Mme Michelle Meunier. Cet amendement vise à supprimer la possibilité d’entendre le demandeur dans une langue dont, je cite, « il est raisonnable de penser qu’il la comprend », dans le cas où la CNDA « ne peut désigner un interprète dans la langue demandée ». Voilà une disposition qui n’est pas acceptable au vu des enjeux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission va émettre un avis défavorable sur cet amendement, comme sur tous les autres qui, par principe, dirais-je, tendent à modifier les conditions dans lesquelles la CNDA ou l’OFPRA recueille les avis du demandeur.

Dans sa rédaction actuelle, le texte permet que soit utilisée une langue parfaitement adaptée pour assurer au demandeur une excellente compréhension des enjeux. Il n’est pas question de modifier le droit positif en la matière.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. J’émets le même avis défavorable sur tous les amendements de ce type.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 223 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 224 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 741-1, les mots : « ou dont il est raisonnable de supposer qu’il la comprend » sont supprimés ;

La parole est à Mme Michelle Meunier.

Mme Michelle Meunier. Dans le même esprit et sur le même sujet, il s’agit en quelque sorte d’un amendement de repli, pour assurer au demandeur qu’il sera informé de ses droits et obligations dans une langue qu’il comprend.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 224 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 354 rectifié bis, présenté par Mme de la Gontrie, MM. Jomier, Leconte, Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Le premier alinéa de l’article L. 741-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Tout demandeur est informé de son droit inconditionnel à bénéficier d’un hébergement d’urgence, d’un premier examen de santé et de la possibilité d’être assisté par une association pour préparer le dépôt de sa demande d’asile. » ;

La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. L’article L. 741-1 du CESEDA prévoit et organise la façon dont doit se dérouler la procédure. Il indique notamment que le demandeur reçoit une information sur ses droits et obligations. Il y manque toutefois une précision, que nous souhaitons introduire par cette phrase : « Tout demandeur est informé de son droit inconditionnel à bénéficier d’un hébergement d’urgence, d’un premier examen de santé et de la possibilité d’être assisté par une association pour préparer le dépôt de sa demande d’asile. »

La bonne information du demandeur sur ses droits est un sujet important. Il serait donc utile de préciser encore davantage l’organisation de la procédure.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’objet de cet amendement est déjà satisfait par les dispositions actuelles de l’article L. 741-1 du CESEDA, en vigueur depuis le 20 mars dernier.

La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle y serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Défavorable.

M. le président. Madame de la Gontrie, l’amendement n° 354 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. J’ai la version de l’article en question sous les yeux, et ce n’est pas ce qui est écrit. Je maintiens donc mon amendement, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 354 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 523 rectifié, présenté par M. Arnell, Mmes Costes et M. Carrère, MM. Requier, Artano, A. Bertrand, Castelli, Collin, Corbisez, Gold, Guérini et Guillaume, Mme Laborde et MM. Menonville et Vall, est ainsi libellé :

Alinéas 4 et 5

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Guillaume Arnell.

M. Guillaume Arnell. Les alinéas 4 et 5 de l’article 7 de ce projet de loi prévoient une modification importante de l’article L. 741-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA, relatif aux modalités de dépôt de la demande d’asile. Il est ainsi prévu de contraindre les familles à déposer une demande d’asile pour l’ensemble de ses membres.

Actuellement, cet article dispose seulement que « tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l’asile se présente en personne à l’autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l’État responsable ».

S’agissant des mineurs accompagnés de leurs parents, on distingue aujourd’hui deux cas de figure : soit le motif de la demande d’asile repose sur les parents, et, dans ce cas, il n’y a pas de demande individuelle déposée au nom de l’enfant, mais celui-ci bénéficie, sous certaines conditions, d’un droit de séjour équivalent à celui du parent protégé ; soit le motif de la demande repose sur l’enfant, essentiellement pour un risque de mariage forcé ou de mutilation génitale, ce qui donne lieu à une demande propre.

Manifestement, ce nouvel alinéa tend à réduire le nombre de demandes d’asile en évitant la multiplication des demandes au sein de chaque famille.

Or le droit d’asile est un droit individuel et non familial, sans que cela fasse ensuite obstacle à l’exercice du droit de mener une vie familiale normale de l’étranger protégé, grâce au mécanisme de réunification familiale. Ce rapprochement instille une confusion de nature à en entretenir une autre, celle qui existe actuellement entre les demandeurs d’asile et les migrants économiques.

En outre, la rédaction actuelle est ambiguë et pourrait être interprétée comme occultant les cas de figure où le motif légitime de la demande repose sur l’enfant. Un examen unique de la demande d’asile d’une famille pourrait ainsi paradoxalement aboutir à une moindre protection des enfants, donc de l’ensemble de leur famille.

D’autres pays, comme la Suède, prévoient justement explicitement un droit des enfants à solliciter personnellement l’asile. C’est pourquoi nous proposons de nous en tenir au droit en vigueur, faute d’une meilleure rédaction.

M. Guillaume Arnell. Ce point précis souligne la tension qui peut exister entre le droit de mener une vie familiale normale et l’intérêt supérieur de l’enfant.

M. le président. L’amendement n° 355 rectifié bis, présenté par Mme S. Robert, M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 5, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

La décision de l’office accordant ou rejetant la protection n’est pas opposable aux enfants ayant déclaré au cours de l’entretien que la personne qui a présenté la demande n’était pas en droit de le faire, sauf si cette personne en apporte la preuve contraire.

La parole est à Mme Sylvie Robert.

Mme Sylvie Robert. Cet amendement a pour objet de consolider le mécanisme prévoyant qu’une décision de l’OFPRA n’est pas opposable au mineur lorsque la personne qui a formulé la demande n’était pas en droit de le faire.

Le dispositif prévu par l’alinéa 5 de cet article est intéressant. D’une part, il offre la protection la plus étendue aux enfants mineurs. D’autre part, il établit un mécanisme protecteur lorsque la personne présentant une demande d’asile au nom de l’enfant mineur n’était, en réalité, pas en droit de le faire.

Néanmoins, en l’état, la dernière phrase de cet alinéa soulève un vrai problème. En effet, la charge de la preuve repose sur l’enfant mineur qui devrait prouver que la personne présentant la demande d’asile en son nom n’est pas en droit de le faire. Or, mes chers collègues, comment un enfant de neuf ou dix ans pourrait-il apporter cette preuve ? Il s’agit donc de renforcer le caractère protecteur du mécanisme en renversant la charge de la preuve.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Le droit positif est plus favorable que l’amendement n° 523 rectifié. Lorsque des parents font une demande de protection au titre du statut de réfugié, leurs enfants mineurs bénéficient d’une protection de même niveau. Ce système s’applique désormais à ceux qui font une demande de protection subsidiaire, ce qui n’était pas le cas auparavant.

En ce qui concerne l’amendement n° 355 rectifié bis, lorsque les demandes sont faites séparément par les parents, dans les deux cas susmentionnés, la protection la plus élevée est accordée aux enfants.

Le droit positif est donc très protecteur, ce qui est une bonne chose. Le système est nouveau pour ce qui concerne la protection subsidiaire. Il s’agit d’une évolution positive.

Ces deux amendements visant à s’affaiblir le dispositif en place, j’émets deux avis défavorables.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Comme la commission, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Arnell, pour explication de vote.

M. Guillaume Arnell. Je ne fais pas la même lecture que M. le rapporteur de cet amendement, dont les dispositions ne semblent pas le satisfaire. Je le maintiens, quitte à ce qu’il soit rejeté.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 523 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 355 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 558 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, M. Arnell, Mme Costes, MM. Artano, A. Bertrand, Castelli, Collin, Corbisez, Gabouty, Gold, Guérini et Guillaume, Mmes Guillotin et Laborde et MM. Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 5

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« Dès leur arrivée sur le territoire, les personnes mentionnées au premier alinéa du présent article bénéficient d’un hébergement au sens du 2° de l’article L. 744-3.

« Au sein de cet hébergement d’urgence, les personnes mentionnées au premier alinéa du présent article bénéficient d’une information sur le droit d’asile, d’un premier examen de leur santé et d’une orientation vers l’autorité administrative compétente pour enregistrer la demande d’asile. » ;

La parole est à Mme Josiane Costes.

Mme Josiane Costes. Cet amendement vise à consacrer un droit à l’hébergement pour l’ensemble des demandeurs d’asile dont la demande a été acceptée. Il n’est aujourd’hui pas tolérable que des réfugiés auxquels le droit d’asile a été reconnu dorment à la rue.

Les dispositions de cet amendement ne suffiront peut-être pas à éviter les situations de rue, mais elles sont une première étape et elles s’inscrivent dans la logique de la circulaire du 4 décembre 2017.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’amendement vise à légaliser les centres d’accueil et d’évaluation des situations, les CAES, qui permettent de prendre en charge les étrangers avant l’enregistrement de leur demande d’asile. Il est satisfait par l’article 9, la commission ayant d’ailleurs renforcé les CAES en les incluant dans les logements pris en compte par la loi.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

Mme Josiane Costes. Je le retire, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 558 rectifié est retiré.

L’amendement n° 57 rectifié bis, présenté par M. Karoutchi, Mme Canayer, MM. Poniatowski, Cambon et Kennel, Mme Garriaud-Maylam, M. Mayet, Mme Procaccia, MM. Bizet, Brisson et Duplomb, Mmes Deroche et Micouleau, M. Daubresse, Mme Berthet, MM. Courtial, Morisset et Savary, Mme Dumas, MM. Revet, Longuet, Danesi et Ginesta, Mme Thomas, M. Schmitz, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. Genest, Joyandet, Piednoir, Charon et Dallier, Mmes Deseyne et Lassarade, M. B. Fournier, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bouchet, Mme Boulay-Espéronnier, M. J.M. Boyer, Mmes Chain-Larché, de Cidrac et Delmont-Koropoulis, MM. Gilles, Gremillet, Mandelli, Milon, Pierre, Sido et Cardoux et Mme Lamure, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Toute personne répertoriée sur le fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste est non éligible à la procédure de demande d’asile. » ;

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Il y a quelques semaines, la presse s’est fait l’écho d’un problème : une personne a obtenu le statut de réfugié, mais il est apparu ultérieurement qu’elle avait appartenu à une organisation terroriste.

Cet amendement vise simplement à préciser que ne sont pas éligibles à la procédure de demande d’asile toutes les personnes qui, d’une manière ou d’une autre, seraient inscrites sur le fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste. Le rapporteur m’a affirmé que la mesure allait de soi, même si elle n’est pas inscrite dans le texte. Si la commission et le Gouvernement me le confirment, l’amendement sera retiré.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Je confirme à M. Karoutchi et aux auteurs de l’amendement ce que j’ai déjà expliqué dans le cadre de l’examen de l’article 4 : à partir du moment où l’une des personnes est enregistrée dans l’un de ces fichiers, la protection ne peut être accordée.

La commission demande donc le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Je n’étais pas présent hier lors de l’examen de l’article 4, mais je confirme ce que vient de dire M. le rapporteur. Effectivement, le projet de loi prévoit que l’OFPRA pourra solliciter la réalisation d’enquêtes administratives pour éviter que des gens ne constituent une menace pour la sécurité du pays.

Le Gouvernement sollicite donc, lui aussi, le retrait de cet amendement.

M. le président. Monsieur Karoutchi, l’amendement n° 57 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Roger Karoutchi. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 57 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 350 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Après la première phrase du premier alinéa de l’article L. 741-2, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le demandeur peut introduire sa demande d’asile auprès de l’office en français ou dans la langue qu’il a indiquée lors de l’enregistrement de sa demande. » ;

La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. Cet amendement a pour objet de clarifier les règles linguistiques qui régissent l’introduction d’une demande d’asile auprès de l’Office.

Le projet de loi prévoit que le demandeur d’asile devra désormais indiquer dès l’enregistrement de sa demande d’asile la langue dans laquelle il préfère être entendu. Ce choix lui sera opposable pendant toute la durée de l’examen de sa demande. Cependant l’article 7 est imprécis et n’indique pas à partir de quelle étape de la procédure s’applique la règle selon laquelle le demandeur est entendu dans la langue qu’il a indiquée lors de l’enregistrement.

Cet amendement vise à prévoir explicitement que le demandeur pourra introduire sa demande devant l’office soit en français, soit dans la langue qu’il aura indiquée lors de l’enregistrement de sa demande.

Actuellement, l’article R. 723-1 oblige le demandeur à déposer sa demande d’asile « en français sur un imprimé établi par l’office ». Or obliger des demandeurs d’asile qui, dans la très grande majorité des cas, ne maîtrisent pas notre langue à rédiger en français les motivations de leur demande est une absurdité.

Face à cette obligation, les demandeurs d’asile se trouvent souvent démunis, ce qui fait notamment le jeu des trafics de traduction. De prétendus traducteurs, contre rémunération, fournissent aux demandeurs des récits « clés en main » en français. Les demandeurs se trouvent alors, lors de leur entretien, dans la situation de ne pas pouvoir soutenir un récit ne correspondant pas à la réalité de leur histoire.

Ce trafic, outre qu’il soutire de l’argent à des demandeurs d’asile, nuit à leur démarche. Alors même qu’ils justifieraient d’un dossier solide leur permettant de bénéficier d’une protection, ils se trouvent prisonniers d’un récit fabriqué de toutes pièces qui va d’emblée les décrédibiliser.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Le présent amendement tend à permettre l’introduction de la demande d’asile devant l’OFPRA en français ou dans la langue indiquée lors de l’enregistrement de la demande.

L’article 7 du projet de loi dispose que le choix de la langue de la procédure est prévu dès l’enregistrement de la demande d’asile à la préfecture. Il est ensuite opposable pour l’entretien personnel à l’OFPRA et lors du recours devant la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA.

En revanche, le dépôt de la demande d’asile à l’OFPRA doit toujours se faire en français. Cela peut interroger, dans le contexte du droit d’asile où les personnes sont en grande majorité non francophones. Toutefois, conformément à l’article 2 de la Constitution selon lequel « la langue de la République est le français », l’usage du français est imposé aux usagers, que sont les demandeurs d’asile, dans leurs relations avec les administrations. Des dispositions qui reconnaîtraient un droit à pratiquer une autre langue que le français dans la vie publique seraient contraires à la Constitution.

En conséquence, les problématiques que vous soulevez, qui sont bien réelles, ne peuvent trouver de réponse que dans l’assistance des demandeurs d’asile par les associations et leurs conseils pour les aider à rédiger leur demande et leur recours en français, ce qui est déjà très largement le cas.

La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Nous avons déjà longuement évoqué ce problème de la langue. Le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement doit être maintenu ! Monsieur le rapporteur, lorsque nous l’avons défendu en commission, vous nous avez répondu qu’il était satisfait. Or, maintenant, vous nous dites que son adoption serait non constitutionnelle. J’avoue que j’ai du mal à suivre.

En tout état de cause, cette disposition simplifierait énormément les choses et permettrait d’obtenir des récits plus exacts, sincères et complets.

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. M. le rapporteur a reconnu que, dans bon nombre de cas, cette disposition posait des difficultés majeures. Cependant, il ne nie pas l’existence de fraudes et admet que des personnes profitent de cette difficulté pour soutirer de l’argent aux demandeurs d’asile, ce qui ne leur permet pas de défendre correctement leurs droits.

C’est la raison pour laquelle je maintiens cet amendement. Certes, l’argument évoqué m’interpelle, mais, finalement, c’est bien le demandeur d’asile qui se trouve pénalisé et qui n’est pas en situation de défendre sa demande.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 350 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 559 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, M. Arnell, Mme Costes, MM. Artano, A. Bertrand, Castelli, Collin, Corbisez, Dantec, Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :

Alinéas 6 et 7

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Les alinéas 6 et 7 du présent projet de loi tendent à figer le choix de la langue dans laquelle le demandeur d’asile sera entendu pendant toute la durée de la procédure, y compris en cas de recours devant la CNDA.

Comme nous l’avons rappelé précédemment, il s’agit d’une restriction à l’exercice du droit du demandeur d’asile à être entendu dans une langue qu’il comprend. Voilà pourquoi nous voulons supprimer cette disposition.

M. le président. L’amendement n° 46 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et MM. Savoldelli et Watrin, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 741-2-1. – Lors de l’enregistrement de sa demande d’asile, l’étranger est informé, dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu’il la comprenne, des langues dans lesquelles il peut être entendu lors de l’entretien personnel mené par l’office prévu à l’article L. 723-6. Il indique celle dans laquelle il préfère être entendu. Tout au long de la procédure, il peut être entendu dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu’il la comprenne. »

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Les bases juridiques européennes applicables au droit d’asile prévoient un droit à l’information du demandeur d’asile « dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu’il la comprenne », aux termes de l’article 12 A de la directive Procédures.

Or la nouvelle formulation retenue par le projet de loi, à savoir « dans une langue dont il a une connaissance suffisante », laisse supposer que l’on pourrait se contenter d’une simple connaissance d’une langue, sans s’assurer que le demandeur d’asile la comprend réellement.

En outre, le demandeur doit opérer un premier choix linguistique lors de l’enregistrement de sa demande, qui lui sera opposable durant toute la durée d’examen de la procédure, y compris en cas de recours devant la CNDA. Nous estimons, comme l’a également souligné la Commission nationale consultative des droits de l’homme, que la rigidité de ce dispositif est un frein à l’équité de l’ensemble de la procédure d’asile.

Un demandeur d’asile pourrait ainsi, par exemple, cocher la case mentionnant qu’il comprend bien le français et l’anglais, alors que ses connaissances seraient plus qu’approximatives, de peur justement de ne pas voir sa demande aboutir et d’être débouté.

Or tout justiciable a le droit d’être entendu dans une langue qu’il maîtrise ou dont il aurait une connaissance suffisante pour comprendre et être entendu. Le sens de notre amendement est de rétablir ce droit, qui devrait être sacralisé. N’oublions pas la situation de ces exilés, qui jouent bien souvent leur vie lorsqu’ils motivent leur demande d’asile.

M. le président. L’amendement n° 352 rectifié bis, présenté par Mme S. Robert, M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 7, troisième phrase

Remplacer le mot :

suffisante

par le mot :

effective

La parole est à Mme Sylvie Robert.

Mme Sylvie Robert. La question de la langue est vitale, parce qu’elle est au cœur de la procédure.

Cet amendement de repli vise à préciser que le demandeur d’asile doit avoir une connaissance « effective » de la langue dans laquelle se déroule l’entretien, et non « suffisante », dans la mesure où une connaissance « suffisante » ne garantit aucunement que le demandeur sera capable de saisir les subtilités des questions qui peuvent lui être adressées. C’est une affaire de droit, mais c’est aussi une affaire d’effectivité du droit d’asile.

Certes, le rapporteur nous a dit que le texte était suffisant, raison pour laquelle il s’opposerait aux amendements. Pour autant, la question des langues est aujourd’hui cruciale, surtout en matière de droit d’asile pour les demandeurs.

M. le président. L’amendement n° 225 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 7, troisième phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et par laquelle il peut se faire comprendre

La parole est à Mme Gisèle Jourda.