Mme la présidente. L’amendement n° 175, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 17
Après les mots :
contrat de service public
insérer les mots :
qui s’avère nécessaire pour mener les procédures d’attribution desdits contrats
II. – Alinéa 20
Rédiger ainsi le début de cet alinéa :
« Un décret en Conseil d’État, pris après avis de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, fixe les conditions d’application du présent article. Il établit notamment une liste de catégories d’informations …
La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre. Cet amendement assez technique vise à apporter un certain nombre de précisions sur les conditions de transmission des données.
Dans sa rédaction actuelle, l’article 2 quater traite en même temps de deux types d’informations : celles que l’opérateur en place doit nécessairement fournir à l’autorité organisatrice pour lui permettre d’organiser des appels d’offres, et celles que l’opérateur choisi doit fournir tout au long de l’exécution du contrat. Les premières relèvent de la loi et de l’obligation qui est faite à l’opérateur sortant, les secondes de la contractualisation entre l’autorité organisatrice et l’opérateur. Ces dernières ne me semblent pas devoir être mentionnées dans la loi.
Cet amendement vise en outre à préciser le contenu du décret annoncé dans l’article. Il s’agit d’indiquer que ce décret fixera non seulement une liste des informations à fournir, mais également un certain nombre de modalités de fourniture de ces informations.
Mme la présidente. L’amendement n° 201 rectifié bis, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée:
Les entreprises, les gestionnaires d’infrastructure et les exploitants d’installations de service indiquent quelles informations ils estiment relever du secret en matière industrielle et commerciale.
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Cet amendement vise à revenir à la rédaction initiale de l’alinéa, en tenant compte, cependant, des nouvelles dispositions introduites par la commission.
Il nous paraît essentiel d’adopter cet amendement pour protéger nos savoir-faire industriels et commerciaux. Cette question représente un véritable enjeu pour nos industries.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Le sujet est très délicat. La difficulté est de savoir où l’on place le curseur en matière de confidentialité des informations. La SNCF, qui est une grande maison, ne nous a pas jusqu’à présent habitués à beaucoup de transparence, puisque même les parlementaires ont du mal à obtenir les informations qu’ils demandent.
La commission a essayé de positionner au mieux le curseur, même si, je l’avoue humblement, nous n’avons aucune certitude à cet égard. En tout état de cause, nous avons recherché un équilibre.
Les auteurs de l’amendement n° 200 souhaitent revenir sur le principe de la transmission aux autorités organisatrices d’informations couvertes par le secret industriel et commercial.
Le souci de protéger ces informations est tout à fait légitime, mais il faut aussi avoir à l’esprit que la transmission de certaines données couvertes par le secret est indispensable pour que l’autorité organisatrice puisse définir correctement le périmètre de son appel d’offres, apprécier l’équilibre économique du contrat et garantir le caractère équitable et non discriminatoire de la procédure de mise en concurrence. L’ARAFER a d’ailleurs clairement affirmé cette nécessité.
Je relève que le projet de loi initial prévoyait déjà la transmission de données couvertes par le secret industriel et commercial. La rédaction adoptée par la commission a établi un équilibre entre ces deux préoccupations légitimes : elle a certes élargi le champ des données à transmettre aux autorités organisatrices, mais elle a aussi, en parallèle, renforcé la protection des informations couvertes par le secret industriel, en prévoyant l’application de l’article 226-13 du code pénal en cas de divulgation de ces données à des tiers non autorisés.
Par ailleurs, la communication de certaines de ces informations aux candidats à un appel d’offres est aussi nécessaire pour éviter que l’opérateur historique ne bénéficie d’une rente informationnelle lui donnant un avantage concurrentiel par rapport aux nouveaux entrants. Je rappelle que le dispositif adopté par la commission est proportionné et encadré : cette communication n’aura lieu que lorsqu’elle est nécessaire pour éviter des distorsions de concurrence, et dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État, pris après avis de l’ARAFER, pour protéger la confidentialité de ces données. Nous avons prévu ceinture et bretelles !
Certaines informations devront, par exemple, être présentées par fourchette de valeurs ou ne pourront être consultées que dans une salle spécifique.
En conséquence, la commission a émet un avis défavorable sur l’amendement n° 200. J’espère cependant avoir répondu aux préoccupations de ses auteurs.
L’amendement n° 175 tend quant à lui à rétablir en partie la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, pour restreindre l’obligation de transmission d’informations aux autorités organisatrices aux seules informations « qui s’avèrent nécessaires pour mener les procédures d’attribution des contrats ».
Une telle disposition nous semble trop restrictive, car il faut que les autorités organisatrices puissent avoir accès à ces informations tout au long de l’exécution des contrats pour en assurer le suivi. Je m’appuie, là encore, sur la contribution de l’ARAFER sur l’ouverture à la concurrence des services conventionnés. Nous connaissons trop bien les difficultés rencontrées par les autorités organisatrices pour obtenir des informations de la part de l’opérateur historique ; on ne saurait se contenter des seules informations nécessaires à la préparation des appels d’offres. La commission a émis un avis défavorable.
Enfin, la commission est favorable à l’amendement n° 201 rectifié bis. C’est une précision qui permet de renforcer le dispositif en matière de protection des informations couvertes par le secret des affaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. L’amendement n° 200 vise à interdire aux autorités organisatrices d’obtenir de l’opérateur sortant des informations relevant du secret industriel et de les communiquer.
Il s’agit bien entendu d’un sujet très sensible, mais il peut dans certains cas être utile à l’autorité organisatrice de disposer d’un certain nombre d’informations relevant du secret industriel et commercial. La rédaction issue des travaux de la commission, qui mentionne la possibilité de transmettre ces informations, mais de façon très encadrée, me semble constituer un bon équilibre. Par conséquent le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
L’amendement n° 201 rectifié bis vise tout d’abord à rétablir la rédaction du texte issu de l’Assemblée nationale, en prévoyant que les opérateurs précisent aux autorités organisatrices quelles informations relèvent selon eux du secret industriel et commercial. C’est de toute façon une précision qui n’aurait qu’une valeur indicative, permettant à l’autorité organisatrice de détecter, en amont, les sujets sur lesquels il pourrait y avoir divergence, donc contentieux, en cas de transmission.
Je pourrais être d’accord avec cette disposition de l’amendement, mais je suis défavorable à la suppression de l’impossibilité d’invoquer le secret industriel et commercial pour empêcher la transmission d’informations, y compris dans des conditions encadrées. Je suis donc défavorable à l’amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.
M. Claude Bérit-Débat. J’ai bien entendu les arguments de M. le rapporteur. Nous avons déjà eu un débat sur la clause du secret des affaires. Ce n’est pas aussi simple que cela…
Vous avez rappelé, monsieur le rapporteur, les efforts de la commission pour élaborer une rédaction équilibrée. Nous représentons un certain nombre d’autorités organisatrices qui souhaitent faire évoluer les choses. Nous écoutons aussi l’opérateur historique public, SNCF Mobilités, qui, dans certains cas, a fait de gros efforts. L’amélioration de sa rentabilité et du réseau dépend de la préservation d’un certain nombre de secrets de l’entreprise. Il y a donc là un véritable problème.
Nous retirons l’amendement n° 200 au profit de l’amendement n° 201 rectifié bis. Je remercie M. le rapporteur d’avoir donné un avis favorable à celui-ci. Par ailleurs, nous sommes favorables à l’amendement n° 175 du Gouvernement.
Mme la présidente. L’amendement n° 200 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 175.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 43, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 10 à 14
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 2121-15. – Par dérogation à l’article L. 2121-14, l’autorité organisatrice peut attribuer directement un contrat de service public de transport ferroviaire de voyageurs dans les cas prévus aux 2, 3 bis, 4, 4 bis, 4 ter et 5 de l’article 5 du règlement (CE) n° 1370/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, et abrogeant les règlements (CEE) n° 1191/69 et (CEE) n° 1107/70 du Conseil.
« Pour l’application de l’article 5 du règlement (CE) n° 1370/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 précité, toute personne à qui la décision est susceptible de faire grief peut demander à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières d’évaluer, préalablement à l’attribution du contrat, la décision motivée prise par l’autorité organisatrice d’attribuer un contrat de service public en application des 3 bis, 4 bis ou 4 ter du même article 5.
« Les conditions d’application du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Au travers de cet amendement, nous demandons a minima le rétablissement de la rédaction initiale de l’article 2 quater.
En effet, en commission, un amendement de Jean-François Longeot a été adopté, qui tend à durcir le recours aux exceptions prévues par le règlement européen OSP, conformément à l’esprit de la proposition de loi Maurey, dont notre collègue avait été le rapporteur et qui allait plus loin encore, en supprimant toute possibilité de recours à ces dérogations.
Alors que le texte initial permettait de soumettre pour avis à l’ARAFER le recours aux exceptions permises par le règlement, l’amendement susmentionné visait à transformer cet avis motivé en avis conforme pour deux exceptions : tout d’abord, la dérogation pour circonstances exceptionnelles, prévue au 3 bis de l’article 5 du règlement européen du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route ; ensuite, la dérogation dite « de performances », prévue au 4 bis du même article.
Nous contestons ce pouvoir d’autorisation confié à l’ARAFER. En effet, nous le savons tous, le rôle et la raison d’être de cette autorité indépendante sont de faire de la place aux nouveaux entrants. C’est d’ailleurs cette même autorité qui avait déclaré que, si prise isolément, chacune des dérogations autorisées par le quatrième paquet ferroviaire peut présenter un intérêt opérationnel, leur application cumulée pourrait faire peser un risque de ralentissement du processus d’ouverture à la concurrence, à rebours de l’esprit de ce quatrième paquet ferroviaire. Nous voyons bien quel type de décisions pourra rendre l’ARAFER…
Nous proposons de respecter le droit européen, lequel permet le recours à ces exceptions sans qu’il soit nécessaire d’obtenir un avis conforme de l’ARAFER. Le présent amendement vise donc à rétablir le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale.
Mme la présidente. L’amendement n° 250, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 10 et 12
Après le mot :
directement
insérer les mots :
à l’opérateur historique
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Nous nous interrogeons, madame la ministre, sur l’attribution directe d’un contrat de service public, c’est-à-dire sur la possibilité, pour une autorité organisatrice de transport, une AOT, de ne pas recourir à une procédure de mise en concurrence.
Le règlement OSP a en effet prévu un certain nombre de dérogations à la procédure de mise en concurrence. Nous considérons que, lorsque la procédure est d’attribution directe, conformément aux paragraphes 3 bis, 4, 4 bis et 4 ter de l’article 5 du règlement OSP, le contrat de service public doit être attribué à l’opérateur historique.
Aujourd’hui, SNCF Mobilités est en situation de monopole. Demain, il u aura des opérateurs concurrents. Permettre, dès la phase d’ouverture à la concurrence, d’attribuer directement un contrat de service public, c’est-à-dire sans recourir à une procédure de mise en concurrence, à un opérateur nouvel entrant serait contraire à l’esprit même de l’ouverture à la concurrence et pourrait même constituer une forme de favoritisme, que les lois Sapin visent à empêcher.
Nous nous interrogeons sur ce point et souhaiterions bénéficier, madame la ministre, de votre éclairage.
Mme la présidente. L’amendement n° 161, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 10
1° Après la référence :
2,
insérer la référence :
3 bis,
2° Après la référence :
4,
insérer la référence :
4 bis,
II. – Alinéa 11
Remplacer la référence :
du 4 ter
par les références :
des 3 bis, 4 bis et 4 ter
III. – Alinéas 12 et 13
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre. Cet amendement a pour objet de revenir sur l’introduction en commission d’un avis conforme de l’ARAFER pour encadrer le recours à certaines exceptions à l’obligation de mise en concurrence prévues dans le règlement OSP.
La disposition qui a été adoptée en commission va au-delà de l’obligation d’évaluation par un organisme indépendant prévue par les textes. Les garanties de transparence, avec une évaluation préalable de l’ARAFER et la possibilité d’en appeler au juge avant l’attribution directe, me semblent suffisamment dissuasives pour prévenir tout comportement inapproprié de la part des autorités organisatrices.
Une procédure d’avis conforme irait aussi, de façon plus générale, à l’encontre de la position de principe du Gouvernement, qui est de donner toutes les cartes aux régions et de les laisser libres de décider comment elles organiseront l’ouverture à la concurrence, que ce soit pour le choix des dates, la définition des lots ou le choix de recourir ou non aux exceptions prévues dans le règlement OSP, étant entendu que, dans le cas d’un tel recours, un contrôle est exercé par une autorité indépendante, comme prévu par le texte sans pour autant qu’un avis conforme de l’ARAFER soit nécessaire.
Mme la présidente. L’amendement n° 199, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
M. Claude Bérit-Débat. Cet amendement va dans le même sens que l’amendement n° 250, que vient de présenter Yves Daudigny.
L’article 2 quater autorise les AOT à déroger aux procédures de mise en concurrence et à recourir, dans les cas prévus par l’article 5 du règlement européen OSP, à la procédure d’attribution directe. Il conditionne cependant le choix de l’AOT d’utiliser ces dérogations à l’avis de l’ARAFER lorsque celle-ci est saisie par « toute personne à qui la décision est susceptible de faire grief ».
Nous considérons que le choix de l’attribution directe, permise par le règlement OSP, ne doit pas être soumis à avis de l’ARAFER et que l’introduction de cet alinéa relève de la surtransposition.
Mme la présidente. L’amendement n° 245, présenté par M. Jacquin, Mme Lienemann, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mme de la Gontrie, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Cette évaluation donne lieu à un avis consultatif.
L’amendement n° 249, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 12
Supprimer les mots :
, après avis conforme de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières rendu des conditions fixées au III,
II. – Alinéa 13
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Compte tenu des explications que vient de donner Mme la ministre, je retire l’amendement n° 249.
Mme la présidente. L’amendement n° 249 est retiré.
L’amendement n° 261, présenté par M. Cornu, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Après la référence :
4 bis
insérer la référence :
de l’article 5
La parole est à M. le rapporteur, pour le présenter et pour donner l’avis de la commission sur les autres amendements.
M. Gérard Cornu, rapporteur. L’amendement n° 261 est de précision.
Les amendements nos 43 et 161 sont très proches : Gouvernement et groupe CRCE, même combat ! (Sourires.)
Mme Éliane Assassi. Incroyable, n’est-ce pas ?
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Cela change un peu…
M. Gérard Cornu, rapporteur. Le règlement OSP prévoit un certain nombre de dérogations à l’obligation de mise en concurrence des services conventionnés, que les États membres sont libres d’autoriser ou non dans leur droit national.
Certaines de ces dérogations sont bien délimitées et ne posent pas de problème. C’est le cas de celle qui est prévue pour les contrats de moins de 7,5 millions d’euros ou de moins de 500 000 kilomètres de service. Contrairement à la proposition de loi Maurey-Nègre, le présent texte, madame Assassi, conserve ces dérogations très précises.
Nous avons estimé, en revanche, que deux dérogations aussi larges que la dérogation pour circonstances exceptionnelles et la dérogation de performances justifiée par les caractéristiques structurelles et géographiques du marché et du réseau pourraient complètement fausser la concurrence, voire permettre à des régions de bloquer l’ouverture à la concurrence. Sans doute est-ce pour cette raison que vous souhaitez conserver l’ensemble des dérogations…
Mme Éliane Assassi. Vous avez tout compris !
M. Gérard Cornu, rapporteur. L’ARAFER a d’ailleurs souligné que ces dérogations pourraient être utilisées pour retarder la mise en concurrence.
Pour éviter ce risque, la commission aurait pu interdire le recours à ces dérogations ; elle ne l’a pas fait, comprenant que les régions souhaitaient garder la possibilité de les utiliser. La commission a, en conséquence, soumis le recours à ces deux dérogations très générales à un avis conforme de l’ARAFER, pour éviter une utilisation de ces dérogations qui pourrait exposer les régions concernées à des contentieux. Il s’agit ainsi de sécuriser le choix de celles-ci. C’est une position de compromis.
La commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 43 et 161.
L’amendement n° 250 vise à préciser que lorsqu’une autorité organisatrice attribuera directement un contrat après 2023, en application des dérogations prévues par le règlement européen, elle l’attribuera à SNCF Mobilités. Cela n’est pas conforme au droit européen, qui ne permet pas le maintien des monopoles historiques. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 199 tend à supprimer la possibilité, pour toute personne à qui la décision fait grief, de saisir l’ARAFER pour évaluer le recours à la dérogation à l’obligation de mise en concurrence prévue au 4 ter de l’article 5 du règlement européen. Cette dérogation concerne des portions très limitées du réseau ferré national sur lesquelles les services peuvent être assurés par un opérateur qui gère aussi l’infrastructure.
Les auteurs de l’amendement évoquent une surtransposition du droit européen, mais le règlement européen prévoit bien, au 7 de son article 5, « la possibilité de demander que la décision motivée prise par l’autorité compétente fasse l’objet d’une évaluation par un organisme indépendant désigné par l’État membre concerné », notamment pour la dérogation prévue à l’article 4 ter.
C’est exactement ce que prévoit l’alinéa 11. La commission ne souhaitant pas revenir sur cette disposition qui est conforme au droit européen, l’avis est défavorable.
L’amendement n° 245 vise à préciser que l’évaluation de l’ARAFER du recours à la dérogation prévue au 4 ter de l’article 5 du règlement OSP donne lieu à un avis consultatif.
Je le redis, il s’agit d’une dérogation qui concerne des portions très limitées du réseau ferré national, sur lesquelles les services peuvent être assurés par un opérateur qui gère aussi l’infrastructure. Il s’agit a priori, d’après les services du ministère, des lignes à voie métrique Saint-Gervais-Vallorcine, dans la vallée de l’Arve, dite du « train jaune », en Occitanie, dite du « Blanc-Argent », dans la région Centre-Val-de-Loire, et Nice-Digne, en région PACA, ainsi que des lignes de chemin de fer corses.
Il me semblait aller de soi que l’évaluation faite par l’ARAFER avait un caractère consultatif, puisque, pour les deux autres dérogations, prévues au 3 bis et 4 bis, nous avons prévu un avis conforme. Cependant, je ne suis pas opposé à une telle précision.
L’avis est donc favorable sur l’amendement n° 245.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement n° 43 au profit de son amendement n° 161. À défaut, l’avis sera défavorable.
La possibilité d’attribution directe à l’opérateur historique au-delà de 2023 prévue par l’amendement n° 250 n’est pas conforme au règlement OSP. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Le dispositif de l’amendement n° 199 est contraire au règlement européen. L’avis est défavorable.
Sur l’amendement n° 245, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Enfin, le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 261 de la commission.
Mme la présidente. Madame Assassi, retirez-vous l’amendement n° 43 au profit de l’amendement n° 161 du Gouvernement ?
Mme Éliane Assassi. Pour une fois, notre position et celle du Gouvernement sont proches, mais je maintiens tout de même l’amendement n° 43, madame la présidente ! (Sourires.)
Mme la présidente. Monsieur Daudigny, l’amendement n° 250 est-il maintenu ?
M. Yves Daudigny. Il nous paraissait très important d’insister sur ce point. Après avoir entendu les explications de Mme la ministre, nous retirons l’amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 250 est retiré.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Comme l’a rappelé M. le rapporteur, à l’origine, la proposition de loi que j’avais déposée avec Louis Nègre marquait une hostilité à toute dérogation, car nous voulions que l’ouverture à la concurrence intervienne le plus rapidement possible. Lors de l’examen de notre proposition de loi, pour tenir compte de l’avis des régions, nous en avons accepté le report à 2023.
La commission, pour répondre davantage encore aux attentes des régions, a retenu l’ensemble des dérogations possibles. Cependant, l’interprétation de la dérogation pour circonstances exceptionnelles et de celle dite de performances de l’entreprise peut ouvrir la voie à certaines dérives. C’est la raison pour laquelle nous avons introduit en commission la nécessité d’obtenir un avis conforme de l’ARAFER pour pouvoir recourir à ces dérogations.
Cela me semble important pour éviter des interprétations excessives ou erronées de ces exceptions, mais aussi pour sécuriser les décisions des régions qui voudront y recourir. Sans cette sécurisation, ces décisions pourront être contestées devant des juridictions administratives par des entreprises qui n’accepteront pas que les marchés n’aient pas été ouverts à la concurrence. Il est dans l’intérêt des régions elles-mêmes d’obtenir cet avis conforme.
Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, ce sujet fait partie des points de divergence que nous avons avec le Gouvernement. Nous ne vivons pas dans un monde de Bisounours et nous ne cherchons pas à « collaborer avec le Gouvernement », comme nous en a presque accusés aujourd’hui M. Jacquin, s’exprimant en direct sur un plateau de télévision. Notre attitude est constructive, mais nous avons des divergences avec le Gouvernement, notamment sur la question du rôle de l’ARAFER.
Nous avons, au sein de la commission, voulu conforter le rôle de régulateur de l’ARAFER, qui est tout à fait essentiel dans l’organisation du système ferroviaire en France. Malheureusement, plusieurs amendements – l’amendement n° 161 et d’autres, relatifs notamment au contrat de performance, à la tarification provisoire et aux délais dans lesquels l’ARAFER doit rendre ses avis –, montrent que le Gouvernement, sans doute influencé par de mauvais génies, a toujours en tête de reprendre un peu de pouvoir à l’autorité de régulation. Nous ne sommes pas d’accord avec lui sur ce point, et je tenais à le souligner.