M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Cet amendement concerne les modalités d’entrée en vigueur du nouveau dispositif de prise en charge des fonctionnaires momentanément privés d’emploi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. La commission n’a pas pu examiner cet amendement, mais à titre personnel, les rapporteurs émettent un avis favorable.
M. le président. L’amendement n° 529, présenté par MM. de Belenet, Mohamed Soilihi, Richard, Amiel et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Navarro, Patient, Patriat et Rambaud, Mmes Rauscent et Schillinger, MM. Théophile, Yung, Bargeton et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 34
Après le mot :
articles
insérer la référence :
33-3,
II – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
C. – Les emplois de sous-directeur des administrations parisiennes et les emplois de directeur général et directeur général adjoint des services des mairies d’arrondissement de Paris dont la population est supérieure à 80 000 habitants, peuvent être pourvus par la voie du recrutement direct dans les conditions prévues au cinquième alinéa de l’article 47 de la loi du 26 janvier 1984 précitée, dans sa rédaction issue de la présente loi.
La parole est à M. Arnaud de Belenet.
M. Arnaud de Belenet. Cet amendement de coordination et d’harmonisation et que l’on pourrait qualifier d’amendement « Ville lumière » a pour objet de permettre à la Ville de Paris de bénéficier de l’ensemble des modalités d’application des dispositions du projet de loi. En outre, il permet un recrutement direct pour les postes de direction des services des mairies d’arrondissement de plus de 80 000 habitants, c’est-à-dire du Xe au XXe arrondissement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cet amendement ne nous apparaît pas particulièrement nécessaire. En effet, s’agissant des modalités de gestion des ressources humaines, la Ville de Paris est en principe soumise au droit commun de la fonction publique territoriale, même s’il peut y être apporté des dérogations par voie réglementaire. S’agissant des statuts d’emplois, notamment du régime des emplois fonctionnels, ils sont fixés, par décret, par analogie avec les règles applicables à la fonction publique de l’État ou à la fonction publique territoriale selon le cas.
L’amendement omet d’ailleurs un certain nombre d’emplois fonctionnels de la Ville de Paris : secrétaire général, secrétaire général adjoint, directeur général et directeur.
C’est pourquoi nous demandons l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. L’appréciation du Gouvernement est légèrement différente de celle de Mme la rapporteur. L’amendement présenté par M. de Belenet vise principalement à élargir à la fonction publique de la Ville de Paris les dispositions de l’article 7 qui ouvrent la possibilité de recrutement pour les emplois de direction.
L’Assemblée nationale a adopté un amendement permettant de garantir l’application des dispositions de l’intégralité du projet de loi aux fonctionnaires de la Ville de Paris, mais l’article 7 a été omis. Pour compléter ce dispositif de coordination, le Gouvernement est favorable à l’adoption de cet amendement.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Favorable !
M. le président. L’amendement n° 417 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Les dispositions des titres Ier et des articles 11, 12 et 14 de la présente loi s’appliquent nonobstant toute disposition statutaire contraire.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 36, modifié.
(L’article 36 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 36
M. le président. L’amendement n° 267, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 36
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport ayant pour objectif de faire un bilan du gel du point d’indice depuis l’année 2008.
Ce rapport permet notamment de :
– détailler précisément la perte de revenu globale et cumulée pour les agents des trois fonctions publiques, ce notamment par rapport à l’inflation ;
– préciser les effets sur le fonctionnement des services et sur la qualité effective du service public rendu aux usagers par le recours actuel de personnes par le biais du contrat plutôt que par la voie des concours de la fonction publique.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Cet amendement demande la remise d’un rapport et je connais la position traditionnelle du Sénat sur ce type de demandes…
Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite tout de même vous alerter d’un point de vue général. En effet, nous avons beaucoup parlé du statut des fonctionnaires, mais très peu, malheureusement, de la façon dont votre gouvernement, comme les précédents, les traite et de la manière dont ils vivent la forme de défiance systématique à laquelle ils sont exposés.
Nous savons tous, quelle que soit la commission dans laquelle nous siégeons, qu’il y a aujourd’hui un problème majeur de recrutement dans la fonction publique, qu’elle soit d’État, hospitalière ou territoriale.
Pour prendre le seul exemple de l’éducation nationale, vous savez comme moi que, malheureusement, un grand nombre de postes ne sont plus pourvus faute de candidats, notamment dans des disciplines – je pense à l’informatique ou aux mathématiques –, où l’écart entre les traitements proposés et les salaires du secteur privé ne permet plus l’embauche de fonctionnaires.
C’est un problème général. Les forces armées le connaissent également, en particulier dans l’informatique. Hier, Mme Gatel nous disait très justement que les collectivités n’arrivent plus à recruter et que nous faisons face de plus en plus souvent à des « déserts » de fonctionnaires territoriaux.
Il est dommage que nous n’ayons pas eu ce débat lors des nombreuses journées que nous avons passées ensemble sur ce projet de loi.
Que représente la fonction publique aujourd’hui en France ? À quoi sert-elle ? Pourquoi n’est-elle plus attractive ? Comment peut-on renforcer le service public et le sens de l’intérêt général qui est pourtant quelque chose de tout à fait indispensable ? En ce qui nous concerne, nous ne considérons pas que la société se réduise à la juxtaposition d’intérêts privés. Il faut que l’État et le Gouvernement défendent l’intérêt général et les fonctionnaires constituent un outil majeur et moderne pour permettre l’expression de cet intérêt général.
Monsieur le secrétaire d’État, cet amendement est un appel à tenir ce débat politique plus large.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Vous le savez, nous sommes traditionnellement opposés aux demandes de rapport ; la commission est donc défavorable à cet amendement.
Sur le fond, j’ajoute que le point d’indice est gelé depuis 2010, et non 2008 ; il a toutefois été revalorisé à deux reprises, en juillet 2016 et février 2017 pour une augmentation totale de 1,2 %. En outre, il revient au Gouvernement de nous préciser les objectifs du prochain rendez-vous salarial du 2 juillet. (M. Pierre Ouzoulias approuve cette demande.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Par principe, le Gouvernement est également opposé aux demandes de rapport.
Sur le fond, le gouvernement actuel, comme ses prédécesseurs, n’entend pas privilégier la méthode du point d’indice pour revaloriser la rémunération des agents publics. Je l’ai dit à de nombreuses reprises, notamment lors des différents rendez-vous avec les organisations syndicales auxquels j’ai participé, et j’aurai d’ailleurs l’occasion de le répéter la semaine prochaine.
Nous préférons d’autres dispositifs de revalorisation, par exemple catégoriels. Ainsi, nous mettons pleinement en œuvre le protocole appelé Parcours professionnels, carrières et rémunérations – PPCR – que ce gouvernement n’a pas signé, mais qu’il applique et finance : en 2020, cela représente un engagement de 850 millions d’euros.
De la même manière, nous avons mis en place un certain nombre de mesures, dont certaines ont été prises à la suite du rendez-vous salarial de l’année dernière. Je pense à la facilité accordée, pour le moment dans la fonction publique territoriale et d’État – nous devons encore travailler sur ce point pour la fonction publique hospitalière –, en matière de monétisation des comptes épargne-temps. Je pense aussi aux mesures d’urgence économique et sociale qui s’appliquent à la fonction publique : accès à la prime d’activité, défiscalisation des heures supplémentaires… Et je peux vous dire que nous aurons l’occasion d’ouvrir d’autres chantiers.
Par ailleurs, nous reconduisons des instruments, non pas de développement du pouvoir d’achat, mais de protection et de garantie. Je pense notamment à la reconduction de la garantie individuelle du pouvoir d’achat – cela paraît tomber sous le sens, mais c’est une décision qu’il faut prendre et financer chaque année. Et nous sommes prêts à travailler sur un certain nombre de sujets indemnitaires directement ou indirectement liés à la rémunération.
J’aurai en effet l’occasion de rencontrer les partenaires sociaux dans quelques jours. Ce sera l’occasion pour moi de préciser les intentions du Gouvernement en la matière.
M. le président. L’amendement n° 308 rectifié n’est pas soutenu.
L’amendement n° 445 rectifié quinquies, présenté par MM. Poadja, Patient, Delcros, Moga, Laurey, Laufoaulu et Longeot, Mmes Vullien et Tetuanui, MM. Canevet et Henno, Mme Férat, MM. Kern et Lafon, Mmes C. Fournier et Doineau, MM. Détraigne, Gremillet, Mandelli et Capo-Canellas et Mme Billon, est ainsi libellé :
I. –Après l’article 36
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement évaluant les inégalités de prise en charge des congés bonifiés entre les fonctionnaires originaires d’un département d’outre-mer ou de Saint-Pierre et Miquelon affectés en métropole et ceux originaires des collectivités ultramarines du Pacifique. Ce rapport expose les moyens législatifs et réglementaires permettant de remédier à ces inégalités.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Favoriser l’égalité professionnelle entre les agents ultramarins de la fonction publique d’État
La parole est à Mme Lana Tetuanui.
Mme Lana Tetuanui. Monsieur le président, je vous propose d’intervenir sur les trois amendements dont le premier signataire est mon collègue calédonien.
M. le président. J’appelle donc également en discussion les amendements nos 444 rectifié quinquies et 446 rectifié quinquies.
L’amendement n° 444 rectifié quinquies, présenté par MM. Poadja, Patient, Delcros, Laurey, Laufoaulu et Longeot, Mmes Vullien et Tetuanui, MM. Canevet, Henno, Kern et Lafon, Mmes C. Fournier et Doineau, MM. Détraigne, Gremillet, Mandelli et Capo-Canellas et Mme Billon, est ainsi libellé :
I. –Après l’article 36
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement évaluant l’opportunité d’étendre l’application de la prime spécifique d’installation à l’ensemble des fonctionnaires de l’État ayant leur résidence principale dans une collectivité ultramarine, et affectés en métropole.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Favoriser l’égalité professionnelle entre les agents des outre-mer
L’amendement n° 446 rectifié quinquies, présenté par MM. Poadja, Patient, Laurey, Laufoaulu et Longeot, Mmes Vullien et Tetuanui, MM. Canevet, Henno, Kern et Lafon, Mmes C. Fournier et Doineau, MM. Détraigne, Gremillet, Mandelli et Capo-Canellas et Mme Billon, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 36
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement évaluant l’opportunité de créer un dispositif substitutif à l’indemnité temporaire de retraite pour les fonctionnaires de l’État dans les territoires d’outre-mer.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Favoriser l’égalité entre les agents hexagonaux et les agents ultramarins
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Lana Tetuanui. Ces trois amendements ont pour objet de demander la remise de rapports et je connais l’issue de ce type de proposition, mais je souhaite dire à M. le secrétaire d’État et à M. le président de la commission des lois que la question n’est pas tant celle d’un rapport. Ce qui est absolument nécessaire, c’est de réaliser une véritable mission de contrôle sur les inégalités qui existent encore aujourd’hui entre la métropole et l’outre-mer.
Les fonctionnaires de métropole perçoivent des avantages, quand ils viennent dans nos collectivités, mais ceux de nos collectivités n’ont pas les mêmes, quand ils viennent en métropole. Lors de l’examen du projet de loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer, nous nous sommes pourtant battus – certains collègues présents ont participé à ce mouvement – pour que ces avantages soient accordés et que les choses aillent dans les deux sens.
Quelle différence y a-t-il entre un fonctionnaire d’État de métropole et un fonctionnaire d’État originaire de nos collectivités ultramarines ? Au-delà des rapports mentionnés dans ces amendements, je demande solennellement la mise en place d’une véritable mission de contrôle sur ce sujet. On doit donner la même chose en métropole et dans nos collectivités ultramarines !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Ces amendements portent des demandes de rapports sur trois sujets : les congés bonifiés ; l’opportunité d’étendre l’application de la prime spécifique d’installation à l’ensemble des fonctionnaires de l’État ayant leur résidence principale dans une collectivité ultramarine et affectés en métropole ; l’opportunité de créer un dispositif substitutif à l’indemnité temporaire de retraite pour les fonctionnaires de l’État dans les territoires d’outre-mer.
Chacun connaît l’hostilité de principe de la commission des lois envers les demandes de rapport et son avis est donc défavorable sur ces trois amendements. Toutefois, comme vous l’indiquiez, ma chère collègue, le Parlement peut tout à fait, au titre de ses missions de contrôle, répondre aux préoccupations que vous avez exprimées. Il me semble que le président de la commission des lois serait un interlocuteur tout à fait indiqué dans cette perspective.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. L’avis du Gouvernement est également défavorable pour la raison de principe que j’ai déjà évoquée.
Par ailleurs, je n’ai pas à commenter ce que vient de dire M. le rapporteur sur l’opportunité, pour votre assemblée, de décider de la mise en place d’une mission d’information, mais le Gouvernement se tiendra naturellement à la disposition des parlementaires pour fournir toute son aide et transmettre l’ensemble des informations nécessaires, si une telle mission était lancée.
En ce qui concerne la question des congés bonifiés, ma collègue Annick Girardin, ministre des outre-mer, aura l’occasion, la semaine prochaine, d’ouvrir une concertation avec les parlementaires et les organisations syndicales pour établir un bilan et mettre en œuvre les engagements du Président de la République en faveur des agents qui ont le centre de leurs intérêts matériels et moraux – leur CIMM – outre-mer. Les discussions porteront notamment sur la manière de permettre à ces agents de partir plus souvent, même si c’est pour des périodes moins longues.
Je ne doute pas qu’à l’occasion de ces discussions la question de la situation comparée des Ultramarins selon leur CIMM sera abordée. Je le répète, ces travaux commencent dès la semaine prochaine.
Nous nous sommes aussi engagés à rendre public, avant la fin de l’année 2019, un bilan de l’application du critère du CIMM comme priorité légale d’affectation sur l’année 2018.
Sur les autres sujets, je répète la disponibilité du Gouvernement pour donner aux parlementaires les informations dont ils ont besoin, notamment s’ils créent une mission d’information.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Arnell, pour explication de vote.
M. Guillaume Arnell. Je voudrais appuyer les propos de ma collègue Lana Tetuanui. La loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer n’aura de sens que si de réels progrès sont apportés aux territoires ultramarins et à leurs habitants. Il est désagréable de toujours devoir réclamer, ici ou ailleurs, l’égalité entre les territoires, même si égalité ne signifie pas uniformité.
Il est temps de conduire une véritable réflexion sur les différences qui existent entre la France métropolitaine et les territoires ultramarins. Alors, nous ressentirons peut-être plus nettement le fait que nous sommes des Français à part entière !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 445 rectifié quinquies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 444 rectifié quinquies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 446 rectifié quinquies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 37
(Non modifié)
Le Gouvernement remet chaque année au Parlement un rapport précisant le montant des rémunérations des membres nommés au sein du Conseil constitutionnel, des autorités administratives et publiques indépendantes et des agences de l’État. – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. S’attaquer aux statuts particuliers est une vieille rengaine, je dirais même un chiffon rouge agité pour dénigrer, voire effacer des pans entiers de notre histoire, au cours desquels des luttes sociales ont été victorieuses. Ces luttes ont permis d’obtenir des garanties collectives afin de ne pas laisser l’individu seul et désemparé.
Après les cheminots et les postiers, c’est maintenant au tour des fonctionnaires ! Je me souviens de ce que disait Mme Parisot, l’ancienne présidente du Medef : « La vie est précaire, alors le travail doit l’être lui aussi. »
Cette philosophie est aujourd’hui appliquée à la fonction publique de manière dogmatique et dangereuse, puisque la stabilité de l’emploi public est le corollaire du temps long qui caractérise l’action publique, l’intérêt général, la permanence et la continuité de l’État.
Il serait à ce titre intéressant, puisque cette réforme est un copier-coller des ordonnances Travail, de se pencher plus sérieusement sur les conséquences de ces réformes sur la dégradation des conditions sociales et sur la démocratie sociale. Le nouveau monde que vous voulez nous imposer n’est-il pas en réalité un grand retour en arrière ?
La réforme que vous nous présentez est bien plus insidieuse que la suppression pure et simple du statut des fonctionnaires. Certes, elle ne supprime pas, mais elle introduit le ver dans le fruit.
En effet, la possibilité de recourir à des contractuels à la place de fonctionnaires placés sous un statut protecteur ouvre la voie au dépérissement de la fonction publique telle que nous la connaissons. Qui, demain, voudra passer un concours, alors que le même emploi sera potentiellement accessible par copinage ou complaisance politique, rompant ainsi avec la notion d’une fonction publique de carrière ?
Les ruptures conventionnelles et autres détachements d’office ouvrent parallèlement la voie à la suppression annoncée de 120 000 postes de fonctionnaires, à laquelle vous vous disiez pourtant opposé, monsieur le secrétaire d’État, en 2017…
Ce projet de loi porte donc une atteinte grave à notre morale républicaine, celle du mérite et de l’égalité d’accès aux emplois publics. Vous l’aurez compris – les amendements que nous avons déposés allaient évidemment dans le même sens –, nous voterons contre ce projet de loi qui organise la privatisation de l’appareil d’État et entretient la confusion sur les finalités de l’action publique.
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. Le groupe socialiste et républicain a examiné ce texte, en ayant à l’esprit le travail essentiel que réalisent chaque jour les fonctionnaires de l’État, des hôpitaux et établissements de santé et des collectivités territoriales. Ils sont nombreux, à l’heure actuelle, à s’exprimer au sujet de leurs conditions de travail ; ils essaient de se faire entendre, mais avec ce projet de loi, force est de constater que le Gouvernement et la majorité sénatoriale ne prennent pas en compte leur voix.
Cette réforme au forceps, imposée aux agents contre l’avis unanime des syndicats, dégradera durablement les conditions de travail de celles et ceux qui ont choisi de servir l’intérêt général en s’engageant dans le service public.
En agissant ainsi, le Gouvernement ne répond ni aux demandes des fonctionnaires ni à celles des usagers qui sont particulièrement attachés au service public et qui demandent plus de proximité et d’égalité d’accès.
Or, comme je l’avais souligné lors de la discussion générale, le service public, c’est le patrimoine de ceux qui n’en ont pas !
Certes, plusieurs amendements du groupe socialiste ont été adoptés. Les collaborateurs du Président de la République seront désormais contrôlés par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, lorsqu’ils partent dans le privé. Le remboursement de la « pantoufle » sera automatique. La pénalité financière sera obligatoire pour les employeurs publics qui ne respectent pas l’obligation de mettre en place un plan d’action pluriannuel en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
La mission sur le handicap que j’ai réalisée avec ma collègue Catherine Di Folco a aussi reçu un écho favorable, même si le Gouvernement ne s’est pas attelé à la mise en œuvre de l’ensemble de nos propositions.
Les sénateurs socialistes seront particulièrement vigilants à ce que ces dispositions ne soient pas écartées lors de la commission mixte paritaire.
Cependant, le compte n’y est pas ! L’esprit de ce texte reste particulièrement inquiétant. Le dialogue social sort considérablement affaibli. La santé au travail et la prévention des risques professionnels sont reléguées au second plan avec la suppression du CHSCT, le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.
Malgré ses grands discours sur la déontologie, le Gouvernement a refusé d’accroître les contrôles, qui visent à éviter les conflits d’intérêts, lors des mouvements entre la fonction publique et le secteur privé – nous souhaitions confier cette mission à la Haute Autorité.
Surtout, le Gouvernement, appuyé en cela par la majorité sénatoriale, a démultiplié le nombre de postes sur lesquels les fonctionnaires seront mis en concurrence avec des contractuels, aggravant au passage la précarité de ces derniers.
Autre symbole de précarité, le Gouvernement a créé un nouveau type de contrat – le contrat de projet – sans possibilité d’obtenir à terme un contrat à durée indéterminée ni d’être titularisé, sans délai de prévenance en cas de rupture anticipée et sans prime de précarité. Nous alertons sur ce CDD au rabais qui, demain, pourrait être généralisé à l’ensemble des salariés.
Derrière cet affaiblissement du statut, c’est l’objectif de suppression de 120 000 postes qui se dessine. Les dispositions de ce texte, en revenant sur les principes mêmes qui constituent la fonction publique, la mettent à mal. Nous nous y opposerons donc et ferons entendre notre voix en commission mixte paritaire pour sauvegarder autant que possible notre service public.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous arrivons au terme de ces débats, qui ont duré presque deux semaines, avec quelques autres textes intercalés. Nous y avons passé beaucoup de soirées. Ce texte n’a pas soulevé l’enthousiasme des foules ni celui de nos collègues. Pourtant, il est très important, car il touche à la fonction publique, une institution qui a une place dans l’histoire de la France, dans son fonctionnement et sa tradition. Le groupe du RDSE, dans sa diversité, laquelle implique une liberté de vote que beaucoup nous envient secrètement (Sourires.), va voter de manière diverse, mais la grande majorité de ses membres va s’abstenir, dans l’attente d’avancées et d’accords obtenus, peut-être, en commission mixte paritaire.
En conclusion, je veux remercier M. le secrétaire d’État, qui a fait preuve d’une grande technicité. Il est très souvent présent dans notre assemblée, à telle enseigne que je me demande s’il ne finira pas un jour au Sénat, lorsque ses fonctions gouvernementales auront cessé. (Sourires.) J’adresse également mes remerciements aux deux rapporteurs pour la qualité de leurs interventions, ainsi qu’à M. le président de la commission des lois, pour sa modération et sa pondération. Je salue enfin les présidents de séance, qui ont su activer les débats pour que nous terminions dans les délais, et les administrateurs de la commission des lois.
M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord vous dire que le groupe Union Centriste a particulièrement apprécié l’examen de ce texte. Nous avons apporté un certain nombre de contributions et nous voulons saluer sans réserve le travail des deux rapporteurs, Catherine Di Folco et Loïc Hervé, qui, je crois, se sont complètement investis dans l’examen de ce projet de loi. Ils ont apporté à la fois leur expérience et un regard tout à fait positif.
Je voudrais aussi saluer, monsieur le secrétaire d’État, votre implication dans l’examen de ce texte. Vous vous êtes vraiment attaché à répondre avec précision à l’ensemble de nos préoccupations, ce que nous avons beaucoup apprécié.
Le groupe Union Centriste se félicite de la flexibilité qui est donnée aux gestionnaires de la fonction publique – quelle qu’elle soit, hospitalière, territoriale ou d’État – pour recourir à différents modes de recrutement et de gestion des personnels. C’est indispensable, parce que – le président Delahaye le sait bien – il est impératif que nous puissions, demain, arriver à une meilleure maîtrise des dépenses publiques. Or une meilleure maîtrise des dépenses publiques, lorsque l’essentiel est constitué par des dépenses de personnel, nécessite justement l’existence d’outils adéquats à la disposition de l’ensemble des employeurs.
Je crois que les dispositions contenues dans ce texte, qui visent justement à permettre le recours à une contractualisation accrue, constituent un bon signal, une bonne orientation.
Le groupe Union Centriste apprécie aussi la simplification d’un certain nombre d’organisations paritaires. C’est vrai, le système était assez lourd jusqu’à présent, et il était devenu nécessaire d’améliorer l’efficacité du paritarisme et du dialogue avec les organisations syndicales.
Nous regrettons cependant, monsieur le secrétaire d’État, que nous n’allions pas plus loin en matière d’apprentissage. Le contrat de professionnalisation, à notre avis, devrait aussi pouvoir trouver sa place dans la fonction publique. Pour le moment, tel n’est pas le cas.
Enfin, il reste le grand chantier de la santé au travail, qui fera l’objet d’un projet de loi à venir.
Néanmoins, nous sommes attachés à ce texte et l’ensemble du groupe Union Centriste le votera.