M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Un petit peu, certes, mais suffisamment pour que nous gagnions de l’argent : comme précédemment avec le budget de l’AFD, notre moindre importance nous fait faire des économies.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Non ? Soit !
Troisièmement, la politique immobilière du ministère doit faire l’objet d’un pilotage renforcé. À la fin de 2016, son parc immobilier était estimé à 4,3 milliards d’euros.
L’immobilier du ministère va être mis à contribution pour financer les dépenses de sécurisation des implantations à l’étranger. Les avances du compte d’affectation spéciale « Gestion immobilière de l’État » devraient représenter 100 millions d’euros, qui devront être remboursés par les produits de cession. Or ceux-ci ne cessent de se réduire et ne devraient représenter que 30 millions d’euros en 2018. Comment comptez-vous rembourser ces avances et à quelle échéance ?
Enfin, concernant le programme 347, « Présidence française du G7 », le coût estimé s’élève à 36,4 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 3,2 millions d’euros au titre des dépenses de protocole. Ce coût est supérieur à celui de l’organisation du G20 en 2008, à Deauville, même en tenant compte de l’inflation. Par conséquent, je présenterai deux amendements visant respectivement à aligner le coût du G7 sur celui du G20 de 2008 et à réduire les dépenses liées à l’organisation de la réunion des ministres des affaires étrangères du G7, qui ne figurent pas dans ce programme et sont rattachées aux dépenses protocolaires.
Le projet de budget pour 2019 de la mission « Action extérieure de l’État » a été critiqué en raison des réformes structurelles qui ont été annoncées, notamment de la diminution de 10 % de la masse salariale d’ici à 2022, qui inquiète beaucoup. Il me semble qu’un examen attentif permet plutôt de souligner une relative préservation de nos moyens à l’étranger pour 2019 et de mettre en évidence l’existence de certaines marges de manœuvre budgétaires, sous réserve des points de vigilance dont je vous ai fait part. Par conséquent, la commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l’État ». (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche. – M. le président de la commission des affaires étrangères applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Rémi Féraud, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à la suite de Vincent Delahaye, je vais brièvement vous présenter les programmes de la mission « Action extérieure de l’État » qui concernent, d’une part, les Français à l’étranger et les affaires consulaires et, d’autre part, la diplomatie culturelle et d’influence et l’enseignement français. Les crédits afférents à ces programmes représentent environ un tiers du total des crédits de la mission.
Le premier constat, à la lecture du projet du Gouvernement, est celui du maintien global de la prévision budgétaire pour 2019 par rapport à l’exercice en cours. Après plusieurs années de baisse, la stabilité réelle de ces crédits doit être soulignée. Cependant, la réduction des emplois du ministère de l’Europe et des affaires étrangères reste préoccupante. La répartition des crédits ne semble donc pas totalement en accord avec la volonté d’avoir de grandes ambitions diplomatiques et une vocation universelle pour notre pays.
Le budget de l’administration consulaire ne pose pas de difficulté. Celle-ci mène de nombreux chantiers de modernisation qui sont source d’économies et qui font preuve d’une réelle efficacité, à telle enseigne que la délivrance des documents d’identité s’avère beaucoup plus rapide pour les Français de l’étranger que pour ceux qui vivent sur le territoire national. Autre marqueur de modernisation : la mise en place du vote électronique sera effective dès le prochain scrutin européen. Le budget alloué à l’organisation des élections européennes est de 3,5 millions d’euros, soit une somme équivalente à celle de 2014. Cela ne devrait donc pas poser de difficultés.
S’agissant du remplacement de la réserve parlementaire, le Gouvernement a mis en place un dispositif nommé « STAFE », soutien au tissu associatif des Français de l’étranger, doté d’un budget de 2 millions d’euros pour 2018, reconduit pour 2019. La première année d’existence de ce dispositif semble relativement prometteuse, puisque 223 projets ont été approuvés, pour un montant de 1,74 million d’euros. Il est intéressant de noter que près de la moitié des subventions sollicitées sont destinées à soutenir un projet éducatif. Nous pourrons certainement mieux en juger l’an prochain – nous pourrons tirer le bilan de l’année 2018 –, en espérant que les crédits pour 2019 pourront être intégralement consommés, car la campagne d’examen des demandes de subventions commencera plus tôt. Mais nous pouvons d’ores et déjà constater que ce dispositif de remplacement de la réserve parlementaire semble fonctionner avec efficacité.
Concernant les acteurs culturels et l’enseignement ainsi que les opérateurs chargés de la politique d’influence de notre pays, la stabilité des crédits apparaît davantage comme un sursis bienvenu, qui n’enlève rien à la nécessité d’établir une stratégie claire de développement du soft power français pour les années à venir.
À la suite des annonces du Président de la République sur le plan Langue française, en mars dernier, l’Institut français bénéficiera de 2 millions d’euros supplémentaires. Il faut saluer cet effort, en ajoutant que des précisions doivent encore être apportées, notamment, sur le rapprochement entre l’Institut français et la Fondation Alliance française, qui a été acté lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2018.
Les subventions et les emplois des autres opérateurs sont, eux, maintenus à un niveau équivalent à celui de 2018, ce qui marque la volonté de préserver leurs missions en matière d’attractivité de notre pays.
J’en viens à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, sur laquelle nous avons travaillé, avec Vincent Delahaye, dans le cadre de la mission de contrôle budgétaire. Il s’agit d’un des plus grands réseaux d’enseignement public à l’étranger au monde, ce qui en fait un atout très précieux pour la scolarisation des enfants français à l’étranger et pour le rayonnement de notre pays.
Si la préservation, cette année, du budget de l’enseignement français à l’étranger semble positive, elle ne saurait occulter d’importantes tensions. L’annulation d’une partie de la subvention de l’AEFE, à hauteur de 33 millions d’euros, à l’été 2017, avait mis en évidence la difficile équation budgétaire de l’Agence. Celle-ci fait face, depuis de nombreuses années, à une hausse structurelle de ses dépenses parallèle à un désengagement progressif de l’État. Dans ces conditions, les familles sont de plus en plus mises à contribution et les frais de scolarité par élève ont beaucoup augmenté ces dernières années. La stabilité budgétaire, pour 2019, était donc indispensable. Il faut saluer sa concrétisation.
Pour faire face aux difficultés, en effet, l’AEFE a réduit le nombre de postes d’enseignants et d’encadrement qu’elle finance : elle a supprimé 80 postes d’expatriés et 100 postes d’enseignants résidents cette année ; elle prévoit d’en supprimer 166 autres en 2019. Or ces suppressions de postes, qui sont difficiles à accepter pour les établissements, risquent de nuire à la qualité de l’enseignement. Elles sont en outre contradictoires, en apparence en tout cas, avec l’objectif de doublement du nombre d’élèves scolarisés dans le réseau d’ici à 2030. Cet effet ciseaux fragilise l’Agence et l’ensemble des établissements d’enseignement qui lui sont liés. Il devient donc urgent que le Gouvernement donne aux acteurs une visibilité de long terme – tous l’attendent impatiemment – et nous dise comment il entend parvenir au doublement du nombre d’élèves dans les prochaines années.
Pour ma part, et comme beaucoup, je suis attaché à ce service public exceptionnel de l’enseignement français à l’étranger – nous devons trouver les moyens de le projeter dans l’avenir.
Pour conclure, je dirai que ce budget, s’il est tout à fait convenable du point de vue de l’examen de cet exercice budgétaire, semble insuffisant à long terme au regard des ambitions exprimées. Les subventions accordées aux opérateurs chargés de mettre en œuvre la politique d’influence de la France, quoique stables, demeurent d’un niveau insuffisant. Cette insuffisance est plus frappante encore lorsqu’on la compare aux annonces et aux ambitions affichées au début de son mandat par le Président de la République.
Si, comme l’a dit Vincent Delahaye, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l’adoption des crédits de la mission, nous resterons très attentifs, dans les années qui viennent, à leur inscription dans la durée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, pour le programme « Action de la France en Europe et dans le monde ». Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, trois minutes pour présenter un budget de 1,7 milliard d’euros, ce n’est franchement pas beaucoup ! Je vais donc me contenter de vous adresser quelques messages, car, s’agissant des chiffres, je vous renvoie à ceux qu’a présentés Vincent Delahaye et à mon rapport.
Monsieur le ministre, je voudrais exprimer quelques insatisfactions et de réelles inquiétudes. Je fais partie de ceux qui, lors de la Conférence des ambassadeurs, étaient vraiment inquiets : j’avais trouvé, ce jour-là, que, tout à votre contentement de voir augmenter votre budget de l’aide au développement, vous aviez un peu trop vite « lâché » votre budget des affaires étrangères.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Certes, mais je suis rapporteur pour avis du programme 105.
Nous considérons, nous, sénateurs, que la diminution de 10 % de la masse salariale d’ici à 2022 n’est pas une bonne nouvelle, d’autant que, en dix ans, la mission « Action extérieure de l’État » a déjà perdu 12 % de ses effectifs.
Quant à la réorganisation des modes de gestion des réseaux de l’État à l’étranger, elle n’est pas plus rassurante. Rassembler sous la tutelle de l’ambassadeur l’ensemble du réseau et tous les fonctionnaires de chaque ambassade, c’est une bonne idée.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Certes, mais si vous, vous jouez le jeu, ce n’est pas le cas des autres ministères. C’est ce que nous montrent les premiers retours concernant le ministère des finances, le ministère de l’intérieur et le ministère de la défense – je mets les ministres concernés devant leurs responsabilités ! Je ne suis donc pas sûr que cette réforme parte sur de bons rails.
Mon deuxième message sera le suivant : votre politique immobilière – le président de notre commission vous le disait déjà à l’époque où il était rapporteur du programme 105 – est à bout de souffle.
M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. Je vais le redire !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Vous avez tout vendu ! Vous n’avez donc presque plus rien à vendre. Comment allez-vous payer l’entretien des ambassades et de l’ensemble de votre patrimoine ? Non seulement vous n’avez plus rien à vendre, mais vous n’avez inscrit cette année que 12 millions d’euros sur la ligne budgétaire dédiée à l’entretien de vos bâtiments. Or nous savons très bien qu’il faut entre 40 millions et 80 millions d’euros pour financer cet entretien. Sur ce point aussi, nous ne sommes pas tout à fait rassurés.
Mon troisième et dernier message sera sous forme de question : quelle place voulez-vous donner à la France dans le monde ?
Une telle place peut se traduire de différentes manières : par les deux sujets que je viens d’évoquer, mais aussi par l’ensemble des contributions internationales obligatoires. Or elles baissent de près de 10 %. La raison en est très simple : comme le poids économique de la France baisse dans le monde, notre quote-part baisse elle aussi. C’est peut-être bon signe budgétairement parlant, mais, économiquement parlant, ce n’est pas très bon pour la France, de surcroît à un moment où l’Allemagne augmente son budget et ses effectifs et où le Royaume-Uni augmente son budget, ses effectifs et le nombre de ses ambassades !
Monsieur le ministre, c’est sous la mandature Macron, sous le gouvernement de M. Édouard Philippe, sous votre mandat de ministre, que la France est déjà passée du deuxième au troisième rang, derrière les États-Unis et la Chine, pour la taille du réseau international.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Nous allons passer, l’année prochaine, au quatrième rang : le Royaume-Uni va nous passer devant !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Et les Allemands ne sont pas loin !
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le rapporteur pour avis !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Ils ne sont d’ailleurs pas très bons camarades. Je vous renvoie à la déclaration du vice-chancelier allemand demandant, la semaine dernière, que la France…
M. le président. N’abusez pas du temps, s’il vous plaît !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. … perde son siège de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies au profit d’un siège européen, qui pourrait être allemand…
M. le président. Merci !
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. Une minute de dépassement !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Bernard Cazeau, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, pour le programme « Action de la France en Europe et dans le monde ». Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2019, les efforts en faveur de la sécurité extérieure au sens large se poursuivent. Cependant, nous avons quelques interrogations sur le financement.
Notre commission se félicite de la stabilisation des crédits de la coopération de défense et de sécurité, qui constitue notre « premier bouclier au loin », illustration parfaite du continuum entre sécurité intérieure et sécurité extérieure. Il s’agit là d’un rééquilibrage, à un étiage encore bas, mais essentiel à la cohérence de notre politique. Après une forte baisse, les crédits retrouvent le niveau qu’ils avaient voilà dix ans, soit 104 millions d’euros. Nous avons dans ce domaine deux recommandations.
La première consiste à veiller à ne pas imposer une réduction d’effectifs : il faut laisser la direction gérer une baisse de la masse salariale et retrouver ainsi une certaine souplesse au lieu de prévoir la suppression de vingt équivalents temps plein de 2019 à 2022.
La deuxième concerne la loi d’orientation et de programmation de l’aide publique au développement, qui doit permettre d’assurer le financement du continuum entre la sécurité et le développement, en finançant, si possible, hors programme 105 les actions de la DCDS renforçant les capacités des États partenaires dans les domaines de la sécurité intérieure et de la protection civile.
En 2019, les crédits budgétaires dédiés à la sécurisation des emprises françaises à l’étranger diminuent, passant de 75 millions à 44 millions d’euros. Cette réduction de crédits est compensée par une avance de 100 millions d’euros sur deux ans du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ». Notre commission souhaite la définition d’un programme d’investissements à hauteur des besoins de financement et la réforme des dépenses éligibles au compte d’affectation spéciale. Nous veillerons à ce que le ministère garde toute latitude et indépendance pour définir le programme de cessions dont le produit remboursera l’avance.
Nous notons que la sécurisation est la grande priorité de ce budget. Nous nous en félicitons. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Grand, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, pour le programme « Français à l’étranger et affaires consulaires ». Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’interviens comme rapporteur pour avis du programme 151, qui concerne les dépenses du réseau consulaire. Mon propos portera sur les aspects budgétaires.
Pour 2019, les crédits du programme 151 enregistrent une modeste augmentation, de 1,5 %, qui ne doit pas dissimuler le régime d’austérité imposé à notre réseau consulaire. De fait, cette hausse s’explique avant tout par une réévaluation des crédits de titre 2, réévaluation destinée à compenser leur sous-évaluation l’année dernière. Il ne s’agit en aucun cas d’augmenter les effectifs, puisque le programme 151 perdra trente-sept équivalents temps plein en 2019, afin de se conformer aux objectifs du projet Action publique 2022 de réduction des réseaux de l’État à l’étranger.
Hors titre 2, les crédits du programme diminuent de 2,6 %, malgré des transferts de crédits à son profit liés à la nécessité de préparer les élections européennes de mai 2019, à l’abondement du dispositif STAFE, créé pour compenser la suppression de la réserve parlementaire, et, dans une moindre mesure, au rapatriement de crédits d’adoption en provenance du programme 185.
C’est ainsi que certaines lignes subissent des ajustements. C’est le cas de l’aide sociale distribuée par les comités consulaires, en diminution de 1,9 million d’euros. Cette diminution, nous dit-on, s’expliquerait par une baisse du nombre d’allocataires. Nous en doutons un peu. Je rappelle que ces aides, souvent d’un faible montant, n’en sont pas moins importantes pour nos compatriotes à l’étranger en difficulté. Ce sont donc les plus modestes qui risquent de souffrir. De même, la dotation destinée aux bourses scolaires, qui était stable l’an passé, se trouve diminuée de 5 millions d’euros, à 105,3 millions d’euros, au motif qu’il sera possible de puiser dans la soulte de l’AEFE pour compléter si besoin. Certes, cette soulte constitue une réserve confortable qui a de surcroît l’avantage de se reconstituer grâce aux effets de change, mais cela pourrait ne pas durer. Qu’adviendra-t-il si les circonstances sont moins favorables ? La baisse de l’enveloppe budgétaire sera-t-elle réversible ? Ma crainte est que ne se produise un « effet de cliquet ».
Les suppressions d’emplois prévues en 2019 – elles ne sont que la première marche d’un effort appelé à s’accentuer les années suivantes – ne seront possibles qu’au prix de nouvelles mesures de rationalisation : regroupement d’activités, par exemple en matière de transcription de l’état civil, ajustement au strict minimum des effectifs des « postes à gestion simplifiée », poursuite de l’externalisation du traitement des demandes de visas, transformation de postes d’agents titulaires en postes d’agents de droit local… Je le souligne, cette manœuvre n’est pas sans risque dans certains pays.
Par ailleurs, l’administration consulaire continuera à moderniser ses procédures et à dégager des gains de productivité, à travers des projets tels que le paiement en ligne des droits de chancellerie, la pré-demande en ligne des passeports ou encore le lancement d’une expérimentation visant à permettre la transmission dématérialisée des actes d’état civil aux Français de l’étranger.
Bien que notre commission ait émis un avis favorable à l’adoption de ces crédits, je tiens à faire part de mon inquiétude quant à la réduction continue des moyens d’une administration efficace et appréciée, qui – nous avons déjà eu l’occasion de le dire – ne pourra pas indéfiniment faire plus avec moins. Au final, c’est la capacité d’influence et de rayonnement de la France dans le monde qui en sera amoindrie. (M. le président de la commission des affaires étrangères applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Rachid Temal, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, pour le programme « Français à l’étranger et affaires consulaires ». Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant de mettre l’accent sur quatre points importants, je souhaite rappeler toute l’importance du programme 151, qui représente les services publics aux Français de l’étranger.
Le premier point concerne le dispositif de soutien au tissu associatif des Français de l’étranger, dit STAFE. Bien que faisant suite à la suppression de la réserve parlementaire, celui-ci accuse une baisse d’un tiers des crédits consacrés, passant de 3 millions à 2 millions d’euros.
Par ailleurs, nous regrettons qu’aucune place n’ait été prévue pour les parlementaires dans ce dispositif, contrairement au précédent.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Très bien !
M. Rachid Temal, rapporteur pour avis. Pour autant, le bilan de la première campagne semble encourageant. Monsieur le ministre, quels enseignements en tirez-vous ? Quelles adaptations envisagez-vous pour la suite ?
Le deuxième point, également abordé par mon corapporteur Jean-Pierre Grand, est celui des bourses scolaires et des aides aux familles. En la matière, il me semble important d’avoir un travail commun entre les associations des Français de l’étranger, la représentation nationale et votre ministère pour aboutir à un diagnostic partagé, afin de sortir de la situation devenue préoccupante sous l’effet de la réduction des prestations. Cette démarche pourrait être organisée sous votre égide.
Le troisième point a trait au Brexit et à la situation de nos 300 000 compatriotes qui résident au Royaume-Uni.
Nous nous réjouissons de la signature de l’accord entre Londres et l’Union européenne le 25 novembre dernier, après des semaines et des mois d’atermoiements. Certes, nous le savons, le processus de ratifications n’est pas simple. Il est même parfois source d’incertitudes. Quelles mesures nos postes consulaires ont-ils prises face aux différents scenarii en présence ?
Par ailleurs, en vertu du compromis sur le maintien des droits convenu le 19 mars 2018, des dispositions sont prévues pour les citoyens européens présents sur le territoire britannique au terme de la période de transition fixée au 31 décembre 2020. Ils pourront continuer à vivre, travailler ou étudier dans les mêmes conditions qu’actuellement. Je veux néanmoins me faire l’écho des préoccupations exprimées par un certain nombre d’associations de ressortissants européens résidant au Royaume-Uni. Elles s’inquiètent de la capacité de l’administration britannique à procéder, sans erreur et dans les délais, au recensement de tous les citoyens de l’Union européenne. Avez-vous des informations à nous apporter sur ce travail ?
Le quatrième point concerne la réforme de la représentation des Français de l’étranger. Annoncée par le Président de la République, elle n’a donné lieu pour l’heure qu’à une consultation des élus et des associations. Mais, vous le savez, son contenu fait encore débat. Pouvez-vous nous en dire davantage, à la fois sur son contenu éventuel et sur son calendrier ? La tradition républicaine voudrait qu’elle puisse être adoptée avant le mois de juin 2019. Ce sujet nous semble très important. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Robert del Picchia, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, pour le programme « Diplomatie culturelle et d’influence ». Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la diplomatie culturelle et d’influence est actuellement un chantier de réflexions multiples, encore inabouties. Un rapprochement de l’Institut français et de la Fondation Alliance française est en cours. L’enseignement français à l’étranger doit être développé. Le Président de la République a présenté un plan ambitieux pour la langue française et le plurilinguisme. Dont acte ! Mais les moyens sont-ils au rendez-vous ?
Je concentrerai mes remarques sur l’AEFE.
La subvention est stable, après une année difficile. Plusieurs mesures très contraignantes pour les établissements scolaires ont été mises en œuvre. Je vous rappelle l’augmentation du taux de la participation française complémentaire sur les frais de scolarité, à 9 %. On nous dit que ce sera 7,5 %. Nous demandons instamment de revenir à 6 % au maximum. En effet, l’équation du financement de l’AEFE repose fondamentalement sur le diptyque État-familles. Lorsque l’État se désengage, ce sont donc automatiquement les familles qui paient. Or elles paient de plus en plus, et de plus en plus de familles françaises à l’étranger à revenus modestes ont des difficultés.
Par ailleurs, comment participer à la sécurisation de locaux n’appartenant pas à l’État ? Comment remédier au fait que l’Association nationale des écoles françaises de l’étranger, l’ANEFE, ait stoppé ses activités de prêts garantis par l’État aux établissements ?
Tout semble concourir à compliquer la tâche des établissements français à l’étranger, alors qu’un doublement des effectifs des élèves dans la prochaine décennie est prévu dans les écoles de l’AEFE, mais également en dehors. Nous espérons que les crédits des bourses seront augmentés ; c’est nécessaire, car il y aura de nouveaux enfants français. L’éducation nationale aura-t-elle davantage de professeurs détachés ?
Monsieur le ministre, vous le voyez, nos interrogations sont multiples, tant les objectifs de la diplomatie culturelle paraissent disproportionnés par rapport aux moyens déployés.
Je terminerai par une suggestion : une part du budget doit provenir de la vente d’immeubles. Pourquoi ne pas s’inspirer de certains pays voisins et amis dont les ambassades appartiennent à une institution financière nationale ? Nos joyaux diplomatiques – il y en a encore quelques-uns – pourraient, par exemple, être cédés à la Caisse des dépôts et consignations, qui les louerait au ministère. Non seulement ils resteraient français, mais en plus le loyer serait probablement moindre. Étant à moitié autrichien, de résidence en tout cas, je me permets de formuler cette proposition un peu baroque… (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)