Mme Marta de Cidrac, rapporteure. L’avis de la commission est défavorable.
Il n’est pas efficace de procéder à coup d’interdictions en surtransposant les directives européennes, sans évaluer au préalable l’impact des mesures proposées. Les questions soulevées sont toujours les mêmes : quels produits sont concernés ? Les solutions de remplacement ne présentent-elles pas des risques ? Tous les impacts ont-ils été évalués ?
Cela étant, nous partageons votre objectif. Nous avons d’ailleurs adopté des objectifs ambitieux de réduction de la mise sur le marché des emballages plastiques à usage unique et de recyclage du plastique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État. Je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Je peux vous assurer, madame la sénatrice, que la lutte contre les perturbateurs endocriniens est véritablement l’une des priorités du Gouvernement. J’en ai fait l’un de mes chevaux de bataille. Malheureusement, la décision ne peut être prise qu’à l’échelon européen.
Nous allons poursuivre notre action afin d’obtenir la suppression peu à peu des perturbateurs endocriniens dans tous les produits du quotidien. Nous avons écrit à la Commission européenne à maintes reprises, nous avons travaillé sur la réforme des agences d’évaluation des substances chimiques à l’échelon européen et lancé une nouvelle stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, laquelle a d’ailleurs été publiée le 3 septembre dernier. Reste qu’il faudrait que d’autres pays se mobilisent, la France étant extrêmement seule pour mener ce combat.
Pour information, c’est mon ancien directeur de cabinet qui a en grande partie obtenu l’interdiction du bisphénol A. C’est dire combien nous sommes mobilisés sur cette question.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. Je pense qu’on peut agir en France, on l’a fait pour le bisphénol A. Ces produits chimiques sont tellement insidieux qu’il faut arrêter avec la logique du peu à peu et prendre les choses en main. Il y va de notre santé, de celle de nos enfants et de la préservation de nos écosystèmes.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 149 rectifié, présenté par M. Gontard, Mmes Assassi et Cukierman, M. Gay, Mmes Benbassa et Cohen, MM. Collombat et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Au plus tard le 1er janvier 2021, il est mis fin à l’utilisation de gobelets, y compris leurs moyens de fermeture et couvercles, d’emballages et de récipients alimentaires à usage unique pour les repas et boissons consommés sur place dans les établissements de restauration. Les professionnels ayant une activité de restauration s’assurent que des récipients et emballages réutilisables se substituant aux produits à usage unique sont mis à la disposition du consommateur final au point de vente. »
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement vise à rendre obligatoire l’utilisation d’emballages, récipients et gobelets réutilisables pour les repas pris sur place dans les établissements de restauration. Le secteur de la restauration rapide produit plus de 13 milliards d’unités d’emballages jetables par an en France, ce qui représente environ 180 000 tonnes d’emballages.
Certaines régions du monde ont adopté ces derniers mois des restrictions similaires à celle que tend à prévoir le présent amendement : la ville de Berkeley aux États-Unis a voté l’obligation d’utiliser des articles de cuisine réutilisables pour la restauration sur place à partir de juillet 2020 ; les îles Baléares en Espagne ont prévu l’interdiction des récipients à usage unique pour les repas pris sur place dans les établissements de restauration à partir de janvier 2021.
Permettez-moi de revenir un instant sur l’amendement précédent. Vous nous objectez souvent, madame la secrétaire d’État, qu’il faut travailler à l’échelon européen.
M. Guillaume Gontard. Or on vous a proposé tout à l’heure une série de trois amendements tendant à prévoir un alignement sur les directives européennes…
M. le président. L’amendement n° 158 rectifié, présenté par MM. Gold, Dantec, Labbé, Arnell, A. Bertrand et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Corbisez, Mme Costes, M. Gabouty, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mmes Jouve et Laborde et MM. Léonhardt, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Au plus tard le 1er janvier 2021, il est mis fin à l’utilisation de gobelets, d’emballages et de récipients alimentaires à usage unique pour les repas et les boissons consommés sur place dans les établissements de restauration. Les professionnels ayant une activité de restauration s’assurent que des récipients et emballages réutilisables se substituant aux produits à usage unique sont mis à la disposition du consommateur final au point de vente. »
La parole est à M. Éric Gold.
M. Éric Gold. Cet amendement s’inscrit dans la lignée de la directive européenne du 5 juin 2019, qui fixe notamment pour objectif la mise à disposition du consommateur de produits réutilisables dans les points de vente.
Le secteur de la restauration rapide produit chaque année 180 000 tonnes d’emballages et ne trie que très rarement ses déchets, au mépris de la réglementation en vigueur.
Lorsqu’un repas est pris sur place, les emballages pourraient aisément être remplacés par des contenants réutilisables. Il vous est donc proposé d’interdire l’utilisation d’emballages jetables pour les repas pris sur place, afin de mettre fin à des pratiques qui sont désormais dépassées.
M. le président. L’amendement n° 390 rectifié bis, présenté par Mme M. Filleul, MM. Joël Bigot, Kanner et Bérit-Débat, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville et Tocqueville, M. Duran, Mme S. Robert, MM. Antiste et Temal, Mme Harribey, MM. Montaugé, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Au plus tard le 1er janvier 2025, il est mis fin à l’utilisation de vaisselle jetable dans les établissements de restauration commerciale et les débits de boissons à consommer sur place. »
La parole est à M. Joël Bigot.
M. Joël Bigot. Cet amendement vise à obliger les établissements de restauration à utiliser de la vaisselle réutilisable pour les consommations sur place. Nous visons plus particulièrement les établissements de restauration rapide, qui produisent chaque année 183 000 tonnes d’emballages.
Le délai de cinq ans envisagé pour y parvenir nous semble largement suffisant pour permettre à ces établissements d’anticiper et de s’adapter à cette nécessaire évolution.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Nous sommes défavorables aux amendements nos 149 rectifié et 158 rectifié, très semblables. Bien sûr, il faut agir sur ce secteur, notamment sur la question du tri à la source des biodéchets.
Nous émettons également un avis défavorable sur l’amendement n° 390 rectifié bis, pour les mêmes raisons.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 149 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 177 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Pour l’adoption | 103 |
Contre | 213 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Puis-je considérer que le vote est identique sur les amendements nos 158 rectifié et 390 rectifié bis ? (Assentiment.)
Ces amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 143 rectifié, présenté par M. Gontard, Mmes Assassi et Cukierman, M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2040, il est mis fin à la mise à disposition et à l’utilisation de plastique à usage unique. Le Gouvernement présente, au plus tard le 1er janvier 2022, un plan d’accompagnement des territoires et des secteurs industriels impactés. »
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Le plastique, nous l’avons rappelé, est une source de pollution majeure des océans. À cet égard, il me paraît important de rappeler quelques chiffres : entre 8 millions et 12 millions de tonnes de plastique s’y déversent chaque année. C’est comme si l’on déversait le contenu d’un camion poubelle en mer toutes les minutes !
Actuellement, plus de 150 millions de tonnes de plastique sont déjà présentes en milieu marin. Si les États et les citoyens n’agissent pas, les océans pourraient contenir une tonne de plastiques pour trois tonnes de poissons d’ici à 2025.
Ces chiffres, nous ne les inventons pas. Ils figurent tout simplement sur le site du ministère de l’environnement. Nous considérons donc que nous devons aller beaucoup plus loin dans les interdictions et limiter tous les produits plastiques à usage unique, qui sont un non-sens environnemental.
Aujourd’hui, c’est la stratégie des petits pas. En tout, une dizaine de catégories de produits est concernée. Parmi elles, les pailles, les touillettes, les couverts, ou encore les gobelets et les cotons-tiges. Cette approche ne nous semble pas assez offensive. Pour cette raison, nous proposons de fixer une date possible, à l’horizon de 2040, à l’image de l’interdiction des moteurs thermiques pour les voitures, pour interdire purement et simplement l’usage des plastiques à usages unique.
Cette date est cohérente, puisqu’il s’agit de l’échéance que nous nous sommes fixée pour sortir de l’exploitation des hydrocarbures et donc du pétrole. L’interdiction à cette date de plastique à usage unique semble donc à la fois crédible et cohérente. Le délai est largement suffisant pour que les industriels puissent s’adapter à ce choix de société. Ces industriels, mais également les territoires, doivent être accompagnés dans ces mutations technologiques par les pouvoirs publics, et il convient que la transition écologique soit réellement le gisement d’emploi que nous attendons tous, y compris les salariés de ces usines.
Déjà aujourd’hui, des alternatives existent : de l’inox ou du bois pour les couverts, des récipients en verre pour les aliments, des mugs en terre cuite pour les boissons, des gourdes en lieu et place des bouteilles en plastique. Nous pourrions d’ailleurs utiliser largement ces dernières au Sénat. Pourquoi ne pas offrir une gourde à chaque sénateur en début de mandat pour éviter l’usage des bouteilles et des verres en plastique ?
Ce qu’il nous faut maintenant, c’est de la volonté politique pour favoriser ces filières innovantes en plaçant un véritable objectif compréhensible, en accompagnant les entreprises, mais en fixant un cap clair, 2040, à la fin de l’exploitation des énergies fossiles et donc à celle du plastique à usage unique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Nous partageons bien sûr vos objectifs. En réalité, cher collègue, votre amendement est quasiment satisfait par les objectifs ambitieux que nous avons adoptés au début du texte. Je les rappelle : 100 % des plastiques recyclés en 2025, une réduction de 50 % des emballages en plastique à usage unique mis sur le marché en 2030, et encore de 50 % en 2040 par rapport à 2030.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Nous avons effectivement adopté des objectifs très clairs sur le recyclage, mais en restant sur une logique de production de plastique. Si nous voulons que les entreprises changent, mutent, il faut leur fixer un cap clair. C’est tout l’intérêt de cet amendement : fixer un cap clair à l’horizon assez lointain de 2040. L’État indique ainsi qu’il faut amorcer la transition et sortir de cet usage et de cette dépendance au plastique.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Vous avez raison, mon cher collègue, mais je vous rappelle que nous avons déjà adopté deux amendements, celui de M. Husson et le vôtre, visant justement à interdire la mise sur le marché d’emballages à usage unique en plastique. Nous estimons que ce que vous demandez à travers cet amendement est quasiment satisfait.
M. Pierre Ouzoulias. Quasiment !
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. J’étais prête à voter votre amendement, monsieur Gontard, que je trouve extrêmement pertinent dans la lutte contre le plastique, en particulier parce qu’il prévoit une date assez éloignée et un plan d’accompagnement de la part du Gouvernement.
Maintenant, j’entends l’argumentaire de Mme la rapporteure sur la philosophie du texte. Votre amendement a déjà été voté avec celui de M. Husson, nous sommes donc en réalité un peu dans la répétition. Par loyauté, je vais donc la soutenir.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 143 rectifié.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. Joël Labbé. Oh, yes !
M. le président. L’amendement n° 386 rectifié, présenté par Mme Taillé-Polian, MM. Joël Bigot, Kanner et Bérit-Débat, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville et Tocqueville, M. Duran, Mme S. Robert, MM. Antiste et Temal, Mme Harribey, MM. Montaugé, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La pratique qui consiste à sur-emballer un produit, alimentaire ou non alimentaire, avec un emballage plastique est interdite. »
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian. S’il convient effectivement de recycler mieux ce que l’on produit, l’objectif principal est évidemment de réduire toujours plus jusqu’à annihiler la production d’emballages plastiques.
Cet amendement vise à interdire les suremballages, qui produisent beaucoup trop de déchets qu’il serait préférable de ne pas produire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. L’avis de la commission est défavorable, notamment en raison du malus financier prévu pour les emballages qui utilisent le plus de matière.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 629 rectifié, présenté par MM. Labbé, A. Bertrand, Corbisez, Dantec et Collin, Mmes N. Delattre et Guillotin et MM. Léonhardt et Requier, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Il est mis fin à la mise sur le marché des produits de consommation courante ou à usages professionnels contenant des microplastiques intentionnellement ajoutés. Un décret fixe les modalités d’application du présent alinéa, notamment les catégories de produits concernées, ainsi que la date d’entrée en vigueur pour chacune de ces catégories. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à mettre fin à l’utilisation de microplastiques dans différentes catégories de produits de consommation courante ou à usage professionnel, étendant ainsi l’interdiction déjà en vigueur des microplastiques dans les cosmétiques rincés à usage d’exfoliation ou de nettoyage adoptée dans la loi Biodiversité. Il se situe dans la lignée des recommandations de l’Agence européenne des produits chimiques, l’ECHA, qui préconise de mettre fin progressivement à l’ajout de microplastiques dans un certain nombre de produits, comme les cosmétiques, les peintures, les détergents, mais aussi les fertilisants agricoles.
Selon cette agence, dans l’Union européenne, la quantité de microplastiques ajoutés intentionnellement aux produits qui s’infiltrent dans l’environnement chaque année est estimée à environ 36 000 tonnes par an. Ces microplastiques sont ainsi une source majeure de pollution des milieux, notamment des milieux aquatiques.
S’il reste encore des incertitudes quant à leur impact sur la santé, on peut largement présupposer que ces particules, qui se retrouvent dans des produits alimentaires comme la bière ou l’eau du robinet, sont loin d’être anodines. L’Anses a été saisie sur ce point. Les missions de l’Anses ne cessent d’ailleurs de s’accroître, sans qu’elle dispose des moyens de les assurer.
Il faut donc profiter de ce texte pour agir rapidement sur le sujet. Un décret pourra préciser les catégories de biens concernés et la date d’entrée en vigueur de l’interdiction pour chaque catégorie, afin de s’adapter à chaque filière en fonction de sa possibilité de développer rapidement des alternatives, en vue de rendre applicable cette interdiction pour les entreprises.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Nous comprenons parfaitement votre demande, cher collègue, et nous la partageons. La difficulté tient à la manière dont l’amendement est présenté : une telle interdiction ne peut être prononcée ainsi.
Le champ de cette interdiction est potentiellement très large et pourrait concerner un grand champ de produits de consommation courante, mais aussi à usage professionnel. L’impact a-t-il été mesuré ? L’effet serait en outre immédiat.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État. La notion de produits de consommation courante est extrêmement vague et ne permet pas de savoir quels seraient les produits interdits.
Vous avez totalement raison, et vous êtes exactement dans le même esprit que le Gouvernement. Néanmoins, il nous faut prendre des mesures concrètement opérationnelles afin de ne pas gonfler la liste des lois inappliquées, qui contribuent à la défiance.
M. Pierre Ouzoulias. Des lois inutiles, nous en avons voté quelques-unes !
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État. Essayons de définir des objectifs précis, actionnables dans la réalité. L’avis est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. L’amendement prévoit justement qu’un décret fixe les modalités d’application, en particulier les catégories de produits concernés et la date d’entrée en vigueur pour chacune d’elle.
Compte tenu de la situation d’urgence, les microplastiques étant redoutables, ne serait-ce que pour l’environnement, il s’agit de donner un signal fort et d’y travailler ensuite via le décret.
M. le président. L’amendement n° 252 n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 10, modifié.
(L’article 10 est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures dix, est reprise à onze heures vingt.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 444 rectifié bis, présenté par Mme Préville, M. Joël Bigot, Mme Taillé-Polian, M. Lurel, Mme G. Jourda, M. Vallini, Mmes Conconne et Lepage, M. Marie, Mme Perol-Dumont, MM. Courteau, Antiste et Temal et Mme Monier, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 541-15-9 du code de l’environnement, dans sa rédaction résultant du I de l’article 8 de la présente loi, est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Au plus tard le 1er janvier 2021, il est mis fin à la mise à disposition à titre onéreux ou gratuit de bouteilles en plastique de boisson de moins de soixante-quinze centilitres. »
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à interdire la mise sur le marché de bouteilles en plastique de moins de 75 centilitres. Il s’agit de mettre un terme à ce type de contenant à usage unique, qui semble en totale contradiction avec la préservation de l’environnement.
Nous devons changer nos habitudes face à la dérive qui est la nôtre d’utilisation de bouteilles d’eau de petit format. C’est une gabegie, considérant que leur usage, très éphémère, n’est parfois que de quelques minutes. C’est aussi mettre fin à une certaine forme d’addiction à la facilité. Certains de nos concitoyens ont déjà adopté d’autres contenants, comme des gourdes, mais ce n’est pas suffisant. Le maître mot pour lutter contre la pollution plastique et pour lutter contre ce gaspillage, c’est la réduction à la source, ce qui me paraît évident.
Or quel exemple plus éloquent qu’une bouteille en plastique de 25 centilitres, par exemple, tellement vite bue, tellement vite jetée ? Il faut amorcer le basculement de notre société du jetable vers une société plus respectueuse de nous-mêmes, tout simplement. Nous n’avons plus le temps d’attendre que tout le monde en soit persuadé, au détriment de l’environnement et de notre santé. Comme vous le savez, les microplastiques et l’antimoine contenus dans les bouteilles d’eau en plastique représentent certainement un problème de santé et un scandale à venir. Sans en connaître pour l’instant l’impact sur la santé, on peut d’ores et déjà se douter qu’il n’est pas anodin. Une bouteille en verre, une gourde en acier n’ont pas ces inconvénients. Nous savons : un principe de précaution s’impose !
M. le président. L’amendement n° 388 rectifié, présenté par MM. Joël Bigot, Kanner et Bérit-Débat, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville et Tocqueville, M. Duran, Mme S. Robert, MM. Antiste et Temal, Mme Harribey, MM. Montaugé, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le III de l’article L. 541-15-9 du code de l’environnement, dans sa rédaction résultant du I de l’article 8 de la présente loi, est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Au plus tard le 1er janvier 2021, il est mis fin à la mise à disposition à titre onéreux ou gratuit de bouteilles en plastique de boisson de moins de 50 centilitres. »
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Cet amendement de repli vise à interdire la mise sur le marché de bouteilles d’eau en plastique de moins de 50 centilitres. Il semble en effet temps de mettre fin à ce type de contenant à usage unique qui semble en totale contradiction avec la préservation de l’environnement.
M. le président. L’amendement n° 159 rectifié bis, présenté par MM. Gold, Arnell, A. Bertrand et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le III de l’article L. 541-15-9 du code de l’environnement, dans sa rédaction résultant du I de l’article 8 de la présente loi, est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2021, la mise sur le marché de bouteilles en plastique de moins de 50 centilitres est interdite. »
La parole est à M. Éric Gold.
M. Éric Gold. Nous avons déjà souligné l’importance de limiter les déchets en amont, par exemple en limitant la production de plastique. Nous vous proposons donc d’interdire une forme de gaspillage qui participe chaque jour à accroître notre production de déchets.
En effet, 25 millions de bouteilles en plastique sont jetées chaque jour en France. Si, dans certains cas, cette consommation se justifie, des efforts peuvent être faits pour la limiter drastiquement. C’est le cas notamment des toutes petites bouteilles en plastique qui se multiplient, contre toute logique et à rebours de la prise de conscience de nos sociétés. Les bouteilles de 20 centilitres contiennent 20 grammes de plastique, soit un gramme par centilitre.
Cet amendement s’inscrit donc dans un souci d’effort commun pour limiter notre impact sur l’environnement, à la fois en termes d’utilisation de matières premières et de production de déchets.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Ces amendements visent à interdire la mise sur le marché de bouteilles en plastique selon leur format : moins de 75 centilitres, moins de 50 centilitres… Nous en voyons bien les limites. Pourquoi tel format et pas tel autre ?
Nous avons déjà adopté un amendement fixant un objectif ambitieux de réduction de la mise sur le marché de tous les emballages plastiques à usage unique qui couvre vos souhaits au-delà de la taille de l’emballage.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission est défavorable aux amendements nos 444 rectifié bis, 388 rectifié et 159 rectifié bis.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État. Je partage totalement votre ambition de lutter drastiquement contre la pollution plastique. J’ai proposé plusieurs solutions, et ce projet de loi en contient beaucoup. Un jour, je suis convaincue que nous pourrons et devrons nous passer totalement des bouteilles en plastique.
En attendant de trouver une alternative sanitairement et écologiquement viable, soutenable, je dirais même désirable pour les Français – car, ne nous leurrons pas, si plus de 20 000 bouteilles sont vendues chaque minute en France, c’est qu’elles sont achetées par nos compatriotes -, nous devons travailler à en limiter les effets négatifs. Les bouteilles de jus de fruit, de lait sont également concernées. La consigne fait partie des solutions de transition, mais je ne vais pas rouvrir le débat…
Faut-il interdire les bouteilles en plastique en 2040, en 2038, en 2042 ? Je ne sais pas. De tels objectifs de long terme sont fixés au doigt mouillé ; ils n’ont pas beaucoup de sens. Comme vous le savez, une telle interdiction n’est d’ailleurs pas permise par le droit européen. La directive Emballages l’interdit, et cela ne pourrait pas perdurer.
Vous avez raison, nous devons nous y préparer, préparer notre industrie à une telle transformation et anticiper les conséquences très lourdes que cela pourrait avoir sur la façon de transporter, d’emballer et de consommer les boissons. Une telle décision doit être nourrie par une réflexion approfondie que nous devons lancer dans la perspective du débat à l’Assemblée nationale. Nous devons disposer de données chiffrées.
Madame la présidente de la commission des affaires économiques, vous parliez d’étude d’impact solide, rigoureuse. Votre groupe est majoritaire, et il me semble que c’est ce type d’approche rigoureuse de l’élaboration des lois que vous prônez. C’est pourquoi je demande le retrait de ces amendements. À défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.