M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions.)
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, la loi Énergie-climat, qui est le fruit d’un accord entre le Sénat et l’Assemblée nationale, vient d’être promulguée par le Président de la République. Alors que le projet de loi de finances pour 2020 a pour objet le premier exercice budgétaire qui suivra l’adoption de cette loi, on peut constater que, hélas, les moyens présentés par le Gouvernement ne sont pas à la hauteur des objectifs adoptés par le législateur.
Pourtant, madame le ministre, nous avions souvent évoqué devant vous, lors de nos débats sur ce texte, l’importance du rendez-vous qu’allait constituer le présent projet de loi de finances.
M. Roland Courteau. C’est vrai !
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. En effet, les crédits consacrés à l’énergie sont en baisse de 1 milliard d’euros à périmètre constant ; le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) perd deux tiers de son montant et de ses bénéficiaires pour les travaux réalisés en 2020.
Dans le même temps, la fiscalité énergétique croît de 4 milliards d’euros ; la part de la TICPE perçue par l’État augmente pour sa part de 11 %. La remise en cause d’incitations fiscales induit une charge pérenne de 1 milliard d’euros pour les professionnels.
Dans ce contexte, je me réjouis que le Sénat ait adopté, lundi, les amendements que j’ai présentés sur la fiscalité énergétique, avec l’appui du rapporteur spécial Jean-François Husson, de Mme Estrosi Sassone et de Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Ces modifications permettent de maintenir les incitations de la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN) et de la TICPE pour nos chantiers navals, de mieux prendre en compte les filières du bois, de la géothermie et du gaz dans les équipements éligibles au CITE ou à la prime à la conversion.
Nous avons aussi décidé de favoriser le recyclage des déchets issus du bois et du gaz au travers de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). Enfin, nous avons envisagé un allégement de TVA sur le froid renouvelable ; nous attendons du Gouvernement qu’il mène des négociations sur ce sujet à l’échelle européenne.
C’est par une fiscalité incitative, soucieuse de l’effort d’innovation des professionnels et du pouvoir d’achat des ménages, que nos modes de production et de consommation d’énergie pourront durablement évoluer.
Aujourd’hui, je défendrai plusieurs amendements visant à renforcer les crédits alloués à l’énergie.
Parmi eux, l’amendement n° II-222 rectifié tend à abonder de 50 % une sous-action destinée à revaloriser les territoires touchés par les fermetures de centrales, sous-action dont la création avait été préconisée, l’an dernier, par notre commission et le Sénat tout entier, mais dont le montant des crédits reste insuffisant. Je vous rappelle que les fermetures des quatre centrales à charbon concerneront, d’ici à 2022, un territoire important et beaucoup de femmes, d’hommes et d’entreprises.
L’amendement n° II-223 rectifié vise pour sa part à allouer 40 millions d’euros au fonds Chaleur renouvelable, dans la mesure où sa revalorisation affichée est largement due au simple recyclage d’anciens crédits. Là encore, si nous voulons encourager les réseaux de chaleur et le raccordement des particuliers, il est important d’y mettre les moyens.
Enfin, l’amendement n° II-224 rectifié vise à relever de 75 millions d’euros les crédits destinés au chèque énergie, de manière à financer effectivement les dépenses de rénovation énergétique.
Je serai en tout état de cause très vigilant pour que ce projet de loi de finances ne remette pas en cause les acquis de la loi Énergie-climat. Je constate en effet que l’évaluation financière de la loi quinquennale issue de notre accord en commission mixte paritaire risque d’être abrogée au détour d’un article introduit par l’Assemblée nationale. C’est regrettable ; j’espère, madame le ministre, que ce n’est qu’une erreur de plume que vous aurez à cœur de corriger.
Je forme en conclusion le vœu qu’un effort fiscal et budgétaire suffisant nous permette d’atteindre l’objectif de neutralité carbone que nous avons voté, de manière supportable pour notre économie et pour les ménages. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Corbisez, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cela fait plusieurs années que la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable alerte sur l’état de nos infrastructures, qui ne cesse de se dégrader et exige aujourd’hui des moyens de remise à niveau très importants.
Il faut toutefois convenir, madame la ministre, que vous avez fait de l’entretien des réseaux existants une priorité, dès votre arrivée en responsabilité, et que vous avez augmenté les moyens qui y sont consacrés. Les chiffres en témoignent : les crédits alloués à cet objectif sont passés de 2,4 milliards d’euros en 2017 à 2,9 milliards d’euros aujourd’hui, soit 25 % de croissance.
Cette trajectoire est néanmoins inférieure à celle que préconisait le Conseil d’orientation des infrastructures (COI), qui a estimé que 1 milliard d’euros par an était nécessaire, dont 120 millions d’euros pour les ouvrages d’art, pour enrayer la dégradation du patrimoine existant et le remettre à niveau en une dizaine d’années.
Au-delà du réseau géré par l’État, les travaux de notre commission ont montré que l’état des ouvrages d’art gérés par les collectivités territoriales était inquiétant et que ces collectivités ne disposaient, la plupart du temps, ni de l’ingénierie ni des moyens financiers suffisants pour les entretenir.
Le Gouvernement a récemment fait plusieurs annonces qui reprennent certaines des préconisations de notre commission : il a notamment promis d’apporter une assistance technique aux collectivités pour recenser leurs ponts, de les faire bénéficier d’une méthodologie adaptée pour leur entretien, et d’intégrer dans les systèmes GPS des informations relatives aux ponts et à leur capacité, actualité malheureuse oblige ! Mais selon quel calendrier cela se fera-t-il, madame la ministre ?
Un appui technique est nécessaire, mais insuffisant : les communes et les intercommunalités ne pourront pas procéder à l’entretien de leurs ponts sans aide financière. Madame la ministre, le Gouvernement est-il prêt à apporter une telle aide aux collectivités qui seraient dans l’obligation de remettre en état leurs ouvrages d’art en urgence ?
S’agissant du dispositif de bonus-malus, nous regrettons que la hausse prévue du malus s’applique dans un contexte de restriction des aides à l’acquisition de véhicules propres, puisque les conditions d’octroi de la prime à la conversion ont été revues à la baisse cet été dans une logique budgétaire.
Nous avons également entendu dire que le Gouvernement envisageait de diminuer de moitié le montant du bonus dont bénéficient les entreprises qui acquièrent un véhicule électrique, en le faisant passer de 6 000 euros à 3 000 euros. Madame la ministre, nous confirmez-vous cette information ? Si elle était avérée, ce serait un véritable coup porté au renouvellement du parc automobile, étant donné que plus de 50 % des véhicules neufs sont acquis par des entreprises. Nous ne saurions donc l’accepter.
Par ailleurs, je réitère mon opposition à ce que deux grilles de malus automobile soient appliquées l’année prochaine, comme le prévoit l’article 18, ce qui créera beaucoup de complexité, tant pour les professionnels que pour les consommateurs. Pourquoi demander aux membres de la Haute Assemblée d’approuver une grille de malus qui ne sera valide que trois mois ?
Pour toutes ces raisons, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis défavorable à l’adoption des crédits relatifs aux transports routiers.
Toutefois, pour être honnête, et sans renier les arguments négatifs que j’ai présentés à mes collègues en commission et qui ont justifié cet avis défavorable, je me dois de m’abstenir à titre personnel. En effet, je suis membre du comité stratégique du canal Seine-Nord, projet encore fantôme jusqu’à vendredi dernier. Après plus de trente ans d’attente, et ayant habité plus de trente-cinq ans à moins de deux kilomètres de l’enfer sonore et accidentogène que représente l’autoroute A1, enfin je vois le canal Seine-Nord prendre forme et apporter un peu de tranquillité à cet axe autoroutier ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Nadia Sollogoub ainsi que MM. Michel Dagbert et Jean-François Longeot applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-François Husson, rapporteur spécial, applaudit également.)
M. Didier Mandelli, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, compte tenu des montants prévus par le présent projet de loi de finances, qui traduisent d’ailleurs les apports du Sénat au projet de loi d’orientation des mobilités, et de l’augmentation du budget de l’Afitf qui en résulte, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux.
J’ai toutefois pointé quelques sujets de vigilance, notamment en ce qui concerne la rénovation des petites lignes, dont on connaît l’état fortement dégradé, la diminution inquiétante du plafond d’emplois de Voies navigables de France, ou encore les moyens limités accordés à l’Autorité de régulation des transports au regard de l’extension de ses missions.
Je souhaiterais d’abord vous faire part d’une remarque, madame la ministre, puis vous interroger sur le sujet du transport ferroviaire.
D’abord, comme je l’ai annoncé, le budget de l’Afitf est en augmentation, de près de 500 millions d’euros, et nous ne pouvons que nous en réjouir : avec 2,98 milliards d’euros, ce budget se rapproche du scénario médian du Conseil d’orientation des infrastructures.
Je tiens néanmoins à vous rappeler que l’année 2020 correspond à un pic pour l’Afitf et que, dès 2021, le budget alloué aux infrastructures de transports s’éloignera à nouveau des 3 milliards d’euros annuels prévus par le scénario 2 du COI.
Lors de l’examen du projet de loi d’orientation des mobilités, notre commission avait regretté la trajectoire de dépenses retenue par le Gouvernement, sensiblement inférieure à celle du scénario 2 du COI, mais elle avait fait le choix responsable de ne pas l’augmenter artificiellement. Nous serons donc d’autant plus vigilants quant au respect de cette trajectoire votée au sein du projet de loi d’orientation des mobilités, qui représente une version a minima de ce scénario médian, d’autant qu’elle devra désormais intégrer la participation de l’État au financement du canal Seine-Nord, soit plus de 1 milliard d’euros.
Je souhaitais ensuite vous interroger sur le fret ferroviaire, dont les résultats sont préoccupants depuis une dizaine d’années, alors même que ce mode de transport de marchandises est bien moins polluant que le transport par la route.
La filialisation, au 1er janvier 2020, de Fret SNCF, filiale fortement endettée – cette dette s’élève à 5 milliards d’euros environ –, pose à court terme la question de l’avenir de cette activité de fret. Si le projet de loi d’orientation des mobilités prévoit la définition d’une stratégie pour le fret d’ici au 1er janvier 2021, je souhaite vous interroger sur les mesures concrètes que vous comptez mettre en œuvre rapidement dans le but de développer le fret ferroviaire.
Enfin, nous attendons toujours le fameux rapport Philizot sur les petites lignes ferroviaires. Le secrétaire d’État aux transports avait évoqué devant notre commission une possible remise de ce rapport à la fin de novembre – nous sommes déjà le 27 – ou au début de décembre, après la phase de retour vers les régions. Cette date sera-t-elle respectée, madame la ministre ?
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Mme Nicole Bonnefoy, rapporteure pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable à l’adoption des crédits relatifs aux transports aériens.
Elle a tout d’abord constaté que le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » poursuivra son assainissement financier, tout en maintenant un haut niveau d’investissements dans les programmes de modernisation des systèmes de gestion de la navigation aérienne.
Par ailleurs, on ne peut que se satisfaire de l’augmentation de 20 % des crédits affectés aux lignes d’aménagement du territoire (LAT), ce qui permettra l’ouverture de nouvelles lignes, notamment entre Paris et Quimper. Comme l’a rappelé le récent rapport de notre collègue Josiane Costes, les LAT constituent des outils indispensables au désenclavement et à la cohésion des territoires ; elles doivent à ce titre être pérennisées.
Ces motifs de satisfaction ne doivent pourtant pas masquer la situation dans laquelle se trouve aujourd’hui le pavillon français, qui continue de perdre du terrain face aux compagnies étrangères, low cost en particulier. Deux compagnies nationales, XL Airways et Aigle Azur, ont même fait faillite, occasionnant la suppression de près de 2 000 emplois directs.
Le constat dressé au moment des assises du transport aérien, en 2018, n’a pas changé : les difficultés de nos compagnies s’expliquent en grande partie par leur déficit de compétitivité. À ce sujet, on ne peut que déplorer l’absence de cohérence de la politique du Gouvernement, qui avait allégé la fiscalité de l’aérien d’environ 120 millions d’euros dans la loi de finances pour 2019, avant de proposer dans le présent projet de loi de finances une hausse de la taxe de solidarité d’environ 180 millions d’euros afin de financer l’Afitf.
Je salue à cet égard les amendements adoptés à l’article 20 du présent projet de loi de finances. Ces mesures permettront de compenser la hausse de cette taxe de solidarité par un allégement de la taxe de l’aviation civile et par un suramortissement sur l’impôt sur les sociétés pour les investissements de renouvellement des flottes.
Je regrette cependant que la remise d’un rapport du Gouvernement portant sur les niveaux de fiscalité du secteur aérien en France, prévue dans le projet de loi d’orientation des mobilités, ait été repoussée d’octobre 2019 à mars 2020. Le manque d’informations objectives en la matière affaiblit grandement la capacité du Parlement à débattre de manière éclairée sur le sujet crucial de la compétitivité du pavillon français.
Pouvez-vous nous donner, madame la ministre, des indications quant au calendrier de publication de ce rapport très attendu ? Par ailleurs, au-delà du simple levier fiscal, comment le Gouvernement entend-il redresser la situation de notre pavillon national ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Michel Vaspart, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la stabilisation, pour ne pas dire la stagnation, du budget des affaires maritimes et portuaires figurant dans le programme 205 et dans l’action n° 43 du programme 203, s’inscrit dans la continuité de la loi de finances pour 2019. Pour la deuxième année consécutive, l’État compensera à 100 % les dépenses de dragage des grands ports maritimes, ainsi que d’autres dépenses non commerciales de ces ports. L’administration des affaires maritimes poursuit sa modernisation avec l’acquisition de nouveaux équipements dédiés à la sécurité maritime.
Plusieurs éléments positifs peuvent être relevés. Je pense à la subvention de 4,5 millions d’euros supplémentaires accordés à la SNSM. Si cette subvention ne résout pas l’enjeu majeur de la gouvernance de l’association, enjeu qu’a tout particulièrement relevé la mission commune d’information sur le sauvetage en mer, présidée par Corinne Féret, et dont le rapporteur était Didier Mandelli, elle constitue une aide bienvenue pour le financement des nombreux investissements auxquels doit procéder la SNSM pour renouveler la flotte de ses canots.
Je pense aussi à la subvention exceptionnelle de 500 000 euros qui sera versée par l’État cette année pour soutenir la Fédération d’entraide polynésienne des sauveteurs en mer (FEPSM) pour l’acquisition d’un nouveau navire. Notre mobilisation sur ce sujet, au côté de notre collègue Lana Tetuanui, aura été déterminante ; je m’en félicite ! Le gouvernement polynésien apportera sa part, à hauteur de 500 000 euros, et la convention devra être signée rapidement pour que les travaux de construction du navire s’engagent dès le début de 2020.
S’agissant des ports maritimes, le Premier ministre devrait présenter la nouvelle stratégie portuaire du Gouvernement à l’occasion du comité interministériel de la mer de décembre : il est temps ! Face au Brexit, face à la concurrence internationale dans le secteur portuaire, et face à l’avancée des « nouvelles routes de la soie » chinoises, il est plus que jamais nécessaire de bâtir une vision à moyen et long termes pour nos ports et leur infrastructure multimodale, et d’engager un plan d’action qui mobilise un ensemble d’instruments juridiques, économiques et d’investissement pour ancrer nos infrastructures portuaires dans les chaînes logistiques nationales et européennes et engager l’ensemble des acteurs dans une stratégie de conquête de parts de marché.
D’ailleurs, je tiens à signaler à l’ensemble de mes collègues que la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable met en place une mission d’information sur la gouvernance et la performance de nos ports.
Madame la ministre, en 2019, notre commission avait émis un avis défavorable sur les crédits des affaires maritimes et portuaires, car le budget ne permettait pas de valoriser le deuxième territoire marin qui est le nôtre.
Cette année, les manques sont, hélas, les mêmes. Toutefois, pour saluer les efforts réalisés dans l’urgence pour la SNSM et les sauveteurs de Polynésie française, mais également pour marquer une bienveillance à l’égard des futures annonces du Premier ministre sur la stratégie nationale portuaire, la commission, sur ma proposition, a souhaité émettre un avis d’abstention sur les crédits des affaires maritimes et portuaires pour 2020.
Je conclurai mon intervention par une question : madame la ministre, quels moyens comptez-vous mobiliser pour construire une stratégie portuaire à la hauteur des enjeux économiques, numériques et de transition écologique, mais aussi de l’importance de notre zone économique exclusive ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme l’an passé, notre commission déplore l’absence d’effort budgétaire en faveur de la prévention des risques, ainsi que les baisses considérables d’effectifs imposées au ministère de la transition écologique et solidaire.
Face aux risques naturels, comme l’a souligné la mission d’information sur la gestion des risques climatiques et l’évolution de nos régimes d’indemnisation, notre politique de prévention n’est pas à la hauteur. Les inondations meurtrières dans le Var nous rappellent pourtant une fois encore à quel point notre pays est exposé aux aléas naturels.
On ne peut donc que déplorer le maintien du plafonnement du fonds Barnier. Il faudrait au contraire revoir à la hausse les interventions de ce fonds, afin d’accroître l’effort de prévention face à l’amplification et à la multiplication des catastrophes naturelles, la prévention permettant de sauver des vies et de réduire sensiblement les besoins d’indemnisations.
En matière de risques technologiques, la situation est contrastée : si les effectifs de l’Inspection des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) sont maintenus, les crédits budgétaires diminuent, les plans de prévention ayant été approuvés. Il reste pourtant beaucoup à faire pour assurer leur mise en œuvre. Quant aux crédits ainsi libérés, ils auraient pu être réorientés vers d’autres actions de prévention.
En outre, le Gouvernement s’est fixé comme objectif une augmentation de 50 % du nombre de contrôles des ICPE d’ici à 2022. Selon les syndicats, sans augmentation des effectifs, c’est une gageure, sauf à réduire le temps consacré à chaque contrôle, y compris aux visites sur le terrain. Madame la ministre, comment entendez-vous atteindre cet objectif sans sacrifier la qualité des contrôles ?
Permettez-moi également d’évoquer le bilan décevant du troisième plan national santé-environnement, dont les défaillances et la faible plus-value en matière de prévention ont été soulignées dans deux rapports d’inspection. Madame la ministre, vous avez indiqué devant notre commission qu’il était temps de privilégier des plans plus sélectifs et mesurables. Pouvez-vous nous préciser ce que cela implique pour le nouveau plan national santé-environnement ?
Pour terminer, je relève que votre ministère est le deuxième le plus touché par les baisses d’effectifs, après celui de l’action et des comptes publics. Certes, chaque ministère doit contribuer à l’effort de maîtrise de la dépense publique, mais est-il cohérent, quelques mois après une déclaration de politique générale au cours de laquelle la réponse à l’urgence écologique a été présentée comme étant « le premier axe de la feuille de route » du Gouvernement, que le ministère responsable de sa mise en œuvre continue de subir de telles suppressions d’emplois ?
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, au vu de ces observations, notre commission a émis un avis défavorable à l’adoption des crédits consacrés à la prévention des risques et à la conduite des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Guillaume Chevrollier, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis défavorable à l’adoption des crédits des programmes 113, 159 et 174 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », consacrés notamment aux politiques de l’eau et de la biodiversité, à la météorologie ainsi qu’à l’énergie, au climat et à l’après-mines.
Je ferai une remarque et je poserai deux questions.
Ma remarque concerne le décalage évident entre, d’une part, l’affichage environnemental de ce projet de budget censé répondre à l’urgence écologique et préparer un projet de loi de finances vert pour 2021, conformément à la démarche de green budgeting annoncée par le Gouvernement et, d’autre part, la réalité des efforts consentis en matière environnementale, lesquels paraissent bien maigres. Notre commission regrette un tel décalage.
Deux signes sont particulièrement révélateurs à mon sens : premièrement, le fait que la hausse des crédits de la mission soit en réalité due pour une grande partie à des mesures de périmètre ; deuxièmement, le fait que le ministère de la transition écologique et solidaire connaisse la deuxième plus forte baisse d’effectifs.
Ma première question porte sur les moyens consacrés à la préservation de la biodiversité. Malgré la reconduction des 10 millions d’euros consacrés à la mise en œuvre du plan Biodiversité, la hausse des crédits du programme 113 n’est en fait qu’une compensation pour l’Office français de la biodiversité (OFB) du manque à gagner résultant de la réforme de la chasse. S’ajoutent à cela les nouvelles baisses des moyens des agences de l’eau et des parcs nationaux, qui voient de nouveau leurs effectifs diminuer.
Dans ce contexte, comment comptez-vous, madame la ministre, faire prendre à notre pays des positions et des engagements forts en matière de biodiversité lors des rendez-vous très importants de l’année à venir ? Je pense au congrès mondial de l’Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources (UICN), qui se tiendra à Marseille, et à la COP15 Biodiversité, qui aura lieu en Chine. Je ne doute pas de votre engagement personnel sur ce sujet, madame la ministre, mais avec une gouvernance de la biodiversité en constante réorganisation en France et des moyens fragilisés, comment pouvons-nous espérer être crédibles à l’échelon international et efficaces sur notre territoire ?
Ma seconde question porte sur la situation de l’établissement public Météo France, dont les moyens humains sont eux aussi touchés cette année. Alors qu’ils vont subir la perte de 95 ETP en 2020, la diminution de la masse salariale devrait se poursuivre d’ici à 2022, en même temps qu’une centralisation des moyens. Les efforts consentis en termes d’investissements, essentiels pour progresser en matière de recherche scientifique, d’amélioration des prévisions et de prévention des catastrophes naturelles, seront-ils reconduits au-delà de 2022, afin que nous ne soyons pas très vite dépassés en matière de capacités de calcul notamment ? La prévision météorologique est essentielle, compte tenu du changement climatique. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Frédéric Marchand. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)
M. Frédéric Marchand. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi, à titre de propos liminaire, d’insister sur le moment dans lequel nous nous trouvons.
Chacun a conscience de l’urgence écologique, non seulement les experts, mais également les jeunes, et nous tous. À l’heure de l’examen du projet de loi de finances pour 2020, nous devons réussir à transformer cette prise de conscience en lignes budgétaires traduisant la priorité donnée à l’écologie.
Nous devons nous poser la question suivante : les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sont-ils à la hauteur pour faire face à l’urgence ? Pour ma part, je le pense – cela ne surprendra personne – et je vais tenter de vous expliquer pourquoi.
Le projet de loi de finances qui nous est soumis soutient des politiques publiques et permet surtout de rémunérer des femmes et des hommes pour les mettre en œuvre.
Mme la ministre l’a rappelé tout à l’heure lors des questions d’actualité au Gouvernement, la politique en faveur de l’écologie au cours de l’année à venir sera déclinée selon trois axes d’action principaux.
Le premier axe sera l’accompagnement au quotidien des citoyens dans la transition énergétique via notamment la simplification du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE), lequel deviendra à terme une prime plus simple et plus juste pour l’ensemble des Français ; le verdissement du parc automobile, grâce à la hausse de 50 % du bonus automobile ; la prime à la conversion ou encore le chèque énergie, doté de 822 millions d’euros en 2020, et le forfait mobilité durable.
Le deuxième axe est la défense du vivant, un effort important étant fait en faveur de l’eau et de la biodiversité.
Le troisième axe est l’amélioration des transports du quotidien. Un investissement massif dans les infrastructures de transports sera effectué, dans la continuité de la loi d’orientation des mobilités, à hauteur de 3 milliards d’euros, contre 2,2 milliards d’euros en 2018. Par ailleurs, la forte hausse depuis 2017 des crédits de paiement en faveur des transports collectifs est révélatrice de la volonté de développer les transports du quotidien. Toutefois, j’attire votre attention, chers collègues, sur la nécessité de pérenniser les financements de l’Afitf dans les prochaines années, afin de pouvoir mettre en œuvre les objectifs de la LOM.
Par ailleurs, ce projet de budget consacre la priorité accordée à la modernisation du réseau existant. Nous sommes nombreux, comme l’a rappelé notre collègue Didier Mandelli, à attendre la publication du rapport du préfet François Philizot sur les lignes ferroviaires de desserte fine des territoires. Ces petites lignes sont essentielles pour nos concitoyens, notamment dans les zones rurales et périphériques. Indispensables à l’aménagement d’un territoire donné, elles constituent une solution alternative à l’usage de la voiture.
L’année 2020 marquera également la transformation profonde du groupe public SNCF, qui deviendra un ensemble de sociétés anonymes à capitaux publics. L’article 76 du projet de loi de finances pour 2020 prévoit la première étape de reprise par l’État de la dette de SNCF Réseau, à hauteur de 25 milliards d’euros, en contrepartie d’efforts de productivité de la part de l’opérateur national.
À cet égard, je salue le choix du Gouvernement d’une totale transparence sur le coût de cette reprise et de la création d’un programme budgétaire spécifique doté de crédits évaluatifs, le programme 355, « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l’État ». La première mise en œuvre de cette décision est ainsi inscrite dans le projet de loi de finances pour 2020, 408 millions d’euros étant prévus en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.
J’en viens maintenant aux crédits du programme 205, « Affaires maritimes ». La France possède, vous le savez, le deuxième domaine public maritime au monde, ce qui constitue une véritable chance pour notre pays, car les enjeux sont considérables en termes stratégiques, géopolitiques, militaires, économiques, environnementaux et sécuritaires. De surcroît, la perspective du Brexit est source d’incertitudes.
Le projet de budget que nous examinons finance les actions relatives à la politique de sécurité et de sûreté maritimes civiles, à la régulation sociale de l’emploi maritime, à l’action préventive en matière de sécurité maritime, au soutien à la qualité et au développement du pavillon français, ainsi qu’à la protection de l’environnement marin et littoral.
Nous pouvons nous féliciter de la stabilité des crédits de paiement – ils s’élèveront à 157 millions d’euros pour 2020 –, tout comme de la hausse de 6,2 % du montant inscrit à la ligne budgétaire relative à l’action interministérielle de la mer, soit 13 millions d’euros.
Plus généralement, il faut souligner la hausse de l’ensemble du budget consacré aux affaires maritimes et aux ports, qui s’établit à 258 millions d’euros.
Par ailleurs, comme l’a rappelé notre collègue Michel Vaspart, le projet de budget pour 2020 est, et restera, celui de l’engagement de l’État en faveur de la Société nationale de sauvetage en mer, la subvention qui lui est versée connaissant une hausse sans précédent.
Les hommes et les femmes de la SNSM sont de véritables héros du quotidien, et ils méritent toute notre reconnaissance. Tous sont très attachés à leur statut de bénévoles. Nous connaissons le courage et l’abnégation dont ils font preuve au quotidien.
Une réflexion globale sur le modèle de la SNSM sera entreprise. Les défis sont nombreux : l’évolution des profils, la formation, l’entretien et le renouvellement de la flotte. La subvention publique en faveur de la SNSM passera cette année de 6 millions à 10,5 millions d’euros, comme le Gouvernement s’y est engagé. Il s’agit bien évidemment d’une excellente nouvelle, et je forme le vœu que ce financement soit pérenne.
Le programme 113, « Paysages, eau et biodiversité », appréhende l’ensemble des actions liées à l’eau et à la biodiversité, qu’il s’agisse de la préservation des ressources et des milieux naturels terrestres et marins ou de l’aménagement concerté et de la protection des espaces, des sites et des paysages, en veillant au développement équilibré et durable des territoires. Au regard de l’urgence environnementale, les crédits de ce programme se trouvent confortés de manière significative. Ainsi les crédits de paiement connaissent-ils une forte hausse : ils sont portés à 201 millions d’euros, soit une augmentation de plus de 26 % sur un an, qu’il convient de saluer.
Les risques naturels, les risques technologiques, les risques miniers et les risques pour la santé d’origine environnementale se concrétisent par des catastrophes aux conséquences humaines, économiques et environnementales majeures. Aussi convient-il d’assurer la transition de notre économie vers une économie circulaire et de réduire la vulnérabilité de notre territoire aux risques naturels, l’intensité des catastrophes étant accrue par le changement climatique.
Le programme 181 porte également, depuis 2018, le financement de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, à hauteur de 595 millions d’euros en crédits de paiements pour 2020. Notons également que l’Agence est aussi financée via les programmes 422 et 423 de la mission « Investissements d’avenir ».
La transition écologique et solidaire est un véritable projet de société, qui passe par une transformation de l’ensemble des secteurs économiques et par une mobilisation de tous les types d’acteurs : entreprises, collectivités, citoyens.
C’est ensemble que nous relèverons le défi de la transition écologique. Nous ne le relèverons pas les uns contre les autres ni les uns au détriment des autres. Chacun ses responsabilités, chacun son rôle, même si nous sommes tous dans le même bateau.
C’est un budget offensif que nous présente Mme la ministre. C’est pourquoi le groupe La République En Marche soutiendra bien évidemment les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)