Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 11, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
1° Remplacer la date :
15 avril
par la date :
16 avril
2° Remplacer les mots :
à l’établissement public mentionné à l’article 8 ou à l’État, pour le financement des dépenses que ce dernier a assurées directement avant la création de l’établissement public pour couvrir les travaux de conservation et de restauration de la cathédrale ainsi que pour les dépenses de restauration du mobilier dont il est propriétaire
par les mots :
à l’État ou à l’établissement public désigné pour assurer la conservation et la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris
II. – Alinéa 2
1° Première phrase
Supprimer les mots :
des dons et versements
2° Seconde phrase
Supprimer cette phrase.
III. – Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le ministre.
M. Franck Riester, ministre. Cet amendement a d’abord pour objet de rétablir la date du 16 avril.
Il vise ensuite à supprimer la référence à des conventions obligatoires – des conventions sont possibles, mais elles ne doivent pas être obligatoires.
Il tend enfin à permettre que l’établissement public ou l’État puissent bénéficier des dons, notamment pour les objets mobiliers qui sont dans Notre-Dame de Paris et qui nécessitent une restauration.
Mme la présidente. L’amendement n° 5, présenté par M. Assouline, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kanner et Antiste, Mmes Blondin, Ghali et Lepage, MM. Lozach, Magner, Manable et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1
1° Remplacer les mots :
, au titre de la souscription nationale
par les mots :
en vue de la réalisation des travaux mentionnés à l’article 2 de la présente loi
2° Après les mots :
« Fondation Notre-Dame » est
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
affecté à la souscription nationale dans des conditions respectant l’intention des donateurs, par des conventions conclues entre lesdites fondations et l’établissement public mentionné à l’article 8. Les fondations susmentionnées peuvent utiliser une partie du montant des dons et versements à l’aménagement des environnements immédiats de la cathédrale.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Nous avons déjà eu ce débat, mais cela me permet de revenir sur les propos du ministre, qui m’ont quelque peu refroidi, sur le financement des travaux probables aux abords de Notre-Dame. En effet, je pensais que M. le ministre allait indiquer que, même si cela ne figurait pas dans la loi, l’État participerait à leur financement.
Or il vient de dire que l’on en faisait déjà assez pour Paris. Mais de quoi parlons-nous ? Le parvis de Notre-Dame est certes la propriété de la Ville de Paris, mais il appartient à la France entière, à l’ensemble des citoyens !
La cathédrale étant la propriété de l’État, vous vous en portez garants, mais pour le reste il faudrait se débrouiller et trouver des donateurs privés. C’est incroyable ! Notre-Dame de Paris est un ensemble, et si l’on se pose la question de l’aménagement du parvis, c’est bien parce qu’il y a eu un incendie et qu’il va falloir accueillir des millions de touristes !
Nous devons prendre nos responsabilités, et nous les prendrons. La maire de Paris a annoncé que la ville donnerait 50 millions d’euros pour la cathédrale, et cela a été voté. C’est une somme énorme. Nous sommes donc dans la solidarité, et vous ne pouvez pas nous renvoyer pas à notre particularisme de Parisiens prétendument gâtés.
Le parvis devra accueillir les touristes pendant que la cathédrale sera en travaux. C’est la cause de l’État, de la ville, de tous les Français ; c’est une cause nationale !
Je trouve donc un peu fort que, au lieu de me rassurer, vous en rajoutiez en me disant que non seulement le financement de ces travaux par l’État n’est pas inscrit dans la loi, mais que l’État n’a pas du tout l’intention de les financer, et que vous en appeliez à la bonne volonté de fondations et de donateurs.
J’ai bien compris que nous devrons nous débrouiller, mais j’attendais du ministre qu’il dise que l’État prendrait sa part, quelle qu’elle soit d’ailleurs.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Schmitz, rapporteur. Sans surprise, l’avis de la commission est défavorable sur l’amendement du Gouvernement, qui tend à revenir sur tout le travail engagé par le Sénat pour sécuriser le cadre légal offert aux donateurs, afin de permettre à l’élan de générosité de se poursuivre.
Je ne reviens pas sur la date retenue pour l’ouverture de la souscription.
L’obligation de conclure des conventions avec les fondations reconnues d’utilité publique me semble nécessaire, puisque les donateurs se sont adressés à des fondations, lesquelles étaient d’ailleurs en nombre limité.
Par ailleurs, le principe d’un reversement étalé au fil de l’avancée des travaux de restauration me semble primordial.
Nous avons bien travaillé la rédaction pour préciser les circonstances dans lesquelles le reversement est opéré à l’État ou à l’établissement public. Aujourd’hui, il ne s’agit plus que de l’établissement public, mais la référence à l’État est importante, car ce dernier reste propriétaire des biens mobiliers, tableaux et œuvres d’art, qui sont à l’intérieur de la cathédrale et qui relèvent de sa compétence exclusive.
La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 11.
Concernant l’amendement de M. Assouline, nous avons déjà discuté de cette question lors de l’examen l’amendement qu’il a déposé à l’article 2. Les donateurs ignoraient, au moment où ils ont versé leurs dons, que cette somme pourrait être utilisée pour une autre finalité que la restauration de la cathédrale.
Ouvrir cette possibilité créerait donc un risque juridique. Il faudrait que les fondations interrogent individuellement chacun des donateurs, ce qui semble quasiment impossible et qui représenterait une perte de temps considérable. Or l’intérêt de tous et le souhait exprimé par le Président de la République sont de restaurer la cathédrale Notre-Dame de Paris le mieux et le plus vite possible.
La commission émet donc également un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 5 ?
M. Franck Riester, ministre. Monsieur Assouline, la souscription nationale vise depuis le départ à la restauration de Notre-Dame de Paris.
À la demande d’un certain nombre d’élus, l’État propose, au travers de cette rédaction, que l’établissement public puisse bénéficier d’une délégation de maîtrise d’ouvrage afin d’effectuer les travaux dans le cadre d’un financement à déterminer.
Or il est quelque peu désagréable de vous entendre mettre la pression sur l’État pour qu’il finance les travaux d’aménagement de l’environnement immédiat de Notre-Dame de Paris. C’est cela qui m’a fait quelque peu sortir de mes gonds.
Vous devriez plutôt aller dans le sens de ce que nous proposons, monsieur Assouline, car cela permettra à l’établissement public de bénéficier de tous types de financements – de la région, de la ville, éventuellement de l’État, de donateurs et de mécènes – pour effectuer ces travaux d’aménagement de l’environnement immédiat de Notre-Dame de Paris. Franchement, je ne vois pas où est le problème.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. J’ai surtout entendu le plaidoyer de M. Assouline pour aider la Ville de Paris parce que le parvis de Notre-Dame appartient à tous les Français.
Or les Français qui viennent dans la capitale de notre pays, qui est girondin – du moins en théorie –, ne peuvent y circuler librement en raison de tous les travaux que la Ville de Paris trouve à faire. Pour cela, vous trouvez tous les financements nécessaires, monsieur Assouline, mais pour le parvis de Notre-Dame, il faudrait que les Français soient assez généreux pour venir en aide à la Ville de Paris ! C’est un peu ennuyeux…
Permettez-moi de rappeler que, lorsqu’on construisait une cathédrale on bâtissait, disait-on, le beau, le bien et le vrai. Le beau, c’était la cathédrale ; le bien, c’était l’Hôtel-Dieu ; et le vrai – chacun trouvera sa vérité –, c’était l’école cathédrale.
Tout cela peut faire sens aujourd’hui. Les amendements visant l’aménagement de l’Hôtel-Dieu pour les pèlerins et les touristes avaient un sens historique et culturel. Il me semble qu’il serait bon d’y revenir, plutôt que de s’étendre sur le besoin de financement de la Ville de Paris.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Même si l’on s’invite dans ce débat pour régler d’autres comptes, je ne puis pas laisser passer ces propos.
Il y a 7 000 chantiers à Paris. Quelque 700 sont menés par la Ville de Paris, soit 10 % du total. Ils visent à mettre un peu de végétation, à construire des pistes cyclables, c’est-à-dire à agir concrètement contre le réchauffement climatique, alors que d’autres se contentent de faire de grandes phrases ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Piednoir. Vous n’êtes pas au Conseil de Paris !
M. David Assouline. Ce n’est pas moi qui ai lancé ce débat ! M. Bascher vient de dire que l’on empêchait les Français de circuler à Paris parce que l’on faisait des chantiers. Or bien des chantiers en retard à Paris relèvent de la RATP, dont est responsable Mme Pécresse, par exemple. (Mêmes mouvements.)
Toutefois, fermons le ban. J’en reviens au chantier qui nous occupe aujourd’hui. Certains ont découvert récemment que le parvis appartenait à la ville, car tout le monde considérait que la cathédrale et ses abords formaient un tout.
Je ne demande pas de l’aide pour la Ville de Paris. Cette dernière a pris ses responsabilités, j’ai déjà dit lesquelles – elle a promis un don de 50 millions d’euros pour la cathédrale dont elle n’est pas propriétaire. Nous en appelons à une unité nationale.
Or M. le ministre, que je le salue pour cela, a dit qu’il était sorti de ses gonds. Puis, il a indiqué que l’État, la région, entre autres, pourraient participer au financement de ces travaux.
Oui, monsieur le ministre, je me réjouis que, dans cette nouvelle rédaction, l’établissement public puisse bénéficier d’une délégation de maîtrise d’ouvrage pour effectuer les travaux aux abords de la cathédrale.
J’ai salué cette avancée, et j’ai seulement remarqué que le financement nécessaire n’était pas prévu. Vous m’avez répondu que celui-ci était possible. Notre débat a donc été utile.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3.
(L’article 3 est adopté.)
Article 4
Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent également opérer des versements au titre de la souscription nationale auprès de l’établissement public mentionné à l’article 8 ou de l’État, conformément à l’article 3.
Ces versements sont considérés, à titre dérogatoire, comme des dépenses correspondant à des projets d’investissement en matière de rénovation des monuments protégés au titre du code du patrimoine, tels que prévus au III de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales. Ces dépenses ne sont pas, cependant, éligibles à un remboursement par le Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée prévu à l’article L. 1615-2 du même code.
Mme la présidente. L’amendement n° 12, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le ministre.
M. Franck Riester, ministre. Le présent amendement vise à supprimer l’alinéa 2.
L’exposé des motifs du projet de loi souligne que les versements des dons seront considérés comme des subventions d’équipement pour les collectivités territoriales, et donc imputés en section d’investissement des budgets.
Ce point relève du niveau réglementaire et sera précisé prochainement dans une instruction interministérielle. Je l’avais déjà dit en première lecture, je le répète aujourd’hui.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Schmitz, rapporteur. Nous préférerions que ce point soit inscrit dans le marbre de la loi. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 4.
(L’article 4 est adopté.)
Article 5
Pour les dons et versements, y compris l’abandon exprès de revenus ou produits, effectués en vue de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris entre le 15 avril 2019 et le 31 décembre 2019 auprès du Trésor public, du Centre des monuments nationaux ou des fondations mentionnées à l’article 3 de la présente loi, le taux de la réduction d’impôt prévue au 1 de l’article 200 du code général des impôts est porté à 75 %. Ces versements sont retenus dans la limite de 1 000 €. Il n’en est pas tenu compte pour l’application de la limite de 20 % du revenu imposable mentionnée au même 1.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 1 est présenté par MM. Savoldelli, Ouzoulias et Bocquet, Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 17 est présenté par Mmes Jouve et Laborde, MM. Requier, Roux, Castelli, Collin et Gold, Mmes N. Delattre et Guillotin, MM. Léonhardt, Cabanel, Dantec, Guérini, Artano, Gabouty, Vall, A. Bertrand et Corbisez et Mme Costes.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 1.
M. Pierre Ouzoulias. Le présent amendement vise à supprimer la dérogation au régime classique pour ce type de financement.
Au-delà de la discussion sur le pourcentage de réduction d’impôt, les difficultés rencontrées, notamment le fait qu’un certain nombre de promesses de dons ne sont pas réalisées, montrent qu’il est nécessaire d’accompagner la souscription par un travail pédagogique.
Plutôt que d’accorder une déduction fiscale plus importante, le Gouvernement doit expliquer aux Français et aux Françaises pourquoi on a besoin de leur argent, et surtout à quoi il va servir et dans quel cadre. C’est absolument essentiel.
L’enjeu du débat, ce n’est pas « mairie de Paris versus État ». L’enjeu est de savoir quels moyens l’État doit consentir pour accompagner le chantier tout en respectant la priorité de donation des dons. Monsieur le ministre, il faut que vous nous donniez des engagements quant au travail de pédagogie qui doit être réalisé.
Je regardais le site internet du ministère de la culture sur Notre-Dame. C’est un peu pauvre ! Ce site pourrait être enrichi de nombreuses données, car celles-ci existent, en proposant par exemple une restitution sur la très longue durée de ce qu’était Notre-Dame dans son environnement architectural immédiat.
Il est d’autant plus nécessaire de faire ce travail de pédagogie qu’il permettra ensuite de justifier vos choix patrimoniaux et esthétiques. Je pense sincèrement que ce sera plus utile que l’affichage d’un taux d’exonération supplémentaire.
Mme la présidente. La parole est à Mme Mireille Jouve, pour présenter l’amendement n° 17.
Mme Mireille Jouve. Nous souhaitons de nouveau supprimer cette disposition, qui avait été écartée, de façon accidentelle, semble-t-il, par nos collègues députés en commission des finances lors de la nouvelle lecture, avant d’être réintroduite en séance publique.
À nos yeux, cette majoration ne se justifie toujours pas, compte tenu de la mobilisation financière aussi spontanée que massive entourant le sinistre, alors que les deniers publics font largement défaut ailleurs.
Par ailleurs, cette majoration s’applique à une déduction d’impôt et non à un crédit, ce qui exclut de fait la moitié de la population.
Si le Gouvernement a jugé opportun d’annoncer dès le lendemain du sinistre cette majoration, cela n’engage pas la représentation nationale. Dans ce dossier, on confond décidément vitesse et précipitation !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Schmitz, rapporteur. Ces amendements visent à supprimer l’article 5. Il s’agit du seul article qui justifie le dépôt du présent projet de loi visant à organiser une souscription nationale. Or celle-ci aurait pu être ouverte par le seul pouvoir réglementaire.
La majoration du taux a été voulue par le Président de la République, dont les déclarations engagent bien entendu le Gouvernement. Elle est surtout symbolique, puisqu’elle a été plafonnée à 1 000 euros. Je rappelle d’ailleurs que le montant moyen des dons apportés par des particuliers à la Fondation du Patrimoine est de 100 euros.
Il me semble important de maintenir cet article, j’y insiste, car la présidente de notre commission a montré, dans le cadre de la discussion générale, que cette majoration du taux de la réduction, qui est portée à 75 %, est très importante en matière de mécénat.
C’est une volonté de conforter le mécénat en cas d’événement exceptionnel. Il ne faudrait pas – vous avez raison de le souligner, madame la présidente – qu’il y ait un risque de voir diminuer le mécénat : vous avez vous-même indiqué que le risque est grand si l’on fait passer le taux de réduction d’impôt de 60 % à 40 %.
En l’espèce, un engagement présidentiel a été pris, lequel favorise le mécénat. Respectons-le.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Franck Riester, ministre. Comme je l’ai indiqué précédemment, cette réduction d’impôt complémentaire est au cœur même de notre souhait de légiférer rapidement, pour répondre à l’élan de générosité qui s’est exprimé face au choc qu’a constitué l’incendie de Notre-Dame de Paris. Elle a été très clairement limitée aux dons des particuliers, dans la limite de 1 000 euros.
Pour le reste, il nous faut bien sûr communiquer davantage encore sur la restauration et inclure au maximum nos compatriotes dans la consultation, pour ce qui concerne le choix de la restauration, en mettant en avant le savoir-faire exceptionnel de tous les professionnels du patrimoine et des métiers d’art.
Cela fait évidemment partie de notre cahier des charges, et nous allons le faire. D’ailleurs, nous avons déjà commencé à le faire, mais nous pouvons évidemment faire encore mieux. Nous en reparlerons, et nous vous montrerons bien sûr ce que nous avons décidé de mettre en œuvre.
Le chef de l’État a pris les choses en main ; c’est une bonne chose, car il aurait été critiqué, et à juste titre, s’il n’avait pas été présent dès le 15 avril au soir et s’il n’avait pas souhaité agir au plus haut niveau de l’État pour faire en sorte que cette restauration se fasse dans les meilleures conditions possible. Il est dans son rôle, celui de chef de l’État, en prévoyant une disposition spécifique : il signifie aux Français, qui se sont mobilisés, que l’État est au rendez-vous.
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Je voudrais préciser ma pensée afin d’éviter tout malentendu, dans la perspective, notamment, de l’examen de la loi de finances, si nous avons à débattre de la question des déductions fiscales pour le mécénat.
Je comprends l’amendement de Mme Jouve, mais le Président de la République s’était engagé à mettre en place une défiscalisation à hauteur de 75 %.
Quand un engagement est pris et que les dons se font sur cette base, il est très compliqué, comme l’a souligné le rapporteur, de revenir en arrière, même si, fondamentalement, pour ma part je ne suis pas favorable à porter le taux de réduction d’impôt de 66 % à 75 % lors de circonstances très particulières. La différence est si importante qu’il peut y avoir un effet d’évasion pour les autres chantiers en France.
Mme Françoise Laborde. Absolument !
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Il faut vraiment que ce soit très exceptionnel.
En revanche, j’ai voulu souligner le paradoxe du Gouvernement à augmenter, d’un côté, ce pourcentage, et, de l’autre, à nous annoncer, dans la perspective de la loi de finances, une forte réduction de la défiscalisation en la faisant passer de 66 % à 44 %.
M. Jean-Pierre Leleux. Eh oui !
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Tel est le paradoxe que j’ai voulu souligner d’emblée, parce que nous allons nous engager très rapidement dans la discussion budgétaire, et je parle là sous le contrôle du rapporteur général Albéric de Montgolfier, qui est aussi très sensible à ces questions.
Mme Mireille Jouve. Je suis tout à fait d’accord !
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je pense également qu’il fallait mettre en place un autre dispositif fiscal, et pas du tout celui-là.
Vous le savez, nos concitoyens les plus démunis ne payent pas d’impôt sur le revenu. Ce dispositif d’encouragement fiscal s’adressera à tous, sauf à ceux qui ont peu de revenus, c’est-à-dire aux revenus moyens. Mais beaucoup de Français, qui ne payent pas d’impôts, ont fait des dons. Or ceux-ci ne bénéficient d’aucun dispositif. Pourquoi ? Nous ne nous l’expliquons pas.
C’est pourquoi, dans un souci de justice, nous avions proposé, en première lecture, un crédit d’impôt, pour que tous les Français en bénéficient au même titre.
La disposition fiscale proposée est mauvaise au sens où elle n’est pas juste. Je ne pense pas qu’il faille l’abroger parce qu’il n’y a pas de dispositif de remplacement : notre amendement n’existe plus, et la commission des finances n’a pas jugé bon de le reprendre. Mais nombre de ceux qui ont fait des dons pensent qu’ils vont bénéficier d’une réduction d’impôt de 75 %. Nous ne pouvons pas leur dire que ce ne sera plus le cas à l’issue des débats, alors qu’ils ont déjà donné.
Mme Mireille Jouve. Mais non !
M. David Assouline. Si, ils ont déjà donné en pensant qu’ils allaient bénéficier d’une réduction de 75 %. On ne peut donc plus faire autrement, comme beaucoup d’entre nous l’ont souligné, ce que je regrette.
Aussi, nous allons nous abstenir, car nous ne voulons pas valider ce dispositif que nous critiquons par ailleurs.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote.
Mme Françoise Laborde. Il est vrai que cet amendement tend à soulever un certain nombre de problèmes et à remettre en cause la parole du Président de la République. Bien sûr, celui-ci a fait une promesse un peu rapide, mais il faut l’assumer. L’Assemblée nationale l’assumera si ces amendements identiques sont adoptés par le Sénat, ce que je ne pense pas.
Quoi qu’il en soit, nous ne retirerons pas notre amendement. Pourquoi ?
Lors de l’examen de la loi de finances, il y a aura différents niveaux de réduction d’impôt pour le mécénat, ce qui est un peu dommage. D’ailleurs, cela pourrait servir d’exemple : d’un côté, on octroiera une réduction de 75 %, et, de l’autre, de 44 %.
En revanche, j’entends bien les propos de David Assouline. Les particuliers ont calculé leurs dons sur la base d’une réduction d’impôt de 75 %, au lieu de 66 %.
Monsieur le ministre, s’il s’agissait de la cathédrale Notre-Dame de Saint-Bertrand-de-Comminges, de la basilique Notre-Dame-de-la-Garde à Marseille ou du Mont-Saint-Michel, quel taux appliqueriez-vous ? Il faut, à un moment donné, que le dispositif soit global, sensé, applicable sur tout le territoire de la France, même si certains monuments ne sont pas inscrits au patrimoine de l’Unesco.
Quoi qu’il en soit, nous ne retirerons pas notre amendement, car celui-ci est porté par tous les membres du RDSE.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. À la liste des monuments qui ont été cités, j’aimerais ajouter l’église de Saint-Yrieix-le-Déjalat, un site tout à fait essentiel. (Sourires.)
Sur le fond, ce qui me gêne, c’est le principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs. Être obligé ici de voter des lois confirmatives de la parole présidentielle me rebute, je suis désolé de vous le dire tout cru.
Par ailleurs, si l’objet de cette loi – c’est en tout cas ce que je comprends de plus en plus – est de transposer les déclarations présidentielles,…
M. Pierre Ouzoulias. … je m’interroge une nouvelle fois sur les propos du Président, qui a affirmé : « nous rebâtirons la cathédrale plus belle encore ».
Mes chers collègues, j’ai donc bien fait de voter précédemment contre votre amendement (M. David Assouline fait un signe de dénégation.), car on doit introduire dans ce texte de loi un certain nombre de garanties pour limiter l’extension de la parole présidentielle.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 et 17.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 16, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Première phrase
Remplacer la date :
15 avril
par la date :
16 avril
La parole est à M. le ministre.
M. Franck Riester, ministre. C’est un point que j’ai déjà évoqué à plusieurs reprises depuis le début de notre discussion : cet amendement vise à rétablir la date de départ de la souscription au 16 avril.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Schmitz, rapporteur. Je me suis déjà exprimé sur cette question : nous souhaitons fixer la date du 15 avril pour éviter une rupture d’égalité entre les donateurs.
En conséquence, l’avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour explication de vote.
M. Albéric de Montgolfier. De temps en temps, la commission de finances fait un peu de droit fiscal !
Le beau formulaire Cerfa qui est obligatoire en la matière mentionne la date de versement du don. Concrètement, cela veut dire que le particulier qui a fait un don au moyen d’une carte bancaire le 15 devra indiquer cette date sur le formulaire.
J’ai compris qu’une instruction fiscale rendrait éligibles les donateurs à cette réduction d’impôt, mais il serait plus simple d’inscrire dans le droit positif que le particulier qui, ému par l’incendie de Notre-Dame de Paris, a fait un don bénéficiera du taux de réduction d’impôt de 75 %. Il est quelque peu scabreux de procéder par instruction fiscale ; il aurait été plus sain de le faire dans la loi.