M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, auteur de la question n° 792, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. Martial Bourquin. Madame la secrétaire d’État, je voudrais attirer votre attention sur la problématique de la fabrication détachée. En effet, les marchés publics les plus importants sont traités en entreprises générales, qui répondent souvent répondent aux appels d’offres sans préciser les noms des entreprises sous-traitantes.
Une fois les marchés obtenus auprès des acteurs publics, les entreprises sous-traitent à des entreprises étrangères européennes à bas coûts sociaux – fréquemment situées en Espagne, au Portugal ou en Pologne –, ce qui explique, par exemple, les difficultés actuelles de la construction métallique.
Or l’acheteur public n’a pas connaissance des noms des sous-traitants et, donc, d’une éventuelle sous-traitance à l’étranger, alors même que de l’argent public est dépensé.
En outre, point majeur, une telle sous-traitance entraîne une perte de recettes fiscales pour la France, puisque ni cotisations sociales ni taxes locales ne seront perçues. Cette privation de recettes fiscales s’élèverait à environ 10 % de la valeur du marché sous-traité.
Cette pratique fragilise, entre autres, le secteur de la construction métallique en mettant à mal son savoir-faire, mais aussi en alimentant le chômage dans cette filière.
Aussi, madame la secrétaire d’État, je demande au Gouvernement de légiférer en faveur de la production sur notre territoire et des emplois français.
À l’exemple du Luxembourg, nous pourrions imposer aux entreprises générales d’indiquer, dans leurs offres, les noms des entreprises sous-traitantes avec lesquelles elles se sont associées afin de répondre aux appels d’offres. Elles auraient, bien sûr, l’obligation de conserver comme partenaires ces mêmes entreprises après avoir remporté le marché. Cela permettrait aux acheteurs publics de décider en toute connaissance de cause.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Monsieur le sénateur Bourquin, vous m’interrogez sur les conditions de recours à la sous-traitance dans les marchés publics. Aussi, je tenais à préciser plusieurs points.
Les dispositions existantes permettent déjà aux acheteurs de connaître les sous-traitants d’un marché. La loi relative à la sous-traitance, récemment codifiée dans le code de la commande publique, impose en effet aux titulaires de marchés publics de faire accepter par l’acheteur chacun de leurs sous-traitants. Elle leur impose également de faire agréer par l’acheteur les conditions de paiement de chaque contrat de sous-traitance.
Ainsi, lorsqu’une entreprise envisage d’avoir recours à des sous-traitants pour l’exécution d’un marché, elle doit déclarer, soit au moment du dépôt de son offre, soit en cours d’exécution du contrat, la nature des prestations sous-traitées, le nom et l’adresse du sous-traitant, le montant maximal des sommes à lui verser et les conditions de paiement prévues dans le sous-traité. En cas de sous-traitance occulte, l’acheteur a au demeurant l’obligation de mettre en demeure son cocontractant de régulariser la situation de son sous-traitant.
Les dispositions existantes permettent également aux acheteurs de lutter d’ores et déjà contre la sous-traitance pratiquée à des prix anormalement bas. C’est très important pour répondre à votre attente, monsieur le sénateur. Lorsque le montant des prestations sous-traitées est anormalement bas, l’acheteur peut ainsi exiger que le sous-traitant justifie son prix ou les coûts proposés dans le sous-traité. À défaut de justification suffisante, ou s’il est établi que la sous-traitance est anormalement basse parce qu’elle contrevient à la réglementation applicable en matière environnementale et sociale, ou encore au droit du travail, l’acheteur est tenu de refuser le sous-traitant concerné.
Ainsi, le droit de la commande publique en vigueur permet déjà aux acheteurs publics de s’assurer que le recours à la sous-traitance dans les marchés publics n’est pas susceptible de créer des situations de concurrence déloyale, notamment à l’égard des PME françaises, ou de compromettre la bonne exécution du marché.
J’estime qu’il faut à présent que de telles dispositions soient mise en œuvre dans leur plénitude afin de répondre pleinement aux situations que vous signalez, qui sont effectivement anormales.
Quant à l’idée d’imposer au titulaire d’un marché public de conserver les entreprises sous-traitantes présentées dans son offre initiale, si elle paraît intéressante, sa mise en pratique se heurterait à la réalité de l’exécution. On rencontre des changements dans la vie des entreprises. L’exécution d’un contrat peut se heurter à de nombreux aléas, qui imposent que les relations d’affaires entre entreprises bénéficient d’une certaine souplesse. Il serait embêtant de devoir repasser un marché public parce que l’un des sous-traitants initialement proposés ferait défaillance.
Je peux en tout cas vous assurer, monsieur le sénateur, que le Gouvernement est très attentif à la question de la sous-traitance. Ce sujet sera examiné lors des prochains travaux menés par l’Observatoire économique de la commande publique. J’assisterai d’ailleurs personnellement à ces travaux le 4 juillet prochain.
M. le président. Madame la secrétaire d’État, je vous prie de vous montrer, dans vos prochaines réponses, plus attentive au respect de votre temps de parole.
La parole est à M. Martial Bourquin, pour la réplique.
M. Martial Bourquin. Ce problème est reconnu par l’ensemble des entreprises et des filières professionnelles. Les mesures adoptées par le Luxembourg sont conformes au droit européen : on fait figurer dans les marchés publics leur titulaire, mais aussi ses sous-traitants.
J’ai assisté à un très grand chantier public, à l’hôpital de Belfort-Montbéliard, où deux grandes entreprises générales françaises ont délégué leurs tâches à des dizaines d’entreprises européennes ; à côté de cela, nos PME restaient sans travail ! Il faut prendre ce problème à bras-le-corps et le régler : ce qu’a fait le Luxembourg, je pense que nous pouvons le faire !
protection des marques de territoire
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, auteure de la question n° 813, transmise à M. le ministre de l’économie et des finances.
Mme Annick Billon. Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur la nécessité de mieux protéger les marques de territoire.
L’Institut national de la propriété industrielle, l’INPI, a récemment rejeté l’opposition introduite par la communauté de communes de l’Île-de-Noirmoutier à l’encontre d’une marque, au motif que l’établissement public de coopération intercommunale, ou EPCI, n’est pas une collectivité territoriale au sens de l’article 72 de la Constitution et qu’il n’est donc pas habilité à agir. En effet, l’article précité limite les collectivités territoriales aux seuls « communes, départements, régions, collectivités à statut particulier et collectivités d’outre-mer ».
Aujourd’hui, l’alinéa h) de l’article L. 711–4 du code de la propriété intellectuelle interdit tout dépôt portant atteinte « au nom, à l’image ou à la renommée d’une collectivité territoriale ». L’exploitation du nom d’une collectivité est parfois abusive ou susceptible de créer une confusion dans l’esprit du public et de nuire à l’image des territoires.
En 2012, une proposition de loi visant à mieux protéger les indications géographiques et les noms des collectivités territoriales a été rejetée. Elle prévoyait de modifier l’article L. 712–4 du code de la propriété intellectuelle, afin d’instaurer une obligation d’informer une collectivité locale de tout projet d’utilisation de son nom ou de ses signes distinctifs, notamment à des fins commerciales. Un tel dispositif aurait permis aux collectivités d’agir contre ce type d’usurpation d’identité, de protéger l’identité de leur territoire, mais aussi de défendre leurs spécificités culturelles et économiques et, par conséquent, de soutenir leur économie locale.
Dans un contexte où nos collectivités se sentent de plus en plus délaissées, je vous demande donc, madame la secrétaire d’État, ce que le Gouvernement entend faire pour protéger les marques de nos territoires. Je vous demande également de bien vouloir prendre en compte la nécessité de reconnaître les EPCI en qualité de collectivité territoriale au sens de l’article 72 de la Constitution.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Madame la sénatrice Annick Billon, le nom d’une collectivité ou d’un regroupement de collectivités participe de l’identité d’un territoire. Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale doivent être en mesure de se défendre contre les usurpations mercantiles de leur nom ou de leur image.
Depuis la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, dite loi Hamon, les collectivités territoriales peuvent s’opposer aux dépôts de marque qui porteraient atteinte à leur nom, à leur image, ou à leur renommée, ainsi qu’aux atteintes à une indication géographique qui comporterait leur nom.
Un droit d’alerte gratuit a également été créé au bénéfice des collectivités territoriales et des EPCI, qui peuvent demander à l’Institut national de la propriété industrielle de les alerter en cas de dépôt d’une demande d’enregistrement d’une marque contenant leur dénomination. Cependant, le droit d’opposition est resté limité aux collectivités territoriales : comme vous le soulignez à juste titre, madame la sénatrice, cette possibilité n’est pas ouverte aux EPCI en l’état actuel du droit.
Afin de mieux protéger les marques de territoires, le droit de former opposition à l’encontre de demandes d’enregistrement de marques contenant leur dénomination sera étendu aux EPCI par l’ordonnance qui transposera, à l’automne prochain, la directive Marques du 16 décembre 2015. L’habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance sur ce point est inscrite à l’article 201 de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte. Je crois donc que nous répondons très directement à votre question.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour la réplique.
Mme Annick Billon. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de cette réponse. Nous sommes évidemment d’accord sur le constat : vous l’avez bien vu, aucune solution n’existe à présent. Vous me donnez aujourd’hui la garantie qu’une ordonnance permettra, à l’automne, de combler ce vide ; elle devrait apporter une réponse claire à la question soulevée par la communauté de communes de l’Île-de-Noirmoutier et par son président, Noël Faucher. Je vous en remercie.
assujettissement aux impôts commerciaux des syndicats informatiques
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, auteure de la question n° 776, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
Mme Maryse Carrère. Madame la secrétaire d’État, au travers de cette question, je souhaite appeler votre attention sur les syndicats informatiques intercommunaux, créés par les collectivités pour les collectivités.
Ces syndicats informatiques de forme mixte et ouverte, à l’image de l’Agence de gestion et de développement informatique, l’Agedi, sont des acteurs incontournables à l’heure de la dématérialisation. Ils permettent la diffusion, à des prix avantageux, de logiciels à destination, notamment, des petites communes.
Cependant, ces syndicats sont aujourd’hui en danger. Leur assujettissement aux impôts commerciaux, en particulier à l’impôt sur les sociétés, pèse en effet lourd sur leur trésorerie.
L’Agedi n’exerce pas son activité, au vu des prix qu’elle pratique, de la même manière qu’une société commerciale ; il paraît donc disproportionné qu’elle soit soumise à l’impôt sur les sociétés, alors même que les services rendus par les logiciels dont ces syndicats assurent la diffusion apparaissent indispensables à l’exécution des certains services publics.
Le 17 juin, les responsables de l’Agedi ont été reçus par vos services ; ils ont pu expliquer la logique mutualiste de leur syndicat, ainsi que le rôle de proximité et d’assistance qu’il joue auprès de collectivités parfois isolées et dépourvues de moyens financiers et humains dans le domaine du numérique.
À l’issue de cet entretien, vos services ont indiqué que la décision d’assujettissement ou non de ce syndicat informatique aux impôts commerciaux serait vraisemblablement prise par votre ministère.
Aussi, madame la secrétaire d’État, pouvez-vous m’indiquer si vous êtes parvenue à une décision à ce jour ? À l’avenir, les syndicats informatiques seront-ils assujettis aux impôts commerciaux ? Pouvez-vous aussi nous faire savoir de quelles pistes législatives et réglementaires nous disposons pour rendre possible la prospérité de ces syndicats ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Madame la sénatrice Maryse Carrère, vous appelez l’attention du Gouvernement sur la fiscalité applicable aux syndicats mixtes exerçant des activités dans le domaine informatique et, notamment, à l’Agedi, qui a fait l’objet en 2017 d’un rapport d’observations définitif de la chambre régionale des comptes d’Île-de-France.
D’une manière générale, le régime fiscal applicable aux personnes morales de droit public résulte non pas de leur statut juridique, mais de la nature des activités qu’elles exercent. Ainsi, ces personnes morales, telles que les syndicats mixtes, sont soumises aux impôts commerciaux lorsqu’elles exercent une activité lucrative, c’est-à-dire une activité concurrentielle réalisée dans des conditions similaires à celles d’une entreprise commerciale. Pour apprécier le caractère lucratif de l’activité, sont examinés les produits proposés, le public visé, les prix pratiqués, ainsi que la publicité réalisée.
Même lorsque le critère de lucrativité est satisfait, les syndicats mixtes constitués exclusivement de collectivités territoriales, ou de groupements de ces collectivités, peuvent, conformément à une jurisprudence constante, bénéficier d’une exonération d’impôt sur les sociétés si les services rendus sont indispensables à la satisfaction des besoins collectifs de la population.
Tel n’est pas le cas, en revanche, lorsque leur activité répond à un intérêt purement économique et financier, ou que sa vocation principale est de satisfaire des besoins propres à telle ou telle catégorie d’intéressés.
La détermination du régime fiscal applicable suppose donc l’examen, au cas par cas, de la nature des activités exercées et de leur mode d’exploitation.
Pour des raisons tenant au secret fiscal, il ne m’est pas possible de vous communiquer des informations relatives à la situation fiscale particulière de tel ou tel contribuable. Je voulais simplement préciser de nouveau le cadre général dans lequel ce type de situations est apprécié.
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour la réplique.
Mme Maryse Carrère. Un syndicat comme l’Agedi permet aussi d’assurer un service public dans un contexte où il n’existe pas d’offre privée abondante, ce qui laisse les collectivités soumises à des pratiques de prix trop souvent exorbitantes et inabordables pour les plus petites d’entre elles. Merci de prendre en compte cette spécificité : cela est absolument nécessaire !
respect de l’obligation de dépôt des comptes pour les entreprises outre-mer bénéficiaires d’un avantage fiscal
M. le président. La parole est à M. Michel Magras, auteur de la question n° 852, adressée à M. le ministre de l’action et des comptes publics.
M. Michel Magras. Madame la secrétaire d’État, le code général des impôts subordonne l’octroi de l’avantage fiscal pour investissement productif outre-mer au respect de l’obligation de dépôt des comptes dans le délai de trente jours prévu aux articles L. 232–21 à L. 232–23 du code de commerce.
Toutefois, l’administration applique une interprétation particulièrement restrictive de cette règle, ce qui conduit à une multiplication des redressements fiscaux, de manière doublement pénalisante.
Un seul manquement prive ainsi définitivement l’exploitant du bénéfice de l’aide fiscale et, donc, d’une source de financement de ses investissements ; quant à l’investisseur, qui n’a pas la possibilité de vérifier que l’exploitant a bien satisfait à ses obligations, il se voit contraint de rembourser la déduction fiscale.
On sait en outre que le fonctionnement des greffes des tribunaux et le nombre limité d’experts-comptables dans les départements d’outre-mer peuvent expliquer que le délai de trente jours ne soit pas toujours respecté par les exploitants.
Bien sûr, il ne s’agit pas de remettre en cause l’obligation de dépôt des comptes dans les délais, ou encore la conditionnalité de l’aide fiscale.
Il n’en reste pas moins que, en l’absence de délimitation dans le temps de la régularité au regard du dépôt des comptes prise en compte pour l’octroi de l’aide, la sanction risque d’être appliquée ad vitam aeternam, ou au cas par cas.
Seront ainsi sanctionnés indifféremment un entrepreneur ayant dépassé le délai d’un jour et un exploitant victime du retard de son expert-comptable comme un entrepreneur négligent.
L’absence de possibilité de régularisation s’inscrit surtout à rebours du droit à l’erreur, qui vient d’être inscrit dans notre législation. Surtout, la privation définitive d’aide fiscale ne s’applique qu’aux investissements outre-mer.
Le Gouvernement envisage-t-il de remédier à cette situation ? Une lecture bienveillante de cette règle n’est-elle pas concevable ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Monsieur le sénateur Michel Magras, comme vous l’indiquez, les articles 199 undecies B, 217 undecies et 244 quater W du code général des impôts prévoient que le bénéfice de l’avantage fiscal pour investissement productif outre-mer est subordonné au respect par les sociétés commerciales réalisant l’investissement et par les entreprises exploitantes, à la date de réalisation de l’investissement ou de la souscription, de leurs obligations fiscales et sociales et de l’obligation de dépôt de leurs comptes annuels au greffe du tribunal dans le mois suivant leur approbation par l’assemblée ordinaire des associés ou l’assemblée générale des actionnaires.
La publicité des comptes de l’entreprise, qui constitue une obligation prévue par le code de commerce pour toutes les entreprises, permet aux investisseurs de s’assurer que l’exploitant est en mesure d’exploiter le bien et de respecter l’ensemble des obligations administratives auxquelles il est tenu. Il convient notamment de rappeler que l’investissement doit être exploité pendant une période de cinq ans.
Il n’est donc pas envisagé de modifier une telle condition, garante de la sécurité juridique des investisseurs et des exploitants.
Concernant plus particulièrement les difficultés pratiques de dépôt des bilans annuels auprès des greffes des tribunaux de commerce, il est rappelé que les sociétés ont la possibilité de déposer leurs comptes par voie électronique, dans un délai de deux mois suivant leur approbation.
Dans les cas où des dysfonctionnements avérés du greffe du tribunal de commerce seraient constatés et sous réserve que le contribuable de bonne foi justifie de l’accomplissement de la formalité de dépôt dans les délais requis, l’avantage fiscal ne sera pas remis en cause.
La direction générale des finances publiques se chargera de mettre en œuvre cette solution et d’en assurer la publicité adéquate.
M. le président. La parole est à M. Michel Magras, pour la réplique.
M. Michel Magras. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse. Je veux juste évoquer la réalité outre-mer. Il est hors de question, pour nous, de chercher à ne pas appliquer le droit dans nos territoires, mais il est nécessaire que la loi s’y applique de manière différenciée, pour des raisons qui sont bien connues.
J’ai déjà déposé, à deux reprises, un amendement de précision à cette fin sur des projets de loi de finances ; s’il le faut, je le ferai de nouveau cette année.
Il y a deux ans, déjà, M. Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics, avait déclaré que l’objet de mon amendement était en réalité une simple question d’interprétation des textes fiscaux ; il s’était engagé à améliorer la doctrine administrative. Vous venez de faire la même chose. J’espère simplement que le Gouvernement tiendra sa parole.
pêcheurs des lacs alpins en péril
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, en remplacement de M. Loïc Hervé, auteur de la question n° 753, adressée à M. le ministre de l’action et des comptes publics.
Mme Annick Billon. Madame la secrétaire d’État, mon collègue Loïc Hervé, sénateur de la Haute-Savoie, est empêché d’assister à notre séance ce matin par la préparation de la commission mixte paritaire qui se réunira jeudi prochain sur le projet de loi de transformation de la fonction publique. Il m’a donc demandé de le représenter.
M. Hervé souhaitait vous interroger sur la tarification des autorisations d’occupation temporaire du domaine public délivrées aux pêcheurs professionnels des lacs alpins au titre de l’exercice de leur activité économique.
Le montant de la redevance due par le titulaire de cette autorisation est fixé par la direction départementale des finances publiques. Elle est constituée d’une part fixe, mais aussi, depuis 2015, d’une part variable indexée sur le chiffre d’affaires des acteurs économiques.
Cette redevance est exigée des 70 pêcheurs professionnels des lacs alpins, principalement constitués en entreprise individuelle. Elle menace très fortement la pérennité de ces petites exploitations qui font pourtant la renommée de la gastronomie haut-savoyarde. Le directeur départemental des finances publiques attend des éléments de réponse à cette saisine pour se positionner définitivement.
Les pêcheurs professionnels des lacs alpins sont les gardiens des ressources naturelles de ces lacs ; ils veillent à leur biodiversité, notamment par la pratique de l’alevinage. Ce métier a su attirer de jeunes passionnés que la rudesse, la précarité et la pénibilité du travail n’ont pas découragés. Aujourd’hui, ils ont besoin d’être entendus et soutenus, car déjà certains restent à quai.
Aussi, Loïc Hervé vous demande, madame la secrétaire d’État, si vous envisagez de reconsidérer le bien-fondé économique et social de cette taxation : elle met en effet en péril une activité séculaire fragile qui ne permet plus de mener une vie décente. Madame la secrétaire d’État, « le pessimiste se plaint du vent, l’optimiste espère qu’il va changer, le réaliste ajuste ses voiles ». Alors, quelle direction entendez-vous prendre ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Madame la sénatrice, M. Loïc Hervé m’interroge sur la situation des pêcheurs des lacs alpins, à laquelle mes services m’ont à plusieurs reprises sensibilisée.
Je tiens tout d’abord à préciser qu’il est bien question ici d’appliquer à ces pêcheurs une redevance domaniale, qui constitue une simple contrepartie financière de l’utilisation privative du domaine public.
La redevance domaniale permet à l’État de valoriser son domaine public naturel. Elle est constituée d’une part fixe et d’une part variable. Elle permet d’appréhender les avantages de toute nature qui sont procurés à ceux qui exploitent le domaine public, à savoir, pour les pêcheurs alpins, le lac Léman et le lac d’Annecy.
C’est en ce sens que, depuis plusieurs années, dès lors qu’il est question d’une activité économique, une part variable, indexée sur le chiffre d’affaires, est appliquée lors du calcul des redevances par les services de la direction générale des finances publiques. La fixation des redevances relève de la compétence locale des directeurs départementaux des finances publiques.
J’ai bien entendu donné à ces derniers la consigne de faire preuve de discernement et de tenir compte des conditions d’exercice de l’activité économique.
C’est dans cet esprit qu’une concertation a eu lieu, dans le département de la Haute-Savoie, entre le directeur départemental des finances publiques et la douzaine de pêcheurs professionnels dont la situation a été signalée. Cette concertation a permis de fixer des taux allant de 0,75 % à 2,5 % de leur chiffre d’affaires pour la part variable de la redevance. J’ai examiné attentivement ces taux avec mes services. Soyez convaincue, madame la sénatrice, qu’ils sont déjà très favorables par rapport à ce qui est préconisé !
Malgré l’intérêt que j’attache à l’activité des pêcheurs alpins, vous comprendrez que, pour des raisons d’équité entre les utilisateurs du domaine public, je ne puisse aller au-delà de ces taux mesurés, et encore moins supprimer la part variable.
M. le président. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de respecter votre temps de parole. Je suis sûr que M. Laurent Nunez fera mieux !
La parole est à Mme Annick Billon, pour la réplique.
Mme Annick Billon. Même si, comme l’ont souligné mes collègues, je ne suis pas spécialiste de la pêche dans les lacs alpins, le littoral vendéen m’étant plus familier, j’ai bien compris, madame la secrétaire d’État, que vous n’étiez pas disposée à modifier les taux applicables à ces pêcheurs, qui vous semblent déjà favorables.
Cette réponse demeure donc, aux yeux du sénateur Loïc Hervé, totalement insuffisante au regard du contexte économique et social qu’endurent les pêcheurs professionnels des lacs alpins. Rappelons qu’ils n’ont pas le même statut que leurs confrères suisses avec lesquels ils partagent le lac Léman. Ils ont besoin non pas d’un coup d’épée dans l’eau, mais d’un horizon : vous aurez compris que mon collègue Loïc Hervé aime les chutes ! (Sourires.)
mode de scrutin dans les communes de moins de mille habitants
M. le président. La parole est à M. Alain Cazabonne, auteur de la question n° 624, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. Alain Cazabonne. Monsieur le secrétaire d’État, je veux, au travers de cette question, me faire le porte-parole d’un certain nombre de maires de petites communes.
Ma question fait suite à la modification de la législation électorale opérée par la loi du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux, des conseillers communautaires et modifiant le calendrier électoral.
Cette loi impose désormais aux communes de 1 000 habitants et plus de présenter des listes paritaires. Or les maires ruraux ont de très grandes difficultés à constituer des listes paritaires. Dans la commune de Maransin, aux dernières élections, le maire lui-même était tout juste arrivé à assembler une liste ; la liste d’opposition n’a quant à elle pas pu se créer. Depuis lors, j’ai rencontré une vingtaine de maires de mon département qui rencontrent tous de très grandes difficultés à constituer des listes paritaires.
Dès lors, monsieur le secrétaire d’État, y aurait-il d’éventuelles pistes de modification de la loi électorale ? Peut-être pourrait-on faire passer ce seuil de 1 000 à 2 000 ou à 2 500 habitants.