PRÉSIDENCE DE M. Jean-Marc Gabouty
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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Adoption des conclusions de la conférence des présidents
M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune observation sur les conclusions de la conférence des présidents.
Elles sont donc adoptées.
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Candidatures à une commission d’enquête
M. le président. L’ordre du jour appelle la désignation des vingt et un membres de la commission d’enquête sur la souveraineté numérique, créée sur l’initiative du groupe Les Républicains en application du droit de tirage prévu par l’article 6 bis du règlement.
En application de l’article 8, alinéas 3 à 11, et de l’article 11 de notre règlement, la liste des candidats établie par les groupes a été publiée.
Elle sera ratifiée si la présidence ne reçoit pas d’opposition dans le délai d’une heure.
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Création de l’Office français de la biodiversité
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant création de l’Office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l’environnement.
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen de l’article 1er.
Article 1er (suite)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, sur l’article.
M. Guillaume Chevrollier. La création d’un grand établissement public chargé de la biodiversité et de la chasse témoigne de la volonté de mener une politique résolument engagée en faveur de la biodiversité. Je salue cette marque d’engagement, qui s’accélère fortement depuis la création de l’Agence française pour la biodiversité en 2017.
L’article 1er de ce projet de loi crée l’Office français de la biodiversité, reprenant les missions de l’AFB et de l’ONCFS, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage. Cet organisme exercera ainsi la police administrative et judiciaire relative à la chasse et à la pêche, afin de mieux la répartir dans l’espace et dans le temps. Davantage d’efficacité est ainsi attendue sur le terrain.
La seule gagnante de ce texte doit être la biodiversité, et elle seule. C’est ainsi que l’on parviendra à un réel équilibre entre les chasseurs, les pêcheurs, les forestiers, les agriculteurs et les associations environnementales.
Enfin, j’appelle votre attention sur la boulimie ou la frénésie législative en matière de politique environnementale. Ce texte vise en effet à fusionner des établissements publics deux ans seulement après la précédente réforme.
Nous devons nous attacher à concevoir des politiques publiques de long terme, dans un souci de cohérence et de lisibilité. Nous devons nous assurer également du financement des textes adoptés. Pour le présent projet de loi, je rappelle qu’il manque 41 millions d’euros ! C’est malheureusement vrai aussi pour de trop nombreux textes examinés sous cette majorité. (M. Daniel Gremillet et Mme Frédérique Puissat applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, sur l’article.
M. Daniel Gremillet. Il y a deux heures, nous étions en séance avec le Premier ministre et le Gouvernement pour dresser le bilan du grand débat et des messages transmis par les Français à cette occasion. Or je ressens en cet instant un véritable décalage entre les attentes de la population et les dispositions de ce texte. Je vais prendre un exemple très concret, qui ressemble sans doute à des situations que vous rencontrez un peu partout sur le territoire, mes chers collègues.
Ce week-end, j’ai rencontré une personne de 95 ans habitant dans un petit village des Vosges de 150 habitants. Cette brave dame y avait élevé sa famille sans avoir eu la chance de bénéficier d’un réseau collectif d’assainissement. Un contrôleur chargé de l’assainissement non collectif est venu lui rendre visite et lui a annoncé qu’elle devait payer 10 000 euros pour mettre en conformité son habitation, et ce sans aucun accompagnement financier ! Pourtant, cette femme a contribué, comme les autres, au travers des taxes qu’elle a payées, au financement de l’Agence de l’eau. Quel décalage avec ceux qui ont pu bénéficier d’un accompagnement financier pour le même investissement, dans les mêmes territoires, pour se conformer aux mêmes règles !
Quand je vois que le sujet qui nous anime ce soir a été largement financé par des prélèvements opérés sur l’Agence de l’eau, je me dis que nous sommes en train de mentir aux Français, qui ont directement financé cette agence. De plus, comme l’a dit notre collègue à l’instant, l’équilibre financier du futur office est incertain, puisqu’il manque 41 millions d’euros.
Je partage donc totalement les propos du président du groupe d’études Chasse et pêche du Sénat. En raison du manque de garanties financières, est-ce finalement une chance ou un risque pour la biodiversité et le monde de la chasse ? Telle est la véritable question. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 141, présenté par Mme Préville, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
Office français de la biodiversité et de la chasse
par les mots :
Office français de la nature
II. – En conséquence, dans l’ensemble du projet de loi
Remplacer les mots :
Office français de la biodiversité et de la chasse
par les mots :
Office français de la nature
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Donner un nom relève toujours du symbolique et du pragmatique. C’est l’occasion de se pencher sur le berceau de ce nouvel office et, en bonne fée, de lui donner toutes ses chances, en le parant de dons propres à lui garantir un avenir, sinon radieux, du moins stable et prometteur.
La loi de 1976, ambitieuse et sans précédent, instaurait un « patrimoine naturel d’intérêt général ». Dans la lignée de cet héritage, je propose de nommer cette nouvelle instance « Office français de la nature », une dénomination susceptible d’englober tous les sujets concernés, non seulement la chasse, mais aussi la pêche, les paysages et les écosystèmes. C’est un nom ouvert, nullement restrictif, qui a aussi quelque chose de noble et d’ancien.
Le mot « nature » porte beaucoup de belles choses, couvrant un large spectre allant de la poésie à la science en passant par le rapport intime que chacun de nous entretient avec la nature. La nature, c’est la création, le rêve, le bien-être, des sujets qui nous concernent tous.
Afin que nous puissions renouer des liens avec la nature, et parce qu’il nous faudra prendre de la hauteur et revoir, de façon responsable, ce rapport indispensable à la préservation de la biodiversité, je vous propose le nom d’Office français de la nature, qui sera propre, non seulement à rassembler, mais également à inspirer.
M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 8 rectifié est présenté par MM. Dantec, Corbisez, Guérini et Labbé.
L’amendement n° 68 est présenté par le Gouvernement.
L’amendement n° 143 rectifié est présenté par M. Houllegatte, Mmes Bonnefoy et Tocqueville, MM. Joël Bigot, Jeansannetas et P. Joly, Mmes Harribey et Meunier, MM. Tourenne et Daudigny et Mme Monier.
L’amendement n° 156 est présenté par M. Gontard, Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 4
Supprimer les mots :
et de la chasse
II. – En conséquence, dans l’ensemble du projet de loi
Remplacer les mots :
Office français de la biodiversité et de la chasse
par les mots :
Office français de la biodiversité
La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié.
M. Ronan Dantec. Mon intervention sera moins poétique que la précédente. L’idée de créer un office français de la nature est intéressante, et j’écouterai avec intérêt l’avis de Mme la secrétaire d’État sur ce sujet. Durant les deux jours que nous allons passer ensemble, nous essaierons, bien souvent, de défendre les chasseurs contre eux-mêmes, et il me semble donc symbolique de commencer par cet amendement.
Les chasseurs sont les premiers écologistes de France – ils le disent souvent eux-mêmes. Je ne peux qu’aller dans leur sens, à condition toutefois que la sémantique aille avec les déclarations. Et là, patatras, je ne sais quel directeur de la communication des chasseurs – il est vrai que c’est un milieu assez disparate – a eu l’idée d’ajouter le mot « chasse » dans l’intitulé du futur office français de la biodiversité ! Ce faisant, on sous-entend que la chasse n’appartient pas tout à fait à la biodiversité, voire qu’elle s’y oppose, ce qui serait une erreur sémantique absolue.
On voit bien l’idée qui consiste à conserver une partie des intitulés des deux organismes fusionnés – match nul, balle au centre, en quelque sorte –, mais on joue contre l’image de la chasse en voulant l’exclure de la biodiversité, voire de la protection de la nature. Je propose donc tout simplement de revenir à l’intitulé initial, issu du débat avec les agents.
Derrière les termes « Office français de la biodiversité », il y a un acte de foi, que je porterai tout au long du débat : les chasseurs étant les premiers écologistes de France, le mot « chasse » ne doit jamais être opposé ou mis en parallèle avec le terme « biodiversité ».
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour présenter l’amendement n° 68.
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. En effet, le choix du nom d’un établissement est important. Nous avons consulté longuement les agents des deux établissements actuels, l’AFB et l’ONCFS, à ce sujet. Les débats se sont poursuivis en séance à l’Assemblée nationale.
Notre premier objectif était de trouver un équilibre permettant à ces deux établissements de ne pas se sentir pris dans un processus de fusion ou d’absorption de l’un par l’autre.
Notre second objectif était de respecter la parole des agents. Nous leur avons soumis six noms et, au terme du vote, « Office français de la biodiversité » est celui qui a reçu le plus de suffrages.
Cet intitulé apparaît équilibré. Il rappelle évidemment l’ONCFS, que tout le monde appelle l’Office, mais aussi l’Agence française pour la biodiversité.
Nous avons tous fait beaucoup d’efforts pour installer cette notion de biodiversité, non sans succès d’ailleurs, puisqu’on retrouve dorénavant dans les préoccupations des Français à la fois la lutte contre le changement climatique et la préservation de la biodiversité. Ce terme, très vaste et inclusif, ne s’oppose nullement à la chasse.
Le Gouvernement souhaite respecter le choix des agents qui se sont prononcés et propose donc de revenir au nom de l’établissement adopté à l’Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour présenter l’amendement n° 143 rectifié.
M. Jean-Michel Houllegatte. Je soutiens une position différente de celle de Mme Préville, preuve qu’il existe aussi une grande biodiversité au sein de notre groupe politique. (Sourires.)
Je compléterai les arguments de Mme la secrétaire d’État en me bornant à citer un extrait de l’article L. 110-1 du code de l’environnement : « On entend par biodiversité, ou diversité biologique, la variabilité des organismes vivants de toute origine, y compris les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques, ainsi que les complexes écologiques dont ils font partie. Elle comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces, la diversité des écosystèmes ainsi que les interactions entre les organismes vivants. » Ces interactions peuvent bien évidemment être positives ou négatives.
Il nous semble donc que la biodiversité est un terme générique qui peut être utilisé pour dénommer l’Office.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 156.
M. Guillaume Gontard. Il aurait été plus logique de conserver le nom de l’Agence française pour la biodiversité, afin de conserver la notoriété de ce jeune organisme et par souci de cohérence avec les antennes régionales, qui seront dénommées « agences régionales de la biodiversité ». Les débats à l’Assemblée nationale ont toutefois abouti à un nom de compromis, approuvé par les agents des deux organismes fusionnés. Pourquoi ne pas respecter ce compromis ?
Le choix de la commission est d’autant plus étonnant que la chasse est déjà contenue dans la biodiversité, au même titre que la pêche ou la gestion des parcs naturels. En isolant la chasse, on donne l’impression qu’elle n’a pas de lien avec la biodiversité et qu’on cherche à la séparer des enjeux de préservation de la biodiversité. Même si tel n’était pas l’objectif de la commission, le résultat masque, de fait, les autres missions de la nouvelle agence.
Si l’on tient vraiment à ce que la chasse apparaisse dans le nom, il conviendrait de lister tous les usages de la biodiversité. Cet organisme devrait donc s’appeler Office français de la biodiversité, de la chasse, de la pêche, de la cueillette, du pastoralisme, etc. Je suis volontairement provocateur pour démontrer qu’il semble plus sage de revenir au nom originel de l’Office : il se suffit à lui-même et inclut bien évidemment la chasse dans son objet et ses missions.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Claude Luche, rapporteur de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. L’avis est défavorable sur ces amendements, qui visent à revenir sur la position de la commission. Nous avons tenu à ce que l’Office français de la biodiversité soit renommé « Office français de la biodiversité et de la chasse ».
Il nous paraît particulièrement important d’ouvrir nos débats en rappelant notre souci de préserver l’identité des deux entités fusionnées, afin que l’une ne se sente pas absorbée par l’autre.
Bien que parfaitement conscients de l’appartenance de la chasse aux différentes politiques de biodiversité, nous tenons, en raison de ses spécificités, à ce qu’elle demeure explicitement mentionnée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 141 ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Dans la mesure où les quatre amendements identiques respectent le compromis trouvé, accepté par toutes les parties prenantes, l’avis est défavorable sur l’amendement n° 141.
J’entends la volonté de la commission de mettre en valeur la partie « chasse » de cet établissement, mais la biodiversité est un mot inclusif, qui a recueilli l’accord de tous, y compris des chasseurs.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne Chain-Larché, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Je veux rappeler certains points importants.
On fusionne deux établissements, dont l’un comprend le mot « chasse » dans son intitulé. Ce dernier a droit à une attention particulière, notamment parce qu’il va participer largement au financement du nouvel office.
Je veux revenir sur la façon dont les agents des deux établissements, l’AFB et l’ONCFS, se sont prononcés. Ils ne pouvaient pas proposer d’intitulé pour le nouvel office et, parmi les sept solutions qui leur ont été soumises, aucune ne comprenait le mot « chasse ». Seuls 22 % d’entre eux se sont prononcés favorablement pour « Office français de la biodiversité ».
On peut certes considérer que les agents de ces deux offices ne se sont pas prononcés en faveur du maintien du mot « chasse », mais a-t-on seulement interrogé les chasseurs ? Ils se sont toujours sentis représentés par leur fédération, départementale ou nationale, et par l’ONCFS.
On s’accorde tous sur le fait que la chasse participe amplement de la biodiversité, mais il me paraît essentiel de pousser un peu plus loin la reconnaissance jusqu’à citer le mot « chasse » dans l’intitulé de l’organisme.
Mme Sophie Primas. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.
M. Jean-Noël Cardoux. J’ai écouté avec attention les propos des auteurs des amendements qui visent à supprimer le mot « chasse ». Je constate un certain progrès depuis que nous avons débattu de la loi sur la biodiversité il y a quelques années… Nous avions quand même eu bien du mal à faire admettre à certains que la chasse était un élément essentiel de la biodiversité.
M. Ronan Dantec. Pas à moi !
M. Jean-Noël Cardoux. Paradoxalement, c’est en s’appuyant sur ce même argument qu’ils estiment aujourd’hui qu’il n’est pas nécessaire d’inscrire ce mot dans la dénomination du nouvel office.
Je rejoins totalement les propos d’Anne Chain-Larché. Je ferai une simple comparaison : en matière économique, quand deux entreprises fusionnent, l’habitude veut que la dénomination sociale de la nouvelle société reprenne une partie de celle des deux entités préexistantes. Il doit en être de même ici. Il me semble donc naturel que le terme « chasse » soit accolé à celui de « biodiversité ». En outre, lors d’une fusion, on doit tenir compte de celui qui apporte le plus de financements. Là aussi, il est naturel qu’il soit privilégié dans la nouvelle dénomination. Or, je le rappelle, les chasseurs apporteront environ 45 millions d’euros par an au budget du futur office.
J’ai écouté avec attention les garanties de bonne foi des uns et des autres, mais je pense qu’en l’état actuel des choses accoler le mot « chasse » à celui de « biodiversité » est indispensable. Voilà pourquoi je voterai contre ces amendements. Nous verrons bien comment la situation évolue dans le futur et, si l’entente est cordiale, nous pourrons toujours modifier la dénomination du nouvel office. Pour l’heure, nous tenons à ce que le mot « chasse » y figure.
M. le président. La parole est à M. Christophe Priou, pour explication de vote.
M. Christophe Priou. J’ai bien entendu Ronan Dantec parler de la chasse, et je ne peux m’empêcher de penser à une conversion. Certes, nous acceptons les convertis, mais on dit toujours qu’il faut distinguer l’amour et les preuves d’amour. Nous verrons donc bien comment les choses se passent dans la suite de nos débats…
Lorsque nous vous avons auditionnée, madame la secrétaire d’État, je vous avais dit que le passage de ce texte par l’Assemblée nationale lui avait donné une connotation urbaine. L’esprit de ruralité, dont nous avions parlé avec votre prédécesseur Sébastien Lecornu, s’est quelque peu estompé.
Je crois que nous devons dire les choses clairement. La semaine dernière, nous avons voté le projet de loi d’orientation des mobilités. Or les gens comprennent beaucoup mieux quand on parle d’organisation des transports que de gouvernance des mobilités. Pour votre part, vous parlez d’« inclusif ». Je pense qu’il faut vraiment faire des lois avec des termes que nos concitoyens sont capables de comprendre aisément.
Dans le présent projet de loi, il me semble que nous aurions dû ajouter la ruralité à côté de la chasse. J’ajoute qu’à mon sens un autre secteur n’est pas assez présent dans ce texte – une collègue en parlera tout à l’heure –, c’est la forêt.
Quoi qu’il en soit, nous avons eu un long débat sur ces questions en commission. Nous avons pris une position, et je suivrai moi aussi l’avis de nos excellents rapporteurs.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Grand. Ces amendements visent à revenir sur la nouvelle dénomination de l’Office adoptée en commission sur ma proposition et celle de Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques.
La fusion de l’Agence française pour la biodiversité et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage doit se faire dans le respect de chacun. Or, madame la secrétaire d’État, quinze jours après l’adoption du texte en conseil des ministres, vous déposiez un amendement en commission à l’Assemblée nationale sonnant la fin de la concertation et imposant le nom « Office français de la biodiversité ». En séance, vous rattachiez le choix du terme « Office » à l’ONCFS et celui de « biodiversité » à l’AFB. Vous êtes même allée jusqu’à dire que ce nouvel établissement serait au quotidien appelé Office et que, par conséquent, s’il devait y avoir une absorption, ce serait celle de l’AFB par l’ONCFS…
Les mots ont un sens. Le nom de ce futur établissement se doit donc de rassembler et de respecter l’ensemble des acteurs. Le mot « chasse » n’est pas tabou ! C’est pourquoi je voterai contre ces amendements afin de maintenir l’intitulé « Office français de la biodiversité et de la chasse », comme cela est attendu par des millions de Français.
M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour explication de vote.
M. Alain Marc. Je suis moi aussi de l’avis de la commission.
Comme vient de le dire Jean-Pierre Grand, les mots ont un sens. Je suis chasseur, et je souhaite que cette qualité soit reconnue. Je n’en ai absolument pas honte, et j’en suis même très fier ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Médevielle applaudit également.)
Par ailleurs, j’ai entendu les arguments de notre collègue Dantec. Il ne faut pas opposer les uns aux autres et, sans vouloir faire une leçon de grammaire, le mot « et » est bien une conjonction de coordination. Il est donc tout à fait justifié que nous choisissions de nommer ce nouvel organisme « Office français de la biodiversité et de la chasse ».
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Je soutiens complètement le travail de la commission.
Comme vient de le dire le président du groupe d’études Chasse et pêche du Sénat, nous ne venons pas de nulle part. Lorsqu’on fusionne des structures, il est absolument impensable de faire disparaître complètement l’une d’entre elles, alors même qu’elle contribuera et participera au nouvel ensemble et qu’elle a une histoire forte. Ayons du respect pour l’histoire et pour les femmes et les hommes qui vont mettre en œuvre au quotidien cette réforme !
Vous l’aurez compris, je suis opposé à ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. J’ai le même avis. Nous sommes en train de fusionner deux organismes, l’un dédié à la biodiversité, l’autre à la chasse. Il est donc tout à fait naturel que ces deux mots soient associés dans la dénomination de la nouvelle structure – d’ailleurs, elle ne peut en être que renforcée. Cela ne porte préjudice à personne.
Madame la secrétaire d’État, vous nous dites que le mot « biodiversité » fait le lien entre les deux organismes. Il me semble que c’est plutôt l’expression « biodiversité et chasse » qui crée cette union. C’est pourquoi, dans sa très grande majorité, le groupe Union Centriste soutient la position de la commission et votera contre ces amendements.
M. Rémy Pointereau. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Mes chers collègues, je vais vous raconter une histoire de nature.
Sur les hauts plateaux du Vercors, où le sol est constitué de calcaire poreux, l’eau est rare. Il a été observé que le cerf y aménage des baignoires imperméables, en se roulant dans la boue. Grâce à des photos prises par des naturalistes, on a pu constater que ces souilles servent d’abreuvoirs à d’autres animaux, comme le chevreuil, la martre, le lièvre, voire le loup. Cette histoire puissante et enthousiasmante est aussi emblématique de tout ce qu’à l’avenir nous pourrons apprendre de la nature.
Si j’ai proposé le nom « Office français de la nature », c’est pour sortir d’une gestion comptable, ne plus raisonner en silos et développer une vision qui a du sens.
M. le président. La parole est à M. Michel Raison, pour explication de vote.
M. Michel Raison. Les événements que nous vivons dans notre pays depuis quelques mois doivent nous faire comprendre que nous devons respecter l’ensemble des acteurs de notre société.
En ce qui me concerne, je prendrai l’exemple des communes nouvelles, qui constituent parfois des opportunités très importantes dans nos territoires. Le meilleur moyen pour qu’une telle fusion ne fonctionne pas, c’est qu’une commune un peu plus puissante que les autres les absorbe et néglige complètement leur histoire.
Or nous sommes justement en train de fusionner deux organismes, ce qui est plutôt une bonne chose – nous pourrons notamment dégager des économies d’échelle –, et il serait catastrophique pour l’avenir même du nouvel office de négliger une partie de son histoire et de sa culture. Cela ne pourrait qu’entraîner des dysfonctionnements. Et la question n’est même pas celle d’être pro ou anti-chasse ! C’est pourquoi je soutiens fortement la position de la commission.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. En ce qui me concerne, je ne suis pas chasseur (Pas encore ! sur des travées du groupe Les Républicains.), et je ne le serai sans doute jamais. (Marques de déception amusées sur les mêmes travées.) Pour autant, il me semble essentiel d’arrêter d’opposer les Français.
M. Ronan Dantec. Absolument !
M. Jérôme Bascher. Naturellement, il est très important que la dénomination du nouvel office inclue le terme « biodiversité » – je suis très attaché à cette notion –, mais elle doit aussi inclure le mot « chasse ». Les deux sont importants. Arrêtons de les opposer ! Aucune partie ne doit prendre le pas sur l’autre !
La création de cet office doit aboutir à un équilibre, nous en avons besoin. C’est pourquoi je suis favorable au double nom.
M. Rémy Pointereau. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour explication de vote.
M. Pierre Cuypers. La chasse fait partie de notre histoire, de nos valeurs, de notre culture, quelle que soit la génération à laquelle nous appartenons. La chasse, c’est aussi le respect de nos territoires et de la biodiversité. À titre personnel, je mettrais même le mot « chasse » en premier.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Houllegatte. Il me semble que le terme « Office » fait référence à l’Office français de la chasse et de la faune sauvage et que le mot « biodiversité » est générique. Finalement, la question est de savoir si la chasse est bien partie prenante de la biodiversité ou si elle est complètement à part.
Je crois que la dénomination « Office français de la biodiversité », qui utilise un terme générique, permettra de créer une culture commune, à laquelle chacun aspire. Si nous ne créons pas cette communauté de culture, de pratiques et de valeurs, les agents considéreront encore qu’ils appartiennent à l’ancienne entité, ce qui créera aussi de nombreuses difficultés de management.