M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 938, présenté par Mme Lamure, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 64
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le 2° est complété par les mots : « du présent code » ;
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 908, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 68
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
12° ter À la section 1 du chapitre III du titre IV du livre II de la sixième partie, après l’article L. 6243-1, il est inséré un article L. 6243-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 6243-1-1. – Pour l’application de l’article L. 6243-1, l’effectif salarié est déterminé selon les modalités prévues au I de l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale. » ;
La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre. Cet amendement d’harmonisation et de simplification vise à appliquer la réforme des seuils à l’aide unique à l’apprentissage.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Cet amendement tend à appliquer, à l’aide versée par l’État à l’employeur dans les entreprises de moins de 250 salariés qui ont signé des contrats d’apprentissage, les nouvelles règles d’appréciation et de franchissement des seuils d’effectifs. L’aide à l’apprentissage ne serait donc plus versée dès que l’entreprise franchit le seuil de 250 salariés, en moyenne, pendant un an. La commission spéciale émet un avis favorable.
M. le président. L’amendement n° 907, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 73
Insérer douze alinéas ainsi rédigés :
15° bis L’article L. 6323-17-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’application du présent article, l’effectif salarié est déterminé selon les modalités prévues au I de l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale. » ;
15° ter Au chapitre 1er du titre III du livre III de la sixième partie :
a) Au début, est insérée une section préliminaire ainsi rédigée :
« Section préliminaire
« Décompte et franchissement d’un seuil d’effectif
« Art. L. 6330-1. – Pour l’application du présent chapitre, l’effectif salarié et le franchissement d’un seuil d’effectif salarié sont déterminés selon les modalités prévues à l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale. » ;
b) À l’intitulé de la section 2, les mots : « de onze salariés et plus » sont remplacés par les mots : « d’au moins onze salariés » ;
c) Au premier alinéa de l’article L. 6331-3, les mots : « de onze salariés et plus » sont remplacés par les mots : « d’au moins onze salariés » ;
d) Les articles L. 6331-7 et L. 6331-8 sont abrogés ;
15° quater Au début de la section 1 du chapitre II du titre III du livre III de la sixième partie, est insérée une sous-section préliminaire ainsi rédigée :
« Sous-section préliminaire
« Décompte et franchissement d’un seuil d’effectif
« Art. L. 6332-1-A. – « Pour l’application du présent chapitre, l’effectif salarié est déterminé selon les modalités prévues au I de l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre. Dans le même souci d’harmonisation, cet amendement vise à appliquer la réforme aux seuils issus de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. L’amendement n° 939, présenté par Mme Lamure, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 80
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’application du présent article, l’effectif salarié et le franchissement du seuil de cinquante salariés sont appréciés selon les modalités prévues à l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Cet amendement tend à corriger une erreur matérielle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 906, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 89
Après les mots :
l’article L. 2531-2 du même code,
insérer les mots :
l’article L. 6331-7 du code du travail,
La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre. Cet amendement a pour objet les dispositions transitoires nécessaires pour que les anciens dispositifs de gel ou de lissage du taux de participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continuent à s’appliquer à leurs bénéficiaires actuels.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Favorable.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote sur l’article.
Mme Michelle Gréaume. Alors que nous nous apprêtons à voter l’article 6, nous pouvons nous demander si l’approche systématique du sujet que celui-ci a ouvert, à savoir les effets de seuil, ne vient pas contrebattre l’ensemble des arguments plaidant pour son adoption.
Les effets de seuil entraînent peut-être des contraintes et des charges pour les entreprises ; mais les obligations associées sont également des formes de la socialisation des besoins et des ressources qui a fait notre système social.
Par exemple, les entreprises qui augmentent leur effectif au-delà de 20 salariés doivent s’acquitter d’une participation à l’effort de construction : ce que l’on a nommé ensuite le 1 % a constitué l’une des réponses collectives à la crise du logement, qui, il y a soixante-cinq ans, au cœur de l’hiver 1954, avait pris des formes si brutales.
C’est le 1 % qui a permis la réalisation de la plupart des quatre millions de logements sociaux dans notre pays, réponse aux besoins collectifs particulièrement prégnants en ce domaine. Le dire, c’est se rappeler que la contrainte imposée aux entreprises a donné du travail à nombre d’entre elles : elle a permis de créer de l’emploi, elle a facilité l’innovation technique et architecturale. Mais on peut effectivement assécher la ressource et décider, en toute conscience, de laisser les mal-logés et les sans-abri aux prises avec l’état actuel du marché, lequel est dérégulé depuis plus de trente ans…
Parlons aussi de la formation continue, dont l’article 6 attaque directement le financement. Dans un monde changeant, où, à en croire certains, l’on est appelé à exercer deux, trois métiers différents au cours de sa vie professionnelle, voire davantage encore, la diminution du financement des entreprises ne sera pas sans conséquence pour les salariés.
Le présent article est particulièrement régressif pour les droits des salariés ; pour justifier ces mesures, on invoque la complexité des règles administratives.
Monsieur le ministre, nous attendons de connaître votre avis quant aux normes en matière de sécurité et de santé des travailleurs, qui complexifient le quotidien des patrons : peut-être faudrait-il songer à les simplifier, elles aussi… Et tant pis si ce choix entraîne – c’est inévitable – une augmentation du nombre d’accidents du travail ! Selon une étude publiée par l’INSEE en novembre dernier, ces derniers concernent aujourd’hui plus d’un quart des salariés !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Mes chers collègues, nous avons eu un débat franc sur cet article, et je ne reviendrai pas sur ce que vient de dire Mme Gréaume. Je tiens simplement à apporter une précision.
Emportés par la passion, nous avons quelque peu débordé et, au-delà de la modification des seuils, nous avons parlé de la sécurité sociale, des cotisations, etc. Nous avons anticipé, car les dispositions dont il s’agit figurent aux articles 20 et 57, pour ce qui concerne l’abaissement du taux du forfait social et la suppression de ce forfait.
M. le ministre a effectivement apporté un certain nombre d’éléments. Toutefois, je tiens à le rappeler pour l’exactitude et la sincérité de nos débats : depuis la loi Veil de 1994, le code de la sécurité sociale précise que l’État compense, à l’euro près, toute mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale, pendant toute la durée de son application. Or, à compter de 2019, l’État ne compensera pas la baisse du forfait social. C’est, hélas !, ce qui a été voté par le Parlement, c’est-à-dire par l’Assemblée nationale et le Sénat.
Cette précision est nécessaire : il s’agit non pas du fruit de notre imagination, mais de mesures adoptées ici même, et que nous avons combattues. Certes, nous anticipons la discussion de prochains articles, mais, pour la clarté de nos débats, je tenais à opérer cette mise au point.
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est presque minuit. Je vous propose de prolonger notre séance jusqu’à minuit et demi, afin d’aller plus avant dans l’examen de ce texte.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
Article 6 bis A (nouveau)
I. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° Le chapitre III du titre III du livre II de la première partie est ainsi modifié :
a) Aux b et c du 1° de l’article L. 1233-3, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
b) Au premier alinéa de l’article L. 1233-61, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
c) À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 1233-87, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
2° Le chapitre III du titre IV du livre Ier de la deuxième partie est ainsi modifié :
a) À l’intitulé du paragraphe 1 de la sous-section 2 de la section 1, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
b) Aux premier et troisième alinéas de l’article L. 2143-3, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
c) Aux premier et dernier alinéas de l’article L. 2143-5, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
d) À l’intitulé du paragraphe 2 de la sous-section 2 de la section 1, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
e) Au premier alinéa de l’article L. 2143-6, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
f) Au 1° de l’article L. 2143-13, la première occurrence du mot : « cinquante » est remplacée par le mot : « cent » ;
3° Au premier alinéa de l’article L. 2232-10-1, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
4° La sous-section 3 du chapitre II du titre III du livre II de la deuxième partie est ainsi modifiée :
a) À l’intitulé du paragraphe 2, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
b) Au premier alinéa du I de l’article L. 2232-23-1, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
c) À l’intitulé du paragraphe 3, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
d) À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 2232-24, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
e) Au premier alinéa de l’article L. 2232-25, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
5° Le titre Ier du livre III de la deuxième partie est ainsi modifié :
a) Aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 2312-1, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
b) À la première phrase du premier alinéa et au second alinéa de l’article L. 2312-2, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
c) À l’article L. 2312-3, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
d) À l’intitulé des sections 2 et 3 du chapitre II, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
e) Au dernier alinéa de l’article L. 2312-8, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
f) Au dernier alinéa de l’article L. 2315-7, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
g) À l’intitulé des sections 2 et 3 du chapitre V, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
h) À la première phrase de l’article L. 2315-63, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
6° À l’article L. 3121-45, les deux occurrences du mot : « cinquante » sont remplacées par le mot : « cent » ;
7° Au deuxième alinéa de l’article L. 3312-2, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
8° Aux première et seconde phrases du premier alinéa de l’article L. 3322-2, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
9° L’article L. 4162-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du I, les trois occurrences du mot : « cinquante » sont remplacées par le mot : « cent » ;
b) Au II, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
10° Au premier alinéa de l’article L. 6323-13, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
11° La section 3 du chapitre II du titre III du livre III de la sixième partie est ainsi modifiée :
a) À l’intitulé, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
b) Au premier alinéa de l’article L. 6332-17, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent ».
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2021.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 371 est présenté par MM. Tourenne et M. Bourquin, Mme Espagnac, M. Lalande, Mme Artigalas, MM. Durain et Lurel, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Antiste, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Courteau, Duran, Fichet et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 657 est présenté par M. Gay, Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 739 est présenté par MM. Yung, Patient, Patriat, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, de Belenet, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi, Navarro et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe La République En Marche.
L’amendement n° 903 est présenté par le Gouvernement.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 371.
M. Jean-Louis Tourenne. La commission spéciale a relevé l’ensemble des seuils fixés à 50 salariés dans le code du travail à 100 salariés.
Cette mesure n’appelle pas d’opposition forcenée de notre part, mais elle n’en pose pas moins problème. Il faudrait que les modifications de seuils décidées dans le cadre de ce projet de loi aient fait la preuve de leur intérêt et de leur efficacité : il faudrait vérifier qu’elles n’emportent pas des conséquences tout à fait regrettables et qu’elles méritent d’être pérennisées.
Si cette disposition entre en vigueur, elle imposera, en 2021, d’appliquer le seuil de 100 salariés, quelles que soient les aventures vécues, au titre de cette réforme, avec la modification des seuils. Elle me semble donc prématurée.
Voilà pourquoi nous proposons d’en rester, aujourd’hui, aux seuils tels qu’ils sont définis. Demain, en fonction de l’expérience, selon les leçons que nous pourrons tirer des modifications, nous verrons s’il faut ou non aller au-delà.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 657.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Alors que l’article 6 a pour objet de ne retenir que trois seuils, ceux de 11, 50 et 250 salariés, l’article 6 bis A en généralise un quatrième : le seuil de 100 salariés. C’est plutôt ironique, quand on sait que le Gouvernement affiche comme objectif l’harmonisation de l’ensemble des seuils…
À travers cet article, la modification des seuils est encore l’occasion de porter atteinte aux droits des salariés. En effet, il est prévu de relever à 100 tous les seuils fixés à 50 salariés dans le code du travail. Autrement dit, toutes les entreprises comprenant entre 50 et 99 salariés seraient soudainement exonérées d’une multitude d’obligations.
En droit du travail, le seuil de 50 salariés est central. Il entraîne l’application de règles dans des domaines variés. Il en est ainsi du droit du travail collectif, qui encadre la représentation des salariés dans l’entreprise.
Ce droit à représentation serait mis à mal, puisque la réunion d’un comité social et économique disposant de l’intégralité de ses attributions serait reportée, tout comme l’obligation de nommer des délégués syndicaux centraux d’entreprise et d’établissement. Ces derniers verraient d’ailleurs leurs heures de délégation réduites, alors même que ce temps est nécessaire à l’exercice de leurs attributions.
Ces dispositions ont une autre conséquence notable, quant au licenciement pour motif économique. Les entreprises doivent démontrer des difficultés économiques, dont la durée dépend de la taille de l’entreprise. La démonstration du licenciement serait facilitée, puisque les entreprises comptant entre 50 et 99 salariés n’auraient à faire état que de deux trimestres de difficultés, contre trois actuellement.
Mes chers collègues, on pourrait également citer la durée du travail, la formation professionnelle, la santé, la sécurité et les conditions de travail.
Une fois de plus, nous nous opposons à ce que les mesures de simplification soient l’occasion de porter atteinte aux droits des salariés. Nous sommes tout à fait favorables à une harmonisation des droits des salariés, à condition qu’elle soit créatrice de droits. Comme ce n’est pas le cas de cet article, nous vous présentons cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l’amendement n° 739.
M. Richard Yung. Il s’agit donc d’un amendement identique de suppression. La commission spéciale a décidé de relever à 100 salariés l’ensemble des seuils jusqu’à présent fixés à 50, ce que nous pourrions qualifier de sur-transposition.
Cet article ne nous semble pas utile, le projet de loi PACTE prévoyant déjà, en son article 6, un délai de cinq ans pendant lesquels les obligations liées au passage d’un seuil à un autre ne s’appliquent pas. Laissons fonctionner ce qui vient d’être voté avant de décider, dans quelques années, s’il est nécessaire de faire passer le seuil de 50 à 100.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 903.
M. Bruno Le Maire, ministre. Je ne suis pas sûr qu’il arrive très souvent, au cours du débat, que je dépose, au nom du Gouvernement, un amendement identique à un amendement de M. Gay ! Partager un amendement avec M. Yung, ce n’est pas surprenant, avec M. Tourenne, ça l’est un peu plus, avec M. Gay, je ne sais pas comment qualifier cela ! (Sourires.)
J’ai dit que nous ne souhaitions pas toucher aux institutions représentatives du personnel et je le confirme. L’amendement adopté en commission spéciale, qui fait passer de 50 à 100 salariés les seuils déclenchant l’ensemble des obligations dans ce domaine, modifie en profondeur les règles de représentation du personnel dans l’entreprise et tout ce qui va avec : le comité économique et social ou les règles de calcul de la représentativité, donc des éléments très importants pour l’entreprise, que nous n’entendons pas changer.
Comme M. Yung et les autres sénateurs qui ont déposé des amendements identiques, je souhaite donc que nous revenions sur le vote de la commission spéciale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Je veux défendre notre choix. Dans l’état actuel du droit, cinquante-cinq nouvelles obligations sociales et fiscales s’appliquent aux entreprises lorsque celles-ci franchissent le seuil de 50 salariés. La dernière réforme du code du travail, issue des ordonnances de septembre 2017, a renforcé ce seuil en y attachant près d’une quinzaine d’obligations déclenchées auparavant à 20 salariés. Cette réforme ne devrait pas conduire à diminuer le nombre très important d’entreprises comprenant 48 ou 49 salariés dans notre pays qui est 1,8 fois plus élevé qu’en Allemagne, d’après l’enquête IFO citée dans l’étude d’impact.
Le seuil de 50 salariés est un frein pour les entreprises.
Sur le plan économique, d’abord, l’instauration d’instances représentatives du personnel nécessite de se doter d’une direction des ressources humaines – DRH –, alors même que le dialogue direct entre le chef d’entreprise et ses salariés est possible sans qu’il soit nécessaire de l’institutionnaliser.
En matière financière, ensuite, outre l’adaptation organisationnelle et managériale nécessaire, le passage à 50 salariés emporte un certain nombre d’obligations fiscales reposant sur l’ensemble de la masse salariale. Le coût d’un emploi supplémentaire ne se résume pas au coût marginal du dernier salarié arrivé.
D’un point de vue psychologique, enfin, le changement de dimension lié à l’adaptation de la structure de l’entreprise peut faire craindre au dirigeant une perte de contrôle.
Les économistes entendus lors de notre table ronde nous ont dit que c’était à partir de 70 salariés que les entreprises devaient commencer à se doter d’un encadrement pour suivre la production, les ventes et la gestion du personnel. Relever le seuil de 50 à 100 salariés, c’est offrir la possibilité aux entreprises de se doter de ces infrastructures quand elles le jugent pertinent.
La commission spéciale est donc défavorable à la suppression de l’article 6 bis A. Néanmoins, monsieur le ministre, j’ai bien noté votre ouverture. Vous pourriez étudier la possibilité de fixer un seuil à 70 salariés, tout en conservant les IRP. Je suis très réceptive à cette proposition.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Vous voyez, monsieur le ministre, ça fait du bien de rejoindre nos positions. Vous devriez essayer plus souvent ! (Sourires.)
Plus sérieusement, « syndicalisme », ce n’est pas un gros mot. Être syndicaliste aujourd’hui dans une entreprise, quelle qu’elle soit, c’est très difficile. C’est pour cela que le taux de syndicalisation en France se situe entre 7 % et 8 %. En effet, un certain nombre d’entreprises pratiquent une répression syndicale, parfois féroce, et plus l’entreprise est petite, plus c’est complexe.
Relever à 100 salariés le seuil nécessaire pour disposer d’un représentant syndical, d’un local, etc. c’est un mauvais coup qui revient à faire des entreprises de moins de 100 salariés, celles dans lesquelles la situation syndicale est déjà difficile, un no man’s land pour les salariés eux-mêmes.
Je me réjouis de voir ces quatre amendements de suppression, mais je demande vraiment que l’on consacre à cette question le temps nécessaire. Ma collègue Laurence Cohen l’a dit, nous débattons depuis quatorze heures trente de nouveaux droits pour les entreprises. C’est très bien. Pourtant, une entreprise, c’est un patron, une direction, mais aussi des salariés, un savoir-faire, des machines-outils, un territoire.
Nous allons discuter de 195 articles, qui ne peuvent pas se limiter à libérer l’entreprise et à donner plus de droits à l’employeur, sans offrir de droits nouveaux aux salariés. Ce ne serait pas tenable, particulièrement dans la situation politique actuelle.
Mes chers collègues, je vous demande de bien peser ce que vous allez voter, car cet article constitue un recul majeur pour les salariés. J’appelle donc chacune et chacun d’entre vous à adopter ces amendements de suppression.
M. le président. La parole est à M. Bernard Lalande, pour explication de vote.
M. Bernard Lalande. Tout d’abord, les salariés ne sont pas les ennemis des entreprises. Il faut favoriser le dialogue, faire de ce projet de loi PACTE une opportunité de considérer qu’il n’y a pas d’un côté des chefs d’entreprise et de l’autre des salariés, mais qu’il y a bien une entreprise, c’est-à-dire des partenaires, dont les salariés font partie.
L’organisation du travail dans notre pays prévoit que ces derniers aient des représentants, afin de rendre le dialogue possible. Grâce à cela, on construit des structures, on débat de l’intéressement et de beaucoup d’autres sujets avec eux. Si ce système est absent, on va dans la rue et on se rassemble autour des ronds-points ! Vous fixez des seuils alors qu’il faut représenter les salariés et ouvrir le dialogue.
Les propositions qui sont faites par le Gouvernement comme par les sénateurs siégeant sur différentes travées ne sont qu’un appel à l’entreprise et ne dessinent pas une opposition entre salariés et employeurs. Nous considérons simplement que des représentants élus sont nécessaires et peuvent apporter quelque chose à l’entreprise.
Nous soutiendrons ces amendements et je vous appelle, mes chers collègues, à emboîter le pas d’un dialogue véritable avec tous les partenaires qui composent l’entreprise.