M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Je vous remercie, monsieur le sénateur, d’avoir soulevé cette question qui me permet d’aborder les outre-mer dans le cadre de la transition énergétique.
Depuis ma prise de fonction, j’ai eu l’occasion de me rendre en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna, en Guyane, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy, en Guadeloupe, en Martinique ; j’irai prochainement en Nouvelle-Calédonie ; mais je ne me suis pas encore déplacé à La Réunion.
Néanmoins, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec les élus régionaux de ce territoire, notamment avec le président du conseil régional, Didier Robert. Votre intervention me permet de faire une annonce : nous devons changer complètement de stratégie en ce qui concerne la déclinaison des PPE dans les territoires d’outre-mer ; je ne parle pas des PPE en tant que telles, qui correspondent à un niveau d’ambition que vous avez rappelé.
L’ambition d’une autonomie énergétique en 2030 fait de nos outre-mer des modèles pour la métropole. Au-delà des objectifs inscrits dans les PPE, le niveau de résultat, d’ambition est excellent. La vraie question est donc : comment faire du sur-mesure pour les territoires d’outre-mer ? J’ai le plaisir de vous annoncer que nous sommes en train de travailler de façon que les prochains appels d’offres en matière d’énergies renouvelables se fassent territoire par territoire.
Ainsi, sur une île aussi importante que celle de la Réunion, nous devons être capables de développer véritablement les ENR – le photovoltaïque, par exemple, puisque j’ai cru comprendre qu’un certain nombre de projets pointaient leur nez ici ou là –, en garantissant le coût de rachat de l’électricité et en prévoyant une utilisation du foncier intelligente. Sur ce dernier point également, j’ai entendu que quelques projets allaient dans le sens de ce que nous souhaitions.
Les territoires non interconnectés, en clair les territoires en situation d’insularité, notamment l’île de la Réunion, doivent pouvoir bénéficier d’une véritable réponse sur mesure et tirer profit de la compétitivité des énergies renouvelables. Il y a dix ou quinze ans, ces énergies n’étaient pas compétitives sur le plan industriel. Aujourd’hui, au regard du prix du carbone et de l’arrivée massive des énergies renouvelables, ainsi que de l’énergie verte – photovoltaïque, éolien, biomasse, etc. –, ce n’est plus le cas. Je serai donc ravi, monsieur le sénateur, de vous retrouver à La Réunion pour développer ces énergies.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Fabien Gay. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les enjeux de la transition énergétique sont des enjeux de société qui portent sur l’organisation des systèmes, sur nos façons de vivre, de produire et de consommer, pour faire face à l’urgence du réchauffement climatique.
La question de l’énergie est, certes, essentielle, mais, je suis d’accord avec vous, monsieur le secrétaire d'État, la problématique est globale. (M. Roland Courteau opine.) Vous avez évoqué notamment la question des transports.
Par ailleurs, quand on discute des énergies de demain, la première question à se poser est, à notre sens, la suivante : qui y aura accès ?
Aujourd’hui, près de 8 millions de personnes sont en situation de précarité énergétique en France ; 2 milliards d’êtres humains sur les 7 milliards que compte notre planète – 10 milliards en 2050 ! – n’ont pas accès à l’électricité. L’énergie de demain doit être avant tout accessible à toutes et à tous.
Nous croyons au développement des énergies renouvelables dans un mix énergétique. Cela demande tout d’abord de continuer à investir non seulement pour la sécurisation des centrales nucléaires, qui fournissement aujourd’hui près de 75 % de notre énergie, mais aussi dans la recherche et le développement pour le traitement des déchets.
Il faut surtout investir massivement dans la recherche, le développement et la formation en matière d’énergies renouvelables de demain : géothermie, hydraulique, etc. Cela ne peut se faire, à notre sens, que dans le cadre d’un investissement public massif et de la création d’un pôle public de l’énergie, seul capable de réaliser les investissements dont nous récolterons les fruits dans vingt ans.
Changer de modèle est coûteux et des investissements publics considérables sont indispensables. L’État, les collectivités locales doivent retrouver des marges de manœuvre et de la capacité à se projeter dans le temps long.
Or si le budget du ministère est en légère hausse, il s’inscrit toutefois dans une politique d’austérité, de baisse des dotations aux acteurs de cette transition et de renoncement à la lutte contre l’évasion fiscale, qui prive notre pays des moyens indispensables à cette révolution énergétique.
Ma question est simple : pensez-vous, monsieur le secrétaire d'État, que les 500 millions d’euros supplémentaires dont bénéficie le budget de l’écologie sont à même de répondre à l’urgence climatique ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur, je partage votre constat, mais j’ai bien peur de ne pas réussir à vous convaincre.
M. Ronan Dantec. Ne partez pas perdant ! (Sourires.)
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. Votre question aborde plusieurs points. Vous évoquez la solidarité et vous nous faites part de votre volonté de ne pas abandonner les personnes les plus fragiles dans la mise en place de cette transition.
Le paquet « solidarité climatique » proposé par le Gouvernement constitue à mon sens un virage majeur en la matière. Tout d’abord, le chèque énergie, jusque-là expérimenté dans quatre départements, sera étendu à toute la France. Il passera de 150 euros en moyenne en 2018 à 200 euros en 2019. Nous généraliserons également la prime à la casse pour opérer une transition du parc automobile, y compris pour les véhicules d’occasion, ce qui constitue une nouveauté. Cette prime sera portée à 2 000 euros pour les personnes non imposables. Bref, je ne récapitulerai pas l’ensemble des mesures que vous connaissez, monsieur le sénateur, mais le Gouvernement aura besoin du Parlement pour évaluer l’efficacité de ces dispositifs.
Vous avez également évoqué l’investissement public massif. Le Grand Plan d’investissement fait tout de même la part belle à la transition écologique – 20 milliards d’euros, dont 9 ou 10 milliards seront consacrés à la seule performance énergétique, toutes cibles « bâtimentaires » confondues, sur l’ensemble du quinquennat.
Pour le coup, cet argent soutiendra la commande publique, y compris la commande publique locale : la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, et la dotation de soutien à l’investissement public local, la DSIL, sont des outils pérennisés et sanctuarisés. Nous devons parvenir à les orienter le plus possible vers des questions écologiques.
Des travaux sont en cours sur la contribution climat-énergie, en lien avec les projets des territoires. C’est le plan climat-air-énergie territorial, le PCAET, aujourd'hui ; mais demain des projets peut-être encore plus ambitieux verront le jour pour aller vers des contrats de transition écologique.
M. Ronan Dantec. Faites déjà le PCAET !
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. Quant à votre question sur le budget du ministère, je vous donne rendez-vous début décembre pour l’examen du projet de loi de finances, moment où j’aurai l’occasion de vous rassurer !
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour le groupe Union Centriste.
Mme Nadia Sollogoub. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je remercie M. Dantec, car il a résumé tous les questionnements qui sont les miens. Son intervention a été très complète ; la mienne sera, hélas !, redondante.
Vous avez commencé à nous répondre, monsieur le secrétaire d'État. Cependant, j’insisterai sur un point qui me tient particulièrement à cœur.
Nous devons bâtir de toute urgence une vraie stratégie, réaliste techniquement, qui nous permette d’aller vers les énergies renouvelables.
Cependant, les récents débats sur l’exploitation des hydrocarbures et les conclusions timides de la COP23 montrent combien les contraintes économiques sont souveraines.
Les politiques que nous sommes, en tant que représentants des territoires, ont aussi le devoir de défendre les bassins d’emploi. Pour des milliers de salariés, transition énergétique est synonyme de reconversion professionnelle. L’emploi est l’une des variables clefs de la transition énergétique que l’on ne doit pas oublier.
Nous ne pourrons avancer que si les stratégies de reconversion sont claires, accompagnées et anticipées par les pouvoirs publics.
Ayant été moi-même élue dix ans à quelques kilomètres de la centrale nucléaire de Belleville-sur-Loire, je mesure combien un bassin entier peut être lié à une activité dominante.
La décision est prise d’interdire l’exploitation des hydrocarbures selon un calendrier qui se précise. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte entend réduire la part du nucléaire à 50 % en 2025. La perte de poids dont vous parlez, monsieur le secrétaire d'État, est vertueuse, mais les régimes sont toujours un peu pénibles à mettre en œuvre, nous le savons tous plus ou moins… (Sourires.)
Qu’a-t-on prévu concrètement et rapidement pour accompagner tous les travailleurs concernés par ces mutations ? Vers quelles reconversions les orienter utilement, rapidement et de façon pérenne ? Je me permets d’insister afin que la problématique de l’emploi ne soit pas de nouveau un frein majeur.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice, vous avez raison : une transition en pousse une autre !
Votre question aborde beaucoup de sujets, qui ont des calendriers différents : la fin des hydrocarbures est prévue pour 2040 ; l’industrie automobile et le diesel, c’est plutôt du temps court ; le nucléaire, plutôt du temps moyen ; les centrales à charbon, c’est de nouveau du temps court. Bref, il est compliqué de traiter en deux minutes une question aussi sérieuse et sensible, d’autant que les clefs des différents calendriers ne sont pas toutes identiques.
Néanmoins, nous devons toujours garder de la prévisibilité. J’ai évoqué tout à l’heure les mines : l’État a dû mettre de l’argent sur la table pour traiter les friches minières, des établissements publics ont été créés ; il a fallu aussi prévoir des dispositifs, importants pour le budget de la Nation, pour le traitement social des mineurs et de leur famille, y compris dans le projet de loi de finances que vous allez prochainement examiner, mesdames, messieurs les sénateurs. Mais personne ne s’est posé la question de l’évolution économique du territoire. Nous n’avons pas su anticiper la suite là où des territoires ont fait leur révolution sur la base de la deuxième révolution industrielle fondée sur l’utilisation des énergies fossiles. Voilà pourquoi, vingt ou trente ans plus tard, des acteurs économiques, comme dans les Hauts-de-France avec Rev3, la troisième révolution industrielle, se servent de la transition écologique et de la transition numérique pour créer de nouveau de l’emploi : 10 000 emplois ont été produits ces dernières années.
Pour autant, dans ces régions, vingt ou trente années se sont écoulées sans qu’il ne se passe rien. Nous devons donc veiller à mieux enchaîner les transitions entre elles, d’autant que bien souvent des savoir-faire le permettent si l’on y consacre de l’argent et des moyens humains en matière de formation professionnelle, par exemple.
C’est tout l’objet des contrats de transition : volet territorial plus classique ; volet entrepreneurial plus innovant ; volet social, y compris en mettant l’accent sur la formation professionnelle, le développement des compétences, l’éducation nationale. Une telle démarche permet une véritable stratégie de filières.
Une fois encore, je ne crois pas que la réponse puisse être uniforme et décidée depuis Paris. Il me paraît préférable de chercher des solutions au cas par cas : une centrale nucléaire n’est pas une usine qui fabrique des voitures !
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Roland Courteau. Ma question concerne le stockage de l’électricité. Les énergies issues du vent, du soleil, notamment, ont une caractéristique, celle d’être variables et intermittentes, car elles dépendent des fluctuations de la météo.
Autrement dit, ces énergies intermittentes produisent de l’électricité, mais pas forcément quand on en a besoin. Par ailleurs, elles peuvent saturer les réseaux lorsque des vents forts soufflent en même temps à l’échelle européenne.
Or le fait de pouvoir stocker l’électricité permet de la restituer lorsque le besoin s’en manifeste, par exemple, lors des pointes de consommation. Le stockage permet donc de restituer l’énergie accumulée, en décalé, dans le temps, mais aussi là où se trouvent les besoins, c'est-à-dire dans un endroit différent du lieu où elle est produite.
Monsieur le secrétaire d’État, où en est-on du stockage de l’électricité ? On nous dit depuis longtemps que les solutions avancent.
C’est très important, car cette nouvelle technologie conditionne un fort développement des énergies renouvelables qui sera rendu nécessaire, d’une part, par les comportements de plus en plus écoresponsables des consommateurs et, d’autre part, par la croissance massive de l’électromobilité dès lors qu’elle aura pris le pas sur l’essence et le diesel.
Quelles sont donc dans ce contexte, les perspectives en matière de stockage ou de technologies nouvelles permettant de répondre aux enjeux actuels que sont, premièrement, une meilleure intégration des énergies renouvelables aux réseaux, lesquels devront répondre plus demain qu’aujourd’hui à une demande massive d’électricité avec le déploiement de l’électromobilité et, deuxièmement, une véritable sécurité d’approvisionnement électrique ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Il s’agit d’une question centrale, y compris pour la sincérité du mix énergétique dans le cadre des travaux de la PPE.
Je rappelle, dans un souci de pédagogie collective, que le stockage existe déjà pour ce qui concerne l’hydroélectricité avec les stations de transfert d’énergie par pompage, les STEP.
M. Roland Courteau. Tout à fait !
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État. Il s’agit aujourd'hui de la première source de stockage dans le pays.
Comme je l’ai souligné tout à l’heure dans mon propos liminaire, il faut déverrouiller ce nœud technologique, franchir ce palier pour résoudre le problème que pose le manque de régularité d’approvisionnement en termes d’énergies renouvelables.
Certes, nous avons de la chance puisqu’une innovation en pousse une autre. Nos amis constructeurs automobiles, en particulier, financent aujourd'hui de nombreuses innovations pour promouvoir la mobilité électrique. Je pense à la Renault Zoé notamment, dont le coût de même que celui des batteries ont considérablement diminué. Bref, les innovations arrivent sur le marché, pour un prix au final stable pour les usagers.
Ces innovations technologiques pour la mobilité servent bien évidemment d’inspiration pour les énergies renouvelables, voire plus rarement pour l’autoconsommation. Que font les pouvoirs publics en la matière ?
Michel Dennemont, sénateur de La Réunion, m’a posé une question sur les outre-mer. Ces territoires sont intéressants en matière d’expérimentation. En raison de l’insularité et du fait qu’ils se trouvent dans une zone non interconnectée, le stockage est encore plus précieux pour eux.
Nous continuons, en particulier dans le cadre du dispositif de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, à financer un certain nombre d’innovations autour du stockage, mais davantage en lien avec les industries automobiles.
Je ne veux pas faire d’annonce prématurée, mais le Premier ministre a évoqué lundi dernier, en réunissant le Conseil national de l’industrie, un certain nombre de pistes fondamentales pour les années à venir.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour la réplique.
M. Roland Courteau. Le stockage de l’électricité est effectivement la première condition du développement des énergies renouvelables. Ce développement est indispensable non seulement pour la réduction des gaz à effet de serre, mais aussi pour la création d’emplois et pour la diminution de notre facture énergétique, qui est de l’ordre de 60 milliards d’euros.
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Mme Maryse Carrère. Ma question concerne le renouvellement des concessions hydroélectriques, ainsi que les perspectives du Gouvernement dans ce secteur.
Lors de l’adoption de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, notre pays s’est doté d’objectifs ambitieux en matière de développement des énergies renouvelables : celles-ci doivent représenter 40 % de la production d’électricité en 2030, alors que cette part s’élève actuellement à un peu plus de 20 %.
L’hydroélectricité a un rôle important à jouer, la France étant le deuxième pays européen producteur avec environ 13 % de sa production totale d’électricité d’origine hydraulique. Cette source d’énergie, disponible à tout moment, s’inscrit pleinement dans la politique énergétique de notre pays ; il est primordial que l’État continue de garder la maîtrise sur cette production, qui participe à notre sécurité d’approvisionnement.
Or la France fait aujourd’hui l’objet de démarches contentieuses concernant sa gestion du renouvellement des concessions hydroélectriques qu’elle a gelé depuis 2011, dont une mise en demeure par la Commission européenne en octobre 2015.
Le régime des délais glissants, qui s’applique à de nombreuses concessions échues, est juridiquement très fragile. Il entrave la création de sociétés d’économie mixte instituées par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, dont l’objet est d’exploiter des contrats de concession sur une vallée, afin de mieux associer les collectivités territoriales à la gestion des usages de l’eau, et de maintenir le contrôle public de l’État sur le parc hydroélectrique français comme sur l’ensemble de la production énergétique.
Le retard pris dans le renouvellement des concessions hydroélectriques empêche également le perfectionnement structurel et fonctionnel du secteur, et engendre un manque à gagner considérable pour les collectivités territoriales et pour l’État lui-même, privés de la redevance prévue par l’article L. 523-2 du code de l’énergie.
La Cour des comptes a évalué, dans un référé de 2013, que cette situation impliquera une perte de recettes budgétaires cumulée de 600 millions d’euros d’ici à 2020 ; le département des Hautes-Pyrénées estimait pour sa part en 2015 à plus de 1,125 million d’euros le manque à gagner pour les collectivités territoriales concernées.
Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement prévoit-il d’engager rapidement le renouvellement des concessions arrivées à échéance, avec un éventuel dédommagement des collectivités lésées ? Enfin, quelle stratégie comptez-vous mettre en place pour l’avenir et le développement de l’hydroélectricité dans notre pays ?
M. Jean-Claude Requier. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Cette question me permet de rappeler à quel point nous avons besoin de l’hydroélectricité, à la fois pour le développement économique des territoires et pour atteindre nos objectifs en matière d’énergies renouvelables.
Le droit français, en conformité avec le droit européen, prévoit que les concessions hydroélectriques échues doivent être renouvelées via une mise en concurrence, ce que personne ne refuse. Néanmoins, cela a entraîné quelques contentieux, ce qui me conduira, madame la sénatrice, à vous répondre sans trop me détacher de mes notes pour ne pas ajouter du trouble au trouble.
La transition énergétique a notamment prévu la possibilité pour les collectivités locales d’être associées à la concession dans le cadre d’une société d’économie mixte hydroélectrique et a retenu l’option de regrouper des concessions hydrauliques liées, pour faciliter leur exploitation et favoriser la sûreté.
Le statut des personnels sera préservé dans tous les cas et les cahiers des charges devront prévoir la reprise des personnels par le nouvel exploitant.
Actuellement, de nombreux échanges, commencés sous le précédent gouvernement, ont lieu avec la Commission européenne, afin de parvenir à une mise en œuvre équilibrée de ces dispositifs. Aucun accord n’a pour l’instant été trouvé. Le Gouvernement compte poursuivre les discussions dans le même état d’esprit, à savoir en prenant en compte l’ensemble des enjeux et l’intérêt public.
L’objectif est d’aboutir rapidement à une sortie du statu quo qui nuit aux investissements dans le secteur, suscite beaucoup d’inquiétude chez les élus locaux, et est source d’incertitude pour les entreprises et pour les salariés.
La France continuera à défendre les regroupements de concessions, indispensables à la cohérence des vallées, les projets de prolongation, transmis à la Commission, ainsi que la possibilité pour EDF de participer au processus de mise en concurrence.
La remise en concurrence est une politique nationale que nous souhaitons mener pour optimiser la gestion de nos barrages et relancer l’investissement, tout en redistribuant des ressources financières vers les territoires. Il ne faut pas oublier que les barrages appartiennent à l’État et que nous devons les valoriser !
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour le groupe Les Républicains.
M. Pierre Cuypers. Monsieur le secrétaire d’État, la pollution de l’air tue prématurément 40 000 personnes chaque année dans notre pays. L’objectif de la France est d’instaurer un taux moyen d’émission de 95 grammes de CO2 par kilomètre parcouru pour les voitures neuves d’ici à 2020.
Or, cette année, le Gouvernement baisse le seuil de 127 à 101 grammes pour les véhicules de société. Afin de le réduire davantage, le Sénat, dans sa séance du 16 novembre, a adopté un dispositif plus ambitieux au sein du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il a étendu l’exonération de la taxe sur les véhicules de société pendant une période de 12 trimestres aux véhicules fonctionnant au super-éthanol E 85, à l’instar du gaz naturel ou liquéfié, ce qui permet de répondre aux objectifs de réduction de CO2.
La France a la chance d’avoir des carburants vertueux, qui réduisent notre dépendance énergétique. L’emploi du super-éthanol contribue à réduire les émissions de 65 % à 75 %.
Alors, monsieur le secrétaire d’État, encourageons notre pays dans cette démarche. Pouvez-vous nous confirmer que le Gouvernement, qui avait émis un avis favorable à l’adoption de l’amendement que je viens d’évoquer, tiendra bien ses engagements et introduira des dispositions en conséquence dans le projet de loi de finances pour 2018 ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur, la réponse est oui. Je ne peux pas faire plus efficace que cette réponse sans détour ! Je tiens à vous remercier des travaux que vous menez sur ce sujet, dans le cadre du projet de loi dit Hydrocarbures, sur lequel vous avez déposé un amendement relatif aux biogaz venus d’Amérique du sud. Je n’en dirai pas plus, car je me sens observé par la Commission européenne…
La stratégie et l’ambition que vous avez rappelées dans votre question sont bien celles du Gouvernement. Elles participent des réflexions que nous menons actuellement dans le cadre des Assises de la mobilité ; elles permettent d’être en accord avec la trajectoire carbone que nous voulons définir de la façon la plus pragmatique possible.
C’est donc un autre membre du Gouvernement qui vous l’assure, monsieur le sénateur : l’avis qu’il avait émis sur l’amendement que vous avez mentionné reste inchangé.
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour la réplique.
M. Pierre Cuypers. Merci pour ce oui franc, monsieur le secrétaire d’État ! Encourager et développer cette filière vertueuse, c’est sécuriser notre approvisionnement en matière énergétique et alimentaire. C’est aussi une réponse à la très forte crise agricole et aux défis environnementaux.
Un gouvernement qui s’engagerait sur cette voie gagnerait en crédibilité, en encourageant encore plus largement l’utilisation des carburants vertueux, et en préservant ainsi plus de 30 000 emplois directs.
M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton, pour La République En Marche.
M. Julien Bargeton. Monsieur le secrétaire d’État, je ne peux commencer mon propos sans un clin d’œil au plan Climat adopté à l’unanimité du Conseil de Paris lundi dernier, ce qui prouve que les élus peuvent s’entendre sur l’essentiel.
Mais les Parisiens, contrairement à leurs voisins normands, ne pourront pas faire appel aux éoliennes offshore. Le plan compte beaucoup d’actions, mais pas celle-là ! (Sourires.)
Le Gouvernement, de ce point de vue, a pris la mesure des enjeux, en faisant du développement des énergies renouvelables un axe de sa politique de transition écologique.
Développer les énergies renouvelables, notamment l’éolien, c’est une ambition. Mais c’est aussi un impératif : veiller aux conditions de développement des entreprises à fort potentiel de ce secteur. Or, comme tous les secteurs, l’éolien a besoin de simplification, d’un cadre stable, qui s’impose à son activité. Je ne plaide évidemment pas pour l’abandon pur et simple des règles qui encadrent les énergies renouvelables en général, et l’éolien en particulier. Mais je partage la préoccupation du Gouvernement sur le bon niveau de contraintes pesant sur ce secteur.
De manière générale, au-delà de l’éolien, favoriser les innovations technologiques en matière d’énergies renouvelables requiert un juste équilibre entre l’encadrement normatif et la souplesse pour encourager les initiatives.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez cité dans votre intervention liminaire le groupe de travail dédié à l’éolien ; vous avez également indiqué que le Gouvernement souhaitait que les choses s’accélèrent dans ce domaine.
Ma question est donc triple, de prospective comme de curiosité : quel est le périmètre exact de ce groupe de travail ? Où en sont les réflexions sur l’éolien terrestre ? Si propositions il y a, quelles seront les traductions législatives, réglementaires, budgétaires ou autre ? (M. Michel Dennemont applaudit.)