M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. J’irai dans le même sens que la commission.
Néanmoins, je voudrais apporter quelques éléments complémentaires. Je souhaite faire de la pédopsychiatrie l’une des priorités de mon action. Les besoins en la matière sont réels, et ils ne sont pas couverts. Je prends donc devant vous l’engagement d’essayer de réorganiser la prévention de la santé mentale, les dépistages et la prise en charge des enfants.
Je sollicite également le retrait de cet amendement, qui n’a pas sa place à l’article 35.
M. le président. Monsieur Chasseing, l’amendement n° 290 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Daniel Chasseing. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 290 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 335, présenté par MM. Jomier, Daudigny et Guillaume, Mmes Féret, Grelet-Certenais, Jasmin, Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Améliorer les conditions de travail des professionnels de santé et du secteur médico-social ;
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Nous sommes toujours dans le champ principal, après l’alinéa 8.
Je vous propose de prendre en compte l’amélioration des conditions de travail des professionnels de santé, quel que soit leur statut, et des professionnels du champ médico-social.
Nous l’avons vu précédemment, cet alinéa prévoyait de développer les modes d’exercice coordonné. Il me paraît important que les innovations puissent également prendre en compte la qualité de vie au travail.
Nous sommes tous particulièrement conscients de l’importance du phénomène de burn-out, notamment chez un certain nombre de professionnels qui exercent dans des conditions difficiles. Dans notre volonté commune de mettre en place un système de soins fonctionnant de manière plus satisfaisante, la prise en compte de l’amélioration des conditions de travail des professionnels de santé me semble devoir être considérée comme prioritaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Là encore, le sujet est important, mais l’adoption de cet amendement ouvrirait encore un autre champ d’action, potentiellement très large.
On peut toutefois espérer que l’amélioration de la pertinence des prises en charge et de l’efficience du système de santé contribuera d’une certaine manière à l’amélioration des conditions de travail des professionnels de santé.
La commission demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Jomier, l’amendement n° 335 est-il maintenu ?
M. Bernard Jomier. Oui, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 336, présenté par MM. Jomier, Daudigny et Guillaume, Mmes Féret, Grelet-Certenais, Jasmin, Lienemann, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Renforcer les initiatives de démocratie en santé ;
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Nous sommes toujours dans le champ principal. Les expériences menées depuis un certain nombre d’années sur le terrain montrent que les démarches de démocratie en santé – je pense notamment aux conseils locaux de santé – sont porteuses d’innovations de grande qualité.
Nous proposons de renforcer les initiatives de démocratie en santé dans le champ de ces expérimentations. Je rappelle par ailleurs que le financement de telles démarches fait partie des missions du FIR, auquel il est fait référence dans l’article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, rapporteur. La commission estime que le sujet est en dehors du champ principal des expérimentations. Nous sollicitons donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je vais retirer mon amendement, mais j’ai tout de même un peu de mal à comprendre. Les champs principaux énumérés à l’alinéa 8 portent sur des domaines d’importance similaire ; on n’est pas dans le détail ! Et tout le monde reconnaît le caractère prioritaire des domaines visés par mon amendement.
Je ne comprends donc pas la logique consistant à repousser les dispositions portant sur la qualité de vie au travail des professionnels de santé, qui est un enjeu majeur, ou sur la démocratie en matière de santé, qui en est un autre, dans les évolutions de notre système de soins.
Néanmoins, eu égard aux réponses qui m’ont été apportées, je retire mon amendement.
Mme Agnès Buzyn, ministre. Je souhaite vous rassurer, monsieur le sénateur. Quand nous travaillons sur la pertinence ou sur la qualité des parcours de soins, ce qui est un des objectifs principaux aujourd’hui des expérimentations, il nous faut des indicateurs de qualité des parcours venant des patients. C’est ce qu’on appelle les PREM’s, Patient Reported Experience Measures, qui sont des indicateurs de qualité issus d’expériences de patients.
Il s’agit d’une autre vision de la démocratie sanitaire, bien plus participative. Une approche uniquement représentative, fondée sur un parcours ou sur une organisation territoriale n’est à mon sens pas suffisamment moderne.
J’ai donc donné mission à la Haute Autorité de santé de nous proposer des indicateurs de qualité des soins et des parcours venant des patients. Elle a commencé par un indicateur de qualité qui s’appelle I-SATIS dans les établissements de santé. Cette démarche doit être poursuivie dans le champ ambulatoire. Pour moi, le ressenti du patient par rapport à son parcours fait partie des éléments de qualité et de pertinence qu’il faut recueillir et financer.
C’est ainsi que nous travaillerons sur les territoires avec les patients pour améliorer la qualité des soins. Voilà pourquoi le texte de votre amendement me paraît quelque peu décalé par rapport à l’objectif ambitieux que je me fixe, à savoir que le patient devienne coconstructeur de l’évolution du système de santé.
M. le président. L’amendement n° 343 rectifié bis, présenté par Mme Ghali, MM. Daudigny, Lalande, Courteau et Iacovelli, Mmes Lienemann et Lepage, M. Tissot, Mme Conconne, MM. Mazuir et Antiste et Mmes G. Jourda, Espagnac et Féret, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Favoriser chez les enfants de six et douze ans le recours préventif à la technique du scellement de sillons et de soins consécutifs dans le cadre de la médecine scolaire ;
La parole est à Mme Samia Ghali.
Mme Samia Ghali. J’espère, madame la ministre, que ce sujet trouvera grâce à vœux yeux, car il me tient à cœur.
Le scellement prophylactique des sillons est une méthode de prévention qui assure une protection durable et une défense fiable de l’émail des dents face aux caries.
Cette méthode préventive existe maintenant depuis plus de vingt-cinq ans, même si elle n’est pas systématiquement proposée par les dentistes. Pourtant, elle a fait ses preuves puisque 80 % des enfants qui ont eu la chance d’en bénéficier n’ont plus eu de caries. Ce n’est pas rien en termes de prévention dentaire, d’autant qu’un certain nombre de nos concitoyens n’auront pas les moyens par la suite de s’offrir des prothèses, bien souvent onéreuses. Pour éviter demain d’avoir des « sans dents », mieux vaudrait développer la prévention grâce à ce type de traitement.
J’ai souhaité favoriser ce recours préventif dans le cadre de la médecine scolaire : c’était d’abord pour moi une façon de vous interpeller, madame la ministre. Néanmoins, il est clair que le scellement doit être pratiqué par les dentistes. Mon intention était aussi de contourner l’article 40 de la Constitution. Néanmoins, cette méthode est déjà remboursée par la sécurité sociale. Cet amendement n’entraînera pas un coût supplémentaire. Par ailleurs, il ne concerne que les enfants entre 6 ans et 7 ans, après 7 ans, c’est trop tard pour le scellement prophylactique. Bref, c’est un traitement qui me paraît utile pour les enfants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Cet objectif ciblant précisément une technique dentaire paraît très éloigné du champ des expérimentations prévues dans l’article 35. Il relèverait plutôt d’une démarche de prévention à mener dans le cadre de la médecine scolaire. La commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Effectivement, l’article 35 n’a pas pour but de décliner toutes les maladies les unes après les autres. En revanche, j’ai donné des instructions très claires à l’assurance maladie, dans le cadre de la convention qui est en train d’être renégociée avec les dentistes, pour axer les remboursements sur la prévention plutôt que sur le curatif et sur les prothèses. Les orientations sont donc en cours de négociation. On peut imaginer que ces techniques fassent l’objet d’un remboursement aidant à leur prise en charge. Quoi qu’il en soit, le Gouvernement demande également le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Madame Ghali, l’amendement n° 343 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Samia Ghali. Oui, même s’il n’est pas adopté. Madame la ministre, les dentistes n’informent quasiment pas sur cette méthode. De nombreux Français ignorent même qu’elle existe. Ma volonté première était de proposer le scellement prophylactique comme une sorte de vaccin obligatoire de plus. La question des dents est en effet essentielle non seulement en matière de santé, mais également pour l’accès à l’emploi. N’oublions pas que l’embauche peut dépendre de l’apparence physique. Je suis sûre que dans les années à venir nous serons obligés de démocratiser la méthode, dans l’intérêt de tous.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je trouve dommage que soit mise en avant une technique particulière. Il me paraît plutôt important de mettre l’accent sur l’ensemble de la prévention bucco-dentaire. Des expériences extrêmement intéressantes ont été conduites en Seine-Saint-Denis tout d’abord et, aujourd’hui, dans le Val-de-Marne. Grâce à cette prévention bucco-dentaire, le risque carieux a beaucoup reculé dans ce dernier département. Il faudrait mettre en place une politique de prévention beaucoup plus large, notamment en prévoyant que des dentistes se déplacent dans les écoles. Encourageons plutôt les départements à développer cette politique en leur accordant des moyens, car il est extrêmement difficile pour eux de faire toujours mieux et toujours plus avec toujours moins !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 343 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 353 rectifié ter, présenté par M. Daudigny, Mme Blondin, MM. Cabanel et Iacovelli, Mme Guillemot, MM. Todeschini et Vaugrenard, Mmes Ghali et Conconne, M. Daunis, Mmes Tocqueville et Cartron, MM. Carcenac, Houllegatte et Raynal, Mme Espagnac, MM. Duran, Lalande, Boutant et Courteau, Mmes Bonnefoy et Rossignol, MM. Sutour et Mazuir, Mme Lubin, MM. Jeansannetas et Antiste, Mme Féret, MM. Fichet, Lozach et Manable et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Permettre une orientation pertinente du patient atteint d’insuffisance rénale chronique terminale vers la modalité de prise en charge la plus adaptée à sa situation, par une tarification unique modulable en fonction du patient et non du mode de prise en charge ;
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Les expérimentations ouvertes par cet article 35 me semblent de nature à permettre l’expérimentation d’un forfait unique en dialyse. Comme le recommande la Cour des comptes depuis 2015, un forfait unique, adapté au profil de chaque patient remplaçant les seize forfaits de rémunération en vigueur, permettrait de réformer le financement de la dialyse, et par là même de développer la dialyse à domicile, solution préconisée par les différentes agences de santé et demandée par beaucoup de patients.
Ce forfait comporterait des majorations et des minorations en fonction notamment du profil du patient et des résultats des traitements. Les frais de transport, examens biologiques, supplémentation nutritionnelle destinée à remédier aux carences liées au traitement et une part de paiement à la performance y seraient intégrés.
Cela reviendrait à créer, tout d’abord, un forfait de suivi hebdomadaire pour les néphrologues, qui sera le même, quelle que soit la technique de dialyse utilisée ; et ensuite un forfait hebdomadaire de traitement de l’IRCT, l’insuffisance rénale chronique terminale, par dialyse pour les établissements, indépendamment de la thérapie, le tarif étant basé sur la charge en soi dont a besoin chaque patient.
Nous sommes face à une demande des patients. La réforme de cette tarification marquerait une étape importante.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, rapporteur. On pourrait croire que l’amendement est déjà satisfait par l’expérimentation ouverte par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 concernant la prise en charge des personnes atteintes d’insuffisance rénale chronique, expérimentation qui pourra être intégrée et poursuivie dans le cadre juridique créé par l’article 35.
La commission a toutefois considéré que tel n’était pas le cas : l’objectif de l’amendement est important et mérite d’être réaffirmé dans le cadre de cet article. L’expérimentation ouverte par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 se traduit par des insuffisances dans la prise en charge des dialysés relevées par la Cour des comptes.
La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Je suis embarrassée, car il s’agit d’un sujet prioritaire. Mais, si l’on commence à décliner l’article 35 pour toutes les pathologies, nous n’en finirons pas !
L’insuffisance rénale chronique est un sujet important. Mais il en va de même de la prise en charge du diabète de type 1, de la gonarthrose, etc. Il y aura toujours une bonne raison de créer un forfait.
Cet article 35 vise justement à expérimenter des tarifications au forfait d’épisodes de soins. À l’heure actuelle, nous réfléchissons à l’élaboration d’une liste de parcours que pourrait nous donner la Haute Autorité de santé, avec des indicateurs de parcours. Nous travaillons donc sur des actes ou sur des parcours prioritaires. Mettre en avant, par voie d’amendement, dans cet article 35 une pathologie en particulier romprait l’équilibre de l’article, qui vise précisément à ouvrir le cadre expérimental à toutes les pathologies en vue de transformer notre système de santé.
Voter un tel amendement restreindrait l’article à une expérimentation de forfaits pour l’insuffisance rénale chronique. Ce serait contre-productif par rapport à l’esprit de l’article 35, qui vise au contraire à ouvrir au maximum le champ de l’expérimentation. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Mme la ministre n’a pas tout à fait tort sur le cadre de l’article 35.
Je reviendrai néanmoins sur les travaux réalisés par la commission des affaires sociales il y a un an et demi à La Réunion. Ce que l’on peut lire un peu partout dans des journaux plus ou moins satiriques sur le scandale de la dialyse à l’hôpital est juste : la dialyse à domicile est peu employée dans notre pays, alors qu’il s’agit d’une solution pratique et sécurisée pour le patient ; cette pratique serait moins onéreuse pour la sécurité sociale. Par ailleurs, le taux de greffes rénales est faible en France par rapport aux autres pays européens.
Je ne sais pas ce que fera l’auteur de cet amendement, mais je compte vous écrire sur ce sujet, madame la ministre, pour obtenir de vous une réponse écrite. Je demanderai également à la Cour des comptes, qui a déjà rendu un rapport sur cette question en 2015, de nous dresser rapidement l’état actuel de la situation. Que s’est-il passé depuis 2015 et les recommandations formulées par la Cour ? Je solliciterai enfin auprès du président du Sénat, au nom de la commission des finances ou au nom de mon groupe, la création d’une mission d’information sur la situation ambiguë de la dialyse en France.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet article 35 vise à définir le cadre, et non les contenus. C’est toute la différence entre le contenant et le contenu. Si l’on précise trop le contenu, le contenant perd de sa richesse. Ici, on est dans la stratégie. Je peux comprendre que chacun veuille définir une perspective selon ses objectifs personnels, voire ses marottes, mais cela nous priverait d’une ouverture. Il s’agit de définir le cadre, la méthode, le pilotage, la gouvernance. Tel est l’objet de cet article 35. Limitons-nous à cela !
M. le président. La parole est à M. Guillaume Arnell, pour explication de vote.
M. Guillaume Arnell. Je comprends la position de Mme la ministre, mais M. le président de la commission des affaires sociales a raison : c’est un sujet important au regard des dégâts que causent le diabète et l’hypertension artérielle, notamment dans mon territoire.
Se pose également le problème des structures de dialyse. Les personnes dialysées sont encore en difficulté par rapport à la tarification, soit de l’hémodialyse, soit de l’autodialyse, et en raison du manque de place. Il y a très peu de dialyses à domicile.
Je comprends les propos de Jean-Marie Vanlerenberghe, mais il est important d’utiliser chaque espace pour sensibiliser Mme la ministre sur des sujets de cette importance. Cela allonge peut-être les débats, mais c’est aussi pour nous une façon de sonder l’opinion du Gouvernement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 221, présenté par MM. Tourenne, Daudigny et Guillaume, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L’État peut donc autoriser à titre expérimental, dans certaines régions, pour une durée de cinq ans, les orthoptistes et les optométristes diplômes à prescrire des verres correcteurs ainsi que des lentilles oculaires de contact et effectuer tout examen nécessaire à la prescription, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, sauf pour les personnes âgées de moins de seize ans ;
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. J’évoquerai un problème que j’ai déjà eu l’occasion d’aborder ici et que chacun connaît bien, à savoir qu’il est difficile d’obtenir un rendez-vous avec un ophtalmo. Certes, le problème se pose aussi pour d’autres spécialistes. Il n’en reste pas moins qu’il n’est pas acceptable de devoir attendre six mois, voire un an, dans l’inconfort avant d’obtenir une prescription de verres ou de lentilles. Il importe donc de trouver des solutions.
Je vais aussi vous parler d’une bête curieuse, d’une espèce de métier non identifié : la profession d’optométriste. L’optométriste n’existe pas, chers collègues ! C’est un individu qui a passé un diplôme, mais qui ne pourra pas exercer sa profession parce qu’elle n’existe pas dans la nomenclature des métiers. Il me semble facile de remédier à cette difficulté. Ce qui est important chez l’optométriste, c’est qu’il a suivi cinq années d’études après le baccalauréat et qu’il a toutes les compétences nécessaires pour mesurer les corrections à apporter à un défaut de vision. Il est donc capable de définir de façon très exacte la correction dont vous avez besoin.
Il serait peut-être utile, tout compte fait, d’expérimenter la chose sur un territoire, car j’entends bien les oppositions : d’abord celles des ophtalmos, mais aussi celles des personnes qui doutent, qui sont circonspectes. Expérimentons et mettons en place un suivi rigoureux afin de permettre aux optométristes de prescrire des verres lorsqu’il ne s’agit, notamment, que de renouveler une ordonnance. Il ne s’agit pas du tout de leur permettre de s’intéresser à la pathologie de l’œil pour y apporter quelque remède que ce soit. Une telle expérimentation limitée, sur un territoire donné, au seul aspect métrique nous permettrait de tirer certaines conclusions et de trouver des solutions. Nous ne pouvons pas rester encore des années les bras croisés, sans chercher à apporter une réponse à une situation parfaitement intolérable !
M. le président. L’amendement n° 209 rectifié bis, présenté par M. Marie, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Durain, Mme Espagnac, MM. Houllegatte, Iacovelli et Lalande, Mmes Lepage, Lienemann, Meunier, S. Robert et Rossignol, MM. Tissot, Courteau et Carcenac, Mme M. Filleul et M. Jomier, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L’État peut donc autoriser à titre expérimental, dans certaines régions, pour une durée de cinq ans, les orthoptistes diplômés à prescrire, sous validation de la signature du médecin ophtalmologiste, des verres correcteurs ainsi que des lentilles oculaires de contact et effectuer tout examen nécessaire à la prescription cosignée, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, sauf pour les personnes âgées de moins de seize ans ;
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Avec cet amendement de repli, il s’agit de permettre aux orthoptistes, qui sont des professionnels de la vision, de travailler sous le contrôle des ophtalmologistes, un peu comme les sages-femmes assurent les prescriptions et le suivi gynécologique à la place des gynécologues-obstétriciens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Les amendements nos 221 et 209 rectifiés bis concernent la filière visuelle. Celle-ci a commencé à s’organiser entre les ophtalmologistes, les orthoptistes et les opticiens, chacun devant rester à sa place en fonction de ses compétences. Certains orthoptistes travaillent d’ailleurs avec des ophtalmologistes, en partenariat dans le même cabinet.
La filière commence donc à se structurer ; elle fait même partie des filières médicales qui se sont bien organisées ces dernières années. Le problème concerne plutôt les délais d’attente pour obtenir un rendez-vous. Une fois l’examen médical réalisé, il est facile d’obtenir rapidement une paire de lunettes.
En tout état de cause, il me semble prématuré de voter des amendements de ce type en loi de financement de la sécurité sociale. La filière s’organise, même si des points restent à approfondir et à perfectionner. Nous ne pouvons rien faire sans concertation avec les professionnels concernés. Par ailleurs, j’ai toujours défendu pour ce qui me concerne la même position : je suis contre des prescriptions de durée très longue, qui permettent, si l’on renouvelle sa prescription deux mois avant les cinq ans, de rester dix ans sans consulter un ophtalmologiste, avec le risque de laisser évoluer des pathologies à bas bruit telles que le glaucome.
La position de la commission est donc très claire : on ne touche pas à la filière visuelle sans concertation. Cela pourra bien sûr évoluer dans les mois à venir, en fonction de l’avancée des négociations.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
Pour compléter les propos de Mme Deroche, j’insisterai à mon tour sur l’importance qu’il y a à travailler avec les différentes filières. Il s’agit plutôt de protocoles de coopération entre professionnels. Or l’article 37 du PLFSS vise à accélérer l’examen des déploiements des protocoles de coopération qui relèveront des priorités ministérielles. Votre proposition, monsieur Tourenne, n’a donc pas lieu de figurer dans l’article 35. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Tourenne, l’amendement n° 221 est-il maintenu ?
M. Jean-Louis Tourenne. Je veux bien vous accorder, madame la ministre, que cet amendement est totalement déplacé et qu’il aurait dû figurer ailleurs. Néanmoins, ce n’est pas le fond du problème, même s’il faut peut-être s’attacher à la procédure. Mme Deroche nous a dit que la filière était en train de s’organiser. Comment peut-elle s’organiser ? En raison du manque de spécialistes, il faudra toujours attendre longtemps avant d’obtenir un rendez-vous ! Chercherons-nous une solution ou continuerons-nous à faire systématiquement des misères à la profession d’ophtalmo ?
Je maintiens mon amendement.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. L’amendement soutenu avec acharnement par M. Tourenne a été défendu en s’appuyant sur des considérations qui sont fausses. Notre collègue affirme que les patients attendent longtemps avant d’obtenir un rendez-vous chez un ophtalmo. S’il s’agit d’un renouvellement, l’ordonnance est valable deux ans puisque la ministre de la santé précédente a signé un décret en ce sens. Il y a 35 000 opticiens en France et 13 000 magasins d’optique. Les opticiens peuvent renouveler les lunettes tous les deux ans à partir d’une ordonnance faite deux ans auparavant.
En cas de problème, de glaucome ou autre, l’opticien est tout à fait capable de s’en rendre compte. Il appellera alors directement l’ophtalmo, ce qui permettra probablement au patient d’obtenir plus vite un rendez-vous. En revanche, en l’absence d’un problème relatif à la santé des yeux, l’opticien est tout à fait capable de prescrire des verres. Laissons chacun exercer son métier !
Mme la ministre l’a rappelé : la filière visuelle est en train de s’organiser. Elle travaille de conserve avec l’assurance maladie et le ministère de la santé. Très probablement, une filière visuelle de qualité sera mise au point. Laissons-la faire et ne mélangeons pas les problèmes !
M. le président. Madame Meunier, l’amendement n° 209 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Michelle Meunier. Tout à fait !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 209 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)