M. Gilbert Barbier. Compte tenu de l’adoption de l’amendement n° 168 rectifié, je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 269 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 9 rectifié bis, présenté par MM. Daudigny, Labazée et Guillaume, Mmes Bricq, Génisson et Riocreux, MM. Godefroy, Durain et Tourenne, Mmes Schillinger, Émery-Dumas, Yonnet et Féret, MM. Vergoz et Caffet, Mmes Meunier et Campion, M. Jeansannetas et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur les mesures prises ou à prendre pour assurer la pérennité du modèle français de la répartition pharmaceutique, notamment concernant les conditions de rémunérations des grossistes répartiteurs ou la fiscalité applicable à ces derniers.
La parole est à Mme Evelyne Yonnet.
Mme Evelyne Yonnet. Interrogée voilà plus d’un an sur la situation économique complexe des entreprises de la répartition, madame la ministre, vous avez rappelé votre attachement « à la préservation du modèle de distribution en gros des médicaments » et avez annoncé des discussions entre le ministère et les représentants de la répartition pharmaceutique pour « étudier dans quelles mesures certaines propositions d’évolution de la rémunération des grossistes-répartiteurs pourraient être envisagées ».
Cette profession, rappelons-le, est un acteur clef de la distribution du médicament en France, en desservant plus de 22 000 officines et en distribuant quotidiennement 6,3 millions de boîtes. Cependant, à ce jour, aucune mesure concrète n’a été prise et les tensions économiques des entreprises de répartition, qui assurent pourtant l’égalité d’accès de tous les Français aux médicaments, ont continué à s’aggraver.
C’est pourquoi il est urgent d’évaluer les mesures concrètes qui pourraient être formulées pour assurer aux entreprises de répartition une rémunération en adéquation avec les missions qu’elles réalisent.
C’est non sans humour, madame la ministre, mes chers collègues, que nous demandons la rédaction d’un rapport évaluant notamment les effets d’une modification du régime de taxation applicable aux médicaments génériques.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mme la ministre ayant répondu par anticipation, le retrait de cet amendement me semble opportun : nul besoin de rapport, puisqu’un groupe de travail a été créé pour revoir le modèle économique des grossistes de la répartition. C’est nécessaire, compte tenu des cris d’alerte qui ont été lancés dans cette enceinte même.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement demande également le retrait de cet amendement, pour les mêmes raisons. Je ne rappelle pas les explications que j’ai apportées précédemment, qui sont, au fond, ainsi que l’a souligné le rapporteur général, une réponse par anticipation à une légitime préoccupation. Les auteurs de cet amendement ont donc satisfaction.
Mme la présidente. Madame Bricq, l'amendement n° 9 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Nicole Bricq. Lorsque nous avons déposé cet amendement, nous n’avions pas les explications de Mme la ministre. Il s’agissait d’un amendement de repli, car nous avions bien conscience que l’amendement n° 8 rectifié ter, de nature fiscale, poserait problème au Gouvernement.
Ce qui importe, monsieur le président la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, c’est que le Parlement, notamment le Sénat qui est très attaché à la pérennité de ce modèle économique en difficulté, soit informé de l’avancée des travaux du groupe de travail.
Il serait intéressant que nous soient communiqués la lettre de mission et le périmètre de cette inspection – peut-être la commission des affaires sociales les a-t-elle déjà reçus. Si la dimension fiscale n’est pas la bonne entrée, de façon directe en tout cas, elle fait tout de même partie du problème.
Par conséquent, je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 9 rectifié bis est retiré.
Article 19
I. – Est instituée une participation à la prise en charge des modes de rémunération mentionnés au 13° de l’article L. 162-5 du code de la sécurité sociale due par les organismes mentionnés au I de l’article L. 862-4 du même code. Son produit est affecté à la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés.
La participation est due par chaque organisme mentionné au premier alinéa en activité au 31 décembre de l’année au titre de laquelle elle est perçue. Elle est égale au produit d’un forfait annuel de 5 € par le nombre de bénéficiaires de la prise en charge des frais de santé prévue à l’article L. 160-1 dudit code et d’ayants droit âgés de seize ans ou plus, couverts par l’organisme, à l’exclusion des bénéficiaires de la couverture complémentaire mentionnée à l’article L. 861-1 du même code, au 31 décembre de l’année précédant celle au titre de laquelle elle est perçue et pour lesquels l’organisme a pris en charge, au cours de cette même année, au moins une fois, en tout ou partie, la participation de l’assuré due au titre d’une consultation ou d’une visite du médecin traitant au sens de l’article L. 162-5-3 du même code.
II. – La participation est recouvrée par l’organisme désigné pour le recouvrement de la taxe mentionnée à l’article L. 862-4 du code de la sécurité sociale, concomitamment au recouvrement de cette même taxe, sous réserve d’aménagements prévus, le cas échéant, par décret en Conseil d’État. Elle est recouvrée et contrôlée selon les règles, garanties et sanctions prévues pour ladite taxe.
III. – La participation mentionnée au I est due pour l’année 2017.
Mme la présidente. L'amendement n° 299, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après le 2° de l’article L. 4124-6 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Dans le cas de non-respect du tact et de la mesure dans la fixation des honoraires ou dans le cas de méconnaissance des dispositions de l’article L. 1110-3, l’amende, dont le montant ne peut excéder 10 000 € ; ».
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement vise à rétablir la sanction supprimée par la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, ou loi HPST, en cas de non-respect de la notion de tact et mesure. Si nous n’adhérons pas à cette notion, qui non seulement est subjective, mais encore constitue en quelque sorte une justification des dépassements, nous considérons néanmoins indispensable de rétablir des sanctions pour juguler la hausse des dépassements d’honoraires dans notre pays.
En effet, malgré un certain nombre de dispositions, de nombreux patients continuent de subir au quotidien des dépassements d’honoraires. Ainsi, en 2014, plus de 2,8 milliards d’euros ont été facturés aux patients au-delà des tarifs de l’assurance maladie, en progression de 6,6 % par rapport à 2012.
Avec 2,5 milliards d’euros – soit une hausse de 7,7 % –, les médecins spécialistes demeurent les principaux bénéficiaires de ces dépassements, largement devant les généralistes, qui voient, eux, leurs dépassements diminuer de 1,5 %, à 300 millions d’euros.
La mise en place du contrat d’accès aux soins, en 2013, destinée à contenir l’évolution des dépassements d’honoraires, a permis de limiter certains excès, mais n’a pas enrayé l’augmentation globale du montant des dépassements des spécialistes. Le problème majeur auquel nous nous heurtons est qu’elle a contribué à ces dépassements généralisés, puisque tous les médecins signataires d’un tel contrat sont autorisés à en pratiquer, notamment celles et ceux qui sont établis en secteur 1 et qui, jusqu’à présent, pratiquaient leur activité aux tarifs de l’assurance maladie. De nombreux radiologues et anesthésistes ont ainsi pu augmenter leurs honoraires, déjà élevés, grâce au contrat d’accès aux soins.
Il y a un risque véritable de généralisation des dépassements d’honoraires des médecins spécialistes, rendant encore plus difficile l’accès aux soins de certains patients, pas ou peu couverts par leur assurance complémentaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Il est préférable de laisser à la négociation conventionnelle le soin de déterminer avec les professionnels de santé le montant des dépassements. C’est d’ailleurs ce qui a été fait : un plafond a été fixé voilà peu, trois ans. C’est à la CNAM, si des dépassements sont constatés, de sanctionner et de verrouiller le dispositif. C’est retirer sinon toute réalité et toute crédibilité à la négociation.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Cette discussion revient régulièrement. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, car je crois à l’efficacité de la démarche conventionnelle.
Madame la sénatrice, je veux redire toute la sympathie que je porte à votre combat sur ce point-là. C’est aussi ce qui m’a amenée à lancer la négociation de l’avenant n° 8 à la convention médicale.
Les résultats sont là, sur deux terrains : les taux de dépassement baissent et le nombre d’actes pratiqués au tarif sécurité sociale opposable augmente. En d’autres termes, un plus grand nombre d’actes qu’auparavant sont pratiqués sans dépassements et le nombre de dépassements diminue alors qu’il augmentait régulièrement au cours des années précédentes. On assiste donc à un double mouvement, convergent et positif.
Madame la sénatrice, vous affirmez que les dépassements concernent un plus grand nombre d’actes. C’est vrai, puisque davantage de médecins sont autorisés à pratiquer des dépassements en secteur 2.
Un médecin qui signe un contrat d’accès aux soins – quelle que soit la dénomination de ce document aujourd'hui – ne peut pas pratiquer n’importe quel dépassement. Ce n’est pas un droit à dépasser, c’est un droit à maîtriser des dépassements qu’il pratiquait auparavant. Avant l’entrée dans le dispositif sont pris comme référence les tarifs que le praticien appliquait avant la signature. Sinon, cela aurait été un permis de dépasser de manière inconsidérée ! (Mme Annie David acquiesce.)
Par ce contrat qu’il signe, le médecin a toujours le droit de pratiquer des dépassements, mais il s’engage à les maîtriser. En contrepartie, l’assurance maladie s’engage à mieux rembourser ses patients et à lui accorder des avantages.
Les résultats sont là. Ils ne sont pas assez rapides, ils ne vont pas assez loin. Le taux moyen de dépassement en France est de 53 %. Je le précise, non pas pour vous, madame la sénatrice, mais pour tous ceux qui m’expliquent que les contrats responsables qui ont fixé une fiscalité contraignante pour des dépassements supérieurs à 125 % pénaliseraient les Français. Certes, cela pénalise certains Français – ils devraient renoncer à certains avantages –, ceux qui ont des super contrats, qui sont pris en charge à 200 %, à 300 %, voire à 400 %, dont les médecins pratiquent de super dépassements, alors que la grande majorité des Français est confrontée à des dépassements qui ne sont éventuellement pas pris en compte par la mutuelle.
Je crois à la démarche conventionnelle. Il faut sanctionner les abus – c’est prévu –, sans doute parfois avec un peu plus d’entrain ; ce n’est pas le terme qui convient…
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Avec plus de rigueur !
Mme Marisol Touraine, ministre. Oui, monsieur le rapporteur général, j’achète volontiers le terme.
La lutte contre les dépassements est un enjeu majeur. La démarche conventionnelle donne des résultats qu’il faut amplifier.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Cet amendement et cet article montrent la nécessité de trouver le juste équilibre entre la sécurité sociale – largement déficitaire, on le sait – et les organismes complémentaires – largement excédentaires, on le sait également.
Madame la ministre, cet article prouve bien que vous n’avez pas remis en cause la participation des complémentaires santé au forfait du médecin traitant, pour 150 millions d’euros.
Ce n’est pas une privatisation de la médecine ! Vous parliez hier des modèles de santé présentés à l’occasion des prochaines échéances, certains proposant une privatisation de la médecine. Il s’agit seulement de trouver un équilibre : intégrer une part de complémentaire au financement des risques ne signifie pas que l’on prône une médecine qui privatise. Pour votre part, vous avez plutôt favorisé une médecine qui tournait vers l’étatisation.
La médecine à l’acte produit peut-être trop d’actes, mais la médecine salariée n’en produit sûrement pas assez. C’est ce juste équilibre qui doit être recherché, comme doit l’être un équilibre dans le financement des parts des complémentaires par rapport aux parts prises en compte par la sécurité sociale. Ces deux modèles ne s’opposent pas : ils méritent que l’on s’y penche également pour faire en sorte de trouver le financement nécessaire au meilleur coût.
Reste qu’il ne faut pas non plus décourager les médecins qui ont un talent particulier, qui nouent une relation de confiance tout à fait singulière avec leurs patients. C’est pourquoi, dans le cadre de cette relation de confiance, nous étions opposés, et nous le sommes toujours, au tiers payant.
Vous le constatez, nous avons des arguments pour montrer que le modèle social et le modèle de santé que nous voulons faire évoluer tiennent la route.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 19.
(L'article 19 est adopté.)
Article 19 bis (nouveau)
L’article L. 912-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa du I, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les accords peuvent également prévoir la mutualisation de la couverture des risques décès, incapacité, invalidité ou inaptitude. À cette fin, dans le respect des conditions définies au II, ils peuvent organiser la sélection d’au moins deux organismes mentionnés à l’article 1er de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 précitée ou institutions mentionnées à l’article L. 370-1 du code des assurances permettant la mutualisation d’un socle commun de garanties défini par l’accord à travers des contrats de référence. Les entreprises entrant dans le champ d’application de l’accord ont l’obligation de souscrire un des contrats de référence, à l’exception de celles qui ont conclu un accord collectif antérieur de même objet. » ;
2° Au premier alinéa du II, après le mot : « recommandation », sont insérés les mots : « ou la mutualisation » ;
3° À la première phrase du III, après le mot : « recommandation », sont insérés les mots : « ou de la mutualisation ».
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, sur l'article.
M. Jean-Noël Cardoux. Cet article, introduit à l’Assemblée nationale par voie d’amendement, crée la clause de désignation dans les contrats de prévoyance. C’est la troisième tentative de la majorité présidentielle pour imposer une telle clause en quelques années.
La première tentative a eu lieu lors de la discussion de l’accord national interprofessionnel, M. Desessard s’en souvient. Le Conseil constitutionnel a censuré la disposition.
La deuxième tentative a été effectuée lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, par le biais d’une surtaxation des contrats assurantiels qui n’étaient pas couverts par une clause de désignation. Le Conseil constitutionnel a de nouveau censuré cette disposition, pourtant supposée répondre aux critères qu’il avait fixés.
Les amendements portant article additionnel adoptés par la majorité à l’Assemblée nationale correspondent à la troisième tentative pour imposer une clause de désignation. Il s’agit d’inciter les mutuelles à contractualiser avec deux structures, pour pouvoir présenter ce contrat de référence aux adhérents de certains syndicats.
La rédaction correspondrait, cette fois, aux dispositions imposées par le Conseil constitutionnel. On peut en douter.
Toujours est-il que, pour la troisième fois, nous demanderons la suppression de cette clause de désignation qui, nous le rappelons, est une violation évidente de la concurrence en matière assurantielle. Certes, les amendements adoptés par l’Assemblée nationale ne concernent que la prévoyance en matière d’entreprise, mais celle-ci recouvre à elle seule à peu près 50 % du chiffre de ces contrats d’assurance. C’est donc extrêmement significatif.
Puisque le Gouvernement persévère, nous persévérerons à notre tour et, si, par malheur, l’Assemblée nationale rétablissait de nouveau cette clause de désignation, nous saisirions sans doute de nouveau le Conseil constitutionnel. (Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, vous vous en doutez, mon propos s’inscrit dans la logique inverse.
Nous l’avons dénoncé en 2013 lors de l’adoption de l’accord national interprofessionnel, transposé dans la loi relative à la sécurisation de l’emploi, la généralisation de la complémentaire santé en entreprise entraîne un transfert de la prise en charge des prestations de la sécurité sociale vers les complémentaires santé, mais aussi une bataille des assureurs privés qui souhaitent avoir une part de ce marché juteux.
Le texte initial de la loi relative à la sécurisation de l’emploi prévoyait que des négociations entre les syndicats et le patronat devaient s’engager dans les branches professionnelles pour définir les garanties de remboursement souhaitées et choisir un ou plusieurs organismes répondant aux attentes, afin de mutualiser les coûts et d’avoir des régimes de branche plus solides. Toutefois, saisi par des assureurs au nom de la libre concurrence, le Conseil constitutionnel a retoqué la procédure.
Ainsi, aujourd’hui, dans une profession donnée, un opérateur peut démarcher les entreprises présentant les « meilleurs risques » en offrant un prix plus bas que l’organisme recommandé par la branche. Nombre de PME et de TPE choisissent l’offre la moins chère et s’en tiennent au panier minimal.
La suppression de la clause de désignation a provoqué une véritable guerre commerciale entre les divers opérateurs pour remporter les contrats santé des 600 000 entreprises non pourvues. Résultat, la plupart doivent revoir les garanties à la baisse, les précédents accords étant en moyenne nettement plus favorables, en particulier pour la prise en charge des frais d’optique, des dépassements d’honoraires de spécialistes.
D’où l’article 19 bis introduit par plusieurs amendements émanant de différents groupes lors des débats à l’Assemblée nationale, notamment le groupe de la gauche démocrate et républicaine, l’équivalent du groupe CRC.
Nous ne voterons donc pas les amendements de suppression et ne sommes pas du tout d’accord avec la position exprimée par Jean-Noël Cardoux. (Très bien ! sur les travées du groupe CRC.)
M. Jean-Noël Cardoux. C’est bon signe !
Mme Annie David. Très bon signe ! (Sourires.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 66 est présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 162 rectifié est présenté par MM. Husson, B. Fournier, Bas et Laufoaulu, Mme Gruny, MM. de Raincourt et Rapin, Mme Hummel, MM. Lefèvre et Revet, Mme Mélot, MM. Houel, Karoutchi, Laménie et Buffet, Mme Deromedi, MM. Lemoyne et Longuet, Mme Lamure et M. Gremillet.
L'amendement n° 186 rectifié bis est présenté par M. Gilles, Mme Garriaud-Maylam et MM. Genest, Frassa, Calvet, G. Bailly et Danesi.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 66.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’article 19 bis prévoit de rétablir la possibilité d’une clause de désignation en matière de contrats de prévoyance d’entreprise, afin d’assurer une meilleure mutualisation sur ces contrats et de répondre aux critères fixés par le Conseil constitutionnel. Je n’entrerai pas dans le débat de fond. Compte tenu des discussions que nous avons déjà eues, il ne paraît néanmoins pas opportun d’ouvrir de nouveau une querelle entre organismes complémentaires, au moment où la couverture complémentaire santé vient de se mettre en place, difficilement qui plus est.
Je suis pour le maintien du dispositif, tel qu’il a été voté à l’Assemblée nationale comme au Sénat. C’est la raison pour laquelle la commission des affaires sociales demande la suppression de cet article.
Mme la présidente. La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l'amendement n° 162 rectifié.
Mme Jacky Deromedi. Cet amendement est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Gilles, pour présenter l'amendement n° 186 rectifié bis.
M. Bruno Gilles. Sur la forme, je m’étonne moi aussi que le Gouvernement s’entête à vouloir instaurer un dispositif ayant été censuré à deux reprises par le Conseil constitutionnel.
Sur le fond, je suis entièrement d’accord avec ce que vient de dire M. le rapporteur général.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je ne reviendrai pas sur l’historique de cette disposition ; je ferai simplement trois observations.
Premièrement, nous parlons de contrats de prévoyance et non de couverture santé, contrairement aux projets qui avaient été précédemment présentés. Il s’agit de couvrir des risques de plus en plus fréquemment cités par les salariés : les risques d’invalidité, de maladie de longue durée ou de décès, notamment.
Deuxièmement, il s’agit d’une clause non pas de désignation, mais de co-désignation, les branches devant obligatoirement proposer au moins deux types de contrat ou d’organismes.
Troisièmement, les entreprises qui, par accord d’entreprise, ont d’ores et déjà signé avec un assureur un contrat de prévoyance, dans la mesure où ce dernier donne entière satisfaction à tous, n’auront pas l’obligation d’en changer. Il n’y a pas de clause de migration obligatoire. La clause de co-désignation est un outil supplémentaire destiné à permettre aux entreprises de s’orienter dans l’offre de contrats qui leur est présentée.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements de suppression.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. J’ai moi aussi du mal à comprendre pourquoi le Gouvernement s’entête dans sa position.
Mme Catherine Procaccia. Lobbying !
M. Alain Vasselle. M. Cardoux comme M. le rapporteur général ont très bien expliqué les raisons pour lesquelles la disposition proposée était inconstitutionnelle. Je me demande donc si le Gouvernement ne souhaite pas uniquement faire de la communication et de l’affichage sur ce sujet.
Alors qu’il a été sanctionné à deux reprises par le Conseil constitutionnel, il s’apprête à l’être une troisième fois. C’est vraiment faire perdre du temps au Parlement que de légiférer ainsi !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.
M. Jean-Noël Cardoux. Vos explications, madame la ministre, que j’ai écoutées avec attention, appellent de ma part deux observations.
Vous nous dites que les contrats de prévoyance couvriront un nombre important de salariés. Cela signifie que, selon vous, la fin justifie les moyens : on peut entraver la libre concurrence dans le domaine assurantiel pour permettre au plus grand nombre d’être couvert. Cette approche ne me semble pas tout à fait logique.
Vous dites par ailleurs que, dès lors que deux mutuelles seront en présence, deux contrats pourront être proposés. Or les deux mutuelles pourront s’entendre au préalable sur un contrat commun. Proposer deux mutuelles, c’était en effet instituer une concurrence entre deux organismes différents, mais demander aux mutuelles de s’entendre au préalable, c’est fausser durablement le jeu de la concurrence, madame la ministre.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Cet article propose un modèle de société différent et soulève à cet égard deux questions : souhaite-t-on laisser la liberté aux entreprises de s’organiser et de prendre en charge leurs collaborateurs comme elles le souhaitent ? Veut-on favoriser la négociation au niveau des entreprises plutôt qu’au niveau des branches ?
Ces contrats de prévoyance posent par ailleurs un autre problème : les risques sont répartis sur la proportion de la population présentant le moins de risques. Par conséquent, le coût sera plus cher pour les personnes âgées, notamment, qui sont plus à risques.
Ce modèle social n’est pas le bon, il n’est pas le mieux adapté. Pour ces raisons, je soutiens les amendements de suppression de l’article.
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.
M. Yves Daudigny. Le dispositif de l’article 19 bis vise à permettre la mutualisation pour les garanties de prévoyance, en l’occurrence la couverture des risques lourds – décès incapacité, invalidité ou inaptitude –, au niveau d’une branche professionnelle.
À cette fin, il prévoit que la branche puisse sélectionner, dans le cadre d’un accord collectif, au moins deux organismes parmi les institutions de prévoyance, les mutuelles et les compagnies d’assurance.
Les entreprises qui entreraient dans le champ d’application de l’accord auraient l’obligation de souscrire l’un de ces contrats de prévoyance.
Il s’agit de permettre la mutualisation en matière de prévoyance, dans le respect de la décision du 13 juin 2013 du Conseil constitutionnel sur la loi relative à la sécurisation de l’emploi.
Je rappelle que, à cette occasion, le Conseil, vérifiant la constitutionnalité de l’article L. 912-1 du code de la sécurité sociale, avait considéré qu’il n’était pas possible d’imposer à une entreprise d’être liée à un cocontractant déjà désigné par un contrat négocié au niveau de la branche. Le pluralisme qui est introduit en l’espèce me paraît répondre aux exigences constitutionnelles.
C’est selon nous un dispositif important compte tenu de la nature des risques en cause, hors risques de santé. Ces risques lourds viennent en complément de ceux pour lesquels les salariés bénéficient aujourd’hui d’une assurance aux termes de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 et de la loi relative à la sécurisation de l’emploi.
Comme cela a été dit, oui, il s’agit bien d’un choix de société : nous faisons le choix de la meilleure sécurisation possible des salariés. Nous voterons donc contre les amendements de suppression.