Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Si le sujet est intéressant, il me paraît curieux d’organiser une concertation chaque année portant spécifiquement sur le thème évoqué par Mme Gréaume. On pourrait tout à fait envisager que la Conférence nationale de santé travaille de manière ponctuelle sur cette question dans le cadre d’une proposition ou d’un avis. Il ne me semble cependant pas opportun d’y affecter chaque année une large part des moyens de la Conférence nationale de santé alors que d’autres thèmes relatifs à la santé publique méritent tout autant de faire l’objet d’une concertation. En outre, l’article 10 bis A prévoit l’intégration d’un volet portant sur la qualité de vie au travail dans le projet social de chaque établissement de santé. La commission a donc émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Permettez-moi, madame la présidente, mes chers collègues, de vous faire part de quelques observations générales sur le titre Ier du projet de loi.
Le titre Ier vise tout d’abord à réformer la formation des professionnels de santé. Trois moments clés sont visés : l’entrée dans les études de santé – c’est l’objet de l’article 1er –, l’entrée dans le troisième cycle de médecine et le choix d’une spécialité – c’est l’article 2 – et la formation continue des professionnels de santé – c’est l’article 3.
Si les nouvelles orientations proposées recueillent le consensus des acteurs, elles ne constitueront pas le cœur des réformes qui seront mises en place. Les trois premiers articles se bornent en effet à l’affirmation de grands principes dont la traduction concrète est renvoyée à la voie réglementaire ou à l’ordonnance. Nous devons donc croire sur parole le Gouvernement quant aux modalités effectives de la réorganisation des études de santé. Comme je l’ai souligné, la communication gouvernementale autour de ces mesures apparaît pourtant partiellement trompeuse, et je crains que la réforme des études de santé ne fasse au total de nombreux déçus.
Sur ce premier volet, la commission des affaires sociales a choisi de ne pas retenir les propositions visant à inscrire le contenu de certaines parties de la formation des professionnels de santé dans la loi. Outre que ces matières ne relèvent pas du niveau législatif, l’adoption de telles dispositions pourrait être contre-productive, car on pourrait alors se demander ce qu’il adviendra de tout le contenu qui ne serait pas énuméré.
Le titre Ier comprend par ailleurs des mesures éparses touchant à l’organisation des carrières en santé. On y trouve notamment un toilettage du CESP et un élargissement de l’exercice en tant que médecin adjoint. La principale mesure est portée par l’article 6, qui vise à réformer l’emploi hospitalier.
Sur ma proposition, la commission des affaires sociales a complété ce titre par des mesures constituant une incitation forte à l’ancrage rapide des jeunes médecins dans un territoire et auprès d’une patientèle.
L’article 4 bis prévoit ainsi que ceux qui s’installeront dès la fin de leurs études bénéficieront d’une large exonération de cotisations sociales, quel que soit leur mode d’installation. Nous avons, dans le même temps et en conséquence, souhaité limiter l’exercice en remplacement à une période de trois ans sur l’ensemble de la carrière des médecins diplômés. Il s’agit là de propositions sur lesquelles nous pourrons continuer de travailler ensemble dans cet hémicycle. En tout état de cause, ces propositions ont été introduites dans cet article pour éviter que des mesures plus importantes de coercition ou de régulation ne soient évidemment proposées à d’autres articles.
En conséquence, nous sommes défavorables aux amendements visant au renforcement des dispositifs d’exercice alternatif à l’installation : la multiplication de ces outils pourrait au total avoir des effets délétères sur l’installation pérenne de médecins dans un territoire de santé.
Article 1er
I. – L’article L. 631-1 du code de l’éducation est ainsi rédigé :
« Art. L. 631-1. – I. – Les formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie et de maïeutique relèvent, par dérogation à l’article L. 611-1, de l’autorité ou du contrôle des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la santé et donnent lieu à la délivrance de diplômes au nom de l’État. Ces formations permettent l’orientation progressive de l’étudiant vers la filière la plus adaptée à ses connaissances, ses compétences, son projet d’études et ses aptitudes ainsi que l’organisation d’enseignements communs entre plusieurs filières pour favoriser l’acquisition de pratiques professionnelles partagées et coordonnées.
« Les capacités d’accueil des formations en deuxième et troisième années de premier cycle sont déterminées annuellement par les universités. Pour déterminer ces capacités d’accueil, chaque université prend en compte les objectifs pluriannuels d’admission en première année du deuxième cycle de ces formations. Ces objectifs pluriannuels, qui tiennent compte des capacités de formation, des besoins de santé et de l’évolution prévisionnelle des effectifs et des compétences des acteurs de santé du territoire, sont arrêtés par l’université sur avis conforme de l’agence régionale de santé ou des agences régionales de santé concernées. L’agence régionale de santé ou les agences régionales de santé consultent, au préalable, la conférence régionale de la santé et de l’autonomie ou les conférences régionales de la santé et de l’autonomie concernées. Les objectifs pluriannuels d’admission en deuxième et troisième année du premier cycle sont définis au regard d’objectifs nationaux pluriannuels relatifs au nombre de professionnels à former établis par l’État pour répondre aux besoins du système de santé, réduire les inégalités territoriales d’accès aux soins et permettre l’insertion professionnelle des étudiants.
« L’admission en deuxième ou en troisième année du premier cycle des formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie et de maïeutique est subordonnée à la validation d’un parcours de formation antérieur dans l’enseignement supérieur et à la réussite à des épreuves, qui sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Des candidats, justifiant notamment de certains grades, titres ou diplômes, ainsi que des étudiants engagés dans les formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie ou de maïeutique et souhaitant se réorienter dans une filière différente de leur filière d’origine, peuvent être admis en deuxième ou en troisième année du premier cycle des formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie et de maïeutique, selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’État.
« Ces modalités d’admission garantissent la diversité des parcours des étudiants.
« II. – Un décret en Conseil d’État détermine :
« 1° La nature des parcours de formation ainsi que les grades, titres et diplômes permettant d’accéder en deuxième ou, selon les cas, en troisième année du premier cycle des formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie ou de maïeutique ;
« 2° Les conditions et modalités d’admission ou de réorientation en deuxième ou troisième année du premier cycle des formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie ou de maïeutique ;
« 3° Les modalités de définition des objectifs nationaux pluriannuels mentionnés au I ;
« 3° bis Les modalités de définition d’objectifs de diversification des voies d’accès à la deuxième ou la troisième année du premier cycle des formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie ou de maïeutique ;
« 4° Les modalités d’évaluation des étudiants et les conditions de délivrance des diplômes ;
« 5° Les modalités de fixation du nombre d’élèves des écoles du service de santé des armées pouvant être accueillis en deuxième et troisième années de premier cycle des formations de médecine, de pharmacie et d’odontologie et leur répartition par université ;
« 6° Les modalités de fixation des objectifs d’admission en première année du deuxième cycle des formations de médecine, de pharmacie et d’odontologie des élèves des écoles du service de santé des armées et leur répartition par université ainsi que les conditions dans lesquelles ces nombres sont pris en compte par les universités et les agences régionales de santé pour la détermination des objectifs d’admission en première année du deuxième cycle des formations de médecine, de pharmacie et d’odontologie ;
« 7° Les conditions et modalités d’accès dans les formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie et de maïeutique pour les titulaires d’un diplôme d’un État membre de l’Union européenne, d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen, de la Confédération suisse ou de la Principauté d’Andorre ;
« 8° Les conditions et modalités d’accès dans les formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie et de maïeutique pour les titulaires d’un diplôme des pays autres que ceux cités au 7° du présent II ;
« 9° Les conditions dans lesquelles les titulaires d’un diplôme sanctionnant des études de santé validé à l’étranger permettant d’exercer dans le pays de délivrance peuvent postuler aux diplômes français correspondants. »
II. – (Non modifié) L’article L. 631-2 du code de l’éducation est abrogé.
III. – L’article 39 de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche est ainsi rédigé :
« Art. 39. – L’État peut, à titre expérimental et pour une durée de six ans à compter de la rentrée universitaire 2020, autoriser l’organisation des formations relevant du titre III du livre VI de la troisième partie du code de l’éducation selon des modalités permettant de renforcer les échanges entre les formations, la mise en place d’enseignements en commun et l’accès à la formation par la recherche.
« Les conditions de mise en œuvre du premier alinéa du présent article sont définies par voie réglementaire. Elles précisent notamment les conditions d’évaluation des expérimentations en vue d’une éventuelle généralisation.
« Au cours de la sixième année de l’expérimentation, les ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la santé présentent au Parlement un rapport d’évaluation des expérimentations menées au titre du présent article. »
IV. – (Non modifié) Le second alinéa de l’article L. 632-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° À la fin de la première phrase, les mots : « arrêtés du ministre chargé de l’enseignement supérieur et du ministre chargé de la santé » sont remplacés par le mot : « décret » ;
2° La seconde phrase est supprimée.
V. – Le titre III du livre IV de la première partie du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le l du 2° de l’article L. 1431-2 est complété par les mots : « et se prononcent, dans les conditions prévues par le code de l’éducation, sur la détermination par les universités des objectifs pluriannuels d’admission en première année du deuxième cycle des études de médecine, de pharmacie, d’odontologie et de maïeutique » ;
2° Après la deuxième phrase du troisième alinéa de l’article L. 1432-4, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Elle est consultée dans les conditions prévues au deuxième alinéa du I de l’article L. 631-1 du code de l’éducation. »
VI. – (Non modifié) Au 3° du V de l’article L. 612-3 du code de l’éducation, les mots : « ou à une première année commune aux études de santé » sont supprimés.
VII. – (Non modifié) Les I, II et III sont applicables à compter de la rentrée universitaire 2020.
Les étudiants ayant suivi soit une première année commune aux études de santé prévue à l’article L. 631-1 du code de l’éducation, soit une première année commune aux études de santé adaptée prévue au 1° bis de l’article 39 de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, soit une à trois années d’un premier cycle universitaire adapté conduisant à un diplôme national de licence prévues au 2° du même article 39, avant la publication de la présente loi, et qui auraient eu, en application des dispositions antérieures à la présente loi, la possibilité de présenter pour la première ou la seconde fois leur candidature à l’accès en deuxième année des études médicales, pharmaceutiques, odontologiques ou maïeutiques conservent cette possibilité selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État.
VIII. – (Non modifié) Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de la réforme du premier cycle des études mentionnées à l’article L. 631-1 du code de l’éducation en 2021 et en 2023. Ce rapport porte notamment sur les informations apportées aux lycéens et aux étudiants concernant les modalités d’accès aux études de santé, le taux de succès des candidats selon la modalité d’accès et la diversité des profils d’étudiants admis dans les études médicales. Le rapport transmis en 2023 présente en outre une analyse de la réussite des étudiants à l’issue de leur premier cycle.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. L’article 1er portant sur la réforme des études de santé en premier cycle sera sans doute l’un des plus emblématiques de ce projet de loi, l’un des plus médiatisés également. Et pour cause, il correspond à une urgence : former plus de médecins pour faire face à la baisse démographique et répondre aux besoins de santé sur tous les territoires, même si ses effets ne se font sentir que dans dix ans. Vous vous étonnez, madame la ministre, que tous les pays du G7 vivent la même pénurie de médecins, mais tous les pays du G7 mènent la même politique libérale et l’amplifient ! C’est une mauvaise politique qu’il faut changer. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé une motion tendant à opposer la question préalable, qui a été rejetée.
Vous acceptez enfin de supprimer le numerus clausus, ce qui va dans le bon sens. Avec les syndicats, nous dénonçons depuis longtemps ce couperet, convaincus que ce mode de sélection, d’une part, est responsable de la pénurie de professionnels de santé que nous connaissons actuellement et, d’autre part, que la première année commune aux études de santé, la Paces, constitue un véritable cauchemar pour les étudiants, et un gâchis d’intelligence et de compétences.
Cette ultra-sélection, synonyme d’échec pour 75 % des étudiants, ne garantissait en rien la qualité des futurs professionnels, notamment dans l’approche humaine des patients, tant s’en faut ! C’était même l’un des défauts unanimement reconnus de ce système.
Malheureusement, comme l’a souligné M. le rapporteur, il ne s’agit pas d’une véritable suppression du numerus clausus puisque les capacités d’accueil et de formation seront déterminées annuellement par les universités, en fonction d’objectifs nationaux pluriannuels établis par l’État et sans moyens supplémentaires.
Comment pensez-vous, mesdames les ministres, que les universités pourront accueillir et former plus d’étudiants en médecine, maïeutique, odontologie et pharmacie dans ces conditions ? En fait, il s’agit d’une proposition somme toute limitée, puisqu’elle permettra, selon vous, madame la ministre, une augmentation maximale de 20 % des effectifs, même si j’ai bien compris que vous ne teniez pas à ce que l’on rappelle ces chiffres.
Je crains qu’il ne s’agisse donc plutôt d’un desserrement du numerus clausus, comme cela se pratique depuis quelques années, et d’une régionalisation de ce numerus clausus. Une fois de plus, vous restez au milieu du gué.
Enfin, je ne saurais terminer mon propos sans souligner que la diversification des profils et des parcours est une mesure positive, à même de favoriser une prise en charge plus humaine des patients, ce que nous soutiendrons sans réserve !
Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, avant d’entamer l’examen des amendements sur l’article 1er visant à réformer le numerus clausus, je rappellerai que l’on évoquait déjà, lors de sa mise en place, les capacités des universités pour former les futurs médecins afin de justifier l’instauration de la sélection dans les études de médecine. L’argument des moyens matériels et des places de stage avait été invoqué pour limiter le nombre d’étudiants.
À l’époque déjà, les parlementaires communistes dénonçaient une pratique qui consiste à créer la pénurie pour mieux justifier les mesures d’élimination. Ils demandaient une augmentation constante et prolongée du nombre des étudiants à former. Malheureusement, pour former, il aurait fallu se donner davantage de moyens financiers et augmenter le taux d’encadrement. Je parle, évidemment, du nombre de professeurs nommés par faculté.
J’ai rencontré dernièrement le doyen de la faculté de médecine. Il me disait que, même en supprimant le numerus clausus, ce qui est selon moi une bonne chose, les choses ne s’amélioreraient pas pour autant faute de créer davantage de postes de professeurs pour former les futurs médecins et professionnels de santé. Si nous souhaitons réussir demain cette réforme, il faudra déployer, que vous le vouliez ou non, madame la ministre, des moyens supplémentaires !
Or nous sommes très inquiets quand nous entendons le Président de la République annoncer que le système restera sélectif et dire qu’il n’est pas question de rogner sur l’excellence de la formation. En l’absence de moyens financiers et humains supplémentaires, arriverons-nous à combler le déficit de professionnels de santé ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Gréaume, sur l’article.
Mme Michelle Gréaume. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, alors que la pénurie de médecins contraint plus de 5 millions de nos concitoyens à vivre dans un désert médical, nous ne formons pas assez de futurs professionnels. Le système est tel qu’un grand nombre de jeunes sont éjectés de la formation médicale au cours des deux premières années d’études. Si la disparition du numerus clausus nous satisfait, de nombreuses interrogations demeurent.
Ce sont les facultés de médecine et les ARS qui auront désormais la main sur la formation des futurs médecins, et détermineront les effectifs d’étudiants en fonction des besoins des territoires. Mais comment s’organisera la nouvelle formation ? Le seul critère de débouchés locaux ne risque-t-il pas de remettre en cause le caractère national du diplôme ? Tiendra-t-il compte de la mobilité des étudiants, en France ou à l’étranger, en fonction de leurs souhaits ou de leurs projets professionnels ?
Se pose surtout la question des moyens financiers dont il faut doter les universités pour former plus et mieux. Travailleront-elles à moyens constants ou des moyens supplémentaires seront-ils engagés ? Qu’en est-il, enfin, de la question de la réforme globale des études de médecine ?
La suppression du numerus clausus est une bonne nouvelle, mais les enjeux de la démocratisation des études médicales et de la régulation de l’installation des médecins ne sont que partiellement traités.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, sur l’article.
M. Bernard Jomier. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, l’article 1er vise à instaurer un certain nombre de mesures auxquelles nous ne pouvons qu’être favorables. La réforme des modalités d’admission en deuxième année d’études médicales en fait partie. En effet, la suppression de la Paces met fin à un système organisé sur l’échec des étudiants, et c’est une bonne chose. Néanmoins, j’attire l’attention du Gouvernement : il est nécessaire que les nouvelles modalités de sélection soient garantes de l’égalité des chances entre les candidats, ce que permettait l’anonymat des épreuves qui prévalait jusqu’alors. Cette notion ne doit pas disparaître de nos textes.
Venons-en à la suppression du numerus clausus. Cette suppression serait la mesure phare permettant de répondre à la problématique de la désertification médicale. Or, si nous n’y sommes pas opposés, rien ne prouve que le nombre d’étudiants formés sera à la hausse et que la donne changera significativement. Certaines universités n’ont-elles pas récemment refusé d’augmenter le nombre d’inscriptions d’étudiants au motif que cette hausse excédait leurs capacités de formation ?
Le numerus clausus, par ailleurs, est passé de 3 200 à 9 300 places en dix ans, ce qui n’a pas suffi à enrayer le phénomène de désertification médicale, car il répond également à d’autres causes. Sans augmentation du budget alloué aux universités, il est illusoire de tabler sur un accroissement significatif du nombre d’étudiants en médecine et de considérer que cette mesure constituera une réponse satisfaisante au problème des déserts médicaux.
Enfin, on ne peut pas donner la priorité aux capacités de formation des universités sur les besoins de santé de la population dans la détermination du nombre de professionnels à former. C’est mettre la question des moyens avant celle de la finalité. Voilà pourquoi nous souhaitons corriger ce texte.
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Piednoir, sur l’article.
M. Stéphane Piednoir. Sans doute les études de santé méritent-elles d’être réformées. De nombreux reproches ont été exprimés aujourd’hui, notamment sur la Paces, véritable mécanique pour sélectionner parmi les 40 000 étudiants qui s’inscrivent ceux qui sont à même de poursuivre leurs études. Le QCM systématique comporte bien des travers, comme cela a été dénoncé à plusieurs reprises.
Sans doute convient-il d’introduire dans la formation aux métiers de santé d’autres disciplines pour améliorer le contact avec la patientèle ou apprendre à gérer un cabinet. Sans doute faut-il trouver un moyen pour que ces étudiants ne perdent pas deux années. Car aujourd’hui, un élève qui ne réussit pas sa première année tente une deuxième fois sa chance, au risque d’en rester à la case post-bac.
Or ce nouveau système qu’il faudrait inventer existe déjà à l’université d’Angers : c’est le système PluriPass. Plutôt que de mettre sur pied une nouvelle usine à gaz, il aurait été préférable de s’inspirer de ce système qui fonctionne très bien puisqu’il présente un taux d’insertion et de réussite exemplaire.
Par ailleurs, je m’inscris en faux par rapport à ce qui a été dit sur le profil des étudiants qui réussissent. On a dit qu’ils avaient une formation scientifique : c’est heureux s’ils doivent soigner les gens ! On a aussi dit qu’ils obtenaient souvent le bac avec une mention bien ou très bien : tant mieux s’ils réussissent ! Comment peut-on reprocher à de bons élèves de réussir ? Devront-ils un jour s’excuser de leurs résultats ?
J’appelle aussi à une certaine vigilance sur la diversification des accès. Les « mineures santé » devront absolument garantir l’acquisition de connaissances solides et d’une bonne capacité à soigner. C’est indispensable.
Mme Laurence Cohen. Ce n’est pas exclusif !
M. Stéphane Piednoir. Pour avoir été professeur principal en terminale, je sais que beaucoup de vœux sont exprimés, mais que tous les élèves ne peuvent pas réussir dans toutes les filières !
Mme la présidente. La parole est à Mme Angèle Préville, sur l’article.
Mme Angèle Préville. Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, je tiens à alerter sur un sujet d’importance. Nous le savons, mieux vaut une tête bien faite qu’une tête bien pleine, et ce d’autant plus quand il s’agit de la formation de nos futurs médecins. C’est pourquoi, sans vouloir ajouter d’injonctions supplémentaires, je demande que la formation des médecins et des professionnels de santé intègre un important module scientifique de santé par les plantes.
Ayant fait partie l’an dernier de la mission d’information du Sénat sur le développement de l’herboristerie et des plantes médicinales, j’ai pu mesurer combien la médecine par les plantes non seulement est promise à un grand avenir au vu des récentes découvertes scientifiques, mais surtout est plébiscitée par nos concitoyens, plus particulièrement par nos concitoyennes qui, pour avoir expérimenté sur elles-mêmes de genre de médecine, appellent de leurs vœux des législations favorables à la généralisation des pratiques douces et plus respectueuses de leur santé.
Les scandales sanitaires provoqués par certains médicaments ne sont pas étrangers à cette prise de conscience collective. La médecine par les plantes s’inscrit par ailleurs dans le désir de développement durable que nous voulons tous. J’insiste, car c’est là qu’est notre avenir. Les futurs médecins, qui n’exerceront que dans une dizaine d’années, doivent absolument être formés à ces pratiques vertueuses, non seulement pour le bien des populations, mais aussi pour le bien la nature que nous devons préserver, car la nature, c’est aussi nous, bien évidemment !
À toutes fins utiles, je rappelle que les résidus de médicaments que nous rejetons dans les eaux usées ne sont, pour la plupart d’entre eux, ni détruits, ni retenus, ni filtrés. Ils polluent donc de manière insidieuse, mais pérenne et grave, les eaux et les sols, et par là même toute la nature ! Le préjudice est terrible. On commence tout juste à en mesurer les effets sur notre santé. N’a-t-on pas trouvé des traces d’antibiotiques et d’anti-inflammatoires dans les moules et les poissons ? N’assiste-t-on pas à la féminisation des poissons ? Nous devons nous montrer à la hauteur des enjeux et de nos responsabilités : améliorer notre système de santé, c’est aussi permettre à la médecine par les plantes de se développer !
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, sur l’article.
M. Daniel Chasseing. La réforme du premier cycle des études de médecine est un élément important du projet. Nous partageons la volonté du Gouvernement de diversifier les profils des médecins. Il s’agit d’humaniser la formation de nos médecins en supprimant la forme de sélection par l’échec qui caractérise actuellement l’admission en deuxième année. Nous le savons, en Paces, l’échec s’élève à 80 % alors que 90 % des étudiants ont eu le bac S avec mention. Le système de réorientation actuel après un échec est quasi inopérant, ce qui témoigne d’un dysfonctionnement majeur, et coûteux pour les finances publiques, de cette filière particulièrement sélective.
Bien sûr, il est nécessaire d’opérer une sélection. Nous devons être vigilants sur le nombre d’étudiants qui sera déterminé par l’ARS et l’université. Certes, il doit être en augmentation, madame la ministre, mais il importe d’accroître aussi le nombre des stages. Je pense notamment aux stages de découverte décentralisés pour le premier et le deuxième cycle, aux stages de formation dans les hôpitaux périphériques pour le troisième cycle et à la possibilité d’exercer comme médecin adjoint dans la dernière année du troisième cycle. Nous sommes donc favorables aux propositions de Mme le ministre de l’enseignement supérieur en ce sens. Pour toutes ces raisons, le groupe Les Indépendants – République et Territoires soutiendra pleinement le projet du Gouvernement de réformer l’accès aux études de médecine.