M. Jean-Pierre Vial. Je veux vous faire part d’une interrogation. Dans cet hémicycle, nous sommes tous des élus à avoir été confrontés à ces procédures d’enquête publique – pour ne pas dire que nous les avons subies –, avec les lourdeurs et les contraintes qu’elles peuvent souvent présenter. Cela dit, outre la vertu démocratique du débat, il faut reconnaître que ces enquêtes ont également un côté positif.
La question que je me pose est la suivante : en voulant simplifier, ne risque-t-on pas de compliquer ? Je m’explique : dématérialiser les procédures donne une impression de simplification. Mais il ne faudrait pas qu’en cherchant à simplifier, et donc en évitant le débat, nous nous retrouvions avec une augmentation systématique des recours, justement parce que nous n’aurions pas permis ce débat.
Avant d’exprimer mon vote dans un sens ou dans l’autre, madame la secrétaire d’État ou madame la rapporteure, puisque vous avez dit que la procédure concernée concernait des projets très élémentaires qui méritaient un traitement simplifié, pourriez-vous nous communiquer leur nombre ? S’agit-il de projets qui ne font jamais l’objet de recours, qui ne sont jamais discutés ? Cela permettrait de nous rassurer. Faute de quoi, je le dis très sincèrement, je serai plutôt porté à l’abstention.
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Entendre ces deux dernières prises de parole nous donne de l’espoir ! Nous disons de manière consensuelle que ces enquêtes numériques ne répondent pas à la nouvelle démocratie dont nous avons besoin.
Madame la secrétaire d’État, je vous trouve plutôt mesurée dans vos propos, mais, lorsque vous évoquez le million d’emplois perdu dans l’industrie, je vous en prie, ne mettez pas dans la balance la défense de l’environnement ! Vous aviez droit à une erreur dans la matinée, vous l’avez faite ! (Rires sur les travées du groupe SOCR.)
On entend trop cela. N’oublions pas que l’environnement et la biodiversité sont en péril ! Il ne faut pas tout mélanger. Il est nécessaire – cela a été dit et je suis d’accord – de réindustrialiser notre pays, de se réapproprier des outils de développement économique.
En revanche, de grâce, on doit maintenant, plus que jamais, être extrêmement précautionneux s’agissant des équilibres environnementaux, mais aussi de la démocratie. Consultez nos concitoyens parce qu’ils le demandent ! Comme cela a été souligné, en avançant comme vous le faites, vous allez augmenter les risques de contentieux et, au lieu de simplifier, énormément complexifier la situation, tout en vous opposant frontalement aux populations.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Houllegatte. Un élément n’a pas été évoqué : la fracture numérique. Une consultation par voie électronique, ce n’est pas simple. Dans une enquête publique, les documents sont assez volumineux, et en général il y a des plans qui sont importants. Or lire un plan sur un écran, ce n’est pas évident ! Je peux vous dire que je suis le premier à avoir du mal à le faire, peut-être parce que je suis has been, tout comme j’ai parfois des difficultés à m’approprier un dossier complexe de 200 pages sur un PDF qui défile…
De plus, il faut une certaine agilité pour répondre à une consultation numérique, et ce n’est pas donné à tout le monde ! Les anciens maires comme moi ont non pas subi, mais connu les enquêtes publiques qui se tenaient dans des lieux publics. Des personnes qui n’avaient peut-être pas prévu de se déplacer se disaient finalement que, puisqu’il y avait une concertation sur tel ou tel projet et qu’elles étaient devant ce lieu public qu’est la mairie, elles allaient s’y rendre pour rencontrer le commissaire enquêteur qui était à leur disposition.
Alors il est vrai qu’il n’y a peut-être pas beaucoup de monde à ces réunions, mais le commissaire enquêteur est à la disposition du public, qui peut avoir toutes les informations nécessaires et consigner éventuellement des observations sur un cahier. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe SOCR. – M. Joël Labbé applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Je suis, comme certains de mes collègues, assez gêné par la position de Mme la secrétaire d’État. Je lis le début de l’exposé des motifs du projet de loi : « Le grand débat national a mis en lumière les attentes majeures des Français […] Les Français ont à cette occasion exprimé une forte demande de services publics, plus proches, plus lisibles, adaptés aux usagers et accessibles dans tous les territoires. Ils ont insisté sur un besoin de proximité […] »
Je ne vois pas en quoi le fait de passer par une consultation numérique au lieu d’aller en mairie et de rencontrer les gens répond à cet exposé des motifs et à ce besoin de proximité. (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.
M. Éric Kerrouche. Le Sénat vient de créer une mission d’information sur l’illectronisme. Ce problème touche, on le sait, à peu près 27 % des Français. Ainsi, si le numérique peut parfois être une option, il ne saurait constituer une option définitive. En l’espèce, le fait de se déplacer, de pouvoir avoir matériellement accès au dossier ne doit pas devenir optionnel, cela doit rester une possibilité ouverte à tous, et je ne vois pas en quoi cela représenterait un recul.
Parfois, le mieux est l’ennemi du bien ; cet exemple l’illustre parfaitement.
M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Fournier, pour explication de vote.
Mme Catherine Fournier. Les projets dont il est, en l’occurrence, question ne sont pas de grands projets.
Ayant été, pendant vingt-deux ans, élue d’une commune, j’ai pu l’expérimenter personnellement : quand on ouvre la procédure, pour certains projets, personne ne se présente en mairie ; il faut raison garder.
Pour ma part, je suis donc favorable à la position de la commission.
M. Julien Bargeton. Bravo !
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Je souhaite tout d’abord apporter une précision : le dossier de consultation restera, sous format papier, disponible à la préfecture ou à la sous-préfecture ; il sera donc bien possible d’y avoir accès. Simplement, par facilité, pour ceux qui ne souhaitent pas se déplacer, il y aura aussi la possibilité d’utiliser des moyens électroniques. Cela répond donc, me semble-t-il, à votre inquiétude sur l’illectronisme.
M. Jean-Claude Tissot. Non !
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Ce n’est pas une situation très différente de celle du commissaire enquêteur : soit on se déplace, soit on a accès aux documents par voie numérique ; c’est cumulatif.
En second lieu, on parle effectivement ici de projets sans portée pratique majeure. Certains d’entre vous me suggéraient de ne pas opposer écologie et économie, mais c’est très exactement ce que j’ai dit dans mon propos ! Seulement, je le répète, je parle de procédures administratives, de complexité administrative, non de droit de l’environnement. On ne touche pas, je le redis, à un seul article de ce droit.
C’est d’efficacité administrative que l’on parle. Ce n’est pas par hasard que la France figure au-delà de la centième place, en matière de complexité administrative, dans le classement du World Economic Forum (M. Jean-Claude Tissot s’exclame.). Sans doute peut-on soutenir que ce classement n’est pas bien fait, mais être placé au-delà de la centième position constitue tout de même une forme de message, adressé par des investisseurs également confrontés à la Suède, à l’Allemagne, aux Pays-Bas ou encore à la Norvège, pays qui ne sont pas moins-disants d’un point de vue environnemental…
M. Julien Bargeton. C’est sûr !
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. C’est donc bien cela que l’on vise, en s’appuyant sur des faits précis et sur des dossiers instruits réellement.
En effet, de quoi parle-t-on ici ? De pressings ou d’imprimeries – non pas de grosses imprimeries, mais d’imprimeries offset ! Il s’agit donc, de manière très factuelle, très basique, non de dossiers à fort enjeu environnemental, mais de cas pour lesquels – peut-être parce que nous avons trop élargi le propos – on additionne les délais. Il est bien question ici de dossiers à l’examen desquels les Français ne participent pas, parce qu’ils n’y voient pas d’intérêt.
Je rejoins votre avis sur la nécessité d’avoir un commissaire enquêteur de qualité, en particulier lorsque le projet est complexe, qu’il emporte des conséquences environnementales que l’on peine à évaluer ou qu’il porte sur des zones fragiles ; c’est évidemment essentiel et ces professionnels font un travail remarquable. Toutefois, accordez-le-moi, un pressing ou une imprimerie offset ne méritent probablement pas d’utiliser le temps précieux de ces professionnels.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 68, 106 et 170 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas les amendements.)
Mme la présidente. L’amendement n° 153 rectifié, présenté par MM. Dantec, Labbé, Collin, Gabouty, Jeansannetas et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Après les mots :
sur l’environnement
insérer les mots :
, sur la santé humaine
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Avec beaucoup de regret – ainsi va la démocratie… –, je propose, au nom de mon collègue et complice écolo, Ronan Dantec, un amendement de repli par rapport au précédent. Je lui souhaite un sort meilleur…
Cet amendement vise à permettre au préfet de recourir à l’enquête publique lorsqu’un projet faisant l’objet d’une procédure d’autorisation, mais n’étant pas soumis à évaluation environnementale, est susceptible d’avoir un impact sur la santé humaine.
Les enjeux socioéconomiques peuvent être pris en considération dans ce cadre, mais l’impact sur la santé humaine nous semble constituer un intérêt au moins aussi fondamental à protéger.
Compte tenu de la technicité de certains dossiers, l’intervention d’un commissaire enquêteur indépendant permettra de mener une consultation du public qui soit plus objective et éclairante que la simple participation par voie électronique.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Patricia Morhet-Richaud, rapporteure. La commission spéciale souhaite entendre l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Cet amendement n’est pas nécessaire, parce que le code de l’environnement prend déjà en compte la santé humaine dans la définition des impacts environnementaux.
Votre amendement est donc satisfait, monsieur le sénateur. Pour cette raison, le Gouvernement en demande le retrait et, à défaut, émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 125, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
…. – Le code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° L’article L. 2111-5 est ainsi modifié :
a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’acte administratif portant constatation du rivage fait l’objet d’une participation du public par voie électronique selon les modalités prévues à l’article L. 123-19 du code de l’environnement. Les revendications de propriété sur les portions de rivage ainsi délimitées se prescrivent par dix ans à dater de la publication. Le recours contentieux à l’encontre de l’acte de constatation suspend ce délai. » ;
b) Les deuxième et troisième alinéas sont supprimés ;
2° Le deuxième alinéa de l’article L. 2124-3 est supprimé.
…. – Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 121-32, les mots : « effectuée comme en matière d’expropriation » sont remplacés par les mots : « réalisée conformément au chapitre IV du titre III du livre Ier du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve des dispositions particulières prévues par le présent code » ;
2° À la première phrase de l’article L. 121-34, les mots : « effectuée comme en matière d’expropriation » sont remplacés par les mots : « réalisée conformément au chapitre IV du titre III du livre Ier du code des relations entre le public et l’administration et sous réserve des dispositions particulières prévues par le présent code ».
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Le présent amendement vise à simplifier la participation du public aux procédures relatives au domaine public maritime.
Le domaine public maritime naturel est l’un des plus vastes domaines de l’État. Les préfets de département ont la charge d’administrer ce domaine en veillant à concilier ses différents usages et en intégrant au mieux les enjeux environnementaux. Les préfets ont été nombreux à mettre en évidence le besoin de simplifier certaines procédures, notamment celles qui sont liées à la délimitation ou aux concessions d’utilisation. Cet amendement vise à répondre à ces attentes, également relayées, pour ce qui concerne les concessions, par les collectivités locales qui administrent les ouvrages de protection de la population face aux risques littoraux.
En outre, les auteurs d’un rapport récent sur la mise en œuvre des plans d’action et de prévention des inondations appellent de leurs vœux une mise en œuvre rapide de la mesure de simplification relative aux concessions.
Cet amendement tend également à sécuriser les procédures de création de servitudes de passage de piétons sur le littoral ; l’objectif est de renvoyer ces créations à la procédure d’enquête publique prévue par le code des relations entre le public et l’administration, moins lourde que la procédure actuelle, rattachée au code de l’expropriation. Environ 5 800 kilomètres linéaires de sentiers du littoral sont ouverts en 2019 sur l’ensemble des côtes françaises, dont 1 530 kilomètres au titre de la servitude de passage des piétons. Avec cette mesure, le Gouvernement entend consolider la procédure de création de plus de 1 000 kilomètres linéaires de sentiers, qui sont encore à l’étude, afin de garantir l’accès des Français au rivage de la mer.
Cet amendement a donc pour objet d’introduire plusieurs simplifications, qui correspondent aux attentes des parties prenantes et qui seront bénéfiques à la gestion du domaine public maritime.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Patricia Morhet-Richaud, rapporteure. La commission spéciale, n’ayant reçu cet amendement gouvernemental que lundi dernier, c’est-à-dire assez tardivement, s’en remet à la sagesse du Sénat.
Néanmoins, je précise que, à titre personnel, j’y suis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 25.
(L’article 25 est adopté.)
Article 25 bis (nouveau)
Après la sous-section 3 de la section 6 du chapitre unique du titre VIII du livre Ier du code de l’environnement, est insérée une sous-section 4 ainsi rédigée :
« Sous-section 4
« Installations de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent
« Art. L. 181-28-2. – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 181-5, le porteur d’un projet concernant une installation de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent adresse au maire de la commune concernée, quinze jours au moins avant le dépôt de la demande d’autorisation environnementale, un avant-projet dont les éléments sont fixés par le décret en Conseil d’État prévu par l’article L. 181-31 et qui comprend notamment l’étude d’impact prévue au III de l’article L. 122-1. »
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l’article.
M. Jean-Pierre Sueur. Je veux remercier Mme la rapporteure et les membres de la commission spéciale d’avoir bien voulu accepter, à l’unanimité, je crois, l’intégration de cet article nouveau dans le texte. Je remercie également Mme la secrétaire d’État de ne s’être pas opposée à cet ajout.
Cette disposition est très attendue de nombreux maires. En effet, il arrive fréquemment que des entreprises souhaitant implanter des éoliennes contactent directement des propriétaires de terrain et passent, le cas échéant, avec ces derniers des accords ou des préaccords, sans que l’autorité municipale soit mise au courant. Par conséquent, certains maires découvrent par hasard ou dans la presse l’existence de projets d’installation d’éoliennes sur leur commune.
Je le précise d’emblée, cet article n’aura pas d’effet sur la capacité à s’opposer à un projet, dans les procédures existantes. Il permettra simplement au maire d’être informé, puisque, quinze jours avant une demande d’autorisation, le maire sera nécessairement prévenu. Cette information favorisera la réflexion sur de tels projets et la mise en œuvre des procédures existantes.
Je remercie donc tous ceux qui ont bien voulu souscrire à cette mesure, qui satisfera, je crois, les maires. Je remercie en particulier M. le président de la commission spéciale de ne pas avoir invoqué l’article 45 de la Constitution, que je crains toujours un peu, car on ne comprend pas toujours bien pourquoi il nous tombe sur la tête dans certains cas et pas dans d’autres… (Sourires.) Vous avez été très bien inspiré, monsieur le président ; je vous en rends hommage.
M. Jean-Pierre Sueur. C’est une bonne mesure !
Chapitre IV
Exécution anticipée de travaux
Article 26
I. – L’article L. 181-30 du code de l’environnement est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au premier alinéa du présent article, les permis et décisions qu’il mentionne peuvent, à la demande du pétitionnaire et à ses frais et risques, recevoir exécution avant la délivrance de l’autorisation environnementale prévue au présent titre lorsque l’autorité administrative compétente pour délivrer l’autorisation environnementale le permet par décision spéciale motivée, à condition que la possibilité de commencer certains travaux avant la délivrance de l’autorisation environnementale ait été préalablement portée à la connaissance du public. Cette décision ne peut concerner que les travaux dont la réalisation ne nécessite pas l’une des décisions mentionnées au I de l’article L. 181-2 ou au I de l’article L. 214-3.
« Cette décision spéciale, notifiée au pétitionnaire et soumise aux mêmes modalités de publicité que l’autorisation environnementale, ne peut intervenir qu’après que l’autorité administrative compétente a eu connaissance de l’autorisation d’urbanisme. Elle ne peut être délivrée avant l’expiration d’un délai, fixé par voie réglementaire, courant à partir de la fin de la consultation du public incluant une information sur la possibilité de commencer les travaux par anticipation. Cette consultation est soit celle prévue à l’article L. 181-9, soit la consultation du public propre à l’autorisation d’urbanisme lorsqu’elle est anticipée pour favoriser la bonne réalisation du projet en application du I de l’article L. 181-10. La décision spéciale désigne les travaux dont l’exécution peut être anticipée. »
II. – Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Au début de l’article L. 425-10, les mots : « Lorsque le projet porte sur une installation classée soumise à enregistrement » sont remplacés par les mots : « Lorsqu’une demande d’enregistrement a été déposée » ;
2° L’article L. 425-14 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa de l’article L. 425-14, le mot : « second » est remplacé par le mot : « deuxième » ;
b) Le 1° est complété par les mots : « , sauf décision spéciale prévue à l’article L. 181-30 du même code ».
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 69 est présenté par Mmes Brulin et Cukierman, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 107 est présenté par Mme Préville, MM. Houllegatte et Sueur, Mme Artigalas, M. Kerrouche, Mme S. Robert, MM. Kanner, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin, Bonnefoy et Conconne, MM. Daudigny, Duran et Fichet, Mmes Grelet-Certenais et Harribey, MM. Jacquin et Leconte, Mmes Lubin et Monier, M. Montaugé, Mme Perol-Dumont, M. Temal et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 171 rectifié est présenté par MM. Labbé et Dantec.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l’amendement n° 69.
Mme Céline Brulin. J’avoue ne pas bien comprendre cet article, même si je vois bien qu’il concerne des cas assez particuliers.
Le fait de permettre, en gros, à des industriels de commencer des travaux à leurs risques et frais ne me semble pas être une idée particulièrement lumineuse ni relever de la simplification que vous prônez.
En outre, cela peut occasionner un impact environnemental, puisque des travaux commencés, puis refusés, peuvent nuire à l’environnement. Cela ne nous semble absolument pas judicieux.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour présenter l’amendement n° 107.
M. Jean-Michel Houllegatte. À nous non plus, cet article ne semble pas judicieux.
On pourrait d’abord, en préambule, se demander si cette disposition n’aurait pas plutôt vocation à figurer dans le futur projet de loi décentralisation, différenciation, déconcentration, dit « 3D », au titre de la déconcentration.
Surtout, je crains que cette mesure ne fasse peser, sur nos préfets, un poids énorme. En effet, quand le projet sera engagé et que des financements auront été mobilisés, ils risquent de subir un chantage à l’emploi, l’investissement risquant de ne pas être fructueux, tout cela, bien évidemment, au détriment de l’environnement.
Je ne m’étendrai pas davantage sur l’argumentation, mais nous vous invitons, mes chers collègues, à supprimer cet article.
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 171 rectifié.
M. Joël Labbé. Il a été très bien défendu.
Toutefois, j’ajoute que cette mesure ne va pas dans le sens de la sécurisation des projets industriels, logique pourtant suivie par le texte. Le rapport de la commission spéciale le souligne, « il s’agit […] d’une complexification, [puisque cette mesure] se traduit par une troisième décision administrative du préfet ».
En outre, cela nuira à la lisibilité des procédures pour nos concitoyens, qui pourront voir des travaux se lancer avant même que la décision sur le projet ne soit rendue.
Ainsi, eu égard au risque que cette disposition fait peser sur l’environnement et à la complexité nouvelle qu’elle engendre alors que l’on cherche à simplifier, nous souhaitons supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Patricia Morhet-Richaud, rapporteure. La possibilité offerte au préfet d’autoriser un démarrage anticipé des travaux est strictement encadrée : l’autorisation ne sera accordée qu’aux frais et risques du pétitionnaire, qui demandera donc cette dérogation en connaissance de cause ; cela concernera des endroits où il n’y a pas de problème d’espèce protégée ni de défrichement ; en outre, cela ne sera possible qu’à condition que les deux consultations du public aient été dissociées et que le permis de construire ait donné lieu à une consultation du public mentionnant le démarrage anticipé.
Cette recommandation est, à mon sens, de nature à conforter les projets industriels, via l’adaptation des procédures par les autorités locales, tout en garantissant une protection importante de l’environnement, dans le respect du droit à l’information du public.
La commission spéciale a donc émis un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Je veux rappeler les conditions d’application de cette mesure, qui sont très strictes (M. Jean-Claude Tissot s’exclame.) : absence d’atteinte irréversible à l’environnement du fait des travaux anticipés, pas d’espèce protégée dans la zone concernée, pas de défrichement, pas d’intervention sur zone humide, information préalable du public déjà effectuée et incluant la possibilité d’un démarrage anticipé des travaux, démarches effectuées aux frais et risques du demandeur et permis de construire déjà délivré. Cela figure très clairement dans le projet de loi. En outre, cela doit faire l’objet d’une décision spéciale motivée de l’autorité administrative.
À quels cas cette disposition correspond-elle ? À des projets sur lesquels, disons-le très simplement, nous avons été mis en concurrence avec, sans citer le nom de l’entreprise, l’Allemagne, qui offre, contrairement à la France, cette possibilité.
En effet, dans des zones totalement artificialisées – il ne s’agit en aucun cas de zones naturelles –, certains industriels souhaitent commencer à construire, pour des raisons de délai de livraison de leurs produits. Ils mettent alors en concurrence différents sites – en l’occurrence, si c’est la France contre l’Allemagne, c’est une question non pas de coût du travail, mais d’accès au marché ou à des infrastructures ou à de la main-d’œuvre de qualité ; il ne s’agit pas du tout de rechercher le moins-disant social ou environnemental. Les industriels acceptent donc de prendre ce risque, parce qu’ils font face à des enjeux de concurrence sur leur marché, mais ils trouvent que cela va trop lentement en France et nous demandent à pouvoir aller un peu plus vite, en étant prêts à payer pour cela.
Je le répète, l’Allemagne le permet, la France, non. Par conséquent, pour le dire très concrètement, nous perdons ces projets. Je voulais donc partager cette considération avec vous.
Il est évident que des garanties sont prévues pour permettre la mise en œuvre de projets industriels impliquant une très grande rapidité d’exécution sans pour autant créer de préjudice pour l’environnement.
Par conséquent, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur ces amendements.