M. Roger Karoutchi. C’est sûr !
Mme Élisabeth Borne, ministre. De ce fait, notre réseau a été bien entretenu.
La SNCF consacre quant à elle 800 millions d’euros à la régénération du réseau.
M. Roger Karoutchi. Non !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Certes, cela peut ne pas paraître assez, mais c’est trois fois plus que ce qui se faisait par le passé.
M. Roger Karoutchi. Oui, mais ce n’est pas assez !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Gardons à l’esprit – tel était le sens de l’échange que j’ai eu avec Valérie Pécresse, la présidente de SNCF Réseau, la RATP et la SGP – que le rythme des investissements doit être soutenable pour les transports de la vie quotidienne. En effet, ou les travaux sont menés en interrompant les réseaux – c’est le cas pour les RER C et A –, ou ils sont réalisés de nuit, en interrompant aussi les circulations, mais il faut que, chaque matin, les trains repartent dans de bonnes conditions.
Monsieur le sénateur, je vous assure que la préoccupation du Gouvernement comme de la présidente d’Île-de-France Mobilités, c’est de remettre en état ce réseau au plus tôt. Il faut toutefois aussi des trajectoires soutenables.
En Île-de-France, grâce à Île-de-France Mobilités, nous avons la chance d’avoir une organisation qui combine l’ensemble des modes de transport, ce qui n’est pas le cas en province. Il s’agit là d’un outil spécifique et remarquable.
Je ne suis pas sûre qu’un big-bang de l’organisation en Île-de-France serait propice à une amélioration rapide des transports en Île-de-France.
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour la réplique.
M. Roger Karoutchi. Madame la ministre, je ne critique pas les gens de la RATP et de la SNCF. J’ai personnellement inauguré, avec le président de la région Jean-Paul Huchon, une station à Montrouge. Il a fallu quatorze ans pour créer une station entre la porte d’Orléans et Montrouge. C’est bien qu’il y a un problème !
Pendant très longtemps, la tutelle de l’État ne s’est pas exercée sur l’Île-de-France. Je suis d’accord, les travaux sont difficiles à mener d’un coup, mais s’ils avaient été réalisés pendant dix ou vingt ans, on aurait eu moins d’incidents.
Si vous n’agissez que progressivement, vous aurez des réseaux de plus en plus usés, des incidents et des accidents et on sera tous dans l’embarras ! Alors, pardonnez-moi, mais il faut faire la révolution ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mme Laurence Cohen. C’est un scoop !
M. Roger Karoutchi. Non, pas la vôtre ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud de Belenet, pour le groupe La République En Marche.
M. Arnaud de Belenet. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je me réjouis du plan d’investissement dans les transports du quotidien, même si l’on ne rattrapera évidemment pas en quelques années des décennies de sous-investissement.
Je comprends la règle de la priorisation sur l’entretien et la modernisation des réseaux pour les transports du quotidien, mais peut-être que toute bonne règle a son exception... Le département de la Seine-et-Marne est singulier, ce qui d'ailleurs n’enlève rien aux autres départements : c’est le plus vaste, celui qui a commencé son développement le plus tardivement dans la région, celui qui a la plus forte croissance démographique, ainsi qu’une croissance économique exceptionnelle.
La Seine-et-Marne produit un nombre de logements considérable. Elle participe de manière singulière à la création de valeurs et d’emplois dans la région. Or elle a toujours été la parente pauvre, avec une valse à quatre temps qu’un certain nombre de personnes connaissent ici.
Aujourd’hui, elle manque de tout : infrastructures routières, interconnexions, développements et initiatives de transports nouveaux, notamment sur le réseau routier avec du matériel roulant sur les autoroutes. Bien sûr, ce n’est pas lié à la politique du Gouvernement. Elle a le plus gros bouchon d’Europe sur l’A4. Les lignes P et R dysfonctionnent, tout comme la ligne A du RER. Elle détient sans doute le record francilien du temps de trajet domicile-travail.
Certes, on peut agir sur nos territoires pour rapprocher le travail du domicile, mais on sait que cela prend du temps. Delouvrier et de Gaulle ont engagé voilà quarante ans le développement de l’Est francilien et de la région en général. Au-delà du plan d’investissement et de rénovation, nous avons besoin d’un nouveau Delouvrier pour préparer les investissements en infrastructures et en transports en commun.
Madame la ministre, accepteriez-vous d’être le nouveau Delouvrier pour l’Est francilien ? (Sourires.)
M. Roger Karoutchi. Dites oui ! (Nouveaux sourires.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur, j’ignore si c’est compatible avec mes fonctions…
Plus sérieusement, je pense que la grande couronne doit avoir sa part des améliorations des transports. C’est le cas, par les schémas directeurs des RER, dans les programmes de régénération développés par SNCF Réseau. Il faut trouver toutes les solutions nouvelles et rapides pour que les investissements importants qui sont plutôt réalisés dans la zone agglomérée profitent aussi à l’ensemble des habitants d’Île-de-France.
M. Vincent Éblé. Tout à fait !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Je suis convaincue que c’est bien le projet des élus d’Île-de-France de faire que ce nouveau réseau – 200 kilomètres, avec 68 gares, dont 44 en interconnexion – bénéficie non pas simplement aux habitants des territoires qu’ils desservent, mais bien à l’ensemble de la région. Cela suppose aussi de développer des solutions efficaces de rabattement sur les modes lourds et, bien sûr, de continuer à améliorer les modes lourds existants.
J’ignore si ce projet est à la hauteur de Paul Delouvrier, mais nous pouvons rapidement avancer dans ce sens. L’État mettra à la disposition des autorités organisatrices et utilisera sur ses propres infrastructures toutes les innovations possibles, notamment pour développer le contrôle sanction automatisé, dédier des voies pour fluidifier la gestion du trafic et apporter des solutions rapides aux difficultés que vous mentionnez.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Pierre Ouzoulias. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je suis usager de la ligne B, comme beaucoup d’entre vous ici, et je me rends régulièrement à Nanterre venant de Bourg-la-Reine.
À ce titre, j’ai l’immense plaisir d’emprunter les deux lignes les plus saturées d’Europe. C’est une souffrance, c’est quelque chose qui rend malade, au sens propre. Par ailleurs, n’est-il pas absurde de devoir passer par Paris quand on habite le sud des Hauts-de-Seine et que l’on veut se rendre dans le nord du département ?
Madame la ministre, j’ai bien compris que la ligne 15, qui devait desservir Nanterre en 2025 et qui m’aurait permis d’éviter ce parcours absurde, ne serait pas livrée à temps. Je ne connaîtrai pas cette ligne avant ma retraite dans vingt ans. (M. Roger Karoutchi s’exclame.) Il restait une petite fenêtre d’espoir, vous venez de la refermer. Sur ce point au moins, votre discours était clair et précis. J’en informerai mes concitoyens dans le sud des Hauts-de-Seine : ils seront sans doute ravis d’apprendre cette très bonne nouvelle.
Nos migrations journalières, qui deviennent insupportables, sont imposées, comme ma collègue l’a souligné, par le fait que, dans cette région, le travail est concentré à l’Ouest et le logement à l’Est. Cela fait vingt ans que ce déséquilibre s’accroît.
Madame la ministre, par une décision du Gouvernement, en autorisant l’extension du quartier d’affaires de la Défense sur un tiers de la commune de Nanterre, vous venez de l’accentuer encore. Vous contribuez ainsi au déséquilibre majeur de notre région capitale. (M. Vincent Éblé applaudit.)
Je tiens à vous dire ici, de façon très solennelle, qu’aux problèmes sociaux et aux problèmes d’organisation de la localisation du travail et de nos activités, il n’y a pas nécessairement des solutions techniques. Vous devez avoir une approche sociale des problèmes de transport. Dans ces conditions, quels moyens allez-vous consacrer, par des mesures d’ordre législatif et réglementaire, pour éviter ces déséquilibres structurels entre l’activité à l’ouest et l’habitat à l’est ? (Mme Laurence Cohen applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur, votre question nous éloigne un peu des sujets de transport (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.), même si je suis bien d’accord avec vous : les deux sont liés.
Le schéma directeur d’Île-de-France a précisément vocation à planifier le développement de la région sur les prochaines années en articulation avec le développement des infrastructures ; il s’agit d’un outil à la disposition des collectivités locales.
M. Pierre Ouzoulias. Vous ne l’avez pas respecté !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Monsieur le sénateur, je suppose que les décisions du Gouvernement sont conformes avec ce schéma directeur qui s’impose à tous les documents d’urbanisme. Par conséquent, les projets de développement dont vous parlez sont bien ceux qui sont prévus dans le schéma directeur d’Île-de-France, qui vise à coordonner le développement de la région avec celui-ci de ses infrastructures.
C’est d’ailleurs précurseur. En effet, c’est ce que les autres régions font avec moins de force au travers des SRADDET, les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires. Le schéma directeur d’Île-de-France a bien pour objet de répondre à ces enjeux.
Je tiens à répondre à votre déception concernant la ligne 15, qui ne sera pas achevée sur l’ensemble du territoire en 2024. Sur ces sujets, nous devons nous parler avec réalisme. Oui, les 36 milliards d’euros de lignes nouvelles à grande vitesse qui ont été promis ne seront pas réalisés dans les cinq prochaines années. Oui, les 200 kilomètres de l’ensemble du Grand Paris Express ne seront pas réalisés dans les cinq prochaines années.
M. Roger Karoutchi. Évidemment ! Il faut dire les choses, vous avez raison !
Mme Élisabeth Borne, ministre. C’est restaurer la crédibilité de la parole de l’État, qui en a besoin, que de dire que l’on ne réalise pas 200 kilomètres de lignes de métro en claquant des doigts, alors que le sous-sol est l’un des plus compliqués qui existent au monde, et qu’on ne fait pas 36 milliards d’euros de lignes à grande vitesse sans en avoir les ressources.
Nous traitons ces sujets avec beaucoup de détermination, d’engagement, de volonté d’améliorer les transports de nos concitoyens, mais aussi en faisant preuve de réalisme et de sincérité.
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Lafon, pour le groupe Union Centriste.
M. Laurent Lafon. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite revenir sur l’état du réseau SNCF en région Île-de-France.
Les Franciliens, peut-être plus que tous les autres habitants en France, ont souffert de la politique menée pendant des années et visant à donner la priorité au financement des lignes à grande vitesse. Selon le rapport de la Commission des comptes des transports de la Nation, en vingt-cinq ans, sur les 78 milliards d’euros qui ont été investis, 38 % l’ont été sur le réseau LGV, 49 % sur les lignes de province et seulement 13 % dans le réseau francilien. Si l’on met en regard ces chiffres avec ceux de la fréquentation, on mesure davantage l’ampleur des difficultés.
Le réseau TGV est utilisé par 110 millions de voyageurs, alors que 850 millions de trajets sont comptabilisés sur le réseau SNCF francilien, soit huit fois plus. Ces chiffres permettent de mieux comprendre la saturation du réseau SNCF en Île-de-France. La chambre régionale des comptes établissait que 40 % des voies et 30 % des aiguillages ont plus de trente ans, alors qu’un aiguillage ou une voie doivent être normalement régénérés au bout de vingt-cinq ans.
Madame la ministre, dans votre discours, vous avez souligné l’effort d’investissement actuellement consenti, avec 800 millions d’euros consacrés à la régénération du réseau. C’est vrai, mais, pour les Franciliens, cela ne se voit malheureusement pas dans leur quotidien.
Ma question est simple dans sa formulation, peut-être moins dans la réponse, mais elle n’est pas piège. Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer à quel horizon temporel les Franciliens connaîtront une amélioration de leurs conditions de transport sur le réseau SNCF ? (Mme Élisabeth Doineau applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur, je ne sais pas vous dire avec précision à quelle échéance les centaines de millions ou les milliards d’euros que l’on est en train d’investir dans le réseau seront visibles par les voyageurs, que ce soit ceux qui empruntent des TER connaissant des ralentissements à quarante kilomètres par heure dans certaines régions ou ceux qui utilisent un réseau pâtissant de sous-investissements.
Je puis en revanche affirmer que SNCF Réseau élaborera avec détermination les programmes les plus efficaces pour permettre les résultats les plus rapides.
Comme cela été remarqué tout à l’heure, on ne règle peut-être pas les problèmes en demandant des diagnostics sur les gares en Île-de-France, mais, dans un contexte où les retards se chiffrent en dizaines de milliards d’euros, on doit attendre de SNCF Réseau qu’elle parvienne à cibler les investissements là où ils ont la meilleure rentabilité du point de vue du voyageur. C’est la raison pour laquelle les grandes gares, qui peuvent arrêter l’ensemble des circulations sur un réseau, constituent des enjeux prioritaires.
Je ne promets pas que, dans dix-huit mois, le problème sera réglé. Nous allons continuer à travailler avec SNCF Réseau, sous le regard du Conseil d’orientation des infrastructures et de la mission de Jean-Cyril Spinetta. SNCF Réseau travaille avec beaucoup de détermination pour élaborer une stratégie d’investissement permettant des résultats visibles pour les voyageurs dans les meilleurs délais.
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Roger, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Gilbert Roger. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’engagement pris par l’État en 2010 et dont beaucoup de mes collègues ont parlé de créer le Grand Paris Express est le résultat d’un accord historique entre l’État et les collectivités territoriales ; il est très attendu par nos concitoyens et par nous-mêmes.
Comme beaucoup, j’emprunte tous les jours les lignes B et E. Financé par des ressources exclusivement apportées par les contribuables franciliens depuis 2010 – il faut rappeler que cela ne pèse pas sur le budget national –, ce projet desservira les territoires de petite et grande couronnes. Je pense en particulier aux lignes 15 et 16, qui complètent en Seine-Saint-Denis une offre de transport particulièrement défaillante.
Je m’inquiète de l’avenir de la ligne 15 Est, qui doit relier Champigny-centre à Saint-Denis-Pleyel, en passant par Bondy et Bobigny-préfecture. En effet, il est à craindre que la question du coût du Grand Paris Express, avec l’échéance des jeux Olympiques, donne lieu à un réarbitrage de certaines lignes, voire à une réalisation uniquement sur les sites desservis pour les jeux Olympiques. Au-delà de cette échéance, on peut penser qu’il y aura un décalage au-delà de 2024, vous l’avez souligné.
Aussi, madame la ministre, je souhaite avoir de votre part l’assurance que le projet du Grand Paris Express sera réalisé. Il en est de même pour la ligne 16, dont le Président de la République a parlé lorsqu’il est venu à Clichy-sous-Bois.
D’un point de vue local, si je me réjouis de l’ouverture d’une nouvelle branche du tramway T4 en 2019, je suis très inquiet. En effet, cela aura pour conséquence 19 000 déplacements pendulaires supplémentaires par jour à la gare de Bondy.
Je m’inquiète de savoir quelles mesures seront prises pour absorber cette arrivée massive de nouveaux usagers, dont je suis au demeurant content. Est-il prévu d’augmenter la fréquence de passage du RER E dans cette gare pour les prendre en charge ?
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous demande à nouveau de veiller au respect de votre temps de parole.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur, je confirme de nouveau l’engagement du Gouvernement de mener à son terme le réseau du Grand Paris Express.
Si le schéma de développement de la région parisienne, comme on disait à l’époque de Paul Delouvrier, dont nous parlions précédemment, a permis le développement des villes nouvelles, appuyé sur celui des RER, il a clairement fait l’impasse sur le développement de toute cette zone agglomérée.
Tel est bien l’enjeu d’aujourd’hui : réaliser une infrastructure qui permette le développement de ces secteurs oubliés dans les schémas précédents. C’est le sens non seulement du réseau du Grand Paris Express, mais aussi de tous les prolongements de lignes de métro et de toutes les connexions prévues avec la nouvelle infrastructure.
Je le répète donc : le schéma d’ensemble n’est pas remis en cause. Le Gouvernement est bien conscient des attentes fortes en matière de transport en Île-de-France, mais nous voulons sortir des calendriers irréalistes et des promesses non financées, pour proposer des trajectoires soutenables et crédibles.
C’est dans cet esprit que des annonces seront prochainement faites par le Gouvernement sur le calendrier du Grand Paris Express – sans remise en cause, encore une fois, du schéma d’ensemble.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Léonhardt, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
M. Olivier Léonhardt. Je reprends la parole dans ce débat, car mes collègues ont considéré que le seul sénateur d’Île-de-France de notre groupe pouvait poser deux questions.
M. Jean-Claude Requier. Tout à fait !
M. Olivier Léonhardt. Comme je l’ai fait observer à l’occasion de ma première question, si rien n’est fait, les inégalités en matière de transport entre Paris et la grande couronne continueront évidemment à progresser dans les prochaines années. Des gens vont continuer à subir les retards et suppressions de train, à perdre leur emploi et à voir leur vie familiale se dégrader.
Malheureusement, s’ajoute désormais au déséquilibre en matière d’investissements dans notre région une politique égoïste qui vise à exclure les voitures de Paris, sans augmenter simultanément et très sensiblement la qualité ou la quantité de l’offre de transports en commun pour les habitants de grande banlieue contraints de rejoindre la capitale pour des raisons professionnelles.
C’est assez paradoxal alors que les recensements réalisés par l’INSEE entre 2010 et 2015 font apparaître une baisse de la population dans Paris et une hausse sensible de la population dans les départements de grande couronne, en particulier dans l’Essonne et en Seine-et-Marne…
Est-il nécessaire de préciser que personne ne souhaite voir augmenter la pollution dans notre région ? Aussi, pourquoi certains feraient-ils semblant de croire que la pollution s’arrêterait aux limites du périphérique ? Certains pensent-ils que les embouteillages et la pollution sont plus dangereux pour les habitants de Paris que pour ceux de la banlieue ?
Le meilleur moyen d’éviter les embouteillages et la pollution, c’est d’investir massivement pour l’amélioration des transports en grande couronne. Il est inacceptable que les recettes issues de la taxe du Grand Paris, payée par tous les contribuables de la région, bénéficient quasi exclusivement à la zone dense. On peut aussi s’interroger sur les recettes issues des vignettes récemment mises en place pour accéder à la capitale.
Madame la ministre, êtes-vous favorable à un rééquilibrage significatif des investissements au niveau régional pour permettre la création, l’entretien, la modernisation et la transformation des réseaux de transports en grande couronne ?
M. Jean-Claude Requier. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur, je pense que l’on ne peut pas opposer la grande couronne et la zone agglomérée ; on doit viser à réaliser les investissements qui permettront aux réseaux desservant aujourd’hui la grande couronne – essentiellement celui de SNCF Réseau – de fonctionner mieux et de façon plus fiable.
On doit aussi s’assurer que les investissements, notamment ceux du Grand Paris Express, bénéficient à l’ensemble des territoires, et pas uniquement à ceux qui sont traversés par l’infrastructure.
Je suis convaincue que tel est bien l’objectif d’Île-de-France Mobilités : organiser la mobilité autour de ces infrastructures pour qu’elles bénéficient à l’ensemble des territoires d’Île-de-France.
M. Vincent Éblé. Pas du tout !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Je sais qu’Île-de-France Mobilités et les présidents des conseils départementaux ont beaucoup d’idées sur les solutions de mobilité qui peuvent être mises en œuvre dans ces territoires : transport à la demande, covoiturage, entre autres.
On doit aussi pouvoir améliorer sensiblement les conditions de déplacement en provenance de la grande couronne, comme on doit chercher à le faire ailleurs. De fait, les Assises nationales de la mobilité ont montré que les problèmes de congestion, qui étaient l’apanage de la région d’Île-de-France, sont en train de se développer dans toutes nos grandes métropoles.
Il faut donc s’efforcer d’apporter des réponses rapides, les plus rapides que l’on puisse imaginer consistant à soutenir massivement le covoiturage et les voies dédiées – des réponses ne supposant pas d’investissements lourds. Si l’on met deux personnes par voiture au lieu d’une – ou de 1,1, comme on le constate aujourd’hui –, on aura deux fois moins de voitures ; si l’on arrive à en mettre trois, ce sera encore mieux…
La loi d’orientation des mobilités aura aussi pour ambition de permettre de telles réponses rapides, qui améliorent les mobilités de nos concitoyens sans passer par des projets d’infrastructure lourds.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Pemezec, pour le groupe Les Républicains.
M. Philippe Pemezec. Madame la présidente, mes chers collègues, je salue le courage de Mme la ministre, qui dit les choses comme elles se présentent. En effet, il nous semblait difficile que tous ces investissements soient réalisés en aussi peu de temps.
Je ne reprendrai pas la question de Laurent Lafon. Ma préoccupation concerne la ligne 18, et c’est à ce sujet que je souhaite, madame la ministre, vous interroger, ou plutôt vous interpeller.
En 2024 se tiendront les jeux Olympiques, et Saint-Quentin-en-Yvelines est concernée par un certain nombre de manifestations sportives qui se dérouleront dans ce cadre. L’année suivante aura lieu l’Exposition universelle, qui concernera le plateau de Saclay, un pôle d’excellence dans le domaine de la recherche et du développement au niveau mondial.
J’espère donc que, dans l’ordre des priorités que vous allez devoir établir, vous penserez à ces deux événements majeurs et que vous en tiendrez compte pour votre programmation.
Nous avons attendu quarante-cinq ans la radiale entre Châtillon et Vélizy : nous aimerions bien ne pas attendre aussi longtemps pour cette ligne 18, qui est fondamentale !
Nous réclamons tous, et chacun pleure après sa ligne… C’est la preuve qu’un vrai problème de transport et de déplacements se pose dans l’ensemble de l’Île-de-France. Je ne sais si les petites mesures qui sont prises sont à la hauteur du défi, ni si une révolution est nécessaire, mais il faut en tout cas une action forte et des investissements importants !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur Pemezec, je vous confirme que le Gouvernement est bien conscient des besoins qui existent en Île-de-France.
Au risque de m’écarter un peu du sujet de ce débat, je répète que ces besoins existent aussi dans les métropoles de province. On peut trouver que le fonctionnement des RER n’est pas à la hauteur de ce qu’on pourrait souhaiter en Île-de-France, mais, en province, il n’y a pas de RER du tout : le réseau ferré national n’a pas été adapté pour tenir compte de l’émergence de nos métropoles.
J’ai bien entendu les enjeux que vous avez soulignés, monsieur le sénateur, en particulier le respect des engagements liés aux jeux Olympiques. Je réitère l’engagement du Gouvernement à réaliser l’ensemble du schéma du Grand Paris Express.
J’ajoute simplement que, par analogie avec les difficultés que l’on rencontre aujourd’hui en Île-de-France, on constate que nos métropoles connaissent aussi des situations très difficiles – ce fut pour moi l’une des surprises des Assises nationales de la mobilité. Malheureusement, il n’y a plus seulement en région parisienne qu’il faut parfois faire une heure de trajet pour se rendre à son travail.
Votre assemblée aura à se prononcer sur le projet de loi de programmation des infrastructures. Dans ce cadre, nous devrons déterminer un calendrier pour les 36 milliards d’euros de projets de ligne à grande vitesse, mais aussi à réfléchir à la place que nous donnons à la désaturation des réseaux ferroviaires dans les agglomérations, en Île-de-France, mais aussi en province, où le retard est également considérable.
Sans attendre, il faut réfléchir à des solutions qui permettent d’apporter des améliorations visibles pour nos concitoyens ; on ne peut pas se contenter de dire qu’il y en a pour dix ou quinze ans. S’il s’agit de créer un RER dans une grande ville de province qui n’en a pas, vous imaginez le délai… Il va bien falloir qu’on trouve des solutions pour améliorer rapidement la mobilité de nos concitoyens, partout en France !
Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud de Belenet, pour le groupe La République En Marche.
M. Arnaud de Belenet. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, sans opposer entre eux quelques territoires que ce soit, je tiens à souligner, en complément de ma précédente intervention, que le rattrapage du manque d’investissement ne compensera pas, en Seine-et-Marne, la dynamique économique et démographique, elle-même liée principalement aux opérations d’intérêt national qui se poursuivent – c’est bien là la volonté de l’État.
Les habitants de Seine-et-Marne paient la taxe sur le Grand Paris, comme tous les contributeurs franciliens, mais la ligne 17 effleure à peine ce territoire…
Mon propos n’est pas d’alimenter la liste de courses, ni la litanie de problèmes que les uns et les autres présentent. Simplement, le niveau d’incompréhension a atteint un point qui appelle des réponses opérationnelles et immédiates.
Je rejoins donc totalement Mme la ministre, dont j’apprécie la transparence et la sincérité, dans son souhait de voir se développer des outils efficaces et rapides. Nous en avons tous certains à l’esprit : des bus sur la ligne 4, le covoiturage, des parkings de rabattement… Au passage, si l’on supprimait le péage de Coutevroult, on disposerait très rapidement d’un espace, mais je ne suis pas certain que cela plairait au gestionnaire de la concession autoroutière… Il y a donc des problèmes particuliers à étudier.
Pour ne pas être trop insistant, je finirai, madame la ministre, par une question sur les touristes qui empruntent nos réseaux : partagez-vous notre constat s’agissant des efforts à faire dans nos transports pour les accueillir, assurer leur sécurité et les orienter par la signalétique ? Ce n’est pas seulement l’élu de la première destination touristique européenne qui exprime cette préoccupation, en pensant notamment aux touristes asiatiques, souvent perdus dans nos réseaux.