Mme la présidente. L’amendement n° 115 rectifié bis, présenté par MM. Karam, Patient et Lévrier et Mme Rauscent, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 423-23 du code de l’environnement est ainsi rédigé :
« Art. L. 423-23. – Par dérogation aux articles L. 423-12 et L. 423-19, la validation du permis des résidents à titre principal en Guyane est gratuite.
« Les articles L. 423-16 à L. 423-18 ne sont pas applicables à cette validation.
« La validation peut résulter du visa annuel du permis par le maire de la commune de résidence de l’intéressé.
« Le représentant de l’État dans le territoire peut accorder un visa irrégulièrement refusé ou annuler un visa irrégulièrement accordé. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Antoine Karam.
M. Antoine Karam. Cet amendement tend à s’inscrire dans la continuité du précédent, en prévoyant la gratuité de cette validation départementale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. L’objectif de ce régime créé en 2017 était de proposer un encadrement de la vente et de la détention d’armes dans ce territoire, jusque-là dépourvu de vrai contrôle en la matière. Il semble toutefois poser problème.
Nous souhaitons donc entendre l’avis du Gouvernement sur ces trois amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Je voudrais prendre quelques minutes pour répondre au sénateur Karam, qui soulève une question importante.
Vous l’avez signalé, monsieur le sénateur, c’est la loi de 2017 pour l’égalité réelle outre-mer qui a instauré ce permis de chasse, à la suite de l’adoption d’un amendement que vous aviez déposé, me semble-t-il.
Ce permis de chasse vise avant tout à contrôler l’achat et la détention des armes en en faisant le seul moyen d’accès légal aux armes en Guyane. La délivrance du titre de permis de chasser est gratuite jusqu’en 2020 et donnera lieu par la suite à une validation annuelle payante.
Si plusieurs associations favorables au permis se sont créées, un collectif d’opposants s’est constitué à l’automne 2017, et en décembre 2018, les élus de la collectivité et les parlementaires ont demandé au Gouvernement un moratoire.
Simplement, la Guyane fait face à une insécurité chronique. Avec environ quarante homicides par an, ce département est le plus meurtrier de France. Or quelque 80 % des vols à main armée sont commis à l’aide d’une arme de chasse à canon scié.
L’instauration du permis de chasser en Guyane vise avant tout à contrôler l’achat et la détention des armes, la détention de ce permis devenant le seul moyen d’accès aux armes. Pour bien contrôler cet accès, tout le dispositif devrait avoir vocation à être déployé dès 2020, avec l’examen préalable à la délivrance du permis et sa validation annuelle, de manière à vérifier que seuls les chasseurs accèdent aux armes.
Ce dispositif permet d’interdire la chasse à toute personne interdite d’accès et de détention d’arme. Il est déjà tout à fait spécifique à la Guyane. Ainsi, outre les possibilités de valider un permis au niveau départemental ou au niveau national pour pouvoir chasser sur le territoire correspondant, la loi ÉROM a ouvert la possibilité d’une validation communale. Celle-ci est adaptée aux communes autochtones et à la superficie des communes. Son montant, déterminé par chacune d’entre elles, est plafonné à 22 euros.
Les communes où sont majoritairement présentes des communautés pratiquant une chasse traditionnelle de subsistance sont bien évidemment invitées par le Gouvernement à prévoir une validation gratuite, ce qui est tout à fait possible.
Depuis sa mise en place, en février 2018, le permis de chasse rencontre l’adhésion de la majorité des chasseurs, plus de 5 700 demandes ayant été reçues et 5 300 permis ayant déjà été délivrés sur tout le territoire guyanais.
Dès lors, le Gouvernement ne souhaite pas supprimer ou reporter sa mise en place, qui correspond à une avancée importante en matière de contrôle de l’accès aux armes et donc de sûreté publique. Mais il demeure attentif aux éventuelles difficultés que peut susciter la mise en œuvre de la seconde phase, après 2020.
Afin d’améliorer encore le dispositif, notamment pour les populations qui utilisent la chasse comme moyen de subsistance, le Gouvernement est prêt à travailler à une évolution de la loi pour bien rappeler que la validation communale décidée par les maires peut être gratuite et pour permettre aux chasseurs qui le souhaitent de valider leur permis communal pour plus de deux communes limitrophes.
Dès lors, le Gouvernement n’est pas favorable à ces trois amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Karam, pour explication de vote.
M. Antoine Karam. Je perçois ici comme une méconnaissance de notre territoire, et c’est regrettable. La situation outre-mer et dans mon département n’est pas la même qu’en France hexagonale. En Guyane, il est difficile de circuler, et certaines populations sont complètement isolées. Je l’ai expliqué, les populations riveraines des fleuves, qui représentent plusieurs dizaines de milliers de personnes, vivent de la chasse.
Oui, je reconnais que c’est moi qui ai proposé l’instauration de ce permis, dans un contexte d’insécurité. Sauf que beaucoup de gens désormais titulaires de ce permis n’ont jamais chassé de leur vie, celui-ci leur donnant simplement la possibilité d’acheter un fusil pour se protéger. Voilà la situation.
Madame la secrétaire d’État, vous vous êtes montrée intransigeante, alors que, selon moi, un compromis aurait été possible. Chacun assumera ses responsabilités. Mais, je tiens à vous le dire, la tension restera très vive sur notre territoire et pour assurer la paix civile, il faudra recourir à d’autres méthodes. Je regrette profondément que nous ne soyons pas parvenus à un compromis.
Mme la présidente. La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.
M. François Patriat. Pour ma part, je crois au droit à la différenciation. J’ai longuement évoqué avec Antoine Karam et Georges Patient la situation des chasseurs en Guyane.
C’est un fait, la chasse n’a pas dans ce département la même signification que pour beaucoup de chasseurs ici, pour laquelle elle est sport, un loisir ou un mode de vie. Là-bas, c’est souvent un moyen de subsistance et de survie.
Qu’il y ait des problèmes de délinquance importants, je l’entends bien. Que les gens prennent un permis de chasse uniquement pour pouvoir acquérir un fusil, afin de se défendre, ou pour autre chose, je l’entends aussi. Que le Gouvernement ait besoin de contrôler la détention d’armes, je le comprends, mais il existe d’autres moyens. La chasse, je le répète, est en Guyane un moyen de subsistance. Sans compter que, là-bas, les communes sont d’une superficie incomparable à celle des communes métropolitaines.
Madame la secrétaire d’État, pour une fois, je ne suivrai pas l’avis du Gouvernement et je voterai donc l’amendement d’Antoine Karam, qui me paraît empreint d’une grande lucidité et qui prend en compte les réalités du terrain.
Mme la présidente. Quel est, maintenant, l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Je me rallie à la position du Gouvernement, madame la présidente.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel est ainsi inséré, dans le projet de loi, après l’article 3, et les amendements nos 114 rectifié bis et 115 rectifié bis n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 30 rectifié, présenté par MM. Menonville, Castelli, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mme Costes et MM. Gabouty, Gold, Guérini, Léonhardt, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les communes peuvent souscrire une convention avec les fédérations départementales ou interdépartementales des chasseurs pour faire réaliser, par les agents de développement, certaines missions relevant de la police municipale mentionnées à l’article L. 2212-2 ».
La parole est à M. Franck Menonville.
M. Franck Menonville. Les moyens dont disposent les petites communes rurales ne leur permettent pas toujours de financer la création d’une police municipale.
Cet amendement tend à faire bénéficier aux communes qui souscrivent une convention avec la fédération de chasseurs d’agents de développement chargés d’intervenir pour la régulation de certaines espèces nuisibles, la divagation et l’errance des animaux domestiques, la circulation sur les chemins ruraux et la collecte des animaux sauvages morts.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. La commission est défavorable à la possibilité de transférer, par convention, des missions de police municipale à des agents de droit privé, même dépositaires de prérogatives de puissance publique limitées.
J’émets donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 30 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 3 bis (nouveau)
Le troisième alinéa de l’article L. 424-2 du code de l’environnement est remplacé par sept alinéas ainsi rédigés :
« Des dérogations peuvent être accordées, s’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante et à la condition du maintien dans un bon état de conservation des populations migratrices concernées :
« – pour prévenir les dommages importants aux cultures, au bétail, aux forêts, aux pêcheries et aux eaux ;
« – pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la capture, la détention ou toute autre exploitation judicieuse de certains oiseaux en petites quantités ;
« – dans l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques ;
« – dans l’intérêt de la sécurité aérienne ;
« – pour la protection de la flore et de la faune ;
« – pour des fins de recherche et d’enseignement, de repeuplement, de réintroduction ainsi que pour l’élevage se rapportant à ces actions. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 48 rectifié est présenté par MM. Temal, Antiste et J. Bigot, Mmes Blondin et Conconne, MM. Dagbert et Daudigny, Mmes Grelet-Certenais, Perol-Dumont et Préville, M. Tissot, Mme Tocqueville et M. Vallini.
L’amendement n° 171 est présenté par M. Gontard, Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Rachid Temal, pour présenter l’amendement n° 48 rectifié.
M. Rachid Temal. À l’heure où l’on parle de biodiversité en danger et où le Gouvernement s’engage à agir en faveur de la protection de l’environnement, cet article, paradoxalement, va à contresens de ces objectifs en permettant, sur dérogation, la chasse d’oiseaux migrateurs en dehors des périodes d’ouverture de la chasse et pendant leur période de retour vers leur lieu de nidification.
Cet article va par ailleurs plus loin que l’actuel code de l’environnement, en incluant dans la liste des motifs permettant cette dérogation des sujets qui ne sont pas liés à la protection de l’environnement, tels que la sécurité aérienne ou encore l’élevage.
Il convient donc de supprimer cet article, qui va à contresens de la plus essentielle des priorités de notre temps : la préservation de l’environnement et de la biodiversité.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 171.
M. Pierre Ouzoulias. Je dois excuser mon collègue Guillaume Gontard, qui a dû regagner son département.
Je ne reprendrai pas l’argumentaire de notre collègue Rachid Temal, auquel je souscris complètement. J’ajoute juste que, en quinze ans, quelque 60 % des animaux sauvages ont disparu. Aussi, ce n’est vraiment pas le moment de déroger à un certain nombre de règles européennes qui visent à favoriser la biodiversité, ce qui est précisément l’objet du projet dont nous discutons.
C’est pourquoi nous proposons, nous aussi, d’abroger cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Cet article a été introduit en commission, afin de reprendre les dispositions de l’article 16 du projet de loi portant suppression de surtranspositions de directives européennes en droit français, dont la suite de l’examen est incertaine. Il permet de transposer pleinement en droit interne les motifs de dérogation prévus par la directive Oiseaux en ce qui concerne la chasse des populations migratrices d’oiseaux sauvages.
À défaut, nous ne disposerions pas dans notre droit de toutes les marges de manœuvre permises dans le cadre européen. En outre, je précise que ces dérogations sont rigoureusement encadrées par deux conditions cumulatives : l’absence d’alternative satisfaisante et l’état de bonne conservation des espèces concernées.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques de suppression.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 48 rectifié et 171.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3 bis.
(L’article 3 bis est adopté.)
Article 3 ter (nouveau)
Le troisième alinéa de l’article L. 424-4 du code de l’environnement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les modes de chasse consacrés par les usages traditionnels à caractère régional appartiennent au patrimoine cynégétique national. À ce titre, ils sont reconnus et préservés. »
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 12 rectifié est présenté par MM. Dantec, Corbisez et Labbé.
L’amendement n° 85 est présenté par le Gouvernement.
L’amendement n° 172 est présenté par M. Gontard, Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l’amendement n° 12 rectifié.
M. Ronan Dantec. Cet amendement tend à en revenir à la rédaction initiale de l’article L. 424-4 du code de l’environnement. Son alinéa 3 prévoit, conformément aux dispositions de la directive européenne du 30 novembre 2009, la possibilité pour le ministre chargé de la chasse d’autoriser la chasse de certains oiseaux de passage en petites quantités dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective.
Peut-être le débat nous éclairera-t-il, mais je me suis demandé quel intérêt pouvaient avoir ceux qui représentent ici une partie des chasseurs – pas tous les chasseurs ! – à insérer cet article 3 ter nouveau, dont je vous rappelle les termes : « Les modes de chasse consacrés par les usages traditionnels à caractère régional appartiennent au patrimoine cynégétique national. À ce titre, ils sont reconnus et préservés. » Cela signifie que des fédérations départementales vont mettre en place des formations à la chasse à la glue – au hasard…
Nous l’avons dit-on en introduction de ce débat sur la chasse, le nombre de chasseurs a diminué de moitié en quelques décennies, un tiers des chasseurs ont plus de soixante-cinq ans. Or n’importe quelle photo de chardonneret avec les plumes collées dissuadera à jamais des dizaines de jeunes de prendre un fusil. Cela fait un mal de chien à la chasse !
Pourquoi de tels articles, qui ruinent toutes les politiques de communication tendant à présenter les chasseurs comme les premiers écolos de France ? Tout cela pour quelques dizaines de chasseurs, dont le nombre diminue constamment, et pour une activité qui ne représente rien pour l’économie et la culture de la chasse… Au regard des intérêts du monde de la chasse, j’irai presque jusqu’à qualifier cet article de masochiste.
Depuis le début de nos débats, j’ai à cœur d’aider les chasseurs à rester suffisamment nombreux, pour leur permettre de réguler notamment les populations de sangliers et de quelques autres espèces. J’attends donc des éclaircissements en présentant cet amendement de suppression de l’article.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour présenter l’amendement n° 85.
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Il me semble que la précision apportée à cet article n’est pas utile, l’article L. 424-4 du code de l’environnement permettant au ministre chargé de la chasse d’autoriser et d’encadrer ces pratiques, qui ont déjà une valeur législative.
C’est la raison pour laquelle nous présentons cet amendement de suppression.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 172.
M. Pierre Ouzoulias. Si vous me le permettez, madame la présidente, je défendrai en même temps l’amendement n° 173.
Ce dont il est question ici, c’est aussi de la capacité des chasseurs à cibler les gibiers. Or, dans le cas de la chasse à la glue, tout le monde l’a compris, il y a aucune sélectivité : quand on répand de la glue sur une branche, on ne choisit pas les oiseaux qu’on va tuer. Et j’ai rappelé quelle était la problématique de la disparition de certaines espèces.
Comme l’a dit avec force M. Dantec, nous défendons la chasse, une certaine forme de chasse. Ces amendements visent à interdire des pratiques qui ne sont plus compréhensibles par une large part de la population et qui remettent même en cause les fondements de la chasse. Ce sont vraiment des amendements de bon sens.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Cet article a été inséré en commission sur l’initiative de nos collègues Jean-Noël Cardoux et Claude Bérit-Débat, en vue de réaffirmer l’existence des modes de chasse traditionnels. Il s’agit de pratiques spécifiques à certains territoires qui présentent des enjeux culturels très, très, très forts pour ceux-ci.
La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 12 rectifié, 85 et 172.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 173, présenté par M. Gontard, Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le cinquième alinéa de l’article L. 424-4 du code de l’environnement est ainsi rédigé :
« La chasse à la glu ou à la colle est interdite. »
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.
M. Jean-Noël Cardoux. S’agissant de la chasse à la glu, qui fait polémique depuis quelques années, je rappellerai qu’il s’agit d’une chasse régionale limitée au sud-est de la France.
J’ai le sentiment d’être projeté quelques années en arrière, quand le même débat avait lieu à l’occasion de la discussion du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. J’avais alors expliqué en détail les conditions de fonctionnement de cette chasse. Au contraire de ce qui a été dit, celle-ci est autorisée par une dérogation européenne, ainsi que le Conseil d’État, saisi par la Ligue de la protection des oiseaux, l’a confirmé.
Il s’agit d’une chasse individuelle pratiquée sur autorisation préfectorale, avec des quotas imposés, qui consiste à capturer des oiseaux, essentiellement des grives et des merles, qui servent ensuite d’appelants et qui ne sont donc pas tués.
Le chasseur a l’obligation d’être présent dans sa cabane pendant que les gluaux sont posés et d’intervenir immédiatement dès qu’un oiseau est pris pour le désengluer. Il conserve ses prises pour les utiliser comme appelants lors de ses chasses. C’est une pratique très marginale, et soumise à des quotas très restreints.
S’agissant des dégâts causés sur certains oiseaux, il est vrai que cela peut se produire, mais, pour reprendre un exemple que j’ai déjà cité, les associations qui capturent au filet des oiseaux à des fins de baguage et de recherche provoquent des dégâts, par exemple des ailes cassées, qui ne sont pas moindres que ceux qui découlent de la chasse à la glu.
Je le répète, cette chasse est tout à fait confidentielle ; elle est pratiquée au sud-est de la France par des chasseurs de condition modeste dont c’est la passion. Leur seule richesse est leur connaissance de la nature, et je suis surpris qu’un représentant du parti communiste français veuille priver ces gens de ce qui est toute leur vie ! (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mme Éliane Assassi. Cette sortie facile indique que vous êtes à bout d’arguments !
Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Je me permettrai de considérer que le développement de Jean-Noël Cardoux est quelque peu faible, pour dire le moins… En effet, si cette pratique est si minoritaire, pourquoi insister absolument pour lui consacrer un alinéa, alors qu’elle est déjà autorisée ? Il y a là une contradiction.
On sent bien qu’il y a là quelque chose d’identitaire, mais il ne me semble pas que cette chasse porte aujourd’hui l’enjeu culturel qu’a décrit M. le rapporteur.
Monsieur Cardoux, si vous tenez tant à défendre les identités régionales, je vais déposer une proposition de loi sur l’enseignement de haut niveau des langues régionales et je compte sur vous pour lui consacrer le même enthousiasme et le même engagement ! Je ne suis pas certain que ce serait le cas, alors que, sur ce sujet, les enjeux culturels sont autrement plus importants.
Je voterai bien sûr l’amendement de notre collègue Guillaume Gontard et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. Et je vous invite à nous écouter lorsque nous affirmons que défendre toutes les chasses n’aide pas la chasse.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Mes chers collègues, c’est le Corrézien communiste qui s’exprime ! Vous le savez, dans mon département natal, la haute Corrèze, une région très pauvre, nous tenons à la chasse, parce qu’il s’agit d’une conquête révolutionnaire. Nous l’avons gagnée sur les nobles en 1789, et elle fait partie de notre patrimoine commun.
Je suis sénateur des Hauts-de-Seine, mais je me rends très souvent en Corrèze ; je mange du gibier ; je participe à des chasses, parce que c’est en effet l’un des derniers loisirs qui reste à mes voisins et à mes camarades communistes.
Je discute avec eux, et ils pensent aujourd’hui comme nous, comme beaucoup, que cette chasse à la glu – si confidentielle que les caméras de télévision sont systématiquement braquées sur elle tous les ans – donne une très mauvaise image de ce qu’est la chasse, telle qu’ils la vivent, c’est-à-dire une relation forte avec leur terroir et avec leur identité culturelle.
Je défends donc aussi cet amendement au nom de ces chasseurs corréziens communistes.
Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Priou, pour explication de vote.
M. Christophe Priou. Nous aurions pu être sensibles à l’argumentation de Ronan Dantec, mais j’ai un peu de mémoire : je me souviens d’un parlementaire de l’Assemblée nationale, qui appartenait au même groupe que M. Dantec, qui vient de la région dont nous parlons et qui est passé d’Europe Écologie-Les Verts à La République En Marche, puis aux radicaux de gauche. (M. Ronan Dantec s’exclame.)
En 2015, cet élu avait fait l’apologie de ce type de chasse, qu’il pratiquait lui-même. Je sais que l’on n’est pas toujours responsable des membres de sa famille politique, mais, hélas, cela m’a marqué, parce que cette position était surprenante et indiquait une certaine proximité avec les acteurs locaux.
Je me rangerai à l’avis de la commission sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Je ne pratique pas la chasse à la glu, mais il se trouve que, lors du dernier texte sur la biodiversité, j’étais rapporteur pour avis, aux côtés de Jérôme Bignon.
Des amendements avaient été déposés – M. Dantec était déjà en pointe sur cette question – pour mettre un terme à la chasse à la glu. Je n’avais aucune idée sur le sujet, je m’y suis donc intéressée et, comme tout le monde, j’ai tapé « chasse à la glu » sur Google. J’ai vu en effet des choses épouvantables : des oiseaux pris dans la colle – des images terribles.
Je suis allée un peu plus loin, parce que, même s’il n’y avait pas encore de loi sur les fake news, je me méfiais des informations trouvées sur internet. J’ai cherché à en savoir plus et j’ai rencontré des chasseurs à la glu qui m’ont expliqué leur pratique, qui fait effectivement partie de leur patrimoine.
Je ne suis pas une fanatique de la chasse à la glu, mais je ne voudrais pas qu’on la caricature. Elle est régie par des règles. Leur application pose peut-être problème, je puis l’entendre. Il faudrait peut-être prévoir plus de contrôles dans les départements.
Toutefois, selon ces règles, ainsi que Jean-Noël Cardoux l’indiquait, les oiseaux ne restent pas sur les branches sur lesquelles ils sont attrapés. Ils doivent être tout de suite retirés et, s’ils ne font pas partie des espèces recherchées, nettoyés. S’ils en font partie, alors ils servent ensuite d’appelants.
On pourrait peut-être mieux contrôler les méthodes appliquées, mais la chasse à la grue,…
M. Ronan Dantec. Ah non ! Ça, c’est absolument interdit ! (Sourires.)
Mme Sophie Primas. … pardon, la chasse à la glu, mérite un peu plus de bienveillance et un peu moins de caricature que ce que l’on en dit sur internet.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 173.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)