compte rendu intégral

Présidence de Mme Isabelle Debré

vice-présidente

Secrétaires :

M. Serge Larcher,

M. Philippe Nachbar.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Articles additionnels après l’article 17 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017
Troisième partie

Financement de la sécurité sociale pour 2017

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017
Articles additionnels après l'article 17

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2017 (projet n° 106, rapport n° 114 [tomes I à VIII], avis n° 108).

Dans la discussion des articles, nous poursuivons, au sein du chapitre III du titre Ier de la troisième partie, la discussion des amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 17.

TROISIÈME PARTIE (suite)

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2017

Titre Ier (suite)

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE

Chapitre III (suite)

Dispositions contribuant au financement de l’assurance-maladie

Troisième partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017
Article 18

Articles additionnels après l’article 17 (suite)

Mme la présidente. Je rappelle que l’amendement n° 297 rectifié bis a été présenté hier soir. La commission a émis un avis favorable, tandis que le Gouvernement a émis un avis défavorable. Les explications de vote ont eu lieu.

Toutefois, avant la levée de la séance, les auteurs de l’amendement ont indiqué qu’ils souhaitaient le rectifier.

Je suis donc saisie d’un amendement n° 297 rectifié ter, présenté par Mmes Hoarau, Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi libellé :

Après l'article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article L. 758-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « 0,04 euro » sont remplacés par les mots : « 0,404 euro ».

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. La séance d’hier s’est terminée avec beaucoup de passion, ce qui n’est pas en soi un défaut, mais je tiens à dire, au nom du groupe CRC, que si nous avons blessé nos amis d’outre-mer, nous nous en excusons, car telle n’était pas notre intention. D’ailleurs, personne ne peut accuser Paul Vergès ou Gélita Hoarau de vouloir stigmatiser les populations ultramarines.

J’en viens à notre amendement, destiné à corriger une inégalité en matière de taxe sur les alcools.

Je le répète, le premier problème qui se pose dans le cadre de la lutte contre la diffusion de l’alcool à La Réunion est celui de son prix de vente, particulièrement bas, notamment s’agissant des alcools forts.

Le caractère bon marché de ces produits est de surcroît renforcé par la taxation dérogatoire dont ils bénéficient. Le rhum industriel tire ainsi avantage d’un droit d’accise et d’un octroi de mer interne réduits. Sur un litre de rhum, la moitié n’est pas du tout taxée, et le reste voit sa taxation réduite de moitié par rapport à l’Hexagone.

C’est là que se situe le problème. En effet, selon l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, la taxation des boissons alcoolisées constitue l’un des moyens de lutte les plus efficaces contre l’abus d’alcool. Plusieurs pays étrangers ont d’ailleurs efficacement défini un prix unitaire minimal, ou PUM, pour l’alcool.

Nous proposons donc de rétablir une taxation équitable pour essayer de combattre le syndrome d’alcoolisation fœtale, qui a de graves répercussions.

Devant la difficulté à faire accepter notre amendement, nous allons le retirer, mais nous demandons à Mme la ministre de la santé, comme à M. le secrétaire d’État chargé du budget hier, de porter une attention toute particulière à cette problématique pour tenter de dégager une solution.

En tout cas, mes chers collègues, ne cédez pas à la tentation d’une interprétation abusive de nos propos. Essayons plutôt de dominer ensemble ces questions. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste et républicain. – M. Gérard Roche applaudit également.)

Nous retirons l'amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 297 rectifié ter est retiré.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je me réjouis que le groupe CRC ait retiré cet amendement, qui avait donné lieu à un débat un peu houleux et disproportionné par rapport à l’enjeu. La commission ne l’avait d’ailleurs pas examiné sous cette forme, puisque, d’un amendement qui portait sur l’ensemble de l’Hexagone, nous étions passés à une discussion au sujet de La Réunion et des outre-mer. C’est ce qui a provoqué toute cette confusion, d’autant plus que l’amendement que nous avions étudié en commission tendait à imposer une augmentation de 4 euros par hectolitre, laquelle est devenue en séance une hausse de 4 euros par décilitre. Cette disproportion nous a entraînés dans un débat un peu surréaliste, pour ne pas dire pire.

À titre personnel, je suis ravi que nos discussions puissent se conclure aujourd’hui par un retrait du présent amendement, même si ce sujet mérite certainement une discussion ultérieure plus générale sur la fiscalité des alcools, dans un autre cadre. Je ne doute pas que la commission des affaires sociales saura s’impliquer dans un tel débat.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je remercie le groupe CRC d’avoir bien voulu retirer cet amendement, qui posait en effet d’énormes problèmes. Ni la commission ni Bercy n’avaient bien compris de quoi il retournait ; il était donc difficile de se prononcer.

Malgré tout, le syndrome d’alcoolisation fœtale représente un problème majeur, particulièrement dans la région d’outre-mer visée, où la commission s’est rendue.

Mme Catherine Deroche. Pas seulement !

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je vous l’accorde, madame Deroche, le Pas-de-Calais est aussi touché, mais dans de moindres mesures.

Lors de notre déplacement dans l’île de la Réunion, madame la ministre, nous avons été surpris de constater que les lois n’y étaient pas complètement appliquées, en particulier en ce qui concerne les publicités. Nous avons ainsi vu un peu partout, mais en particulier en bord de mer, des affiches 4x3 faisant la promotion d’alcools forts, et pas toujours français, puisque le whisky, pour ne pas le citer, y est semble-t-il très apprécié.

Par conséquent, il importe, à mon avis, pour une bonne éducation sanitaire, d’harmoniser l’application de la loi, en particulier la loi Évin, sur tout le territoire national. Il faudrait notamment que ces publicités ne soient plus aussi évidentes et visibles à La Réunion.

Une bonne politique de prévention doit aussi nous permettre d’obtenir des résultats intéressants.

Par ailleurs, mes chers collègues, la commission des affaires sociales organise régulièrement des petits-déjeuners de travail auxquels nous invitons différents types de personnalités. Le prochain de ces rendez-vous aura lieu le 7 décembre, en présence d’un professeur qui nous parlera du syndrome d’alcoolisation fœtale. J’aimerais que vous y assistiez pour que vous compreniez ce qui se passe avec l’alcool. (Mme Laurence Cohen applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Même si je n’étais pas présente hier soir, j’ai évidemment été informée précisément de la teneur des débats. À mon tour, madame Cohen, je veux vous remercier de votre démarche, qui permet d’exprimer une position sans faire adopter un dispositif qui ne serait pas sécurisé.

En tout cas, j’attache une grande importance à ce débat. À l’Assemblée nationale, cette question est régulièrement soulevée par Mme Monique Orphé, députée de La Réunion, qui la considère comme majeure. Elle n’y voit surtout aucune espèce de discrimination.

Le Gouvernement a tenté de mener la discussion sur la question des panneaux publicitaires et de leur taille, notamment dans les outre-mer et donc à La Réunion. Il y a là une réflexion à engager pour la santé publique, et pas seulement en outre-mer.

Il s’agit surtout de voir comment nous pouvons mettre en place des actions spécifiques de prévention et d’accompagnement dans les territoires les plus touchés, qui peuvent tout aussi bien se situer dans l’Hexagone. En particulier, cela passe par une réflexion spécifique sur la manière de communiquer, d’informer, par conséquent sur la publicité.

Mais ce débat tourne court à chaque fois, monsieur le président de la commission des affaires sociales. Pour ma part, j’avais fait l’effort, si j’ose dire s’agissant de santé publique, de ne pas toucher à la loi Évin, mais j’ai été confrontée à une mobilisation extrêmement forte dans tous les camps, plus dans certains que dans d’autres, d’ailleurs, dans cette enceinte comme dans celle de l’Assemblée nationale, pour revenir en arrière et détricoter le dispositif de cette loi portant sur la publicité. Votre souhait de réfléchir à la manière de mieux encadrer, voire de durcir les règles relatives à la publicité sur l’alcool outre-mer, à un moment où le Parlement a justement fait le choix de faciliter une telle pratique, me paraît difficile à justifier tant la contradiction est flagrante.

Le débat ne sera pas rouvert aujourd’hui, mais permettez-moi de dire qu’on ne peut, d’un côté, expliquer que l’alcool est responsable de 50 000 morts par an, plus particulièrement concentrées dans certains territoires, et, de l’autre, considérer que la réglementation de la publicité imposée par la loi Évin est secondaire et ne répond pas à des enjeux de santé publique.

Pour ce qui me concerne, je ne cesserai de déplorer l’assouplissement du dispositif décidé par le Parlement. Je suis heureuse que soit aujourd’hui évoquée la santé publique, mais il serait cohérent d’en parler encore et toujours, à tout moment et lors de l’examen de tous les textes.

Mme la présidente. L'amendement n° 418 rectifié, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au chapitre III du titre III de la première partie du livre premier du code général des impôts, il est rétabli une section I ainsi rédigé :

« Section I

« Taxe spéciale sur les édulcorants de synthèse

« Art. 554 B. – I. – Il est institué une taxe spéciale sur l’aspartame, codé E951 dans la classification européenne des additifs alimentaires, effectivement destiné, en l’état ou après incorporation dans tous produits, à l’alimentation humaine.

« II. – Le taux de la taxe additionnelle est fixé par kilogramme à 30 € en 2017. Ce tarif est relevé au 1er janvier de chaque année à compter du 1er janvier 2018. À cet effet, les taux de la taxe sont révisés chaque année au mois de décembre, par arrêté du ministre chargé du budget publié au Journal officiel, en fonction de l’évolution prévisionnelle en moyenne annuelle pour l’année suivante des prix à la consommation de tous les ménages hors les prix du tabac. Les évolutions prévisionnelles prises en compte sont celles qui figurent au rapport économique, social et financier annexé au dernier projet de loi de finances.

« III. – 1. La contribution est due à raison de l’aspartame alimentaire ou des produits alimentaires en incorporant par leurs fabricants établis en France, leurs importateurs et les personnes qui en réalisent en France des acquisitions intracommunautaires, sur toutes les quantités livrées ou incorporées à titre onéreux ou gratuit.

« 2. Sont également redevables de la contribution les personnes qui, dans le cadre de leur activité commerciale, incorporent, pour les produits destinés à l’alimentation de leurs clients, de l’aspartame.

« IV. – Pour les produits alimentaires, la taxation est effectuée selon la quantité d’aspartame entrant dans leur composition.

« V. – L’aspartame ou les produits alimentaires en incorporant exportés de France continentale et de Corse, qui font l’objet d’une livraison exonérée en vertu du I de l’article 262 ter ou d’une livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de l’Union européenne en application de l’article 258 A, ne sont pas soumis à la taxe spéciale.

« VI. – La taxe spéciale est établie et recouvrée selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d’affaires.

« Sont toutefois fixées par décret les mesures particulières et prescriptions d’ordre comptable notamment, nécessaires pour que la taxe spéciale ne frappe que l’aspartame effectivement destiné à l’alimentation humaine, pour qu’elle ne soit perçue qu’une seule fois, et pour qu’elle ne soit pas supportée en cas d’exportation, de livraison exonérée en vertu du I de l’article 262 ter ou de livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de l’Union européenne en application de l’article 258 A. »

II. – Après le 7° de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Le produit de la taxe mentionnée à l’article 554 B du code général des impôts est affecté à la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du présent code. »

La parole est à Mme Aline Archimbaud.

Mme Aline Archimbaud. Présent dans des milliers de produits alimentaires de consommation courante, l’aspartame est l’édulcorant intense le plus utilisé au monde. Dès sa découverte dans les années soixante aux États-Unis, des doutes sont apparus sur sa nocivité et sa mise sur le marché par le laboratoire Searle a été d’emblée entachée de manipulations, de conflits d’intérêts et de nombreux procès.

Il existe aujourd’hui de très fortes présomptions scientifiques mettant en cause la consommation d’aspartame dans l’accroissement du risque de survenue de différents cancers. Pour les femmes enceintes, il est d’ores et déjà démontré qu’une telle consommation, même à faible dose, augmente les risques de naissance avant terme.

Une étude suédoise, publiée le 26 octobre dernier et relayée par le journal anglais The Guardian, met par ailleurs en avant que la consommation de boissons « light » comportant des édulcorants augmenterait fortement le risque de développer un diabète. L’INSERM, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, avait déjà relevé le risque d’un lien entre surpoids et édulcorants intenses en 2013, soulignant que l’aspartame induirait une augmentation de la glycémie et donc du taux d’insuline, tout comme le sucrose. Ce produit n’apporterait, en plus, aucun avantage du point de vue de la lutte contre l’obésité.

Le présent amendement a pour objet de créer une taxe additionnelle sur l’aspartame, afin de supprimer l’avantage concurrentiel dont bénéficie cet édulcorant. En effet, le coût des problèmes de santé qu’il occasionne, comme les naissances prématurées, est externalisé ou supporté en aval par la collectivité. Les recettes générées permettraient de financer des politiques de prévention en matière de nutrition, ainsi que de plus nombreuses études indépendantes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Comme les années précédentes – il en est de même pour les trois amendements suivants –, il nous paraît qu’une taxation additionnelle n’est pas adaptée au regard de l’état des connaissances scientifiques. S’agissant de l’aspartame, c’est l’étude collective de l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, du mois de janvier 2015 qui l’indique. Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Il n’y a aujourd’hui aucun consensus scientifique. Des travaux et des investigations sont menés, notamment par l’ANSES, pour déterminer l’effet sanitaire de l’aspartame, et dans quelles conditions celui-ci serait susceptible de présenter des dangers. Néanmoins, rien n’est encore établi. Donc je ne peux que donner un avis défavorable sur votre amendement, madame la sénatrice, si vous ne le retirez pas.

Mme la présidente. Madame Archimbaud, l'amendement n° 418 rectifié est-il maintenu ?

Mme Aline Archimbaud. Oui, madame la présidente. Il existe un certain nombre d’études indépendantes et objectives. Certes, il en faudrait plus, ce qui ne peut être obtenu qu’en enclenchant une dynamique.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 418 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 420 rectifié, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le chapitre III du titre III de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par une section ainsi rédigée :

« Section…

« Taxe spéciale sur les dispositifs médicaux

« Art. 564. – I. – Il est institué une taxe spéciale sur le mercure effectivement destiné au soin dentaire après incorporation dans un amalgame.

« II. – La taxe entre en vigueur au 31 décembre 2017. Le taux de la taxe est fixé par gramme de mercure à 32 €.

« Ce tarif est relevé au 31 décembre de chaque année à compter du 31 décembre 2018. À cet effet, les taux de la taxe sont révisés chaque année au mois de décembre, par arrêté du ministre chargé du budget publié au Journal officiel, en fonction de l’évolution prévisionnelle en moyenne annuelle pour l’année suivante des prix à la consommation de tous les ménages hors les prix du tabac. Les évolutions prévisionnelles prises en compte sont celles qui figurent au rapport économique, social et financier annexé au dernier projet de loi de finances.

« III. – Est redevable de la contribution le praticien qui pose un amalgame à un patient. La contribution est due à raison de la masse de mercure présente dans l’amalgame posé.

« IV. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret. »

II. – Après le 7° de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Le produit de la taxe mentionnée à l’article 564 du code général des impôts est affecté à la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale. »

La parole est à Mme Aline Archimbaud.

Mme Aline Archimbaud. Le mercure, métal lourd, est un neurotoxique, un immunotoxique et un reprotoxique.

La convention de Minamata sur le mercure, signée au mois d’octobre 2013, est à ce jour la seule réglementation internationale concernant une substance particulière, signe que ce produit est singulièrement nocif.

Les amalgames dentaires, qui servent aux dentistes à obturer des cavités creusées dans les dents, sont composés pour moitié de mercure, ce qui pose deux problèmes.

D’une part, le mercure présent de longues années dans la bouche du patient a tendance à migrer dans le corps, notamment dans le cerveau. D’autre part, ce mercure finit le plus souvent par se retrouver dans l’environnement, l’air, l’eau, l’alimentation, soit sous forme de déchets, soit à la mort du patient, particulièrement lors des incinérations.

Le présent amendement tend à prévoir un délai suffisant de mise en œuvre pour que les tarifs de remboursement de la sécurité sociale aient le temps d’être adaptés et que les dentistes soient en mesure de se former aux procédés de substitution excluant le mercure qui existent bel et bien.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. C’est encore le même avis défavorable. Comme l’indique l’objet de l’amendement, la solution serait plutôt l’interdiction du mercure dans cet exercice professionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. J’ai eu l’occasion de dire les années précédentes que le ministère avait adressé une instruction de bonnes pratiques aux chirurgiens-dentistes pour leur recommander de ne pas utiliser les amalgames concernés, surtout pour les dents de lait.

J’ajoute qu’il serait paradoxal d’imposer une taxe, qui pénaliserait les personnes ayant des revenus modestes, car les dentistes ne manqueraient pas de la répercuter automatiquement sur leurs prix.

Pour toutes ces raisons, je ne suis pas certaine qu’une telle mesure soit opportune, même si ce sujet de santé publique est bien connu et identifié. Par ailleurs, il faut savoir que des négociations internationales ont lieu et que la Commission européenne est saisie du problème. Enfin, je le répète, une instruction ministérielle a été adressée aux professionnels de santé.

C’est pourquoi, madame la sénatrice, je vous demande de retirer votre amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.

Mme la présidente. Madame Archimbaud, l'amendement n° 420 rectifié est-il maintenu ?

Mme Aline Archimbaud. Je le retire, Mme la ministre ayant donné un certain nombre de précisions.

Mme la présidente. L’amendement n° 420 rectifié est retiré.

L'amendement n° 417 rectifié, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – La section III du chapitre Ier bis du titre III de la deuxième partie du livre Ier du code général des impôts est complétée par un article 1609 unvicies ainsi rédigé :

« Art. 1609 unvicies. – I. – Il est institué une contribution additionnelle à la taxe spéciale prévue à l’article 1609 vicies sur les huiles de palme, de palmiste et de coprah effectivement destinées, en l’état ou après incorporation dans tous produits, à l’alimentation humaine.

« II. – Le taux de la contribution additionnelle est fixé à 30 € par tonne en 2017, à 50 € en 2018, à 70 € en 2019 et à 90 € en 2020.

« III. – Cette contribution est due :

« 1° Pour les huiles fabriquées en France, sur toutes les ventes ou livraisons à soi-même de ces huiles par les producteurs ;

« 2° Pour les huiles importées en France, lors de l’importation ;

« 3° Pour les huiles qui font l’objet d’une acquisition intra-européenne, lors de l’acquisition.

« IV. – Pour les produits alimentaires, la taxation est effectuée selon la quantité d’huiles mentionnées au I entrant dans leur composition.

« V. – Les huiles mentionnées au même I ou les produits alimentaires les incorporant exportés de France continentale et de Corse, qui font l’objet d’une livraison exonérée en application du I de l’article 262 ter ou d’une livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de l’Union européenne en application de l’article 258 A ne sont pas soumis à la contribution.

« VI. – La contribution est établie et recouvrée selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d’affaires.

« Sont toutefois fixées par décret les mesures particulières et prescriptions, notamment d’ordre comptable, nécessaires pour que la contribution ne porte que sur les huiles effectivement destinées à l’alimentation humaine, pour qu’elle ne soit perçue qu’une seule fois et pour qu’elle ne soit pas supportée en cas d’exportation, de livraison exonérée en application du I de l’article 262 ter ou de livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de l’Union européenne en application de l’article 258 A.

« VII. – Cette contribution est perçue au profit des organismes mentionnés à l’article L. 723-1 du code rural et de la pêche maritime et son produit finance le régime d’assurance vieillesse complémentaire obligatoire institué à l’article L. 732-56 du même code. »

II. – Le livre VII du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Au 9° de l’article L. 731-2, après la référence : « 1609 vicies », est insérée la référence : « , 1609 unvicies » ;

2° Après le deuxième alinéa de l’article L. 732-58, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« – par le produit de la contribution additionnelle à la taxe spéciale sur les huiles mentionnée à l’article 1609 unvicies du code général des impôts ; ».

La parole est à Mme Aline Archimbaud.

Mme Aline Archimbaud. Mme Chantal Jouanno et moi-même avons été mandatées en 2015 par les présidents des commissions des affaires sociales et du développement durable pour travailler sur le thème de la santé et de l’environnement.

Dans une communication que nous avons faite au mois d’avril 2015 devant ces deux commissions réunies, en présence de nombreux collègues – je les en remercie –, nous avons fait état des auditions de dizaines de structures officielles, telles que l’ANSES, l’INSERM, l’INCa, l’Institut national du cancer, l’Académie de médecine, le Haut Conseil de la santé publique, mais aussi de représentants d’administrations, comme le directeur général de la santé et bien d’autres. Nous avons également repris les conclusions d’un certain nombre de rapports réalisés par des collègues : Gilbert Barbier sur les perturbateurs endocriniens ; Sophie Primas et Nicole Bonnefoy sur les pesticides ; Daniel Raoul sur les nanotechnologies. Tout concourt à montrer qu’il est temps pour nous, et c’est le sens des amendements que nous défendons, de prendre conscience du fait que l’exposome – à cet égard, je remercie Mme la ministre d’avoir soutenu l’inscription de cette notion à l’article 1er de la loi de santé –, c’est-à-dire l’exposition pendant toute la vie à des produits toxiques, même à très faible dose – c’est ce que l’on appelle l’effet cocktail –, se conjugue très souvent à d’autres facteurs, génétiques par exemple, pour provoquer des épidémies de maladies qui sont aujourd’hui les plus coûteuses pour les politiques de santé publique : diabètes, cancers, maladies cardiovasculaires.

Mes chers collègues, ne croyez pas que nous avons une obsession quelque peu folklorique pour ces sujets. Nous voulons juste essayer de vous faire comprendre qu’il est temps de changer de logiciel. Un certain nombre d’actions fortes ont déjà été menées par le Gouvernement sur ce point – je l’en remercie –, mais je pense qu’il faut aller plus loin. Nous devons notamment trouver les moyens de financer la recherche publique pour ouvrir des portes. C’est notre responsabilité. Nous ne pouvons plus être dans une vision « pasteurienne » de la santé qui correspond à une époque où la majorité des maladies étaient contagieuses.