M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Je partage votre position, monsieur Bérit-Débat.
M. Olivier Jacquin. Oh !
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il est important de renforcer le rôle du Haut Comité du système de transport ferroviaire, et ce d’autant plus que le secteur s’ouvre à la concurrence.
Le Haut Comité pourra s’appuyer sur l’état des lieux réalisé annuellement par l’ARAFER sur l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire. Cet état des lieux permettra effectivement de faire le point, notamment sur l’évolution des dessertes de TGV.
La commission est donc favorable à l’amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Le Haut Comité du système de transport ferroviaire, qui a été créé par la loi de 2014, rassemble les collectivités locales, les usagers, les ONG, les organisations syndicales et les entreprises ferroviaires. Malheureusement, la loi de 2014 ne lui a quasiment confié aucune mission. Il semble donc important de pouvoir la compléter sur ce point aujourd’hui.
Je suis donc favorable à ce que les missions du Haut Comité soient élargies et qu’on lui permette de rendre des avis au ministre chargé des transports. Il est tout aussi important qu’il soit chargé du suivi des aspects économiques du système de transport ferroviaire et qu’il ait la possibilité de donner un avis sur les modalités d’ouverture à la concurrence, notamment sur la base du rapport de l’ARAFER.
Cette proposition correspond à l’une des attentes formulées au cours du débat sur la qualité du service public ferroviaire que j’ai organisé avec toutes les parties prenantes au cours des mois de mars et d’avril dernier. Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Je suis très satisfait des avis que viennent d’émettre tant le rapporteur que Mme la ministre. L’adoption de cet amendement contribuera à introduire plus de démocratie dans le dispositif de régulation.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. M. Jacquin a presque l’air surpris que l’un de ses amendements ait reçu un avis favorable. Mais cela peut tout à fait arriver, mon cher collègue !
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. En effet, nous ne sommes pas du tout dogmatiques, comme le diraient nos amis du groupe communiste… (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Je rappelle que le Haut Comité du système de transport ferroviaire, qui a été créé par la loi de 2014, n’a quasiment jamais fonctionné. Il n’a en effet dû se réunir qu’une seule fois depuis sa création.
Madame la ministre, vous êtes aujourd’hui favorable à ce que les missions de ce haut comité soient élargies. Mais, pour qu’il fonctionne, cela dépend aussi de vous ! Après tout, ce haut comité est présidé par le ou la ministre des transports…
Je dis cela d’autant plus que les parlementaires siègent dans un certain nombre d’organismes extraparlementaires. On est d’ailleurs en train de remettre un peu d’ordre dans la composition de ces organismes et d’y réduire la présence des parlementaires. On s’aperçoit à cette occasion qu’il existe une quantité importante d’organismes extraparlementaires qui ne se réunissent quasiment jamais. On faisait récemment le point : il y en a un certain nombre qui ne se sont réunis qu’une fois, voire pas du tout ces dernières années.
Tout le monde souhaite que le Haut Comité bénéficie de compétences élargies, mais faisons en sorte que ce ne soit pas simplement un effet d’annonce ou un effet de tribune !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er ter.
Je constate que l’amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L’amendement n° 226 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 1er ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un bilan quinquennal d’évaluation de la mise en œuvre de la présente loi a lieu au plus tard le 31 décembre 2023. En ce sens, un rapport d’évaluation de l’application de la présente loi est adressé par le Gouvernement au Parlement. Cette évaluation est également réalisée sur leur champ de compétences, par le Haut Comité du système de transport ferroviaire mentionné à l’article L. 2100-3 du code des transports et par les commissions parlementaires compétentes dans le domaine du transport.
Ces évaluations présentent notamment le bilan :
- de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs, au regard notamment de l’aménagement du territoire, de l’état des dessertes ferroviaires des villes moyennes ;
- de l’évolution du groupe ferroviaire unifié et de ses filiales SNCF Réseau et SNCF Mobilités ;
- de l’évolution et de l’état des lignes les moins circulées ;
- du transfert des personnels de l’opérateur historique aux entreprises ferroviaires nouvellement entrées ;
- du niveau de garanties sociales de la branche ferroviaire et de la portabilité des droits sociaux des salariés transférés aux nouveaux entrants.
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Monsieur Maurey, je m’étais malheureusement habitué à cette cascade d’avis défavorables.
M. Philippe Dallier. Comme quoi, les choses changent ! (Sourires.)
M. Olivier Jacquin. Monsieur le rapporteur, madame la ministre, poursuivez sur cette voie ! Nous ne doutons pas que, après le déjeuner, vous serez de nouveau favorables à nos amendements sur l’un des aspects décisifs de ce projet de loi : je veux parler de son volet social et des transferts de personnel. C’est sur ces sujets que nous vous attendons !
Fort de ce regain d’optimisme, je vous propose de compléter la liste des avis favorables que vous avez rendus en soutenant le présent amendement, qui vise lui aussi à introduire davantage de démocratie dans le dispositif.
Le projet de loi soulève plusieurs grands enjeux sur le long terme, enjeux qui auront des effets importants pour l’ensemble de nos concitoyens, comme la transformation de l’organisation de l’EPIC en société anonyme ou la filialisation de Gares & Connexions et du fret. Beaucoup de conséquences sont également à attendre de l’ouverture à la concurrence en matière d’aménagement du territoire, de dessertes ferroviaires, notamment les dessertes des villes moyennes, et de correspondances entre ces dernières et les grandes métropoles.
Le dispositif de péréquation par modulation des péages doit lui aussi être suivi. Et que dire, en termes d’aménagement équilibré du territoire, à l’heure des nouvelles technologies de l’information et de la communication, de la préservation des petites lignes, que le rapport Spinetta avait mal classées et jugées trop coûteuses, de l’extinction du recrutement au statut SNCF à la fin de l’année 2019 ou de la portabilité des droits sociaux ?
Nous pensons que toutes ces réformes devront être évaluées, et ce d’autant plus que nous n’avons obtenu ni étude d’impact ni avis du Conseil d’État, et que nous légiférons « au doigt mouillé » sur de nombreux articles que le Gouvernement a lui-même insérés dans le projet de loi initial, qui n’était composé que d’articles d’habilitation à légiférer par ordonnance.
Il nous paraît essentiel d’introduire le principe d’une clause de revoyure à cinq ans, avant la fin de l’année 2023.
M. Roger Karoutchi. Il n’y aura plus de Sénat !
M. Olivier Jacquin. À ce stade, rien ne garantit en effet que la réforme permettra au système ferroviaire actuel d’affronter l’ouverture à la concurrence dans les meilleures conditions possible et de sortir d’une logique ferroviaire malthusienne, fondée sur l’attrition progressive du réseau. Rien ne garantit non plus que la transformation des EPIC en sociétés anonymes permettra de maintenir, voire de renforcer la qualité du service public.
Pour toutes ces raisons, les auteurs de l’amendement considèrent que cette loi ne peut être envisagée, en quelque sorte, que comme une grande loi d’expérimentation, nécessitant de fixer un rendez-vous au Parlement pour en évaluer tous les effets dans quelques années. Aussi proposons-nous de fixer une clause de revoyure avant la fin de l’année 2023 sous l’égide du Haut Comité du système de transport ferroviaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur Jacquin, je ne voudrais pas modérer votre enthousiasme, mais cela ne peut pas être Noël tous les jours. En plus, j’ai l’impression que vous me provoquez…
M. Olivier Jacquin. Je demande des rapports ! (Sourires.)
M. Gérard Cornu, rapporteur. … en demandant trois rapports dans un seul amendement, ni plus ni moins !
Je rappelle qu’il n’est pas nécessaire de prévoir une disposition législative pour que le Gouvernement ou le Parlement se saisisse d’un sujet. Nous faisons d’ailleurs régulièrement le bilan des lois adoptées dans le cadre du suivi de l’application des lois. La commission est donc défavorable à l’amendement.
L’amendement que votre groupe a présenté précédemment sur le renforcement du Haut Comité du système de transport ferroviaire, qui a été, je crois, ou du moins je l’espère, adopté à l’unanimité, était beaucoup plus intéressant. Il importe que ce haut comité fonctionne : Mme la ministre a promis qu’elle allait le réunir et le faire fonctionner. Dont acte !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Vous le savez, le moment venu, le Parlement, s’il le souhaite, pourra tout à fait mener les missions d’évaluation de la réforme qui lui paraîtraient utiles, afin de tirer des conclusions sur les éventuelles adaptations qui s’imposeraient. C’est par exemple ce qu’ont fait vos collègues députés Gilles Savary et Bertrand Pancher à l’Assemblée nationale sur la réforme ferroviaire adoptée en 2014.
Il est évidemment tout à fait normal que le Parlement puisse disposer d’une évaluation de la réforme, d’autant qu’il s’agit d’une réforme de grande ampleur. Il appartiendra au Parlement de choisir la date à laquelle il souhaite conduire cette évaluation.
Si je comprends votre préoccupation, monsieur le sénateur, je m’en remets cependant à la sagesse du Sénat.
M. Olivier Jacquin. Alors, on va faire un rapport ! (Sourires.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 17 rectifié quinquies, présenté par MM. Malhuret, Fouché et Laménie, Mme Goy-Chavent, MM. Piednoir, Babary et Kern, Mmes C. Fournier et Bruguière, MM. L. Hervé et Gremillet, Mme Garriaud-Maylam et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 1er ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Haut Comité du système de transport ferroviaire remet aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat un rapport annuel sur la situation du système ferroviaire national contenant l’évolution d’indicateurs de performances précis.
La parole est à M. Alain Fouché.
M. Alain Fouché. Il s’agit là encore d’une demande de rapport, mais je compte à la fois sur M. le rapporteur et Mme la ministre pour la soutenir.
Cet amendement tend à prévoir que le Haut Comité du système de transport ferroviaire remette un rapport annuel au Parlement sur la situation du système ferroviaire national ouvert à la concurrence, par le biais d’indicateurs de performance définis par décrets.
Créé par la réforme ferroviaire de 2014, ce haut comité a pour mission d’éclairer le Gouvernement et le Parlement sur la situation du système ferroviaire national, ses évolutions envisagées ou prévisibles. Dans ses avis, celui-ci prend en compte tous les aspects juridiques, financiers, économiques, sociaux, environnementaux, afin de proposer ou d’évaluer les grandes orientations de la stratégie nationale dans le domaine ferroviaire.
Avec cet amendement, on ne crée donc pas – je le précise bien – de tâches supplémentaires pour ce haut comité, qui remet simplement son rapport au Gouvernement et au Parlement dans les mêmes délais et les mêmes termes.
L’ouverture à la concurrence des systèmes ferroviaires a eu des effets variés selon les pays étudiés, certaines expériences se soldant par des échecs et d’autres par des succès. En parallèle, un certain nombre d’études soulignent que l’organisation du travail et le degré d’ouverture à la concurrence ne constitueraient que des éléments paramétriques, le critère fondamental en matière d’augmentation de la qualité de service restant le montant de l’investissement public.
Devant ces situations plurielles et contrastées, il apparaît nécessaire d’informer les Français, au travers de leur représentation nationale, sur la mesure de la fiabilité, de l’efficacité et de la productivité du système ferroviaire.
Ce que je viens de dire est clair : pas de travail en plus, il suffit d’envoyer le rapport à un certain nombre de parlementaires. Vous n’allez pas me répondre que vous n’allez pas soutenir cet amendement ! Sinon, je serai très vexé ! (Rires.)
M. le président. L’amendement n° 66 rectifié bis, présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 2100-3 du code des transports, il est inséré un article L. 2100-3-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2100-3 –… – Le Haut Comité du système de transport ferroviaire remet chaque année au Parlement un rapport sur le fonctionnement du système de transport ferroviaire, au regard de la mise en œuvre du droit au transport, de l’offre de service public et de la réponse aux besoins des usagers et des territoires. »
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Cet amendement est quasi identique à celui que notre collègue vient de soutenir avec brio.
Je confirme à M. le rapporteur que le Sénat a adopté l’amendement n° 209 à l’unanimité. Nous pensons en effet que le Haut Comité du système de transport ferroviaire est une instance nationale extrêmement importante, qu’il faut renforcer et à laquelle il faut donner des moyens supplémentaires.
Suivant l’approche adogmatique et constructive qui caractérise nos prises de position, je vous soumets même, ici et maintenant, une proposition d’ordre du jour pour la première réunion de ce haut comité. Nous pourrions, comme l’a suggéré notre rapporteur, discuter du problème du nœud lyonnais, avec une question subsidiaire que je vous pose, madame la ministre : quels moyens le Gouvernement compte-t-il engager, dans le cadre de cette régulation nationale, pour résorber ce nœud ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. J’ai bien compris que M. Fouché tenait beaucoup à son amendement, et ce d’autant plus qu’il bénéficie du renfort du groupe communiste. Il y a parfois des alliances qui paraissent contre nature, mais bon… (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mme Éliane Assassi. Qu’est-ce qui est contre nature, monsieur le rapporteur ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. En définitive, le Sénat adoptera peut-être l’amendement grâce à cette alliance contre nature, mais, en tant que rapporteur du texte, je suis contre les rapports et ne changerai pas d’avis.
Malgré le renfort du groupe communiste, monsieur Fouché, la commission est défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Votre assemblée dispose déjà du rapport annuel du régulateur. Il existe également un compte rendu annuel sur les contrats passés entre l’État et le groupe SNCF. En outre, si le Haut Comité élabore des documents intéressants, le ministre pourra les transmettre au Sénat. Cela étant, je ne m’oppose pas aux amendements et m’en remets à la sagesse de votre assemblée.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Non, monsieur le rapporteur, il ne s’agit pas d’une alliance contre nature ! Ce qui nous réunit, M. Fouché et moi, c’est une culture républicaine de défense des prérogatives du Parlement ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe Les Républicains.)
M. Alain Fouché. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 17 rectifié quinquies.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur des travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er ter, et l’amendement n° 66 rectifié bis n’a plus d’objet.
L’amendement n° 208, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 1er ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2100-4 du code des transports est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Des représentants de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières et du ministre chargé des transports peuvent participer, en qualité d’observateurs, aux réunions du comité des opérateurs du réseau. » ;
2° Le troisième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après les mots : « du réseau », sont insérés les mots : « contribue à la réalisation des objectifs énoncés à l’article L. 2100-2. Il » ;
b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Il peut être saisi par le ministre chargé des transports de toute demande d’avis ou d’étude technique en rapport avec la réalisation des objectifs énoncés à l’article L. 2100-2. » ;
3° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après les mots : « et les », il est inséré le mot : « autres » ;
b) Sont ajoutés les mots : « , et à favoriser la réalisation des objectifs mentionnés à l’article L. 2100-2 ».
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Cet amendement, quelque peu technique, concerne le comité des opérateurs du réseau, le COOPERE.
Aux termes de l’article L. 2100-4 du code des transports, il s’agit d’une instance de concertation, composée de représentants des entreprises ferroviaires, des exploitants d’installations de service reliées au réseau ferré national et des autorités organisatrices de transport ferroviaire. C’est au sein de cette instance que SNCF Réseau dialogue avec ses clients, également membres. La vocation de ce lieu d’échanges est d’améliorer les relations, notamment en vue d’instaurer une charte du réseau.
Ce comité contribue à l’élaboration de la réponse aux priorités stratégiques nationales et internationales et à l’atteinte des objectifs fixés par l’État concernant le système ferroviaire. Ces objectifs sont les suivants : assurer la cohérence de l’offre proposée aux voyageurs, une qualité optimale de service fournie aux utilisateurs du système de transport ferroviaire national ; préserver la sûreté des personnes et des biens, la sécurité du réseau et des installations relevant du système de transport ferroviaire national ; organiser et piloter la filière industrielle ferroviaire, en vue d’en accroître la capacité à l’exportation, la sécurité, l’efficience économique et environnementale, la fiabilité, le développement technologique, la multimodalité et l’interopérabilité ; programmer les investissements de développement et de renouvellement du réseau ferroviaire ; assurer la complémentarité entre les services de transport ferroviaire à grande vitesse, d’équilibre du territoire et d’intérêt régional, pour satisfaire aux objectifs d’aménagement du territoire.
Il nous paraît important, dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, d’élargir les missions du comité des opérateurs du réseau et de mettre un peu d’huile dans ses rouages complexes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Comme vient de l’indiquer son auteur, cet amendement vise à étendre le champ de compétence et les missions du comité des opérateurs du réseau, qui est l’instance de concertation réunissant SNCF Réseau et les utilisateurs du réseau.
J’y suis favorable – deux avis favorables d’affilée, c’est presque Noël ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. Roger Karoutchi. C’est trop !
M. Gérard Cornu, rapporteur. Cette instance de concertation peut effectivement jouer un rôle important dans les différents domaines évoqués par l’amendement : cohérence de l’offre proposée aux voyageurs, permanence opérationnelle du système et gestion des situations de crise, préservation de la sûreté et de la sécurité. Nous sommes, au Sénat, très attachés à ce dernier point : nous voulions un marqueur social, un marqueur d’aménagement du territoire et un marqueur de sûreté et de sécurité. L’avis est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Cet amendement a pour objet d’étendre le champ de compétence du comité des opérateurs du réseau, ce qui me paraît effectivement nécessaire.
L’article L. 2100 -2 du code des transports, tel qu’il résulte de la loi du 4 août 2014, confie à l’État le soin de veiller à la cohérence et au bon fonctionnement du système de transport ferroviaire national, ainsi qu’à la cohérence de l’offre proposée aux voyageurs, à la coordination des autorités organisatrices de transport ferroviaire et à l’optimisation de la qualité de service fournie.
Toutefois, au regard de ces ambitions affirmées par la loi de 2014, l’État manque aujourd’hui de leviers concrets. Le comité des opérateurs du réseau me semble être l’instance adéquate pour veiller à ces points. J’ai entendu de nombreux élus déplorer un manque de coordination dans la circulation de différents trains desservant leur territoire. Ce travail de coordination me paraît pouvoir être réalisé au sein du comité des opérateurs du réseau. Je suis donc favorable à l’extension des compétences de cette instance.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er ter.
Article 2
Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution et dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi pour assurer la transposition de la directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen, dans sa rédaction résultant de la directive (UE) 2016/2370 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2016 modifiant la directive 2012/34/UE en ce qui concerne l’ouverture du marché des services nationaux de transport de voyageurs par chemin de fer et la gouvernance de l’infrastructure ferroviaire.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, sur l’article.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous allons maintenant aborder la question de l’ouverture à la concurrence. Mon collègue Olivier Jacquin évoquera la méthode, à savoir le recours à une ordonnance ; pour ma part, je voudrais donner mon point de vue sur le fond du sujet.
Ayant suivi les débats sur les paquets ferroviaires au Parlement européen, je n’ai jamais été convaincue que l’on puisse tirer grand avantage de l’ouverture à la concurrence dans le cas de la SNCF ou, plus généralement, des réseaux fixes, comme le rail. En réalité, il s’agit plus, en l’espèce, d’une dérégulation que d’une ouverture à la concurrence, car il n’y a pas de choix pour l’usager.
Je l’ai toujours dit, cette démarche serait à la limite acceptable s’il y avait des directives-cadres de service public garantissant, de manière rigoureuse et formelle, le maintien du service public partout et dans la durée.
L’observation des évolutions intervenues m’a confortée dans mon opposition originelle : l’ouverture à la concurrence ne résout rien, et même détériore la situation, hormis le cas de pays, comme l’Italie, où le service public était dans un état si lamentable que n’importe quelle transformation ne pouvait qu’apporter du mieux. En Allemagne, par exemple, l’ouverture à la concurrence n’a pas réglé les problèmes.
Mme Fabienne Keller. Et la Suisse ?
Mme Marie-Noëlle Lienemann. En Suisse, le secteur ferroviaire est public.
Mme Fabienne Keller. Non, il y a des délégations !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il est à 90 % public, et en tout cas la Suisse n’est pas dans l’Union européenne. Reprenons donc l’exemple de l’Allemagne, qui est souvent cité.
En Allemagne, la Deutsche Bahn, dont la dette avait été reprise au bon moment – passons sur ce point, mais certains collègues ont eu raison de signaler que la situation des finances publiques françaises rendait la chose plus difficile chez nous –, est à nouveau endettée et connaît des dysfonctionnements du même ordre que ceux que l’on constatait avant l’ouverture à la concurrence. La dérégulation n’a strictement rien apporté, mais les prix ont fortement augmenté, les conditions de travail et le statut des salariés se sont dégradés, certaines lignes ont fermé.
Cela étant, des lignes ont aussi disparu dans le cadre du service public à la française… Je ne prétends donc pas qu’il y ait forcément lien de cause à effet, mais, en tout état de cause, l’ouverture à la concurrence n’a rien amélioré, rien réglé.
L’abaissement du statut des salariés, le dumping social sont mortifères pour nos sociétés. Nous avons au contraire besoin de consolider la valorisation, dans la durée, des salariés au sein de l’entreprise, leurs conditions de travail et leur technicité. La fidélisation du personnel étant un élément déterminant de la qualité du service rendu, la remise en cause du statut des cheminots est illégitime, d’autant que l’on ne dispose pas encore d’une convention collective de branche de haut niveau, garantissant qu’il n’y aura pas de dumping social.
Il me paraît prématuré de tirer des plans sur la comète, de promettre monts et merveilles pour demain, et je regrette que le Sénat ait rejeté l’amendement déposé par mon groupe.
J’ai bien conscience que, à ce stade, la Haute Assemblée ne votera pas la remise en cause du quatrième paquet ferroviaire, approuvé largement. Je demande simplement qu’il soit pris acte que M. Vidalies, lors de la négociation de la directive, avait tenu à défendre avec force l’idée d’exceptions, définies selon des critères assez larges. J’espère que les régions utiliseront au maximum ces exceptions pour ne pas ouvrir grand les bras à la concurrence. J’espère aussi que nous aurons une convention collective de branche de suffisamment haut niveau pour qu’elle ne légitime pas, in fine, la remise en cause du statut des cheminots. J’espère enfin que le Parlement sera l’ultime arbitre pour les fermetures de lignes et que l’on ne laissera pas les régions dans l’incapacité, faute de ressources, de maintenir des lignes.