Mme la présidente. Monsieur Grand, l'amendement n° 4 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Grand. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 4 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2
Mme la présidente. L'amendement n° 10 rectifié bis, présenté par MM. Grand, Masclet, Danesi et Joyandet, Mme Garriaud-Maylam, MM. Fontaine et Lefèvre, Mme Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Bonhomme, Chasseing, Milon, Reichardt, Legendre, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, M. Charon, Mme de Rose, MM. Revet, Chaize et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Pellevat et Mme Gruny, est ainsi libellé :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 62-1 du code de procédure pénale est complété par les mots : « ou de la préfecture de leur département ».
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. L’article 62-1 du code de procédure pénale autorise les officiers et agents de police judiciaire et les fonctionnaires et agents chargés de certaines fonctions de police judiciaire concourant à une procédure à déclarer comme domicile l’adresse du siège du service dont ils dépendent.
Comme le souligne l’étude d’impact, la localisation est facilitée pour les militaires. Or cette possibilité est rendue inopérante par le fait que les familles sont logées sur le même site que l’unité de rattachement.
Il est donc proposé de compléter cet article par la faculté de domiciliation à l’adresse de la préfecture de département.
Cet amendement vise à protéger nos forces de sécurité – principalement les militaires – dans le cadre d’une procédure.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Grosdidier, rapporteur. L’agression dans une caserne est tout de même moins aisée que dans les appartements diffus où sont logés la plupart des policiers.
Par ailleurs, si tant est que la domiciliation à la préfecture soit possible – il y a des objections juridiques et techniques fortes, notamment le risque de confusion entre l’autorité administrative et l’autorité judiciaire –, l’appartenance du gendarme à telle ou telle brigade n’est pas difficile à établir.
Les dispositions actuelles sont suffisamment protectrices. L’adoption de cet amendement poserait certaines difficultés, tout comme celle de l’amendement n° 13 rectifié bis, que vous vous apprêtez à défendre, mon cher collègue.
Pour ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Roux, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
L’article 62-1 du code de procédure pénale prévoit déjà la domiciliation au siège du service dont dépendent les agents, ce qui paraît suffisant pour garantir la protection de ceux-ci, y compris celle des gendarmes résidant habituellement sur le lieu de leur service.
De plus, la remise des plis qui sont adressés à ces agents peut difficilement dépendre d’un renvoi, diligent ou pas, par les services préfectoraux.
Enfin, la domiciliation à la préfecture du département de personnels pris en leur qualité d’officiers ou d’agents de police judiciaire serait susceptible d’entraîner une confusion entre les rôles respectifs de l’autorité administrative et de l’autorité judiciaire.
Le Gouvernement souhaite conserver la rédaction actuelle de l’article visé et vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Grand, l'amendement n° 10 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Grand. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 10 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 13 rectifié bis, présenté par MM. Grand, Masclet, Danesi et Joyandet, Mme Garriaud-Maylam, MM. Fontaine et Lefèvre, Mme Micouleau, MM. J.P. Fournier et Vasselle, Mmes Deromedi et Cayeux, MM. Huré, Bonhomme, Savary, Chasseing, Milon, Reichardt, Rapin, Legendre, Laufoaulu, Doligé, del Picchia et G. Bailly, Mme Duchêne, MM. Karoutchi et Charon, Mme de Rose, MM. Revet, Chaize et Laménie, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Pellevat et Mme Gruny, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 322-2 du code de la route, il est inséré un article L. 322-… ainsi rédigé :
« Art. L. 322-… – Pour la délivrance du certificat d’immatriculation de leurs véhicules personnels, les personnels visés aux articles 16 à 29 du code de procédure pénale sont autorisés à déclarer comme domicile l’adresse du siège du service dont ils dépendent. »
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. L’article 62-1 du code de procédure pénale autorise les officiers et agents de police judiciaire et les fonctionnaires et agents chargés de certaines fonctions de police judiciaire concourant à une procédure à déclarer comme domicile l’adresse du siège du service dont ils dépendent.
Il convient également de protéger les forces de sécurité en permettant l’utilisation de leur adresse professionnelle pour l’immatriculation de leurs véhicules personnels.
En effet, l’accès au système d'immatriculation des véhicules, ou SIV, est autorisé à de nombreux professionnels de l’automobile – garagistes, concessionnaires… L’identité et l’adresse personnelle d’un policier ou d’un gendarme pourraient ainsi être dévoilées à une personne ayant repéré la plaque d’immatriculation de son véhicule personnel et ayant des relations avec un garagiste peu scrupuleux.
Nous proposons que les éventuelles contraventions concernant ces véhicules soient reçues par le service dont ces agents dépendent, lequel se chargera de la transmission au contrevenant.
Il s’agit, là encore, d’une mesure de protection très attendue par nos forces de l'ordre.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Grosdidier, rapporteur. L’accès au système d’immatriculation des véhicules est extrêmement restreint et garanti par une traçabilité totale. Nous avons déjà débattu de cette question au sein de cette assemblée quand nous avons défendu l’accès des polices municipales au fichier minéralogique.
La consultation du SIV ne peut entraîner aucun abus : tout agent public – y compris un membre de la direction départementale de la sécurité publique ou un préfet – qui utilise ce fichier peut être amené à justifier des raisons qui l’ont conduit à le consulter.
Par ailleurs, les garagistes y ont uniquement accès lorsqu’ils sont mandatés par leurs clients pour procéder à l’immatriculation.
Enfin, que se passerait-il si arrivaient dans les préfectures toutes les contraventions non seulement des fonctionnaires couverts par l’anonymisation, mais aussi de leurs conjoints ou de leurs enfants qui auraient utilisé un véhicule immatriculé au nom du policier ou du gendarme concerné ? Je vous laisse imaginer les difficultés pour gérer ce stock de contraventions, qu’il faudra adresser au titulaire de la carte grise dans les délais lui permettant de bénéficier de l’amende minorée… (Sourires.)
Pour ces raisons, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Roux, ministre. Le Gouvernement partage totalement la première partie de la démonstration de M. le rapporteur, même s’il est aussi sensible à la seconde. (Sourires.)
C'est la raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Grand, l'amendement n° 13 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Grand. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 13 rectifié bis est retiré.
Article 3
I. – L’article L. 212-1 du code des relations entre le public et l’administration est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les décisions fondées sur des motifs en lien avec la prévention d’actes de terrorisme sont prises dans des conditions qui préservent l’anonymat de leur signataire. Seule une ampliation de cette décision peut être notifiée à la personne concernée ou communiquée à des tiers, l’original signé, qui seul fait apparaître les nom, prénom et qualité du signataire, étant conservé par l’administration. »
II. – La seconde phrase de l’article L. 5 du code de justice administrative est complétée par les mots : « , du secret de la défense nationale et de la protection de la sécurité des personnes ».
III. – Après le chapitre III bis du titre VII du livre VII du même code, il est inséré un chapitre III ter ainsi rédigé :
« Chapitre III ter
« Le contentieux des décisions administratives fondées sur des motifs en lien avec la prévention d’actes de terrorisme
« Art. L. 773-9. – Les exigences de la contradiction mentionnées à l’article L. 5 sont adaptées à celles de la protection de la sécurité des auteurs des décisions mentionnées au second alinéa de l’article L. 212-1 du code des relations entre le public et l’administration.
« Lorsque dans le cadre d’un recours contre l’une de ces décisions, le moyen tiré de la méconnaissance des formalités prescrites par le même article L. 212-1 ou de l’incompétence de l’auteur de l’acte est invoqué par le requérant ou si le juge entend relever d’office ce dernier moyen, l’original de la décision ainsi que la justification de la compétence du signataire sont communiqués par l’administration à la juridiction qui statue sans soumettre les éléments qui lui ont été communiqués au débat contradictoire ni indiquer l’identité du signataire dans sa décision. » – (Adopté.)
Chapitre III
Dispositions diverses
Article 4
Avant le dernier alinéa de l’article L. 114-2 du code de la sécurité intérieure, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque le résultat d’une enquête réalisée en application du deuxième alinéa du présent article fait apparaître, le cas échéant après l’exercice des voies de recours devant le juge administratif dans les conditions fixées au neuvième alinéa, que le comportement du salarié concerné est incompatible avec l’exercice des missions pour lesquelles il a été recruté ou affecté, l’employeur peut engager à son encontre une procédure de licenciement dès lors qu’il n’est pas en mesure de lui proposer un emploi autre que ceux mentionnés au premier alinéa et correspondant à ses qualifications. Cette incompatibilité constitue la cause réelle et sérieuse du licenciement qui est prononcé dans les conditions prévues par les dispositions du code du travail relatives à la rupture du contrat de travail pour motif personnel.
« L’employeur peut décider, à titre conservatoire et pendant la durée strictement nécessaire à la mise en œuvre des suites qu’il entend donner au résultat de l’enquête qui lui est communiqué par l’autorité administrative, de retirer le salarié de son emploi, avec maintien du salaire.
« Le salarié peut contester, devant le juge administratif, l’avis de l’autorité administrative dans un délai de quinze jours à compter de sa notification et, de même que l’autorité administrative, interjeter appel, puis se pourvoir en cassation, dans le même délai. Les juridictions saisies au fond statuent dans un délai de deux mois. La procédure de licenciement ne peut être engagée tant que la décision juridictionnelle n’est pas devenue définitive.
« Le présent article est applicable aux salariés des employeurs de droit privé, ainsi qu’au personnel des personnes publiques employé dans les conditions du droit privé ou régi par un statut particulier, recrutés ou affectés sur les emplois mentionnés au premier alinéa. » – (Adopté.)
Article 4 bis (nouveau)
L’article L. 132-10-1 du même code est ainsi modifié :
1° Le 4° du I est complété par une phrase ainsi rédigée :
« À cet effet, ils peuvent se voir transmettre par ces mêmes juridictions et ce même service toute information à caractère personnel liée au comportement de ces personnes en détention et aux modalités d’exécution de leur peine qu’ils jugent utiles au bon déroulement du suivi et du contrôle de celles de ces personnes dont le comportement est susceptible de constituer une menace pour la sécurité et l’ordre publics. » ;
2° Le premier alinéa du II est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toute personne destinataire d’une telle information est tenue au secret professionnel, dans les conditions et sous les peines prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal. » – (Adopté.)
Article 5
À l’article L. 225-5 du même code, après les mots : « poursuites judiciaires », sont insérés les mots : « , fondées sur des faits qualifiés d’actes de terrorisme par les articles 421-1 à 421-6 du code pénal et accompagnées de mesures restrictives ou privatives de liberté, ». – (Adopté.)
Article 6
L’article L. 613-12 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 613-12. – Les agents exerçant les activités mentionnées au 3° de l’article L. 611-1 ne peuvent être autorisés à être armés que lorsqu’ils assurent la protection d’une personne exposée à des risques exceptionnels d’atteinte à sa vie.
« Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État. Ce décret précise les conditions dans lesquelles est délivrée l’autorisation d’être armé, celles dans lesquelles est vérifiée l’aptitude professionnelle des agents concernés, les catégories et types d’armes susceptibles d’être autorisés, les conditions de leur acquisition et de leur conservation et celles dans lesquelles les armes sont portées pendant le service et remisées en dehors du service. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 26 est présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 36 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collombat, Amiel, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Évelyne Rivollier, pour présenter l’amendement n° 26.
Mme Évelyne Rivollier. Cet amendement vise à supprimer l’article 6, qui permet un encadrement législatif du port d’armes concernant certains agents de sécurité privée.
Cette disposition est inquiétante, car elle participe d’une dynamique rampante depuis quelques années, celle de la privatisation de la sécurité intérieure.
Le port et l’usage d’une arme doivent, selon nous, rester de la responsabilité d’un agent public formé à cet effet, garant de l’intégrité des personnes, représentant de la force publique et responsable devant la loi en tant que tel.
Nous ne souhaitons pas que des compagnies privées, donc des sociétés à but lucratif, à terme, complètent les dispositifs publics en matière de lutte contre la délinquance et de prévention des risques, notamment antiterroristes.
D’autre part, les magistrats nous alertent sur le fait qu’adopter cette disposition reviendrait à mettre le doigt dans l’engrenage dangereux de la généralisation de l’armement des agents de sécurité privée, lequel pourrait aller jusqu’à celui des agents de surveillance, absolument pas formés pour cela.
Or, nous le savons tous dans cet hémicycle, la multiplication du nombre d’armes à feu au sein d’un territoire ne fait pas bon ménage avec le principe de sécurité.
Nous soulignons une nouvelle fois que le manque de moyens ne peut justifier que l’État délègue son pouvoir régalien à des entreprises privées, dont la logique, et c’est leur droit, n’est pas la recherche du bien commun et de l’intérêt collectif.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Noël Guérini, pour présenter l’amendement n° 36 rectifié.
M. Jean-Noël Guérini. Comme le précise l'étude d’impact, l’article 6 vise à « rendre juridiquement possible l’armement d’agents privés de protection de l’intégrité physique des personnes dans les cas où cet armement est strictement nécessaire pour assurer la protection d’une personne exposée à des risques exceptionnels d’atteinte à sa vie ».
Il est certain que la protection de l’intégrité physique de personnes exposées à des risques exceptionnels d’atteinte à la vie constitue une charge importante pour les forces de l’ordre qui les éloigne de leurs missions traditionnelles de sécurité publique.
Les auteurs de cet amendement considèrent cependant que des pistes alternatives devraient être explorées, dès lors qu’une telle disposition se heurte à la conception française du « monopole de la violence physique légitime » de l’État, matérialisée par les articles II et XII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
Par ailleurs, la jurisprudence du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État encadre très strictement les possibilités de déléguer des prérogatives de police.
Enfin, fidèle à cette conception, le législateur lui-même avait veillé à exclure la possibilité d’armer les personnels des entreprises exerçant une activité de protection de personnes – article 10 de loi du 12 juillet 1983 –, là où il l’autorisait pour les activités de gardiennage ou de transport de fonds.
Pour ces raisons, nous proposons de supprimer l’article 6.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Grosdidier, rapporteur. La commission est défavorable à ces amendements identiques.
Comment imaginer, au moment où il convient de décharger nos forces de sécurité de charges indues, que l’on affecte des agents de la police nationale ou de la gendarmerie à la protection de personnes privées – de grands patrons d’entreprises sensibles, par exemple.
Une surveillance de vingt-quatre heures sur vingt-quatre mobilise quatre policiers. Imaginez quels effectifs il faudrait dégager, aux frais du contribuable, pour assurer la protection de personnes privées qui ont les moyens de la financer !
En l’espèce, il s’agit simplement de permettre à des personnes qui pourraient disposer d’un port d’arme, dans la mesure où l’État reconnaît qu’elles sont objectivement menacées, de déléguer ce port d’arme à un tiers parfaitement qualifié et entraîné.
On est aujourd’hui dans un système très hypocrite, dans lequel les gardes du corps privés ne disposent pas d’un port d’arme à titre professionnel, mais se voient confiés à titre personnel des ports d’arme qu’ils utilisent à des fins professionnelles, ce que la loi ne prévoit pas. Cela se fait sans aucun contrôle.
Il est simplement proposé de retenir le dispositif qui est appliqué aux convoyeurs de fonds. Il existe en effet trois filières de sécurité privée : celles des convoyeurs de fonds, des gardes du corps, qui gardent les personnes, et des vigiles, qui gardent les lieux.
Vous ne demandez pas que la force publique assure le convoyage de fonds ! Pour ce faire, une filière est d’ores et déjà en place, avec des personnes formées sous l’égide du CNAPS, le Conseil national des activités privées de sécurité, et qui se voient ou non renouveler leur carte professionnelle. C’est un système qui fonctionne très bien ; il n’y a jamais eu de bavure.
Il convient donc de dupliquer cette organisation rigoureuse, contrôlée par l’État et le CNAPS, pour protéger les personnes et les lieux. C’est l’État qui décide d’une telle protection, à tel point d’ailleurs qu’il autorise déjà les entreprises à acheter des armes. Pour autant, les salariés ne sont autorisés à les utiliser que dans le cadre professionnel.
Je comprends que vous bloquiez intellectuellement, mes chers collègues, s’agissant de l’armement de la sécurité privée. Celui-ci existe aujourd'hui, et il convient de l’organiser et de le contrôler en assurant notamment une formation. Je le rappelle, c’est toujours l’État qui décide quelle personne ou quel lieu peuvent être protégés par des gardes armés.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Roux, ministre. Madame la sénatrice, monsieur le sénateur, dans la mesure où ce débat nous accompagnera quelques jours, voire quelques mois ou quelques années, vous me permettrez de vous apporter une réponse extrêmement précise.
L’activité de protection de l’intégrité physique des personnes est déjà une activité privée de sécurité réglementée par le code de la sécurité intérieure. Il s’agit en l’occurrence de prévoir une modalité particulière à l’exercice de cette activité, en rendant l’armement possible dans des cas très rares où une personne est exposée à des risques exceptionnels d’atteinte à sa vie et où sa protection armée est nécessaire.
Il ne s’agit en aucune façon de déléguer des prérogatives de police de manière générale et non encadrée. Ni le Conseil constitutionnel ni le Conseil d’État n’ont interdit à des acteurs privés de se voir confier des missions concourant à la sécurité des personnes et des biens, dès lors que les conditions d’exercice de ces missions sont encadrées par la loi. C’est l’objet du livre VI du code de la sécurité intérieure.
Les garanties relatives à l’exercice de ces activités n’ont d’ailleurs cessé de croître ces dernières années : création du CNAPS en 2012 en tant qu’organe de contrôle et encadrement des organismes de formation à la sécurité privée en 2015, avec des obligations de formation continue.
Je tiens à le souligner, la protection policière, malgré son coût financier et humain particulièrement lourd, n’a pas vocation à disparaître. Pour autant, dans un contexte particulier où l’évolution de la menace conduit les forces de l’ordre à protéger un nombre croissant de personnalités de la société civile, il paraît indispensable que nous autorisions d’autres régimes de protection armée.
Par ailleurs, le droit permet aujourd'hui à des personnes menacées d’un risque exceptionnel de bénéficier elles-mêmes du droit de porter une arme pour se défendre. Mais nous pensons que ce régime n’est pas entièrement satisfaisant. Porter une arme, c’est un métier : c’est tout le sens de l’article 6 du présent texte.
Depuis de nombreuses années, un nombre limité d’autorisations de port d’arme a été délivré à des accompagnateurs de personnalité dans des conditions juridiques insatisfaisantes qu’il faut aujourd'hui clarifier. Tel est l’objet du dispositif proposé par le Gouvernement : l’exercice armé de protection physique des personnes donnera lieu à la délivrance d’une nouvelle carte professionnelle, créée par voie réglementaire. L’armement sera limité et l’usage de l’arme ne pourra se faire que dans le cadre de la légitime défense.
L’analyse du risque exceptionnel d’atteinte à la vie relèvera de la compétence du ministre de l’intérieur. L’autorisation du port d’armes par le ministre de l’intérieur concernera la protection d’une personnalité identifiée. L’agent privé ne pourra porter l’arme que pour l’exercice de cette mission.
De nombreuses garanties ont par ailleurs été prévues quant à l’aptitude professionnelle des agents, qui devront suivre des programmes de formation initiale et continue, notamment concernant le maniement des armes. De plus, l’administration exigera la production d’un certificat médical et s’assurera que le comportement du demandeur n’est pas incompatible avec l’usage d’une arme.
Je souhaitais, mesdames, messieurs les sénateurs, vous apporter ces précisions, le débat étant loin d’être mineur aux yeux du Gouvernement. C’est la raison pour laquelle tous les principes nécessaires à l’encadrement de cette activité ont été mis en œuvre.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements identiques.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 26 et 36 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6.
(L'article 6 est adopté.)
Article additionnel après l'article 6
Mme la présidente. L'amendement n° 41 rectifié, présenté par M. Grosdidier, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre VI du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° Après le 1° de l’article L. 611-1, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis À faire assurer par des agents armés l’activité mentionnée au 1° lorsque celle-ci est exercée dans des circonstances exposant ces agents, ou les personnes se trouvant dans les lieux surveillés, à un risque exceptionnel d’atteinte à leur vie ; »
2° Après le premier alinéa de l’article L. 612-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’exercice de l’activité mentionnée au 1° bis de l’article L. 611-1 est exclusif de toute autre activité. » ;
3° Après l’article L. 612-9, il est inséré un article L. 612-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 612-9-1. – L’autorisation prévue à l’article L. 612-9 ne peut être délivrée en vue de l’exercice de l’activité mentionnée au 1° bis de l’article L. 611-1 à un demandeur qui ne justifie pas de l’emploi d’agents disposant d’une aptitude professionnelle spécifique ainsi que d’une organisation et d’équipements propres à garantir la sécurité du port et de la conservation des armes.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. » ;
4° Après la section 1 du chapitre III, est insérée une section 1° bis ainsi rédigée :
« Section 1° bis : Activités de surveillance armée
« Art. L. 613-7-1. – Toute mission exercée dans les conditions prévues au 1° bis de l’article L. 611-1, dans un lieu déterminé et pour une durée donnée, par une personne titulaire de l’autorisation mentionnée à l’article L. 612-9-1, nommément désignée, est soumise à l’autorisation préalable du représentant de l’État dans le département.
« Art. L. 613-7-2. – Sans préjudice des dispositions des articles L. 612-7 et L. 612-20, nul ne peut exercer l’activité mentionnée au 1° bis de l’article L. 611-1, comme employé ou comme dirigeant, s’il est interdit d’acquisition ou de détention d’armes en application des articles L. 312-3, L. 312-3-1, L. 312-10 et L. 312-13.
« Art. L. 613-7-3. – Les articles L. 613-1, L. 613-2, L. 613-3 et L. 613-4 sont également applicables aux personnes exerçant l’activité mentionnée au 1° bis de l’article L. 611-1. »
5° Après le 2° de l'article L. 617-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 2° bis Le fait d'exercer l'activité mentionnée au 1° bis de l'article L. 611-1 et d'avoir une autre activité ; ».
La parole est à M. le rapporteur.