amendement de suppression de l’article 34 quinquies. Son adoption serait une erreur.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je ne comprends pas bien le sens de cet amendement de suppression, indépendamment des raisons de forme qui, à l’identique d’un amendement précédent, ont été invoquées par la rapporteure.
Sur le fond – car c’est bien ce qui est ici en question –, si cet amendement était adopté, l’accès à l’IVG s’en trouverait compliqué. Les médecins qui pratiquaient des IVG partant en grand nombre à la retraite, un certain nombre de femmes n’auront plus le choix entre la méthode médicamenteuse et la méthode instrumentale, contrairement à ce que prévoit le code de la santé publique.
Comme l’a rappelé Corinne Imbert, les sages-femmes pratiquent des IVG médicamenteuses depuis la loi de 2016 de modernisation de notre système de santé. L’IVG instrumentale est-elle d’une technicité telle qu’elle devrait être réservée à des spécialistes en actes quasi chirurgicaux ? Non ! Les médecins généralistes pratiquent des IVG instrumentales ; la technique en est simple et la formation extrêmement rapide. Une fois que vous savez pratiquer un frottis, l’étape suivante consiste à introduire dans l’utérus le matériel d’aspiration, cette opération n’étant pas compliquée. Cette formation est parfaitement accessible aux sages-femmes, qui, je le rappelle, exercent une profession médicale, prescrivent et accomplissent des actes techniques.
Rien ne justifie, sur le plan technique, ce refus qui est opposé aux sages-femmes de pratiquer des IVG instrumentales, alors qu’elles sont parfaitement compétentes pour ce faire dès lors qu’elles auront suivi une courte formation complémentaire. De surcroît, cela compromet le droit des femmes à choisir leur méthode d’IVG.
Nous aurions accepté de débattre plus précisément des modalités de cette expérimentation, mais nous ne comprenons pas, je le répète, que l’on veuille supprimer l’article. Nous voterons donc contre cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Permettez-moi de revenir sur ce que vient de dire M. Jomier.
C’est vrai, l’IVG instrumentale consiste, pour commencer, à introduire une canule dans l’utérus aux fins d’aspiration. Le problème, c’est que l’utérus n’est pas vide. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez comparé l’IVG instrumentale à la pose d’un stérilet ; or la pose d’un stérilet se pratique dans un utérus vide. Lors d’une IVG, celui-ci est « occupé » – pour ne pas dire autre chose.
En outre, l’introduction d’une canule dans un col d’utérus « occupé » nécessite au préalable que celui-ci soit dilaté, cette opération n’étant pas nécessairement très aisée à réaliser. (Exclamations sur les travées du groupe SER.) Ensuite, il faut vérifier l’absence de tout saignement après l’aspiration.
Je suis d’accord pour considérer que les sages-femmes, dès lors qu’elles auront suivi une formation à cette fin, pourraient très bien pratiquer des IVG instrumentales. En revanche, monsieur le secrétaire d’État, je ne veux surtout pas qu’il soit établi une comparaison entre une IVG instrumentale et la pose d’un stérilet. L’une et l’autre n’ont rien en commun.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je veux rassurer M. Milon, qui pourra relire mes propos : je n’ai pas comparé l’une et l’autre, pour les raisons que vous avez d’ailleurs très bien évoquées ; j’ai simplement dit que les sages-femmes pratiquaient d’ores et déjà un certain nombre d’actes.
M. Alain Milon. Ce n’est pas une excuse valable !
Mme la présidente. En conséquence, l’article 34 quinquies est supprimé.
Mme Laurence Cohen. Hou !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n’est pas glorieux !
Article 34 sexies (nouveau)
À titre expérimental, pour une durée de trois ans, l’État peut autoriser le financement par le fonds d’intervention régional mentionné à l’article L. 1435-8 du code de la santé publique de la mise en place par certaines agences régionales de santé d’un parcours soumis à prescription médicale visant à accompagner les personnes pour lesquelles une complication du diabète de type 2 est découverte et qui bénéficient du dispositif prévu au 3° de l’article L. 160-14 du code de la sécurité sociale.
Un décret fixe les conditions d’application du présent article, notamment les agences régionales de santé concernées par cette expérimentation et le contenu de ce parcours, qui peut comprendre un bilan d’activité physique ainsi qu’un bilan et des consultations de suivi nutritionnels et psychologiques.
Un rapport d’évaluation du dispositif est transmis au Gouvernement avant la fin de l’expérimentation.
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, sur l’article.
M. Xavier Iacovelli. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, je profite de l’examen de cet article pour alerter M. le secrétaire d’État sur le remboursement de frais médicaux liés au diabète.
J’ai récemment fait la connaissance d’un jeune homme que certains d’entre vous ont déjà eu, eux aussi, l’occasion de rencontrer : Hakaroa Vallé. Âgé de 15 ans, il est diabétique de type 1 et mène un combat formidable contre les discriminations que subissent les personnes diabétiques dans notre pays, notamment dans l’emploi, principalement dans la fonction publique.
J’évoquerai la problématique du remboursement des capteurs de glycémie, qui sont au nombre de deux en France.
Avec 80 % d’utilisateurs, le système Freestyle est le plus utilisé en France. Il l’est même désormais par les cyclistes professionnels pour le suivi de leur glycémie dans l’effort. Or ce capteur flash, sans piqûre, n’est aujourd’hui pas remboursé pour les enfants de moins de 4 ans, âge auquel il n’est pas évident de verbaliser les symptômes d’une hypoglycémie. Pour les familles, le coût de ce dispositif peut atteindre 1 750 euros par an.
Le second type de capteur, le Dexcom, est, quant à lui, remboursé dès lors que le taux d’hémoglobine glyquée est supérieur à 8 %, taux à partir duquel on se situe dans la zone de croissance exponentielle des risques de complications.
En deçà de 7 %, il est impossible d’être remboursé alors même qu’un tel remboursement éviterait des complications qui coûtent beaucoup plus cher à la sécurité sociale.
Je tenais vraiment à aborder cette question, car cette problématique touche des milliers d’enfants et de familles en France.
Nous devons tendre vers un remboursement sans condition pour les personnes insulino-dépendantes et insulino-requérantes – 500 000 Français sont concernés.
Aborder cette question lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, même si celle-ci n’est pas directement liée à cet article, c’est aussi rendre hommage à ce jeune homme de 15 ans, à sa détermination et à son combat pour améliorer notre système. Il est source d’inspiration pour nous tous et un formidable porte-parole pour les personnes diabétiques. (Mme Nadia Sollogoub applaudit.)
Mme la présidente. L’amendement n° 174, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Avant de présenter cet amendement, je tiens à dire que je souscris aux propos de notre collègue. Le non-remboursement de ce dispositif pour les enfants de moins de 4 ans soulève de nombreux problèmes pour eux et pour leurs familles.
J’en viens à la présentation de l’amendement n° 174 tendant à supprimer l’article 34 sexies.
Cet article s’inspire du forfait de suivi post-cancer institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, qui ne constitue pas cependant une expérimentation, comme celle qui est envisagée dans cet article.
Si la volonté d’accompagner les patients atteints de pathologies chroniques dans une logique de parcours non pas seulement de santé, mais aussi de soins est partagée, le fait est que de nombreux dispositifs répondent déjà à cette finalité.
L’expérimentation proposée pourrait notamment s’inscrire dans le cadre général pour l’innovation au sein du système de santé ouverte par l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, qui avait précisément vocation à renforcer la cohérence des actions de coordination des parcours tout en renforçant leur suivi et leur évaluation.
Afin de ne pas superposer les dispositifs, il est proposé de supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Permettez-moi, pour commencer, de faire un double aparté.
Comme Mme la rapporteure, je partage les propos du sénateur Iacovelli. Aussi, je vous propose d’avancer ensemble sur la problématique que vous avez soulevée.
Par ailleurs, permettez-moi de revenir sur l’expérimentation prévue à l’article précédent, dont vous avez voté la suppression à l’instant. Il s’agissait d’autoriser les sages-femmes, à titre expérimental, à pratiquer des IVG instrumentales. Avec cette suppression, je me demande quel message nous envoyons aux femmes de ce pays et, accessoirement, aux sages-femmes elles-mêmes, mais nous aurons l’occasion d’y revenir au cours de la longue navette parlementaire qui nous attend. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, GEST, SER et CRCE.)
J’en viens à l’amendement n° 174.
Mme la rapporteure a raison de souligner les possibilités offertes par le dispositif de l’innovation en santé, créé par l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.
Plus de soixante-dix expérimentations, portant sur des thèmes variés, ont été autorisées à ce titre, dont douze favorisant la pratique de l’activité physique adaptée. C’est la voie principale pour les expérimentations, d’autant qu’il n’existe aucune restriction quant au statut juridique des porteurs de projets.
En première lecture, l’Assemblée nationale a voté une expérimentation visant à mettre en place un parcours de soins pour l’accompagnement des personnes souffrant de diabète. Nous y sommes favorables, pour plusieurs raisons que je vous précise de nouveau.
Premièrement, cet article souligne très clairement que le Gouvernement est fortement engagé en faveur du développement du sport santé. J’espère qu’il en est de même du Sénat !
Deuxièmement, il favorise le déploiement sur le terrain de toutes les initiatives qui rencontrent un véritable succès dans les territoires. Je pense notamment aux maisons sport-santé – certains d’entre vous en comptent sans doute dans leur département.
Troisièmement et enfin, il met en avant les innovations, permises par le dernier PLFSS, en faveur de l’activité physique adaptée. Parmi elles, figure bien sûr le parcours post-cancer, que vous avez voté l’an passé et dont les décrets d’application sont en cours de finalisation en vue d’un déploiement avant la fin de l’année 2020.
Le sport santé est l’une des priorités d’Olivier Véran et il s’inscrit dans l’action du Gouvernement : l’examen du PLFSS me donne l’occasion de le réaffirmer. Pour cette raison, nous avons appuyé les amendements de députés visant à expérimenter l’accompagnement pluridisciplinaire des diabétiques de type 2. En conséquence, nous sommes défavorables à cet amendement de suppression.
Mme la présidente. L’amendement n° 379 rectifié, présenté par MM. Savin, Kern, Piednoir, Savary, Somon, Moga et Hugonet, Mmes Dumas et N. Goulet, MM. Cambon et Joyandet, Mme Deromedi, M. Sol, Mmes Demas et Boulay-Espéronnier, M. Bouchet, Mme Puissat, MM. Vogel, Calvet, Daubresse, B. Fournier et Burgoa, Mme Estrosi Sassone, M. Gremillet, Mme Belrhiti, MM. Laugier, Wattebled et Brisson, Mmes M. Mercier et Lassarade, M. Pointereau, Mme Micouleau, M. de Nicolaÿ, Mme Bonfanti-Dossat, M. D. Laurent, Mmes Sollogoub, Berthet et Malet, MM. Mandelli, Longeot, Belin, Longuet et Decool, Mme Garriaud-Maylam, M. Genet, Mme Ventalon, MM. Darnaud, Houpert, Regnard et Cuypers, Mme Borchio Fontimp, MM. Meurant, Tabarot, H. Leroy, E. Blanc, J.M. Boyer et Dallier, Mme Billon, M. Bonhomme, Mme Chauvin, M. Saury et Mmes Mélot et Di Folco, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Après le mot :
personnes
insérer les mots :
traitées pour une hypertension artérielle ou
La parole est à Mme Frédérique Puissat.
Mme Frédérique Puissat. Même si j’ai voté pour la suppression de l’article 34 sexies, je défendrai cet amendement, déposé par Michel Savin.
Monsieur le secrétaire d’État, vous le savez, notre collègue est très engagé en faveur du sport santé. Par cet amendement, il propose d’étendre l’expérimentation prévue au traitement de l’hypertension artérielle.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Initialement, la commission avait émis un avis défavorable sur cet amendement, mais puisque l’on semble décidé à accompagner toutes les pathologies chroniques, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, vous avez compris combien le Gouvernement est engagé en faveur du sport santé. Il s’agit non pas d’accompagner et de traiter toutes les pathologies, mais de développer une approche nouvelle, axée sur la prévention : nous sommes tous conscients du virage que notre pays doit prendre à cet égard.
Plusieurs mesures concrètes sont déployées sur le terrain. Je pense, une nouvelle fois, aux maisons sport-santé : ces structures connaissent le succès que l’on sait. Les derniers PLFSS nous ont également permis d’encourager l’activité physique adaptée grâce à diverses innovations, dont le parcours cancer et les douze expérimentations que je viens d’évoquer, au titre de l’article 51, favorisant la pratique d’activités physiques.
Cela étant, l’offre que nous déployons sur le terrain doit être lisible pour les Français. En ce sens, je rejoins Mme la rapporteure : il ne faut pas complexifier à l’excès le dispositif expérimental prévu dans ce PLFSS pour les personnes atteintes de diabète de type 2 en l’étendant, comme vous le proposez, aux personnes souffrant d’hypertension artérielle.
Nous sommes très engagés sur ce terrain, mais, à mes yeux, il vaut mieux procéder par étape. Comme Mme la rapporteure, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34 sexies, modifié.
(L’article 34 sexies est adopté.)
Article 34 septies (nouveau)
I. – À titre expérimental, pour une durée d’un an, l’État peut autoriser le financement, dans le cadre du dispositif mentionné à l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale, de la mise en place par la Caisse nationale de l’assurance maladie, sur certains territoires, d’une consultation longue sur la santé sexuelle réalisée par le médecin généraliste, le gynécologue ou la sage-femme au bénéfice des assurés entre leur quinzième et leur dix-huitième anniversaire.
II. – Un rapport relatif à cette expérimentation est transmis au Gouvernement avant le terme de celle-ci en vue d’une éventuelle généralisation.
Mme la présidente. L’amendement n° 175, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Mes chers collègues, la commission vous propose un nouvel amendement de suppression.
Cet article met en œuvre à titre expérimental, pour une durée d’un an, une consultation longue en santé sexuelle pour les assurés âgés de 15 à 18 ans, financée par l’assurance maladie.
Évidemment, la mesure est intéressante, mais il me semble dommage de limiter l’expérimentation à une année. De plus, elle viendrait s’ajouter à plusieurs dispositifs existants : outre la première consultation de contraception et de prévention dont peuvent bénéficier les filles de 15 à 18 ans, il existe – je le rappelle – un examen médical obligatoire entre 15 et 16 ans, lequel fait partie des vingt examens obligatoires de l’enfant.
Certains conseils régionaux, en lien avec les ARS, ont également mis en place des pass santé jeunes qui offrent, notamment aux jeunes, un accompagnement en matière de santé sexuelle. C’est une bonne chose.
Il ne semble donc pas opportun d’adopter une mesure de portée si limitée, qui viendrait s’ajouter aux dispositifs déjà mis en œuvre pour améliorer la prévention en santé des adolescents et des jeunes adultes.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Madame la rapporteure, j’entends bien vos observations et je suis sûr que nous visons le même but : accroître le niveau d’information et de sensibilisation de l’ensemble de nos jeunes.
Évidemment, la promotion de la santé sexuelle est une des priorités du Gouvernement. À preuve, nous avons déployé une stratégie nationale en santé sexuelle, qui s’étend jusqu’à l’horizon 2030 – elle traduit donc bien une certaine ambition !
Nous avons à cœur de permettre le développement des politiques publiques en faveur de la santé sexuelle, lesquelles vont de l’éducation à la sexualité à la santé reproductive, en passant par la prévention et le dépistage des infections sexuellement transmissibles (IST), notamment le VIH. Vous le savez, il y va également de l’égalité entre les femmes et les hommes, principe fondateur de notre République.
Grâce à ce dispositif, nous atteindrons mieux encore notre objectif global : améliorer l’information et la sensibilisation de l’ensemble de nos jeunes. Vous souhaiteriez que nous soyons plus ambitieux encore, mais cet article fait déjà œuvre utile. Nous nous opposons donc à sa suppression.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Nous avons voté contre les précédents amendements de suppression : pour les mêmes raisons, nous nous prononcerons pour le maintien de l’article 34 septies.
Bien sûr, on peut entendre les arguments de Mme la rapporteure : des dispositifs similaires existent déjà. Néanmoins – l’examen de ce PLFSS le prouve –, les questions liées à la santé publique en général et à la santé sexuelle en particulier sont trop souvent balayées d’un revers de main par notre commission.
Madame la rapporteure, si la portée de cette mesure vous semble trop limitée, pourquoi ne proposez-vous pas d’étendre la durée de l’expérimentation et d’en faire bénéficier plus de territoires, au lieu de demander la suppression pure et simple de cet article ?
À mon sens, il est dommageable de se priver d’un outil supplémentaire à destination des jeunes, notamment des garçons, qui pourraient ainsi bénéficier d’une consultation.
On sait très bien l’importance de la prévention et de l’information à destination des jeunes sur les IST, les maladies sexuellement transmissibles (MST) ou encore sur la contraception. Les chiffres sont alarmants. On assiste à la résurgence de certaines maladies, comme la syphilis : à l’évidence, les dispositifs existants ne suffisent pas.
Nous voterons contre la suppression de cet article.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Pardonnez-moi d’intervenir dans ce débat de spécialistes : depuis quelques instants, je ressens un certain malaise. Amendement après amendement, le Sénat semble freiner les différentes initiatives prises en faveur des femmes. À présent, il s’agit des jeunes.
Laurence Cohen a eu raison de parler des garçons. Quand on est élu local, on connaît toute l’importance de ces politiques, souvent destinées aux adolescentes et aux adolescents.
Madame la rapporteure, cet article prévoit que, « à titre expérimental, pour une durée d’un an, l’État peut autoriser le financement » de cette consultation : ce n’est pas la révolution ! Vous relevez que, parfois, les collectivités territoriales mènent déjà de telles politiques : parfois ! Mais quels sont ces dispositifs ? Sont-ils suffisamment robustes ?
Nous tous ici avons été, ou sommes encore, élu local. Personnellement, je trouve réellement utile que l’État puisse, pendant un an, observer ce qui se passe sur l’ensemble du territoire. Ce faisant, il verra ce que les collectivités territoriales font ou ne font pas et pourra repérer les initiatives méritant d’être complétées.
Dès l’adolescence, nos enfants doivent apprendre ce que sont la sexualité, les maladies sexuellement transmissibles et la reproduction, nous le savons bien ! Ceux qui, dans cet hémicycle, s’inquiètent du recours à l’IVG ou des maternités non désirées devraient, eux aussi, être favorables à ces dispositions.
J’ai pris la liberté de m’immiscer dans ce débat de connaisseurs. À mon sens, il faut repousser cet amendement, car il faut accepter cette action de l’État !
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Pour ma part, je ne vois pas ce qu’apporte cet article. Il existe déjà un examen obligatoire entre 15 et 16 ans, au titre des examens de l’enfant. Pourquoi le doublonner par une telle expérimentation ?
En parallèle, les collectivités territoriales ont leurs propres dispositifs. Ainsi, la région des Pays de la Loire, où je suis chargée de la mission santé, a étendu le pass contraception pour en faire un pass santé, lequel ouvre droit à des consultations médicales, à des préservatifs gratuits ou encore à des tests.
J’y insiste, pourquoi s’offusquer ? Si la commission rejette cet article, c’est parce qu’il est satisfait par l’examen obligatoire que nous avons voté il y a un an ou deux.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. J’abonde dans le sens de Catherine Deroche et j’ajoute qu’il ne faut pas multiplier les examens, car les adolescentes doivent rester réceptives.
Au demeurant, monsieur le secrétaire d’État, les examens obligatoires de 15 à 18 ans sont-ils bien effectués ? Quel est leur taux de réalisation ? Il faut commencer par procéder à un état des lieux ! Je ne suis pas du tout sûr que cette visite soit entièrement prise en compte, au titre de la surveillance de nos jeunes…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n’est pas de la surveillance !
M. René-Paul Savary. Une fois que l’on s’en sera assuré, cette consultation permettra également l’éducation sur laquelle nous insistons ce soir.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Madame la présidente de la commission, monsieur Savary, il ne s’agit pas de doublonner la consultation obligatoire entre 15 et 18 ans, qui peut certes porter sur des questions de santé sexuelle, mais dont l’objet est bien plus large.
Ce dispositif vise à expérimenter, pour les jeunes garçons, ce que le droit commun prévoit déjà pour les seules jeunes filles : une consultation auprès du médecin traitant – les jeunes femmes peuvent également s’adresser à un gynécologue ou à une sage-femme –, dans une approche globale de la santé sexuelle et reproductive. Cette consultation est donc tout à fait différente de l’examen obligatoire en vigueur, dont l’objectif est plus général. Nous pourrons mesurer dans un an les effets de cette expérimentation !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 175.
(L’amendement n’est pas adopté.) – (M. Ronan Dantec applaudit.)
Mme la présidente. L’amendement n° 432 rectifié, présenté par Mmes Billon, C. Fournier, Perrot, Jacquemet, Vérien, Vermeillet, Tetuanui et Létard, MM. Cadic, J.M. Arnaud, Longeot, Levi, Détraigne et Kern, Mme Sollogoub, MM. Le Nay, Janssens, Canevet et Delcros, Mmes Férat et de La Provôté et MM. Lafon, Hingray, Poadja et Capo-Canellas, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Pour la mise en œuvre de l’expérimentation, il est dérogé à article L. 4151-1 du code de la santé publique. Il peut être dérogé aux articles L. 162-8-1 et L. 160-14 du code de la sécurité sociale. Les sages-femmes, à titre dérogatoire, peuvent effectuer ces consultations auprès des assurés mineurs de moins de dix-huit ans et leur prescrire la contraception.
La parole est à Mme Nadia Sollogoub.
Mme Nadia Sollogoub. Après cet intense suspense, je vais pouvoir défendre l’amendement de ma collègue Annick Billon ! (Sourires.)
En tant que présidente de la délégation sénatoriale aux droits des femmes, Mme Billon insiste sur l’intérêt de l’expérimentation : elle propose donc de l’élargir et, ce faisant, d’offrir à tous, filles comme garçons, une consultation longue et globale dédiée à la santé sexuelle.
En outre, cet amendement vise à permettre aux sages-femmes de réaliser cette consultation. Grâce à un meilleur maillage territorial, les jeunes auront plus facilement accès à cette consultation.
Enfin – cet aspect n’a pas encore été évoqué –, pour apporter aux adolescents des garanties de confidentialité, cet amendement tend à lever l’obligation pour le mineur d’être accompagné d’un adulte et à ouvrir la possibilité de bénéficier du secret des dépenses. En effet, un tel examen ne peut être assimilé aux consultations proposées aux enfants.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Nous demandons le retrait de cet amendement – à défaut, nous émettrons un avis défavorable –, car il semble a priori satisfait : peut-être M. le secrétaire d’État nous le confirmera-t-il ?
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je le confirme ! Je demande moi aussi le retrait de cet amendement. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Madame Sollogoub, l’amendement n° 432 rectifié est-il maintenu ?
Mme Nadia Sollogoub. Oui, je le maintiens !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 34 septies.
(L’article 34 septies est adopté.)
Article additionnel après l’article 34 septies
Mme la présidente. L’amendement n° 408 rectifié ter, présenté par MM. Henno et P. Martin, Mme Dindar, MM. Kern, Janssens et Moga, Mme Guidez, M. Levi, Mme Vermeillet, MM. Laugier, S. Demilly et Détraigne, Mme Perrot, MM. Hingray, Lafon, Le Nay et Cazabonne, Mme de La Provôté, M. Chauvet, Mmes Saint-Pé et Morin-Desailly, M. Duffourg et Mme Doineau, est ainsi libellé :
Après l’article 34 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 2° du I de l’article L. 623-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’assurée peut réduire, à sa demande et sous réserve d’un avis favorable du professionnel de santé qui suit la grossesse, la période de son congé prénatal, qui commence avant la date présumée de l’accouchement d’une durée maximale de trois semaines, la période postérieure à la date présumée de l’accouchement étant alors augmentée d’autant. »
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Avec cet amendement, nous voulons mettre fin à une disparité entre les salariées et les indépendantes en autorisant l’ensemble des professionnelles exerçant en libéral, lorsqu’elles mènent leur grossesse jusqu’à son terme dans des conditions de santé optimales, et dans des conditions médicales strictes, à reporter une partie de leur congé prénatal sur leur congé postnatal.
Ainsi, les mères concernées pourront, sans bouleverser les dispositions actuelles et sans coût supplémentaire, disposer de plus de temps avec leur enfant après la naissance, ce qui sera favorable au développement harmonieux du lien mère-enfant.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Il me semble que cette possibilité soit déjà offerte, même si le code de la sécurité sociale ne la détaille pas de manière si explicite : afin de nous en assurer, nous sollicitons l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Madame la rapporteure, nous vous confirmons que cet amendement est satisfait.
Monsieur Henno, les textes réglementaires du code de la sécurité sociale permettent déjà aux travailleuses indépendantes de reporter une partie du congé prénatal sur le congé postnatal. À ce titre, elles se voient appliquer les mêmes règles que les salariées. En effet, les durées du congé de maternité des travailleuses indépendantes sont totalement alignées sur celles des salariées depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.
Cette évolution résulte d’un amendement de la députée Marie-Pierre Rixain. Présidente de la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, Mme Rixain est très investie sur ces sujets, notamment pour ce qui concerne les indépendants. Nous aurons probablement l’occasion d’y revenir, lors de l’examen de l’article 35, que nous attendons tous, car il prévoit l’allongement de la durée du congé de paternité dans notre pays !
Une travailleuse indépendante peut donc reporter une partie de son congé prénatal, dans la limite de trois semaines de congés obligatoires en prénatal, afin de bénéficier de ces semaines de congé après la naissance de l’enfant.
En conséquence, nous vous demandons de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Monsieur Henno, l’amendement n° 408 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Olivier Henno. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 408 rectifié ter est retiré.
Chapitre II
Allonger le congé de paternité et d’accueil de l’enfant et le rendre pour partie obligatoire
Article 35
I. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 1225-35 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « et dans un délai déterminé par décret » sont supprimés, après le mot : « conjoint », sont insérés les mots : « ou concubin », les mots : « ou vivant maritalement avec elle » sont supprimés et les mots : « onze jours consécutifs ou de dix-huit jours consécutifs » sont remplacés par les mots : « vingt-cinq jours calendaires ou de trente-deux jours calendaires » ;
b) Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Ce congé est composé d’une période de quatre jours calendaires consécutifs, faisant immédiatement suite au congé de naissance mentionné au 3° de l’article L. 3142-1, et d’une période de vingt et un jours calendaires, portée à vingt-huit jours calendaires en cas de naissances multiples.
« Le délai de prévenance de l’employeur quant à la date prévisionnelle de l’accouchement et aux dates de prise du congé et à la durée de la ou des périodes de congés, le délai dans lequel les jours de congé doivent être pris ainsi que les modalités de fractionnement de la période de congé de vingt et un jours et de vingt-huit jours sont fixés par décret. Le délai de prévenance relatif à la date prévisionnelle de l’accouchement et celui relatif aux dates de prise du ou des congés de la seconde période de vingt et un jours ou de vingt-huit jours ainsi qu’à la durée de ces congés doivent être compris entre quinze jours et deux mois. » ;
c) Le troisième alinéa est supprimé ;
d) Au dernier alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre » et les mots : « le congé de paternité et d’accueil de l’enfant est de droit » sont remplacés par les mots : « la période de congé de quatre jours consécutifs mentionnée au troisième alinéa est prolongée de droit, à la demande du salarié, » ;
2° Après l’article L. 1225-35, il est inséré un article L. 1225-35-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1225-35-1. – Il est interdit d’employer le salarié pendant le congé mentionné au 3° de l’article L. 3142-1 et pendant la période de congé de paternité et d’accueil de l’enfant de quatre jours mentionnée au troisième alinéa de l’article L. 1225-35, à l’exception de sa prolongation éventuelle mentionnée au dernier alinéa du même article L. 1225-35 et sans qu’y fasse, le cas échéant, obstacle le non-respect par le salarié du délai de prévenance mentionné à l’avant-dernier alinéa dudit article L. 1225-35.
« Si la naissance de l’enfant intervient alors que le salarié a pris des congés payés ou un congé pour évènements familiaux, l’interdiction d’emploi débute à l’issue de cette période de congés.
« L’interdiction d’emploi ne s’applique pas pour le congé mentionné au troisième alinéa de l’article L. 1225-35 lorsque le salarié ne peut pas bénéficier des indemnités et allocations versées dans les conditions prévues à l’article L. 331-8 du code de la sécurité sociale ou par d’autres dispositions législatives ou réglementaires. » ;
2° bis (nouveau) À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 1225-37, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « seize » ;
3° L’article L. 1225-40 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « onze » est remplacé par le mot : « vingt-cinq » et le mot : « dix-huit » est remplacé par le mot « trente-deux » ;
b) Au deuxième alinéa, le mot : « onze » est remplacé par le mot : « vingt-cinq » ;
4° L’article L. 3142-1 est ainsi modifié :
a) Le 3° est ainsi modifié :
– à la fin de première phrase, les mots : « survenue à son foyer ou pour l’arrivée d’un enfant placé en vue de son adoption » sont remplacés par les mots : « pour le père et, le cas échéant, le conjoint ou le concubin de la mère ou la personne liée à elle par un pacte civil de solidarité » ;
– la seconde phrase est supprimée ;
b) Après le même 3°, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3° bis Pour l’arrivée d’un enfant placé en vue de son adoption ; »
5° L’article L. 3142-4 est ainsi modifié :
a) Le 3° est ainsi rédigé :
« 3° Trois jours, pour chaque naissance. Cette période de congés commence à courir, au choix du salarié, le jour de la naissance de l’enfant ou le premier jour ouvrable qui suit ; »
b) Après le même 3°, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3° bis Trois jours pour l’arrivée d’un enfant placé en vue de son adoption ; »
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les jours de congés mentionnés au présent article sont des jours ouvrables. »
II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa de l’article L. 161-6 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, le mot : « onze » est remplacé par le mot : « vingt-cinq » et le mot : « dix-huit » est remplacé par le mot : « trente-deux » ;
b) (nouveau) À la seconde phrase, le mot « onze » est remplacé par le mot « vingt-cinq » ;
1° bis (nouveau) À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 331-7, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « seize » ;
2° L’article L. 331-8 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Lorsqu’il exerce son droit à congé prévu à l’article L. 1225-35 du code du travail dans les délais fixés par le décret auquel renvoie le même article L. 1225-35, l’assuré reçoit, pour la durée de ce congé et dans la limite maximale de vingt-cinq jours, l’indemnité journalière mentionnée à l’article L. 331-3 du présent code dans les mêmes conditions d’ouverture de droit, de liquidation et de service, sous réserve de cesser toute activité salariée ou assimilée pendant cette période et au minimum pendant la période de quatre jours mentionnée au troisième alinéa de l’article L. 1225-35 du code du travail. » ;
b) À la fin du deuxième alinéa, les mots : « dix-huit jours consécutifs » sont remplacés par les mots : « trente-deux jours » ;
3° Le premier alinéa du II de l’article L. 623-1 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« II. – À l’occasion de la naissance d’un enfant, le père et, le cas échéant, le conjoint de la mère ou la personne liée à elle par un pacte civil de solidarité ou son concubin, auxquels s’appliquent les dispositions du présent livre bénéficient, sur leur demande, d’indemnités journalières du même montant que celles mentionnées au 2° du I.
« Pour bénéficier des indemnités mentionnées au premier alinéa du présent II, les intéressés doivent cesser leur activité professionnelle pendant une durée minimale, fixée par décret, à compter de la naissance et ne pas reprendre cette activité pendant la durée d’indemnisation. »
III. – Le premier alinéa de l’article L. 732-12-1 du code rural et de la pêche maritime est remplacé deux alinéas ainsi rédigés :
« Le père ainsi que, le cas échéant, le conjoint ou concubin de la mère ou la personne liée à elle par un pacte civil de solidarité, lorsqu’ils appartiennent aux catégories mentionnées aux 1° et 2°, au a du 4° et au 5° de l’article L. 722-10, bénéficient, à l’occasion de la naissance d’un enfant, sur leur demande, d’une allocation de remplacement.
« Pour bénéficier de l’allocation prévue au premier alinéa du présent article, les intéressés doivent se faire remplacer par du personnel salarié dans leurs travaux, cesser leur activité professionnelle pendant une durée minimale, fixée par décret, à compter de la naissance et ne pas reprendre cette activité pendant la durée d’indemnisation. »
IV. – Le présent article entre en vigueur le 1er juillet 2021. Il s’applique aux enfants nés ou adoptés à compter de cette date ainsi qu’aux enfants, nés avant cette date, dont la naissance était supposée intervenir à compter de cette date.
Par dérogation au premier alinéa du présent IV, les dispositions du présent article relatives à l’information de l’employeur sur la date prévisionnelle de la naissance s’appliquent aux naissances prévues à compter du 1er juillet 2021.
Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, sur l’article.
Mme Véronique Guillotin. « Il n’y a pas de bon père, c’est la règle : qu’on n’en tienne pas grief aux hommes mais au lien de paternité qui est pourri. » Cette citation n’est pas de moi, elle est d’un écrivain-philosophe, qui n’est autre que Jean-Paul Sartre !
Très longtemps, le père a été essentiellement perçu comme le pourvoyeur de revenus ; son objectif principal n’était pas de créer une relation avec ses enfants. Aux mères, les soins quotidiens ; aux pères, l’éducation au savoir et la protection financière de la famille.
Toutefois, cette vision patriarcale de la société a profondément changé. Aujourd’hui, ceux que l’on appelle « les nouveaux pères » cherchent à construire une paternité fondée sur la proximité et la complexité affective avec leurs enfants. De plus, la naissance n’est plus uniquement une affaire de femmes : c’est un événement qui bouleverse l’existence des deux parents, du couple et de la famille.
Parce qu’il répond aux attentes des familles et de très nombreux pères, l’allongement de la durée du congé de paternité et d’accueil de l’enfant est une avancée sociale majeure.
Tout d’abord, la présence des deux parents pendant les premiers mois de la vie a une incidence positive durable et déterminante sur la santé et le développement des enfants.
Selon le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, qui préside la commission des 1 000 premiers jours, plus le père est présent pendant la grossesse et pendant les premiers jours qui suivent la naissance, plus la mère est sécurisée et plus le bébé trouve autour de lui ce qu’il lui faut pour se développer. Nos voisins européens l’ont d’ailleurs bien compris, à l’instar de nos jeunes.
Ensuite, cette mesure renforce l’égalité entre les hommes et les femmes en favorisant le partage des tâches au sein de la sphère familiale et en incitant à une répartition équitable entre vie familiale et vie professionnelle.
Enfin, alors que les femmes ont été considérées jusqu’à présent comme des mères en puissance, tous les salariés deviendront des parents en puissance.
Dans quelques instants, nous débattrons d’amendements visant à réduire la portée de cette mesure. Je ne les voterai pas. Nous le savons, les pères qui, aujourd’hui, ne prennent pas la totalité de leur congé s’autocensurent souvent, parce qu’ils craignent d’être mal vus dans leur entreprise, ou tout simplement parce qu’ils sont sous l’influence de représentations sociales.
Si ce dispositif devient facultatif, les pères ne seront certainement pas libres de prendre ou non leur congé. À mon sens, il faut donc maintenir son caractère obligatoire. C’est dans cette même logique que la parité en politique a pu progresser.
Les pères ne veulent pas être traités comme des parents de seconde zone : nous devons accompagner cette évolution sociétale. Aussi, j’espère que la Haute Assemblée aura la sagesse de repousser ces amendements, pour enfin donner aux pères la place qui leur revient dans l’accueil de l’enfant. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et RDPI.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Elsa Schalck, sur l’article.
Mme Elsa Schalck. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est la première fois que je prends la parole dans cet hémicycle et je suis heureuse que ce soit pour une telle occasion : l’allongement de la durée du congé de paternité est une avancée que je tiens à saluer.
C’est une avancée pour les hommes c’est une avancée pour les femmes, c’est une avancée pour les familles, c’est une mesure qui répond à l’intérêt de l’enfant. C’est également une avancée pour toute notre société, qui a besoin d’aller encore plus loin vers l’égalité entre les femmes et les hommes, qu’il s’agisse de la conciliation entre la vie professionnelle et la vie familiale, du partage des tâches ou de l’implication des deux parents, dès les premiers jours de la vie de l’enfant.
Ces questions sont essentielles. Elles nous concernent tous. J’y ai été fortement sensibilisée lors de stages que j’ai effectués il y a quelques années au Québec. Je garde en mémoire plusieurs témoignages de parents. De jeunes pères soulignaient notamment tout ce que le congé de paternité avait de positif : grâce à lui, ils pouvaient s’investir auprès de leur enfant et prendre conscience de la parentalité, qu’il est si important d’apprendre à deux.
Ce congé permet aux deux parents de s’épauler l’un l’autre. De surcroît, il donne, notamment aux pères, l’envie de prolonger ce moment par un congé parental, dans un cadre bienveillant – le mot a toute son importance – et protecteur.
Ces envies, je les retrouve aujourd’hui dans notre société ; je les perçois autour de moi.
Prolonger le congé de paternité, c’est donc accompagner un changement de mentalités. De telles évolutions ne se décrètent pas : elles s’apprennent. Il est parfois nécessaire de passer par l’obligation, précisément pour concrétiser les changements. Il s’agit d’inciter, d’impliquer et d’encourager ; en particulier, le père doit se sentir légitime à prendre un congé lors de la naissance de son enfant.
Il s’agit aussi de créer un climat favorable pour que tout un chacun puisse demander et obtenir un tel congé. Ainsi, l’on favorisera la sérénité au sein du couple, qui est souvent chamboulé par l’arrivée d’un enfant.
Enfin – je le rappelle à mon tour –, il s’agit de permettre à l’enfant de passer ses premiers jours avec ses deux parents : nous savons combien cette double présence est bénéfique pour son développement.
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Elsa Schalck. L’allongement du congé de paternité est une avancée nécessaire, mais il n’est pas le seul enjeu. Nous aurons l’occasion d’en reparler. Je pense notamment…
Mme la présidente. Il faut vraiment conclure !
Mme Elsa Schalck. … à l’accompagnement des familles à la parentalité. Ces questions me paraissent essentielles ! (MM. Martin Lévrier et Stéphane Artano applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, sur l’article.
M. Guillaume Gontard. L’article 35 vient consacrer l’une des mesures phares de ce PLFSS : l’allongement de la durée du congé de paternité.
Ce doublement à vingt-huit jours, dont sept obligatoires, est un nouveau symbole du fameux « en même temps ». En avril 2019, la France faisait tout pour limiter la portée de la directive européenne relative au congé parental. Fidèle à la logique comptable qui guide son action, le Président de la République déclarait alors : « […] C’est une belle idée qui peut coûter très cher et finir par être insoutenable. »
Nous avons observé un changement de pied heureux, cinq mois plus tard, avec le lancement de la commission Cyrulnik, censée faire des 1 000 premiers jours de la vie de l’enfant une priorité de l’action publique. Le rapport rendu un an plus tard préconise l’extension du congé de paternité à neuf semaines et une réforme du congé parental, qui serait beaucoup mieux rémunéré et d’une durée plus courte.
Entre les grandes promesses présidentielles et la logique comptable, il a fallu trancher et, comme souvent, c’est le portefeuille qui a gagné l’arbitrage. Le congé de paternité est étendu à quatre semaines, dont une seule est obligatoire, et la réforme du congé parental est renvoyée aux calendes grecques.
Nous saluons ce premier pas, mais nous restons sur notre faim, car la réforme du congé de paternité et des congés parentaux est essentielle à bien des égards.
Cette réforme est essentielle pour les enfants – les précédents orateurs l’ont rappelé. Elle permettra de les accueillir dans les meilleures conditions, de favoriser leur développement cognitif et de renforcer leur sécurité affective.
Elle est essentielle pour permettre au père, ou au second parent, de soulager la mère après l’épreuve de l’accouchement et, au-delà, pour assurer une meilleure répartition des tâches domestiques.
Elle est également essentielle pour que les parents, notamment celui qui n’a pas porté l’enfant neuf mois, puissent appréhender et découvrir la parentalité en nouant des liens avec leur progéniture.
Elle est essentielle, enfin, au combat pour l’égalité entre les femmes et les hommes. Seul un congé de paternité allongé dans des proportions similaires au congé de maternité permettrait de lutter contre la discrimination à l’embauche des futures mères et contre les inégalités salariales. Tant que la parentalité n’aura pas des conséquences similaires, que l’employé soit père ou mère, ces discriminations perdureront.
Nous n’avons pas pu amender ce dispositif et nous le regrettons : de l’Espagne, avec ses seize semaines de congés payés, à la Suède, avec ses dix-huit mois de congés parentaux partageables, il y avait bien des modèles à suivre.
J’espère que, au-delà de la naissance, on imaginera demain dans notre pays un congé parental utilisable tout au long de la vie de l’enfant, pour l’accompagner beaucoup mieux quand le besoin s’en fait sentir !
Mme la présidente. La parole est à Mme Nadège Havet, sur l’article.
Mme Nadège Havet. Mes chers collègues, le congé de paternité est actuellement de onze jours : il peut succéder au congé de naissance, qui dure, lui, trois jours. Dans ce cas, le père peut rester deux semaines auprès de son enfant. Qu’est-ce que deux semaines ?
Que change cet article ? Le congé est porté à vingt-huit jours. Sa durée est doublée : aux trois jours de congé de naissance, qui seront indemnisés par l’employeur, s’ajouteront vingt-cinq jours de congé de paternité, qui seront indemnisés par la sécurité sociale. En cas de naissance multiple, ce total sera porté à trente-deux jours.
Disons-le : il s’agit d’une avancée remarquable. Cette réforme, qui devrait entrer en vigueur le 1er juillet 2021, est un marqueur social fort du quinquennat.
Les jeunes pères auront l’obligation de prendre sept de ces vingt-huit jours immédiatement après la naissance de l’enfant. Les vingt et un jours de congé restants pourront être pris dans la foulée ou ultérieurement, de manière fractionnée.
Cette mesure vient soutenir l’égalité entre les femmes et les hommes. Elle est voulue, revendiquée, attendue par tous les parents. Depuis la création du congé de paternité, en 2002, aucun allongement n’avait été décidé. La commission des 1 000 premiers jours, qui a rendu son rapport en septembre dernier, met en avant la nécessité de renforcer ce temps parental afin de favoriser la création de liens d’attachement durables entre le second parent et l’enfant et, ainsi, d’accompagner le développement de celui-ci.
Il ne faudra pas laisser entendre que cette mesure est une contrainte : c’est au contraire une démarche positive et un élément fort de nos politiques sociales et familiales.
Nous voterons évidemment cet article, avec fierté : il va dans le sens de l’histoire ! Nous nous opposerons aux mesures qui auraient pour conséquence de réduire sa portée. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Meunier, sur l’article.
Mme Michelle Meunier. Deux minutes trente : c’est le temps dont je dispose pour défendre l’allongement de la durée du congé de paternité et le caractère obligatoire de celui-ci.
Deux minutes trente : c’est aussi le temps que les pères accorderont en plus aux soins des enfants si nous ne faisons rien, et encore faudra-t-il attendre cinq ans pour obtenir ce résultat. Ce n’est pas moi qui le dis : cette tendance, qui n’est évidemment pas satisfaisante, a été mesurée par le Centre d’analyse stratégique en 2012.
Nous connaissons l’immense déséquilibre entre le temps consacré par les mères et par les pères aux soins des enfants. Cet écart ne nous semble pas acceptable ; il est le ferment d’une société inégalitaire, qui fait peser principalement sur les femmes la charge du soin parental, des tâches éducatives et du travail domestique.
Ne nous étonnons pas, si l’on maintient cet injuste déséquilibre, que le travail professionnel des femmes soit minoré et que le principe « à travail égal, salaire égal » demeure un slogan. Ne nous étonnons pas que les femmes travaillent gratuitement depuis mercredi 4 novembre à seize heures seize, ce qui sera le cas jusqu’à la fin de l’année.
Nous voulons modifier de façon radicale la répartition du temps de travail parental au sein du couple, et nous l’assumons. Nous entendons en finir avec le modèle « monsieur gagne-pain » et « madame au foyer ».
La seule manière d’avancer rapidement vers l’égalité, c’est de rendre ce congé de paternité obligatoire. Sans cela, il est à craindre qu’une telle avancée ne prenne trop de temps, le risque étant de se heurter à certains obstacles, comme ce cliché qui veut qu’un homme qui pouponne ne soit pas viril. En outre, le risque existe, en dépit de la formidable attente que suscite ce congé dans la population française, que certains hommes ne demandent pas à en bénéficier, par crainte de le demander à leur employeur.
Nous le savons, nous parviendrons à l’égalité, car la société française y est majoritairement prête, tout comme une partie de votre famille politique, chers collègues de droite, divisée sur la question. Nous remporterons cette bataille culturelle.
Nous voterons donc pour l’allongement de la durée du congé de paternité et pour son caractère obligatoire. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et RDPI.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure de la commission des affaires sociales pour la famille. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, je remercie tous ceux qui se sont exprimés. Je dois reconnaître que je buvais du petit-lait en vous écoutant !
L’allongement de la durée du congé de paternité figure parmi les recommandations du rapport des 1 000 jours, fruit du travail d’un comité de dix-huit experts.
Alors quand débute et quand se termine cette période des 1 000 jours ? Elle commence au quatrième mois de grossesse et s’étend jusqu’aux 2 ans de l’enfant, certains scientifiques la faisant démarrer et s’achever plus ou moins avant ou après.
Quoi qu’il en soit, la croissance la plus spectaculaire du cerveau humain a lieu à la fin de la grossesse et durant les deux premières années de la vie. C’est la période privilégiée pour apporter à l’enfant un sentiment d’attachement et de sécurité, pour favoriser son développement émotionnel et cognitif. Ces moments sont uniques. Pour les scientifiques, ils sont incontournables.
À ceux qui se demandent si le congé de paternité ne serait pas un gadget dans notre société, je rappelle que les neurosciences nous montrent le chemin depuis trente ans et prouvent combien il est important d’agir durant ces 1 000 premiers jours. Ces moments sont uniques, je le répète, et ne se renouvelleront pas.
À mon sens, la société doit être soutenante, elle doit aider les parents lors des premiers jours de la vie de l’enfant. L’importance de ces moments doit être prise en compte dans les politiques publiques. Les adultes que nous sommes aujourd’hui sont les enfants que nous étions hier. Plus un enfant a été élevé et éduqué dans l’amour, plus il est accompli à l’âge adulte. Le sentiment d’attachement et de sécurité est très important.
Vous le voyez, je suis complètement convaincue par l’allongement de la durée du congé de paternité, qui constitue, selon moi, une priorité de l’action publique, car il répond à la demande des nouvelles générations de parents. Écoutez-les : ils ont vraiment envie de passer ces moments avec leur bébé et de les partager.
Notre collègue l’a dit, il faut partager l’arrivée d’un enfant et ses conséquences, une naissance n’ayant rien d’anodin. La présence des deux parents auprès de l’enfant à un stade précoce permet un développement des systèmes affectif, émotionnel, relationnel et psychobiologique dès le plus jeune âge. Dans le rapport Cyrulnik, on parle d’« accordage affectif » : je partage entièrement le choix de ces mots.
On refuse de nombreux rapports dans cet hémicycle. Il existe pourtant des rapports qu’il faut lire et conserver. Lisez et conservez le travail de Boris Cyrulnik et de ses experts ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et RDPI.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, sur l’article.
M. Philippe Mouiller. Mon intervention sera plus brève. Je poserai simplement une question très pragmatique. Je soutiendrai l’article 35, il n’y a pas de débat sur ce point, mais je m’interroge sur le calendrier. Certes, on peut s’interroger de la même façon sur toutes les mesures : interviennent-elles trop tôt ou trop tard ?
Si je comprends l’intérêt de l’avancée qui nous est proposée, est-il pertinent de l’inscrire dans ce PLFSS, en pleine épidémie de covid, alors que la situation est tendue pour nos entreprises ? Le calendrier est-il bien opportun ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. J’aurai l’occasion de m’exprimer plus longuement lorsque je donnerai l’avis du Gouvernement sur les amendements qui ont été déposés sur cet article, mais je tiens d’ores et déjà à évoquer deux ou trois éléments, même si Mme la rapporteure a dit beaucoup de choses, avec beaucoup de conviction et d’émotion, ce dont je la remercie, comme tous ceux d’entre vous qui ont pris la parole pour soutenir cette réforme.
Monsieur Gontard, nous n’allons pas bouder notre plaisir : il s’agit d’une réforme historique, dont nous devons nous réjouir, comme Mme Schalck. Merci, madame Schalck, de cette première intervention qui restera, je pense, dans votre mémoire.
Cette réforme est historique, car ce congé n’avait pas été modifié depuis 2002, soit dix-huit ans.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ce n’est pas la révolution non plus !
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Vous auriez pu la faire aussi, cette réforme !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Mais si, madame de La Gontrie, nous sommes selon moi sur le chemin d’une révolution culturelle, comme l’a dit Mme Meunier. Le caractère obligatoire de cette mesure, dont nous allons débattre et auquel certains d’entre vous sont opposés, contribue à faire de cette réforme une révolution culturelle.
Toutes les raisons justifiant l’allongement de ce congé de paternité ont été évoquées. Cette réforme se justifie avant toutes choses pour l’enfant lui-même, vous l’avez très bien dit, madame la rapporteure. Les neurosciences nous montrent qu’un tel congé est important pour la relation entre l’enfant et les parents, qu’il favorise le développement de l’enfant.
Cette mesure favorise aussi l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, elle permet un partage des tâches domestiques et familiales et encourage l’égalité entre les hommes et les femmes. Elle est l’une des recommandations phares du rapport de Boris Cyrulnik et fait partie d’un ensemble de dispositifs que nous mettons en place durant les 1 000 premiers jours de l’enfant. Ce PLFSS comporte plusieurs de ces mesures, en plus de l’allongement du congé de paternité, mais nous y reviendrons.
J’ajoute, mesdames, messieurs les sénateurs, parce que nous n’aurons peut-être pas l’occasion d’insister sur ce point, que l’article 35 comporte également une avancée pour les parents adoptants : le Gouvernement a fait voter à l’Assemblée nationale un amendement visant à porter de dix à seize semaines la durée du congé d’adoption. Il s’agit là d’une véritable avancée pour ces parents, qui s’inscrit dans le cadre de la réforme de modernisation de l’adoption que je porte au sein du Gouvernement.
Vous le savez, nous sommes en train de bâtir des parcours 1 000 jours pour l’ensemble des parents, y compris pour ceux qui connaissent des situations de fragilité liées, par exemple, à l’arrivée d’un enfant prématuré, en situation de handicap ou au fait d’être eux-mêmes en situation de handicap. À cet égard, je rappelle que le 17 novembre prochain sera la journée mondiale de la prématurité. Toutes ces situations de fragilité posant des problèmes spécifiques, nous créons des parcours des 1 000 jours adaptés.
L’extension du congé d’adoption de dix à seize semaines prévue dans cet article est une première pierre. Il s’agit d’une avancée pour ceux de nos concitoyens qui sont engagés dans un parcours d’adoption. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 312 rectifié bis, présenté par Mme Puissat, M. Cardoux, Mme Micouleau, MM. Bonne, Savary, Meurant, Sol et Calvet, Mme Thomas, M. Grosperrin, Mme Deromedi, M. Dallier, Mmes Lassarade, Malet, Estrosi Sassone et Noël, MM. Milon et Brisson, Mme Gruny et MM. Babary, Savin, D. Laurent, Sautarel et C. Vial, est ainsi libellé :
Alinéa 6, première phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Le délai de prévenance de l’employeur quant à la date prévisionnelle de l’accouchement et aux dates de prise du congé et à la durée du ou des congés, le délai dans lequel les jours de congé doivent être pris, les modalités de fractionnement de la période de vingt-et-un et vingt-huit jours ainsi que la nature du contrat de travail et les conditions d’ancienneté nécessaires pour pouvoir bénéficier dudit congé sont fixés par décret.
La parole est à Mme Frédérique Puissat.
Mme Frédérique Puissat. Cet amendement tend à prévoir que, pour bénéficier du congé de paternité dans sa nouvelle forme, le salarié doit remplir des conditions en termes d’ancienneté et de contrat de travail. Les modalités seront fixées par décret.
J’ai bien conscience, compte tenu de tout ce qui vient d’être dit, que défendre un tel amendement, c’est nager à contre-courant. Cela étant, notre rôle n’est pas d’aller tous dans le même sens, il est aussi de faire état de certaines réalités du terrain.
Comme Philippe Mouiller, je m’interroge sur la temporalité de cette mesure. Vous avez dit, monsieur le secrétaire d’État, que cet article était attendu de tous. J’ignore si c’est vraiment le cas, mais ce qui est certain, c’est que personne ne vient me voir dans ma permanence pour me dire : « Madame la sénatrice, il est impératif de doubler la durée du congé de paternité et d’imposer quatre jours de congé supplémentaires après la naissance d’un enfant. »
Tous ceux qui ont travaillé dans le secteur de la protection de l’enfance sont très sensibles au soutien à la parentalité, mais, aujourd’hui, l’inquiétude est grande de savoir si nos systèmes sociaux vont tenir.
Le fait marquant de ce PLFSS, je suis désolée de le dire, ce n’est pas cet article, ce sont les 50 milliards d’euros de déficit. Les Français se demandent aujourd’hui si leurs retraites pourront être payées et si nos systèmes sociaux vont tenir.
M. François Bonhomme. Exactement !
M. Xavier Iacovelli. Il faut arrêter de faire des enfants alors !
Mme Frédérique Puissat. Quant aux milieux économiques, ils se demandent si nos entreprises vont, elles aussi, pouvoir tenir. Certains chefs d’entreprise – vous les avez entendus comme moi – sont au bord du burn-out et se demandent comment ils pourront assurer l’économie de demain.
Cet article est certes le bienvenu, mais pas maintenant, car il va imposer de nouvelles contraintes aux entreprises. Or je ne suis pas certaine que les petites et moyennes entreprises, notamment, soient capables de les supporter. (Bravo ! sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 594 rectifié est présenté par M. J.B. Blanc, Mme Dumas, MM. Houpert et Decool, Mmes Lavarde, Loisier et Deromedi, MM. Cambon et Calvet, Mme Gruny, M. Brisson, Mme Thomas, MM. Bascher, Laménie, Wattebled et Boré, Mme Estrosi Sassone et MM. Cazabonne et Regnard.
L’amendement n° 618 rectifié quinquies est présenté par Mmes Deseyne, Lassarade et Borchio Fontimp, MM. Le Rudulier et Panunzi, Mmes Puissat et Belrhiti, MM. B. Fournier, Grosperrin, Cardoux, Segouin, Duplomb, Piednoir et Meurant, Mme Lopez, M. Bonhomme, Mme Chauvin, MM. Saury, Rapin, Mandelli et Savary, Mmes Di Folco et Garriaud-Maylam, MM. Daubresse et Pointereau, Mme Delmont-Koropoulis, M. Chevrollier, Mme Schalck, M. Babary et Mme Noël.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6
1° Première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
dans la limite d’un fractionnement en deux périodes de congés
2° Après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Le nombre de fractionnements peut être augmenté avec l’accord de l’employeur ou lorsqu’une convention ou accord collectif le prévoit expressément.
La parole est à Mme Pascale Gruny, pour présenter l’amendement n° 594 rectifié.
Mme Pascale Gruny. Cet amendement va dans le même sens que celui que vient de présenter notre collègue Frédérique Puissat.
Il est nécessaire, à mon sens, que le législateur encadre les modalités de fractionnement du congé de paternité et d’accueil de l’enfant. En effet, des absences courtes et répétées sont source de désorganisation au sein des entreprises.
Certaines entreprises pourraient être confrontées à des difficultés d’aménagement des plannings si le congé était séquencé en de multiples absences de courte durée. Il est donc préférable d’aménager le congé en un fractionnement en deux blocs de périodes distinctes, en laissant la possibilité aux entreprises qui le souhaitent de prévoir des règles spécifiques, le cas échéant par convention ou par accord collectif.
Cet amendement vise à faciliter et à sécuriser la mise en œuvre du congé de paternité et d’accueil de l’enfant par les employeurs et par les salariés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour présenter l’amendement n° 618 rectifié quinquies.
Mme Chantal Deseyne. Je ne reviens pas sur l’allongement de la durée du congé de paternité ni sur son intérêt. J’aurais pu tenir les mêmes propos que certains de mes collègues à ce sujet.
Par cet amendement, il s’agit simplement d’encadrer les modalités de mise en œuvre de ce congé.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. J’ai bien noté, chers collègues, que vous n’étiez pas contre l’allongement de la durée du congé de paternité et que vous souhaitez simplement l’assortir de conditions.
J’émets un avis défavorable sur l’amendement 312 rectifié bis, qui vise à prévoir par décret des conditions d’ancienneté ou de nature du contrat de travail pour bénéficier du congé de paternité.
Le bénéfice du congé de paternité est aujourd’hui ouvert à tous les salariés. Je ne trouve donc pas opportun de créer ce type de discrimination à l’occasion de son allongement. De telles conditions risqueraient en effet de toucher les salariés les plus précaires, qui, à mon sens, ont autant le droit de bénéficier du dispositif que les autres, le besoin de s’occuper du nouveau-né étant le même pour tous. Elles risqueraient en outre de créer des différences de traitement peu compréhensibles pour les salariés.
J’émets également un avis défavorable sur les amendements identiques nos 594 rectifié et 618 rectifié quinquies. Ces amendements tendent à limiter le fractionnement à deux périodes seulement, sauf accord de l’employeur ou accord collectif plus favorable.
Cette limitation me paraît restreindre la liberté du salarié de prendre les jours facultatifs de congé selon ses besoins de famille. Je ne suis pas certaine que des absences courtes soient plus déstabilisatrices pour l’entreprise que des absences longues. L’inverse peut aussi être vrai, cela dépend de la situation et des activités de l’entreprise.
Je vous rappelle, en outre, que les possibilités de fractionnement seront fixées par décret ; le Gouvernement définira ces modalités en concertation avec les partenaires sociaux.
J’entends bien l’attention que vous portez aux petites et moyennes entreprises, mais si l’on impose des conditions, on ne parviendra jamais à augmenter le taux de recours, qui stagne à 67 % depuis 2003.
Il faut prendre en compte le fait que, aujourd’hui, certains pères ne s’autorisent pas à demander à leur patron de bénéficier d’un congé de paternité, alors que sa durée n’est que de onze jours.
J’ai pour ma part été chef d’une toute petite entreprise. La question est de savoir où placer le curseur entre travail et paternité. Je pense que le travail est très important, car il faut subvenir aux besoins de sa famille, mais les moments que l’on passe avec ses enfants sont uniques. On ne peut pas rattraper les moments perdus, alors que le travail, on peut toujours le faire plus tard. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et GEST.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 312 rectifié bis et demande le retrait des amendements nos 594 rectifié et 618 rectifié quinquies, qui portent sur le fractionnement.
Madame Puissat, si je vous suis bien, vous considérez que les liens d’attachement et le développement de l’enfant doivent être conditionnés pour partie au statut professionnel du père, à la nature de son contrat de travail, au fait qu’il soit en contrat à durée déterminée ou indéterminée ? Du point de vue de l’enfant, cela n’a pas de sens !
Ainsi que Mme la rapporteure l’a indiqué, s’il était adopté, cet amendement créerait des situations de discrimination entre les salariés.
Dans les faits, aujourd’hui, le congé de paternité est pris par 67 % des pères : 80 % de ceux qui le prennent sont en CDI, ce taux chutant à 47 % pour les pères en CDD.
Pour instaurer un droit réel, une égalité entre tous les pères de ce pays, le congé doit être obligatoire. À cet égard, je reviendrai lors de l’examen d’un amendement suivant sur ces jeunes pères qui ne voudraient pas prendre leur congé dont a parlé la sénatrice Deseyne. Le caractère obligatoire est un instrument de lutte contre l’autocensure d’un certain nombre de pères aujourd’hui.
Vous dites que personne ne vient vous réclamer ce congé lors de vos permanences, madame Puissat. Pour ma part, j’ai rencontré depuis un an plus de mille parents, j’ai participé à des tables rondes, visité des services de néonatologie. Systématiquement, le congé de paternité et la question de la présence du père auprès de l’enfant et de la mère ont été évoqués alors même ce n’était pas le sujet.
À cet égard, permettez-moi de vous livrer une anecdote, en anticipation de nos discussions sur le caractère obligatoire de ce congé. J’ai visité à l’hôpital Antoine-Béclère de Clamart le service de néonatologie dirigé par la professeure Alexandra Benachi, gynécologue-obstétricienne, membre de la commission des 1 000 jours, dont je salue ici le travail. J’y ai rencontré le père d’un enfant né grand prématuré. Magasinier de profession, il m’a dit que lorsqu’il avait annoncé à son patron qu’il attendait un enfant, celui-ci lui avait répondu : « tu es gentil, mais ce n’est pas toi qui es enceinte ! », …
Mme Frédérique Puissat. En effet !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. … sous-entendu : « tu ne peux pas prendre ton congé ». Je ne généralise pas, mais je suis désolé de devoir vous dire que ce genre de situation existe aujourd’hui dans les entreprises.
Monsieur le sénateur Mouiller, vous m’avez interrogé sur la temporalité. Le fait est que ce n’est jamais le bon moment. Vous verrez pourtant que, dans quelques années, quand vous aurez voté, ainsi que vous nous l’avez indiqué, cette avancée sociale majeure – qui en appelle d’autres, madame de La Gontrie, monsieur Gontard –, on ne se dira pas qu’elle n’aura pas été votée au bon moment. Tous les Français nous seront redevables.
Moi aussi, avant d’être député et, tout récemment, secrétaire d’État, j’ai été chef d’une entreprise de vingt-cinq, de quarante, puis de cent cinquante salariés. Lorsque j’ai créé ma propre boîte, nous étions deux au fond d’un garage.
Je puis vous dire, madame la sénatrice, que ces sujets sont des questions d’organisation et d’anticipation. Quand une femme est enceinte et prend son congé de maternité, l’entreprise s’organise. Pourquoi un congé de paternité plus long de deux semaines désorganiserait-il toute l’entreprise ? C’est un faux argument, et c’est l’ancien chef d’entreprise qui vous le dit. Je le répète : il s’agit d’une question d’organisation et d’anticipation, tous ceux qui ont été chefs d’entreprise sur ces travées le savent.
Le coût de cette mesure, lequel a fait l’objet de réflexions et de débats avec les partenaires sociaux, ne repose pas sur les entreprises, vous le savez. À l’inverse, madame la sénatrice, il ne me semble pas que le doublement de la durée du congé de paternité mettra à bas le système de protection sociale et la sécurité sociale de notre pays.
Mme Frédérique Puissat. Ce n’est pas ce que j’ai dit !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Certes, mais vous sembliez établir une corrélation entre la situation financière et la mesure que nous proposons.
Tels sont les éléments que je souhaitais porter à votre connaissance.
J’en viens aux questions de fractionnement du congé. Comme l’a dit Mme la rapporteure, le principe est fixé dans la loi, certaines modalités seront fixées par décret.
À cet égard, nous avons discuté de ces sujets, y compris du principe même de l’extension du congé de paternité, avec les partenaires sociaux et les organisations syndicales. Avec la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion, Élisabeth Borne, nous avons rencontré les organisations syndicales et patronales, la première fois le 11 septembre, puis à plusieurs reprises depuis, au cours de quatre réunions.
Nous avons notamment discuté d’un certain nombre de sujets. Toutes les décisions ne sont pas encore arrêtées, certaines seront prises par voie réglementaire. Ainsi, le délai de prévenance de l’employeur ou le fractionnement de ce congé suscitent des avis très contradictoires.
Démultiplier le fractionnement permettra aux indépendants, par exemple, de recourir davantage à ce congé, alors qu’il est souvent difficile pour eux de le prendre, on le sait. Tel était d’ailleurs l’objet de l’amendement de M. Henno sur le congé prénatal. À l’inverse, trop fractionner peut poser des problèmes d’organisation pour une entreprise. Il faut trouver un équilibre, nous en discutons avec les partenaires sociaux.
La durée de la période pendant laquelle ce congé pourra être pris fait également l’objet de discussions. Aujourd’hui, le congé de paternité doit être pris dans les quatre mois suivant la naissance. Faut-il modifier ce délai et permettre un peu de souplesse ? Nous en discutons également avec les partenaires sociaux.
Je me suis engagé à présenter devant l’Assemblée nationale en nouvelle lecture les décisions qui auront été prises avec les partenaires sociaux, afin que les parlementaires puissent avoir une vision globale du dispositif, voter en conscience sur le principe, tout en ayant connaissance des modalités d’application. Je réitère ici cet engagement : je partagerai avec vous les décisions prises avec les partenaires sociaux sur ces questions de mise en œuvre concrètes et opérationnelles.
C’est la raison pour laquelle je demande le retrait des amendements nos 594 rectifié et 618 rectifié quinquies, ces sujets faisant l’objet de discussion avec les partenaires sociaux.
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote.
M. Xavier Iacovelli. Mes chers collègues, j’ai du mal à comprendre votre position sur le caractère obligatoire du congé de paternité. M. le secrétaire d’État ne l’a pas rappelé, mais ni le Mouvement des entreprises de France (Medef) ni la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) ne sont opposés à ce congé de paternité : ils y sont favorables ! Ne soyez donc pas plus royalistes que le roi !
Ce congé répond vraiment à une demande de la société. Il permet au père, ou au deuxième parent, de s’impliquer lors des premiers jours de l’enfant, comme cela est dit dans le rapport Cyrulnik, dont les auteurs préconisent même d’aller au-delà de vingt-huit jours de congé, dont sept obligatoires. Il s’agit donc d’une première avancée dont nous devons nous réjouir et que je soutiens complètement.
On pourrait aussi considérer que l’arrivée d’un enfant ralentissant une carrière professionnelle, autant que ce soient les femmes qui en subissent les conséquences !
La réalité, c’est que durant les trois jours qui sont actuellement obligatoires, le père a tout juste le temps de ramener son épouse à la maison, de déclarer la naissance à la mairie, éventuellement de déposer une demande à la crèche, s’il en a le temps et si ce n’est pas le week-end, avant de reprendre son travail.
Les jours suivants, c’est la femme qui s’occupera du reste des démarches administratives, qui déclarera l’enfant à la sécurité sociale, à la caisse d’allocations familiales. La femme est ensuite vouée à s’occuper au cours des dix-huit années suivantes de toutes les démarches administratives concernant l’enfant. Pendant dix-huit ans, on considérera qu’il est plus pratique que ce soit elle qui l’emmène chez le médecin ou chez le dentiste puisqu’il est sur sa carte Vitale.
Le congé de sept jours doit permettre d’instaurer une égalité dans le couple, entre l’homme et la femme, pour les dix-huit années suivantes.
Je soutiens donc cet article et je vous demande, en responsabilité, mes chers collègues, de retirer vos amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.
Mme Victoire Jasmin. J’ai l’impression d’être à une tout autre époque. Nous sommes pourtant en 2020 !
Trop souvent, j’entends dire des hommes qu’ils sont irresponsables ; trop souvent, j’entends dire que certains pères ne s’occupent jamais de leurs enfants.
Nous avons aujourd’hui l’occasion de proposer aux pères de mieux s’occuper de leurs enfants, et beaucoup d’entre eux attendent cela. De nombreux enfants atteignent l’âge de 2 ou 3 ans sans beaucoup voir leur père : celui-ci part travailler à cinq heures du matin, il rentre tard, il n’a pas de temps pour ses enfants. Nous pouvons aujourd’hui offrir à l’enfant des moments précieux, dont pourra également profiter la mère. De sa naissance à son entrée en maternelle à l’âge de 3 ans, un enfant demande beaucoup d’attention et a besoin de ses deux parents.
Quand j’entends des discours incroyables pour notre temps, je dis non ! En arrivant le matin, je croise beaucoup de pères avec des poussettes, qui s’occupent de leurs enfants. Certes, cette mesure aura peut-être un coût pour la sécurité sociale, mais les pères travaillent et cotisent.
Notre société est décadente à certains moments parce que beaucoup d’enfants n’ont pas la chance d’avoir à leurs côtés un père pour les éduquer. Les réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement voient des parents vraiment défaillants, parce qu’ils sont seuls. La plupart du temps, il s’agit de mères.
Aujourd’hui, nous avons l’occasion de changer les choses. Il faut qu’on prenne la mesure de la situation dans laquelle se trouve notre société et que l’on comprenne qu’il est nécessaire que les pères aient une vraie place auprès de leurs enfants et de leur femme.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Je tiens d’abord à rassurer M. le secrétaire d’État : je ne boude pas mon plaisir ! Ce congé constitue bien une belle et grande avancée, je n’ai aucune difficulté à le reconnaître. J’espère simplement qu’elle sera suivie d’autres progrès et que l’on ira beaucoup plus loin. C’est ce que j’ai voulu dire tout à l’heure. Nous avons encore du travail.
Ma collègue Frédérique Puissat, qui est comme moi de l’Isère, dit que personne n’est venu toquer à la porte de sa permanence pour lui demander un allongement de la durée du congé de paternité. Je n’ai pas les mêmes retours qu’elle. Je pense que ce congé répond à une réelle attente de la société, mais aussi des associations familiales que nous rencontrons tous. Il est nécessaire de répondre à cette aspiration de la société et de passer réellement à l’acte.
Une chose m’étonne dans ces amendements. On entend souvent parler de la famille sur les travées de la droite, mais l’intérêt de la famille s’arrête souvent là où commence celui de l’entreprise ! Je pense qu’il faut remettre l’intérêt de la famille et de l’enfant au centre. Tel est clairement l’objet de cet article.
Par ailleurs, le caractère obligatoire de la mesure me paraît indispensable. Ça aussi, c’est une réelle avancée. On a évoqué le taux de recours : six pères sur dix ne prennent pas leur congé parental !
J’ai moi aussi été chef d’une toute petite entreprise, de trois salariés. Je puis vous garantir que l’on arrive à s’organiser lors des congés maternité, et c’est heureux. Il n’y a pas de raison de ne pas y parvenir lors d’un congé paternité.
Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.
Mme Frédérique Puissat. Je ne veux pas être dans la caricature. En tant que sénateurs, nous pouvons avoir des discussions posées, dans le respect de chacun.
Je tiens à revenir sur les propos de M. Iacovelli. Cet amendement a été travaillé avec la CPME et avec les chefs des petites et moyennes entreprises. Vous dites, cher collègue, que ce congé ne pose pas de difficulté ; pour ma part, je n’en suis pas certaine !
En revanche, monsieur le secrétaire d’État, j’ai bien entendu vos propos et je les respecte. Il est d’ailleurs important que nous nous respections les uns et les autres. J’y insiste, car j’ai lu quelques tweets sur nos amendements et j’ai été très étonnée de la violence des messages caricaturaux d’un certain nombre de parlementaires – plutôt des députés, pas des sénateurs.
J’entends que vous allez reprendre contact avec les organisations syndicales, le MEDEF et la CPME, monsieur le secrétaire d’État. Je retire donc mon amendement, mais j’aimerais que vous abordiez cet aspect de la question avec eux, comme ne manquera pas à mon avis de le demander la CPME, avec qui j’ai travaillé sur cet amendement. Je le dis très honnêtement : la temporalité n’est pas bonne.
Mme la présidente. L’amendement n° 312 rectifié bis est retiré.
La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. Je remercierai, pour commencer, Élisabeth Doineau de ses propos extrêmement touchants et sincères. C’est avec beaucoup de plaisir, j’en suis sûre, que je lirai Boris Cyrulnik. Elle est parfaitement dans son rôle de rapporteure pour la branche famille, qui lui convient très bien.
Néanmoins, je ne voterai pas l’article 35. Je suis très ennuyée : on fait comme si la société n’était composée que de salariés. Or notre société est traversée de très graves fractures, particulièrement en ce moment. Actuellement, il y a deux catégories de gens : ceux qui ont la chance d’être salariés et ceux qui n’ont pas la chance de l’être. On va agrandir encore ce fossé. Nous connaissons tous autour de nous des professionnels du secteur libéral ou des agriculteurs. Seraient-ils de mauvais parents parce qu’ils n’ont pas la possibilité de prendre des journées de congé ?
Je ne peux pas voter cet article, mais je souhaitais m’en expliquer.
Mme la présidente. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour explication de vote.
Mme Jocelyne Guidez. Il ne faut pas faire de procès d’intentions. J’ai compris quel était le souci de Frédérique Puissat. Cependant, je voterai cet article.
J’ai une question à poser à M. le secrétaire d’État. J’ai été femme de militaire et ma fille est née alors que mon mari était en opérations extérieures au Kosovo. Il n’est revenu que trois mois après sa naissance. Dans une situation semblable, les militaires auront-ils droit à ce congé comme tous les pères, deux ou trois mois après la naissance ? La question ici porte non pas sur un fractionnement du congé, mais sur la possibilité de le prendre plusieurs mois après.
Je vous fais part de mon expérience. J’aurais été très heureuse que mon mari soit à mes côtés dans ce moment si précieux.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je voterai quant à moi l’article 35, qui me paraît extrêmement important, mais je ne voterai sûrement pas les amendements visant à réduire la portée de cette avancée sociale. Je souhaite néanmoins revenir sur deux ou trois points.
Ce congé est en effet une attente forte de la société. En revanche, je préférerais que l’on dise qu’il participera au développement harmonieux de l’enfant plutôt que de dire qu’il le conditionnera. Mon père était mineur de fond et je ne l’ai pas beaucoup vu. Pour autant, je n’ai pas eu le sentiment d’avoir un développement disharmonieux. Il faut donc faire attention à ce que l’on dit et à la façon dont on le dit.
Par ailleurs, il ne suffit pas d’affirmer qu’il s’agit d’une avancée sociale majeure, ce que je veux bien croire, et je suis prêt à en défendre l’idée, il faut aussi, dans le même temps, faire en sorte qu’elle puisse être pérenne. À cette fin, il importe d’assurer l’avenir de la sécurité sociale. Or, pour l’instant, je ne vois dans le présent PLFSS, je l’ai dit lors de la discussion générale, que des milliards de déficits pour les années 2020 et 2021 et aucune solution susceptible de garantir la pérennité de cette mesure. Ce point m’inquiète un peu.
Enfin, je suis complètement d’accord pour parler de l’intérêt des familles, comme mon collègue de l’Isère, mais alors pourquoi cautionner la baisse du quotient familial et la suppression de l’allocation jeune enfant ?
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. J’allais dire à peu près la même chose qu’Alain Milon, exception faite de la fin de son intervention.
Je remercie Frédérique Puissat d’avoir retiré son amendement. Il était certes important de signaler le point que vous avez soulevé afin qu’il soit discuté lors des négociations, comme le secrétaire d’État s’y est engagé, mais il était aussi important que les discussions ne freinent pas cette véritable avancée.
Personnellement, je me place – et c’est ma petite différence avec Alain Milon – du côté de la famille et de l’enfant. Je me réjouis donc de cette avancée.
À tous ceux qui s’inquiètent des difficultés qui pourraient apparaître, par exemple pour les indépendants ou les miliaires, je pose la question : faut-il ne pas avancer parce qu’il faudrait régler des difficultés pour d’autres ? Réjouissons-nous d’abord de ce pas en avant, et faisons en sorte ensuite d’en faire bénéficier tout le monde. C’est un très bel article. Je remercie donc vivement ceux qui ont retiré leurs amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Nous remercions tous Mme Puissat d’avoir retiré son amendement, ou en tout cas une grande partie de l’hémicycle. Elle s’étonnait de la violence des réactions qu’il avait suscitées, mais elles sont normales !
D’après les termes de son amendement, tout le monde n’aurait pas les mêmes droits dans les jours clés qui suivent la naissance d’un enfant, ces droits dépendant du niveau d’insertion économique du père. En situation de précarité, certains n’auraient pas les mêmes droits que les autres dans un moment aussi essentiel pour les parents et pour l’enfant ! Il est donc logique que cet amendement ait provoqué de telles réactions, dont vous semblez d’ailleurs avoir pris toute la mesure.
J’entends les remarques formulées sur les indépendants. Un des points essentiels de notre travail collectif sera d’aligner les droits sociaux des travailleurs indépendants, qui sont souvent des travailleurs précaires, sur les droits des salariés. Ce sera l’un de nos grands chantiers à l’avenir. Il va même falloir avancer vite, car beaucoup de travailleurs indépendants sont d’abord des travailleurs précaires.
Enfin, pour conclure, mais nous aurons tout le temps d’en rediscuter, si vous voulez rééquilibrer le budget de la sécurité sociale, nous pouvons vous faire plein de propositions de tranches supplémentaires : ne vous inquiétez pas, on peut y arriver !
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. J’indique à ma collègue Nadia Sollogoub que le congé de paternité est accessible aux indépendants, ainsi qu’aux salariés et aux non-salariés agricoles, à condition – c’est la seule différence – qu’ils se fassent remplacer. Certes, le statut n’est pas le même que celui d’un salarié, mais l’article s’applique bien à l’ensemble des travailleurs. Une ordonnance sera prise pour les agents publics. Sans doute faudra-t-il y inscrire les militaires, qui n’ont nulle raison d’être exclus du dispositif.
Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour explication de vote.
Mme Chantal Deseyne. Il était important d’ouvrir le débat. J’ai parfaitement entendu vos réponses, monsieur le secrétaire d’État. Si je puis me permettre, je vous invite à poursuivre vos négociations avec les organisations syndicales.
Rassurez-vous, je voterai l’article 35. Mon amendement, que je retire, ne portait que sur les modalités de mise en œuvre du congé de paternité.
Mme la présidente. L’amendement n° 618 rectifié quinquies est retiré.
Madame Gruny, l’amendement n° 594 rectifié est-il maintenu ?
Mme Pascale Gruny. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 594 rectifié est retiré.
L’amendement n° 1020, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
c) Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut prévoir un fractionnement du congé au-delà du quatorzième jour. » ;
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. L’extension du congé de paternité et d’accueil de l’enfant à vingt-huit jours est une mesure positive. Nous voterons cet article, même si nous regrettons que le Gouvernement n’ait pas retenu l’ensemble des propositions du rapport sur les 1 000 premiers jours, notamment celle de ne pas limiter à vingt-huit jours la durée du congé de paternité.
Avec cet amendement, nous proposons une amélioration supplémentaire : il vise à rendre une partie du congé fractionnable au-delà d’une première période de quatorze jours calendaires. Ce fractionnement serait cautionné à un accord d’entreprise.
Le fractionnement du congé de paternité et d’accueil de l’enfant permettrait ainsi d’offrir une plus grande souplesse d’organisation aux parents, tout en leur laissant la possibilité de s’impliquer plus activement à différents moments dans les semaines suivant la naissance.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez répondu à nos collègues députés que « l’idée du fractionnement est intéressante, mais fait actuellement l’objet de discussions avec les partenaires sociaux », ce que vous avez réaffirmé devant nous ce soir. Vous avez conclu ainsi vos propos devant l’Assemblée nationale : « d’ici à la nouvelle lecture du PLFSS, je reviendrai vers vous pour vous communiquer le résultat des négociations ». Nous souhaiterions a minima, à l’occasion de cet amendement, savoir où en sont ces négociations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. Cet amendement vise à prévoir la possibilité de fractionner le congé au-delà du quatorzième jour par accord d’entreprise ou de branche. Or l’article ne l’interdit pas, comme l’a d’ailleurs expliqué M. le secrétaire d’État. Les modalités de fractionnement seront fixées par décret, en concertation avec les partenaires sociaux.
Je cède maintenant la parole au Gouvernement pour répondre à votre question. Je précise au préalable que la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. J’espère que Mme Puissat n’a pas eu le sentiment que je lui manquais de respect. Je respecte évidemment la position de chacun, mais il m’arrive parfois d’être fougueux dans mes argumentations.
Monsieur Milon, vous avez totalement raison. Il s’agissait d’un écart de langage : le congé paternité ne conditionne pas le bon développement de l’enfant, il y participe. Il importe, pour toutes les mesures d’accompagnement à la parentalité que nous proposons dans le cadre des 1 000 premiers jours, qu’il s’agisse du congé de paternité ou d’autres mesures, de se tenir systématiquement sur une ligne de crête par rapport aux parents et de ne pas les culpabiliser.
Vous savez parfaitement, monsieur Milon, car vous êtes médecin, que tout ce qui s’abîme facilement dans le cerveau d’un enfant à cet âge se répare tout aussi facilement. Rien n’est définitif, tout ne se joue pas au cours des 1 000 premiers jours, fort heureusement ! Je vous remercie donc de m’avoir repris, car nous ne voulons pas que les parents aient ce sentiment-là.
Je vous rassure, madame Guidez, un certain nombre d’adaptations seront prévues, notamment pour les militaires. Il ne saurait être question de demander à un militaire qui part en opérations militaires extérieures de poser ses sept jours. Tout cela fera l’objet d’adaptations, comme c’est souvent le cas pour les militaires, du moins je l’espère, car je ne maîtrise pas totalement cet aspect.
Madame Apourceau-Poly, je répète ce que j’ai déjà dit : ces sujets sont en cours de discussion. C’est la raison pour laquelle je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement.
Où en sommes-nous ? Comme je l’ai indiqué, quatre rencontres au niveau technique et au niveau plus politique ont été organisées entre la ministre Élisabeth Borne, moi-même et les différents représentants syndicaux.
Sans m’avancer sur des décisions qui ne sont pas encore prises ni m’exprimer au nom d’autres personnes, je puis d’ores et déjà vous annoncer que nous sommes globalement d’accord sur le délai de prévenance. Idem pour le délai de prise de congé : il n’y a pas de demande particulière pour qu’il soit porté de quatre à six mois. Tous ces points, qui ne sont pas encore arbitrés, ne suscitent pas de crispations.
La vraie question, mais qui n’est pas non plus un sujet de tension, c’est celle du fractionnement, car il s’agit une fois de plus de répondre à différents objectifs. Se pose effectivement la question des indépendants. Le fait de pouvoir fractionner le congé ne résoudra pas toutes leurs difficultés, mais leur offrira du confort et de la souplesse. Ils pourront bénéficier de ce congé en plusieurs fois.
Nous avons aussi évoqué les problèmes d’organisation, car il ne faut pas, en effet, que la multiplicité des fractionnements désorganise l’entreprise.
Il sera obligatoire de prendre un congé de sept jours à la naissance de l’enfant, mais il pourra être intéressant pour le père de prendre le reste plus tard, par exemple au moment où la mère reprend son travail. On sait que cette période, qui correspond à l’entrée de l’enfant à la crèche, est un peu délicate. Il est important que le père puisse être présent dans ce moment d’adaptation.
Par ailleurs, un des gros sujets de réflexion sur la période des 1 000 jours, dont nous débattrons peut-être un jour, c’est la dépression post-partum, qui demeure aujourd’hui un tabou dans notre pays. Or elle touche 15 % à 20 % des femmes, probablement le double. On sait que les pics de dépression post-partum surviennent notamment à la cinquième puis à la douzième semaine.
Le congé paternité ne résoudra pas tout, car il s’agit d’un problème bien plus large – c’est tout l’objet de notre réflexion sur les 1 000 jours –, mais il peut constituer un élément de réponse.
C’est entre tous ces éléments-là que nous devons arbitrer. Nous reparlerons des discussions avec les partenaires sociaux lors de la nouvelle lecture du PLFSS.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. À la lumière de ces précisions et de celles de la commission, je retire mon amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 1020 est retiré.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 449 rectifié quinquies, présenté par Mme Deseyne, MM. Retailleau et Cambon, Mme Lassarade, MM. Boré, Le Rudulier et Panunzi, Mmes Puissat et Belrhiti, MM. B. Fournier et Grosperrin, Mmes Dumas et Deromedi, MM. Cardoux, Segouin et Duplomb, Mme Gruny, MM. Piednoir, Bascher et Meurant, Mmes Thomas et Lopez, MM. Bonhomme, Saury, Rapin et Mandelli, Mme Estrosi Sassone, M. Savary, Mmes Di Folco et Garriaud-Maylam, MM. Daubresse et Pointereau, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Regnard et Chevrollier, Mme Chauvin et M. Babary, est ainsi libellé :
Alinéas 9 à 12
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Mme Chantal Deseyne. Cet amendement vise à prévoir un assouplissement dans l’application du dispositif, nullement à remettre en cause l’allongement de la durée du congé de paternité. Notre objectif est que l’on respecte la liberté de choix des pères.
Je suis d’accord avec vous tous : l’enfant a besoin de ses deux parents, et ce dès les premiers jours de sa vie. Néanmoins, je pense que lever le caractère obligatoire de cette mesure ne réduira pas sa portée, bien au contraire. Si les pères peuvent choisir librement de prendre ce congé, ils le feront au moment le plus opportun pour eux, pour leur enfant et pour la mère de leur enfant.
De la même façon que l’on respecte la liberté des femmes dans leur choix d’accouchement – je fais référence à l’article 30 dont nous avons débattu –, je souhaite que l’on puisse donner aux pères le choix de prendre ce congé au moment où ils le souhaitent, dans la limite des quatre mois.
Quelques questions restent en suspens. Vous les avez abordées, monsieur le secrétaire d’État, comme certains de mes collègues. Quid des saisonniers, des artisans, des intermittents du spectacle, des militaires, par exemple, dont l’enfant naîtrait en pleine période d’activité professionnelle ?
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cela vaut tout autant pour les femmes !
Mme Chantal Deseyne. Des réponses restent encore à apporter les concernant.
Cet amendement vise donc à assouplir le dispositif en levant le caractère obligatoire du congé paternité, sans pour autant remettre en cause son allongement.
Mme la présidente. L’amendement n° 602 rectifié, présenté par M. J.B. Blanc, Mme Dumas, MM. Houpert et Decool, Mmes Lavarde, Loisier et Deromedi, MM. Cambon et Calvet, Mme Gruny, M. Brisson, Mme Thomas, MM. Bascher, Laménie et Boré, Mme Estrosi Sassone et MM. Cazabonne et Regnard, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Après le mot :
familiaux
insérer les mots :
prévu à l’article L. 3142-1, à l’exception des 3° et 3° bis de ce même article,
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Mme Pascale Gruny. Le PLFSS introduit une interdiction d’emploi du salarié à la suite de la naissance ou de l’adoption d’un enfant. Il prévoit, en outre, que cette interdiction d’emploi ne débute, le cas échéant, qu’à compter de l’issue de la période de congés payés ou de congé pour événements familiaux.
Or le congé de naissance et le congé pour l’arrivée d’un enfant placé en vue de son adoption font eux-mêmes partie des congés pour événements familiaux. Une lecture littérale de ce texte pourrait donc décaler l’interdiction d’emploi à l’issue du congé de naissance ou du congé pour l’arrivée d’un enfant placé en vue de son adoption, ce qui est contraire à l’esprit du texte.
L’évocation imprécise de l’ensemble des congés pour événements familiaux dans cet alinéa place les salariés bénéficiaires et leurs employeurs dans une insécurité juridique quant à l’application de l’interdiction d’emploi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. L’amendement n° 449 rectifié quinquies vise à supprimer le caractère obligatoire du congé de naissance et des quatre premiers jours du congé de paternité.
Je sais que ce sujet fait débat, nous avons eu cette discussion en commission : on peut tout à fait plaider pour laisser la totale liberté de choix au père de prendre ou non son congé, comme vous l’avez souligné. Sauf que certains salariés aimeraient le prendre, mais n’osent pas le demander, compte tenu de la situation de l’entreprise, comme je l’ai expliqué. Le taux de recours à ce congé est de 67 %, mais quand on interroge ceux qui ne prennent pas leur congé de paternité, on s’aperçoit que jusqu’à 25 % d’entre eux ne le demandent pas par peur d’affronter leur patron. Il faut en tenir compte.
Rendre obligatoire une petite partie des jours – soit sept jours sur vingt-huit – me paraît donc utile afin que le recours à ce congé puisse être effectif, dans l’intérêt du jeune enfant. C’est d’ailleurs un désir exprimé par la plupart des jeunes parents aujourd’hui.
De surcroît, je ne pense pas que ce congé déstabilisera outre mesure les entreprises, qui doivent déjà gérer de nombreux autres congés, dont certains sont beaucoup plus longs. Je rappelle que 67 % des pères prennent déjà le congé de paternité. Comme l’a souligné M. le secrétaire d’État, c’est une question d’organisation. Le salarié doit prévenir le chef d’entreprise au moins un mois à l’avance. Pourquoi imposerait-on plus d’obligations au père qu’à la mère qui demande son congé de maternité ? C’est ce qui me choque le plus ici. Je suis donc défavorable à l’amendement n° 449 rectifié quinquies.
L’amendement n° 602 rectifié vise à préciser les conditions d’interdiction d’emploi. L’article 35 prévoit que l’interdiction d’emploi du salarié pendant le congé peut débuter après la prise d’un congé payé ou pour événement familial si le salarié se trouve dans cette situation au moment où intervient la naissance.
L’amendement vise à exclure de ces situations le congé de naissance et les trois jours de congé d’adoption. Or je précise que le congé d’adoption n’est pas concerné par le caractère obligatoire prévu dans le présent article. En outre, un salarié en congé d’adoption peut très bien être éligible à un congé de naissance au même moment – au titre d’un autre enfant, par exemple. Il ne me semble donc pas souhaitable d’exclure ces congés des situations permettant de différer l’interdiction d’emploi au titre du congé de naissance, car cela risque d’être trop restrictif. J’émets donc également un avis défavorable sur l’amendement n° 602 rectifié.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je suis défavorable, sensiblement pour les mêmes raisons que celles que vient d’exposer Mme la rapporteure, à l’amendement n° 602 rectifié.
Si nous insistons sur le caractère obligatoire du congé, je l’ai évoqué, c’est parce qu’il existe des phénomènes d’autocensure. La réalité est que, en fonction de votre situation professionnelle, vous ne prenez pas le congé de paternité de la même façon.
J’ai discuté avec nos homologues du Québec et du nord de l’Europe. Le Québec, la Suède, la Finlande ont une approche globalisée de tous les congés parentaux. C’est d’ailleurs intéressant, il faudra que l’on examine tout cela de plus près. Quand on discute avec eux du congé paternité, tous disent que c’est son caractère obligatoire qui a changé la donne : grâce à cela, les hommes l’ont pris davantage et le genre n’est plus devenu un biais dans les entreprises.
J’ai pris un petit-déjeuner un matin avec des papas suédois : ils m’ont dit que, en Suède, lorsqu’un chef d’entreprise reçoit deux CV, celui d’un homme et celui d’une femme, il n’y a plus de biais, car il sait que tous deux prendront leurs congés, quoi qu’il arrive. C’est ça l’égalité, c’est ainsi qu’on y arrivera !
Très sincèrement, j’espère que le monde de demain se rapprochera du monde idéal et que la question du caractère obligatoire de ce congé ne se posera même plus parce que les pères le prendront : ce sera devenu la norme.
Néanmoins, je pense que, aujourd’hui, le rôle de la loi – celle sur la parité a été évoquée tout à l’heure – est aussi d’accompagner la société dans ses évolutions. C’est également votre rôle en tant que législateur. Dans quelques années, les entreprises auront compris que la politique familiale d’une entreprise est un facteur d’attractivité pour les salariés. D’ailleurs, un certain nombre d’entreprises savent déjà que mettre en place des mesures pour la famille permettant de mieux articuler vie professionnelle et vie personnelle est une façon d’attirer les meilleurs éléments.
Vous parlez de liberté, madame la sénatrice, et j’aurais dû commencer par là parce que c’était le début de votre argumentation. Selon vous, les jeunes pères devraient avoir la liberté de choisir. Je respecte totalement cette approche, mais qu’en pense la mère ? Qu’en pense l’enfant ?
Détrompez-vous, les jeunes pères auxquels vous vous référez – je ne veux pas non plus en faire un phénomène générationnel – appellent très majoritairement de leurs vœux – plus de neuf jeunes pères sur dix – cet allongement de la durée du congé de paternité. Selon une étude de la Fondation des femmes, sept hommes sur dix âgés de moins de 35 ans sont favorables à un congé obligatoire de six semaines. La grande majorité des Français, soit huit sur dix, sont également pour l’allongement de la durée du congé de paternité. Par ailleurs, environ 55 % des Français considèrent que le caractère obligatoire de la mesure est une bonne chose. Ce taux atteint même 65 % dans les catégories populaires.
Le caractère obligatoire de la mesure me paraît donc nécessaire. Voilà pourquoi j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 449 rectifié quinquies.
Mme la présidente. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour explication de vote.
Mme Micheline Jacques. Je suis tout à fait ouverte aux discussions, mais je soutiendrai l’amendement n° 449 rectifié quinquies, et ce pour une raison bien simple : j’ai eu à connaître dans mon entourage professionnel proche de jeunes couples de moins de 30 ans ayant eu des bébés.
Il est arrivé à un couple, au moment où la maman devait reprendre son travail à l’issue de son congé maternité, de ne pas avoir de solution de garde, la nounou n’étant pas disponible. Le papa a alors décidé de prendre son congé de paternité pour s’occuper du bébé. Les parents étaient ravis. Le papa était magnifique à voir : il se sentait pleinement investi, car il s’occupait du bébé toute la journée. C’est dans de tels moments que se construit le lien dont on parlait.
Souvent, le papa a l’impression que s’il doit être présent les sept premiers jours avec la maman, c’est parce qu’il ne serait pas capable de s’occuper seul de son bébé. Il est donc très positif qu’il puisse s’en occuper seul et passer des moments privilégiés avec lui. C’est également positif pour les jeunes couples.
J’ai vu de jeunes papas s’épanouir en gardant leur bébé pendant les onze jours de congé auxquels ils avaient droit. Leur imposer un congé les sept premiers jours ne me convient donc pas.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Richer, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Richer. Je ne voterai pas ces deux amendements, même si je comprends les arguments de mes collègues. Le caractère obligatoire du congé de paternité permettra – cela a été dit à plusieurs reprises – d’ouvrir la porte à des pères qui ne feraient pas cette démarche sans cela. Je salue aussi l’avancée que constitue le texte en matière d’adoption. Je voterai donc l’article.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Je ne voterai évidemment pas ces amendements, mais je cède à la tentation de contrarier un peu M. le secrétaire d’État !
Quand on fait des comparaisons avec d’autres pays, il faut les faire à tous les niveaux. Je ne conteste pas le fait que les populations d’Europe du Nord aient accepté de manière satisfaisante les mesures qui ont été mises en place dans leurs pays et que cela pourrait nous servir d’exemple en France.
Toutefois, il faudrait aussi considérer le taux de natalité de ces pays : il est à 1,57 pour mille en Allemagne ; à 1,73 au Danemark ; à 1,41 en Finlande ; il atteint heureusement 1,91 pour mille en Suède ; et il est à 2,01, en France, où le congé de paternité n’existe pas, jusqu’à présent.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Madame la sénatrice Jacques, j’ai bien entendu ce que vous nous avez dit sur le cas concret que vous avez pris comme exemple.
Le dispositif que nous envisageons, à ce stade, rend justement cette situation possible. Les sept premiers jours du congé seront obligatoires au moment de la naissance, moment essentiel qui constitue en outre un fait générateur, du point de vue juridique. Ensuite, modulo les possibilités de fractionnement qu’il faudra peut-être ouvrir encore davantage, les vingt et un jours de congé qui restent pourront être pris plus tard, notamment – comme je le disais –, au moment où la mère reprend son travail et où l’enfant entre éventuellement dans une structure collective.
Enfin, monsieur Milon, j’ai simplement dit qu’il était intéressant de faire des comparaisons avec d’autres pays – et je sais que vous le pensez aussi – et non pas évidemment qu’il fallait dupliquer systématiquement les choses. J’espère ne pas devoir déduire de vos propos qu’il y aurait une corrélation absolue et parfaite entre l’existence d’un congé paternité, sa durée et le taux de natalité.
Pour en revenir au quotient familial et aux allocations que vous mentionniez, vous savez probablement que ces avantages fiscaux sont de moins en moins corrélés au taux de natalité, dont l’évolution dépend surtout de l’environnement global dans lequel l’enfant est accueilli. La durée du congé de paternité en fait partie.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. J’ai cosigné l’amendement présenté par Chantal Deseyne, et je voudrais la remercier d’avoir introduit ce débat important, qui permettra de lever un certain nombre d’incertitudes.
Monsieur le secrétaire d’État, je dois dire que votre approche du sujet est relativement convaincante, mais celle de Chantal Deseyne ne l’est pas moins, qui prévoit un stade facultatif pour le congé paternité, de façon à lever les difficultés, notamment celles qui sont liées à la nécessité d’offrir un dispositif égal pour tous. Que le père soit en CDI ou en CDD, comme vous l’avez dit, qu’il soit militaire ou qu’il exerce une profession indépendante, il doit pouvoir prendre son congé, selon l’organisation de son travail et de sa famille.
La politique familiale est un sujet complexe et l’on ne peut pas lui redonner une place au sein de la société sans tenir compte des divergences d’approche.
Si l’on doit retenir du quinquennat l’inscription dans la loi de ces quelques jours supplémentaires de congé de paternité, sans aucune autre mesure pour construire une politique familiale qui rende les Français plus heureux, je ne pense pas que l’avancée sera aussi considérable que vous la présentez.
Attention, donc, à ne pas décevoir nos concitoyens, en leur présentant cette disposition comme une avancée majeure qui changera la société ! La politique familiale en sortira-t-elle changée ? Vous l’améliorerez, sans doute, sans vraiment la transformer.
Est-ce que les dispositions sur la cinquième branche changeront la vie des personnes âgées, pour peu qu’elles soient accompagnées des financements et des mesures territoriales nécessaires à leur mise en œuvre ? Je n’en suis pas entièrement convaincu, car il faudrait d’abord que le Gouvernement s’attache à faire en sorte que le dispositif corresponde aux préoccupations des gens.
Donc, les deux approches se défendent. Je suis plutôt favorable à un dispositif facultatif, dans un premier temps, puis éventuellement obligatoire, si l’on constate que les pères ne prennent pas suffisamment leur congé. Vous préférez le rendre obligatoire d’emblée, pour les inciter à prendre davantage ce congé. Les deux thèses se tiennent et je me rallierai à celle qui l’emportera.
La volonté partagée qui doit nous réunir, c’est de faire en sorte qu’il existe un congé paternité. En effet, le rôle du père est important et il faut l’étendre. C’est la raison pour laquelle, quel que soit le destin de cet amendement, nous voterons largement l’article 35.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 449 rectifié quinquies.
J’ai été saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, et, l’autre, du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 21 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 333 |
Pour l’adoption | 130 |
Contre | 203 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 602 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 896 rectifié, présenté par Mmes M. Carrère et Pantel et MM. Artano, Bilhac, Cabanel, Corbisez, Fialaire, Gold, Guérini, Guiol, Requier et Roux, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif à l’accès de toutes les familles au congé de paternité et d’accueil de l’enfant et au coût que représenterait l’égal accès des couples d’hommes à ces droits.
La parole est à M. Stéphane Artano.
M. Stéphane Artano. Dans d’autres circonstances, j’aurais presque été gêné de présenter un amendement qui demande encore un rapport : je connais, en effet, la doctrine à ce sujet. Néanmoins, celui-ci vaut la peine qu’on s’y attarde.
L’article L. 1225-35 du code du travail ouvre le droit au congé de paternité et d’accueil de l’enfant au compagnon ou au partenaire de la mère, qui n’est pas le père biologique de l’enfant, dans le cadre d’un couple hétérosexuel, ainsi qu’à la compagne ou épouse de la mère, dans le cadre d’un couple homosexuel.
Le fait de réserver l’attribution du deuxième congé de paternité et d’accueil de l’enfant uniquement à la femme et à l’homme liés à la mère exclut donc directement de cet avantage l’homme qui vivrait maritalement avec le père, qui serait pacsé avec lui, ou qui serait son époux. Cela constitue, de notre point de vue, une discrimination directe fondée sur le sexe et l’orientation sexuelle, qui heurte les valeurs humanistes que porte le groupe du RDSE.
Nous avions donc déposé un amendement qui tendait à modifier directement l’article L. 1225-35 du code du travail et à étendre le bénéfice du congé de paternité aux couples de même sexe masculin. Il a malheureusement été déclaré irrecevable. Cette modification aurait pourtant évité à la France le risque de se faire condamner par la Cour européenne des droits de l’homme.
C’est pourquoi Maryse Carrère présente cet amendement de repli, qui vise à demander un rapport sur le caractère discriminatoire des dispositions de l’article L. 1225-35 du code du travail pour les couples d’hommes, et sur le coût que représenterait pour les finances publiques la mise en conformité de cette disposition avec, d’une part, les prescriptions de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et avec, d’autre part, la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. La Défenseure des droits nous a effectivement alertés au sujet de cette discrimination. Cependant, l’amendement que Maryse Carrère et d’autres ont déposé est irrecevable.
De plus, vous savez que toute demande de rapport est malvenue, puisque la commission en a déjà refusé beaucoup, qui avaient sans doute autant d’intérêt que celui que vous proposez.
Par conséquent la commission émettra un avis défavorable sur votre amendement.
Pour autant, je partage votre préoccupation, tout en précisant que des dispositions différentes sont prévues pour les couples homosexuels qui adoptent.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
En effet, le projet de loi ne prévoit pas de modifier les conditions actuelles du bénéfice du congé de paternité et d’accueil de l’enfant. Ce congé peut être attribué aux parents qui justifient d’une pièce d’état civil attestant la filiation de l’enfant, ou bien le lien avec la mère, si le parent n’est pas le père de l’enfant.
De plus, les dispositions relatives au congé de paternité et d’accueil de l’enfant – il faut rappeler le nom complet du dispositif – ne visent pas à redéfinir les règles de filiation.
Enfin, la rapporteure a précisé à juste titre que dans le cas d’une adoption par des couples de même sexe, ce sont les règles du congé d’adoption qui s’appliquent. Si ce congé est partagé, il sera augmenté de la durée du congé de paternité. Le cas de figure que vous mentionnez est donc déjà pris en considération, un régime adapté est prévu.
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote.
M. Xavier Iacovelli. J’avais déposé un amendement similaire qui a également été déclaré irrecevable. Il visait à remplacer le terme de « paternité » par celui de « parentalité » pour adapter le texte à la réalité diverse des familles. En effet, qu’on l’accepte ou pas, les familles sont diverses, et elles doivent toutes bénéficier des mêmes droits. Par conséquent, il est important que les dispositions de cet article s’appliquent aussi au deuxième parent, au même titre que pour les autres pères de famille.
Même si j’ai peu d’espoir que cette demande de rapport aboutisse, je soutiendrai à titre personnel l’amendement de Mme Carrère, car la reconnaissance de l’ensemble des familles est un enjeu fort de ce débat. Le fait que nous ayons un secrétaire d’État chargé de l’enfance et « des familles » a d’ailleurs toute son importance.
Mme la présidente. L’amendement n° 936, présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’intérêt d’étendre la durée obligatoire du congé de paternité et d’accueil de l’enfant à au moins la moitié de ce congé, ainsi que sur l’intérêt de rendre la durée totale des congés de naissance et de paternité et d’accueil de l’enfant égale à neuf semaines, notamment au regard des considérations de santé publique pour les mères, d’égalité entre les femmes et les hommes dans l’emploi et dans les foyers et d’intérêt pour l’enfant et son éducation.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Fidèles à la conviction que nous devons faire, dans ce pays, un grand pas en avant en matière de congé de paternité, nous saluons les premiers pas, non pas de l’enfant, mais ceux effectués dans l’article 35.
Cet amendement tend lui aussi à prévoir la remise d’un rapport, que la longueur du débat suffirait à justifier. Ce rapport étudiera la possibilité d’étendre la durée obligatoire du congé de parenté, pour protéger celui qui en bénéficie de toute pression ou mise en concurrence destinée à favoriser son retour précoce au travail.
Il portera également sur la possibilité d’étendre la durée totale du congé de naissance et du congé de paternité à neuf semaines, de manière à la rapprocher de celle du congé maternité post-natal, en conformité avec les recommandations du rapport sur les 1 000 premiers jours de l’enfant, que vous avez cité.
L’étude que nous demandons pourrait notamment évaluer l’impact que ces deux pistes auront sur le taux de non-recours au congé paternité.
En effet, l’extension du congé paternité et sa durée obligatoire constituent des arguments forts pour l’égalité entre les femmes et les hommes.
Un grand écart entre la durée obligatoire du congé maternité, à savoir huit semaines, dont six après l’accouchement, et celui du congé paternité, soit sept jours après la naissance de l’enfant, maintiendrait indirectement un message genré. Il reviendrait in fine aux mères d’assumer le premier accueil de l’enfant, car l’autre parent bénéficierait du caractère facultatif de l’obligation.
Or une telle répartition entraîne des conséquences lourdes, telles que l’épuisement maternel, la dépression post-partum, la discrimination professionnelle, ou encore l’inégalité d’accès au travail. Voilà pourquoi il est nécessaire de travailler le sujet, en adoptant les deux angles que nous proposons.
Par ailleurs, nous avions nous aussi déposé un amendement qui a été jugé irrecevable. Nous souhaitions qu’il soit inclusif, pour tenir compte de l’ensemble des compositions familiales. Il prévoyait donc un congé de « parenté » plutôt que de « paternité ». Il faudra régler, un jour, cette question de sémantique inclusive.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure. Vous connaissez le sort que nous réservons aux demandes de rapport. La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Cependant, je me tourne vers M. le secrétaire d’État pour lui demander de travailler très sérieusement sur le congé parental, qui n’est pas du tout utilisé, sans doute parce que la rémunération des parents qui le prendraient n’est pas suffisante pour assurer le confort de la famille.
Par ailleurs, l’allongement de la durée du congé de paternité n’était que l’une des recommandations du rapport de Boris Cyrulnik. J’espère donc que nous n’en resterons pas là. Il faudrait en effet lancer un travail avec les départements sur la nouvelle dynamique à donner aux centres de protection maternelle et infantile (PMI). Les PMI ont déjà beaucoup travaillé sur la parentalité et l’accueil du jeune enfant, mais elles ont besoin d’un nouveau souffle. Certains les enterrent un peu vite, alors que ces centres ont toute leur utilité sur le terrain.
L’accueil du jeune enfant est un autre domaine dans lequel il faut œuvrer, car les différentes conventions d’objectifs et de gestion n’ont jamais été atteintes en nombre.
Il serait donc dommage de réduire le rapport de Boris Cyrulnik à une seule de ses recommandations.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Madame la rapporteure, je vous promets que nous allons travailler sur tous ces sujets, mais nous le faisons déjà un peu. (Sourires.)
En effet, un certain nombre des dispositions qui figurent dans ce texte sont la mise en œuvre des recommandations du rapport Cyrulnik. Je pourrais vous en parler plus longuement, mais ces mesures ne sont pas toutes formellement inscrites dans les lignes du texte que vous votez.
Grâce à ce PLFSS, nous mettons en place un « parcours 1 000 jours », qui s’articule autour de trois moments.
Le premier est l’entretien prénatal précoce, dont vous aviez voté le caractère obligatoire, mais qui n’est pris que par 28 % des femmes aujourd’hui. Or ce texte prévoit une enveloppe de trois millions d’euros pour les réseaux de santé périnatale, pour faire connaître l’entretien prénatal précoce aux femmes.
Le deuxième moment, il est important, est celui de la maternité. Nous allons créer immédiatement cent postes pour renforcer les staffs médicaux psychosociaux d’une centaine de maternités prioritaires, afin de mieux accompagner les femmes et de mieux articuler la coopération entre la maternité et les PMI.
Vous savez, par ailleurs, que dans le cadre de la stratégie de prévention et de protection de l’enfance, je suis un grand promoteur des PMI. J’en veux pour preuve que grâce à la contractualisation que nous mettons en place avec les départements, l’État prévoit d’investir 100 millions d’euros dans les PMI, entre 2019 et 2022, soit l’équivalent des aides qu’elles ont perdues au cours des dix dernières années. Je vous renvoie au rapport de Michèle Peyron sur ce sujet.
Le troisième moment, c’est la dépression post-partum. Grâce à ce PLFSS, nous développons les visites à domicile post-partum, différentes du programme Prado. Nous créons aussi une dizaine d’unités mère-enfant et une vingtaine d’équipes mobiles pour prendre davantage en compte la psychiatrie périnatale et mieux accompagner les parents qui souffrent de problèmes psychiques, voire psychiatriques, le tout pour un coût de plusieurs dizaines de millions d’euros. Telles sont les mesures que vous votez, même si elles restent parfois cachées dans l’épaisseur du trait de ce budget important.
Le rapport Cyrulnik mentionne le congé parental, en effet. L’extension du congé de paternité n’est qu’une première étape, et je suis convaincu, comme vous, que nous devrons mener une réflexion, dans un second temps, sur la refonte totale des projets familiaux, et notamment sur le congé parental. Vous l’avez très bien dit, les femmes ne le prennent que très peu, et quand elles le font, c’est de façon subie, au terme d’un arbitrage économique. Ce congé est très mal rémunéré et il est probablement trop long. Beaucoup de rapports le disent, dont celui de l’IGAS, en 2018, dans lequel figure une analyse assez clinique et juste de la situation.
Mes camarades socialistes le savent (Exclamations amusées sur les travées du groupe SER) – camarades, ou anciens camarades, je ne sais plus ! (Sourires.) –, la réforme du congé parental qui a été introduite sous le quinquennat précédent ne fonctionne pas. Seuls 16 000 hommes prennent aujourd’hui un congé parental.
Le Gouvernement émettra donc un avis défavorable sur l’amendement.
Cependant, j’ai déjà annoncé à l’Assemblée nationale que nous engagerions deux experts, issus notamment du monde de l’entreprise, pour engager une réflexion de long terme, qui s’inspirera de l’expérience plus ancienne des pays d’Europe du nord et qui intégrera la question des modes d’accueil. En effet, vous avez raison, la réforme du congé parental ne peut pas être pensée sans celle des modes d’accueil, les deux étant intimement liées. Nous aurons l’occasion d’en reparler au cours des mois à venir.
Quoi qu’il en soit, madame la rapporteure, je peux vous assurer que nous avons déjà engagé ce travail.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote sur l’article.
M. Philippe Mouiller. J’interviens au nom du groupe Les Républicains.
Monsieur le secrétaire d’État, depuis le début de l’examen de ce PLFSS, beaucoup de grandes réformes ont été annoncées. Nous les comprenons, mais nous avons le sentiment que leur élaboration n’est pas toujours complètement aboutie. C’est notamment le cas de cet article 35, nombre de points restant en suspens.
Plusieurs questions se posent sur la mise en œuvre de cette réforme, notamment pour les indépendants, les familles et les petites entreprises. Il n’y a pas que les grands groupes qui mènent des politiques familiales internes, c’est aussi le cas de PME ou d’artisans. Toutes ces questions restent donc en suspens.
Le groupe Les Républicains aurait souhaité amender cet article 35, notamment sur le caractère obligatoire du congé et la possibilité le fractionner. Nous n’avons pas été entendus – peut-être n’avions-nous pas les bons arguments –, mais, quoi qu’il en soit, notre groupe votera cet article 35.
Au-delà de ce vote, nous regrettons qu’une politique familiale plus globale, de plus grande dimension, ne puisse être portée par ce PLFSS. L’un des sujets importants pour nous est le quotient familial ; en effet – le sénateur Milon l’a dit –, cet article représente certes une avancée pour notre société, mais je crains qu’il ne suffise pas pour relancer la natalité en France, cet enjeu étant fondamental pour notre société.
Mme la présidente. La parole est à la présidente de la commission des affaires sociales.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Je me félicite de la qualité de nos débats ce soir sur cet article, à l’opposé de ce qui s’est passé en commission, où nous avons été passablement maltraités, méprisés. On nous a dit que nous étions irresponsables au motif que cet article constituait l’une des plus grandes avancées depuis l’instauration du droit de vote des femmes.
Je veux donc vous remercier de la qualité de vos réponses, monsieur le secrétaire d’État, et remercier les collègues qui ont déposé des amendements sur des points restant à préciser : les difficultés des petites entreprises et des indépendants, de même que le caractère obligatoire du congé de sept jours. Cette forme d’intrusion dans la vie des familles peut parfois choquer ; notre société devient de plus en plus intrusive, on le voit bien en ce moment.
J’ai fait part en discussion générale de mes inquiétudes. Nous avons envie de faire beaucoup de choses, or nous sommes dans une situation économique et sociale dramatique et nous allons au-devant d’énormes difficultés financières. Je pense qu’il y a des priorités et je ne sais pas si c’était le bon moment de décider d’une telle mesure. Je voterai néanmoins cet article 35.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote sur l’article.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ne boudons pas notre plaisir ; cet article 35 est effectivement très important, il représente une avancée considérable dans la vie des familles, des enfants et des femmes. Le Sénat doit être conscient que, si cet article est adopté, il sera adopté conforme, aucun amendement n’ayant été adopté, il sera donc définitif. Nous apprécions la capacité du Sénat à jouer un rôle très actif pour le progrès de chacun.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 35.
J’ai été saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, et, l’autre, du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 22 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 341 |
Contre | 2 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Je serai très bref.
Je veux à mon tour vous remercier, mesdames, messieurs les sénateurs, de nos échanges de ce soir ; ils étaient effectivement d’une très grande qualité.
Cet allongement de la durée du congé de paternité correspondait à un engagement fort du Président de la République et je suis fier et heureux d’avoir pu le porter à son terme et de passer ces moments avec vous.
À demain pour la suite de la discussion de ce PLFSS ! (Applaudissements sur diverses travées.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vais lever la séance. Nous avons examiné 230 amendements aujourd’hui ; il en reste 177.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
8
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, samedi 14 novembre 2020 :
À dix heures, quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2021 (texte n° 101, 2020-2021).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le samedi 14 novembre 2020, à une heure.)
nomination de membres d’une commission mixte paritaire
La liste des candidats désignés par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication pour faire partie de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au retour de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal a été publiée conformément à l’article 8 quater du règlement.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire sont :
Titulaires : M. Laurent Lafon, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Max Brisson, Mmes Catherine Dumas, Claudine Lepage, Marie-Pierre Monier et M. Abdallah Hassani ;
Suppléants : M. Jean-Raymond Hugonet, Mme Elsa Schalck, MM. Olivier Paccaud, Cédric Vial, Lucien Stanzione, Bernard Fialaire et Pierre Ouzoulias.
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER