M. André Reichardt. La première partie de cet amendement a déjà été adoptée par le Sénat, puis par l’Assemblée nationale, dans le cadre de l’examen de la proposition de loi visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral. La seconde partie n’aurait pas été retenue, semble-t-il, parce que la jurisprudence reconnaît déjà la possibilité d’imputer sur les deniers personnels du candidat le coût de l’enlèvement des affiches sauvages. C’est du moins l’explication qui a été avancée par le rapporteur du texte à l’Assemblée nationale.
Je souhaiterais connaître la position du rapporteur de la commission des lois et du Gouvernement sur ce sujet, avant le cas échéant de retirer l’amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Mon cher collègue, je me souviens vous avoir entendu évoquer votre traversée du pays, qui vous a permis de constater que l’affichage électoral sauvage était omniprésent !
Nous sommes bien évidemment très sensibles à ce problème, qui empoisonne la vie de beaucoup d’élus, mais il nous semble relever plutôt des propositions de loi relatives au droit électoral déposées par notre collègue Alain Richard, en cours d’examen devant le Parlement. Je note d’ailleurs que l’Assemblée nationale a conservé une partie de votre dispositif, monsieur Reichardt, en prévoyant la dépose d’office des affiches sauvages. En revanche, l’imputation du nettoyage sur les comptes de campagne du candidat est une question plus délicate, l’affichage sauvage pouvant notamment résulter de l’action isolée d’un militant, voire d’un adversaire.
La commission sollicite le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Je sollicite également le retrait de cet amendement. Le sujet est réel, mais certains pourraient être tentés de détourner un tel dispositif lors des campagnes électorales, au détriment de la liberté d’expression.
M. le président. Monsieur Reichardt, l’amendement n° 453 rectifié est-il maintenu ?
M. André Reichardt. On m’indique que la jurisprudence permet d’ores et déjà de demander au candidat le remboursement sur ses deniers personnels des frais d’enlèvement des affiches litigieuses. Est-ce bien exact ? Si oui, mon amendement est entièrement satisfait et je pourrai le retirer.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. C’est bien exact, monsieur Reichardt. J’espère que le Gouvernement confirmera ce point la semaine prochaine à l’Assemblée nationale.
M. André Reichardt. Je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 453 rectifié est retiré.
L’amendement n° 883 rectifié, présenté par Mme Loisier et M. Longeot, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le montant des contraventions pour dépôt sauvage d’objet est reversé à la collectivité émettrice.
Un décret précise les modalités d’application du présent article.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Les collectivités territoriales dressent des contraventions pour les dépôts sauvages sur leur territoire. Le montant de ces contraventions est jusqu’à présent reversé au budget de l’État. Pour plus de cohérence, cet amendement vise à ce que ce montant soit reversé directement à la collectivité émettrice.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Nous n’avons pas pu expertiser suffisamment le dispositif. Ce sujet est très complexe. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Je rappelle la position d’équilibre que nous avions collectivement trouvée. Le produit des amendes pénales revient à l’État, une partie pouvant, par exception, aller aux collectivités locales – je pense notamment au produit des amendes de police.
La belle innovation introduite par ce texte, sur laquelle le Gouvernement et la commission sont tombés d’accord, consiste à attribuer au budget des communes le produit des amendes administratives lié aux procès-verbaux dressés par le maire. Pour le reste, il me semble préférable de ne pas réformer nuitamment le circuit financier des amendes pénales…
En conséquence, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Longeot, l’amendement n° 883 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-François Longeot. Non, je le retire, monsieur le président. J’attire toutefois l’attention sur le fait que les élus prennent des responsabilités : une partie du produit des amendes pourrait, à ce titre, revenir au budget des collectivités.
M. le président. L’amendement n° 883 rectifié est retiré.
L’amendement n° 429, présenté par MM. Jacquin, Joël Bigot, Kerrouche, Durain, Marie, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Leconte, Sueur et Sutour, Mme Blondin, MM. Montaugé, Courteau et Daunis, Mmes Préville et Taillé-Polian, MM. Jomier, Lurel, P. Joly, Houllegatte et Vaugrenard, Mmes Lepage et Jasmin, M. M. Bourquin, Mme Ghali, M. Tourenne, Mme Conway-Mouret, M. Manable, Mme G. Jourda, M. Devinaz, Mme Meunier, M. Tissot, Mme Perol-Dumont, MM. Antiste et Daudigny, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2212-2-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2212-2-…. – Lorsque le maire constate la présence d’un dépôt sauvage dont l’auteur est identifié, il avise le contrevenant des faits qui lui sont reprochés ainsi que des sanctions qu’il encourt. Il l’informe également de la possibilité de présenter ses observations, écrites ou orales, dans un délai de quarante-huit heures. À l’expiration de cette procédure contradictoire, le maire ordonne le versement d’une amende administrative et met le contrevenant en demeure d’effectuer les opérations nécessaires au respect de la réglementation relative aux déchets, en précisant le délai dans lequel ces opérations devront être effectuées.
« Si le contrevenant met en œuvre l’intégralité des opérations prescrites avant la fin du délai fixé dans la mise en demeure, il doit produire un justificatif établissant que les opérations ont été réalisées en conformité avec la réglementation en vigueur. Seule la production de ce justificatif interrompt la procédure des sanctions administratives.
« À l’expiration du délai fixé par la mise en demeure, si les opérations prescrites n’ont pas été réalisées ou si elles l’ont été partiellement, le maire ordonne le versement d’une astreinte journalière jusqu’à la mise en œuvre de l’intégralité des opérations exigées par la mise en demeure.
« Si l’inaction du contrevenant est à l’origine d’un trouble du bon ordre, de la sûreté, de la sécurité et de la salubrité, le maire fait procéder à l’exécution d’office des opérations prescrites par la mise en demeure, aux frais du contrevenant. Le montant mis à la charge du contrevenant est calculé, à la convenance de la commune, soit sur la base des frais réels, soit par application de forfaits établis en fonction de la quantité et de la difficulté des travaux.
« Le recouvrement des frais engagés par la collectivité s’effectue par l’émission d’un titre de recette auprès du comptable public. »
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Cet amendement vise à lutter contre les dépôts sauvages. Dans le cadre de l’exercice de ses pouvoirs de police, le maire se trouve démuni pour sanctionner le non-respect de la réglementation en la matière. La voie pénale n’est pas toujours adaptée, notamment en raison des classements sans suite, très fréquents. Elle n’apporte de surcroît aucune solution pour la réparation des dommages. La voie administrative est rarement employée alors qu’elle permet, à travers la procédure de l’exécution d’office des travaux, de remédier aux désordres constatés.
La procédure administrative courante, définie à l’article L. 541-3 du code de l’environnement, s’applique à tous les manquements relatifs à la réglementation sur la gestion des déchets, depuis la décharge illégale de plusieurs hectares jusqu’au mètre cube de gravats abandonnés au bord d’un chemin. Dans les faits, elle est surtout adaptée aux procédures mises en œuvre par les services de l’État. Introduire une procédure plus adaptée aux besoins des maires dans le code général des collectivités territoriales permettrait de distinguer la procédure pour les atteintes majeures à l’environnement, qui relèvent plutôt des services de l’État, et la lutte contre les dépôts sauvages, qui relève de la compétence des maires.
Dans le cas de la lutte contre les dépôts sauvages, il est nécessaire d’intervenir assez rapidement, car l’absence de sanctions pendant une durée longue – le temps de la procédure – confirme les contrevenants dans le sentiment de leur impunité et incite d’autres contrevenants à déposer des déchets sur le dépôt existant. C’est pourquoi l’amendement proposé inverse l’exécution d’office et le versement du montant des travaux.
Plutôt que la consignation d’une somme entre les mains du comptable public avant l’exécution d’office, l’amendement prévoit la réalisation des travaux, suivie du recouvrement de la dépense auprès des contrevenants. Cette dernière procédure est plus rapide et plus adaptée à des montants de travaux susceptibles d’être réglés par des particuliers. La consignation préalable relève davantage de dommages et de travaux importants.
L’amendement proposé précise les conditions de mise en œuvre de l’exécution d’office et, surtout, permet de mieux graduer la sanction administrative dans le temps, tout en préservant les droits du contrevenant à présenter des observations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. La commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
La procédure d’amende administrative prévue par l’article 15 du projet de loi couvrira les dépôts sauvages sur le domaine public. L’amendement me paraît donc satisfait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Je sollicite également le retrait de cet amendement, pour une autre raison encore.
Comme vous le savez, nous avons engagé la fusion de deux opérateurs, l’Agence française pour la biodiversité et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, l’ONCFS. À la faveur de la création du nouvel Office français de la biodiversité, nous avons renforcé certains pouvoirs de police en la matière. En particulier, votre demande de réduction de certains délais a été satisfaite par la loi promulguée en juillet dernier, monsieur le sénateur.
M. le président. Monsieur Jacquin, l’amendement n° 429 est-il maintenu ?
M. Olivier Jacquin. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 429 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 482 est présenté par M. Kern.
L’amendement n° 630 est présenté par M. Bonhomme.
L’amendement n° 812 rectifié bis est présenté par MM. Bonnecarrère et Henno, Mme Vullien, MM. Capo-Canellas, Vanlerenberghe et Canevet, Mmes Morin-Desailly, Billon et Saint-Pé et MM. Delahaye et Moga.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 15
Insérer un article ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa du A est supprimé ;
2° Est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Sans préjudice de l’article L. 2212-2 et par dérogation à l’article L. 2224-16, lorsqu’un groupement de collectivités est compétent en matière de collecte des déchets ménagers, les maires des communes membres de celui-ci ou membres d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre membre du groupement de collectivités transfèrent au président de ce groupement les attributions lui permettant de réglementer cette activité. »
La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 482.
M. Claude Kern. J’avais déjà présenté cet amendement lors de l’examen du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire. La commission et le Gouvernement l’avaient trouvé intéressant et m’avaient suggéré de le représenter lors de l’examen du présent projet de loi.
Le transfert du pouvoir de police du maire au président de l’EPCI pour la réglementation de la collecte des déchets ménagers et assimilés est automatique, sauf opposition du maire dans un délai de six mois après l’élection du président de l’intercommunalité.
La compétence collecte étant exercée par l’échelon intercommunal, il est logique que la réglementation de celle-ci le soit par ce même échelon. C’est pourquoi je propose, à travers cet amendement, de lier la compétence collecte des déchets ménagers et assimilés et le pouvoir de police associé.
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour présenter l’amendement n° 630.
M. François Bonhomme. Il s’agit de mettre en cohérence et de clarifier l’exercice des pouvoirs de police pour la réglementation de la collecte des déchets ménagers et assimilés.
Il arrive encore que des maires s’opposent au transfert du pouvoir de police à l’intercommunalité, alors même que cette compétence relève exclusivement de l’EPCI sur le plan opérationnel depuis la loi NOTRe. Il me paraît logique d’empêcher qu’une mairie puisse conserver le pouvoir de police en la matière.
M. le président. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour présenter l’amendement n° 812 rectifié bis.
M. Philippe Bonnecarrère. Le Sénat a déjà évoqué la question des dépôts sauvages de déchets à propos d’un autre texte. Avec ces amendements, nous nous situons non pas sur le terrain répressif, mais sur celui de la police administrative.
Comment est organisée la collecte des déchets dans les collectivités ? Nous savons tous que la première étape consiste à définir un règlement de collecte, qui constitue la règle du jeu pour nos concitoyens. Cette compétence relevant maintenant de l’échelon intercommunal, on ne peut pas imaginer des règles de gestion différant selon les communes, par exemple en termes d’horaires de collecte. Les exigences d’efficacité, de cohérence et de qualité du service rendu aux usagers supposent qu’un règlement unique de collecte soit adopté à l’échelle de l’intercommunalité. Je le répète, nous nous plaçons ici sur le terrain de la police administrative des déchets, pas sur celui de la répression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Au nom de la cohérence, nos collègues appellent de leurs vœux un transfert obligatoire du pouvoir de police en la matière à l’intercommunalité. Je peux comprendre l’argument, mais il contrevient au sacro-saint principe de la libre administration des collectivités territoriales et il ne nous paraît pas opportun d’interdire à un maire de s’opposer à un tel transfert. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Je comprends l’objectif, mais le mieux est l’ennemi du bien. Nous ne devons pas oublier que, depuis une semaine, nous nous efforçons de trouver un juste équilibre entre les compétences des intercommunalités et le rôle du maire.
Si nous décidons un transfert automatique de plein droit des pouvoirs de police administrative du maire en matière de collecte des déchets à l’autorité gestionnaire de cette compétence, c’est-à-dire à l’intercommunalité, nous créerons une forme de jurisprudence. On amputera un pouvoir de police du maire. Le Sénat, comme le Gouvernement, s’y est toujours refusé jusqu’à présent à propos d’autres sujets. Je comprends bien sûr les motivations liées aux aspects pratiques de l’organisation du service de collecte, mais ce serait un premier pas qui pourrait ouvrir la voie au transfert à l’intercommunalité d’autres pouvoirs de police du maire.
M. Laurent Duplomb. Déjà qu’il ne lui reste pas grand-chose…
M. Sébastien Lecornu, ministre. C’est un sujet sérieux, monsieur le sénateur Duplomb ! Nous devons faire attention à ce que nous faisons. Alors que ce texte a été conçu pour redonner du pouvoir au maire, l’adoption de ces amendements transfèrerait un pan entier de ses pouvoirs de police à l’intercommunalité. C’est ce que certains ont reproché au Gouvernement de vouloir faire en matière d’eau et d’assainissement… En outre, cela créerait une asymétrie en matière de pouvoirs de police – je le dis sous le contrôle des rapporteurs et du président de la commission des lois. Aujourd’hui, le maire dispose d’agents assermentés pour exercer ses pouvoirs de police : la police municipale, les agents de surveillance de la voie publique, ou ASVP, les gardes champêtres. Si l’on procède au transfert proposé, ces agents pourront constater les infractions en matière de dépôt de déchets, mais c’est à l’intercommunalité qu’il appartiendra de les sanctionner.
Encore une fois, je comprends l’objectif et l’idée est bonne, mais je pense que nous devons nous y prendre autrement. Comme je le disais tout à l’heure au sénateur Chaize, il faut continuer à réfléchir à une mutualisation des forces et des outils par exemple des polices municipales à l’échelle de l’intercommunalité – tout en maintenant la décorrélation entre compétences et pouvoirs de police. La problématique concerne aussi l’urbanisme : on pourrait imaginer que les communautés de communes ou d’agglomération ayant pris cette compétence exercent également le pouvoir de police en la matière. Si l’on prévoit le transfert automatique du pouvoir de police en matière de collecte des déchets à l’intercommunalité, pourquoi s’y opposerait-on pour l’urbanisme ? Je crois que nous devons faire très attention aux décisions que nous prenons sur ce sujet. Je ne voudrais pas que, au détour de l’examen de ces amendements, on revienne sur le principe qui fonde ce texte, à savoir redonner du pouvoir aux maires. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez comme moi : les pouvoirs de police, c’est souvent l’essentiel de ce qu’il reste aux maires ruraux… Par conséquent, transférer une partie de ces pouvoirs aux intercommunalités sans précaution particulière ni concertation en amont ne me semble pas opportun. C’est pourquoi je demande le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable. J’espère vraiment vous avoir convaincus !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Grand. En adoptant ces amendements, nous mettrions en effet le doigt dans un engrenage ! Transférer des pouvoirs de police à l’intercommunalité – je ne peux que penser à la métropole de Montpellier – serait une aliénation des pouvoirs du maire et nuirait à l’efficacité de ce que nous avons mis en place au fil du temps. Rien n’empêcherait ensuite d’aller plus loin.
Par ailleurs, comment cela pourrait-il fonctionner ? Les policiers municipaux constateraient les infractions, mais quid de la mutualisation sur le plan financier ? Par expérience, je suis totalement opposé à la mise en place de polices municipales intercommunales. Cela peut peut-être fonctionner pour une petite communauté de communes rurale, mais pas à l’échelon des grandes agglomérations. À Montpellier, les policiers municipaux ne travaillent pas le dimanche et ne montent pas dans les tramways, contrairement à ceux de ma commune, Castelnau-le-Lez…
Nous devons donc bien réfléchir avant d’avancer sur cette voie.
M. le président. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.
M. Jacques Bigot. Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, je veux bien que l’on rejette ces amendements, mais alors comment régler le problème ?
L’article L. 2224-16 du code général des collectivités territoriales dispose que le maire peut régler la présentation et les conditions de la remise des déchets en fonction de leurs caractéristiques et qu’il fixe notamment les modalités de collectes sélectives et impose la séparation de certaines catégories de déchets, en particulier du papier, des métaux, des plastiques et du verre, pour autant que cette opération soit réalisable sur le plan technique.
Si la communauté de communes exerce la compétence de gestion des déchets, c’est elle qui va fixer les règles. Je ne vois pas comment un maire pourrait réglementer différemment l’organisation de la collecte des déchets sur le territoire de sa commune. En réalité, il peut donc exister une situation d’impasse entre le maire et l’établissement intercommunal : comment fait-on dans un tel cas ? Ces amendements visent à apporter une réponse à ce type de problème. Ils concernent un pouvoir de police très particulier, celui qui est lié à l’organisation de la collecte, compétence confiée à la communauté de communes. Ils me paraissent donc pleinement justifiés.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Cette question est essentielle et, en ce qui me concerne, je pense que les pouvoirs de police doivent rester entre les mains du maire, pour plusieurs raisons. D’abord, on ne peut pas les détacher les uns des autres. Même si l’intercommunalité exerce la compétence en matière de collecte des déchets, le plus gros problème aujourd’hui pour les maires, c’est celui des dépôts sauvages.
M. Jacques Bigot. Cela n’a rien à voir !
M. Martial Bourquin. Mais si ! Je pense que les maires doivent garder leurs pouvoirs de police, tout en travaillant en harmonie avec l’agglomération. Sinon, ce sera le début de la fin du pouvoir des maires ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Claude Kern, pour explication de vote.
M. Claude Kern. Je crois que ces amendements ont été mal compris ! Philippe Bonnecarrère l’a très bien expliqué, ils concernent non pas le volet répressif, mais uniquement la réglementation de la collecte des déchets. Comment chaque maire pourrait-il édicter son propre règlement de la collecte, alors que c’est l’intercommunalité qui organise le service ?
M. le président. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote.
M. Philippe Bonnecarrère. Il faut faire attention à ne pas aller trop loin. Nous sommes tous attachés au principe de libre administration des collectivités locales, mais nous parlons ici d’une compétence qui a été confiée à l’intercommunalité et je ne connais pas un EPCI où les maires demandent à la récupérer.
Concrètement, la collecte des déchets est gérée à l’échelon intercommunal. Il faut bien qu’il y ait un règlement de collecte ! L’intercommunalité organise le service, négocie avec les agents chargés de son exécution les jours et horaires de travail. Si par exemple le maire d’une commune veut une collecte le dimanche alors que cela n’a pas été prévu, on aboutit à une situation de blocage. Il faut tout de même faire preuve d’un minimum de bon sens, et aussi penser à l’usager ! Pour lui rendre un service organisé et de qualité, il est nécessaire de mutualiser et de fixer des règles communes. Sinon, le système devient ingérable. Ces amendements relèvent du sens pratique !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Sébastien Lecornu, ministre. Je remercie les sénateurs Kern et Bonnecarrère d’avoir précisé leurs intentions. Le problème est qu’il existe une légère dissonance avec le dispositif juridique des amendements. Ils prévoient que « les maires des communes membres […] transfèrent au président de ce groupement les attributions lui permettant de réglementer cette activité ». Cette formulation est floue et son champ pourrait aller de l’organisation du service public de collecte des déchets au pouvoir de police, mentionné au début de l’objet des amendements.
Je n’ai pas d’avis sur la question du transfert de l’organisation du service public, mais si j’avais perçu plus tôt ce flou concernant le pouvoir de police, j’aurais proposé un sous-amendement pour lever le doute. Il ne serait pas glorieux de renvoyer au juge administratif le soin de le faire… Je demande donc le retrait de ces amendements et je vous propose de travailler durant la navette avec mon cabinet à une rédaction levant l’ambiguïté quant aux pouvoirs de police. Je ne voudrais pas que, à la suite de nos débats, l’on puisse dire que le Sénat a voté un transfert partiel à l’intercommunalité des pouvoirs de police du maire.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Nous avons une obligation de cohérence. Il existe beaucoup de compétences communautaires obligatoires, au-delà de la gestion des déchets. La question n’est pas de savoir si c’est une bonne chose que la réglementation en matière de collecte de déchets soit liée à la compétence ; nous serons tous d’accord pour dire que c’est mieux ainsi. La question est de savoir si cela doit être obligatoire ou facultatif.
Nous sommes nombreux ici à avoir une expérience de terrain et nous savons que les cas où des problèmes se posent sont très rares. Or, pour régler de tels cas très minoritaires, nous nous apprêtons à mettre en œuvre une obligation de transfert à l’intercommunalité du pouvoir de police, sans que le maire puisse s’y opposer. Si nous faisons cela, je ne vois pas pourquoi nous ne le ferions pas pour les autres compétences obligatoires des communautés de communes.
M. Laurent Duplomb. Exactement !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Cela voudrait dire qu’à nos yeux la compétence de police administrative, c’est-à-dire de réglementation, est liée à la compétence de gestion. Il est certainement préférable que les choses fonctionnent ainsi, mais est-il opportun, alors que nous ressentons tous l’ardente nécessité de rétablir un meilleur équilibre entre communes et intercommunalités, de créer une obligation de transfert qui hypothèquerait la liberté des maires ? J’observe d’ailleurs qu’ils font bon usage de cette liberté puisque, la plupart du temps, les communautés de communes mettent en place par accord ce que nous voulons imposer par la loi !
M. Laurent Duplomb. Et ça se passe bien !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. La grande vertu du présent texte est de privilégier l’accord plutôt que l’obligation : restons cohérents et suivons cette ligne directrice tout au long de nos débats.
C’est la raison pour laquelle, sans nier qu’il soit bon que la réglementation aille de pair avec la compétence de gestion, je préfère que ce soit décidé par un accord, gage du bon exercice ultérieur de la compétence en termes tant de réglementation que de gestion. Pourquoi abandonnerions-nous notre philosophie sur ce point particulier ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)