M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’exempter les régimes conventionnels de branche de la contribution sur les avantages de préretraite d’entreprise.
L’article L. 137-10 vise les avantages « versés sous quelque forme que ce soit ». Il est donc nécessaire de préciser le régime applicable aux régimes de branche.
L’avis est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Le Gouvernement entend bien la référence au cas des transports routiers, qui peut justifier de corriger une disposition datant de 2004, introduite pour faire contribuer davantage les entreprises aux régimes de préretraite.
L’amendement fait référence à l’ensemble des régimes conventionnels de branche relatifs aux cessations anticipées d’activité. Il couvre donc un champ beaucoup plus large que celui que vous évoquez, madame la sénatrice.
S’il y a bien une correction à effectuer pour un certain nombre de secteurs, on ne connaît pas l’impact financier de la mesure proposée. Le rendement de cette taxe est actuellement de 160 millions d’euros. Un examen plus approfondi de la proposition serait nécessaire et des mesures plus ciblées pourraient prospérer dans un avenir proche.
Le Gouvernement n’est donc pas favorable à l’amendement en l’état.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je soutiens l’amendement de Pascale Gruny.
J’ai du mal à comprendre la position du Gouvernement. S’il considère que cet amendement est fondé, mais qu’il faudrait en restreindre le périmètre d’application, il lui était facile d’en demander la rectification ou de déposer un sous-amendement. Renvoyer la mesure à plus tard n’est certainement pas la solution, car c’est laisser les entreprises dans une incertitude qui n’est pas acceptable.
J’encourage donc mes collègues à voter l’amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 403 rectifié quinquies.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 6 bis.
Article 7
I. – Le chapitre VI du titre V du livre VII du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° A (nouveau) À l’intitulé, les mots : « non salariés » sont remplacés par le mot : « indépendants » ;
1° B (nouveau) À la première phrase du second alinéa de l’article L. 756-1, les mots : « non salariés » sont remplacés par le mot : « indépendants » ;
1° La sous-section 2 de la section 2 et la section 3 sont abrogées ;
2° La section 3 est ainsi rétablie :
« Section 3
« Cotisations et contributions des employeurs et travailleurs indépendants
« Art. L. 756-2. – Les cotisations et contributions de sécurité sociale, à l’exception des cotisations prévues à l’article L. 635-1 et des cotisations et contributions recouvrées par les organismes mentionnés aux articles L. 642-1 et L. 723-1, ne sont pas dues pour une période de vingt-quatre mois à compter de la date de création de l’activité lorsque les revenus d’activité rapportés à l’année entière au titre de chacune des années civiles correspondant à cette période sont inférieurs à un seuil fixé à 110 % du montant annuel du plafond mentionné à l’article L. 241-3. Pour des revenus d’activité compris entre 110 % et 150 % du montant annuel du plafond mentionné au même article L. 241-3, le montant de cette exonération est celui applicable pour un revenu égal à 110 % du montant annuel de ce plafond. Au-delà, le montant de cette exonération décroît linéairement à proportion des revenus d’activité et devient nul lorsque ces revenus atteignent 250 % du montant annuel du plafond mentionné audit article L. 241-3.
« Art. L. 756-3. – Par dérogation aux dispositions des deuxième et troisième alinéas de l’article L. 131-6-2, les cotisations et contributions de sécurité sociale mentionnées à l’article L. 756-2 dues au titre des deux premières années civiles d’activité des travailleurs indépendants non agricoles créant leur activité dans les collectivités mentionnées à l’article L. 751-1 sont calculées à titre définitif sur la base d’un revenu forfaitaire fixé par décret.
« Art. L. 756-4. – Lorsque les revenus d’activité des travailleurs indépendants non agricoles exerçant dans les collectivités mentionnées à l’article L. 751-1 sont inférieurs à un seuil fixé à 250 % du montant annuel du plafond mentionné à l’article L. 241-3, les cotisations et contributions de sécurité sociale, à l’exception des cotisations prévues aux articles L. 635-1 et L. 635-5 et des cotisations et contributions recouvrées par les organismes mentionnés aux articles L. 642-1 et L. 723-1 dues par ces travailleurs sont calculées, pour la partie des revenus inférieure au montant annuel du plafond mentionné au même article L. 241-3, sur une assiette égale aux revenus concernés, sur laquelle est effectué un abattement fixé dans les conditions suivantes :
« 1° L’abattement est fixé à 50 % des revenus concernés lorsque les revenus d’activité sont inférieurs à un seuil fixé à 150 % du montant annuel du plafond mentionné à l’article L. 241-3, décroît linéairement à proportion des revenus d’activité et devient nul lorsque ces revenus atteignent le seuil mentionné au premier alinéa du présent article ;
« 2° Au titre de la troisième année civile d’activité, l’abattement est fixé à 75 % des revenus concernés et décroît dans les conditions définies au 1°.
« Cet abattement n’est cumulable avec aucun autre dispositif de réduction ou d’exonération de cotisations et contributions, à l’exception de l’exonération prévue au II de l’article L. 756-5 et, le cas échéant, de l’exonération prévue à l’article L. 756-2. Au titre de la troisième année civile d’activité, il est ajusté au prorata de la partie de l’année civile sur laquelle l’exonération prévue au même article L. 756-2 ne s’applique pas.
« Art. L. 756-5. – I. – Lorsque leurs revenus d’activité sont inférieurs à un seuil fixé par décret, les travailleurs indépendants non agricoles exerçant leur activité dans les collectivités mentionnées à l’article L. 751-1 sont exonérés des cotisations d’assurance maladie mentionnées à l’article L. 612-4.
« II. – Les personnes exerçant une activité professionnelle non salariée artisanale, industrielle ou commerciale dans les collectivités mentionnées à l’article L. 751-1 sont exonérées du versement de toute cotisation d’assurance vieillesse lorsque leur revenu d’activité ne dépasse pas un montant fixé par décret. »
II. – Le présent article s’applique aux cotisations et contributions de sécurité sociale dues au titre des périodes courant à compter du 1er janvier 2017. Toutefois :
1° Par dérogation au 1° du I, le deuxième alinéa de l’article L. 756-5 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, continue de s’appliquer aux cotisations et contributions de sécurité sociale dues par les travailleurs indépendants ayant commencé leur activité à une date antérieure au 1er janvier 2017 ;
2° Pour l’application du 2° du I, les cotisations et contributions de sécurité sociale dues au titre de l’année 2017 par les travailleurs indépendants exerçant leur activité depuis une date antérieure au 1er janvier 2016 sont calculées, à titre provisionnel, sur la base des revenus d’activité de l’année 2015 et font l’objet d’une régularisation sur la base des revenus d’activité de l’année 2017 lorsque ceux-ci sont définitivement connus.
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, sur l’article.
M. Maurice Antiste. Le régime social des indépendants, ou RSI, a suscité un grand nombre de critiques, ce qui a poussé les pouvoirs publics à réagir, comme en témoigne ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. En métropole comme en Martinique, les critiques ont été, à juste titre, très nombreuses et justifiées, puisque certaines réformes bienvenues sont prévues dans ce texte.
Pourtant, permettez-moi de vous faire part de certaines incompréhensions, notamment sur le dispositif applicable outre-mer, donc en Martinique.
Je ne conteste pas la nécessité d’agir, mais la réforme proposée organise ni plus ni moins que la disparition de certaines mesures et, par là même, un « coup de rabot » pour certains dispositifs importants outre-mer.
Aujourd’hui, les travailleurs indépendants bénéficient d’une exonération de leurs cotisations sociales pendant leurs deux premières années. Les cotisations sont ensuite calculées pour moitié sur la partie de leurs revenus inférieure au plafond annuel de la sécurité sociale, soit 38 616 euros en 2016.
Avec la réforme, les travailleurs indépendants dont le revenu d’activité dépasserait deux fois et demie le plafond annuel de la sécurité sociale n’auraient plus droit à ces exonérations ; quant à ceux dont les revenus se situeraient entre 1,1 fois et 2,5 fois ce plafond, ils seraient exonérés pendant les deux premières années, avant de bénéficier d’un abattement dégressif pour les années suivantes. Seuls les revenus inférieurs à 1,1 fois le plafond annuel de la sécurité sociale continueraient à bénéficier du système actuel.
Enfin, il est prévu que le paiement des cotisations se fasse sur la base de revenus de l’année précédente, et non plus sur ceux de l’avant-dernière année. On supprime donc des dispositifs au nom de la chasse aux exonérations, alors même que celles-ci ne sont pas des privilèges, mais des incitations qui tiennent compte de la particularité et des difficultés de nos territoires, que tout le monde connaît. Les outre-mer sont régulièrement décriés et critiqués pour leur économie. Or ces dispositifs que l’on souhaite supprimer sont pourtant là pour encourager l’activité.
Sous prétexte de moderniser et d’adapter le RSI, on le rend paradoxalement plus compliqué et encore moins adapté ! Je souhaite des dispositifs ambitieux, et non des ponctions exercées selon une logique purement comptable et malheureusement désincarnée ! La Martinique, et les outre-mer plus généralement, ont besoin de mesures énergiques et durables.
M. le président. La parole est à M. Félix Desplan, sur l’article.
M. Félix Desplan. L’article 7 modifie le dispositif d’allégements et d’exonérations de cotisations de sécurité sociale dont bénéficient les travailleurs indépendants en outre-mer. Il s’agit de cibler les bas et moyens revenus, dans la continuité de la politique fiscale du Gouvernement, en soumettant désormais ce dispositif à des conditions de ressources.
En commission, la majorité sénatoriale n’a pas souhaité modifier la rédaction de cet article. Je souhaite, pour ma part, faire quelques observations.
Nous savons que le contexte difficile lié à l’éloignement, à l’insularité de nos outre-mer, à la concurrence de leurs voisins aux coûts de production bien plus bas, nécessite un soutien fiscal à l’égard des travailleurs indépendants.
Or, en outre-mer, le fonctionnement du RSI a suscité de vives critiques de la part de ceux qui y sont assujettis. Il s’améliore, mais les modifications substantielles contenues dans cet article 7 ne déstabiliseront-elles pas nos entrepreneurs, déjà bien peu sereins ? Ne freineront-elles pas de nouvelles initiatives ? Le statut de travailleur indépendant sera moins attractif, alors que nos territoires ultramarins connaissent un chômage très élevé.
Un nombre limité de travailleurs indépendants serait concerné, affirme l’étude d’impact. Ce choix est-il pour autant optimal, dans la mesure où il pourra décourager les activités les plus rentables, les plus qualifiées, indispensables aussi à l’essor de nos territoires ? D’autant plus que la politique d’abandon plus général des exonérations pour les emplois les mieux rémunérés et qualifiés ne favorise pas l’attrait de l’excellence en outre-mer, même si je comprends bien qu’elle est menée dans une perspective de justice sociale, avec une situation budgétaire très contrainte. L’argument avancé selon lequel le coût des prélèvements sociaux ne détermine qu’à la marge la compétitivité des activités sources de très hauts revenus est-il pertinent en l’espèce ?
Les économies réalisées seraient de 23 millions d’euros, et de 30 millions en cas de non-dégressivité. Mais quelles en seront les conséquences pour le dynamisme de nos économies ultramarines ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 7.
(L’article 7 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 7
M. le président. L’amendement n° 293, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le 5° bis de l’article L. 213-1, il est inséré un 5° ter ainsi rédigé :
« 5° ter Le recouvrement de la contribution mentionnée à l’article L. 245-17 ; »
2° Le chapitre 5 du titre 4 du livre 2 est complété par une section 6 ainsi rédigée :
« Section 6
« Contribution des revenus financiers des sociétés financières et non financières
« Art. L. 245-17. – Les revenus financiers des prestataires de service visés au livre V du code monétaire et financier entendus comme la somme des dividendes bruts et des intérêts nets reçus, sont assujettis à une contribution d’assurance vieillesse dont le taux est égal à la somme des taux de cotisation salariale et patronale d’assurance vieillesse assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés mentionnés à l’article L. 241-3 du présent code.
« Les revenus financiers des sociétés tenues à l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce, à l’exclusion des prestataires visés au premier alinéa du présent article, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus, sont assujettis à une contribution d’assurance vieillesse dont le taux est égal à la somme des taux de cotisations salariale et patronale d’assurance vieillesse assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés mentionnés à l’article L. 241-3 du présent code.
« Les contributions prévues au présent article ne sont pas déductibles de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.
« Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes caisses d’assurance vieillesse. »
II. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Alors que ce gouvernement et ceux qui l’ont précédé n’ont eu de cesse de fermer le robinet des recettes, nous proposons, à l’inverse, de lever de nouvelles recettes, plus justes, pour assurer le financement des nouveaux besoins de la sécurité sociale et revenir sur les régressions sociales, de type franchise ou forfait dans le cas de l’assurance maladie ou des retraites.
Avec la mise en place du CICE et des multiples exonérations de cotisations patronales, les assurés sociaux supportent de plus en plus le poids des cotisations, et donc le financement des prestations sociales. Nous estimons également que les revenus du capital doivent être mis à contribution.
Cet amendement, présenté à plusieurs reprises par notre groupe, vise les revenus financiers non réinvestis, c’est-à-dire les dividendes, cet argent qui ne sert ni l’emploi ni l’entreprise, mais seulement les actionnaires. Il nous paraît logique et juste de les taxer.
Il vise donc à faire contribuer davantage les revenus du capital en créant une nouvelle contribution sur les revenus financiers. Un tel dispositif assurerait d’importantes rentrées d’argent et permettrait de mener une politique sociale audacieuse pour répondre aux besoins actuels et futurs, car nombreux sont les défis à relever.
Une telle mesure aurait aussi une portée dissuasive de nature à limiter l’accumulation et serait incitative pour favoriser l’investissement, les créations d’emploi, et donc le travail.
Cet amendement s’articule avec notre amendement n° 294 visant à instaurer une modulation des cotisations des employeurs en fonction de leur politique de salaires, d’emploi et d’investissements.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission s’est déjà prononcée sur ce sujet l’année dernière et sa position n’a pas varié. Cette mesure ne suit aucune logique à proprement parler, même si Dominique Watrin a essayé d’en trouver une.
M. le secrétaire d’État sera d’accord avec moi pour dire que l’on ne peut pas imaginer une contribution d’assurance vieillesse sans prestation correspondante.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Il y a une logique dans ce que nous défendons ! Nous avons d’ailleurs présenté d’autres amendements allant dans le même sens.
De quoi s’agit-il ? Personne ne conteste qu’il y a une richesse financière au niveau mondial, européen et dans notre pays, et nous ne sommes pas les seuls à penser qu’elle doit être mise, elle aussi, à contribution, au même niveau que le sont les salaires. Tel est le sens profond de nos amendements.
On sait aussi que des défis sont à relever. Ainsi, tous les besoins de santé et d’accès aux soins ne sont pas pris en compte. J’ai cité les forfaits et les franchises ; voilà des domaines dans lesquels le gouvernement élu en 2012 n’a pas répondu aux attentes. Il n’a pas eu, en effet, le courage de franchir le pas, de faire le choix de ne pas prendre dans les mêmes poches et de ne pas mettre à contribution toujours les mêmes catégories sociales, qui souffrent déjà beaucoup.
Il faut examiner d’autres pistes et, au moins, les mettre à l’étude.
S’agissant de la pertinence des exonérations de cotisations sociales, des rapports sénatoriaux ont montré que de véritables cadeaux ont été faits aux entreprises. Il ne s’agit pas de supprimer toutes les exonérations sociales, mais de les cibler. Or vous refusez de réformer.
Pour notre part, nous ne sommes pas conservateurs. Nous proposons des pistes nouvelles.
Au titre du CICE, ce sont tout de même 20 milliards d’euros qui sont dispensés dans le budget de l’État pour alimenter de prétendues créations d’emplois, sources de cotisations sociales potentielles. Mais, là encore, des rapports ont fait la démonstration que cette mesure coûtait très cher au budget de l’État, sans effet sur l’emploi, et qu’elle ne permettait donc pas d’améliorer la situation du budget de la sécurité sociale.
Ayons le courage de chercher d’autres pistes et de les mettre en application, comme nous le proposons avec ces amendements !
M. le président. L’amendement n° 294, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après la section 1 du chapitre 2 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale, il est rétabli une section 2 ainsi rédigée :
« Section 2
« Cotisations assises sur la masse salariale
« Art. L. 242-7-2. – I. – Pour l’application du présent article :
« La répartition des richesses des sociétés à l’échelle nationale est définie annuellement par le calcul de la masse salariale par rapport aux dépenses de formation sur la valeur ajoutée augmentée des produits financiers au sens de l’article L. 245-16 de l’ensemble des sociétés ayant leur siège sur le territoire français.
« La répartition des richesses d’une société est définie annuellement par le calcul de la masse salariale augmentée d’une part pour les dépenses de formation sur la valeur ajoutée et d’autre part pour les produits financiers au sens de l’article L. 245-16 de la société ;
« Les sociétés immatriculées au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce s’acquittent annuellement d’une cotisation additionnelle d’assurance vieillesse dont le taux est égal à l’écart entre, d’une part, les dépenses de formation et de la masse salariale, et, d’autre part, la valeur ajoutée créée.
« Les cotisations additionnelles prévues au présent article ne sont pas déductibles de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.
« Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes caisses d’assurance vieillesse.
« II. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Mon intervention s’inscrit dans la continuité des propos de Dominique Watrin. Avec la série précédente d’amendements, nous proposions des sanctions supplémentaires pour les entreprises qui ne respectent pas le droit du travail, notamment en matière d’égalité salariale et de temps partiel, et la suppression des « exonérations Fillon ».
À l’inverse, avec cet amendement, nous souhaitons mettre en place un mécanisme de modulation des cotisations sociales des employeurs en fonction de leur politique salariale et d’emploi, afin de soutenir les entreprises vertueuses – celles qui mettent en œuvre sur leurs sites une politique sociale et salariale digne du XXIe siècle. Aujourd’hui, de nombreuses entreprises évoquent la RSE, la responsabilité sociétale des entreprises, mais en oublient souvent la partie « sociale », c’est-à-dire leur responsabilité envers leurs salariés.
Monsieur le secrétaire d’État, vous nous avez démontré que les sanctions mises en œuvre rapportaient de l’argent. Il est vrai qu’elles alimentent le budget de l’État en millions d’euros, ce qui n’est pas négligeable. Mais nous vous proposons des recettes qui se comptent en milliards d’euros, ce qui est très différent ! Nous avons évoqué tout à l’heure un gain possible de 8 milliards d’euros ; ce serait encore davantage avec l’adoption du présent amendement. Même si les sanctions sont opérantes, comme vous l’avez démontré, on constate toujours des inégalités salariales entre les hommes et des femmes, de l’ordre de plus de 20 %, et des temps partiels contraints.
J’entends M. le rapporteur général lorsqu’il nous dit que certaines entreprises ont besoin de recourir à du temps partiel, mais il n’empêche que, dans la grande majorité des cas, le temps partiel concerne des femmes qui le subissent. La situation peut certainement être améliorée. Nos propositions ont pour but de fournir de nouvelles recettes pour que notre système de protection sociale puisse répondre aux besoins du XXIe siècle en matière de santé et protéger l’ensemble des assurés sociaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’avis est le même que pour le précédent amendement. La commission s’est déjà prononcée sur cette proposition l’année dernière. La présentation de l’amendement a montré que le dispositif était relativement complexe et certainement source de distorsions.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. L’avis est également défavorable.
Madame la sénatrice, pour continuer notre échange, je veux revenir sur la question des sanctions prévues en cas de manquements à la négociation annuelle obligatoire et à l’égalité salariale entre hommes et femmes : leur but est non pas de rapporter de l’argent au budget de l’État, mais de faire progresser les choses ! Si j’ai cité quelques chiffres, c’est pour vous montrer que ces sanctions s’appliquent et qu’elles finiront par produire des effets.
En matière de sanctions, l’idéal est qu’elles ne rapportent rien, car cela signifie la fin des infractions. Nous avons mis en place un dispositif, qui fonctionne. Nous espérons qu’il sera dissuasif et que l’égalité entre les hommes et les femmes et la NAO progresseront.
Vous dites que nous ne sommes pas sensibles à 8 ou à 12 milliards de recettes supplémentaires. Mais elles ne sont pas créées ex nihilo, il faut bien les prendre quelque part !
Nous avons décidé de redonner de la compétitivité à notre économie par des dispositifs d’allégement des prélèvements, qu’il s’agisse de l’impôt ou des cotisations sociales. C’est un choix que nous assumons et qui constitue une différence entre nous.
Vous ne pouvez pas dire que réinjecter 8, 10, 15 ou 20 milliards d’euros dans le budget de l’État serait la panacée, sachant que cela a un effet – on peut en débattre – sur les marges, l’investissement et donc l’embauche dans les entreprises de notre pays.
Certes, le secrétaire d’État au budget que je suis dormirait mieux s’il disposait d’une dizaine de milliards d’euros de recettes supplémentaires. (Sourires.) Mais cela augmenterait le nombre d’entreprises en difficulté dont s’occupe, au troisième étage de la grande maison de Bercy, mon collègue Christophe Sirugue qui, lui, aurait des nuits plus agitées !
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Monsieur le secrétaire d’État, j’entends bien vos propos sur les difficultés des entreprises, mais le CICE et les mesures que vous avez prises bénéficient principalement aux très grandes entreprises. La plupart des petites entreprises et des artisans n’en profitent pas. Souvenez-vous du slogan de l’Union professionnelle artisanale, l’UPA : « L’artisanat, première entreprise de France ». Il y a plus d’un million d’artisans dans notre pays !
J’insiste, les entreprises qui bénéficient de ces mesures sont celles qui connaissent toutes les astuces, notamment fiscales, pour ne payer que très peu ou pas d’impôts et qui délocalisent à la première occasion. Certaines font même du chantage à l’emploi et reçoivent de l’argent public des collectivités locales. Nous avons tous connu de grandes entreprises venues s’implanter dans nos territoires à condition que soient réalisés des investissements routiers, autoroutiers ou ferroviaires, aux frais évidemment des collectivités territoriales. Dès qu’elles en ont l’occasion, ces entreprises n’ont aucun scrupule à repartir. Pendant ce temps, d’autres entreprises, notamment agricoles, sont en grande difficulté.
C’est ce que nous contestons dans les mesures que vous prenez, monsieur le secrétaire d’État, et qui fait la différence qui nous sépare sur le budget que vous nous présentez. J’entends les remarques de M. le rapporteur général, que je partage pour partie, sur la complexité du mécanisme de modulation que nous proposons, mais rien n’est plus compliqué que la fiscalité des entreprises ! On peut y ajouter quelques éléments de complication supplémentaires ; je suis certaine que les équipes de Bercy seraient capables de mettre en œuvre notre proposition.
Nous proposons, au travers de cette modulation, d’encourager les entreprises vertueuses, celles qui pratiquent une bonne politique salariale et sociale. Elles seraient moins « taxées » ou plutôt moins assujetties à cotisations que celles qui ne font que de la finance.
Certes, monsieur le secrétaire d’État, des différences existent entre vos propositions et les nôtres. Mais, au travers de nos amendements, nous voulons dégager des recettes supplémentaires pour notre protection sociale.