M. le président. La parole est à Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Votre question, monsieur le sénateur, me donne l’occasion de revenir sur l’une des priorités du quinquennat : le handicap et, plus particulièrement, l’autisme.
Les centres de ressources autisme ont été généralisés depuis plus de dix ans. Ils sont effectivement des acteurs majeurs dans le dispositif de prise en charge et d’accompagnement des personnes avec autisme.
Vous indiquez que le récent décret régissant leur fonctionnement a été établi en 2017, sans concertation avec les usagers. Je veux vous rassurer : la publication tardive de ce décret, qui est travaillé depuis 2014, tient précisément à la durée des concertations et à la difficulté à trouver un point d’accord entre les nombreuses parties prenantes, comme trop souvent dans ce domaine, traversé par des débats et des conflits « plus délétères que féconds », selon l’expression du rapport d’évaluation du troisième plan Autisme.
En l’espèce, il aura donc fallu trois ans pour confirmer, dans le décret de 2017, la place et le rôle central des CRA dans la chaîne repérage, diagnostic et intervention. Non pas toute la place, mais une juste place en tant que centre expert, pour les diagnostics les plus complexes, et centre ressources, pour la formation des équipes de proximité.
C’est une place essentielle pour garantir la fluidité d’un triptyque indispensable à la qualité des prises en charge, conformément aux bonnes pratiques professionnelles établies par la Haute Autorité de santé, la HAS, et l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux, l’ANESM, et pour favoriser l’accès précoce à des interventions adaptées afin d’éviter, comme vous l’avez signalé, l’installation d’incapacités et rendre enfin possible une trajectoire d’inclusion.
Malheureusement, les textes sont aussi longs à être publiés que les pratiques à évoluer !
Je veux le dire clairement, la concentration des diagnostics sur les centres régionaux de ressources autisme est un vrai problème. Elle témoigne de l’insuffisance de la structuration des parcours et, surtout, de celle des outils donnés aux professionnels de santé et aux familles pour assurer une orientation adéquate.
Notre ambition est bien que le nouveau plan, dont la remise est annoncée au début de 2018, permette de remédier au problème.
Je serai, pour ma part, particulièrement attentive à toutes les propositions qui seront faites pour accroître la formation initiale et continue des professionnels de santé. Je sais compter sur l’engagement en ce sens de la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, qui est pleinement mobilisée sur le sujet, dans le cadre d’une feuille de route totalement croisée.
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de ces propos, qui, en tout cas de par les intentions évoquées et, surtout, de par les problématiques prises en compte, sont rassurants.
Nous attendrons avec impatience les propositions visant à faire évoluer favorablement le fonctionnement de ces centres. Les membres de la commission des affaires sociales du Sénat seront également très ouverts à une participation aux réflexions sur l’évolution du plan Autisme. Il y a là une invitation à venir nous rencontrer !
implantation d'un centre de protonthérapie à toulouse
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Micouleau, auteur de la question n° 042, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Brigitte Micouleau. Comme vous le savez, madame la secrétaire d’État, la protonthérapie est une technique de radiothérapie utilisant des faisceaux de protons.
Elle est aujourd’hui reconnue comme la méthode permettant de cibler le mieux une tumeur, tout en épargnant les tissus sains voisins.
Moins toxique que la radiothérapie classique, elle permet notamment de s’attaquer à des cancers développés par l’enfant, tels que des tumeurs neurologiques ou de la colonne vertébrale. Chez l’adulte, ses bénéfices sont indiscutables dans le traitement des cancers de la prostate et des sinus.
Le troisième plan Cancer, qui court sur la période 2014-2019, a prévu la création de nouvelles autorisations pour l’ouverture de centres de protonthérapie.
Il est un fait : le grand quart sud-ouest de la France et, plus largement, le quart sud-ouest de l’Europe sont dépourvus de ce type de centres.
Première métropole de France en termes de développement démographique et économique, Toulouse compte déjà plus de 760 000 habitants et jouit d’une situation géographique qui lui permettrait de répondre de la meilleure des façons aux enjeux d’égalité territoriale d’accès à ce traitement innovant, et ce, sur le plan aussi bien national que continental, du fait notamment de sa proximité avec la péninsule ibérique.
De plus, forte de l’Oncopole, pôle de recherche sur le cancer et l’innovation en santé de dimension européenne, la métropole toulousaine peut déjà compter sur une dynamique médicale et scientifique de très haut niveau.
Mobilisés depuis plus de trois ans sur ce dossier, médecins, chercheurs, ingénieurs, industriels et collectivités territoriales, solidairement rassemblés au sein du projet « protonthérapie et recherche innovante en cancérologie et systèmes », dit PERICLES 2, ont réalisé un travail extraordinaire. Ils n’attendent plus aujourd’hui qu’un signe du Gouvernement pour engager les investissements qu’ils ont provisionnés.
Aussi, madame la secrétaire d’État, pouvez-vous dès à présent nous préciser le calendrier, ainsi que les modalités pratiques de l’appel à projets de création de ces nouveaux centres de protonthérapie ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Je vous prie, madame la sénatrice, de bien vouloir excuser l’absence de la ministre des solidarités et de la santé, qui n’a pas pu être présente et m’a chargée de vous répondre.
Vous appelez son attention sur le projet PERICLES 2, projet de création d’un centre de protonthérapie, conjoint au centre hospitalier universitaire de Toulouse et à l’institut Claudius Regaud, centre de lutte contre le cancer.
L’accompagnement des évolutions technologiques et thérapeutiques, ainsi que le déploiement équitable de l’innovation en cancérologie figurent parmi les priorités de la politique menée par le Gouvernement.
J’attire votre attention sur le fait qu’aucun appel à projets pour l’implantation de centre de protonthérapie n’est prévu par le plan Cancer 2014-2019.
Dans le cadre de ce plan Cancer, l’Institut national du cancer, l’INCa, a remis au ministère de la santé son premier rapport sur le développement de la protonthérapie en juillet 2015. Il a mené des travaux complémentaires, en 2016, pour affiner les indications « projetées ».
Se pose dorénavant la question de l’évaluation médico-économique de la protonthérapie, pour laquelle la Haute Autorité de santé doit être saisie. Cette évaluation permettra d’élaborer d’éventuelles recommandations de bonnes pratiques.
Dans cette attente, les agences régionales de santé, les ARS, ont sursis à toute décision d’autorisation en la matière.
Nous ne pouvons que souligner le mérite du positionnement volontariste du centre hospitalier universitaire de Toulouse et de l’institut Claudius Regaud.
Dans l’attente des orientations nationales, nous invitons ce projet à s’inscrire à moyen terme dans le cadre du processus d’autorisation qui suivra l’élaboration du futur projet régional de santé, ou PRS – celui-ci sera justement révisé à l’aune de ces orientations nationales.
Le projet toulousain pourra également s’inscrire dans des orientations qui découleront du programme national de recherche en santé publique, figurant dans la stratégie nationale de santé, lequel sera mené en étroite collaboration et coordination avec le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Micouleau.
Mme Brigitte Micouleau. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État. Je reste néanmoins inquiète s’agissant de la création de nouveaux centres de protonthérapie. Je regrette ce qui ressemble à un renoncement, bien qu’un engagement de l’État ait pourtant été acté sur ce sujet particulier de santé publique et de lutte contre le cancer. Nous pouvions espérer une autre réponse et une réelle volonté politique.
prise en charge de l'avc en france
M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin, auteur de la question n° 049, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Maryvonne Blondin. Près d’un mois après la Journée mondiale du cœur et à quelques jours de la Journée mondiale des accidents vasculaires cérébraux – dits AVC –, je souhaite vous interroger, madame la secrétaire d’État, sur la prise en charge de ces attaques dans notre pays.
L’AVC, il faut le savoir, fait une victime toutes les quatre minutes ! Il représente un enjeu de santé publique majeur, affectant chaque année près de 130 000 personnes et causant 62 000 décès. C’est la première cause de mortalité chez la femme et la troisième chez l’homme, et encore un exemple, d’ailleurs, de l’androcentrisme de la recherche médicale, sujet sur lequel il faudra agir.
Lorsqu’il ne conduit pas au décès, l’AVC constitue la première cause de handicap physique acquis chez l’adulte. Son coût pour l’assurance maladie est par ailleurs estimé à 4,5 milliards d’euros par an.
Je précise que ma région, la Bretagne, est malheureusement très touchée. Elle est l’une des deux régions métropolitaines – l’autre étant les Hauts-de-France – enregistrant le taux de patients hospitalisés pour un AVC ischémique et le taux de mortalité par AVC les plus élevés.
Face à ce phénomène, de nouvelles modalités de prise en charge ont été développées. Outre les traitements médicamenteux, la thrombectomie mécanique représente une avancée médicale capitale, permettant d’augmenter sensiblement les chances de survie des patients et de limiter les risques de séquelles. Encore faut-il que cette technique puisse être disponible sur tout notre territoire !
Si aujourd’hui ces traitements de pointe se développent au sein des unités neuro-vasculaires, unités spécifiquement dédiées à la prise en charge des personnes victimes ou suspectées d’AVC, de nombreuses zones géographiques, en particulier rurales, restent encore trop éloignées de ces structures, avec des temps de transport et d’acheminement bien trop longs. Or le délai de prise en charge d’un AVC est fondamental. On estime qu’une minute perdue représente en moyenne deux millions de neurones en moins !
Il est donc urgent d’assurer à nos concitoyens une réelle égalité d’accès à ces soins.
Je veux ajouter un autre facteur à prendre en compte : la reconnaissance des symptômes de l’AVC.
Ces signaux sont encore trop méconnus, alors qu’ils sont simples à reconnaître, ne serait-ce que la difficulté à sourire, la paralysie temporaire ou le fourmillement. Face à de tels symptômes, il ne faut pas hésiter et appeler le 15 !
Voilà autant d’enjeux liés à la prise en charge de l’AVC, sur lesquels, madame la secrétaire d’État, je souhaite vous interpeller. Quelles sont les intentions du Gouvernement en matière de développement de la prévention, de sensibilisation à la détection des signes de l’AVC et, enfin, d’un accès aux soins rapide et suffisant sur l’ensemble de notre territoire ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. De nouveau, madame la sénatrice, je vous prie d’excuser l’absence de la ministre des solidarités et de la santé.
Les maladies cardio-neuro-vasculaires représentent la deuxième cause de mortalité en France, avec près de 180 000 décès annuels. Elles sont caractérisées par une incidence stable de 150 000 cas par an, avec un taux d’incidence multiplié par deux après 55 ans.
La mise en œuvre du plan AVC 2010-2014 a assuré non seulement une restructuration de la prise en charge de la population au sein de filières AVC, mais aussi le développement d’outils d’aide à la décision pour réduire les délais de prise en charge. Je pense notamment à la télémédecine, avec la téléconsultation, la téléexpertise et la télésurveillance des AVC.
L’innovation thérapeutique que représente la pratique de la thrombectomie mécanique par voie endovasculaire, couplée ou non à la thrombolyse, a montré une récupération quasi totale à trois mois, chez les personnes victimes d’infarctus cérébral, réduisant considérablement les risques de décès et de séquelles.
Les premiers éléments de consensus ont fait émerger l’estimation annuelle d’environ 60 000 à 80 000 AVC susceptibles d’être traités par thrombolyse, dont la moitié avec une association potentielle à une thrombectomie, pour 37 centres de neuroradiologie interventionnelle et 135 unités neuro-vasculaires, ou UNV, dont celle du centre hospitalier régional universitaire de Brest.
Des évolutions organisationnelles au niveau de la prise en charge sont nécessaires, avec le soutien, notamment, de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés, la CNAMTS, et de la Haute Autorité de santé, la HAS.
Elles sont proposées par le comité Thrombectomie créé à cet effet en février 2016, et qui réunit l’ensemble des acteurs impliqués, en lien avec les associations de malades France AVC et la Fédération nationale des aphasiques de France, la FNAF.
En novembre 2016, la HAS a annoncé la reconnaissance du service attendu de l’acte de thrombectomie. Cette reconnaissance a été suivie de la création dans la classification commune des actes médicaux, la CCAM, d’un acte Thrombectomie par la CNAMTS en juillet 2017.
Le déploiement de cette activité s’inscrit également dans le calendrier de la réforme du régime des autorisations d’activités de soins, et de celui du troisième cycle des études médicales.
Il repose aussi sur la télémédecine concernant les AVC, ou téléAVC, qui est l’un des éléments clés du parcours de soins. Plus de 30 projets de téléAVC sont inscrits dans les projets régionaux de santé, les PRS.
À ce jour, une montée en charge progressive de l’activité est observée, notamment par un rattrapage dans les territoires sous-dotés en UNV et le travail se poursuit, avec l’ensemble des acteurs et avec un objectif fixé d’égal accès aux soins sur l’ensemble du territoire.
M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin.
Mme Maryvonne Blondin. Je vous remercie de ces précisions, madame la secrétaire d’État.
Je voudrais ajouter qu’un dispositif expérimental de l’Union européenne – dénommé Spices – sera justement développé dans le pays évoqué tout à l’heure, le Centre-Ouest-Bretagne.
Il s’agit d’un outil de prévention des maladies cardio-vasculaires et cérébro-vasculaires qui permet d’impliquer tous les acteurs de la communauté médicale, mais aussi tous les acteurs du territoire, autour de la question d’un enseignement le plus précoce possible – par exemple auprès des jeunes à l’école – des symptômes de l’AVC.
Autre remarque, il faut travailler à une recherche médicale centrée sur la femme. Alors qu’il existe une spécificité féminine très forte, les recherches portent sur l’être humain et, en général, sur l’homme. Or les femmes, du fait notamment des traitements hormonaux ou des grossesses, présentent une fragilité particulièrement grande des vaisseaux. La recherche doit le prendre en compte.
désertification médicale
M. le président. La parole est à Mme Catherine Troendlé, auteur de la question n° 052, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Catherine Troendlé. Je souhaite attirer votre attention, madame la secrétaire d’État, sur la problématique des déserts médicaux.
Le Gouvernement, qui a présenté le vendredi 13 octobre 2017 son plan de lutte contre les inégalités d’accès aux soins, n’envisage pas de mesures coercitives afin d’inciter fortement les médecins à s’installer dans les zones déficitaires. Il ne prévoit ni d’augmenter le numerus clausus des étudiants en médecine ni même de le supprimer.
Or les pouvoirs publics vont être confrontés aux défis liés à la couverture médicale de l’ensemble du territoire, plus particulièrement dans les zones rurales et urbaines précarisées.
Ce phénomène de désertification médicale est sans nul doute le résultat d’une conjonction de divers facteurs : un vieillissement des praticiens en activité, un recul des vocations de médecin généraliste, mais également un moindre attrait de l’exercice libéral.
Ces réalités aboutissent à des situations extrêmement difficiles à gérer, telles des fermetures définitives de cabinets médicaux ou encore de maisons de santé « coquilles vides », entravant l’accès aux soins de nombreuses populations.
Je voudrais citer pour exemple la ville de Huningue, dans le Haut-Rhin, comptant 7 000 habitants. Elle se voit privée de médecin généraliste depuis le 1er avril dernier, alors que, dès 2011, l’équipe municipale avait entrepris la création d’un pôle médical au cœur même de la commune, afin de pérenniser la présence des médecins généralistes.
La municipalité s’est toujours montrée très attentive à l’ensemble des requêtes de ces professionnels de santé, tant en matière d’aménagement des locaux – des locaux fabuleux – que sur le calcul équitable des loyers et charges. Mais rien n’y a fait !
La situation est aujourd'hui inacceptable pour les élus locaux !
En réaction, les deux pharmaciens de Huningue ont lancé une pétition afin d’alerter les pouvoirs publics sur la pénurie de médecins. Cette démarche, qui a recueilli en peu de temps 1 150 signatures, s’articule autour de deux idées fortes : une régionalisation des diplômes et une réflexion en vue d’une modification législative qui porterait sur la libre installation des médecins – des propositions qui pourraient figurer dans une réelle et ambitieuse réforme !
Partageant pleinement les légitimes inquiétudes exprimées tant par les patients que par les élus locaux sur ce sujet, partant du constat que toutes les mesures incitatives mises en place jusqu’à présent n’ont jamais atteint leurs objectifs, je souhaite connaître, madame la secrétaire d’État, les mesures que vous souhaitez prendre afin de répondre à cette problématique de désertification médicale, qui affecte désormais tous les territoires.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de la ministre des solidarités et de la santé, madame la sénatrice Troendlé.
Comme vous l’avez souligné, l’accès aux soins est un enjeu majeur pour nos concitoyens. Mais pour y faire face, on ne peut se contenter d’une réponse unique qui serait « la » solution partout, dans tous les territoires.
La réponse ne passe pas uniquement par la présence d’un médecin dans chaque village.
Tout l’objectif du plan qui a été présenté par le Premier ministre et par Mme Agnès Buzyn est précisément d’ouvrir le champ des possibles en matière d’organisation, afin que les acteurs de terrain puissent mettre en œuvre les solutions les plus adaptées à leur situation.
Mme la ministre des solidarités et de la santé ne croit effectivement pas en la coercition ou au conventionnement sélectif. Cette méthode n’a pas démontré sa pertinence dans tous les pays qui l’ont essayée, car il y a toujours des moyens de contourner l’obligation.
En outre, il semble essentiel de construire les réponses avec les professionnels, et non contre eux. Ces derniers sont prêts à prendre leur part de responsabilité, dès lors que nous leur facilitons la tâche en levant les verrous réglementaires.
Aussi, ce plan est pragmatique et présente un panel de mesures destinées aux professionnels de santé et aux acteurs de terrain.
Il s’inscrit autour de quatre objectifs importants : redonner du temps médical au soignant, en facilitant les remplacements, le cumul entre emploi et retraite ou les exercices partagés entre ville et hôpital ; mettre en place la révolution numérique, en généralisant la télémédecine dès 2018 et en équipant toutes les zones sous-denses et les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, d’ici à 2020 ; coordonner les professionnels de santé entre eux, en doublant les maisons et centres de santé d’ici à cinq ans, notamment grâce au 400 millions d'euros d’aide à l’investissement issus du Grand Plan d’investissement ; enfin, mettre en place une nouvelle méthode, fondée sur la confiance et le dialogue au niveau de chaque territoire.
Je souhaite donner à l’ensemble des acteurs tous les moyens leur permettant d’organiser ou de réorganiser les soins sur l’ensemble de nos territoires.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 viendra compléter l’annonce de plan, en particulier sur les aspects financiers et réglementaires.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Troendlé.
Mme Catherine Troendlé. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, des précisions que vous m’apportez. Je voudrais moi-même en formuler quelques-unes…
À propos des maisons de santé, j’ai parlé tout à l’heure de coquilles vides.
Les élus locaux sont prêts à mettre en œuvre de tels dispositifs, mais la principale difficulté – je constate sur ce point un infléchissement du Gouvernement, qui semble avoir compris le problème, mais doit réellement en tenir compte –, c’est que ces projets de maison de santé sont impossibles à mettre en œuvre sans une véritable volonté des professionnels de santé.
S’agissant de la solution de la télémédecine, que vous avez évoquée, je vous mets tout de même en garde : cette solution ne peut être l’alpha et l’oméga des réponses apportées à la problématique.
Je pense tout d’abord que nous allons vers une déshumanisation des soins, mais il s’agit là d’un jugement tout à fait personnel.
Par ailleurs, ces consultations de télémédecine nécessitent la réalisation de plateaux techniques très onéreux et, c’est une évidence, la présence de médecins pour vérifier tous les éléments transitant par ces plateaux.
Enfin, et c’est la problématique principale, évoquée voilà quelques instants, il faut des engagements budgétaires importants ! En particulier, ces plateformes de télémédecine exigent un maillage très fin en matière de réseau à haut débit. Je souhaite que le Gouvernement agisse en ce sens, car, même dans une région bien dotée comme la mienne, des zones grises ou blanches demeurent. Ce maillage est un préalable nécessaire à la mise en place d’une télémédecine efficace !
généralisation de l'autorisation de la procréation médicale assistée en france
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, auteur de la question n° 053, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
M. Daniel Chasseing. Ma question porte sur l’amélioration de la procréation médicalement assistée, la PMA.
Pour toutes sortes de raisons sociologiques, un nombre croissant de femmes, aujourd’hui, retardent l’âge de la maternité. Or, après 35 ans, il est scientifiquement démontré que la fertilité baisse. Le nombre d’ovocytes que peut produire une femme diminue progressivement, ce qui réduit ses chances lors de démarches de PMA, singulièrement pour ce qui concerne la congélation d’ovocytes.
En France, celle-ci ne peut se faire qu’à trois conditions : en cas de traitement médical – notamment une chimiothérapie – ; en cas de don d’ovocytes ; en cas de traitement de fécondation in vitro. Elle n’est pas autorisée dans le cadre d’une démarche d’autoconservation.
En 2016, face à l’intransigeance de la législation française sur la PMA, des praticiens ont pris position publiquement. Le professeur René Frydman, notamment, a cosigné un manifeste avec plus de 130 de ses confrères. Ils y affirment avoir aidé et accompagné des couples et des femmes célibataires dans leur projet d’enfant, dont la réalisation n’était pas possible en France. Ces mêmes professionnels se sont récemment émus de l’absence de positionnement favorable à l’autoconservation ovocytaire.
Ainsi, de nombreuses Françaises vont bénéficier d’un diagnostic génétique embryonnaire ou d’une autoconservation ovocytaire à l’étranger, notamment en Espagne : en 2016, plus de 200 Françaises ont consulté dans une clinique de Barcelone. Mais elles se rendent aussi en Belgique, en Italie, en République tchèque, au Danemark ou en Grèce, voire aux États-Unis ou au Canada – 6 000 d’entre elles, semble-t-il.
Certaines techniques de PMA sont effectivement autorisées dans plusieurs pays, et non en France. De ce fait, elles ne sont pas accessibles aux patientes les moins fortunées, même si la caisse primaire d’assurance maladie, la CPAM, participe au financement à l’étranger.
En conséquence, il paraîtrait logique de permettre à toutes les femmes d’accéder aux évolutions de la PMA, en particulier pour la conservation de leurs ovocytes, ainsi que pour les diagnostics génétiques embryonnaires.
Parallèlement, il faudrait prévoir un encadrement du dispositif et en confier la gestion, sous certaines conditions à déterminer par les organismes représentatifs, à des établissements de santé privés ou publics, contrôlés par les pouvoirs publics.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de bien vouloir me donner votre avis, et par là même celui du Gouvernement, sur cette suggestion.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. L’extension de l’assistance médicale à la procréation aux femmes seules et aux couples de femmes relève de la loi. Elle mérite un débat apaisé.
À l’heure actuelle, la PMA répond aux problèmes d’infertilité des couples hétérosexuels. Or les demandes d’accès à la PMA ont désormais vocation à répondre à d’autres problèmes.
L’homoparentalité et la monoparentalité issues de cette technique sont, dans notre pays, une réalité. Chaque année – des chiffres ont déjà été cités –, 2 000 à 3 000 femmes ont légalement recours à la PMA dans des pays limitrophes.
L’opinion publique évolue, puisque 61 % des Français sont favorables au recours à cette technique par les couples de femmes, alors qu’ils n’étaient que 55 % en 2014.
Le Comité consultatif national d’éthique, le CCNE, a rendu un avis favorable à cette extension, le 15 juin dernier, en demandant de définir des « conditions d’accès et de faisabilité ». Il s’agissait précisément de l’accès à l’insémination artificielle avec donneur aux femmes seules et aux couples de femmes.
L’avis va vers plus d’autonomie pour les femmes, conforté par l’absence de violence engendrée par cette technique et par la relation à l’enfant, satisfaisante, dans ces nouvelles structures familiales.
Le CCNE s’inquiète d’un maintien du statu quo, qui stigmatiserait ces formes familiales.
Cependant, il recommande des conditions d’accès et de faisabilité pour les femmes seules, plus vulnérables, ainsi qu’une gratuité garantie du don de gamètes.
Vous le savez, l’actuelle loi de bioéthique du 7 juillet 2011 sera révisée l’an prochain. Conformément aux dispositions prévues, cette révision sera précédée de la tenue d’états généraux, sur l’initiative du CCNE.
Le sujet de l’extension de la PMA pourra être débattu, au premier semestre 2018, lors de ces états généraux. Ce n’est qu’ensuite que sera élaboré le projet de loi de bioéthique. Il est donc trop tôt pour connaître les dispositions qui seront contenues dans ce projet de loi.