Sommaire
Présidence de M. Jean-Pierre Caffet
Secrétaires :
Mme Frédérique Espagnac, M. Bruno Gilles.
2. Organisme extraparlementaire
4. Décision du conseil constitutionnel sur une question prioritaire de constitutionnalité
5. Liaison ferroviaire Paris-aéroport Charles-de-Gaulle. – Discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Discussion générale :
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État
Clôture de la discussion générale.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin ; M. le président.
7. Liaison ferroviaire Paris-aéroport Charles-de-Gaulle. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
Amendement n° 2 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 3 de M. Yves Pozzo di Borgo. – Retrait.
Amendement n° 5 du Gouvernement. – Rejet.
Articles 1er ter et 1er quater (nouveaux) – Adoption.
Article additionnel après l’article 2
Amendement n° 1 de M. Gilbert Roger. – Rejet.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.
Suspension et reprise de la séance
8. Statut de Paris et aménagement métropolitain. – Discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Discussion générale :
M. Mathieu Darnaud, rapporteur de la commission des lois
Clôture de la discussion générale.
Demande de réserve du titre II. – M. Jean-Michel Baylet, ministre ; Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois. – La réserve est ordonnée.
9. Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’un projet de loi
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Jacqueline Gourault
10. Statut de Paris et aménagement métropolitain. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 30 de M. Philippe Dominati. – Non soutenu.
Article additionnel avant l'article 1er A
Amendement n° 72 de M. Christian Favier. – Rejet.
Amendement n° 31 de M. Philippe Dominati. – Non soutenu.
Rejet de l’article.
Amendement n° 41 de M. Philippe Dominati. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 42 de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Adoption, par scrutin public, de l’article.
Amendement n° 43 de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Amendement n° 103 du Gouvernement. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 104 du Gouvernement. – Devenu sans objet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 45 de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Adoption de l’article.
Amendement n° 20 de M. Yves Pozzo di Borgo. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 47 de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Adoption de l’article.
Amendement n° 48 de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Adoption de l’article.
Amendement n° 49 de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Amendement n° 106 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 55 rectifié de M. Pierre Laurent. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l'article 9
Amendement n° 67 rectifié de M. Pierre Laurent. – Retrait.
Amendement n° 68 rectifié de M. Pierre Laurent. – Retrait.
Amendement n° 50 de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Amendement n° 107 du Gouvernement. – Rejet.
Demande de réserve du vote de l’article 10. – M. Mathieu Darnaud, rapporteur ; M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. – La réserve est ordonnée.
Amendement n° 51 de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Amendement n° 98 de M. Hervé Marseille. – Retrait.
Amendement n° 108 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 57 rectifié de M. Pierre Laurent. – Rejet.
Amendement n° 58 rectifié de M. Pierre Laurent. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 52 de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l'article 12
Amendement n° 34 de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Amendement n° 35 de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Amendement n° 33 rectifié de M. Philippe Dominati. – Retrait.
Renvoi de la suite de la discussion.
11. Mise au point au sujet de votes
Mme Esther Benbassa ; Mme la présidente.
12. Retrait d’une question orale
13. Ordre du jour
compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Pierre Caffet
vice-président
Secrétaires :
Mme Frédérique Espagnac,
M. Bruno Gilles.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Organisme extraparlementaire
M. le président. M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de deux sénateurs appelés à siéger au sein du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité.
Conformément à l’article 9 du règlement, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a été invitée à présenter des candidatures.
Les nominations au sein de cet organisme extraparlementaire auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.
3
Dépôt de rapports
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport portant sur les conditions de revalorisation du montant de la pension de retraite du régime des cultes et le rapport sur la couverture du risque de change.
Acte est donné du dépôt de ces rapports.
Le premier a été transmis à la commission des affaires sociales, le second à la commission des finances.
4
Décision du conseil constitutionnel sur une question prioritaire de constitutionnalité
M. le président. Le Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courrier en date du 4 novembre 2016, une décision relative à une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’absence de nullité en cas d’audition d’une personne gardée à vue après avoir prêté serment (n° 2016-594 QPC).
Acte est donné de cette communication.
5
Liaison ferroviaire Paris-aéroport Charles-de-Gaulle
Discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle (projet n° 861[2015-2016], texte de la commission n° 78, rapport n° 77).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la discussion du présent projet de loi est une étape importante dans la réalisation du projet Charles-de-Gaulle Express, ou CDG Express, indispensable pour améliorer le lien entre le centre de Paris et le principal aéroport de l’agglomération parisienne, au bénéfice du dynamisme de celle-ci. La mise en service du CDG Express, à la fin de 2023, permettra de relier directement, en vingt minutes, l’aéroport Charles-de-Gaulle et la gare de l’Est.
Le projet est sous-tendu par deux enjeux principaux : l’attractivité économique et touristique de l’Île-de-France et le développement durable. Chacun comprend aujourd’hui toute l’importance de renforcer l’attractivité économique et touristique de notre pays et de sa capitale, à l’heure où le Gouvernement déploie tous ses efforts pour maintenir Paris au rang de première destination touristique au monde.
Le projet CDG Express est également un atout pour la candidature de Paris à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et de l’Exposition universelle de 2025. Ainsi, l’échéance d’une mise en service à la fin de 2023 répond non pas à un calendrier prévisionnel, mais à un impératif inhérent au projet lui-même.
Quant au développement durable, je dois ici rappeler que la croissance actuelle du nombre de passagers aériens de l’aéroport Charles-de-Gaulle n’autorise pas le statu quo : les accès à l’aéroport – autoroutes Al et A3 ou RER B – sont déjà largement congestionnés, et la cohabitation entre les voyageurs du quotidien et les voyageurs aériens dans le RER B ne permet pas aujourd’hui de proposer le meilleur service aux habitants des territoires concernés.
Créer la liaison Charles-de-Gaulle Express, c’est offrir un service qui favorisera l’usage des transports en commun plutôt que celui de la route pour l’accès à l’aéroport, en portant leur part de 44 % aujourd’hui à plus de 60 % à l’horizon de la mise en service.
Cette évolution s’appuie sur une véritable complémentarité avec les projets du Nouveau Grand Paris.
Le projet Charles-de-Gaulle Express est pensé pour les voyageurs aériens voulant rejoindre Paris sans arrêt, en disposant d’emplacements pour les bagages et d’informations multilingues.
Les autres lignes – notamment le RER B et la nouvelle ligne 17 du Grand Paris Express – doivent, quant à elles, profiter pleinement aux voyageurs du quotidien et à la desserte fine des territoires de ce quart nord-est de l’Île-de France dont la dynamique économique et démographique est très importante.
Je le redis, la ligne Charles-de-Gaulle Express ne saurait être réalisée au détriment des transports du quotidien, et notamment des 900 000 voyageurs quotidiens du RER B. Les engagements figurant dans le projet – près de 130 millions d’euros sont prévus pour la réalisation de travaux sur les infrastructures existantes empruntées par le RER B, la ligne K du Transilien et les TER Picardie – témoignent de leur prise en compte. Ce montant s’ajoute aux 500 millions d’euros déjà investis pour le RER B en 2013, avec des effets très visibles au quotidien, et au milliard d’euros prévu dans le nouveau schéma directeur du RER B, en cours de mise en œuvre.
Dans tous les cas, le travail se poursuit avec le syndicat des transports d’Île-de-France, le STIF, et les opérateurs exploitant ces lignes pour définir plus en détail les conditions d’exploitation permettant d’assurer le maintien de la qualité de service du RER B et des autres lignes, avec notamment une meilleure gestion des situations perturbées. La concertation avec les acteurs du territoire méritera également d’être poursuivie, afin de les rassurer sur ce point.
De la même manière, l’insertion architecturale et urbaine du projet fait l’objet d’une attention particulière, afin de préserver et d’améliorer le cadre de vie des riverains. Les élus et populations concernés sont et seront étroitement associés à la définition des aménagements, portant notamment sur la protection contre le bruit ou l’articulation du projet avec les aménagements urbains prévus par la Ville de Paris.
Le projet a déjà bénéficié d’une déclaration d’utilité publique en 2008. Compte tenu des évolutions du montage, du coût et du financement du projet intervenues, une enquête publique modificative a eu lieu entre le 8 juin et le 12 juillet derniers.
La commission d’enquête a remis tout récemment un avis favorable au projet, assorti de deux réserves.
En premier lieu, elle demande l’établissement d’une grille de circulation, confirmant l’absence d’impact sur le fonctionnement des lignes existantes – RER B et lignes K et H du Transilien. J’ai déjà signalé l’engagement pris pour aboutir à ce résultat avec le STIF et les opérateurs.
En second lieu, elle demande l’établissement d’un plan de financement, avec une répartition chiffrée selon les modalités prévues.
Le nouveau montage économique, prenant acte de l’échec de la concession privée en 2011, repose sur la séparation des missions de construction de l’infrastructure et d’exploitation du service de transport ferroviaire. Le texte qui vous est soumis vise à établir les fondements législatifs qui rendront possible ce projet dans le cadre de ce nouveau montage, validé par la Commission européenne.
D’une part, c’est à une société de projet, filiale à créer entre SNCF Réseau et Aéroports de Paris, que sera confiée la mission de conception, de construction, de financement et d’entretien de l’infrastructure. L’article 1er tend donc à ratifier l’ordonnance publiée le 18 février 2016, qui permet principalement à l’État de signer en gré à gré un contrat de concession de travaux avec la société de projet à créer, associant SNCF Réseau et ADP, et, le cas échéant, un tiers investisseur.
D’autre part, la mission d’exploitation du service de transport ferroviaire sera attribuée par l’État à un opérateur ferroviaire.
L’article 2 permet donc à l’État de désigner l’exploitant par voie d’appel d’offres selon les mêmes modalités que celles qui ont été retenues pour le réseau de transports du Grand Paris Express.
Concernant la société de projet, la mobilisation et l’engagement, en tirant tous les enseignements du passé, des deux opérateurs concernés, ADP et SNCF Réseau, sont apparus incontournables pour la réussite de ce projet : pour ADP, le gestionnaire de l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle, la réalisation de ce dernier est une condition fondamentale de son développement ; SNCF Réseau, le gestionnaire des infrastructures ferroviaires, doit être impliqué, compte tenu de la nature du projet.
En ce qui concerne SNCF Réseau, la loi portant réforme ferroviaire, promue par le Gouvernement et promulguée à l’été 2014, a veillé à sécuriser sa trajectoire financière, en instaurant une « règle d’or » qui lui interdit de financer des investissements de développement tant que son endettement n’aura pas été maîtrisé.
Cette règle est nécessaire, quand on sait à quel point le lancement simultané de quatre projets de ligne à grande vitesse a contribué, ces dernières années, à accroître cet endettement de près de 5 milliards d’euros. Le décret correspondant est actuellement soumis à l’avis de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, l’ARAFER, à la demande du Conseil d’État.
Mais soyons clairs : le champ d’application de la « règle d’or » ne doit pas faire l’objet d’une approche trop restrictive. Je rappelle les spécificités du projet Charles-de-Gaulle Express : son calendrier est connu et ne peut souffrir de retards, au vu des enjeux ; il comprend une part importante d’investissements de renouvellement et d’amélioration de la performance du réseau existant, tant sur les voies où circulera le Charles-de-Gaulle Express que sur d’autres voies, les deux tiers de l’investissement, soit près de 1 milliard d’euros, devant être réalisés dans les emprises ferroviaires existantes, notamment pour améliorer la robustesse du réseau existant ; par ailleurs, la participation de SNCF Réseau, de l’ordre de 200 millions d’euros, prend la forme d’un apport de fonds propres à une société de projet, avec un montant et des risques très réduits par rapport à ce qu’ils auraient été si l’établissement public industriel et commercial SNCF Réseau avait dû assumer lui-même l’investissement ; enfin, je confirme – il n’est pas question de revenir sur ce principe – que le projet ne bénéficiera d’aucune subvention publique.
M. Philippe Dallier. Cela aurait été possible.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. La mobilisation de SNCF Réseau, dans ce modèle, est donc incontournable, mais il n’est pas question, pour un projet d’une telle importance, avec les délais que l’on connaît, de prendre des risques juridiques aussi importants. C’est la raison pour laquelle l’intégration dans ce texte d’une dérogation explicite à la règle d’or est indispensable à la réalisation même du projet. Tel est le sens de l’amendement déposé par le Gouvernement, que je soutiendrai tout à l’heure.
On me dit que la crédibilité du Parlement ne lui permet pas de voter une telle disposition : j’ai, de mon côté, le sentiment que, au contraire, le Parlement est seul à pouvoir décider, en responsabilité, de l’application concrète qu’il entend donner à cette règle et de la pertinence de prévoir une dérogation pour un cas très spécifique, dans l’intérêt de la nation.
Avec un tel montage, le financement du projet repose essentiellement sur la billetterie, qui permettra de payer les coûts d’exploitation du service et les péages ferroviaires au gestionnaire d’infrastructure.
Les résultats de la modélisation indiquent néanmoins que les ressources financières tirées de la billetterie ne seront pas suffisantes. Parmi les solutions envisagées pour boucler le financement, la création d’une taxe dédiée prélevée sur les voyageurs aériens est à l’étude. Cette taxe aurait vocation à ne s’appliquer qu’aux seuls passagers de l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle, hors correspondances.
Je puis vous informer dès aujourd’hui d’une première décision du Gouvernement : la taxe sur les billets d’avion ne sera perçue qu’à compter de la mise en service de la ligne Charles-de-Gaulle Express, au début de l’année 2024. Le Gouvernement fera connaître dans les prochains jours le mode de financement alternatif qui viendra se substituer à la taxe initialement prévue pour la période comprise entre 2017 et 2023. Ces dispositions seront inscrites dans le projet de loi de finances rectificative.
De nombreuses étapes importantes du projet Charles-de-Gaulle Express ont pu être franchies au cours des derniers mois, grâce à la mobilisation de tous les acteurs. L’adoption du présent projet de loi sera un moment essentiel pour la mise en œuvre de cette liaison, dans la perspective des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Si nous manquons cette occasion, l’amélioration de la liaison entre l’agglomération parisienne et son plus grand aéroport international ne pourra être envisagée avant de nombreuses années, peut-être des décennies.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, j’espère vous avoir convaincus de voter ce projet de loi, pour assurer la réussite d’un projet dont chacun peut mesurer l’importance en termes d’attractivité économique et touristique et de développement durable. (Mme Nicole Bonnefoy applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Nègre, rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le présent projet de loi a été examiné par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable le 26 octobre dernier. Trois éléments principaux sont ressortis de nos débats ; ils ne vont pas tout à fait dans votre sens, monsieur le secrétaire d’État !
M. Louis Nègre, rapporteur. Le premier est que ce texte marque un élan nouveau dans l’histoire chaotique du CDG Express. Lancé au début des années 2000, ce projet a connu pendant près d’une décennie le sort réservé aux grands chantiers d’infrastructures dans notre pays : il s’est enlisé…
À force d’atermoiements, nous nous trouvons aujourd’hui contraints d’agir dans l’urgence. La question n’est plus de savoir s’il faut construire ou non le CDG Express : il n’y a pas d’autre option crédible pour faire face à la croissance de l’aéroport, répondre aux besoins spécifiques des passagers aériens et s’inscrire dans une démarche de développement durable.
M. Vincent Capo-Canellas. Très bien !
M. Louis Nègre, rapporteur. À l’heure actuelle, l’absence de ligne dédiée reliant notre capitale au plus grand aéroport de France, le second d’Europe, constitue une anomalie française. Ce déclassement par rapport aux standards internationaux nuit au prestige de la France et à son image, ainsi qu’à la qualité du service rendu aux voyageurs. De plus, l’asphyxie croissante des autoroutes A1 et A3 et la saturation du RER B hypothèquent directement l’avenir de Paris-Charles-de-Gaulle face à ses concurrents.
Un sondage mené par le ministère des affaires étrangères auprès de ses ambassades a montré que la qualité de l’accès à l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle est le premier facteur nuisant à notre réputation à l’international. L’enjeu économique est important pour la région parisienne, sachant qu’un million de passagers supplémentaires représentent 400 millions d’euros de valeur ajoutée et 4 500 emplois, dont 1 400 emplois directs.
Au-delà des seuls flux touristiques, l’attractivité de Paris se mesure également à sa capacité à attirer des événements ou des activités liés à son rôle de métropole mondiale, à commencer par l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et de l’Exposition universelle de 2025.
Plus largement, la qualité des connexions est déterminante pour notre clientèle d’affaires et risque de peser dans les éventuels choix de relocalisation post-Brexit de certaines entreprises, pour lesquels nous sommes en concurrence avec des villes comme Milan, Francfort ou Dublin.
Enfin, cette liaison contribuera également au respect de nos engagements en faveur du climat. Elle permettra le retrait de la route de 71 millions de véhicules-kilomètres dès 2025 et contribuera par là même à la réduction de la pollution de l’air en Île-de-France.
Pour toutes ces raisons, la commission est favorable à la réalisation de ce projet d’intérêt général, dont les bénéfices s’apprécieront dans le temps long.
Le deuxième élément concerne la mise en œuvre du projet. Le nouveau montage juridique, qui sépare les missions de construction, d’une part, et d’exploitation, d’autre part, ne pose pas de problème dans son principe, d’autant qu’il a reçu l’aval des autorités européennes. L’attribution de gré à gré par l’État de la construction de l’infrastructure à une société de projet est compensée par la mise en concurrence de l’exploitation du service de transport ferroviaire.
La dérogation au monopole attribué en droit interne à SNCF Mobilités pour l’exploitation des lignes du réseau ferré national constitue, en quelque sorte, une anticipation bienvenue du quatrième « paquet » ferroviaire ! Elle permettra à Transdev, à la RATP ou à des opérateurs étrangers de faire acte de candidature et suscitera ainsi une saine émulation, pour le plus grand bien des passagers.
Le seul risque porte sur l’avantage concurrentiel dont pourrait bénéficier SNCF Mobilités, en tant que gestionnaire des gares. Une clarification sur ce point sera nécessaire avant l’engagement de toute procédure de mise en concurrence, pour éviter qu’un éventuel contentieux ne retarde la mise en service de la ligne ou ne pénalise la SNCF.
Au total, la commission a surtout cherché à faciliter la mise en œuvre juridique de ce montage en sécurisant une éventuelle participation de la Caisse des dépôts et consignations au capital de la société de projet. Elle a également adopté un amendement visant à allonger le délai pour le recours à la procédure spéciale d’extrême urgence pour procéder à des expropriations, afin de favoriser la recherche d’accords amiables.
En ce qui concerne la mise en œuvre opérationnelle du projet, la commission a exprimé quelques inquiétudes au regard de son impact pour les usagers du RER B. En effet, le CDG Express empruntera vingt-quatre kilomètres de voies existantes servant notamment de ligne de secours lorsque le fonctionnement du RER B rencontre un problème sur son sillon principal. L’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières a d’ailleurs émis des réserves sur la faisabilité de l’intégration au trafic de quatre trains par heure circulant à 160 kilomètres à l’heure sur ces voies déjà sollicitées. J’ai bien noté que vous aviez pris acte de cette difficulté, monsieur le secrétaire d’État.
Au-delà de la disponibilité des sillons, l’autre question essentielle est celle des perturbations, notamment lorsqu’une situation dégradée conduira le RER B à emprunter les voies du CDG Express. Ce risque a été perçu : une enveloppe de 125 millions d’euros a été ajoutée au projet pour financer les investissements nécessaires à la bonne gestion de ces situations, qui concernent cependant à peine 2 % des trains du RER B, soit environ 10 trains par jour sur 550.
Il n’en reste pas moins que l’insatisfaction des usagers du RER B persiste. Malgré les efforts déployés au cours des dernières années – unification de la ligne, rénovation du matériel roulant, remise en état de l’infrastructure –, leur « ressenti » au quotidien ne s’est guère amélioré. Il faudra donc bien veiller, monsieur le secrétaire d’État, à prendre en compte les besoins des voyageurs du quotidien. Au sein de la commission Mobilité 21, nous en étions tous convaincus.
Le troisième élément a trait au plan de financement, qui reste problématique. Le coût de l’infrastructure est estimé à 1,4 milliard d’euros hors taxes aux conditions économiques de 2014 et celui des équipements nécessaires, dont le matériel roulant, est évalué à environ 285 millions d’euros. Nous regrettons que la répartition des 400 à 500 millions d’euros de fonds propres entre ADP, SCNF Réseau et, éventuellement, la Caisse des dépôts et consignations ne soit pas encore claire à ce stade.
Surtout, la commission a supprimé la dérogation à la « règle d’or » sur l’endettement de SNCF Réseau. Une telle dérogation, introduite avant même que cette règle d’or ne soit effective, est inacceptable dans son principe même. Il y va de la crédibilité du Parlement, monsieur le secrétaire d’État : nous ne pouvons pas voter une règle aussi importante – tout le monde en est bien conscient – pour la maîtrise des finances du système ferroviaire et ne pas l’appliquer à la première difficulté !
Le Sénat et son rapporteur ne sont pas des girouettes. La loi votée doit s’appliquer,…
M. Philippe Dominati. Très bien !
M. Louis Nègre, rapporteur. … sauf à déconsidérer l’action des parlementaires et à mettre en cause leur sérieux. Au vu de l’explosion de l’endettement du système ferroviaire, la règle d’or est, selon moi, une mesure impérieuse de salubrité publique. Ne pas l’appliquer à la première occasion, quelle que soit la bonne raison invoquée, signe une vision de la gestion des deniers publics qui n’est pas la mienne.
Cette position est d’ailleurs partagée par le régulateur indépendant, l’ARAFER, qui insiste sur le fait que « l’esprit de la loi portant réforme ferroviaire commande de couvrir la participation de SNCF Réseau au capital de la société de projet par des financements publics », sauf, je le répète, à dévoyer cette règle d’or dont nous avons tous soutenu l’adoption en 2014.
Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement doit assumer ses responsabilités et ne pas déroger à la règle qu’il a lui-même introduite. Certes, le droit actuel interdit à l’État de subventionner directement ce projet, mais nous faisons pleinement confiance à Bercy et à son ingéniosité financière reconnue…
M. Vincent Capo-Canellas. Faire confiance à Bercy…
M. Louis Nègre, rapporteur. … pour proposer d’autres solutions plus respectueuses des engagements du Parlement.
L’autre problème tient à la création envisagée d’une taxe de 1 euro par passager au départ et à l’arrivée de l’aéroport, hors correspondances. Cette contribution d’équilibre doit permettre de lever près de 1 milliard d’euros de dette sur les marchés, dans la mesure où les seules recettes du Charles-de-Gaulle Express, avec un prix du billet fixé à 24 euros, ne permettraient pas de couvrir l’intégralité des coûts.
Actuellement, les compagnies aériennes font face à une concurrence extrêmement forte. Leurs marges de manœuvre sont très faibles. Au regard du prix d’un billet d’avion, on s’imagine souvent qu’une taxe de un ou deux euros par passager serait relativement indolore. En réalité, pour certaines compagnies, la marge moyenne s’établit aujourd’hui à cinq euros par siège. Elles ne pourraient pas répercuter cette taxe dans le contexte actuel.
En conséquence, nous suggérons un autre schéma.
D’une part, nous proposons d’affecter au CDG Express le surplus de recettes produit par la taxe de solidarité.
M. Roger Karoutchi. Mais cela ne fait que trois sous…
M. Louis Nègre, rapporteur. Depuis 2015, cette taxe est écrêtée et le surplus, d’un montant d’environ 10 millions d’euros, est actuellement reversé au budget général.
D’autre part, nous proposons de solliciter en complément les finances d’Aéroports de Paris. Le groupe affiche d’excellents chiffres et redistribue 60 % de son résultat net sous forme de dividendes, soit environ 260 millions d’euros en 2015. La moitié de ces dividendes revient d’ailleurs à l’État, actionnaire majoritaire d’ADP. Ce partenaire, directement intéressé à la réussite du projet, dispose de la solidité financière nécessaire pour abonder ce qui nous apparaît être un investissement relais de croissance pour le groupe. Vous l’avez dit, monsieur le secrétaire d’État, il s’agit d’une condition fondamentale de son développement.
Pour conclure, sous ces quelques réserves, nous souhaitons clairement que le projet aboutisse.
Avec 65 millions de voyageurs accueillis en 2015, l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle est notre première frontière internationale : il est la porte d’entrée et la première image de notre pays. Nous devons faciliter le développement de notre industrie touristique et honorer notre tradition d’accueil en offrant à nos visiteurs un service de transport digne des plus grandes capitales, mais en respectant quelques principes qui fondent, en particulier, la crédibilité du Parlement : j’y tiens ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, chers collègues, le projet de loi dont nous discutons aujourd’hui vise à la ratification de l’ordonnance permettant la création d’une ligne de train dédiée pour relier directement, sans aucun arrêt intermédiaire, l’aéroport Charles-de-Gaulle au centre de Paris d’ici à 2023.
L’objectif est que les touristes et les acteurs économiques puissent utiliser ce train à haut niveau de service pour rejoindre la capitale en vingt minutes. En sens inverse, les usagers de l’aéroport pourraient s’y rendre depuis Paris sans se préoccuper d’éventuels retards. Le RER B, deuxième ligne la plus empruntée d’Europe avec ses quelque 900 000 passagers par jour, ne correspondrait pas aux standards de qualité attendus.
Les membres du groupe écologiste ont quatre remarques à formuler sur ce projet.
Tout d’abord, concernant le RER B, malgré un plan, annoncé il y a quelques années, qui promettait monts et merveilles, avec cinq ans de travaux et 650 millions d’euros de budget, la situation est toujours aussi insupportable pour les usagers. L’état des rames est déplorable. Les pannes et les retards sont presque systématiques, tout particulièrement aux heures de pointe. Un blog très connu des utilisateurs du RER B fait même depuis des années le décompte des problèmes survenus sur cette ligne : par exemple, en octobre 2016, on a dénombré 81 % de jours « à problèmes », dont 65 % liés à l’état du réseau. Et de tels chiffres ne sont pas des exceptions.
L’arbitrage proposé au travers du présent projet de loi est le suivant : un très lourd investissement, d’un montant de 1,7 milliard d’euros, serait consenti pour le projet CDG Express, prévu pour environ 20 000 voyageurs quotidiens, ce qui obligerait de facto à renoncer à financer une amélioration significative du RER B, qui, lui, transporte 900 000 usagers chaque jour. Or toutes les études montrent que des travaux structurels très importants doivent être menés pour que cette ligne fonctionne de nouveau convenablement !
Un tel choix est tout à fait incompréhensible pour les usagers du RER B, qui subissent ces difficultés depuis des années. De plus, le bénéfice attendu en termes de baisse de fréquentation du RER B est minime : seulement 6 % du trafic environ serait reporté sur le CDG Express. Le coût prévu de l’aller simple sur cette future ligne – 24 euros – est élevé, et il ne serait pas possible d’utiliser le pass navigo : seraient de fait exclus les usagers franciliens, les salariés de l’aéroport et beaucoup de voyageurs.
Mme Éliane Assassi. Eh oui !
Mme Aline Archimbaud. On nous propose de faire coexister deux modes de transport très inégalitaires : pour certains, une liaison directe, confortable et rapide ; pour tous les autres, des retards, des pannes, des trains annulés et des rames bondées.
On nous dit souvent que les autres grands aéroports bénéficient de lignes rapides pour le transfert des touristes en centre-ville. C’est vrai pour certains d’entre eux, mais encore faut-il regarder attentivement les services proposés chez nos voisins.
À Berlin, suivant l’aéroport, on doit prendre le bus ou le train. Le trajet jusqu’au centre-ville dure vingt-huit minutes et coûte 3 euros.
À Rome, un train direct relie l’aéroport à la gare centrale en une trentaine de minutes, pour un coût de 14 euros.
À Bruxelles, le billet est à 8,5 euros et le trajet dure vingt minutes.
Dans ces différents exemples, on est loin du coût prohibitif annoncé du CDG Express et bien plus proche, qu’il s’agisse du temps de trajet ou du prix du billet, du service assuré par le RER B, quand il fonctionne et relie directement le centre-ville de Paris et l’aéroport.
Par ailleurs, le nouveau train n’apporterait aucun bénéfice aux villes de Seine-Saint-Denis traversées, puisqu’il ne s’y arrêterait pas ! En revanche, le passage des rames, huit fois par heure de cinq heures du matin à minuit, induirait de nouvelles nuisances visuelles et sonores. Et tout cela pour quoi ? Pour un gain de dix minutes par rapport au RER B quand celui-ci fonctionne bien, et ce au prix d’un engorgement prévisible des voies existantes, qui seront en partie utilisées par le nouveau train. Mécaniquement, cette situation engendrera encore plus de retards.
À nos yeux, ce projet n’est pas acceptable en l’état. On ne peut pas mépriser à ce point les usagers quotidiens du RER B et les territoires de Seine-Saint-Denis qu’il est prévu de traverser.
Par ailleurs, le projet ne tient pas compte des nouvelles évolutions prévues en matière d’aménagement du territoire. Je pense notamment à la ligne 17 du Grand Paris Express, qui, en 2023, doit relier l’aéroport Charles-de-Gaulle à la gare de Saint-Denis-Pleyel. Cette dernière est censée devenir un lieu d’intermodalité, offrant de nombreuses correspondances. Monsieur le secrétaire d’État, pourquoi un tel doublon ?
Enfin, le rapport issu de l’enquête publique met en exergue l’existence de zones d’ombre. En particulier, deux réserves sont formulées concernant le financement : outre qu’il est « difficile d’apprécier le bien-fondé des dépenses », la rentabilité du projet ne serait pas forcément suffisante pour atteindre l’équilibre. De surcroît, l’enquête publique déplore « le manque de précision sur le recours aux fonds propres ou à l’emprunt, aux subventions publiques ou européennes ».
Vous nous avez indiqué qu’aucune subvention publique ne serait octroyée, mais nous n’avons pas très bien compris ce qui serait à la charge de la SNCF, laquelle est déjà lourdement endettée. Ainsi, à nos yeux, le montage financier est encore extrêmement peu clair à ce stade.
Mme Éliane Assassi. Il est même opaque !
Mme Aline Archimbaud. Par principe, nous voulons être sûrs qu’un système de transports aussi inégalitaire ne sera pas financé par de l’argent public.
En conclusion, les membres du groupe écologiste souhaitent la mise en œuvre, en matière de transports, de projets conciliant la volonté légitime de développer l’attractivité économique de Paris et de l’Île-de-France et une bonne qualité de mobilité pour tous les usagers.
À cette fin, nous proposons de concentrer les investissements publics selon deux objectifs.
D’une part, il faut améliorer de façon significative et structurelle le fonctionnement du RER B. À cet égard, il y a urgence, eu égard à la colère qu’expriment les usagers.
D’autre part, il faut assurer le financement de la future ligne 17, infrastructure qui permettra une desserte aéroportuaire moderne et de qualité.
Dès lors, l’Île-de-France disposerait d’un système de transport permettant à la fois une desserte aéroportuaire de qualité et des liaisons, directes et omnibus, au bénéfice des Franciliens, des salariés de l’aéroport et des voyageurs.
Le groupe écologiste ne votera pas, en l’état, le projet de loi qui nous est présenté aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.
Mme Nicole Bonnefoy. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, Roissy-Charles-de-Gaulle, premier aéroport français, deuxième d’Europe par sa taille et neuvième à l’échelle mondiale par son trafic, est la principale interface entre la France et le reste du monde. C’est le lieu par lequel transitent la majorité des 15 millions de visiteurs étrangers qui se rendent chaque année à Paris, première destination touristique au monde.
Pourtant, ses accès sont aujourd’hui fortement congestionnés, qu’il s’agisse des autoroutes A1 et A3 ou du RER B. Les temps de trajet oscillent entre trente minutes et une heure trente, et l’expérience du voyageur coincé dans les embouteillages ou dans un RER bondé, sans espace pour les bagages, n’est pas satisfaisante. La qualité du voyage en France s’en trouve pour partie dégradée.
La réalisation du projet CDG Express, qui vise à relier directement, d’ici à 2023, l’aéroport au centre de Paris en vingt minutes, est dès lors nécessaire pour améliorer la qualité du voyage et de l’accueil de nos visiteurs et pour donner une image plus moderne de notre pays.
Il s’agit là d’un enjeu essentiel pour l’attractivité économique et touristique de l’Île-de-France, d’autant que les aéroports européens de même rang sont déjà dotés d’un tel équipement et que Paris a besoin d’infrastructures de transport de haut niveau dans la perspective de ses candidatures à l’organisation des jeux Olympiques de 2024 et de l’Exposition universelle de 2025.
L’enjeu économique est donc majeur, alors que l’on prévoit un doublement du trafic aérien mondial d’ici à quinze ou vingt ans et que notre pays s’est fixé pour objectif global d’accueillir 100 millions de touristes par an à l’horizon 2020.
Aujourd’hui, le secteur du tourisme souffre énormément du lourd climat que nous connaissons. « C’est l’état d’urgence dans l’industrie touristique », écrivait le journal Le Monde le 17 octobre dernier. Bien entendu, nous espérons que cette situation ne sera que temporaire. Cela étant, c’est là une donnée que nous avons la responsabilité de prendre en compte, le tourisme étant l’un des secteurs clefs de notre économie : il représente entre 7 % et 8 % de notre PIB et deux millions d’emplois directs et indirects.
L’amélioration de la qualité d’accueil des visiteurs est ainsi l’un des axes du travail à accomplir pour soutenir ce secteur : la France a perdu un million de touristes entre les seuls mois de janvier et d’août 2016, ce malgré l’organisation de l’Euro de football.
Le Charles-de-Gaulle Express s’inscrit dans une complémentarité avec l’ensemble des autres projets de transports en commun du Nouveau Grand Paris, notamment la nouvelle ligne 17.
L’amélioration des infrastructures de transports au service des Franciliens des petite et grande couronnes a certes tardé, mais il ne faut pas mettre en concurrence ces deux projets d’infrastructures, d’autant qu’il ne s’agit pas des mêmes financements et que la réalisation de ce projet de desserte directe aura également la vertu de soulager le transport routier ainsi que les transports publics dédiés aux déplacements du quotidien. (Mme Aline Archimbaud manifeste son scepticisme.)
Certes, quelques derniers points restent à régler pour boucler une partie du financement du projet, dont le coût global est estimé à 1,4 milliard d’euros.
Par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a introduit un article additionnel visant à autoriser SNCF Réseau à déroger à la règle d’or qui s’impose à lui depuis 2014, pour lui permettre de participer en fonds propres au financement de l’infrastructure, à hauteur de 100 millions à 300 millions d’euros.
Il ne s’agit pas là, à proprement parler, d’une aggravation de la dette, dans la mesure où seront mobilisés des fonds propres pour contribuer à la création d’un actif, dont l’équilibre financier sera assuré d’une part par les recettes des gestionnaires de l’exploitation, d’autre part par une redevance complémentaire. Le niveau de risque est donc réduit.
À l’inverse, l’absence de cet article imposerait que l’État compense à SNCF Réseau sa participation aux fonds propres de la société en 2017. Cela remettrait en cause le principe selon lequel « l’État ne participe pas financièrement à l’opération ». La déclaration d’utilité publique s’en trouverait juridiquement affaiblie. Dès lors, c’est l’ensemble du projet qui serait en péril.
En réalité, ce projet traîne depuis 2006, tout le monde en convient. Nous ne pouvons donc plus attendre pour engager sa mise en œuvre. C’est pourquoi j’appelle la majorité sénatoriale, qui a supprimé l’article 1er bis en commission, à amender son opposition, qui confine à l’obstruction au projet, pour autoriser le rétablissement du dispositif proposé par le Gouvernement.
Monsieur le secrétaire d’État, en tant que rapporteur pour avis, depuis deux ans, de la mission « Transports aériens » du projet de loi de finances, je souhaite par ailleurs vous interroger sur un autre volet du financement du projet. Bien qu’il ne soit pas, à proprement parler, traité dans le présent texte, il en est indissociable, et nous devons profiter de cette occasion pour l’aborder.
Il est actuellement envisagé de taxer à hauteur de 1 euro par passager les compagnies aériennes opérant des vols au départ de l’aéroport Charles-de-Gaulle, ce dès 2017, afin de dégager une recette d’environ 40 millions d’euros par an.
Vous venez d’annoncer que cette participation financière ne serait instaurée qu’en 2023. C’est là un point positif. Toutefois, nos compagnies aériennes sont aujourd’hui confrontées à un environnement de concurrence féroce en termes de coûts. Retenir une telle solution de financement entrerait en contradiction avec l’intention manifestée par le Gouvernement de soutenir un secteur économique dont les acteurs français sont confrontés à un déficit de compétitivité qui hypothèque leur avenir.
À cet égard, je rejoins mon collègue député Bruno Le Roux, qui écrivait, en 2014, dans son rapport relatif à la compétitivité du transport aérien, que « le pavillon français profite très peu de la croissance du trafic aérien, et voit ses parts de marché diminuer. L’acquittement d’un grand nombre de taxes spécifiques et l’instabilité des réglementations qui s’appliquent à nos compagnies aériennes font partie des maux qui les affaiblissent. »
Par conséquent, la stabilisation et la simplification des réglementations, ainsi que l’amélioration de l’environnement fiscal, dans un contexte européen qui, en la matière, attend encore d’être harmonisé, sont des objectifs que nous devons continuer à viser. Or la création d’une taxe sur les passagers pour contribuer au financement du CDG Express n’irait pas dans ce sens. Les voies d’une autre répartition de la taxe, mobilisant davantage les ressources d’ADP, peuvent être explorées. Dans le même esprit, une solution alternative pourrait consister à réaffecter au projet CDG Express le surplus de recettes de la taxe de solidarité, aujourd’hui soumise à un plafond de 210 millions d’euros, au-delà duquel son produit est reversé au budget général. Le reversement a été de l’ordre de 12 millions d’euros en 2015, de 20 millions d’euros en 2016 : cet excédent pourrait être affecté au financement du CDG Express.
De même – je rejoins là encore les recommandations du rapport Le Roux –, l’assiette de cette taxe destinée à financer la lutte contre les maladies en Afrique pourrait être élargie. Elle est aujourd’hui supportée par les seules compagnies aériennes.
Ces deux voies pourraient permettre de mieux répartir les contributions des divers acteurs concernés sans remettre en cause les engagements de la France en matière de solidarité internationale.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, la réalisation rapide de ce projet est cruciale pour notre pays, au vu des retombées à en attendre. Il serait extrêmement préjudiciable de la compromettre en votant ce projet de loi sans fixer le cadre juridique dont le Gouvernement a besoin pour assurer sa réalisation.
En retour, monsieur le secrétaire d’État, il importe que, par votre voix, le Gouvernement nous apporte un éclairage sur les arbitrages qu’il entend opérer en termes de financement et se montre ouvert à la discussion lors de l’examen des textes financiers : c’est ainsi que nous pourrons trouver un compromis cohérent avec notre souhait commun de soutenir les acteurs français du tourisme et du transport aérien. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la création de la liaison ferroviaire CDG Express entre Paris et l’aéroport Charles-de-Gaulle est un véritable serpent de mer.
Apparu dès les années 2000, ce projet ressurgit régulièrement dans le débat public. Ses contours sont évolutifs, mais le fond, lui, est toujours le même : il s’agit de relier directement Paris à l’aéroport Charles-de-Gaulle, au motif que l’offre actuelle ne serait pas adaptée et qu’il conviendrait de séparer les voyageurs aériens des autres usagers.
Monsieur le secrétaire d’État, vous le savez, nous nous sommes toujours opposés à la création de cette infrastructure.
En effet, nous considérons que ce projet ne relève pas de l’intérêt général, puisque, eu égard à ses caractéristiques, il ne concerne qu’une seule catégorie d’usagers. Sa tarification particulière, de l’ordre de 24 euros pour un aller simple, atteste d’ailleurs de la spécificité de l’offre envisagée, qui n’entre pas dans les grilles de tarification du STIF et se place ainsi hors du champ du pass navigo. Très logiquement, une telle ligne ne constituerait donc pas un élément du service public de transports collectifs.
Tout, dans ce projet, est dérogatoire, qu’il s’agisse des procédures d’expropriation d’urgence, prévues par la loi Macron, dont la commission a d’ailleurs allongé la durée, ou des conditions d’exploitation du service. L’article 2 crée ainsi une dérogation au monopole de la SNCF en ouvrant l’exploitation de cette ligne la concurrence. Une telle mesure laisse craindre des conditions sociales tirées vers le bas pour les salariés, comme cela a été le cas lors de l’attribution de l’exploitation de la Tangentielle Nord à une filiale de la SNCF.
Nous n’approuvons pas ces procédures, qui placent ce projet hors du droit commun et témoignent d’une volonté de libéralisation accrue des transports publics, au détriment de la cohérence de l’offre et de l’unité du réseau ferroviaire.
S’y ajoute un autre motif de désaccord : nous considérons que la mise en regard de l’intérêt public d’une telle structure et de son coût ne plaide pas pour sa réalisation.
Évalué à 1,4 milliard d’euros, soit près de deux fois le montant estimé en 2007, le coût de ce projet semble en décalage avec les besoins exprimés. En outre, cette estimation paraît peu réaliste : certains coûts, notamment ceux des importants dévoiements du réseau de gaz à Mitry-Mory, n’ont pas été pris en compte.
Par ailleurs, par rapport à la DUP de 2007, la situation a évolué. Dans les conditions actuelles, ce projet est redondant avec la ligne 17 du Grand Paris Express.
Enfin, la réalisation de cette nouvelle ligne, qui utiliserait vingt-quatre des trente-deux kilomètres d’infrastructures existantes, risque de contribuer à la sursaturation du réseau, au détriment des usagers du quotidien. Ce risque a d’ailleurs été pointé par le STIF dans son avis du 1er juin dernier. Le STIF a ainsi estimé à 1,5 milliard d’euros le coût de la perte de ponctualité pour les autres modes de transports.
À l’évidence, la mise en service du CDG Express perturbera le fonctionnement non seulement du RER B, mais aussi des lignes K et P, des TER Picardie et du transport de fret.
Dès lors, comment comprendre que l’on accepte ce projet, qui va rendre plus difficiles les conditions de transport quotidien de 870 000 personnes, afin de satisfaire les 22 000 usagers prévus chaque jour pour ce futur réseau de transport ?
De surcroît, les impacts environnementaux seront lourds. Les huit nouveaux kilomètres de ligne seront construits au prix du changement de destination de vingt-neuf hectares de terrains agricoles.
Dans ce cadre, la zone Natura 2000 du parc de la Poudrerie n’a pas été prise en compte. Alors que le Grenelle de l’environnement et les travaux de la COP devraient nous conduire à utiliser les espaces naturels avec précaution, ce projet contribuera à l’artificialisation des sols. L’Autorité environnementale a d’ailleurs considéré que ce projet était incohérent et non conforme au code de l’environnement.
À nos yeux, l’urgence est bien de répondre aux besoins de tous, passagers aériens, salariés –notamment ceux des plateformes aéroportuaires, dont il n’est pas question dans ce projet – ou usagers franciliens.
Pour cette raison, nous estimons qu’améliorer les conditions de circulation du RER B est le meilleur moyen d’améliorer les conditions de transport de tous en respectant les enjeux environnementaux de la région-capitale.
Les défenseurs de ce projet brandissent l’argument de la candidature de Paris à l’organisation des jeux Olympiques. Je rappelle que, en septembre 2015, le président de l’Assemblée nationale lui-même avait déclaré que la meilleure option pour obtenir les jeux Olympiques en 2024, c’était de faire porter l’effort sur le RER B. Nous souscrivons à cette analyse et nous avons toujours formulé des propositions en ce sens.
Nous préconisons donc le bouclage du RER B entre Mitry-Claye et l’aéroport, un meilleur cadencement de la ligne K, le doublement du tunnel entre Châtelet et la gare du Nord et, bien sûr, la rénovation des voies et des matériels roulants, dont le mauvais état entraîne retards et gêne pour les usagers.
Il nous est toujours rétorqué que les financements manquent pour mettre en œuvre ces propositions. Lorsque nous suggérons de dégager des ressources nouvelles, par exemple en augmentant le versement transport, on nous répond qu’il ne faut pas pénaliser les entreprises. Et là, comme par magie, des financements sont trouvés : c’est bien la preuve qu’il s’agit de choix politiques divergents.
Au demeurant, l’ordonnance que l’on nous demande de ratifier n’est pas conforme à l’habilitation à légiférer par ordonnance qui a été donnée dans le cadre de la loi Macron. En effet, la loi Macron prévoit un financement privé. Or, dans le montage qui nous est proposé, on trouve partout de l’argent public : SNCF Réseau et Aéroports de Paris sont détenus, respectivement, à 100 % et à 51 % par l’État.
Un tel montage juridique et financier, peu crédible du reste, comme l’ont souligné les conclusions de l’enquête publique, ne respecte pas l’objectif initialement fixé. Ainsi, alors que SNCF Réseau est exsangue, elle serait amenée à contribuer à hauteur de 250 millions d’euros. Dois-je rappeler que sa dette ne cesse d’augmenter ? Elle atteint désormais près de 50 milliards d’euros ! Cette situation a d’ailleurs conduit l’ARAFER et la Cour des comptes à émettre des réserves sur ce financement.
À la lumière de ces explications, on comprend que ce projet est éminemment politique.
Mme Nicole Bricq. Certes !
Mme Éliane Assassi. Il marque des priorités en matière d’investissement public auxquelles nous n’adhérons pas, puisqu’elles opposent différentes catégories d’usagers, en privilégiant ceux qui ont les moyens de recourir à un mode de transports dédié. Une telle conception remet en cause l’idée même de service public au service de l’intérêt général. Nous voterons donc contre ce texte, qui entérine un projet inutile, coûteux et même dangereux, confirmant l’instauration d’une société à deux vitesses ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – Mme Aline Archimbaud applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Robert Hue.
M. Robert Hue. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous le savons bien, la création de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle n’a pas été un long fleuve tranquille, tant s’en faut. Historiquement, c’est peut-être ce qu’il advient en général des chantiers aéroportuaires.
Pourtant, depuis son inauguration, en 1974, cet aéroport est devenu le deuxième d’Europe. En 2015, près de 65 millions de passagers ont transité par lui. Chaque année, Paris accueille 15 millions de touristes étrangers. La ville s’est portée candidate à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et de l’Exposition universelle de 2025 et doit, dans cette perspective, se préparer à la gestion des flux d’usagers et de touristes, qui peut se révéler délicate.
Ainsi, le présent projet de loi vise principalement à fixer le cadre juridique qui permettra de relancer la création de la future ligne directe reliant l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle à la gare de l’Est en vingt minutes, à savoir la liaison ferroviaire Charles-de-Gaulle Express, dont l’entrée en service est prévue pour 2023.
Nous ne sommes pas véritablement sensibles à l’argument en vertu duquel la liaison Charles-de-Gaulle Express constituera un élément important dans le choix de Paris comme destination touristique. Toutefois, il est indéniable que cette infrastructure rendra plus agréables le début et la fin du séjour des visiteurs étrangers qui l’emprunteront, ainsi que le quotidien des usagers du RER B.
Ces derniers, nous l’espérons, disposeront d’un plus grand nombre de places, mais, étant donné que la fréquentation de cette ligne ne cesse de croître, constateront-ils réellement une différence par rapport à la situation actuelle ?
Mes chers collègues, l’attractivité d’un pays ne se mesure pas à l’existence d’une liaison directe entre l’aéroport principal et le centre de la capitale. À preuve, à l’heure actuelle, son absence n’empêche pas Paris d’être la première destination touristique du monde.
La question de l’opportunité de ce projet ne se pose plus, le législateur s’étant prononcé en sa faveur. Néanmoins, deux problèmes persistent, comme l’a très justement souligné M. le rapporteur : l’impact de la mise en service de la nouvelle ligne sur les usagers des trains du quotidien et le financement, qualifié de « lacunaire » par la commission chargée de l’enquête publique.
Pour ce qui concerne le premier point, il faut rappeler qu’environ 870 000 voyageurs empruntent le RER B tous les jours. La saturation de cette ligne rend la situation insoutenable pour les Franciliens se rendant à leur travail, confrontés à des retards fréquents.
La coexistence, sur un même tronçon, de deux usages différents ne doit pas conduire à un arbitrage au détriment des usagers du quotidien lors de l’attribution des sillons. Monsieur le secrétaire d’État, quelles précisions pouvez-vous nous apporter sur ce sujet qui préoccupe légitimement les usagers comme les élus locaux, en particulier dans le Val-d’Oise, où j’ai mené un certain nombre de consultations ?
À cet égard, il est nécessaire d’inscrire le projet du Charles-de-Gaulle Express dans une vision globale de l’offre de transports et de rappeler que la future ligne 17 reliant Saint-Denis-Pleyel à Roissy doit entrer en service en 2024.
Concernant le financement de la liaison Charles-de-Gaulle Express, qui va coûter 1,4 milliard d’euros, la société de projet, dont les actionnaires majoritaires seront SNCF Réseau et Aéroports de Paris, devra apporter 30 % de ce montant en fonds propres.
Dans cette perspective, le projet de loi prévoyait, avant son examen en commission, une dérogation à la « règle d’or » instaurée lors de la réforme de 2014 afin de maîtriser la dette du gestionnaire du réseau ferré national, laquelle s’élève à plus de 40 milliards d’euros. Qui doit payer : les usagers, la société de projet, le contribuable, à travers un subventionnement public ? La réponse à cette question tout à fait légitime n’est pas, pour l’heure, très claire.
Dans tous les cas, il est inacceptable que le ratio déclenchant l’application de la règle d’or soit d’ores et déjà atteint, ce qui compromet toute perspective de développement pour SNCF Réseau. Plutôt que de contredire l’esprit de la loi de 2014, il serait préférable de sortir l’établissement public de l’impasse afin de lui permettre d’investir.
Concernant l’équilibre financier de la ligne, se pose la question de la concurrence, notamment en dehors des heures de pointe, du RER B, qui, en l’absence de perturbations, relie la gare du Nord à l’aéroport en trente-quatre minutes pour un coût de 10 euros, contre 24 euros pour le Charles-de-Gaulle Express, même si l’on peut espérer que celui-ci captera des usagers de la route. Cela est souhaitable, à la fois pour désengorger les axes routiers et réduire les émissions de gaz à effet de serre.
C’est pourquoi il est essentiel d’évaluer le coût de ce projet de manière sincère. Son estimation est tout de même passée de 780 millions à 1,4 milliard d’euros, aux conditions économiques de 2014. Il est certes compliqué de procéder à une évaluation financière précise à un stade précoce, mais ce doublement du coût prévisionnel est extrêmement préoccupant.
Mes chers collègues, si des interrogations et des doutes demeurent quant aux conditions de réalisation et de financement de ce projet, ce qui nous impose de rester très vigilants et doit inciter le Gouvernement à prendre en compte les remarques de notre assemblée, les sénateurs du RDSE le soutiendront néanmoins, car sa mise en œuvre leur semble indispensable à la région-capitale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas très convaincant…
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce projet est crucial tant pour l’aéronautique française que pour l’attractivité de Paris, de l’Île-de-France et de l’ensemble du pays.
Sa réalisation permettra de remédier à un problème qui est régulièrement pointé comme majeur dans les études et les classements internationaux. Les Français qui voyagent ou résident à l’étranger affirment qu’il s’agit d’une des trois grandes réformes à conduire dans ce pays. Il faut en être conscient.
En faisant ce rappel, je suis en total accord avec le rapporteur, dont je veux saluer le travail. Comme il l’écrit dans son rapport, il faut en finir avec les atermoiements sur ce dossier, car « il n’y a pas d’autre option crédible pour absorber la croissance du trafic de l’aéroport et répondre aux besoins spécifiques des passagers aériens. […] Tout l’enjeu consiste à mettre en place le meilleur schéma possible. » Il qualifie enfin d’« anomalie française » l’absence de liaison directe entre l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle et la capitale.
Je marcherai dans ses pas en affirmant qu’il convient en effet de réaliser cette liaison, tant pour soutenir le secteur aéronautique que pour renforcer l’attractivité de Paris et de l’Île-de-France, ainsi que le prestige de notre capitale. Il y va de la relance du tourisme, de l’emploi et de l’économie du pays.
En tant que rapporteur spécial du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et président du groupe d’études Aviation civile du Sénat, j’ajouterai que, dans la compétition mondiale qui oppose les grands aéroports, les principaux hubs, la réalisation de ce projet est une des conditions essentielles de la réussite aéronautique et aéroportuaire française. Tous les acteurs s’accordent pour affirmer qu’il s’agit d’un élément majeur pour notre attractivité.
Il est bien d’identifier les réformes à entreprendre, les blocages et les difficultés à lever, mais il est mieux de trouver des solutions, de donner une portée concrète aux projets, si nous voulons être des modernisateurs conséquents.
Ce dossier difficile a connu un certain nombre de vicissitudes. Il faut avouer que, collectivement, nous avons posé des verrous, voire accroché des boulets.
La première difficulté réside dans le fonctionnement problématique du RER B, dont je puis en témoigner pour en être un usager. Il ne fallait pas, bien entendu, que la réalisation du projet du CDG Express enlève des crédits à cette ligne ou crée des difficultés supplémentaires à son exploitation. Après le « RER B + », il y aura le « RER B + + », et des investissements seront encore engagés cette année ici et là sur la ligne. Souhaitons que cela permette d’améliorer la situation.
J’ai bien compris que, dès lors que nous avons fixé, à l’article 2 de la loi relative au Grand Paris, une règle selon laquelle le Charles-de-Gaulle Express ne pourra bénéficier d’investissements publics, le RER B ne perdra pas de crédits. M. le secrétaire d’État a rappelé que 150 millions d’euros supplémentaires devaient être consacrés à améliorer la « robustesse » du RER B. Nous serons extrêmement vigilants sur ce point.
Lorsque nous avons instauré la règle que je viens d’évoquer, nous avions à l’esprit que les lignes 16 et 17 devaient être réalisées parallèlement à la modernisation du RER B. Ce chantier est essentiel, mais j’observe que la ligne 17 reliant Saint-Denis-Pleyel à l’aéroport Charles-de-Gaulle desservira neuf autres stations et que la nécessité de changer de quai à Saint-Denis-Pleyel induira une rupture de charge : il ne s’agira donc nullement d’une liaison directe, au contraire du Charles-de-Gaulle Express ; les deux dossiers sont tout à fait distincts.
Nous avons donc imposé l’absence de financement public pour le CDG Express et veillé à ce que rien ne soit ôté aux enveloppes destinées aux transports du quotidien. Nous travaillons dans un contexte très détérioré, monsieur le secrétaire d’État, de sous-financement des transports publics franciliens : en Île-de-France, l’investissement par voyageur est tragiquement insuffisant et la situation des transports en commun y est aujourd’hui encore assez scandaleuse, même si l’État et les collectivités se sont entendus pour renforcer les moyens qui leur sont destinés.
Dans un autre contexte, nous aurions naturellement demandé que cette infrastructure soit réalisée sur fonds publics provenant de la région, de la Ville de Paris et des autres collectivités concernées.
Aéroports de Paris et SNCF Réseau, de facto impliquée dans l’opération puisque la nouvelle ligne empruntera ses voies sur les deux tiers du parcours, doivent donc trouver une solution.
Différents projets ont été avancés. Monsieur le secrétaire d’État, les difficultés ont commencé dès lors qu’il a fallu envisager de prévoir une dérogation à la règle d’or. À ce sujet, je rappellerai à mon excellent collègue Louis Nègre que, pour ma part, je suis allé au bout de la logique qui sous-tend cette règle d’or en défendant un amendement visant à renforcer celle-ci. Mon groupe m’a suivi et nous avons voté le texte, ce qui n’est pas forcément le cas de tout le monde ici, monsieur le rapporteur…
M. Roger Karoutchi. Allons !
M. Vincent Capo-Canellas. Je me sens donc tout à fait à l’aise pour parler de la règle d’or !
Cela étant, il faut trouver une solution. J’ai essayé d’élaborer une formule permettant de concilier l’application de la règle d’or, à laquelle je tiens, et la réalisation du projet. Mais on a déjà posé tellement de verrous que si nous en ajoutions encore un aujourd’hui en excluant le recours à un financement bancaire par l’application de la règle d’or, la mise en œuvre du projet se trouverait de fait gravement fragilisée. Ainsi, l’une des principales réformes que notre pays doit conduire serait mise en péril.
Je défendrai tout à l’heure un amendement, dont j’espère qu’il pourra prospérer, visant à permettre au Sénat de réaffirmer son attachement au respect de la règle d’or sans pour autant bloquer le projet. C’est tout l’enjeu de notre discussion.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, il faudra débattre, aujourd’hui et lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative, du financement global et de la question de la taxe, dont vous nous avez dit qu’elle n’entrerait en vigueur qu’en 2024 : dont acte ! C’est tant mieux pour la compétitivité du transport aérien, mais attention à ne pas répéter l’expérience de l’écotaxe. Il faudra veiller à rendre crédible la mise en place de cette taxe en 2024, faute de quoi les banques nous opposeront l’exemple funeste de l’écotaxe.
Je souhaite que ce projet puisse être mené à bien, dans le respect de l’environnement et des attentes des usagers des transports du quotidien, et qu’il permette à la France de régler un très ancien problème. La seule question à se poser est la suivante : comment en finir avec les atermoiements du passé et faire aboutir ce projet ? (M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il y a une quinzaine d’années, je recevais Antoine Veil dans mon bureau de président de groupe au conseil régional. Il venait m’exposer le projet du Charles-de-Gaulle Express. Depuis lors, j’ai vu défiler bien d’autres porteurs de projet, les uns se prévalant du concours des banques, les autres de celui des collectivités locales, d’autres encore de l’apport de financements publics. Au final, quinze ans plus tard, pas un coup de pioche n’a été donné ! Rien n’a bougé… La République est fidèle à elle-même : plus on tarde, moins on avance !
En définitive, nous nous trouvons devant une situation extraordinairement compliquée, car chacun, en Île-de-France, a son projet, son dada, et tente de faire prévaloir sa volonté. « Qui paye ? » demande-t-on volontiers quand il s’agit de financer un projet. En Île-de-France, la réponse est simple : nous payons tout !
Mme Nicole Bricq. Mais non, pas tout ! Il s’agit d’une société de projet !
M. Roger Karoutchi. Si ! Le Grand Paris Express coûte 32 milliards d’euros : une paille !
Mme Évelyne Yonnet. C’est pour la Seine-Saint-Denis, pas pour Neuilly !
M. Roger Karoutchi. Au début, on nous expliquait que l’État allait apporter des sommes importantes. J’ai été le premier, à l’époque où Jean-Marc Ayrault était Premier ministre, à voter, avec le président Huchon, des projets miraculeux de conventions financières. Puis Manuel Valls nous a dit que, plutôt que d’apporter de l’argent, il nous autoriserait à opérer des prélèvements fiscaux, ce qui n’est pas exactement la même chose ! (Sourires.)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. En effet !
M. Roger Karoutchi. Mais enfin, nous voulions la réalisation du Grand Paris Express et, comme finalement je suis finalement une bonne pâte (Nouveaux sourires.), j’ai voté le plan de rénovation présenté par le président Huchon, d’un montant de 7 milliards d’euros. Lorsque je demandais combien mettait l’État, on me répondait peut-être 1 milliard d’euros et l’on m’invitait à solliciter les départements, les collectivités, pour qu’ils bouclent le financement… Et voilà maintenant le Charles-de-Gaulle Express !
Je le dis tranquillement, dans cette région qui vit mal, les moyens de transport sont usés parce que nous avons été très maltraités : même l’amortissement des matériels circulant en Île-de-France servait à financer le TGV. En réalité, les investissements nécessaires sur nos réseaux et nos matériels n’ont pas été effectués pendant dix à quinze ans. (M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.)
Tous les gouvernements successifs se sont dit que, en Île-de-France, le public était captif ! Quel que soit le modèle des trains, qu’ils roulent ou non, qu’ils soient climatisés ou non, qu’ils soient équipés de toilettes ou non, les usagers montent dedans et se font transporter, souvent « comme du bétail », disait André Santini. Il n’y a pas le choix !
Concernant le Charles-de-Gaulle Express, je suis hésitant. Dans le cadre de travaux sur la modernisation et le financement de la ligne B du RER, j’avais proposé le doublement du tunnel entre Châtelet et Gare du Nord. On m’avait rétorqué que c’était techniquement impossible, puis que c’était financièrement inenvisageable. Finalement, entre la réalisation du Charles-de-Gaulle Express, la création du Grand Paris Express et la rénovation de l’existant, il faudra trouver au minimum 40 milliards d’euros.
J’entends bien, monsieur le rapporteur, votre réticence à déroger à la règle d’or, mais, dans cette région, on déroge déjà depuis très longtemps à une règle de base : assurer des transports de qualité aux citoyens ! (MM. Vincent Capo-Canellas et Yves Pozzo di Borgo applaudissent.)
N’étant pas un spécialiste, je ne sais pas s’il faut respecter ou non la règle d’or, mais il me semble que l’amendement présenté par Vincent Capo-Canellas va dans le bon sens. Je suis en effet intimement persuadé qu’il faut laisser les collectivités, la société du Grand Paris et le STIF se concentrer sur la réalisation du Grand Paris Express et la rénovation de l’existant. Si l’on veut construire en parallèle le Charles-de-Gaulle Express, il faut recourir à d’autres financements et à d’autres structures, sinon on aboutira à un blocage général dont l’usager des transports franciliens subira les conséquences.
Nous avons besoin du Charles-de-Gaulle Express, sachant que nous avons perdu plus d’un million de touristes depuis le début de cette année et que les investissements internationaux ont reculé de près d’un quart en trois ans. Cette réalité ne s’explique pas seulement par les attentats : la baisse avait commencé avant. Les étrangers se plaignent du poids de la fiscalité en France, de l’insécurité en Île-de-France. Pourquoi s’installer chez nous, même après le Brexit, alors que Bruxelles est si accueillante ?
Nous devons envoyer des signaux positifs, pas seulement en vue d’obtenir l’organisation des jeux Olympiques ou de l’Exposition universelle, et affirmer notre volonté de développer cette région, d’offrir à l’usager des transports publics de qualité sur les lignes classiques, d’inciter les collectivités et le secteur privé à s’engager. Monsieur le rapporteur, cessons d’invoquer à chaque fois des règles qui interdisent d’agir ! À la fin, c’est toujours le Francilien qui « trinque », à la fois sur le plan financier et sur celui de la qualité des transports ! L’État, désargenté, ne manque jamais d’annoncer que, en définitive, au lieu d’apporter de l’argent, il autorise la région à pratiquer un prélèvement fiscal… Cela suffit !
Il convient, à mon sens, de voter l’amendement que défendra Vincent Capo-Canellas, de trouver des solutions de financement et de faire en sorte que les transports en Île-de-France cessent d’être une perpétuelle galère, pour les Franciliens comme pour les étrangers qui viennent dans notre région pour faire du tourisme ou créer de la richesse. Je le dis à l’attention de nos collègues de province : l’Île-de-France n’est pas une région riche qui a les moyens de tout faire ; elle connaît de grandes difficultés en matière de transports. (Mme Catherine Troendlé, MM. Philippe Dominati, Vincent Capo-Canellas et Yves Pozzo di Borgo applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne suis pas une spécialiste des transports. J’interviens dans ce débat en tant qu’élue francilienne, surtout pour exercer une sorte de droit de suite parlementaire. En effet, c’est l’article 8 de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, la loi Macron, qui a autorisé le Gouvernement à préciser par voie d’ordonnance les nouvelles modalités de réalisation de l’infrastructure. Cet article a été adopté par le Sénat, en particulier par le groupe socialiste et républicain.
Je soutiens sans aucun état d’âme ce projet national, considérant que sa réalisation placera la France au premier rang en termes d’attractivité touristique et économique. Nous nous félicitons souvent d’accueillir le plus grand nombre de touristes au monde, mais, en termes de chiffre d’affaires, nous sommes derrière l’Espagne. Il y a des raisons à cela.
Nicole Bonnefoy vient de le rappeler, les chiffres pour les dix premiers mois de 2016 sont mauvais. Il est vrai qu’il y a eu les attentats, les grèves, du mauvais temps, mais nous avons un vrai problème en matière d’accueil des touristes. Surtout, nous peinons à attirer ceux qui peuvent le plus alimenter notre chiffre d’affaires touristique. Nous avons du mal, par exemple, à retenir, en fin de semaine, la clientèle d’affaires, qui préfère traverser la Manche pour passer le week-end à Londres, notamment parce que notre offre d’accueil et de transports n’est pas à la hauteur.
Nous avons déjà débattu de ce sujet à plusieurs reprises, en particulier lors de l’examen du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, il y a plus d’un an et demi. Nos collègues des groupes écologiste et CRC avaient alors souligné avec force, comme ils viennent encore de le faire, l’importance des trains du quotidien et la nécessité d’investir sur le RER B.
Depuis, un fait majeur s’est produit, que M. Karoutchi aurait pu rappeler, lui qui connaît bien les affaires de la région d’Île-de-France : un contrat de projet, un CPER, a été signé entre l’État et la région concernant le volet des transports. La programmation et le financement des travaux d’amélioration du fonctionnement du RER B sont prévus dans ce contrat de projet. Certes, des difficultés, notamment techniques, se posent, s’agissant en particulier de la station Châtelet, point d’engorgement des transports franciliens.
Monsieur le secrétaire d’État, il faut placer la région-capitale à la hauteur de ses homologues étrangères. Londres, Stockholm, Oslo, Tokyo et d’autres villes-mondes sont en concurrence avec nous. Dans cette perspective, nous devons améliorer notre offre de transports et d’accueil.
Ce n’est pas un hasard si Mme Hidalgo propose aujourd’hui même à son conseil municipal d’étendre à douze dimanches la possibilité du travail dominical, alors qu’elle y était férocement opposée il y a moins d’un an !
Mme Catherine Procaccia. Il y a tout de même cinquante-deux dimanches dans l’année !
Mme Nicole Bricq. L’amélioration de la qualité de l’accueil sera également évoquée par le comité interministériel réuni sous la présidence du Premier ministre pour traiter des problèmes de sécurité. Nous devons consentir un énorme effort dans ce domaine, nous le savons.
Cela a été dit, le CDG Express sera financé sur fonds privés. Monsieur le secrétaire d’État, concernant la rentabilité du projet, si nous avions eu les mêmes préventions lorsqu’il s’est agi de creuser le tunnel sous la Manche, nous ne l’aurions jamais fait ! La rentabilité d’un tel investissement s’apprécie sur le long terme, comme pour Eurotunnel. Le projet qui nous occupe n’est certes pas de la même ampleur, mais, en matière de réalisation d’infrastructures, le facteur temps doit toujours être pris en compte.
Il reste que les recettes d’exploitation ne couvriront pas forcément les coûts. Je vous fais confiance pour trouver une solution de remplacement à la création d’une taxe qui, il est vrai, fait presque l’unanimité contre elle, et pas seulement chez Air France. On ne doit pas s’arrêter à cela !
Nos amis Toulousains ont la volonté de créer une voie dédiée à la desserte de la zone d’emploi la plus importante de l’agglomération, où est implanté Airbus. Cela coûtera 2,4 milliards d’euros, soit bien plus cher que l’équipement dont nous parlons. J’aurais honte qu’ils nous passent devant en réalisant cet investissement avant que la région-capitale ait pu faire aboutir son projet ! L’impulsion est donnée, suivons-la et les problèmes se règleront. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cela aurait pu être un beau débat. Nous attendions un vrai projet, mais je dois dire que mon trouble est grand.
Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas nouveau, il l’a toujours été !
M. Philippe Dominati. Il a fallu quarante-deux ans pour essayer de corriger une anomalie française : la deuxième plateforme aéroportuaire d’Europe est dépourvue d’une liaison directe avec la capitale. Le premier responsable de cette situation est l’État, qui, bien qu’il puisse s’appuyer sur la SNCF et la RATP, auxquelles se sont ajoutés, depuis la construction de l’aéroport Charles-de-Gaulle, Réseau ferré de France et la Société du Grand Paris, n’a toujours pas été en mesure d’assurer aux Franciliens un service répondant à leurs besoins. L’Île-de-France est pourtant l’une des seules régions d’Europe où l’État dispose d’un monopole sur les transports publics. Quarante-deux ans après l’ouverture de Roissy-Charles-de-Gaulle, on se dit qu’il serait bon de recourir aux mêmes solutions que les autres pays, mais on refuse de laisser faire l’initiative privée : l’État veut toujours tout contrôler, alors que, comme l’a dit Roger Karoutchi, il n’a pas d’argent et se contente d’emboîter des structures vides, telles des poupées russes. Le contribuable paiera…
Pour autant, ce projet est en soi nécessaire. Il serait intéressant que notre aéroport international soit desservi par une liaison directe de qualité. Cependant, nombre de Parisiens, dont je suis, ne sont pas persuadés que le centre de Paris se situe gare de l’Est, terminus prévu de la ligne projetée. On peut en outre s’interroger sur la rentabilité de celle-ci, sachant par exemple qu’il en coûtera 48 euros à un couple pour rejoindre l’aéroport depuis un quartier d’affaires du centre ou de l’ouest de Paris, via, donc, la gare de l’Est…
Par ailleurs, qu’en est-il de la création d’une liaison directe et moderne entre les deux aéroports d’Orly et de Roissy-Charles-de-Gaulle, qui n’est pas abordée dans ce projet ? Faudra-t-il, là aussi, patienter une quarantaine d’années ?
Enfin, la commission des finances a entendu des représentants d’Air France, principal utilisateur de l’aéroport Charles-de-Gaulle. Lorsqu’on les interroge sur l’utilité de ce projet, ils répondent grosso modo qu’ils y sont hostiles si sa réalisation doit nuire à la compétitivité de la compagnie du fait d’un renchérissement du coût du transport aérien. Dans ces conditions, comment peut-on défendre ce projet en invoquant la nécessité de renforcer l’attractivité de Paris et de l’Île-de-France ? Je voudrais comprendre…
Les difficultés auxquelles nous nous heurtons et le malaise que j’éprouve tiennent au fait que nous débattons sur la base d’un projet très ancien, qui a fait l’objet d’une tentative de concession à un groupe connu de BTP, retenu en 2008 parmi cinq candidats. La concession a été signée en janvier 2010. En mai de la même année, lors de l’examen de la loi relative au Grand Paris, nous avons débattu du projet du Grand Paris Express. Plusieurs d’entre nous se sont alors interrogés sur l’opportunité d’intégrer à ce dernier la réalisation d’une liaison directe entre l’aéroport Charles-de-Gaulle et la capitale. Le rapporteur du texte, Jean-Pierre Fourcade, dont vous contestiez d’ailleurs, madame Bricq, les conclusions, était partisan de cette solution et estimait que le projet du CDG Express devait être abandonné, ce qui fut fait.
Le groupe ayant remporté la concession est entré au capital d’ADP, à hauteur de 3 %, cette participation étant ensuite portée à 8 %. Un changement de président entraîna un changement de politique d’ADP, le nouveau président étant favorable à la réalisation de la liaison directe, contrairement à son prédécesseur. Pourquoi le contribuable devrait-il payer ? Soyons sérieux : si ADP, ayant changé de position, considère désormais qu’une liaison ferroviaire directe et moderne reliant Paris à l’aéroport Charles-de-Gaulle est un élément essentiel d’attractivité, il lui revient de la financer. Appliquer la « règle d’or », comme l’a réclamé le rapporteur, est absolument nécessaire. Il est trop facile de verser des dividendes à ses actionnaires et de laisser au contribuable le soin de payer les équipements !
Quant à la taxe sur les passagers du transport aérien, vous avez annoncé, monsieur le secrétaire d’État, qu’elle n’entrerait en vigueur qu’en 2024. Elle vous permettra peut-être de passer à la postérité, mais il faudra que vous m’apportiez des arguments nettement plus convaincants sur le plan économique pour me décider à voter ce texte !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. On peut être contre ce projet à condition de l’appréhender correctement. À cet égard, on ne saurait souscrire à l’argumentation de ceux qui l’opposent aux transports du quotidien : cela n’a strictement rien à voir.
Le CDG Express reliera l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle au centre de Paris et a vocation à renforcer l’attractivité touristique de la capitale. Soit dit en passant, monsieur Dominati, le gouvernement Fillon avait envisagé d’autres terminus que celui qui a finalement été retenu, avant de conclure que faire un autre choix pourrait remettre en cause les TER de Picardie. Vous le savez parfaitement.
Il n’est pas très raisonnable de suggérer à nos concitoyens que ce projet d’un coût de 1,4 milliard d’euros constituerait une remise en cause des transports du quotidien, alors que le coût du Grand Paris Express dépasse 32 milliards d’euros ! Je ne nie pas les difficultés rencontrées par les Franciliens en matière de transports, mais elles ne sont pas liées au projet du Charles-de-Gaulle Express. Je rappelle d’ailleurs qu’une partie de cette somme de 1,4 milliard d’euros servira à améliorer des infrastructures utilisées par les transports du quotidien.
L’on peut être contre ce projet, penser qu’il y a autre chose à faire,…
Mme Éliane Assassi. Nous l’avons dit !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. … mais il ne mobilise pas d’argent public et l’on ne peut donc pas prétendre que sa réalisation se fera au détriment du financement des transports du quotidien. Les modes de financement sont distincts.
En ce qui concerne les incidences de la circulation du Charles-de-Gaulle Express en cas de difficultés sur le RER B, il s’agit d’une vraie question. (Mme Évelyne Yonnet opine.) Sur ce point, permettez-moi de vous renvoyer au compte rendu de mon audition devant la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale : « Je le dis très clairement : sans vouloir ignorer le CDG Express, les solutions techniques prendront naturellement en compte de manière prioritaire les trains du quotidien, en l’occurrence le RER B. » La feuille de route donnée aux techniciens est donc très claire.
M. Karoutchi a dit des choses justes sur l’état du réseau. Nous aurons l’occasion d’en débattre prochainement, et je reviendrai sur l’évolution des enveloppes financières. J’indiquerai simplement qu’il faut bien distinguer les opérations de maintenance des actions visant à la régénération du réseau. Pendant des années, l’argent qui restait n’a servi qu’à faire de la maintenance. On se contentait de boucher des trous.
Les crédits destinés à la régénération ont augmenté et l’enveloppe globale est passée de 3 milliards à 4,9 milliards d’euros cette année. L’importance des besoins et la situation insatisfaisante en Île-de-France résultent d’une histoire collective. Le Charles-de-Gaulle Express n’y est pour rien.
Madame Bonnefoy, le Gouvernement est très attentif à la compétitivité du transport aérien. Ce ne sont pas que des mots ; il y a déjà eu des actes : Air France bénéficie du CICE à hauteur de 70 millions d’euros par an. Au regard du résultat d’exploitation de cette entreprise, ce n’est pas rien !
Par ailleurs, à la suite du rapport Le Roux sur la compétitivité du transport aérien français, nous avons mis en œuvre la suppression de la taxe en correspondance. À ce jour, cette mesure représente 65 millions d’euros en année pleine.
Ces deux mesures ont amélioré le résultat d’Air France à concurrence de 135 millions d’euros.
Comme vous le savez, les compagnies aériennes se trouvent néanmoins dans une situation de fragilité. J’ai donc pris une initiative pour obtenir de la Commission européenne l’engagement d’une négociation sur la concurrence, que nous estimons déloyale, des compagnies du Golfe, notamment. Nous avons été suivis par une majorité d’États membres.
Par ailleurs, après arbitrage du Premier ministre, l’application de la taxe sur les passagers du transport aérien a été repoussée à 2024, afin de prendre en compte la situation d’Air France.
Enfin, la direction d’Air France est en train d’engager la négociation d’un plan de compétitivité et, surtout, d’un plan de développement. Le Gouvernement accompagnera les efforts qui seront faits dans ce cadre. Il n’est pas spectateur et interviendra si nécessaire.
M. Didier Guillaume. C’est très clair !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Voter ce texte tout en maintenant la règle d’or reviendrait à convoquer les obsèques du Charles-de-Gaulle Express… On me dit que cette règle est intangible et doit être respectée. C’est une position nouvelle de votre part. En effet, alors qu’un décret de 1997 prévoyait déjà que SNCF Réseau ne pourrait pas participer à des investissements futurs, vous avez pourtant choisi de déroger à cette règle pour le financement du TGV Grand Est. Votre assemblée a ainsi décidé, à titre exceptionnel, d’aggraver l’endettement de SNCF Réseau, et elle a eu raison de le faire, car sinon cette ligne à grande vitesse n’aurait pas vu le jour.
M. Didier Guillaume. Bien sûr !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Nous proposons que SNCF Réseau investisse uniquement en fonds propres, au côté de partenaires privés, tel ADP aujourd'hui, qui seront attentifs au résultat d’exploitation : cela devrait rassurer ceux qui craindraient que ce ne soit pas le cas de SNCF Réseau.
Le risque d’exploitation sera supporté par le concessionnaire. À ceux qui s’inquiètent d’une privatisation, je rappelle que des acteurs publics peuvent aussi répondre à l’appel d’offres, dans les mêmes conditions que les entreprises privées.
La seule question qui demeure est celle de l’attractivité. Elle doit être prise en compte dans la politique globale de l’État, car on ne peut se borner à répéter qu’il faut faire revenir les étrangers à Paris pour que notre capitale reste la première destination touristique au monde. Il faut aussi poser des actes pour remédier à nos lacunes, en l’occurrence en créant une infrastructure telle qu’il en existe déjà dans beaucoup de pays au monde, et promouvoir du même coup la candidature de la France à l’organisation des jeux Olympiques et de l’Exposition universelle.
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, j’espère que le Sénat voudra bien soutenir ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Nicole Bricq. Bravo !
M. le président. La discussion générale est close.
6
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour un rappel au règlement.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Le groupe CRC souhaite saluer l’action de collectifs féministes qui appelaient les femmes à cesser le travail aujourd'hui à 16 heures 34, pendant vingt-sept secondes, afin de dénoncer les discriminations et les inégalités salariales dont elles font toujours l’objet. (Exclamations amusées sur certaines travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.) Cela fait sourire certains, mais je leur rappelle que l’écart salarial entre hommes et femmes est encore de 19 % !
Mme Catherine Procaccia. Ce ne sont pas les inégalités qui nous font sourire, mais les vingt-sept secondes !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous devons nous associer à toute initiative permettant de faire connaître et de soutenir ce combat pour l’égalité. (Applaudissements sur la plupart des travées.)
M. le président. Ma chère collègue, acte vous est donné de ce rappel au règlement.
Pour nous associer à cette initiative, je propose, avant que nous abordions l’examen du second texte inscrit à l’ordre du jour, de suspendre la séance, et pour un peu plus longtemps que vingt-sept secondes ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste et républicain.)
7
Liaison ferroviaire Paris-aéroport Charles-de-Gaulle
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle.
Je rappelle que la discussion générale a été close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre paris et l’aéroport paris-charles de gaulle
Article 1er
(Non modifié)
L’ordonnance n° 2016-157 du 18 février 2016 relative à la réalisation d’une infrastructure ferroviaire entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle est ratifiée.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l'article.
Mme Laurence Cohen. Le CDG Express coûtera davantage que l’ensemble des investissements prévus pour le réseau des transports d’Île-de-France sur la période 2015-2020. Ce n’est pas sérieux !
Les élus franciliens connaissent bien ce projet. Cela fait des années que nous en entendons parler. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est loin de faire l’unanimité. Pour qui connaît les vrais besoins des usagers des transports franciliens aujourd'hui, il apparaît bien éloigné des réalités…
Si l’on consultait les Franciliens sur l’opportunité de réaliser cette ligne au coût exorbitant, je ne donnerais pas cher de son avenir… Vous me direz que cela s’explique, puisque ce projet n’est pas conçu pour eux ! Sa mise en œuvre risquerait juste de dégrader encore un peu plus leurs conditions de transport, puisque le CDG Express est censé emprunter, sur une bonne partie de son parcours, les voies du RER B.
Comme l’a souligné Pierre Laurent en mai dernier à l’occasion d’une question orale, les créneaux horaires réservés aux rames du CDG Express sur la ligne reliant Paris à Hirson ne pourraient plus servir à la circulation d’autres trains – je pense à la recréation de rames RER reliant directement l’aéroport de Roissy et la gare du Nord ou à de nouveaux TER.
À ce sujet, je rappelle que, en 1976, les trains du RER B assuraient la liaison directe entre Paris et l’aéroport Charles-de-Gaulle en seulement dix-neuf minutes !
Mme Éliane Assassi. C’est vrai !
Mme Laurence Cohen. De plus, il ne sera pas possible, avec un billet vendu au prix très élevé de 24 euros, d’utiliser le réseau du métro une fois arrivé à la gare de l’Est, et le CDG Express ne sera pas accessible aux usagers titulaires d’un pass navigo.
Ainsi, la création de cette ligne ne contribuera pas à une relance économique indispensable à notre pays, ni au renforcement de l’attractivité du territoire. En effet, la nécessaire modernisation du réseau ferroviaire exige davantage que la mise en service d’une ligne réservée à une poignée de personnes.
Ce n’est pas là une affirmation gratuite : le potentiel de transport du CDG Express est de seulement 22 000 passagers par jour, alors que, aujourd’hui, 900 000 passagers bien réels empruntent le RER B ! Je parle en connaissance de cause, car, comme d’autres ici, je fréquente cette ligne.
Le Gouvernement fait preuve du même mépris à l’égard des habitants des Hauts-de-France, en manœuvrant pour repousser aux calendes grecques l’échéance de la réalisation du barreau Creil-Roissy, laquelle, outre qu’elle améliorerait grandement les conditions de transport des milliers de salariés travaillant à Roissy, contribuerait à soulager le trafic sur la ligne B du RER.
En résumé, comme Éliane Assassi l’a indiqué, nous nous prononçons contre ce projet du CDG Express et pour la promotion de moyens de transport collectif qui permettent à toutes et à tous de disposer du droit à la mobilité à un tarif accessible.
Mme Éliane Assassi. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Yonnet, sur l'article.
Mme Évelyne Yonnet. Le Charles-de-Gaulle Express représente pour Paris un fabuleux projet d’avenir. Sa réalisation permettra de répondre aux enjeux de développement économique, d’attractivité et d’accessibilité de Paris via son hub international.
De plus, ce mode de transport moderne, rapide et propre permettra de relier l’aéroport Charles-de-Gaulle et la capitale dans le temps record de vingt minutes.
La mise en œuvre de ce projet dotera Paris et son aéroport d’une infrastructure de haute qualité, similaire à celles dont bénéficient les autres grandes capitales européennes et internationales. Cette ligne sera un atout déterminant pour le développement et la compétitivité de Paris dans un monde de plus en globalisé et interconnecté. Le statut de ville-monde de Paris se trouvera confirmé.
Cette infrastructure sera également un atout majeur pour l’image de notre pays et la qualité de l’accueil des touristes en France. L’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle a accueilli plus de 65 millions de passagers en 2015 et ce chiffre devrait atteindre 80 millions d’ici à 2025. Le développement touristique et le caractère de pôle d’attractivité de Paris se trouveront donc accentués.
Néanmoins, après toutes ces constatations positives et partagées, je mettrai l’accent sur plusieurs points qui méritent d’être soulignés, car ils sont très importants pour le territoire de la Seine-Saint-Denis.
Plusieurs de mes collègues sont déjà intervenus à propos de la ligne B du RER. Quelques améliorations ont été apportées à ses infrastructures ces dernières années, grâce à la mobilisation des usagers et du conseil départemental, mais le devenir de cet équipement, qui demeure très vétuste, reste un sujet d’inquiétude.
Le centre de certaines villes de mon département limitrophes de Paris n’accueillera le métro qu’en 2019. Une amélioration des lignes de tramway T4 et T8 est certes en cours en Seine-Saint-Denis. Nous avons également obtenu un nombre plus important d’autobus. Le rattrapage des transports en commun que les élus appellent de leurs vœux a commencé.
Je salue le travail qu’a mené Jean-Paul Huchon, tout au long de son mandat de président de la région, pour compenser tous les retards accumulés depuis de nombreuses années sur le territoire de la Seine-Saint-Denis. Ils creusaient les inégalités en matière d’accès à l’emploi, grevaient le développement économique et l’attractivité de ce département.
Comment penser la ville de demain si des retards subsistent et s’aggravent ? Paris ne pourra se développer sans une prise en considération de ses territoires annexes.
M. Philippe Dallier. Territoires annexes ? Ce n’est pas très respectueux !
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Évelyne Yonnet. Des questions se posent, s’agissant notamment du tarif de ce nouveau mode de transport, de son accessibilité pour les usagers, particulièrement ceux qui travaillent à l’aéroport de Roissy. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez répondu en partie aux questions légitimes de nos concitoyens.
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par Mme Assassi, MM. Billout, Bosino, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. La concomitance du CDG Express avec d’autres projets de transport, comme la ligne 17 du Grand Paris Express, le rend redondant.
Il met en danger la réalisation de la ligne 17 du futur métro du Grand Paris Express, qui reliera Roissy et le carrefour Pleyel, à Saint-Denis, et est considérée par beaucoup d’élus comme la clé du développement futur de la Seine-Saint-Denis.
Les trains du CDG Express emprunteraient les voies de la ligne K, du TER Picardie et du fret, qui sont aussi les voies de report du RER B en situation perturbée. Leur circulation aurait aussi un impact sur les lignes D et E du RER.
Autrement dit, pour transporter à peine 22 000 passagers par jour à l’horizon 2025, on dégraderait les conditions de transport de 2 millions d’autres usagers ! Encore ce chiffre de 22 000 passagers est-il généreux, puisque les études démontrent que la mise en service de la ligne 17 réduira de 15 % la fréquentation envisagée pour le CDG Express.
De plus, le montage de ce projet ne garantit pas l’exploitation par SNCF Mobilités et comporte ainsi un grand risque de privatisation de l’offre de transport public.
Même si ce risque devait ne pas se réaliser, force est de constater que l’État possède 51 % d’ADP et 100 % de SNCF Réseau. Ce dernier acteur est un établissement public, portant une dette, publique elle aussi, de près de 40 milliards d’euros. Or, le projet CDG Express, même avec un prix du billet fixé à 24 euros, n’est pas rentable.
Le Gouvernement prévoit donc d’instaurer une taxe sur les compagnies aériennes pour combler le déficit, taxe qui sera compensée par une réduction d’impôts pour les compagnies aériennes… Y a-t-il donc, dans ce montage, une part du financement qui ne provienne pas des pouvoirs publics ?
Nous vous invitons, mes chers collègues, à voter cet amendement de suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Louis Nègre, rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. L’avis de la commission est défavorable.
Le CDG Express est un service commercial destiné aux passagers aériens de Paris-Charles-de-Gaulle qui souhaitent rejoindre rapidement le cœur de la capitale. Il est indissociable du service offert par l’aéroport et ne répond pas aux mêmes objectifs que la future ligne 17 reliant Saint-Denis-Pleyel au Mesnil-Amelot, qui desservira, sur son passage, l’aéroport du Bourget et le terminal 2 de Paris-CDG.
De manière générale, il ne faut pas confondre le CDG Express avec une liaison de service public classique dédiée aux transports du quotidien. Ce projet répond à un autre objectif d’intérêt général, à savoir le soutien à l’attractivité économique de notre pays et au développement de notre principal aéroport, plus globalement à notre développement touristique et économique à l’échelle nationale.
Il ne faut donc pas opposer ce projet d’intérêt général à des missions d’intérêt général comme le transport des Franciliens : il faut les concilier. Une enveloppe de 125 millions d’euros a d’ailleurs été ajoutée au projet pour financer les investissements nécessaires au bon fonctionnement du RER B, dont la situation est dégradée.
Enfin, la dérogation au monopole attribué en droit interne à SNCF Mobilités pour l’exploitation des lignes du réseau ferré national compense le choix d’une attribution directe de gré à gré pour la construction de l’infrastructure: C’est la seule manière de rendre ce projet compatible avec le droit européen de la concurrence.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Il n’est pas raisonnable d’opposer ce projet aux transports du quotidien.
Permettez-moi d’insister sur une autre dimension de ce projet, qui n’a pas été évoquée ce soir, sans doute parce qu’elle fait l’objet d’un large consensus : son inscription dans une démarche de développement durable. La liaison CDG Express permettra de décongestionner les autoroutes A1 et A3 et de ramener la part des trajets routiers de 60 % à 40 %.
Ce projet sera réalisé sans recourir à des financements publics, contribuera à renforcer l’attractivité touristique de Paris et s’inscrit dans une démarche de développement durable : je m’étonne donc d’une prise de position aussi définitive contre sa mise en œuvre.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Cette liaison ferroviaire directe entre Paris et l’aéroport Charles-de-Gaulle est-elle nécessaire ? Dans l’affirmative, comment la financer ? Telles sont les deux questions auxquelles nous devons répondre.
Élu de ce territoire si particulier qu’est la Seine-Saint-Denis, je suis moi aussi très attentif aux conditions de transport sur la ligne B du RER.
Le projet de liaison directe remonte à l’an 2000. J’en garde un souvenir très précis en tant que maire, puisque, cette année-là, les porteurs du projet initial étaient venus m’annoncer que c’est aux Pavillons-sous-Bois que serait installée la base du chantier de construction d’un tunnel de treize kilomètres entre La Villette et Sevran, où circuleraient des navettes ne marquant aucun arrêt sur le trajet jusqu’à l’aéroport. Le projet, m’assurait-on, était financièrement équilibré. On connaît la suite…
Dans le cadre du débat public qui a suivi, un bureau d’études suisse indépendant a démontré l’existence d’une autre solution technique : dégager des créneaux sur les voies du RER B, tout en préservant celui-ci.
Chers collègues du groupe CRC, je comprends vos réticences, mais nous ne pouvons plus différer la réalisation d’un projet nécessaire pour l’attractivité de la région d’Île-de-France et qui, par contrecoup, profitera au pays tout entier. Il faut maintenant franchir le pas ! Je n’ai pas le moindre doute à cet égard.
Songeons un instant à l’image que donne de notre pays le trajet entre Paris et l’aéroport de Roissy par les autoroutes A3 ou A1 ! Pour emprunter la première tous les soirs et la seconde plusieurs fois par mois, je puis vous dire que cette image est catastrophique ! Je ne parle pas seulement des embouteillages, mais aussi, monsieur le secrétaire d’État, de l’état des abords : les candélabres ne fonctionnent plus, les murs sont recouverts de tags et l’herbe n’est même plus coupée le long de la route… C’est honteux ! Celui qui arrive à Paris a l’impression d’être n’importe tout, sauf au cœur de l’Europe ! Je pense qu’il faut régler ces problèmes-là aussi,…
Mme Évelyne Yonnet. Absolument !
M. Philippe Dallier. … mais réaliser la liaison directe est nécessaire. Je suis donc résolument contre l’amendement. (M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je me réjouis d’entendre le Gouvernement et l’ensemble de nos collègues défendre le développement du transport ferroviaire pour préserver l’environnement. Nous étions pourtant bien seuls à combattre les cars Macron… Au groupe CRC, nous ne tenons pas de double langage : nous défendons l’environnement partout, en Île-de-France, en Europe et dans le monde !
Par ailleurs, ancienne présidente de la commission de la démocratisation du STIF, je rappelle que ce projet est loin d’être soutenu par les populations. De fait, comment imaginer qu’il sera sans conséquence sur les transports du quotidien quand on connaît les galères du RER B ? Prétendre cela, c’est faire insulte à notre intelligence ! Les conditions de transport sur la ligne B du RER se dégraderont de toute évidence encore davantage.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Exactement !
Mme Laurence Cohen. Le projet initial présenté par Christian Blanc consistait à desservir les pôles d’affaires, les fameux pôles d’excellence. Les Franciliennes et les Franciliens s’y sont opposés au cours des enquêtes publiques, car ils ne voulaient pas regarder passer les trains sans pouvoir y monter. On réintroduit par la fenêtre un projet qui avait été jeté par la porte…
Notre amendement de suppression est cohérent avec les positions que nous avons toujours défendues, mais surtout avec l’intérêt des populations ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme Éliane Assassi. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.
M. Vincent Capo-Canellas. Mme Cohen a insisté à juste titre sur la galère du RER B. Usager régulier de cette ligne, je tiens à souligner l’espoir que représente, pour les voyageurs, la perspective d’une séparation des flux. En effet, il n’y a rien de pire que de se retrouver à l’heure de pointe à côté de voyageurs chargés de bagages !
M. Philippe Dallier. Exactement !
Mme Nicole Bricq. C’est évident : le RER n’est pas conçu pour le transport de bagages !
M. Vincent Capo-Canellas. Certaines estimations font espérer une baisse de trafic sur le RER B pouvant atteindre 30 %. Il faut rester prudent, mais il est sûr qu’une partie des flux vont se reporter sur le CDG Express.
Par ailleurs, l’enveloppe du projet contient aussi une enveloppe destinée à financer le renforcement et la modernisation du RER B, sur la nécessité desquels nous nous accordons tous.
Je rappelle également que le CDG Express ne sera pas financé sur crédits publics ; rien, donc, ne sera enlevé au RER B, comme M. le secrétaire d’État l’a encore répété voilà quelques instants.
Enfin, d’après les travaux de la direction régionale et interdépartementale de l’équipement et de l’aménagement d’Île-de-France, l’autoroute A1 sera totalement thrombosée à l’horizon de 2030. Il faut donc construire une liaison directe, qui sera en outre bénéfique pour l’emploi.
Sous tous les gouvernements, on essaie d’améliorer les transports en Île-de-France. Comme on part de très loin, chaque fois qu’on met l’accent sur l’un des modes, les utilisateurs des autres redoutent d’être lésés. À cet égard, il me semble que le dispositif prévu comporte un certain nombre de garanties. N’opposons pas l’amélioration des transports du quotidien et la desserte directe : il faut mener les deux chantiers de front !
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour explication de vote.
Mme Aline Archimbaud. Je suis moi aussi élue de Seine-Saint-Denis et utilisatrice du RER B. Nous sommes tous d’accord pour renforcer l’attractivité économique et touristique de l’Île-de-France, selon une démarche de développement durable.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez appelé à l’apaisement et demandé que l’on n’oppose pas l’amélioration du fonctionnement du RER B et le projet CDG Express. À ce stade, je me pose trois séries de questions.
D’abord, en ce qui concerne les financements, à quoi la somme de 125 millions d’euros qui a été évoquée correspond-elle exactement ? Tous gouvernements confondus, on a trop longtemps laissé se dégrader les infrastructures ; je pense en particulier au tunnel de Châtelet. Voilà des dizaines d’années que nous attendons, en Seine-Saint-Denis ! Quand donc des travaux seront-ils enfin entrepris ? Je ne suis pas sûre que 125 millions d’euros suffisent pour tout faire…
Ensuite, le montant de 32 milliards d’euros a été mentionné pour le Grand Paris Express, dont la ligne 17 ira jusqu’à l’aéroport Charles-de-Gaulle : pourquoi les investissements très importants réalisés dans ce cadre ne permettraient-ils pas de répondre à l’objectif de créer une liaison rapide et efficace ?
Enfin, je suis assez troublée par le débat sur la séparation des flux. D’après les estimations que j’ai pu consulter, la mise en service de la liaison directe entraînerait une réduction de 6 % du nombre de voyageurs sur la ligne B du RER, ce qui n’est pas considérable. D’ailleurs, que signifie cette volonté de séparer les publics ? Les habitants de la Seine-Saint-Denis peuvent très bien voyager au contact des utilisateurs de l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle !
Je ne vois pas pourquoi une amélioration significative et structurelle du fonctionnement du RER B et la création d’une ligne 17 rapide et efficace ne permettraient pas de relever tous les défis auxquels nous devons faire face !
Mme Éliane Assassi. Tout à fait !
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.
M. Philippe Dominati. Monsieur le secrétaire d’État, dans le propos que vous avez tenu à l’issue de la discussion générale, je n’ai pas entendu de réponses aux questions que je vous avais posées sur l’équilibre financier du projet. J’y reviens donc.
Premièrement, je voudrais savoir si Air France, principal utilisateur de la plateforme aéroportuaire de Roissy-Charles-de-Gaulle, considère la création de cette liaison directe comme utile. À ma connaissance, deux dirigeants de cette compagnie se sont déjà exprimés, pour dire qu’ils n’étaient pas favorables à ce projet, au motif que sa réalisation pèserait sur la compétitivité de l’aéroport Charles-de-Gaulle. Pouvez-vous nous apporter des éclaircissements sur cette question précise ?
Deuxièmement, qu’est-ce qui a justifié le revirement de la position d’Aéroports de Paris, dont le président actuel est favorable au CDG Express, tandis que son prédécesseur y était hostile ? Par ailleurs, pourquoi cette entreprise ne contribue-t-elle pas au financement de ce projet ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. En ce qui concerne la séparation des flux, madame Archimbaud, on peut comprendre que la présence, dans un même train, de voyageurs chargés de bagages et d’usagers du quotidien est source de difficultés pour les uns comme pour les autres.
Mme Nicole Bricq. C’est évident !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Diffuser des annonces multilingues sur le CDG Express me semble tout aussi compréhensible. Veut-on que les touristes aient pour seule option de prendre un taxi ou un VTC, alors que l’encombrement des autoroutes A1 et A3 est une évidence ? La séparation des flux n’est pas l’objet principal du projet, mais un moyen d’améliorer la situation.
Ces détails ne sont pas forcément du niveau du débat parlementaire, mais je vous indique, madame Archimbaud, que l’enveloppe de 125 millions d’euros servira au financement d’installations de retournement et d’aiguillages supplémentaires destinés à faciliter la cohabitation des deux services sur la fraction de voies qui leur sera commune. Ces informations sont au demeurant déjà connues et publiques.
Il s’agit aussi de définir les règles de priorité de circulation, qui s’appliqueront seulement en cas de difficulté. À cet égard, les consignes que nous avons données sont très claires : c’est le transport du quotidien, c’est-à-dire le RER B, qui sera prioritaire, parce que l’on peut considérer que les usagers du quotidien sont soumis à des contraintes horaires plus fortes.
Monsieur Dominati, je regrette de ne pas pouvoir répondre complètement à vos questions. Je ne sais pas quelle était la position des anciens dirigeants d’Aéroports de Paris. Par ailleurs, vous croyez savoir, apparemment, quel sera le mode de financement alternatif, alors que j’ai seulement dit, à ce propos, que nous avions renoncé à instaurer une taxe sur les passagers du transport aérien avant 2024, compte tenu des enjeux en matière de compétitivité. Vous ne pouvez pas préjuger quelles solutions le Gouvernement proposera, car, pour l’heure, nous n’en avons écarté aucune. Nous continuons à travailler sur le sujet.
Vous m’interrogez sur l’équilibre du projet. La tentative de concession privée ayant échoué, il faut trouver des recettes complémentaires et apporter des fonds propres. Nous avons pris le taureau par les cornes et fait le nécessaire pour que le projet réussisse.
En ce qui concerne Air France, il n’est pas surprenant que ses dirigeants n’aient pas montré d’enthousiasme à l’idée de contribuer immédiatement au financement du projet. En revanche, les responsables d’Aéroports de Paris et d’Air France, qui sont de grands chefs d’entreprise, sont évidemment intéressés par la construction d’un équipement qui confortera l’attractivité de l’aéroport Charles-de-Gaulle, et donc leur activité.
Il faut bien voir que le CDG Express est un projet de développement économique avant d’être un projet de transport. (Mme Nicole Bricq opine.)
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. Je sais bien que pragmatique ne rime pas toujours avec politique, mais j’aimerais tout de même comprendre, monsieur le secrétaire d’État, comment la circulation de trains directs et d’omnibus sur les mêmes voies pourra être sans incidence sur le cadencement des rames du RER B…
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. C’est évidemment impossible !
Mme Éliane Assassi. Je reviens sur la question du fret, faute d’avoir obtenu une réponse sur ce sujet, que j’avais soulevé en intervenant dans la discussion générale. Aux termes du rapport de l’enquête publique, « les voies ferrées existantes qui seraient empruntées par le CDG Express sont utilisées aujourd’hui par différentes circulations : des trains de passagers, mais aussi des trains de fret qui entrent ou sortent de l’Île-de-France depuis et vers les territoires situés à son nord-est ». Ce rapport évoque le risque que le CDG Express provoque des perturbations de ces trafics : je n’invente rien ! Veut-on donc que les marchandises soient davantage encore transportées par voie routière ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 1er bis
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 3, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
La réalisation de l'infrastructure ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle prévue par l'ordonnance n° 2016-157 du 18 février 2016 précitée ne peut faire l’objet d’aucun financement direct de l’État hormis les seuls frais déjà ordonnancés et ceux relatifs à la rupture des relations contractuelles afférentes audit projet, dans le respect des règles de droit commun.
Toute clause contraire est réputée non écrite.
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. En avril 2010, lors de l’examen du projet de loi relatif au Grand Paris, j’avais déjà présenté un amendement visant à prévoir que le projet du CDG Express ne pourrait bénéficier d’aucun financement direct de l’État. Il avait été adopté à l’unanimité de notre assemblée, contre l’avis du Gouvernement, mais avec le soutien implicite du secrétaire d’État Christian Blanc. J’avais fait valoir deux arguments.
D’abord, j’avais expliqué que le métro automatique comprendrait une liaison Roissy-La Défense-gare Saint-Lazare. À l’époque, on parlait déjà d’une rupture de charge à Saint-Denis Pleyel, en espérant que la RATP et la SNCF trouveraient une solution pour l’éviter.
Ensuite, j’avais souligné que le plan de modernisation de la ligne B du RER annoncé en 2009 par la RATP et la SNCF, avec une échéance fixée à 2012, prévoyait un doublement des voies et un investissement minimal de 250 millions d’euros, coordonné par le STIF.
Aujourd’hui, je suis obligé de constater, d’une part, que le problème de la rupture de charge à Saint-Denis Pleyel n’a pas été résolu, et, d’autre part, que les efforts annoncés en faveur de la modernisation du RER B sont loin d’avoir été faits. Dans ces conditions, je ne puis que retirer cet amendement. Je ne l’aurais pas déposé en 2010 si j’avais su ce que je sais aujourd’hui !
Je soutiens le projet de loi et je souscris aux arguments présentés par plusieurs de nos collègues, en particulier Vincent Capo-Canellas.
Je retire l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 3 est retiré.
L'amendement n° 5, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après le premier alinéa du I de l’article L. 2111-3 du code des transports, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le 2° de l'article L. 2111-10-1 n’est pas applicable à la participation de SNCF Réseau au financement de la société mentionnée au premier alinéa du présent I. »
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Peut-on voter ce projet de loi et se dire favorable au projet du CDG Express tout en supprimant la dérogation prévue à la règle d’or ? Si la procédure législative devait aboutir à l’adoption d’un texte conforme à la position de la commission du Sénat, il ne resterait plus qu’à organiser les obsèques du CDG Express, faute de pouvoir associer un partenaire au financement…
C’est sur la base de nos discussions que les responsables de la société de projet devront convaincre les banques de prêter environ 1 milliard d’euros, ce qui n’est pas rien. La réponse des banques dépendra aussi des fonds propres qui pourront être apportés. Il importe, dans cette perspective, que SNCF Réseau puisse participer au financement. Nous avons conservé dans le texte la possibilité de solliciter des tiers, mais, aujourd’hui, il n’y en a pas au rendez-vous.
Si la position de la commission du Sénat devait prévaloir, le projet du CDG Express ne pourrait pas être poursuivi !
M. Didier Guillaume. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 4 rectifié, présenté par M. Capo-Canellas, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après le premier alinéa du I de l'article L. 2111-3 du code des transports, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le 2° de l’article L.2111-10-1 n’est pas applicable à la participation de SNCF Réseau aux fonds propres et quasi-fonds propres de la société mentionnée au premier alinéa du présent I, dès lors que SNCF Réseau bénéficie d’une rentabilité suffisante au titre du projet de liaison ferroviaire Paris-Aéroport Charles-de-Gaulle. »
La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. Je voudrais d’abord revenir sur l’excellente question qu’a posée notre collègue Philippe Dominati au sujet de la différence de position entre l’ancien président d’Aéroports de Paris et l’actuel.
Mes fonctions passées et présentes m’ont donné l’occasion d’échanger avec l’un et l’autre.
Sans trahir de secret, je puis témoigner que Pierre Graff soutenait le projet, qu’il jugeait essentiel pour la plateforme aéroportuaire. Seulement, en grand serviteur de l’État, il considérait que le Gouvernement devait décider ; par ailleurs, il avait bien conscience que des difficultés majeures se posaient. Pour sa part, Augustin de Romanet estime que la question est centrale pour l’attractivité du hub et qu’il faut la traiter nonobstant les difficultés. Il y a peut-être aujourd’hui de la part d’ADP un soutien au projet plus affirmé et plus direct, mais Pierre Graff y était lui aussi clairement favorable.
J’en viens à l’amendement n° 4 rectifié. Il me semble que le dossier du CDG Express a atteint un degré de maturité tel que soit il aboutit maintenant, soit il faudra, sinon l’enterrer, comme l’a dit M. le secrétaire d’État, du moins le refermer pour très longtemps. J’estime pour ma part que nous ne pouvons pas nous permettre un échec sur un projet aussi important pour l’attractivité du pays !
La règle d’or est une bonne règle, mais, dans le cas d’espèce, si l’on en fait une application stricte, elle aura un effet couperet : prévoir une dérogation est donc nécessaire pour éviter cela. Sinon, on ne pourra pas demander aux banques de prêter 1 milliard d’euros.
Par cet amendement de compromis, je propose de rappeler l’importance de la règle d’or, tout en aménageant son application dans le cas d’espèce, compte tenu de l’existence d’un certain nombre d’assurances. La participation de SNCF Réseau à la société de projet pourra seulement prendre la forme d’un apport de fonds propres et de quasi-fonds propres, étant entendu que le montant total des fonds propres de la société sera partagé avec Aéroports de Paris. Grâce à ces fonds propres, la société de projet pourra lever l’emprunt nécessaire. La participation de SNCF Réseau à la société de projet sera conditionnée à l’obtention d’un niveau de rentabilité permettant de rémunérer l’ensemble des risques pris par SNCF Réseau.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Louis Nègre, rapporteur. Si tout le monde s’accorde sur l’intérêt de la création du CDG Express, je répète que celle-ci pose un problème de principe que, monsieur le secrétaire d’État, vous avez écarté d’un revers de la main. Quant à mon collègue Capo-Canellas, il défend deux idées selon moi incompatibles…
La commission a finalement émis un avis favorable sur les amendements nos 5 et 4 rectifié, mais, à titre personnel, j’y reste défavorable, fidèle à la position initiale de la commission. Ce revirement est au demeurant révélateur du trouble de cette dernière, les deux amendements n’étant pas totalement compatibles.
Le Gouvernement invoque deux artifices juridiques pour justifier un écart à la règle qu’il a lui-même introduite.
Premièrement, il s’agirait davantage d’un investissement de maintenance du réseau actuel que d’un investissement de développement. Pourtant, l’ARAFER considère qu’il s’agit sans ambiguïté de réaliser un projet de développement du réseau ferré national…
Deuxièmement, il s’agirait non pas d’un investissement direct, mais d’une prise de participation au capital d’une société de projet qui réalisera elle-même les investissements, de sorte que les risques financiers se trouveront dilués. Il n’en reste pas moins que l’opération aggravera l’endettement du système ferroviaire de plusieurs centaines de millions d’euros, ce qui constitue une violation directe de la règle d’or que le Gouvernement nous a demandé d’adopter voilà à peine deux ans.
Pour sa part, notre éminent collègue Vincent Capo-Canellas propose d’instaurer une dérogation à la règle d’or circonscrite à une participation en fonds propres et quasi-fonds propres et assortie d’une exigence de rentabilité suffisante. Mon cher collègue, cette formule ne résout rien, la règle d’or n’ayant pas pour objet de distinguer l’endettement rentable de l’endettement non rentable : son instauration traduit simplement le fait que le volume de la dette ferroviaire est trop élevé et qu’il faut le réduire avant d’envisager de nouveaux investissements. Il faudrait d’ailleurs savoir ce qu’est une « rentabilité suffisante », d’autant que, en parallèle, on prévoit de taxer les passagers aériens, précisément parce que l’autofinancement du projet est impossible.
Dans cette affaire, monsieur le secrétaire d’État, l’attitude du Gouvernement est étrange. En effet, faute de décret d’application, la règle d’or n’est formellement pas applicable, conformément à l’article L. 2211-10-1 du code des transports, puisque le mode de calcul du ratio d’endettement n’est pas connu à ce jour. La règle étant inapplicable, il n’y avait pas lieu, selon nous, de prévoir la possibilité d’y déroger. En le proposant, le Gouvernement a attiré l’attention sur ce point, et nos débats serviront à connaître l’intention du législateur, alors que, en leur absence, il aurait été plus facile à un juge d’écarter la règle inapplicable en cas de contentieux. En d’autres termes, le Gouvernement a lui-même créé la situation d’insécurité juridique qu’il souhaitait prévenir…
Par ailleurs, la suppression de cette dérogation inacceptable ne signerait pas la mort du projet. Je le répète : nous pouvons faire confiance à l’ingéniosité de Bercy pour trouver une autre solution, par exemple un système d’avances remboursables. C’est une piste possible.
Enfin, le sujet excède largement le cas du CDG Express et pose une question de principe d’ordre institutionnel. Il n’est pas possible de prendre le Parlement ainsi en otage. Nous ne pouvons pas voter une règle aussi importante pour la maîtrise des finances publiques et l’écarter à la première difficulté.
Monsieur le secrétaire d'État, le Gouvernement doit prendre ses responsabilités et assumer l’exécution des lois qu’il propose : il y va de notre crédibilité à tous !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 4 rectifié ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. M. le rapporteur nous explique qu’il existe d’autres solutions que déroger à la règle d’or. Pour autant, j’aurais préféré qu’il propose autre chose que faire confiance à l’ingénierie technique de Bercy… Il me semble que c’est tout de même au Parlement que le débat doit avoir lieu, en toute transparence.
Cela étant dit, je comprends que le rapporteur s’interroge sur l’opportunité de mentionner dans la loi la dérogation visant à permettre la participation de SNCF Réseau au financement. Toutefois, il faut tenir compte de l’échéance. Près de deux mois ont été perdus, le Conseil d’État ayant souhaité connaître l’avis de l’ARAFER avant de se prononcer sur le projet de décret. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement n’a pas pu publier le décret.
On peut se demander si le financement du projet s’inscrit vraiment dans le cadre de la règle d’or, dès lors qu’il s’agit d’un actif d’une nature particulière, du fait de la perception d’une redevance et d’une mise en concession, et que des acteurs privés interviennent. Nous aurions pu avoir ce débat, mais ne pas prévoir de dérogation aurait représenté une prise de risque bien inutile, car on ne sait quelle pourrait être la décision d’un juge le cas échéant. Le Gouvernement a donc voulu sécuriser le dispositif. De ce point de vue, la sécurisation est totale, car l’absence de financement public est inscrite dans la déclaration d’utilité publique.
Je mets donc chacun en garde : retenir une solution comportant un financement public nous exposerait probablement à de grandes difficultés. À chacun de prendre ses responsabilités !
Je salue les efforts de M. Capo-Canellas, mais, honnêtement, faire référence à une « rentabilité suffisante » soulève tout de même une difficulté au regard de la nécessaire précision de la loi… Ajoutons que, de manière indirecte, cela revient à garantir une rentabilité suffisante aux actionnaires concernés, qui n’en demandent pas tant !
Tout en comprenant votre démarche, monsieur le sénateur, qui va d’ailleurs plutôt dans son sens, le Gouvernement ne peut qu’émettre un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Après l’adoption de l’article 1er, le projet est « sur les rails », si j’ose dire… Reste la question de son financement.
J’entends les arguments du rapporteur : il est vrai que s’affranchir ainsi de la règle d’or pose un problème aux parlementaires que nous sommes. Cela étant, je crains fort que, s’il suit la position du rapporteur, le Sénat ne donne le sentiment qu’il a décidé l’enterrement du projet.
Je voudrais profiter de cette occasion pour pointer de nouveau la responsabilité des porteurs du projet : si nous en sommes là aujourd’hui, c’est bien parce que l’on nous a dit et répété dès l’origine, en 2000, que le projet s’autofinancerait sans difficulté grâce aux recettes de billetterie et qu’il ne serait pas nécessaire de recourir à l’argent public ! On voit ce qu’il en est en réalité…
J’étais de ceux qui, en 2010, trompés par ce discours, se sont opposés à tout financement public pour le CDG Express. Aujourd’hui, il faut se rendre à la raison : manifestement, le projet ne s’autofinancera pas.
Dès lors, quelle solution retenir ? Demander à l’État de sortir le chéquier pour boucler le financement de l’opération paraît difficile, étant donné l’état des finances publiques. Je comptais d’abord suivre l’avis du rapporteur, mais je vais plutôt finalement me rallier à l’amendement de notre collègue Vincent Capo-Canellas, dont le dispositif me semble constituer le meilleur compromis. En le votant, le Sénat manifestera qu’il est indispensable de faire aboutir ce dossier.
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.
M. Vincent Capo-Canellas. Ce qu’une loi a fait, une autre peut l’adapter en cas de nécessité. Nous voulons tous que ce projet aboutisse ; pour l’heure, il ne peut avancer en raison des contraintes accumulées. Je remercie Philippe Dallier des propos positifs et utiles qu’il vient de tenir : il s’agit de sortir du dilemme actuel.
Il faut trouver la bonne solution en tenant compte aussi des nécessités du marché. Je rappelle qu’il faut trouver 1 milliard d’euros de financement bancaire. Dans cette perspective, il importe que le dossier soit défendable.
L’absence de financement public est inscrite dans la DUP, comme l’a rappelé M. le secrétaire d'État, mais elle l’est également à l’article 2 de la loi relative au Grand Paris. Si l’on prévoit un financement public, il faudra donc aussi revenir sur cet article : nous n’en avons pas fini !
M. Vincent Capo-Canellas. On peut bien sûr débattre de la notion de « rentabilité suffisante », la formulation peut sans doute être améliorée, mais il n’en demeure pas moins que l’investissement devra être rentable. ADP est une société cotée : elle peut faire des efforts, mais il existe tout de même des règles de gouvernance, des contrôles, des actionnaires minoritaires…
On pourrait vous reprocher, monsieur le secrétaire d'État, de ne pas nous présenter un financement parfaitement bouclé. Sachant que la taxe sur les passagers du transport aérien ne sera pas instaurée avant 2024, la rentabilité tiendra à l’apport à d’autres ressources : il faut trouver environ 50 millions d’euros par an. La difficulté n’est tout de même pas telle qu’elle ne puisse être surmontée ! J’attends d’entendre le Gouvernement sur ce point.
En tout état de cause, la solution de compromis que je propose me semble acceptable. Le débat pourra se poursuivre au cours de la navette.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.
M. Philippe Dominati. Je partage le point de vue du rapporteur : si la règle d’or doit être bafouée dès sa première application, autant l’abroger !
Que se passera-t-il en cas de dépassement du budget prévisionnel ? Les derniers grands projets réalisés en Île-de-France en ont tous connu d’importants, de l’ordre de 50 % pour la ligne Meteor, dont le coût de réalisation est passé de 4,4 milliards à 6 milliards d’euros, ou de 20 % pour Éole. Comment sera financé un éventuel surcoût ?
Rappelons-nous la création de la ligne Orlyval, dans le cadre d’un partenariat public-privé. Elle a fait faillite très rapidement, en raison d’une fréquentation insuffisante, et la région a dû se substituer à l’exploitant et assurer le financement de la ligne pendant vingt ou vingt-cinq ans. Que se passerait-il si le présent projet connaissait la même mésaventure ?
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Si la commission a finalement donné un avis favorable sur ces amendements, après avoir émis un vote contraire il y a une dizaine de jours, cela tient tout simplement au fait que la réunion de la commission s’est tenue en tout début d’après-midi et que peu de ses membres étaient présents…
Mme Évelyne Didier. Nous étions là, nous !
M. Hervé Maurey, président de la commission. Ce vote n’est donc pas forcément représentatif de la sensibilité de la commission ! (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Éliane Assassi. C’est ça, la démocratie ! Ce sont les présents qui votent !
M. Hervé Maurey, président de la commission. La démocratie, c’est peut-être de me laisser parler, madame ! Je comprends que mes propos vous gênent, mais laissez-moi m’exprimer !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ils ne nous gênent pas !
M. Hervé Maurey, président de la commission. Je voudrais, à la suite du rapporteur, souligner l’importance de respecter cette règle d’or que nous avons nous-mêmes votée à plusieurs reprises.
Nous l’avons en effet inscrite dans la loi portant réforme ferroviaire, en 2014, puis confirmée lors de l’élaboration de la loi Macron, Vincent Capo-Canellas étant président de la commission spéciale. Aujourd’hui, nous en attendons le décret d’application. Or on voudrait déjà déroger à cette règle ! Je trouve cela assez extraordinaire ! Nous tendons le bâton pour nous faire battre !
Au-delà de cette question de principe, il faut bien voir que si cette règle a été adoptée, c’est pour tenter de mettre fin à la situation d’endettement colossal et dramatique de la SNCF. La dette de la SNCF, dont il n’a guère été question dans ce débat, continue d’augmenter : en incluant SNCF Réseau et SNCF Mobilités, l’endettement s’élève à 50 milliards d’euros et s’accroît de près de 3 milliards d’euros par an. La SNCF espère stabiliser cette dette autour de 60 milliards d’euros d’ici à dix ans, si tout va bien…
Je veux bien entendre qu’il est nécessaire de réaliser le CDG Express. Je suis même tout à fait favorable à ce projet, mais il faut trouver une solution de financement autre, afin de ne pas charger davantage encore un baudet, la SNCF, dont la situation financière est déjà très difficile. N'oublions pas que la SNCF aura bientôt à faire face à l’ouverture du réseau ferroviaire à la concurrence : ce n’est pas en continuant de plomber son bilan qu’on l’y aidera !
Je profite d’ailleurs de l’occasion, monsieur le secrétaire d'État, pour rappeler que le Gouvernement a finalement refusé, en septembre, d’alléger la dette de la SNCF, contrairement aux assurances données aux mois de mai et de juin par le Premier ministre devant l’Assemblée nationale.
Il faut trouver des solutions permettant à la fois de ne pas déroger à la règle d’or et de ne pas aggraver davantage la situation financière de la SNCF.
M. le président. En conséquence, l'article 1er bis est rétabli dans cette rédaction.
Article 1er ter (nouveau)
Le 3° du IV de l’article L. 2111-3 du code des transports est abrogé. – (Adopté.)
Article 1er quater (nouveau)
Au second alinéa de l’article 2 de l’ordonnance n° 2016-157 du 18 février 2016 relative à la réalisation d’une infrastructure ferroviaire entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle, les mots : « au plus tard le 31 décembre 2017 » sont remplacés par les mots : « dans le délai de validité de l’acte déclarant d’utilité publique la réalisation de cette infrastructure ferroviaire ». – (Adopté.)
Article 2
(Non modifié)
L’article L. 2111-3-1 du code des transports est ainsi modifié :
1° La référence : « L. 1242-2 » est remplacée par la référence : « L. 1241-2 » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’État désigne l’exploitant du service de transport de personnes mentionné au premier alinéa du présent article au terme d’une procédure respectant les principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 2
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Roger et Mme Yonnet, est ainsi libellé :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La liaison ferroviaire entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle desservira deux arrêts sur le territoire du département de la Seine-Saint-Denis.
La parole est à M. Gilbert Roger.
M. Gilbert Roger. Une enquête publiée dans les journaux Aujourd’hui en France et Le Parisien montre que, pour le seul mois d’octobre, on comptabilise deux heures et neuf minutes d’incidents sur la ligne B du RER, et trois heures et vingt-trois minutes sur la ligne E, que j’emprunte tous les jours. Des progrès semblent possibles !
Le CDG Express doit améliorer la fluidité du trafic et permettre aux habitants de la Seine-Saint-Denis ou aux salariés de la plateforme aéroportuaire de rejoindre celle-ci sans devoir obligatoirement transiter par Paris intra-muros. Cette nouvelle liaison ne doit néanmoins pas être réalisée au détriment de l’entretien du réseau et de la qualité de la desserte des lignes K du Transilien et B du RER, qui sont empruntées quotidiennement par des centaines de milliers de voyageurs. À ce jour, aucun élément de nature à nous rassurer ne nous a encore été apporté.
Le présent amendement prévoit la desserte par le CDG Express de deux petits arrêts en Seine-Saint-Denis…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Louis Nègre, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.
Le CDG Express a vocation à assurer un service commercial. En outre, la future ligne 17 du Grand Paris Express…
Mme Éliane Assassi. Voilà !
M. Louis Nègre, rapporteur. … permettra de desservir la Seine-Saint-Denis.
Comme l’a rappelé M. le secrétaire d'État, les voyageurs aériens sont une clientèle qui a des besoins spécifiques, notamment en termes de place pour ranger les bagages. Il lui faut un matériel adapté.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. L’adoption de cet amendement changerait la nature du projet : le CDG Express n’a pas vocation à faire du cabotage. Cela étant, peut-être l’objet de l’amendement est-il simplement de rappeler que l’essentiel est de conforter les transports du quotidien.
M. Gilbert Roger. Il s’agit simplement de prévoir deux arrêts en Seine-Saint-Denis !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. En tout état de cause, l’avis du Gouvernement est évidemment défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 44 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 310 |
Contre | 30 |
Le Sénat a adopté.
Mes chers collègues, avant de passer à la suite de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
8
Statut de Paris et aménagement métropolitain
Discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, relatif au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain (projet n° 815 [2015-2016], texte de la commission n° 83, rapport n° 82).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur le président, madame la vice-présidente de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, longtemps, très longtemps même, le législateur a considéré que Paris, ville unique au monde à de nombreux égards, devait être doté d’un cadre institutionnel particulier, pour ne pas dire d’exception.
C’est que, de la Révolution à la Commune, le peuple de Paris a toujours suscité la méfiance des gouvernants, et ce d’autant plus que la ville est aussi le siège des institutions de la République. L’historien Louis Chevalier a dépeint avec talent et minutie ce Paris-là dans son ouvrage intitulé Classes laborieuses et classes dangereuses.
Dès 1795, la loi du 19 vendémiaire an IV divise la ville en douze arrondissements, dotés chacun d’un maire et de deux adjoints nommés par le Gouvernement. Paris est alors dirigé par le préfet de la Seine, titulaire à la fois des fonctions préfectorales et des fonctions municipales, et par le préfet de police, responsable du maintien de l’ordre.
Sous le Second Empire, le décret d’annexion des communes limitrophes de 1859 élargit le territoire parisien en le dotant de vingt arrondissements au total.
Puis la IIIe République naissante fait adopter plusieurs lois importantes, notamment celle d’avril 1871, qui consacre l’élection des maires des communes de plus de 20 000 habitants, et celle d’avril 1884, relative aux libertés communales ; ces lois ne s’appliquent cependant pas à Paris.
Ainsi, la ville est volontairement maintenue dans un état de dépendance ; les maires sont nommés par décret du Président de la République et sont sous l’autorité du préfet de la Seine. Paris reste également dépourvu d’un conseil municipal élu et n’est pas doté de la clause de compétence générale.
Cette situation va perdurer jusqu’aux années soixante, au cours desquelles l’État et les élus vont avoir la même volonté d’amener Paris vers le droit commun.
En 1959 est créé, par ordonnance, le district de la région parisienne. Puis, en 1964, six nouveaux départements voient le jour, dont celui de Paris, aux frontières départementales et communales superposées. Paris devient alors une collectivité territoriale à statut particulier, le conseil de Paris exerçant les attributions antérieurement dévolues au conseil municipal, d’une part, et au conseil général de la Seine, d’autre part.
Dans le même temps, les élus parisiens se mobilisent, dès 1945, pour obtenir un élargissement de leurs prérogatives. Les parlementaires siégeant au conseil municipal de Paris déposent ainsi huit propositions de loi portant réforme du statut de Paris entre 1973 et 1974. Le Président de la République confie alors à son ministre de l’intérieur l’élaboration d’une réforme, qui aboutira à la loi du 31 décembre 1975. Son fil directeur est de faire entrer Paris dans le droit commun municipal.
Le terme de « statut » disparaît et l’article 2 dispose que la commune de Paris est régie par le code de l’administration communale, sous réserve de dispositions spécifiques. Enfin et surtout, le maire de Paris, également président du conseil général, sera élu au suffrage universel. L’élection de 1977 met ainsi fin à près de deux cents ans d’administration de la ville par l’État.
Amplifiant ce mouvement, la loi du 31 décembre 1982, la loi PML – Paris, Marseille, Lyon –, définit pour Paris, dans le contexte de la décentralisation conduite par Gaston Defferre, une organisation administrative plus proche du droit commun municipal et départemental, mais comportant encore de fortes particularités.
Le territoire parisien recouvre toujours deux entités distinctes, la commune et le département.
Les mairies d’arrondissement, conçues comme des instances de médiation entre la population et la mairie centrale, ont un rôle essentiellement consultatif et n’ont pas réellement de compétence. Il faudra attendre 2002 pour que s’opère un véritable mouvement de déconcentration, que le présent projet de loi vise à élargir de nouveau.
Mesdames, messieurs les sénateurs, procéder à ce bref rappel historique n’est pas superflu, au moment où nous vous proposons de nouvelles avancées qui s’inscrivent dans le droit fil des politiques menées par ce gouvernement et par ceux qui l’ont précédé : davantage de clarté et de simplicité dans l’exercice des compétences, davantage de décentralisation et davantage de déconcentration.
Je développerai tout à l’heure ces trois points, mais, auparavant, je tiens à dire à la représentation nationale que la réforme du statut de Paris proposée par le Gouvernement constitue, à partir de quatre thématiques, un ensemble cohérent et d’envergure.
Ces thématiques sont la fusion de la ville et du département, le renforcement des pouvoirs des maires d’arrondissement, la création d’un secteur électoral unique formé des quatre premiers arrondissements et le renforcement des pouvoirs de police du maire.
Tous ces éléments nous paraissent indissociables. C’est pourquoi – je m’en expliquerai – je vous propose de réintroduire dans le texte ce que la commission des lois du Sénat a supprimé. Sans doute l’intention du Gouvernement doit-elle être mieux expliquée – je m’y efforcerai tout au long de ce débat – afin de pouvoir être partagée. Cela concernera également la création des nouvelles métropoles, un amendement tendant à rétablir les dispositions correspondantes ayant été déposé.
Par ailleurs, le Gouvernement ne souhaite pas aller au-delà des propositions qu’il a émises ; c’est pourquoi, en matière d’extension des pouvoirs de police – là encore, je m’en expliquerai –, il ne sera pas répondu favorablement aux amendements du rapporteur.
En effet, notre objectif n’est pas d’affaiblir la commune de Paris en donnant trop de pouvoirs aux arrondissements, lesquels doivent demeurer des démembrements de la commune, sans personnalité morale.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la dualité du territoire parisien, à la fois commune et département, constitue, nous le savons, une spécificité unique en son genre.
Ce projet de loi vise fondamentalement à la modernisation du statut de Paris ; il s’inscrit dans le prolongement de la réforme territoriale engagée depuis le début du quinquennat, en simplifiant et en rendant plus lisible l’action publique pour les Parisiens.
Aujourd’hui, le département, à l’exécutif duquel ils élisent pourtant des représentants, les mêmes que pour la commune, est secondaire, voire invisible, à leurs yeux.
Cette superposition est par ailleurs anachronique ; il est donc temps d’y remédier et de mettre fin à cette « fiction institutionnelle », selon l’expression utilisée par la chambre régionale des comptes d’Île-de-France dans son rapport de 2015.
Il est par conséquent nécessaire, par souci de clarification des compétences, de finaliser l’absorption du département par la commune en les fusionnant. Si la Ville de Paris s’est effectivement engagée depuis longtemps dans la voie du rapprochement, seule la loi peut permettre d’aller au bout de la démarche. C’est l’objet du chapitre Ier du présent projet de loi.
La nouvelle collectivité à statut particulier, dénommée « Ville de Paris », exercera donc les compétences de la commune et du département à compter du 1er janvier 2019.
Au-delà, la fusion permettra des simplifications administratives pour les Parisiens, les entreprises et les associations. La constitution de guichets uniques, par exemple, simplifiera les démarches administratives et les procédures de marchés publics.
La commission des lois du Sénat n’a pas remis en cause la philosophie et les grands axes de cette réforme, saluant même la clarification qui sera ainsi apportée. Je m’en réjouis. Elle a essentiellement introduit des modifications rédactionnelles, procédant – il faut le reconnaître – à des améliorations législatives réelles.
Les pouvoirs des maires d’arrondissement avaient, quant à eux, été considérablement renforcés par la loi du 27 février 2002. Il est aujourd’hui proposé de poursuivre ce processus de déconcentration, en étendant leur délégation de signature au directeur général adjoint des services, en les associant à l’approbation des contrats d’occupation et en leur confiant la possibilité de les accorder, dès lors que leur durée est inférieure à douze ans, en leur permettant de délivrer des autorisations d’étalage et de terrasse dans leur arrondissement.
Ce renforcement de la démocratie locale à Paris passe nécessairement par les acteurs de proximité que sont les mairies d’arrondissement.
À cette fin, le texte prévoit la fusion des conseils des quatre premiers arrondissements, avec la création d’un nouveau secteur électoral. Cela renforcera la capacité d’action du secteur fusionné et lui permettra de mener des projets à hauteur des enjeux propres à cette zone centrale de Paris.
Cette disposition, je le sais, a fait l’objet de beaucoup de débats. Elle a été supprimée par votre commission. Le Gouvernement proposera de la rétablir ; nous y reviendrons et j’aurai l’occasion de vous en exposer le bien-fondé.
Quoi qu’il en soit, il s’agit d’abord et avant tout d’améliorer la représentativité des conseillers de Paris issus de ces arrondissements, afin de tenir compte des évolutions démographiques de la capitale.
En effet – je l’avais dit devant votre commission –, la répartition actuelle, déjà modifiée en 1982 puis en 2013, fait apparaître des écarts importants et même inéquitables, au point de soulever des questions de constitutionnalité.
Il faut en moyenne 13 000 habitants pour élire un conseiller à Paris, mais 17 000 dans le Ier arrondissement et 11 000 dans le IIe arrondissement. La mise en œuvre de la correction proposée aboutirait à ce qu’un siège représente 12 720 habitants, la moyenne étant ainsi approchée. Je rappelle que la projection des résultats des votes de la dernière élection municipale sur la nouvelle configuration à dix-sept secteurs électoraux au lieu de vingt ne fait apparaître aucune modification des équilibres politiques existants.
M. Yves Pozzo di Borgo. Aïe, aïe, aïe !
M. David Assouline. C’est un fait !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de loi prévoit enfin une nouvelle et importante avancée en matière de décentralisation.
À Paris, depuis le Consulat, c’est le préfet de police qui est détenteur des attributions de police générale comme de polices spéciales. Là encore, l’histoire montre une convergence très progressive vers le droit commun municipal et une diminution des pouvoirs du préfet de police, toujours fixés par l’arrêté du 12 messidor an VIII, au bénéfice du maire de Paris.
Certaines compétences ont déjà été transférées à ce dernier, en matière tant de police générale – salubrité sur la voie publique, bruits de voisinage, sûreté sur les monuments funéraires – que de polices spéciales, telles que la police de la circulation et du stationnement.
Le projet de loi prévoit d’approfondir ce rapprochement du droit commun, dans une double perspective de clarification et d’efficacité de l’action publique.
Ainsi, le maire de Paris pourra exercer les compétences relatives à la verbalisation du stationnement gênant, à la gestion des fourrières automobiles, à la police des édifices menaçant ruine, à la sécurité des parties communes des immeubles d’habitation, à la police des baignades ou à la police des funérailles, et aura de nouvelles attributions en matière de police spéciale de la circulation et du stationnement.
Ce réaménagement substantiel permettra à l’État de se concentrer sur ses missions régaliennes relatives à la sécurité publique, notamment en matière de lutte contre le terrorisme. Dans cette optique, le projet de loi transfère la police des aérodromes de Roissy Charles-de-Gaulle et du Bourget du préfet de département au préfet de police.
La police de proximité sera, quant à elle, mieux exercée, à Paris comme partout ailleurs, par le pouvoir municipal.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite aussi dire quelques mots sur les dispositions relatives à l’aménagement métropolitain, qui seront défendues par ma collègue la ministre du logement et de l’habitat durable, Mme Emmanuelle Cosse.
Ces dispositions sont, pour la plupart, très techniques. Je me limiterai, dans ce propos introductif, à en indiquer les grands axes : tout d’abord, améliorer et développer certains outils propres aux opérations d’aménagement ; ensuite, s’intéresser à l’aménagement, à la gestion et à la promotion du territoire de Paris La Défense ; enfin, proposer des dispositions relatives aux transports et à la Société du Grand Paris, notamment.
S’agissant des conditions de création de nouvelles métropoles, les échanges en commission ont été nourris et ont abouti à la suppression de l’article 41.
Nous aurons largement l’occasion d’échanger, en fin de débat, sur ce sujet, mais le Gouvernement a naturellement déposé un amendement de rétablissement du texte initial.
Nous estimons en effet que l’élargissement de la catégorie des métropoles à quelques unités nouvelles est une mesure importante, qui complète la réforme territoriale menée depuis 2012.
Les métropoles se caractérisent en effet par un niveau d’intégration élevé et par la place donnée à la contractualisation avec les départements, les régions et l’État. Un tel statut permet aux élus de ces territoires très agglomérés d’accroître la cohérence territoriale de l’action publique et de favoriser la mutualisation des moyens au service des politiques menées notamment en matière de logement ou de transports.
Au regard de ces avantages, la question de l’élargissement des possibilités d’accès à ce statut en faveur des grands centres urbains dotés d’une zone d’emploi fortement peuplée se pose légitimement.
Ces possibilités d’extension sont subordonnées au critère d’une dimension économique importante : la population des zones d’emploi de ces futures métropoles devra être supérieure à 400 000 habitants. Je reviendrai précisément, au moment de la discussion des amendements, sur les conditions posées par le Gouvernement pour qu’un territoire puisse prétendre au statut de métropole.
Avant de conclure, je veux dire un mot de la question du suffrage universel direct dans les métropoles. Un amendement du groupe écologiste vise à reporter à 2019 l’échéance fixée par la loi MAPTAM, la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, pour définir un mode de scrutin.
Compte tenu des échanges que j’ai eus mercredi dernier au ministère avec les représentants de l’association France urbaine, qui regroupe l’ensemble des présidents de métropole, j’estime que ce report constitue un bon point d’équilibre entre la position de ceux qui souhaitent que les conseillers métropolitains soient élus au suffrage universel dès 2020 et la position de ceux qui sont plus réservés en la matière. Je présenterai donc, au nom du Gouvernement, un amendement allant dans le même sens que celui du groupe écologiste.
Mesdames, messieurs les sénateurs, voilà, rapidement retracées, les grandes lignes du projet de loi soumis à votre examen. Le débat public ne pourra que l’enrichir, j’en suis certain.
En définitive, ce projet de loi, l’un des derniers du quinquennat, répond pleinement aux objectifs de clarification de l’action administrative locale, d’approfondissement de la décentralisation et d’amélioration de l’efficacité de la gestion de proximité, au service de nos concitoyens et de Paris. (MM. Roger Madec et Jean-Claude Requier applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la vice-présidente de la commission des lois, mes chers collègues, je ne présenterai pas les principales dispositions du projet de loi ni ne reviendrai sur l’histoire de Paris, ô combien intéressante et essentielle pour comprendre l’évolution du statut de cette ville, M. le ministre s’en étant chargé.
Paris se caractérise par des rapports souvent conflictuels avec le pouvoir central et des penchants insurrectionnels qui ont tracé les contours de l’histoire nationale. Paris connaît de longue date un statut dérogatoire du droit commun applicable aux autres communes françaises. Cependant, l’évolution de la démocratie a conduit le législateur à rapprocher progressivement ce statut de celui des collectivités locales ; Paris continue d’y déroger cependant, en raison de sa fonction de capitale de la France.
Avant d’évoquer les principales dispositions de ce texte, qu’il me soit permis d’aborder deux points.
D’abord, monsieur le ministre, nous accueillons avec regret, et même avec étonnement, l’engagement par le Gouvernement de la procédure accélérée sur ce texte. Rien, selon nous, ne justifie ce qui apparaît comme une démarche précipitée. Surtout, la procédure accélérée ne permet pas un débat approfondi et serein sur certaines dispositions dont l’adoption aurait pourtant des conséquences pour notre pays en matière d’aménagement du territoire. Dans le même esprit, est-il réellement opportun de revoir le régime des cercles de jeu au travers d’un texte traitant, de manière globale, des collectivités territoriales ?
Par ailleurs, je voudrais évoquer l’article 41 : à lui seul, il fait presque oublier le reste du texte, relatif au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain. Fallait-il, à nouveau, pour la deuxième fois en moins de trois ans, modifier les conditions d’accès au statut de métropole ? De ce point de vue, le débat que nous avons eu en commission, très centré sur l’aménagement métropolitain, fut assez éclairant.
C’est à l’aune de ces deux éléments que la commission des lois a adopté son texte, le mercredi 26 octobre dernier, à une large majorité.
S’agissant du statut de Paris, la commission a approuvé le principe d’une collectivité unique à statut particulier, qui s’impose presque naturellement. Cela représente en effet le point ultime de l’évolution, amorcée il y a quelques années, vers l’intégration du département et de la commune de Paris.
Sur ma proposition, la commission a adopté plusieurs amendements de précision, concernant notamment la commission permanente ou encore la création d’une conférence des maires – une telle structure de coordination entre le maire de Paris et les maires d’arrondissement permettrait de mieux associer ces derniers à la gestion et aux projets de la Ville et pourrait être le lieu d’une nécessaire déconcentration de ses compétences, aux fins de mieux répondre aux attentes des administrés.
S’agissant de la démocratie de proximité et des compétences des maires et des conseils d’arrondissement, la commission a supprimé le regroupement en un secteur unique des quatre premiers arrondissements.
Plusieurs raisons ont motivé ce choix.
Premièrement, les économies attendues d’un tel regroupement sont minimes, et surtout ne sont nullement démontrées par une étude d’impact peu convaincante – il s’agissait pour nous d’un point central, à l’heure où toutes les collectivités de France doivent fournir des efforts budgétaires.
Deuxièmement, nous sommes en droit de nous demander pourquoi le Gouvernement s’est contenté de ne prévoir qu’un seul regroupement, au lieu d’envisager une réorganisation plus large. Là encore, si ce texte avait été présenté plus tôt, et non à quelques mois de la fin de la législature, il aurait été tout à fait possible de mener cette réflexion d’ensemble, ce qui aurait permis de redonner une certaine cohérence au texte.
S’agissant des compétences des maires et des conseils d’arrondissement, la difficulté est que les arrondissements ne sont pas des collectivités territoriales au sens de l’article 72 de la Constitution. Par conséquent, renforcer leurs compétences ne peut se faire que dans un cadre contraint sur le plan juridique. La commission a préféré poursuivre l’examen de cette question jusqu’à la séance publique. Nous avons souhaité placer la notion de proximité au cœur de nos échanges. Je présenterai des amendements allant dans ce sens.
Concernant les pouvoirs de police du maire de Paris, nous pouvons nous réjouir, car le constat dressé par le Sénat il y a plus d’un an, à l’occasion de l’examen de la proposition de loi de notre collègue Yves Pozzo di Borgo, est désormais partagé par le Gouvernement.
Plusieurs amendements ont été déposés sur ce sujet. Paris doit se rapprocher du droit commun et les pouvoirs du maire doivent être renforcés. Je proposerai un compromis articulé selon un principe simple : le maintien de la compétence du préfet de police en matière de bon ordre et la possibilité, pour le maire de Paris, d’appuyer le préfet en tant que de besoin. Il sera donc possible de mettre en place une police municipale. Ce modèle, en définitive, ne fait que reprendre celui qui est applicable dans la petite couronne !
S’agissant des aménagements métropolitains, la commission a globalement approuvé les dispositifs du projet de loi, dans la mesure où ils visent, pour la plupart, à répondre à des problèmes concrets rencontrés par les acteurs de terrain.
J’en viens à l’article 41, relatif aux aménagements métropolitains, qui élargit les critères requis pour la transformation de certains établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre en métropoles.
Comment imaginer qu’un unique article puisse traiter d’un sujet aussi large ? Nous pouvons comprendre que certains élus souhaitent voir le statut de leur intercommunalité évoluer vers celui de métropole, mais la commission a considéré que l’assouplissement des critères proposé dans le texte pourrait à certains égards porter atteinte à l’équilibre des territoires et d’affaiblir la notion de métropole. Elle a estimé qu’une réflexion plus globale sur cette question s’imposait avant toute éventuelle augmentation du nombre des intercommunalités les plus intégrées.
Le texte présenté par le Gouvernement prévoit la création de quatre nouvelles métropoles. Par ailleurs, certains amendements – j’ai cru comprendre, lors de l’audition de M. le ministre en commission, que le Gouvernement y était plutôt favorable – visent à en créer encore trois autres, voire quatre… Aujourd'hui, il existe quinze métropoles sur le territoire national : leur nombre pourrait ainsi se trouver porté à dix-neuf, vingt-deux ou vingt-trois !
Tout cela a évidemment des conséquences, à commencer par la multiplication des systèmes dérogatoires permettant la création de métropoles.
Un amendement du groupe écologiste que vous avez évoqué, monsieur le ministre, a pour objet de reporter à 2019 la définition des modalités particulières d’élection au suffrage universel direct des conseillers métropolitains.
Vous savez combien ce sujet est sensible pour la Haute Assemblée. À nos yeux, l’élection des conseillers métropolitains au suffrage universel direct signe la disparition des communes. Cela, nous ne pouvons pas l’accepter ! La commune joue aujourd'hui un rôle essentiel et irremplaçable en tant que cellule de base de la démocratie territoriale.
Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Très bien !
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Mes chers collègues, ce projet de loi aurait donc mérité de plus amples travaux en amont et une ambition plus large. Surtout, il aurait mieux valu ne pas recourir à la procédure accélérée, qui, en l’occurrence, est plutôt une procédure précipitée !
Quoi qu’il en soit, la commission des lois, dans l’esprit constructif qui la caractérise, a choisi d’élaborer et d’adopter un texte plus équilibré, plus cohérent et, à bien des égards, plus audacieux ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. Roger Madec.
M. Roger Madec. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au travers de ce projet de loi relatif au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain, le Gouvernement souhaite aborder une nouvelle étape décentralisatrice dans l’organisation institutionnelle de la capitale.
Dans le prolongement de la loi du 31 décembre 1975 portant réforme du régime administratif de la ville de Paris et de la loi du 31 décembre 1982 relative à l’organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon et des établissements publics de coopération intercommunale, ou loi PLM, le présent texte vise à rapprocher le régime applicable à Paris de celui des autres communes.
En effet, Paris, en tant que ville-capitale, siège des institutions de la République, a toujours suscité la défiance du pouvoir central, ce qui s’est traduit, à travers l’histoire, par une tutelle de l’État sur les affaires municipales.
Capitale de la France, Paris est également la ville des insurrections, depuis les soulèvements médiévaux jusqu’à l’insurrection d’août 1944, sans oublier les soulèvements de 1800 et de 1848 ou l’épisode tragique de la Commune de Paris. Cette tradition frondeuse du peuple de Paris a incité le pouvoir central à se méfier du pouvoir communal.
Ainsi, du Moyen Âge au milieu des années soixante-dix, l’histoire des institutions parisiennes est dominée par la volonté du pouvoir central de limiter les possibilités d’expression autonome du corps municipal parisien. En effet, la centralisation française fait de la capitale un enjeu essentiel. Les périodes de timide libéralisation ont été suivies de reprises en main consécutives à la révolte du peuple parisien. Il a donc fallu attendre la fin du XXe siècle pour que, dans le cadre d’une démocratie apaisée, le statut de la capitale se rapproche du droit commun.
Quand l’État a décidé d’accorder plus d’autonomie à la Ville de Paris, le fonctionnement de celle-ci demeurait extrêmement centralisé. En effet, jusqu’en 1983, les commissions d’arrondissement créées par la loi de 1975 étaient, dans les faits, composées aux deux tiers par les soins du maire de Paris, seul un tiers de leurs membres étant élus au suffrage universel. Ce n’est qu’avec la loi du 31 décembre 1982 que les conseils d’arrondissements ont été institués et élus au suffrage universel.
Après l’élection de Bertrand Delanoë; en 2001, la Ville de Paris a engagé une politique de décentralisation et de déconcentration entre la mairie centrale et les mairies d’arrondissement, ainsi que de renforcement de la démocratie locale, avec la création des conseils de quartier.
C’est dans la continuité de cette action que se place la maire de Paris, Anne Hidalgo, en appelant à une nouvelle étape dans l’organisation de la Ville de Paris. C’est en tenant compte du vœu des élus parisiens que le Gouvernement de Manuel Valls propose aujourd'hui au Parlement de poursuivre l’évolution du statut de Paris au travers de ce projet de loi.
Je regrette que la majorité sénatoriale ait entrepris de modifier le texte en profondeur, même si les travaux de la commission des lois se sont déroulés dans un esprit constructif.
J’évoquerai d’abord les dispositions qui figuraient dans le texte initial.
Le projet de loi s’organisait selon deux axes : d’une part, la réforme du statut de Paris et l’aménagement métropolitain, au travers des quarante premiers articles ; d’autre part, à l’article 41, l’assouplissement des critères pour l’accès au statut de métropole, afin d’ouvrir celui-ci à quatre établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.
La réforme du statut de Paris répond à plusieurs objectifs.
Le premier est la fusion des deux collectivités territoriales en une collectivité unique à statut particulier, au sens de l’article 72 de la Constitution, appelée « Ville de Paris ». Cette fusion est justifiée par le Gouvernement par la mise en place de guichets uniques, la simplification de la gestion des finances locales et une amélioration de la lisibilité de la gouvernance.
En effet, la complexité excessive de l’organisation actuelle a été soulignée par la chambre régionale des comptes d’Île-de-France dans son rapport public du 2 octobre 2015 sur la gestion du département de Paris depuis 2011, qui préconisait une fusion de la commune et du département de Paris, considérant que le processus d’intégration et d’absorption du département par la commune de Paris était irréversible.
Le deuxième objectif est de renforcer la démocratie locale, en transférant aux maires d’arrondissement de nouvelles compétences de proximité. Aujourd’hui, les enjeux locaux doivent être pris en compte, et le rôle des conseils d’arrondissement dans les processus de décision doit être accru, afin de mieux associer les citoyens à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques publiques. Anne Hidalgo s’est déjà largement engagée dans cette voie.
Le troisième objectif était le regroupement des quatre premiers arrondissements de Paris en un secteur électoral unique, avec une mairie unique, pour assurer une meilleure représentativité des conseillers de Paris et mutualiser les services publics de proximité. Ce regroupement d’arrondissements en un seul secteur électoral, déjà opéré à Marseille, par exemple, est apparu nécessaire au regard des déséquilibres démographiques et des écarts importants existant entre les arrondissements.
Ces écarts avaient d’ailleurs amené le Conseil constitutionnel à censurer, à l’été 2013, le tableau fixant la répartition des conseillers de Paris. Une proposition de loi avait alors été adoptée dans la précipitation, sur l’initiative de notre collègue Jean-Pierre Sueur, par le Sénat et l’Assemblée nationale, quelques mois avant les élections municipales de 2014. L’idée d’un regroupement des quatre premiers arrondissements avait été évoquée à cette occasion, avant d’être abandonnée en raison de la trop grande proximité des élections municipales.
Le texte tend également à approfondir les transferts de pouvoirs de police entre le préfet de police et la maire de Paris, au profit de cette dernière. La poursuite de ces transferts paraît aujourd’hui nécessaire, d’une part dans un souci de simplification administrative et de meilleure prise en compte par les élus municipaux des attentes des Parisiens, d’autre part pour permettre aux services de la préfecture de police de se recentrer sur leurs missions de sécurité, de maintien de l’ordre et de lutte contre le terrorisme. La maire de Paris assumerait des pouvoirs de police spéciale de proximité, comme la police des baignades, la réglementation des manifestations sur la voie publique à caractère festif, sportif ou culturel ou la police de la salubrité des habitations et hébergements.
Une telle réforme s’inscrit dans un grand mouvement de reconquête par Paris de la plénitude de ses compétences. En effet, le maintien du traitement dérogatoire de Paris n’a plus lieu d’être et nuit à l’efficacité de politiques de proximité.
Comme tous les autres maires de France, le maire de Paris doit disposer des pouvoirs nécessaires pour faire face aux problématiques essentielles de la vie quotidienne de la population. Paris doit redevenir une commune de plein exercice, sans perdre pour autant son statut de ville-capitale, siège des institutions de la République, qui justifie notamment son statut particulier en matière de sécurité.
En matière de circulation, les pleines compétences permettraient à la collectivité de mettre en œuvre une politique de lutte contre la pollution et de déplacements apaisés voulue par les Parisiens.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, avec ce projet de loi, il s’agit non pas, pour le Gouvernement, de susciter un big bang de l’organisation institutionnelle de la capitale, mais plutôt de favoriser une adaptation et un rapprochement avec le droit commun. Plus de trente ans se sont écoulés depuis l’adoption de la loi PLM. Il convient de tenir compte des profondes mutations qui ont affecté Paris ces dernières années et de répondre à l’aspiration des Parisiens à une meilleure répartition territoriale et à une gestion plus efficace des moyens.
Pourtant, on peut regretter que les représentants de la majorité sénatoriale au sein de la commission des lois n’aient pas fait le choix d’adopter une démarche constructive visant à enrichir le texte. Ils ont plutôt cherché à le dénaturer. J’espère que nos débats permettront de trouver un point d’équilibre.
Ainsi que je l’ai indiqué, le regroupement de quatre arrondissements au sein d’un secteur électoral était une solution pour remédier aux déséquilibres démographiques et aux carences dans la représentativité des conseillers de Paris. Cela aurait renforcé le pluralisme, en permettant la représentation de l’opposition locale de ces arrondissements au conseil de Paris, ce qui n’est plus le cas depuis 2014. En outre, la suppression de la péréquation pour la répartition des dotations d’arrondissement remet en cause le principe d’unité de la collectivité parisienne.
Le Sénat aurait pleinement joué son rôle en enrichissant le texte et en proposant d’autres solutions. Le statu quo ne saurait être une option. J’espère que nous n’allons pas manquer une occasion de répondre à la volonté de Paris de relever les défis et de s’adapter aux réalités contemporaines, quelques mois après l’adoption de la loi MAPTAM, qui a créé la métropole du Grand Paris.
Au-delà de nos clivages, nous aurions pu faire en sorte d’améliorer ce texte. C’est encore possible. Le texte proposé par le Gouvernement présentait un certain équilibre. Les modifications apportées par la majorité sénatoriale en commission des lois le rendent quelque peu bancal. Je reste persuadé que nous pouvons y remédier.
Une ville aussi dynamique que Paris ne peut être enfermée dans un carcan. Nous avons la responsabilité d’accompagner le mouvement de décentralisation. Le regroupement des arrondissements centraux dans un secteur électoral aurait permis d’ouvrir la voie à d’autres regroupements ultérieurs. Je n’ose imaginer ce que nous aurions entendu si nous avions ouvert ce débat ! Au regard des résultats électoraux de 2014, le regroupement d’un certain nombre d’arrondissements aurait avantagé la majorité municipale plutôt que l’opposition.
Au cours de la discussion des articles, mes collègues du groupe socialiste et républicain s’exprimeront sur les dispositions relatives à l’aménagement métropolitain et sur l’article 41. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Paris, ville-capitale, par sa proximité avec les lieux de pouvoirs, par ses révoltes et ses révolutions, a toujours suscité la méfiance du pouvoir étatique.
Depuis 200 ans, le peuple de Paris paye son obstination à vouloir prendre son destin en main.
Onze ans après la prise de la Bastille, le 14 juillet 1789, la ville de Paris a été privée de ses compétences en matière de police. Après la Commune de Paris, le peuple insurgé a été privé du droit d’élire son maire. Cette injustice n’a été levée qu’un siècle plus tard, Paris n’ayant rejoint le droit commun démocratique des communes de France qu’en 1975.
Il est temps de rendre au peuple de Paris les prérogatives démocratiques qui lui reviennent de droit ! C’est un combat historique des forces de progrès que de faire des communes le centre de la démocratie. La commune est l’échelon le mieux à même de répondre aux aspirations des citoyens, à Paris comme ailleurs.
Paris occupe une place unique aux plans démographique et économique. C’est aussi le seul territoire qui compte un seul département et une seule commune. Pour des raisons de bon sens et de facilité de gestion, il paraissait logique qu’il puisse exister un seul et unique cas en France de fusion du département et de la commune. D’ailleurs, les Parisiens ont précédé la loi et intégré ce changement depuis longtemps : pour eux, la commune et le département de Paris ne font déjà qu’un.
Mon groupe veillera à ce que cette particularité et cette exception institutionnelle ne puissent en aucun cas être « exportées » via l’adoption d’amendements cavaliers susceptibles de mettre en danger l’existence de la commune ou du département dans d’autres territoires. Les Français ont exprimé à plusieurs reprises leur attachement à ces deux échelons indispensables à leur vie quotidienne. Nos 36 000 communes et 101 départements sont autant de foyers de démocratie ; ce sont les piliers de la République et de la nation.
Je pense notamment aux trois départements de la petite couronne, qui constituent des outils indispensables pour corriger les inégalités sur des territoires que le pouvoir central a parfois abandonnés.
L’ambition des sénateurs du groupe CRC est de construire un projet au service des Parisiens. La ville doit être pensée, dans l’ordre, pour ses habitants, pour les salariés qui y travaillent et pour ses visiteurs. Les dernières réformes des collectivités ont modifié profondément les territoires sans consultation des habitants : nous voulons au contraire travailler à ce que rien ne puisse se faire sans eux. Il faut en finir avec les décisions imposées d’en haut, avec les « bouillies » législatives et technocratiques qui éloignent les citoyens des institutions. Dans cette perspective, nous proposons que soit organisée, au titre des articles 72 et 72-1 de la Constitution, une consultation des Parisiens sur la partie du projet de loi qui les concernent. Les Corses et les Alsaciens ont été, par le passé, consultés sur des modifications concernant leur territoire ; il doit en aller de même pour les Parisiens. Je suis pour ma part convaincu que le peuple de Paris a toute légitimité pour donner son avis, son éclairage sur ce projet de loi.
Quand j’évoque les salariés travaillant à Paris, je pense tout particulièrement aux agents de la mairie de Paris et de la préfecture de police. Certains d’entre eux sont concernés par les transferts de compétences ; tous le sont par la mise en place de la collectivité unique. Mon groupe propose d’amender le texte afin que ces personnels ne perdent aucun droit, ne subissent aucune modification de statut. Je vous appelle, chers collègues, à voter ces amendements. Ce serait adresser un signe important à ces agents qui font au quotidien de Paris une des plus belles villes du monde.
Permettez-moi à présent de m’attarder sur le titre II, relatif à l’aménagement métropolitain.
La présence des articles 33 à 41, dont l’objet est éloigné de celui du projet de loi, au sein d’un titre que l’on pourrait qualifier de « fourre-tout », montre bien à quel point les dernières réformes territoriales ont été produites à la va-vite. Qu’il s’agisse de la loi MAPTAM ou de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, il aurait décidément fallu davantage écouter les élus locaux et approfondir les concertations.
Ces articles montrent à quel point, à l’heure où se construit le Grand Paris Express et où s’ouvrent d’immenses chantiers qui changeront le quotidien des Franciliens, les questions qui touchent à l’aménagement occupent aujourd’hui une place centrale dans la région-capitale.
Les articles 34 à 37 du présent projet de loi répondent à ces enjeux et traitent notamment du rapprochement entre les établissements publics d’aménagement et Grand Paris Aménagement. Les discussions entre l’État et les collectivités territoriales tendaient vers un rapprochement fondé sur un modèle fédératif de coopération, sans tutelle d’une autorité sur une autre. C’est une philosophie à laquelle adhèrent nombre d’élus locaux d’Île-de-France, toutes sensibilités politiques confondues. J’espère que nous trouverons un terrain d’entente sur ce sujet, pour permettre la mise en place d’outils d’aménagement respectant les gouvernances actuelles et les projets des communes concernées.
Enfin, je ne peux que me réjouir de la suppression en commission de l’article 41, portant sur la création de nouvelles métropoles ; elle relevait du bon sens, mais je sais que certains voudraient rétablir cet article, ou pire l’étoffer.
Une telle multiplication des métropoles n’aurait aucun sens. Qu’y a-t-il de commun entre la métropole du Grand Paris et les futures métropoles de Dijon ou de Tours ?
M. Philippe Dallier. Rien !
M. Christian Favier. Avec la création des métropoles, vous avez peu à peu, sans réelle vision d’ensemble, bouleversé notre pacte républicain, fondé sur des institutions locales de proximité. Celles-ci disposaient jusque-là d’un pouvoir d’intervention décentralisé, afin de répondre aux besoins et aux attentes de nos populations. Ces diverses réformes ont été engagées sans qu’il ait été envisagé à aucun moment de donner la parole aux citoyens.
Il pourrait y avoir à l’avenir vingt-deux ou vingt-trois métropoles. Ainsi s’installerait petit à petit une autre République, toujours plus technocratique, qui ne serait plus une et indivisible, mais d’abord fédéraliste et concurrentielle. Nous rejetons cette vision de métropoles excluantes, instaurant dans la durée une dichotomie entre des périphéries fragilisées et des centres de plus en plus développés. Nous restons attachés au socle territorial, fondé sur le renforcement des communes et des départements, et à l’existence d’intercommunalités choisies.
Nous avons décidé de défendre cette vision coopérative de l’intercommunalité à travers une série de propositions. Nous souhaitons par exemple que Paris continue, même après cette réforme, à contribuer à la péréquation intercommunale et interdépartementale. Nous proposerons aussi un rééquilibrage est-ouest des agréments de bureaux, afin que tous les territoires puissent bénéficier du dynamisme économique. Ces réformes sont indispensables pour renforcer l’égalité entre les territoires de la métropole.
Prendre en compte les aspirations et les besoins quotidiens des Franciliens, respecter la démocratie citoyenne, donc la légitimité de l’ensemble des collectivités territoriales existantes, promouvoir une vision fédérative, coopérative du fonctionnement l’agglomération francilienne : voilà notre boussole ! C’est la prise en compte ou non de ces exigences qui déterminera notre vote sur le projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, « la République est forte par son État, mais aussi par ses territoires », déclarait le Président de la République le 5 octobre 2012, lors des états généraux de la démocratie territoriale.
Quatre ans plus tard, ce texte relatif au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain vient couronner, si j’ose dire, une série de réformes toutes plus dommageables les unes que les autres pour nos territoires, et particulièrement les territoires ruraux : ni la réforme de la carte régionale, ni celle des périmètres de l’intercommunalité, ni la création d’un nombre sans cesse croissant de métropoles, ni le changement des modalités de divers scrutins n’ont permis, hélas ! d’instaurer une vision politique de l’aménagement des zones interstitielles, fortement délaissées !
Une nouvelle fois, il nous faut regretter d’avoir à examiner en procédure accélérée un texte aux dispositions aussi diverses : traiter dans un même texte de la fusion du département et de la commune de Paris, de la création d’un nouveau secteur électoral, du régime des cercles de jeu, de la création d’une nouvelle catégorie de sociétés publiques locales d’aménagement et, dans la foulée, des métropoles, cela n’a pas de sens ! Certes, me direz-vous, nous y sommes désormais habitués…
Dans l’idéal – mais nous n’en sommes plus là… –, l’assouplissement des conditions d’obtention du statut de métropole aurait dû faire l’objet d’un texte spécifique. Il était pourtant réellement nécessaire de permettre au législateur d’engager le débat sur l’avenir des métropoles, et parallèlement de prendre les mesures urgentes que requiert la situation des territoires les plus enclavés, qui ne peuvent bénéficier des effets positifs du rayonnement métropolitain !
Si, financièrement, il est de bon sens de suivre les recommandations émises en octobre 2015 par la chambre régionale des comptes d’Île-de-France, en fusionnant le département de Paris et la Ville de Paris au 1er janvier 2019, il aurait été également tout à fait bienvenu que l’interdiction du cumul d’indemnités s’applique aux élus parisiens ! Au contraire, l’article 6 leur permettra de conserver, après la fusion, le même niveau d’indemnités qu’auparavant, quand ils siégeaient à la fois au conseil municipal et au conseil départemental. Le non-cumul des mandats s’accompagne donc du cumul des indemnités : on aura vraiment tout vu !
L’élargissement des critères d’accès au statut de métropole prévu au détour d’un article du projet de loi met une nouvelle fois en lumière l’incohérence globale de l’architecture dessinée par l’empilement des réformes territoriales.
Premièrement, à chaque fait urbain correspond désormais une forme de métropole : cette évolution est sans grand rapport avec l’esprit de la loi MAPTAM de 2014. Il s’agissait alors, pour le législateur, d’instituer des moteurs de croissance et de compétitivité territoriale capables de rivaliser avec leurs concurrents européens. Sans vouloir jouer les oiseaux de mauvais augure, je doute que les quatre nouvelles métropoles qui seront créées si l’article 41 est rétabli dans sa rédaction initiale devancent un jour Hambourg, Turin, Francfort ou Milan ! Restons sérieux : ne galvaudons pas la notion de métropole, sous peine de la vider de son intérêt !
Deuxièmement, une multitude de régimes différents de métropoles coexistent, créant un processus de métropolisation à plusieurs vitesses : la collectivité territoriale-métropole de Lyon, les métropoles relevant du régime de droit commun et celles pour lesquelles ce dernier est assorti de spécificités tenant à leur dimension européenne présentent des niveaux d’intégration très différents. N’aurait-on pas pu faire sans ce label métropolitain qui recouvre des réalités fort peu homogènes ? À l’’évidence, ce n’est pas le choix du Gouvernement
Cette question mérite d’autant plus d’être posée que la logique de métropolisation a déjà des conséquences négatives sur l’architecture institutionnelle locale et la vie des territoires.
D’une part, l’opportunisme financier consistant à passer à la strate intercommunale supérieure – communauté urbaine ou métropole – induit une réduction des dotations des communautés d’agglomération, mais aussi, à un degré moindre, de celles des communautés de communes pendant plusieurs années, ce alors même que le Gouvernement s’était engagé, lors de l’examen de la loi MAPTAM, à maintenir l’enveloppe pour les communautés de communes qui ne changeaient pas de statut ! Cette année, le Gouvernement s’est engagé à renforcer, dans le projet de loi de finances pour 2017, le montant de dotation globale de fonctionnement alloué aux communautés d’agglomération : que ces engagements soient tenus, ou certaines communautés se trouveront étranglées !
D’autre part, il n’est pas impossible d’anticiper la disparition progressive de certains départements par métropolisation. Le Sénat et vous-même, monsieur le ministre, avez lutté pour préserver les départements, en supprimant les transferts obligatoires de certaines compétences départementales aux métropoles contenus dans le projet du Gouvernement du 10 avril 2013, préférant adopter une logique de contractualisation. Aujourd’hui, les départements sont peu à peu dessaisis des missions justifiant leur existence et étranglés financièrement ; leur avenir est plus que jamais compromis.
Mes chers collègues, il est urgent de penser l’aménagement du territoire et des zones rurales enclavées, d’avoir une vision d’ensemble et équilibrée de notre territoire. Or ce n’est pas le choix du Gouvernement… L’État se désengage de ces territoires au profit des métropoles au nom du sacro-saint principe de la « recherche de l’efficacité de l’investissement public » !
Dans Le Monde du 7 juillet 2016, M. Jean Pisani-Ferry, commissaire général de France Stratégie, expliquait qu’« il faut miser sur la dynamique de métropolisation, on n’a pas le choix, même si elle est douloureuse pour les territoires ». La question de l’avenir des territoires ruraux plus ou moins enclavés et non limitrophes d’une métropole reste en donc en suspens. Après les contrats de ruralité, à quand un nouveau texte portant sur ces territoires oubliés ? À moins que vous ne leur proposiez d’accéder à leur tour à ce statut de métropole de plus en plus convoité ? Peut-être verrons-nous un jour Aurillac, Cahors et Mende devenir des métropoles ? (Rires.)
Mme Évelyne Didier. Et Figeac !
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le Gouvernement nous propose aujourd’hui de réformer le statut de Paris – un texte important de réforme des collectivités locales, dit-il. Un de plus ! Je ne dresserai pas la liste des textes gouvernementaux modifiant l’organisation territoriale du pays depuis 2012, car cela prendrait trop de temps. Nous n’aurions pas assez de cette séance pour le faire !
Je me contenterai de citer la loi MAPTAM du 27 janvier 2014. Ce texte important réforme notamment la métropole du grand Paris, sujet fondamental et stratégique, non seulement pour les Franciliens, mais plus largement pour le rayonnement de la France. En effet, vous le savez très bien, monsieur le ministre, le développement économique est surtout le fait des grands centres urbains. C’est pourquoi le problème du Grand Paris et de la métropole de Paris est fondamental pour l’économie du pays.
M. Philippe Dallier. Bravo !
M. Yves Pozzo di Borgo. Comment toutefois imaginer que l’on réforme la métropole du Grand Paris, puis que, deux ans plus tard, l’on modifie dans un autre texte le statut et l’organisation de la principale ville de cette métropole, la capitale de la France ?
M. Philippe Dallier. Tout à fait !
M. Yves Pozzo di Borgo. Cette méthode ne peut conduire qu’à des incohérences. Elle témoigne surtout d’un manque de vision globale sur l’organisation de la métropole parisienne.
M. Philippe Dallier. Excellent !
M. Yves Pozzo di Borgo. Or la situation n’est pas si bonne pour la métropole parisienne. Paris est une petite ville de deux millions d’habitants ; ce n’est même pas un village en Chine ! Vous le savez très bien : Paris n’existe que parce qu’il y a l’ensemble de l’Île-de-France !
M. Philippe Dallier. Oh oui !
M. Yves Pozzo di Borgo. Vous faites un texte pour un petit village !
Mes chers collègues, la réalité, nous la connaissons ; il ne faut pas l’occulter. Il était urgent pour la maire de Paris de profiter d’un gouvernement de gauche pour faire adopter une modification du statut de Paris conforme à ses désirs.
M. Philippe Dallier. Bravo !
Mme Catherine Procaccia. Bien dit, et en peu de mots !
M. Yves Pozzo di Borgo. Monsieur le ministre, Mme Hidalgo peut dire merci à ce gouvernement : il a bien suivi la commande qu’elle a passée,…
M. Hervé Marseille. C’est du bidouillage !
M. Yves Pozzo di Borgo. … à une exception près peut-être : la maire de Paris se serait bien passée du fameux article 41 sur l’extension du statut de métropole, que la commission a supprimé, avec grande intelligence. Il suffit de se rappeler les échanges qui ont eu lieu en commission des lois : c’est bien simple, les membres de la commission n’ont pratiquement parlé que de cela et n’ont quasiment pas évoqué Paris !
Pourquoi une telle disposition sans aucun lien avec le statut de Paris ? L’explication est toute simple : il s’agit d’un texte de fin de mandature, la voiture-balai du droit des collectivités territoriales en quelque sorte…
M. Philippe Dallier. Eh oui !
M. Yves Pozzo di Borgo. La méthode consistant à mélanger allègrement les sujets dans un même texte est malheureusement devenue une habitude chez vous. S’y ajoute l’engagement de la procédure accélérée : encore un grand classique !
Voilà pour la forme. J’en viens au fond. Que nous propose le Gouvernement sur le statut de Paris ? De petits ajustements, sans vision d’ensemble, sans mise en perspective avec les défis métropolitains.
On nous annonce un texte visant – je cite l’exposé des motifs – « à renforcer les missions confiées aux maires et aux conseils d’arrondissements de Paris ». En réalité, ce texte ne prévoit quasiment rien sur ce thème, sinon de permettre aux conseils d’arrondissement d’approuver les contrats d’occupation des équipements de proximité.
Monsieur le ministre, vous avez formulé un rappel historique. En 1981, après l’élection de François Mitterrand, Gaston Defferre lance la décentralisation ; en ce sens, ce fut un grand ministre de l’intérieur.
Mme Évelyne Yonnet. Oui, absolument !
M. Yves Pozzo di Borgo. En même temps maire de Marseille, il se rend compte qu’il risque d’être battu aux élections municipales suivantes, si le suffrage universel direct est maintenu.
Pour être élu de nouveau maire de Marseille en 1983,…
M. Philippe Dallier. Même en étant minoritaire !
M. Yves Pozzo di Borgo. … il décide alors de supprimer le suffrage universel direct et de créer les arrondissements de la ville de Marseille : ce seront désormais les conseillers d’arrondissements qui éliront le maire.
Le premier texte qu’il dépose contenait deux dispositions majeures : ce nouveau système électoral et, Gaston Defferre ayant le sens de la démocratie et celui de la décentralisation, une organisation donnant beaucoup plus d’importance aux mairies d’arrondissement. Or, ce texte ne pouvant concerner la seule ville de Marseille, il décide d’en étendre le champ à Paris et à Lyon. Jacques Chirac et le centriste Francisque Collomb, respectivement maires de Paris et de Lyon, soucieux de sauvegarder l’intérêt et l’unité de leurs villes, refusent. Gaston Defferre retire alors toutes les mesures concernant l’indépendance des mairies d’arrondissement et conserve le système lui permettant d’être réélu.
En 1983, Gaston Defferre obtient bien moins de voix, mais il est réélu grâce aux conseillers d’arrondissement. Il en est de même pour Bertrand Delanoë en 2001.
M. Philippe Dallier. Utile rappel !
M. Yves Pozzo di Borgo. Ces rappels s’imposent de temps en temps, car les grands choix et les grandes lois sont souvent l’émanation de petits intérêts particuliers.
Nous ne pouvons évidemment pas nous satisfaire de ce projet de loi, qui est en parfait décalage avec l’une des demandes les plus fortes de nos concitoyens – plus de proximité ! – et l’esprit de la loi PLM de Gaston Defferre. Il faut aller beaucoup plus loin est confier de réels pouvoirs et de véritables missions à ceux qui sont au plus près des problématiques des Parisiens, à savoir les mairies d’arrondissements.
Il faut rappeler la réalité des missions des vingt mairies d’arrondissement aujourd’hui. Le VIIe arrondissement équivaut à la ville de Colmar ou à celle de Cannes. Le XVe arrondissement est beaucoup plus grand que la ville de Bordeaux… Or les chiffres sont très explicites : alors que le budget de la Ville de Paris s’élève à près de 8,5 milliards d’euros, celui de l’ensemble des vingt mairies d’arrondissement de Paris n’atteint que 148 millions d’euros, et encore pour des crédits fléchés ! C’est bien une insulte faite aux conseillers d’arrondissement.
Les habitants se sentent frustrés et ils vont voir leurs maires d’arrondissement pour leur demander de résoudre leurs problèmes, lesquels n’ont ni compétence ni moyens financiers : ils n’ont que leur bonne parole. Ils passent leur temps à répondre que c’est la mairie centrale qui décide. D’un point de vue démocratique, est-il normal pour une capitale de continuer à fonctionner ainsi ?
Le projet de loi promet aussi un « renforcement des prérogatives du maire de Paris », notamment en matière de pouvoir de police. J’ai d’abord cru que le Gouvernement avait enfin entendu le message de nombreux élus parisiens, comme celui du Sénat, qui avait adopté au mois de mai 2015 un texte transférant enfin le pouvoir de police générale au maire, comme cela se passe dans les 35 818 autres communes de France, même lorsqu’elles comptent 300 habitants.
Or il n’en est rien ! Le projet de loi ne prévoit que quelques modifications en matière de pouvoirs de police spéciaux. La confiscation des pouvoirs de police du maire de Paris par le préfet, héritée de Napoléon Bonaparte, n’est-elle pas pourtant devenue obsolète ? Si les réformes de 1975, de 1982 et de 2002 ont permis un élargissement progressif des pouvoirs de police du maire de Paris, ce dernier n’a toujours pas les moyens opérationnels d’exécuter ses propres décisions.
Les 1 848 agents de surveillance de Paris, les ASP, chargés d’assurer le respect de la police du stationnement, ne sont pas placés sous l’autorité du maire, mais sous celle du préfet. Or la Ville de Paris finance tout ce personnel : chaque année, quelque 300 millions d’euros prélevés sur le budget de la Ville servent à financer 5 975 agents aux ordres du seul préfet !
La maire de Paris refuse toujours que sa « brigade de lutte contre les incivilités » soit chargée de la prévention des troubles à la sécurité publique, alors même que les agressions répétées de touristes à Paris nuisent considérablement à l’image de la capitale et à sa fréquentation touristique. Alors que le Gouvernement envisage de renforcer l’armement des polices municipales, seule Paris continue à se tenir en retrait, comme si le climat d’insécurité ne la concernait pas…
Avec le transfert marginal de quelques compétences de police spéciales que propose le Gouvernement, on rate une occasion d’agir pleinement sur l’amélioration du cadre de vie des Parisiens. Nous vous proposerons donc de rétablir les dispositions adoptées par le Sénat en 2015 sur la police municipale à Paris, à moins que nous ne nous ralliions à l’amendement du rapporteur.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, nous ne pouvons pas approuver le texte tel qu’il ressort des travaux de la commission des lois. Nous abordons donc cet examen en séance publique avec prudence : soit la Haute Assemblée est en mesure de modifier profondément ce texte en adoptant les amendements que nous soumettrons, soit le texte reste plus ou moins en l’état, c'est-à-dire conforme à la volonté du Gouvernement – et de la maire de Paris ! –, auquel cas nous ne pourrons pas cautionner cette réforme. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
M. Hervé Marseille. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la vice-présidente de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le projet de loi relatif au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain. Ce texte, les écologistes l’appellent de leurs vœux depuis fort longtemps, convaincus que seule une réforme d’ampleur du statut de Paris permettra de faire progresser l’égalité entre les Parisiennes et les Parisiens, la démocratie locale et l’efficacité des services publics.
Mes chers collègues, permettez-moi de saluer ici l’excellent travail du groupe écologiste de Paris, qui, par sa ténacité et ses propositions constructives, a sans aucun doute contribué à améliorer le texte présenté par le Gouvernement.
Nous partageons tout à fait l’idée que le statut de Paris est devenu incompatible avec les réalités contemporaines et que la coexistence de deux collectivités – commune et département –, intervenant sous la direction d’une même assemblée délibérante, est source d’une extrême complexité. La création d’une collectivité unique à statut particulier, dénommée « Ville de Paris », est une excellente décision. Les écologistes sont depuis longtemps favorables à plus de simplification administrative, donc à la suppression du département, à Paris bien sûr, mais également au sein de la métropole du Grand Paris.
M. Philippe Dallier. Très juste !
Mme Esther Benbassa. En ce qui concerne l’importante question de la répartition des compétences entre l’État et la Ville d’une part, et la mairie centrale et les arrondissements d’autre part, les écologistes souhaitent vivement le retour au droit commun et soutiennent les mesures proposées en ce sens.
Il est ainsi de bon augure que la maire de Paris se voie confier l’exercice de la police de la circulation lors des manifestations festives, sportives et culturelles non itinérantes, la majeure partie de la police de salubrité des bâtiments, la police des baignades et la gestion des voies publiques.
Rappelons ici que les niveaux de pollution de l’air dans la capitale et ses alentours constituent un enjeu majeur de santé publique et nécessitent une action immédiate et de proximité qui devrait être facilitée par le présent texte.
Dans le même sens, il nous semble tout à fait nécessaire de rééquilibrer les arrondissements ; le regroupement des quatre premiers d’entre eux est à ce titre un premier pas vers plus de rationalité et d’égalité. En effet, avec un rapport, en termes de démographie, d’un à quatorze entre le Ier et le XVe arrondissement, il est évident que la gouvernance ne peut être la même et que les habitants de ces arrondissements n’ont pas un égal accès aux services publics municipaux, dont la qualité peut largement varier selon les endroits.
Au motif qu’« une réforme plus ambitieuse de la carte des secteurs électoraux de Paris aurait permis à la fois de réduire les écarts de population entre les secteurs les plus peuplés et les moins peuplés et, en conséquence, de réduire les écarts de représentativité des conseillers de Paris au sein des nouveaux secteurs », la commission des lois a supprimé le regroupement proposé.
Le groupe écologiste regrette cette suppression, et je défendrai tout à l’heure un amendement visant à rétablir le texte proposé par le Gouvernement. Si, à terme, il nous semble indispensable de regrouper les arrondissements les moins peuplés afin qu’aucun secteur ne soit en dessous du seuil de 100 000 habitants, la fusion des quatre premiers arrondissements de Paris constitue un premier pas important qu’il ne faut pas négliger.
Soyons réalistes : le plus probable est que, à l’issue des débats, le projet de loi ne soit modifié qu’à la marge et reste amputé de certaines des avancées majeures qu’il contenait. C’est donc avec regret que la majorité du groupe écologiste ne soutiendra pas ce texte, nécessaire réforme encore une fois sacrifiée sur l’autel de l’électoralisme et des postures politiciennes.
Je terminerai en ayant une pensée, à quelques jours du triste anniversaire des attentats du 13 novembre, pour les Parisiennes et les Parisiens qui se sont montrés tellement forts et dignes. Ils ont fait preuve d’un courage immense, auquel il ne sera probablement pas rendu hommage aujourd’hui ; je le regrette. (Mme Jacqueline Gourault applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Monsieur le ministre, si j’avais entendu il y a quinze ou vingt ans le discours que vous avez prononcé, je l’aurais trouvé audacieux ! Depuis lors, toutefois, de l’eau a coulé sous les ponts et a émergé quelque chose qui semble vous avoir échappé, à savoir le fait métropolitain. Nous présenter comme un texte d’avant-garde le projet de loi dont nous débattons ce soir me semble absolument daté !
Monsieur le rapporteur, je me réjouis de votre prudence sur ce texte. Je me félicite d’ailleurs que la commission des lois ait choisi un rapporteur qui ne soit pas un élu de la région d’Île-de-France, non pas que les élus d’Île-de-France soient illégitimes pour traiter de ces sujets – je suis d’ailleurs l’un d’entre eux –, mais je trouve fort regrettable que nos collègues de province s’intéressent si peu à l’organisation territoriale de l’Île-de-France, de la métropole du grand Paris et de la Ville de Paris, alors que nous avons passé plusieurs années à en discuter.
Mme Évelyne Didier. Nous, nous sommes là !
M. Philippe Dallier. Je n’irai pas jusqu’à dire, comme Clemenceau à propos des militaires et de la guerre, que l’organisation territoriale de l’Île-de-France est trop sérieuse pour être confiée aux seuls élus franciliens, mais je souhaite que, dans ce débat, nos collègues de province s’impliquent davantage qu’ils ne l’ont fait jusqu’à présent.
À l’évidence, monsieur le ministre, nous savons bien qu’il est très difficile de trouver la bonne solution. Marylise Lebranchu en a peut-être fait les frais et s’y est brûlé les ailes. Reste qu’après toutes ces années passées au ministère, après la loi MAPTAM et la loi NOTRe, elle avait sans doute fini par comprendre qu’il fallait créer une métropole du Grand Paris qui soit puissante. Nous n’y sommes pas ! La métropole du Grand Paris est toujours embryonnaire et la région d’Île-de-France, première région économique en France, mais également en Europe, n’est pas non plus dotée de l’ensemble des compétences qui pourraient la rendre plus efficace.
Ajoutez à cela que c’est en Île-de-France que l’on trouve, au mètre carré, le plus grand nombre de chapeaux à plumes politiques, à droite comme à gauche, et vous comprendrez pourquoi nous n’avons toujours pas trouvé la bonne organisation territoriale.
Voilà qui explique notre retard – dramatique à mon sens – pour trouver la bonne solution. Il s’agit en effet de faire en sorte que Paris, ville-monde, puisse être à la hauteur de Londres, Shanghai ou New York. C’est bien l’enjeu, et il nous faudra parvenir à nous doter d’un statut permettant à cette métropole de lutter avec ses concurrentes. Ce n’est malheureusement pas ce texte qui nous y aidera : il est au contraire un bel exemple de notre incapacité à penser l’avenir à la bonne échelle.
Tout d’abord, ce texte bénéficie étonnamment de la procédure d’urgence. Yves Pozzo di Borgo l’a dit : c’est la voiture-balai de ce quinquennat. Pourtant, nous avons voté deux textes, la loi MAPTAM, la loi NOTRe : nous aurions pu parler de Paris en tant que département et de ce qu’il fallait en faire. Nous avons évité le sujet et vous y revenez, comme cela, en fin de législature. Franchement, cela ne me semble pas sérieux.
Aujourd’hui, vous continuez à penser Paris intra-muros, alors que, à mon sens, il faut largement dépasser le périphérique. Petite couronne ou au-delà : le débat est ouvert. Il faudrait poser la question du devenir des départements, celui de Paris, celui des départements de la petite couronne. Vous n’avez pas saisi cette occasion.
Pourquoi ce texte maintenant ? La réponse est évidente ! Pourquoi ce texte-là ? Pour ma part, j’y vois deux raisons : la première est budgétaire, la seconde est de pure tactique politique.
En premier lieu, la chambre régionale des comptes a régulièrement pointé les tours de passe-passe entre le budget de la Ville et le budget du département.
M. Yves Pozzo di Borgo. Oui !
M. Philippe Dallier. On s’arrange comme on peut. On sait que la situation de la Ville de Paris, en matière budgétaire, n’est pas rose : les dépenses ont flambé depuis 2001, et il faut trouver une solution. En voilà une : il n’est qu’à fusionner l’ensemble, ce qui permettra de tenir encore un peu le budget. Je me demande bien ce qu’il en sera dans cinq ou dix ans, mais ce sera une autre affaire.
En second lieu, j’ai le sentiment que l’absorption du département de Paris par la Ville de Paris se fait contre la métropole du Grand Paris,…
M. David Assouline. Pourquoi ?
M. Philippe Dallier. … ce que je trouve fort regrettable, mes chers collègues.
Comme j’aurais voulu que nous portions sur les fonts baptismaux une métropole puissante ! Nous ne l’avons pas fait. Certes, la métropole du Grand Paris dispose d’un budget de 3,7 milliards d’euros, mais savez-vous combien il lui reste pour fonctionner, une fois qu’elle a redistribué aux établissements publics territoriaux et à toutes les communes ce qu’elle doit leur rendre ?
On a évoqué tout à l’heure les 130 millions d’euros dévolus aux arrondissements de Paris. Or il reste à la métropole du Grand Paris, qui compte 7 millions d’habitants, 55 millions d’euros pour fonctionner chaque année ! Voilà bien une somme qui va permettre au Grand Paris de rivaliser avec les autres métropoles de rang mondial ! C’est absolument affligeant.
Il s’agit là d’une métropole embryonnaire, je le répète. Il va falloir revenir sur ce statut, qui n’est pas viable. Nous avons adopté le pire compromis possible, celui qui cherche à ne faire de peine à personne et qui, de fait, mécontente tout le monde.
Nous avons réussi, à une époque où la crème dans les millefeuilles territoriaux est de moins en moins épaisse, à créer un millefeuille à cinq couches : les communes, les établissements publics territoriaux, les départements, la métropole du Grand Paris, la région d’Île-de-France. On nous a présenté cela comme une grande avancée. Vous parachevez ce bel édifice avec l’absorption du département par la Ville de Paris.
M. David Assouline. Cela fait justement une couche de moins !
M. Philippe Dallier. Mes chers collègues, tout cela est tellement daté que cela ne passera pas l’année 2017. C’est en tout cas ce que je souhaite. Vivement l’alternance, dans ces conditions – à la condition, chers collègues de la majorité sénatoriale, que nous parvenions tous ensemble à trouver la bonne solution.
Je ne vous cache pas que je suis un peu inquiet. Le rapporteur est resté vigilant face à ceux qui souhaitaient, d’un simple coup de crayon, supprimer la métropole du Grand Paris au bénéfice de la région d’Île-de-France. Sur ce point, je n’hésite pas à le dire publiquement, je suis en parfait désaccord avec la présidente de la région, Valérie Pécresse ; elle le sait. Il y a la place pour une métropole du Grand Paris puissante, qui soit d’abord en charge de la cohésion urbaine et sociale de ce territoire.
Il a souvent été fait référence à l’histoire de Paris, ville frondeuse que l’État a toujours tenue sous la coupe. C’est vrai. Reste, mes chers collègues, que le problème ne se pose plus ainsi. Les faubourgs de Paris sont non plus à la Bastoche ou à Vaugirard, mais tout autour, en Seine-Saint-Denis, dans les quartiers difficiles. Si nous n’arrivons pas à créer enfin un sentiment d’appartenance positive, si nous ne partageons pas la richesse économique au sein de l’ensemble de la métropole, vous pouvez adopter tous les textes que vous voudrez, vous ne réglerez rien.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je ne pourrai voter un texte qui, même amendé, est daté, voire anachronique ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai par saluer le rapporteur, qui a pu, dans des délais assez brefs, assimiler un texte difficile et s’imprégner de l’histoire de la capitale.
Monsieur le ministre, j’ai écouté avec attention vos propos. Vous aviez bien commencé, décrivant soigneusement le long cheminement de la capitale vers un idéal de droit commun et de libertés communales. Les Parisiens ont mis deux siècles à l’obtenir ; ce fut une longue quête. Il a fallu l’évolution de la société pour que la capitale puisse retrouver un certain nombre de libertés.
Cela a sans doute été possible grâce aux institutions de la Ve République. Tous les présidents de la Ve République se sont intéressés à la région-capitale et y ont apporté leur touche : c’est naturel, puisque c’est un moteur pour l’économie nationale.
Vous l’avez rappelé, le général de Gaulle a mis en place la région d’Île-de-France et les nouveaux départements de cette région. Le président Pompidou n’a pas eu le temps de s’attaquer aux institutions de la capitale, mais il a créé le centre Pompidou, témoignant ainsi de son intérêt pour la vie des Parisiens. Le président Giscard d’Estaing a donné un maire à Paris. Le président Mitterrand a, dans un premier temps, voulu contrer ce pouvoir et disloqué la commune ; c’est en particulier la révolte du Sénat qui l’en a empêché. Comme l’a si bien rappelé Yves Pozzo di Borgo, Gaston Defferre a modifié le système électoral et associé durablement le destin de la Ville de Paris à celui des grandes villes françaises que sont Marseille et Lyon.
Pour avoir exercé les fonctions de maire de Paris, le président Chirac connaissait parfaitement la capitale et n’en a pas modifié le système institutionnel. Il a revu sa perception des pouvoirs de police du maire, car il trouvait anormal que les ministres de l’intérieur, alors liés à l’opposition municipale, aient plus de pouvoir que le maire de Paris.
Le président Sarkozy a lancé le concept du Grand Paris, notamment en matière de transports ou d’urbanisme.
Je n’ai jamais entendu le président François Hollande s’exprimer sur la région-capitale. Ses gouvernements prirent quelques initiatives – malheureuses – concernant la métropole, que Philippe Dallier vient de souligner. Ce projet, pourtant bien parti, a été technocratisé, modifié et amoindri. Pour l’instant, c’est bien cette structure hybride qu’il faudra réformer.
Venons-en à vous, monsieur le ministre. Je me rappelle un président de groupe qui défendait les collectivités territoriales ! Or l’un des derniers actes de cette législature, c’est ce texte qui ouvre la boîte de Pandore en redonnant un statut d’exception à Paris, en brisant la démarche engagée par l’ensemble des présidents de la Ve République pour que les Parisiens puissent vivre normalement leurs libertés communales. Comment pouvez-vous participer à cette turpitude ?
Je ne comprends pas comment, presque nuitamment, vous engagez cette réforme du statut de Paris sans que les Parisiens en soient réellement informés. Nous nous promenons tous les jours dans les rues de Paris ; tous les jours, nous interrogeons les Parisiens : personne n’est au courant. Le pouvoir agit de manière masquée. C’est extrêmement grave !
Ce faisant, en effet, vous donnez à tous les gouvernements futurs la légitimité de créer des statuts d’exception. Dissocier le sort de la capitale de celui des grandes villes de France est une faute politique impardonnable.
À l’avenir, la gauche ne pourra pas dire que les dispositions modifiant le statut de Paris, voire modifiant cette loi, sont des turpitudes. C’est ma famille politique qui a donné aux Parisiens des libertés. C’est la famille politique que je représente qui a permis cette évolution que vous contrecarrez brutalement, d’un trait de plume. En cela, votre texte est dangereux et illégitime.
D’ailleurs, vous savez bien que vous avez perdu toute légitimité. Il n’est qu’à regarder les résultats de toutes les dernières élections locales : vous avez été balayés. Sur un sujet aussi important, vous ne consultez personne.
Vous faites une loi fourre-tout où il est à la fois question de l’institution parisienne – quarante articles ! – et de la métropole – un article. Vous abordez dans un même texte aussi bien la ruralité que le cœur de l’agglomération. Nous discuterons, au sein d’un unique débat, des pouvoirs de police du maire, des jeux, de l’attribution d’un aéroport au préfet de police – quid de l’autre ? –, des pouvoirs de police a minima confiés au maire. Cela a été rappelé, les pouvoirs de police concernent les Parisiens. En cela, vous participez à cette sorte de hold-up démocratique.
L’engagement de la procédure accélérée est tout aussi scandaleux. Dans la mesure où ce texte concerne une collectivité territoriale, le Sénat est saisi en premier. Par conséquent, nous allons probablement voter ce projet de loi, mais ce texte n’aura pas beaucoup de sens, monsieur le rapporteur, même si vous avez essayé de faire au mieux. Nous essaierons de trouver des accommodements pour que la discussion ne perde pas de son intérêt à l’Assemblée nationale, malgré une unique lecture, alors que ce texte concerne des millions de Parisiens et de Franciliens.
Un certain nombre de dispositions relatives à la police, aux secteurs d’arrondissement, à la fusion des collectivités auraient pu être intéressantes et nous les avons même défendues, mais pas dans ces conditions. Ces conditions sont totalement inacceptables pour des démocrates, surtout lorsque l’on prétend respecter les collectivités territoriales et les fondements des libertés communales.
Ce que vous faites n’est ni positif ni légitime. J’espère évidemment que nous reviendrons sur le statut d’exception que vous prévoyez pour les Parisiens. J’ai d'ailleurs déposé un amendement sur ce point, partageant en l’occurrence la position défendue par Christian Favier.
On est capable d’organiser un référendum sur un aéroport qui, depuis quinze ans, a du mal à voir le jour en Loire-Atlantique.
Mme Catherine Procaccia. Tout à fait !
M. Philippe Dominati. On est capable d’organiser un référendum sur la création de la communauté territoriale d’Alsace via la fusion de la région Alsace et de deux départements.
On est capable d’organiser un référendum sur la collectivité territoriale de Corse. Mais, pour la capitale, on fait voter une loi en catimini, de façon à créer une sorte de bunker favorable à Mme Hildalgo et préparer l’opposition future !
J’aimerais, sur un sujet de cette importance, que l’on fasse appel au sentiment des populations concernées. Vous ne pouvez pas, en séance de nuit, sur deux jours, après un débat très confiné, modifier le statut de la plus grande commune de France et décider de l’aménagement des communes limitrophes qui sont associées au destin économique de Paris !
Telle est mon exigence, ou à tout le moins ma proposition, pour que les Parisiens sachent enfin si vous créez un bunker politique pour Mme Hidalgo ou si vous prenez en charge le destin de la capitale du pays, pour son développement économique et son expansion au bénéfice des générations futures. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Je lancerai tout d’abord une boutade à l’intention de M. Dominati : si le critère déterminant pour légiférer est la victoire électorale, alors nous sommes en droit de déposer un texte sur Paris, puisque la gauche a remporté les élections municipales dans la capitale ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
Plus sérieusement, monsieur le président, en application de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande la réserve de la discussion de l’ensemble du titre II du projet de loi relatif au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain jusqu’au mercredi 9 novembre prochain, à l’ouverture de la séance publique, à quatorze heures trente.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cette demande de réserve formulée par le Gouvernement ?
Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. La commission y est favorable, monsieur le président.
M. le président. La réserve est ordonnée.
9
Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’un projet de loi
M. le président. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen de la proposition de loi relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse, déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2016.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures cinq, sous la présidence de Mme Jacqueline Gourault.)
PRÉSIDENCE DE Mme Jacqueline Gourault
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
10
Statut de Paris et aménagement métropolitain
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain.
Je rappelle que la discussion générale a été close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
projet de loi relatif au statut de paris et à l’aménagement métropolitain
Titre Ier
Réforme du statut de Paris
Chapitre Ier
Création de la collectivité à statut particulier de la Ville de Paris
Mme la présidente. L'amendement n° 30, présenté par M. P. Dominati, n'est pas soutenu.
Section 1
Dispositions générales
Article additionnel avant l'article 1er A
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 72, présenté par MM. Favier et P. Laurent, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
En vertu de l’article 72 de la Constitution, la présente loi fera l’objet d’un référendum de ratification sur le territoire parisien.
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. Cet amendement visant à prévoir une consultation par référendum n’est en rien une surprise, puisque nous avons formulé des demandes similaires pour chaque grande réforme territoriale dans notre pays.
Au moment de la discussion du texte créant les métropoles ou encore lorsque les régions ont été remembrées, nous avons légitimement pensé que les articles 72 et 72-1 de la Constitution s’appliquaient. À chaque fois, cette demande nous a été refusée, au motif, peu démocratique, que les citoyens consultés ne répondraient pas à la question qui leur serait posée !
Cette frilosité à l’égard d’une requête légitime nous inquiète. Elle confirme les Français dans leur méfiance à l’égard des institutions et de ceux qui sont censés les représenter.
Il en va de même pour Paris. Certes, certains sujets portés par le texte, comme la fusion ville département, ont dans les faits été intégrés depuis longtemps par les Parisiens. Mais ce n’est pas le cas de la création du secteur regroupant les quatre arrondissements centraux, ni même de la question des pouvoirs du maire, qui, si le texte était voté, seraient largement renforcés.
Il n’est donc pas à craindre que les habitantes et les habitants de la capitale ne répondent pas à la question ni qu’ils ne désapprouvent, a priori, des mesures de simplification et de clarification des responsabilités. Il s’agit là d’une question démocratique.
Il revient aux citoyens de déterminer quelles sont les meilleures solutions pour la structuration de leurs territoires. Cette responsabilité n’est pas seulement celle du législateur.
Mme la présidente. L'amendement n° 31, présenté par M. P. Dominati, n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 72 ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. J’ai bien entendu les motivations de notre collègue Christian Favier.
Toutefois, cet amendement n’étant pas conforme à la procédure référendaire prévue par l’article 11 de la Constitution, j’en demanderai le retrait. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Cette proposition ne tient pas compte du fait qu’une partie importante du projet de loi ne concerne pas uniquement Paris, mais se rapporte également à l’ensemble du territoire national au travers des métropoles. Par ailleurs, je rappelle qu’il n’y a pas eu de référendum qu’il s’agisse de Lyon, de la collectivité unique de Corse ou de la fusion des régions !
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 72.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 1er A (nouveau)
Dans un délai d’un an, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les évolutions dans les structures et les compétences de l’ensemble des collectivités d’Île-de-France et soumet ce dernier à l’avis de l’ensemble de ces collectivités.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 40 est présenté par M. P. Dominati.
L'amendement n° 53 rectifié est présenté par MM. P. Laurent et Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 100 est présenté par le Gouvernement.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 40.
M. Philippe Dominati. Nous n’avons pas obtenu de réponse de la part du Gouvernement à l’issue de la discussion générale, alors que nous avons été un certain nombre à poser des questions. Néanmoins, le moment est peut-être venu pour le ministre de nous apporter certaines explications…
M. le ministre a notamment évoqué la progression du nouveau statut de Paris vers un droit commun plus élargi, alors qu’il s’agit en réalité d’un statut dérogatoire, comme je l’ai souligné dans la discussion générale, c'est-à-dire d’un statut d’exception.
Où est le régime de droit commun lorsque le chapitre Ier traite de la « création de la collectivité à statut particulier de la Ville de Paris » ? Comment prévoir un « statut particulier » pour la principale collectivité territoriale française peut-il permettre d’aller vers un régime de droit commun ? J’aimerais bien comprendre cette subtilité !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour présenter l'amendement n° 53 rectifié.
M. Pierre Laurent. L’article 1er A du projet de loi appelle le Gouvernement à remettre, dans un délai d’un an, un rapport sur les évolutions dans les structures et les compétences de l’ensemble des collectivités d’Île-de-France. Nous ne comprenons pas l’utilité d’un tel article.
Si le Gouvernement estime qu’il est pertinent de rédiger tel ou tel rapport sur le sujet, il n’est nul besoin d’un article de loi pour le lui demander.
Par ailleurs, les dernières réformes des institutions ont déjà profondément bouleversé la structure territoriale de l’Île-de-France. Il a fallu du temps aux élus et aux agents pour s’adapter. C’est d’ailleurs loin d’être terminé. Le personnel des collectivités et des intercommunalités a été placé dans une situation d’incertitude qui ne facilite pas leur travail. Je pense, notamment, à la mise en place des établissements publics territoriaux.
Nous avons aujourd'hui besoin de stabilité. Attendons de voir les effets des réformes pour estimer leur légitimité démocratique. Voilà pourquoi nous proposons de supprimer l’article 1er A, qui constitue une sorte de cavalier.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 100.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er A du projet de loi, ajouté par un amendement adopté en commission.
Ce nouvel article 1er A charge le Gouvernement de remettre au Parlement, dans un délai d’un an à compter de l’entrée en vigueur du projet de loi, un rapport sur les évolutions des structures et des compétences des collectivités d’Île-de-France. Le Gouvernement devrait soumettre ce rapport à l’avis des collectivités franciliennes.
Aux termes du projet de loi, la fusion de la commune et du département de Paris n’interviendra qu’au 1er janvier 2019. Par ailleurs, les évolutions induites par la loi NOTRe – je pense à la montée en puissance de la métropole du Grand Paris – s’étaleront sur plusieurs années.
Par conséquent, le délai d’un an pour la remise du rapport n’a pas de sens. Il est nécessaire d’attendre que les évolutions récentes aient eu le temps d’entrer en vigueur avant de les analyser et de légiférer de nouveau sur le sujet.
Au regard de ces éléments, le Gouvernement demande la suppression de l’article 1er A.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Il nous paraît pertinent, contrairement à ce que vient d’affirmer M. le ministre, qu’un rapport vienne préciser sur un certain nombre de points l’évolution des collectivités franciliennes.
La commission demande donc le retrait de ces trois amendements identiques. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 40, 53 rectifié et 100.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 45 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 155 |
Contre | 188 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 1er A.
(L'article 1er A n'est pas adopté.)
Article 1er
La section 1 du chapitre II du titre Ier du livre V de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est ainsi modifiée :
1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Dispositions spécifiques à la Ville de Paris » ;
2° L’article L. 2512-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 2512-1. – Il est créé une collectivité à statut particulier, au sens de l’article 72 de la Constitution, dénommée “Ville de Paris”, en lieu et place de la commune de Paris et du département de Paris.
« Sous réserve des dispositions du présent chapitre, la Ville de Paris s’administre librement dans les conditions fixées par les dispositions de la présente partie et de la législation relative à la commune et, à titre subsidiaire, par les dispositions non contraires de la troisième partie et de la législation relative au département. Elle exerce de plein droit sur son territoire les compétences attribuées par la loi à la commune et au département, sous réserve des dispositions spécifiques prévues au présent chapitre.
« Les affaires de la Ville de Paris sont réglées par les délibérations d’une assemblée dénommée “conseil de Paris”, dont le président est dénommé “maire de Paris” et est l’organe exécutif de la Ville de Paris.
« Le conseil de Paris peut présenter des propositions tendant à modifier ou à adapter des dispositions législatives ou réglementaires, en vigueur ou en cours d’élaboration, concernant les compétences, l’organisation et le fonctionnement de la Ville de Paris. »
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, sur l'article.
M. David Assouline. Il est rare que la représentation nationale, notamment le Sénat, qui est le représentant des collectivités territoriales, discute de Paris. Pourtant, à voir l’hémicycle ce soir, cela semble susciter peu d’intérêt…
C’est peut-être parce que nous avons souvent laissé traîner, au cours de nos débats, l’idée parfois séduisante que Paris était à part. Or c’est oublier que Paris représente 20 % de la péréquation nationale et 54 % de la péréquation francilienne. Alors que les dotations de l’État ont diminué de 49 % en 2012, Paris a augmenté de 42 % sa participation aux dépenses des collectivités territoriales, à hauteur de 1,2 milliard d’euros. Paris s’inscrit donc dans la solidarité nationale et n’est pas à part. Nous ne sommes pas des nantis ! Ce point méritait d’être souligné.
Il est donc important d’écouter cette collectivité, qui participe à la solidarité nationale, quand elle soutient une réforme rationnelle. Cela a été dit, Paris la rebelle n’a jamais plu au pouvoir central. Nous avons certes avancé au niveau des réformes avec la décentralisation, mais nous sommes restés au milieu du gué.
Il s’agit là d’un vrai sujet politique. Parce que c’est la capitale, parce que les institutions politiques y siègent, parce qu’y sont implantées les ambassades, parce que s’y trouvent concentrés tous les pouvoirs politiques, les pouvoirs d’État doivent pouvoir s’exercer à Paris de manière spécifique. Dans le même temps, il importe de normaliser la situation et de faire en sorte que l’égalité à laquelle a droit, selon la Constitution, l’ensemble des citoyens des 35 884 communes de France soit respectée.
Ce projet de loi tente de trouver le chemin entre les pouvoirs que le maire doit avoir à Paris, comme tous les autres maires, et l’égalité à laquelle ont droit tous les citoyens. Il tient compte de la spécificité de Paris, tout en rationalisant.
Or, rationaliser, c’est faire cesser la confusion entre département et ville, afin d’être efficace et d’optimiser les moyens, mais c’est aussi aborder la question du transfert des pouvoirs au maire et opérer la rationalisation démocratique, avec la fusion des quatre premiers arrondissements. Sur le plan démographique, un conseiller de Paris doit peser la même chose qu’un autre, quel que soit son territoire.
Les élus parisiens attendent du Sénat cette écoute dont ils ont besoin. Le conseil de Paris a longuement débattu et est parvenu à un accord assez large, car les Parisiens souhaitent aller dans le sens de la modernité et de la décentralisation.
Mme la présidente. L'amendement n° 41, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Je suis toujours dans l’attente de la réponse du Gouvernement. S’agit-il d’un statut d’exception ou d’une avancée démocratique vers la normalisation pour la conquête du droit commun ?
En réalité, nous sommes ici en totale contradiction. Pourquoi prévoir un statut particulier qui, encore une fois, dissociera la capitale des grandes villes comme Marseille et Lyon ? Verrons-nous à l’avenir, à chaque changement de pouvoir, l’exécutif tripatouiller, comme il le fait aujourd'hui dans l’une des dernières lois de la législature ?
J’aimerais obtenir une réponse, à moins que ce texte ne soit finalement une loi écrite par Mme la maire de Paris et que le Gouvernement n’ait aucune idée sur rien !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Cet amendement est contraire à la position adoptée par la commission, qui émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Monsieur Dominati, je ne sais quoi vous répondre ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. Philippe Dominati. C’est comme cela depuis le début de nos débats !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Moi, je vous écoute, même quand vous dites les choses les plus insensées ! Soyez donc attentif à mes propos.
Vous êtes systématiquement dans le dénigrement et la contestation de la légitimité du Gouvernement, ainsi que de la majorité. Des élections auront lieu dans six mois ; il adviendra ce qu’il adviendra, mais, d’ici là, le Gouvernement gouverne et le Parlement légifère. C’est ainsi que les choses fonctionnent en démocratie !
À vous écouter, il faudrait que, à l’approche des élections, le Gouvernement ne gouverne plus. Dans ce cas, pourquoi le Parlement ne cesserait-il pas de légiférer, par exemple un an avant son renouvellement ? Idem pour les conseils municipaux, qui n’auraient plus de droit de voter les grands projets. C’est dérisoire ! Voilà pourquoi je ne vous ai rien répondu jusqu’à présent.
En tout état de cause, ce texte va bel et bien vers le droit commun, mais il s’agit tout de même de Paris… M. David Assouline vient de le rappeler avec talent, ce n’est pas d’une ville comme une autre.
Je l’ai moi-même souligné dans mon discours liminaire, que vous avez peut-être mal entendu : Paris est la capitale de notre pays et le siège des institutions de la République. Il faut donc trouver le bon équilibre entre un statut particulier et notre volonté démocratique d’aller vers le droit commun. C’est ce que nous avons fait via le transfert des pouvoirs de police et les attributions des maires d’arrondissement. Nous continuons le travail qui a été engagé dans les années quatre-vingt.
J’en viens à votre amendement de suppression. Si vraiment vous ne pouvez pas accepter de constater avec un minimum de rigueur et d’objectivité qu’il ne sert à rien aujourd'hui d’avoir à la fois un département et une ville, et que c’est même, d’une certaine manière, insensé, puisque les élus et le fonctionnement sont les mêmes, ce que personne ne sait en dehors de quelques initiés, que voulez-vous que je vous dise ?
Vous ne cherchez pas à promouvoir un débat législatif constructif, dans le respect de nos différences. Vous êtes dans l’opposition systématique. J’en prends acte, mais le Gouvernement est naturellement défavorable à votre amendement. (M. David Assouline applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Monsieur le ministre, je voterai l’amendement de Philippe Dominati. Vous nous parlez de droit commun. Relisez donc l’article 1er de ce texte ! La fusion de la ville et du département, vous appelez cela du droit commun.
M. Philippe Dallier. À Lyon, il ne s’agissait pas de la ville en tant que telle, mais de la métropole !
À mon sens, le débat aurait dû être posé, mais pas uniquement pour la Ville de Paris ; il aurait dû concerner tous les départements de la petite couronne situés dans le périmètre de la métropole. En effet, la métropole parisienne présente une particularité tout à fait singulière : elle comporte quatre départements inframétropolitains. Vous qualifiez de droit commun ce qui relève d’un statut tout à fait particulier !
M. Philippe Dallier. Tout cela n’est en réalité qu’un pas de plus dans le sens du démantèlement de la métropole du Grand Paris, dont certains ne veulent pas, nous le savons bien !
Ce n’est pas un petit débat, monsieur le ministre, au contraire. Il aurait fallu que le présent texte traite également des compétences et des ressources de la métropole du Grand Paris et remette tout à plat, au lieu d’être réduit à la seule question de la fusion de la ville et du département.
Je vous rappelle, d’ailleurs, que Paris est également un établissement public territorial de la métropole du Grand Paris, ce qui semble ne déranger personne, alors qu’il s’agit, là encore, d’une situation exceptionnelle.
J’ajoute que nos débats ne sont pas de l’ordre de la polémique stérile. Je pense sincèrement que les dispositions de ce texte sont complètement anachroniques. Vous avez raté le train de l’histoire ! Nous devrions discuter de l’étape d’après, quand vous proposez pour Paris un statut qui lui aurait convenu il y a vingt ans, avant, donc, la création de la métropole.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Je n’ai jamais parlé de droit commun, monsieur le sénateur. La fusion de la ville et du département permet d’aller vers plus de clarté.
Vous non plus, vous n’écoutez pas mes arguments ; vous campez sur votre position, qui est idéologique. Laissons la métropole en dehors de nos débats : ce n’est pas d’elle qu’il s’agit.
Au passage, permettez-moi de vous dire que la Ville de Paris n’est pas un établissement public territorial.
M. Philippe Dallier. Ah bon ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Non ! Quant à vos positions sur la métropole du Grand Paris, je vous encourage à écouter celles de certains de vos amis politiques, et non les moindres.
M. Philippe Dallier. Paris n’est pas un département de gauche…
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Valérie Pécresse, Nicolas Sarkozy, Alain Juppé : des personnes que vous connaissez bien, des leaders de la formation à laquelle vous appartenez et que vous soutiendrez aux prochaines élections, veulent supprimer la métropole.
M. Philippe Dallier. Je ne suis pas d’accord avec eux sur ce sujet !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Aussi, mettez-vous d’accord avec eux sur ce sujet avant de donner des leçons au Gouvernement !
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.
M. Yves Pozzo di Borgo. Je voudrais apporter quelques précisions à destination de nos collègues qui ne connaîtraient pas le fonctionnement du conseil de Paris.
Les conseillers se réunissent deux ou trois jours par semaine et siègent successivement au conseil général et au conseil municipal. Quand il se réunit en format de conseil municipal, le préfet de police siège à la tribune aux côtés du maire. C’est un cas unique en France.
Lorsque les débats intéressent le conseil général, une cloche retentit et le préfet s’en va.
M. Roger Madec. Plus maintenant ! Il n'y a plus de cloche.
M. Yves Pozzo di Borgo. Cela a longtemps été le cas, cher collègue. J’utilisai seulement l’exemple de la cloche pour ses vertus pédagogiques.
Sur le fond, je n’ai rien contre le fait que la Ville de Paris devienne une seule entité au lieu de deux. Certains services administratifs sont mélangés. Parmi les 55 000 fonctionnaires qu’elle emploie, et sans compter les contractuels, certains ont des missions pour le conseil général comme pour le conseil municipal. La fusion est donc logique.
Néanmoins, je rejoins Philippe Dallier et Philippe Dominati sur un point : Paris est une petite ville de deux millions d’habitants.
Je ne sais pas si les futures frontières de la métropole épouseront celles de la région, mais, en tout état de cause, la France a besoin d’une grande métropole à Paris. Toutes les grandes villes du monde sont de grandes métropoles ! Et nous, nous créons un statut spécial pour deux millions d’habitants ? Vous rendez-vous compte de notre ridicule, monsieur le ministre ?
Le problème est donc non pas de savoir s’il fallait ou non fusionner conseil municipal et conseil départemental – c’est une décision logique –, mais d’avoir refusé de traiter dans ce texte de la question du périmètre de la métropole. Doit-elle inclure, par exemple, les départements jouxtant Paris ? C’est le débat que nous aurions aimé avoir.
Le dispositif de l’amendement déposé par Philippe Dominati, même s’il peut faire l’objet de quelques remarques, a au moins le mérite de soulever ce problème. La question de la fusion est minuscule, monsieur le ministre. Elle n’est pas à la hauteur de l’avenir de Paris et de la France, avenir qui passe par le Grand Paris.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Pour la clarté de nos échanges, pour nos concitoyens qui liront le compte rendu de nos débats, il est dommage que les rares sénateurs de la majorité sénatoriale qui participent à ce débat y adjoignent des sujets qui n’ont rien à voir avec le projet de loi.
Monsieur Dallier, vous continuez votre combat entamé lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, combat que vous avez doublement perdu, dans votre camp et dans cet hémicycle !
Vous voulez une métropole intégrée, soit. Je vous accorde la cohérence dans votre conviction, mais cela n’a absolument rien à voir avec nos débats d’aujourd'hui. La métropole du Grand Paris a été créée. Elle connaîtra peut-être des changements à l’avenir.
Cela dit, je ne suis pas sûr que, s’il y avait une alternance politique l’année prochaine et que votre camp l’emportait, votre position sur ce sujet triompherait. Au contraire, Nicolas Sarkozy et Alain Juppé – peut-être pour avoir le soutien de Valérie Pécresse – ont récemment déclaré, ce dernier en catimini et pour les mêmes raisons, vouloir supprimer la métropole.
Ce débat se tient en réalité au sein de votre propre camp politique : pourquoi polluer avec nos discussions de ce soir ?
J’habite Paris depuis des décennies. Je puis vous affirmer qu’aucun de mes voisins ne sait ce qui relève du département et ce qui relève de la ville. Or, dans une bonne démocratie, les citoyens savent exactement qui décide des politiques publiques les concernant. Quand ce n’est pas le cas, ils peuvent avoir le sentiment que quelque chose leur est caché.
Yves Pozzo di Borgo a décrit le déroulement des réunions du conseil de Paris. Personne n’y peut rien comprendre, sauf nous qui y siégeons ! La cloche a disparu, mais elle a longtemps été le symbole du fonctionnement du conseil.
Même les Parisiens n’y comprennent rien. Sur les questions de sécurité, par exemple, l’élu parisien que je suis peut très bien expliquer à ses administrés que les compétences de police en matière de terrorisme ou de manifestations publiques sont exercées par l’État. J’ai en revanche beaucoup plus de mal à leur faire comprendre – ils me traitent même de menteur – que les compétences de police en matière d’incivilités, par exemple, relèvent également de l’État.
Le présent projet de loi prévoit d’attribuer ces compétences de police de proximité au maire et de laisser à l’État les compétences régaliennes. Cela relève de la clarté démocratique !
M. Philippe Dallier. Ce n’est pas l’objet de cet article !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Le groupe CRC ne votera pas cet amendement.
Originellement, le présent projet de loi ne devait traiter que de l’évolution du statut de la Ville de Paris. Un titre II a été ajouté, conduisant à des débats parfois confus.
Pour ce qui a trait à Paris, il s’agit seulement de régler un problème qui lui est particulier. Il n’est pas question, nous concernant, de nous prononcer par ce vote sur l’éventuelle disparition d’autres départements. Nous récusons donc totalement le parallèle dressé par Philippe Dallier entre les évolutions que connaîtra Paris et celles qu’a connues Lyon.
J’ajoute que Philippe Dallier est mal placé pour parler de confusion quand il évoque l’évolution du statut de Paris prévue par ce texte. Je rappelle en effet que sa position lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles était la plus jusqu’au-boutiste : il était même partisan d’une évolution précipitée des institutions de la métropole du Grand Paris, alors même qu’un processus beaucoup plus démocratique, impliquant élus parisiens et élus de la métropole, était en cours.
Dès lors, favorables aux évolutions prévues dans le présent texte pour le statut de la Ville de Paris, évolutions que nous ne confondons pas avec celles de la métropole, nous voterons contre cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 101, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’application du deuxième alinéa du présent article, les références à la commune de Paris et au département de Paris sont remplacées par la référence à la Ville de Paris.
II. – Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Cet amendement vise à rétablir l’alinéa remplaçant la référence à la commune et au département de Paris par la référence à la Ville de Paris, supprimée par un amendement adopté en commission. Il tend également à supprimer un alinéa créant un pouvoir d’évocation au profit du conseil de Paris, ajouté par amendement en commission.
En premier lieu, la commission des lois a supprimé l’alinéa permettant, à l’article L. 2512-1 du code général des collectivités territoriales, de substituer les références à la commune et au département de Paris par celles à la Ville de Paris, au motif que cet alinéa serait redondant avec l’article 9 du projet de loi prévoyant une ordonnance générale d’application du texte.
Or le remplacement des références au département et à la commune de Paris par les références à la Ville de Paris est la conséquence nécessaire et indispensable de la création de cette nouvelle collectivité. Le Gouvernement souhaite donc le rétablissement de ces dispositions.
En second lieu, la commission a créé un pouvoir d’évocation au bénéfice du conseil de Paris, permettant à ce dernier de proposer la modification de tout texte législatif ou réglementaire concernant les compétences, l’organisation ou le fonctionnement de la Ville de Paris, sur le modèle des possibilités données aux régions.
Ainsi que le rapporteur l’a souligné en commission, cette disposition revêt une valeur normative faible, puisque le conseil de Paris peut déjà adopter des vœux proposant la modification des textes législatifs ou réglementaires relatifs au fonctionnement ou aux compétences de Paris.
Par ailleurs, les suites qui pourraient être données à de telles propositions risqueraient d’aller à l’encontre des dispositions de l’article 39 de la Constitution, qui prévoient que « l’initiative des lois appartient concurremment au Premier ministre et aux membres du Parlement ».
Dans ces conditions, le Gouvernement ne souhaite pas étendre au conseil de Paris le dispositif créé pour les conseils régionaux par la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 143, présenté par M. Darnaud, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Amendement n° 101, alinéa 3
Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Pour l'application du deuxième alinéa du présent article :
« 1° Les références à la commune de Paris et au département de Paris sont remplacées par la référence à la Ville de Paris ;
« 2° Les références à la commune et au département sont remplacées par la référence à la Ville de Paris ;
« 3° Les références au conseil municipal et au conseil départemental sont remplacées par la référence au conseil de Paris ;
« 4° La référence au président du conseil départemental est remplacée par la référence au maire de Paris.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Cet amendement tend à préciser l’adaptation des références pour l'application des dispositions des deuxième et troisième parties du code général des collectivités territoriales, respectivement consacrées à la commune et au département, à la Ville de Paris.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 143 ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de ce sous-amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur le rapporteur, le sous-amendement n° 143 est-il maintenu ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 143.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 46 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 198 |
Contre | 145 |
Le Sénat a adopté.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Je sollicite le vote par division de l’amendement n° 101, ainsi modifié, madame la présidente.
Mme la présidente. Nous allons donc procéder au vote par division de l’amendement n° 101, modifié.
Je mets aux voix, modifié, le I de l’amendement n° 101.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 47 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 198 |
Contre | 145 |
Le Sénat a adopté.
Je mets aux voix le II de l’amendement n° 101.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 48 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 155 |
Contre | 188 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Madame la présidente, je constate que la majorité sénatoriale s’intéresse bien peu à ces dispositions sur Paris, puisqu’elle est minoritaire en séance !
La moindre des choses serait pourtant qu’elle soit plus présente pour discuter de ce texte. Cela nous éviterait cette succession de demandes de scrutins publics et la confusion – avec tout le respect que je vous dois, madame la présidente – qui s’est instaurée depuis quelques instants. Je n’ai, par exemple, pas pu donner l’avis du Gouvernement sur les derniers votes…
Je demande donc un peu plus de rigueur dans la tenue de nos débats. Je demande également aux responsables de la majorité sénatoriale de bien vouloir appeler quelques-uns de ses membres, pour que notre séance se déroule dans des conditions normales.
Mme la présidente. Vous aviez donné l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 143, monsieur le ministre. Il était défavorable.
Je mets aux voix, modifié, l’ensemble de l'amendement n° 101.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 49 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 196 |
Contre | 147 |
Le Sénat a adopté.
La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur l’article.
M. David Assouline. Madame la présidente, je ne vous mets pas en cause, mais je voudrais tout de même évoquer ce qui se passe ici ce soir.
Le Sénat débat d’une loi qui est importante, puisqu’elle a été inscrite à l’ordre du jour. Comme toutes les lois, elle doit être respectée. Par égard pour notre institution, nous ne devrions donc pas nous retrouver dans la situation où la majorité sénatoriale n’est pas foutue d’avoir suffisamment de représentants dans l’hémicycle !
Je veux le dire, car nos collègues vont bientôt briguer le suffrage des grands électeurs pour renouveler leur mandat de sénateur. Cela soulève une véritable question politique !
J’y insiste, si vous n’êtes pas capables de réveiller quelques sénateurs ou de leur faire quitter les dîners dans lesquels ils s’attardent, nous allons prolonger cette série ridicule de scrutins publics sur des parties d’amendement…
J’espère que nos concitoyens sont peu nombreux à suivre nos débats en ce moment même sur la chaîne du Sénat ! Nous devons les respecter, et respecter notre institution. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
Mme Esther Benbassa. Vous avez tout à fait raison !
Mme la présidente. La parole est à Mme la vice-présidente de la commission.
Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur Assouline, votre intervention s’apparente davantage à un rappel au règlement : vous devriez donc citer l’article sur lequel celui-ci est fondé.
M. David Assouline. C’est une explication de vote, et vous n’êtes pas présidente de séance !
Mme Catherine Troendlé, vice-présidente de la commission des lois. Quoi qu'il en soit, vous devriez modérer vos propos lorsque vous évoquez la présence en séance des sénateurs de la majorité. Il ne vous appartient pas de faire des conjonctures sur ce que font nos collègues, encore moins dans le contexte des élections à venir. Vous devriez, vous aussi, respecter vos collègues du Sénat ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote sur l’article.
M. Philippe Dallier. Je souscris tout à fait aux propos de Mme la vice-présidente de la commission des lois.
M. David Assouline. C’est un rappel au règlement ? (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Philippe Dallier. Mon cher collègue, vous pouvez formuler les appréciations que vous souhaitez sur l’organisation de nos débats, mais il n’est pas nécessaire d’employer des termes qui n’ont pas lieu d’être dans cet hémicycle.
M. David Assouline. Lesquels ?
M. Philippe Dallier. Et « foutue », cher collègue ?... (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.)
M. David Assouline. Vous avez été élevé dans le XVIe arrondissement !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 50 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Pour l’adoption | 198 |
Contre | 147 |
Le Sénat a adopté.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour dix minutes.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinq, est reprise à vingt-deux heures quinze.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Article 2
La section 1 du chapitre II du titre Ier du livre V de la deuxième partie du même code est ainsi modifiée :
1° L’article L. 2512-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 2512-2. – Les dispositions applicables au fonctionnement des conseils municipaux sont applicables au conseil de Paris, sous réserve des dispositions prévues au présent titre. » ;
2° (nouveau) Après l’article L. 2512-5, il est inséré un article L. 2512-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2512-5-1. – Le conseil de Paris procède à la désignation de ses membres ou de ses délégués pour siéger au sein d’organismes extérieurs dans les cas et conditions prévus par les dispositions régissant ces organismes. À défaut et le cas échéant, ces désignations sont effectuées à la représentation proportionnelle des groupes d’élus du conseil de Paris.
« La fixation par les dispositions précitées de la durée des fonctions assignées à ces membres ou délégués ne fait pas obstacle à ce qu’il puisse être procédé à tout moment et, pour le reste de cette durée, à leur remplacement par une nouvelle désignation opérée dans les mêmes formes. »
Mme la présidente. L’amendement n° 42, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Il s’agit d’un amendement de cohérence sur la philosophie générale du texte.
En réalité, si nous sommes dans cette situation, monsieur Assouline, c’est par la volonté du Gouvernement et de Mme la maire de Paris. Si nous débattons un lundi soir sur un sujet aussi important à la va-vite, en procédure accélérée, c’est parce que vous l’avez voulu !
Vous avez souhaité que ce débat reste dans l’ombre. Le ministre répond à peine aux questions, en se contentant de dire que nous sommes dans l’opposition systématique – on ne sait même pas si cet important dossier est réellement bien compris. Dans ces conditions, je ne comprends pas pourquoi vous vous plaignez.
J’ai déposé un certain nombre d’amendements de cohérence, comme l’amendement n° 42. Finalement, ils sont nécessaires. J’aurais très bien pu ne pas les défendre, mais nous avons un effort pédagogique à faire, pour montrer notre révolte. Ce que vous faites n’est ni correct ni démocratique, que cela vous plaise ou non. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.) Il n’est pas normal que vous modifiiez le statut de la capitale un lundi soir en catimini, à la fin d’une législature. Vous avez provoqué cette situation. S’il faut prendre du temps pour expliquer, nous le ferons !
M. Pierre Laurent. Vous voulez bien du travail le dimanche, mais pas le lundi !
M. Philippe Dominati. Sur le fond, il ne faut pas se plaindre de la fusion des départements. En effet, on nous dit que c’est un statut d’exception. Mais si l’on n’est plus dans le droit commun, alors nous pouvons nous permettre certaines choses dans le futur, ce qui évidemment aura des conséquences pour d’autres collectivités territoriales.
Nous aurions pu avoir un débat sérieux sur de nombreux sujets. Toutefois, le Gouvernement a décidé d’avoir recours à la procédure accélérée et a d’abord présenté son texte devant le Sénat. Pour permettre à la contestation de s’exprimer et mesurer l’enjeu du texte, il aurait fallu une certaine émulation lors de la discussion sur les articles. Avec la confusion qui règne dans la tenue des débats et l’exécutif qui peine à répondre, nous n’y parvenons pas. Le débat est plutôt mal parti !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. L’avis est défavorable, pour les raisons que j’ai précédemment exposées.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. L’avis ne peut être favorable, étant donné la confusion des propos de M. Dominati. Apparemment, il ne sait pas que la Constitution prévoit que les textes relatifs aux collectivités territoriales doivent être examinés d’abord par le Sénat…
M. Philippe Dallier. Il vient de le dire !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Non, il a dit tout le contraire.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Madec, pour explication de vote.
M. Roger Madec. Le groupe socialiste suivra le Gouvernement.
Je veux dire avec respect à Philippe Dominati, que je connais depuis longtemps, qu’il est ridicule lorsqu’il prétend que l’on ne peut pas siéger un lundi soir. Comment expliquer cela aux Français ? L’institution que nous représentons ici est menacée. Continuez à tenir des propos caricaturaux parce que vous êtes minoritaires en séance, et il n’y aura plus de Sénat d’ici peu !
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. J’espère que nous passerons bientôt à l’examen au fond du texte. Mais quand la forme rend inaudible, il faut faire quelques rappels.
Ne faites pas de confusion, monsieur Dominati : respecter l’institution et les parlementaires, cela signifie que, même en sachant que la majorité sénatoriale contestera le texte, nous maintenons le principe selon lequel une loi sur les collectivités territoire doit d’abord être examinée par le Sénat. Contrairement à ce que vous avez affirmé, c’est une marque de très grand respect de la part du Gouvernement.
M. Philippe Dominati. Pas en utilisant la procédure accélérée !
M. David Assouline. Par ailleurs, je constate que vous n’avez aucun problème à travailler le dimanche, mais pas le lundi. C’est le régime spécial des sénateurs ! Ce n’est pas très sérieux.
Vous êtes dans une situation paradoxale. À ce stade de la discussion, nous débattons d’un sujet précis sur le statut de Paris. M. Dallier a mené un combat, qu’il a perdu, en faveur de la métropole intégrée. De votre côté, vous défendez depuis longtemps une autre conception, totalement libérale : il faudrait tout décentraliser à Paris, comme si cette ville n’était pas la capitale, que nous n’étions pas dans un État républicain et que les questions de sécurité devaient être du ressort du maire. Telle n’est pas d'ailleurs la position de votre groupe.
Dans cette confusion politique totale, il serait bon que vous essayiez de vous mettre d’accord et de rassembler davantage de présents dans l’hémicycle pour défendre ce que vous pensez juste pour Paris. La capitale de la France mérite un débat un peu plus sérieux.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Je veux revenir au fond du débat. Mes chers collègues, vous me reconnaîtrez de la constance dans le propos. Oui, j’ai une vision intégrée de la métropole du Grand Paris et, oui, je continue à soutenir que se pose la question de l’existence des départements de la petite couronne au sein de la métropole et du département de Paris.
Souvenez-vous de nos débats en séance sur la loi NOTRe : Mme Lebranchu avait conclu, à la toute fin de l’examen du texte, que nous n’avions probablement pas trouvé la bonne solution, que mes propositions étaient trop en avance et que nous devrions nous reposer ces questions un jour. Je suis tout autant légitime à le faire que vous, parce que l’absorption du département de Paris par la Ville de Paris a des conséquences sur le débat métropolitain. Vous ne voulez pas que nous ayons ce débat. Mais personne ne m’interdira de soulever cette question ici et de redonner mon avis.
Nous en reparlerons à coup sûr ! Je le redis, ce n’est pas un débat entre la droite et la gauche. Nous l’avions bien vu avec la loi NOTRe : à droite comme à gauche, on trouve des partisans d’une métropole plus intégrée que ce que nous avons décidé. Je croyais que nous savions tous que la formule que nous avons fini par adopter – en cohérence avec ma position, je n’ai pas voté la loi NOTRe – n’est que transitoire et qu’elle n’est pas viable.
En 2019, les établissements publics territoriaux, les EPT, perdront toute ressource fiscale, soit les anciennes dotations d’intercommunalité. Les communes et les EPT vont se retrouver dans l’impasse. Il faudra rouvrir ce débat. J’en reparle aujourd’hui, car je ne perds pas une occasion de dire ce que je pense. Ce n’est pas un petit débat, et personne ne m’interdira de l’évoquer ce soir.
M. David Assouline. Personne ne vous l’interdit !
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Marseille, pour explication de vote.
M. Hervé Marseille. Je n’avais pas prévu de prendre la parole, mais je suis très gêné par la tournure des débats. Je suis membre de Paris Métropole, comme beaucoup d’autres maires, et je suis vice-président d’un EPT. Nous n’avons eu aucun débat sur les sujets qui nous intéressent ce soir. Il n’y a jamais eu autant de lieux de débat et aussi peu de discussions !
En ce qui concerne les départements, deux d’entre eux sont en voie de disparition. C’est un choix politique, qui va d’ailleurs dans le bon sens – le département de Paris fusionne avec la Ville, les Yvelines avec les Hauts-de-Seine. Que deviennent les deux autres départements ? On ne s’y intéresse pas, il n’y a pas de débat, on laisse faire !
Le problème est global. Or il n’y a aucune étude d’impact. Je regrette que nos collègues de province ne soient pas plus nombreux ce soir : en effet, comme la péréquation de Paris est plafonnée, quelque 85 millions d’euros de l’enveloppe globale sont payés par la province. On ne sait absolument pas ce qui va se passer. Les autres départements – les malheureux qui restent dans la métropole – vont-ils payer ? La province va-t-elle être davantage mise à contribution ? Bercy est incapable de fournir le moindre chiffre.
M. David Assouline. La Ville de Paris contribue à la péréquation à hauteur d’un milliard d'euros !
M. Hervé Marseille. Je peux vous dire combien payent les Hauts-de-Seine, mais j’interroge le Gouvernement. La loi de finances prévoit un plafonnement de la péréquation à 13 % des recettes fiscales. Alors qui payera l’année prochaine ? Les autres départements, les autres villes, la province ?
M. David Assouline. Les Hauts-de-Seine regorgent de moyens !
M. Hervé Marseille. Nous sommes légitimement en droit de nous poser ces questions quand on discute de la métropole. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote.
M. Christian Favier. La métropole n’est pas le sujet de ce soir. Personne n’interdit évidemment à M. Dallier d’avoir un avis sur la métropole, mais nous ne sommes pas non plus obligés d’être d’accord avec lui !
S’il est favorable à une métropole très intégrée, avec disparition des départements, d’autres ont une vision différente, s’appuyant sur une métropole plus polycentrique, les dynamiques des territoires et les départements actuels. En effet, que ce soient les Hauts-de-Seine, la Seine-Saint-Denis ou le Val-de-Marne pour la petite couronne, chacun, évidemment avec des politiques parfois différentes, a son utilité, et ses compétences pourraient difficilement aujourd’hui être exercées par d’autres.
Paris est dans une situation tout à fait particulière. C’est le seul territoire où l’on trouve sur le même périmètre, à la fois, une commune et un département. Même Lyon n’est pas dans la même situation. Le département du Rhône continue d’exister, certes sur un territoire plus limité. Je ne vois pas pourquoi le fait que Paris fusionne son échelon départemental et son échelon communal entraînerait de facto la disparition des départements de la petite couronne. Le département du Val-de-Marne travaille avec les 47 communes et les territoires qui le composent. Paris est dans une situation complètement différente.
Je ne comprends pas pourquoi on mélange les sujets. Sans doute faudra-t-il faire, à un moment donné, une évaluation de ce que deviendra la métropole du Grand Paris. Mais, pour l’instant, les choses se mettent simplement en place. Il est un peu tôt pour en faire une juste évaluation et voir s’il faut faire évoluer la loi. Restons-en au statut de Paris et ne mélangeons pas tous les problèmes !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Puisque les questions sont maintenant posées sereinement, je voudrais répondre à M. Marseille : il n’est question que de supprimer un département quasiment déjà fictif, comme l’avait fait remarquer la chambre régionale des comptes.
Les Yvelines et les Hauts-de-Seine n’ont pas fusionné. La fusion est à l’étude ; elle se fera, ou pas. En effet, d’autres tentatives de fusion ont eu lieu dans d’autres régions, qui n’ont finalement pas abouti.
Est-il donc bien raisonnable d’affirmer, avant même que quelque procédure ne soit lancée – si l’on fait abstraction de quelques déclarations qui ont effectivement été faites, monsieur le sénateur –, que cette fusion va s’opérer, entraînant de ce fait la disparition d’un département, et d’en tirer des conséquences, alors que l’on ne sait même pas si cela se produira ?
Quant au Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC, je vous confirme qu’il ne sera aucunement affecté par tout cela ; j’y reviendrai à l’occasion de la présentation d’un autre amendement.
Là encore, ne mélangeons pas tout. Concentrons-nous sur le débat qui nous réunit ce soir : le statut du Grand Paris. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. Philippe Dallier. De Paris !
M. Yves Pozzo di Borgo. De ce village qu’est Paris !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Pardonnez-moi : le statut de Paris, ainsi que la fusion de la commune et du département.
Mme la présidente. Monsieur Dominati, l’amendement n° 42 est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Compte tenu de l’avis défavorable de la commission, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 42 est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 54 rectifié est présenté par MM. P. Laurent et Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L’amendement n° 102 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 4 à 6
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l'amendement n° 54 rectifié.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Le présent amendement vise à supprimer les alinéas 4 à 6 de l’article 2 du texte. Ces alinéas introduisent, d’une part, des dispositions dérogatoires au droit commun pour la désignation des représentants de Paris au sein des organismes extérieurs et, d’autre part, une instabilité de la représentation de Paris dans ces mêmes organismes.
L’adoption de dispositions dérogatoires pour Paris contrevient au principe constitutionnel d’égalité. Il convient donc de rejeter ces dispositions. En outre, celles-ci aboutiraient à ce que les représentants des collectivités territoriales dans un même organisme ne soient pas désignés suivant les mêmes procédés.
En ce qui concerne la possibilité, prévue à l’alinéa 6, de modifier à tout moment la représentation parisienne dans ces organismes, elle ajoute au problème précité : elle introduit une instabilité préjudiciable au bon fonctionnement de ces organismes et de la Ville de Paris.
C’est pourquoi nous proposons, au travers de cet amendement, de supprimer ces alinéas.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 102.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Ces amendements tendent à supprimer les précisions concernant la représentation du conseil de Paris au sein d’organismes extérieurs, telles qu’elles ont été introduites par la commission des lois au travers d’un amendement, que j’ai sous-amendé, de notre collègue Pierre Charon.
Il convient de le rappeler, sous réserve de la mention expresse de l’application de la proportionnelle dans la mesure où elle peut s’appliquer au regard du nombre de représentants à désigner, ces dispositions reprennent celles qui sont déjà prévues, pour les communes, les départements et les régions, par les articles L. 2121-33, L. 3121-23 et L. 4132-22 du code général des collectivités territoriales, le CGCT.
Par ailleurs, ces dispositions ne remettent pas en cause, jusqu’au prochain renouvellement général des conseils municipaux, la pérennité des représentants désignés, puisque l’article 10 du texte les maintient expressément dans leurs fonctions jusqu’en 2020.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote.
M. Christian Favier. Je ne comprends pas l’explication du rapporteur. Il n’existe aucune obligation à appliquer la proportionnelle pour désigner les membres de ces organismes.
Ainsi, le département des Hauts-de-Seine a désigné comme représentants au sein du syndicat interdépartemental pour l’assainissement de l’agglomération parisienne, le SIAAP, pour occuper les sept sièges disponibles, sept représentants issus de sa majorité et aucun représentant issu de l’opposition. S’il y avait eu la moindre obligation d’appliquer la proportionnelle, le résultat n’aurait évidemment pas été le même. (MM. Philippe Dallier et Yves Pozzo di Borgo s’esclaffent.)
M. Hervé Marseille. Et comment est-ce que cela se passe dans le Val-de-Marne ?
M. Christian Favier. Il n’y a donc pas d’obligation en la matière. Chaque assemblée est souveraine pour désigner ses représentants au sein de ces organismes.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 54 rectifié et 102.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. David Assouline. Encore ?...
Mme la présidente. Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 51 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 155 |
Contre | 188 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’article 2.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
M. David Assouline. Ils vont encore gagner ce vote, alors qu’ils ne sont que trois pelés et deux tondus ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 52 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 188 |
Contre | 155 |
Le Sénat a adopté.
Article 3
L’article L. 2512-5 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2512-5. – Les conditions dans lesquelles les conseillers de Paris posent des questions orales au maire et au préfet de police sont déterminées par le règlement intérieur du conseil de Paris. »
Mme la présidente. L’amendement n° 43, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 43 est retiré.
L’amendement n° 103, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 2512-5. – Le conseil de Paris établit son règlement intérieur, qui détermine notamment les conditions dans lesquelles les conseillers de Paris posent des questions orales au maire et au préfet de police. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Cet amendement vise à préciser que le conseil de Paris établit un règlement intérieur déterminant notamment les conditions dans lesquelles les conseillers de Paris posent des questions orales au maire et au préfet de police.
C’est assez parlant, me semble-t-il. Dans toutes les collectivités, il y a un règlement intérieur. En limitant le champ couvert par le règlement intérieur du conseil de Paris aux seules modalités permettant aux conseillers de poser des questions au maire ou au préfet de police, la rédaction retenue par la commission est plus restrictive que celle du Gouvernement.
Nous proposons que le conseil de Paris fixe dans son règlement intérieur, entre autres sujets, les modalités selon lesquelles les conseillers de Paris posent leurs questions orales ou écrites au maire et au préfet de police. La rédaction issue de la commission limite le champ du règlement intérieur aux seules questions orales ou écrites pouvant être posées par les conseillers de Paris au maire et au préfet de police.
Nous souhaitons donc le rétablissement de la rédaction antérieure de ces dispositions, qui confère un objet plus large au règlement intérieur.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Monsieur le ministre, le texte de la commission des lois n’est nullement restrictif, puisqu’il se borne à renvoyer au règlement intérieur le soin de déterminer les conditions encadrant les questions orales au maire et au préfet de police. Pour le reste, c’est le droit commun, notamment l’article L. 2121-8 du CGCT, qui régit le règlement intérieur, qui s’applique.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3.
(L’article 3 est adopté.)
Article 4
Le même code est ainsi modifié :
1° À l’article L. 2512-6, après les mots : « Le conseil de Paris » sont insérés les mots : « , sa commission permanente » ;
2° L’article L. 2512-7 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après les mots : « le cas échéant, » sont insérés les mots : « de sa commission permanente et » ;
b) Au deuxième alinéa, après les mots : « au conseil de Paris » sont insérés les mots : « , à sa commission permanente » ;
3°Après l’article L. 2512-5, il est inséré un article L. 2512-5-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 2512-5-2. – Le conseil de Paris crée une commission permanente à laquelle il peut déléguer une partie de ses attributions, à l’exception de celles relatives au vote du budget, à l’approbation du compte administratif et aux mesures de même nature que celles mentionnées aux articles L. 1612-12 à L. 1612-15.
« Aussitôt après l’élection du maire de Paris et sous sa présidence, le conseil de Paris fixe le nombre des adjoints et des autres membres de la commission permanente.
« Les membres de la commission permanente autres que le maire de Paris sont élus au scrutin de liste. Chaque conseiller de Paris peut présenter une liste de candidats, qui doit être composée alternativement d’un candidat de chaque sexe.
« Les listes sont déposées auprès du maire de Paris dans l’heure qui suit la décision du conseil de Paris relative à la composition de la commission permanente. Si, à l’expiration de ce délai, une seule liste a été déposée, les différents sièges de la commission permanente sont alors pourvus immédiatement dans l’ordre de la liste et il en est donné lecture par le maire.
« Dans le cas contraire, le conseil de Paris procède d’abord à l’élection de la commission permanente, à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. Les sièges sont attribués aux candidats dans l’ordre de présentation sur chaque liste. Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l’attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d’égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d’être proclamés élus. Si le nombre de candidats figurant sur une liste est inférieur au nombre de sièges qui lui reviennent, le ou les sièges non pourvus sont attribués à la ou aux plus fortes moyennes suivantes.
« Après la répartition des sièges de la commission permanente, le conseil de Paris procède à l’élection des adjoints au scrutin de liste à la majorité absolue, sans panachage ni vote préférentiel. Sur chacune des listes, l’écart entre le nombre des candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un. Si, après deux tours de scrutin, aucune liste n’a obtenu la majorité absolue, il est procédé à un troisième tour de scrutin et l’élection a lieu à la majorité relative. En cas d’égalité de suffrages, les candidats de la liste ayant la moyenne d’âge la plus élevée sont élus.
« Les membres de la commission permanente autres que le maire de Paris sont nommés pour la même durée que le maire de Paris. » ;
4° (nouveau) L’article L. 2512-8 est abrogé.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 19 est présenté par M. Pozzo di Borgo.
L’amendement n° 32 est présenté par M. P. Dominati.
L’amendement n° 89 est présenté par Mmes Benbassa, Archimbaud, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Poher.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour présenter l'amendement n° 19.
M. Yves Pozzo di Borgo. Selon l’étude d’impact, l’article 4 du projet de loi crée une commission permanente au sein du conseil de Paris.
Il existe à Paris aujourd’hui, et depuis très longtemps, un conseil général et une municipalité. La commission permanente du conseil général existait avant 2001 – elle a d’ailleurs perduré après cette date –, et je sais qu’elle se réunissait, puisque ses vice-présidents avaient droit à un bureau et à une voiture avec chauffeur…
En 2001, lorsque M. Delanoë est devenu maire, la nouvelle majorité a maintenu la commission permanente, mais en a supprimé l’activité, puisqu’il n’y avait plus de bureau ni de voiture avec chauffeur. (Sourires.) Ainsi, je ne suis pas sûr qu’elle se soit réunie, depuis lors, une seule fois.
M. Pierre Charon. Pas une fois !
M. Yves Pozzo di Borgo. Désormais, il n’y aura plus qu’une seule collectivité. Le problème est donc le suivant : on peut certes créer une commission permanente comme il en existe dans les conseils départementaux, mais Paris est plutôt une ville qu’un département, et ces commissions sont, disons, plus rares dans les villes.
En outre, il se trouve que la Ville de Paris n’est pas une commune démocratique, non à cause de ses élus, mais parce qu’elle a toujours été dirigée par des préfets et que l’on a gardé cette culture. Quel qu’ait été le maire – Jacques Chirac, Jean Tibéri, Bertrand Delanoë ou Anne Hidalgo –, c’est un système du pouvoir centralisé et autoritaire qui a perduré.
Le seul élément de démocratie réside précisément dans les réunions mensuelles de deux jours du conseil de Paris ; il y en a d’ailleurs une en ce moment. Ces réunions sont très importantes, parce que l’ensemble des élus, notamment ceux de l’opposition, peut étudier tous les sujets.
Si l’on crée cette commission permanente, de moins en moins de sujets seront donc traités par le conseil de Paris et l’on se demandera à quoi servent les conseillers de Paris, qui perçoivent d’ailleurs un bon salaire – quelque 4 000 euros par mois, me semble-t-il. De quoi traiteront-ils ? Des déchets canins ? Je ne suis même pas certain que cela entre dans leurs compétences…
Mme Catherine Génisson. C’est important !
M. Yves Pozzo di Borgo. Sans doute, chère collègue, mais je demande tout de même la suppression de cet article, parce que la commission permanente ne correspond pas à l’objet de la ville. Pour conserver la démocratie parisienne, il faut conserver la participation du conseil de Paris à l’ensemble des délibérations. Il y en a 412 à la réunion d’aujourd’hui et demain ; si une commission permanente est créée, il n’y en aura plus que 20 ou 25… Ce n’est pas acceptable.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 32.
M. Philippe Dominati. Nous touchons à un point d’achoppement, qui montre bien qu’il s’agit là d’un statut particulier, bien éloigné du droit commun.
Si je comprends bien l’objet de cette disposition, il y aura, d’une part, les adjoints au maire représentant l’exécutif de la municipalité au sein de cette commission permanente et, d’autre part, les adjoints au maire n’ayant pas accès à cette commission. D’où deux catégories d’adjoints : ceux qui auront le privilège d’appartenir à la commission permanente et les adjoints secondaires, annexes, alliés de la majorité municipale, qui n’y auront pas accès – des adjoints à moitié informés, si j’ose dire. Ces derniers ne participeront pas au débat ni aux décisions de l’exécutif.
Cette commission permanente dépossédera donc de leurs attributions non seulement les conseillers de Paris, mais encore les adjoints au maire. Et vous parlez d’une avancée démocratique ! Il faut une certaine dose de culot…
M. David Assouline. Oh !
M. Philippe Dominati. … pour oser affirmer que c’est un progrès pour la décentralisation et pour la représentation des citoyens parisiens.
Je constate d’ailleurs que, dans la vie actuelle des arrondissements, aucun élu d’aucune mairie d’arrondissement n’explique cela à sa population ; aucun Parisien n’est informé de cette disposition. Vous mettrez donc les citoyens devant le fait accompli lorsque l’Assemblée nationale adoptera rapidement, à la fin de décembre ou au début de janvier, ce projet de loi.
En réalité, cette commission permanente prouve que vous voulez porter un mauvais coup libertés communales. Il s’agit d’un régime dérogatoire, d’exception, car il y aura deux catégories d’élus : ceux qui siégeront à la commission permanente et ceux qui ne siégeront qu’au conseil de Paris.
C’est une manière d’anesthésier le conseil de Paris, c’est très clair. Les débats du conseil de Paris seront en grande partie vidés de leur substance et, de temps en temps, on lui donnera un débat emblématique. Néanmoins, la ville ne sera plus administrée comme l’ont voulu les différents Présidents de la République. (M. David Assouline s’exclame.) Il me reste encore quelques secondes de temps de parole, monsieur Assouline ; je sais que vous bouillez d’impatience d’intervenir, mais je ne voudrais pas vous priver du plaisir de m’entendre.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je vous propose, au travers de mon amendement, la suppression de cet article.
Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 89.
Mme Esther Benbassa. L’article 4 du présent projet de loi crée une commission permanente au sein du conseil de Paris, à laquelle celui-ci peut déléguer une partie de ses attributions, exception faite du vote du budget et de l’approbation du compte administratif. Or cette commission, fondée sur le modèle départemental, nous paraît illégitime à plusieurs égards.
Tout d’abord cette disposition n’a pas été débattue par le premier concerné, le conseil de Paris, qui aurait dû, à tout le moins, être consulté.
Ensuite, cette disposition semble au groupe écologiste aller à l’encontre de la réforme envisagée. Quelle logique y a-t-il en effet à supprimer l’échelon départemental à l’article 1er pour créer une commission régie par le droit commun départemental à l’article 4 ?
Enfin, cela rejoint les préoccupations de certains de nos collègues ; malgré l’assouplissement opéré par la commission des lois, nous craignons que le débat démocratique au sein du conseil de Paris ne soit mis en danger, voire vidé de sa substance.
M. Yves Pozzo di Borgo. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. J’entends bien les arguments, soit factuels – la fréquence des réunions de la commission permanente –, soit de fond, qui ont été exposés par MM. Pozzo di Borgo, Dominati et Mme Benbassa.
Néanmoins, cette commission permanente existe dans l’ensemble des collectivités, bien que cela ne soit pas habituel, cela a été dit, dans une ville. Il est important de permettre au conseil de Paris de débattre plus profondément des questions importantes, dans le respect de la démocratie locale – cela va sans dire –, comme cela se passe dans les départements et dans les régions.
Pour cette raison essentielle, la commission a souhaité maintenir l’existence d’une commission permanente et a donc émis un avis défavorable sur ces amendements identiques de suppression.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Dans une collectivité de cette importance, issue de la fusion d’une ville et d’un département, il est indispensable qu’une commission permanente traite d’un certain nombre de sujets, comme cela se passe dans les régions et les départements. Il s’agit tout de même non pas de n’importe quelle collectivité, mais de la Ville de Paris, avec toutes les responsabilités, les compétences et le budget qui lui incombent.
S’il faut, chaque fois qu’une décision doit être prise, réunir le conseil de Paris, il deviendra très compliqué d’administrer cette ville. (M. Hervé Marseille s’esclaffe.) Il s’agit donc là d’une mesure de souplesse et de facilité.
Par ailleurs, tous les adjoints seront bien membres de la commission permanente, monsieur Dominati, sauf, en effet, pendant la période transitoire.
M. Philippe Dominati. Il y aura vingt et un adjoints !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Non, tous seront membres de la commission permanente, sauf pendant la période transitoire, monsieur le sénateur.
Il appartiendra ensuite au conseil de Paris nouvellement élu en 2020 de définir le nombre d’adjoints. Je vous rappelle en effet que le nombre de membres des commissions permanentes départementales et régionales est fixé par délibération lors de la séance d’installation.
Je ne puis donc qu’être défavorable à ces amendements identiques.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je ne comprends pas. On veut tous rationaliser et, en rationalisant, contribuer à la démocratie. En effet, plus les délibérations et le débat public sont lisibles, plus le citoyen est à même de juger ce que font les élus. Si l’on rend au contraire les processus complètement abscons, incompréhensibles, voire irréels, alors le contrôle démocratique ne peut plus exister.
Au travers de ce texte, on fusionne la ville et le département. Or il est déjà compliqué de débattre de 400 à 500 délibérations par séance – je suis conseiller de Paris depuis un certain temps et d’autres ici l’ont été ou le sont encore –, même en trois ou quatre jours !
M. Yves Pozzo di Borgo. Il faut trier !
M. David Assouline. Pensez-vous donc qu’il soit plus démocratique de faire en sorte que toute question soit débattue ? Tout n’est pas dans tout !
M. Yves Pozzo di Borgo. Bien sûr !
M. David Assouline. Si des orateurs sont inscrits sur une question relativement mineure au regard de son poids budgétaire ou de son enjeu, il y aura un long débat, alors qu’un sujet plus important pourra ne donner lieu à aucune discussion ou, en tout cas, à aucune discussion perceptible des citoyens.
Pourquoi ne s’agit-il pas d’un défaut de démocratie ? Parce que, en aucun cas, l’endroit de la démocratie, au plus près des citoyens – les conseils d’arrondissement –, n’est dépossédé de la délibération puisque la commission permanente intervient après. Le débat aura donc bien lieu dans tous les conseils d’arrondissement, sur l’ensemble des délibérations, avec bien plus d’élus que les seuls conseillers de Paris.
M. Yves Pozzo di Borgo. C’est entièrement faux !
M. David Assouline. Cela se passe ainsi aujourd’hui, c’est un fait.
M. Yves Pozzo di Borgo. Mais non !
M. David Assouline. Je ne sais pas comment vous travaillez dans les arrondissements de droite. Peut-être ne soumettez-vous pas toutes les questions à la délibération, mais, dans le XXe arrondissement, où je suis élu, nous discutons de tout. Et la réforme proposée par ce texte ne supprime pas l’échelon de l’arrondissement pour les délibérations.
Par conséquent, je soutiens que, si l’on adopte une posture, non pas d’opposition systématique, monsieur Dominati, mais de recherche d’efficacité et de démocratie – quelle que soit la majorité parisienne –, on ne peut pas s’opposer à cette réforme. Mais quand on veut faire obstacle, on fait feu de tout bois et l’on fait semblant de croire qu’une progression de la démocratie représente un recul de la démocratie. Continuez comme cela, chers collègues…
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Il y a ce soir dans l’hémicycle quelques élus de province ; cela montre que nous sommes tout de même intéressés par ce qui se passe dans la ville et le département de Paris.
M. Jean-Claude Requier. C’est vrai !
M. Marc Laménie. Ce texte n’est pas simple – aucun texte ne l’est –, et c’est logique compte tenu des enjeux. Nous sommes confrontés ici à un dilemme.
D’un côté, certains collègues ont déposé des amendements tendant à supprimer la commission permanente, dont le fonctionnement, on peut l’imaginer, est complexe, avec nombre de délibérations et des budgets importants. Par ailleurs, la commission permanente ne regroupe pas tous les élus. Dans les départements et les régions, elle accueille tantôt tous les élus, tantôt une partie d’entre eux. Enfin, dans une ville comme Paris, qui est tout de même notre capitale, connue et reconnue, on essaie aussi, me semble-t-il, d’être efficace.
D’un autre côté, le rapporteur, dont je comprends les arguments, a formulé un avis défavorable. Pour ma part, je me rallierai à lui.
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote.
M. Christian Favier. Le groupe CRC est favorable à l’existence d’une commission permanente. Dans le cas de Paris, on comprend aisément ce qui justifie une telle commission, destinée à traiter certaines questions pour soulager les séances plénières.
Cela étant, nous avons tout de même quelques interrogations. Tout d’abord, il existe des différences entre la commission permanente et la séance plénière, comme le fait que les rapports ne sont pas examinés en commission spécialisée quand ils sont soumis à la commission permanente, contrairement aux rapports étudiés en séance plénière.
Par ailleurs, l’étendue des prérogatives pose problème. Ce qui paraît excessif en l’occurrence, c’est que, en dehors du budget, toutes les attributions peuvent être déléguées à la commission permanente. Cela semble extrêmement large et, si cette logique est suivie jusqu’au bout, cela peut supprimer tout l’intérêt des séances du conseil de Paris.
Nous ne pouvons donc voter ces amendements de suppression, parce que nous sommes favorables à la création d’une commission permanente et parce que cette disposition, telle qu’elle est rédigée, pose question.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Dans certains départements, dont le mien – le Lot –, les commissions permanentes regroupent tout le conseil général. Ainsi, tous les conseillers ont le sentiment d’être informés ! (Sourires. – M. Philippe Dallier s’esclaffe.)
Cela coûte un peu plus cher, mais la baisse des indemnités permet d’équilibrer le dispositif.
M. Philippe Dallier. C’est bizarre, le Sud ! (Nouveaux sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.
M. Yves Pozzo di Borgo. En deux jours, quelque 482 délibérations sont soumises au conseil de Paris. Le travail s’effectue d’abord en commission, puis au sein du conseil. Chaque groupe choisit de participer à telle ou telle délibération. Il s’agit déjà, en quelque sorte, d’une commission permanente comportant 163 conseillers de Paris. Et les choses fonctionnent très bien !
Si on limite les compétences du conseil de Paris, la plupart des élus ne sauront pas ce qui s’y passe. C’est complètement fou ! Je connais suffisamment bien le système pour savoir qu’il ne peut fonctionner dans une logique de commission permanente. Mieux vaudrait passer à 30 ou 40 conseillers, ce serait autant d’économies pour la Ville de Paris !
La création de cette commission permanente s’apparente à un déni de démocratie. Que restera-t-il à faire aux conseillers de Paris, sinon d’aller se promener ?
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.
M. Philippe Dominati. Je souhaite abonder dans le sens d’Yves Pozzo di Borgo.
Nous avons obtenu une précision : Mme la maire de Paris et ses 22 adjoints vont faire partie de la commission permanente. À titre de comparaison, la commission permanente de la région d’Île-de-France comporte 60 membres, dont les 15 vice-présidents et la présidente, sur un total de 209 conseillers régionaux.
Autrement dit, au nom de la simplification et de votre conception de la démocratie, la commission permanente du conseil de Paris, qui ne compte que 163 membres, sera supérieure en nombre à celle du conseil régional ! Et vous appelez cela une simplification et un rapprochement vis-à-vis des Parisiens ?
J’espère que ma démonstration par l’absurde aura le mérite de clarifier le débat et bien faire comprendre quelle est réellement la situation.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 19, 32 et 89.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe UDI-UC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 53 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 195 |
Contre | 148 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l'article 4 est supprimé, et l'amendement n° 104 n'a plus d'objet.
Toutefois, pour la bonne information du Sénat, je rappelle les termes de cet amendement n° 104, présenté par le Gouvernement et ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
3° L’article L. 2512-8 est ainsi rédigé :
II. – Alinéa 7
Remplacer la référence ;
L. 2512-5-2
par la référence :
L. 2512-8
III. – Alinéa 14
Supprimer cet alinéa.
Article 4 bis (nouveau)
Après l’article L. 2512-5 du même code, il est inséré un article L. 2512-5-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 2512-5-3 – I. – Une conférence des maires est instituée sur le territoire de la Ville de Paris. Elle est composée du maire de Paris, qui la préside de droit, et des maires d’arrondissement.
« Elle peut être consultée lors de l’élaboration et de la mise en œuvre de politiques de la Ville de Paris. Son avis est communiqué au conseil de Paris.
« La conférence des maires est convoquée par le maire de Paris. Elle se réunit au moins une fois par an, à l’initiative du maire de Paris ou à la demande de la moitié des maires, sur un ordre du jour déterminé.
« II. – La conférence des maires élabore, dans les six mois qui suivent chaque renouvellement général des conseils municipaux, un projet de pacte de cohérence entre la mairie de Paris et les mairies d’arrondissement.
« Ce projet propose une stratégie de délégation de compétences de la Ville de Paris aux arrondissements.
« La conférence des maires adopte le projet de pacte de cohérence à la majorité des maires d’arrondissement représentant au moins la moitié de la population totale de la Ville de Paris.
« Le pacte de cohérence est arrêté par délibération du conseil de Paris, après consultation des conseils d’arrondissement.
« III. – Les modalités de fonctionnement de la conférence des maires sont déterminées par le règlement intérieur de la Ville de Paris. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 44 est présenté par M. P. Dominati.
L'amendement n° 105 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 44.
M. Philippe Dominati. Je souhaite que la Ville de Paris reste associée au destin de droit commun des communes de Lyon et de Marseille. Cet amendement tend précisément à ce que les propositions que le Gouvernement considère comme bonnes puissent s’appliquer à ces municipalités.
Toutefois, la commission permanente ayant été supprimée, je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 44 est retiré.
La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 105.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Pour une fois que le Gouvernement était d’accord avec vous, monsieur Dominati, vous retirez votre amendement ! Décidément, nous n’y arriverons jamais… (Sourires.)
Le Gouvernement demande la suppression de cet article, car les conférences des maires dans les métropoles de Lyon et Aix-Marseille-Provence réunissent des maires, c’est-à-dire des exécutifs de collectivités territoriales à part entière. À Paris, il s’agirait de maires d’arrondissement, structures ne pouvant être juridiquement mises sur le même plan qu’une commune.
Les modalités de rencontres entre le maire de Paris et les maires d’arrondissement relèvent naturellement de la libre administration de la Ville de Paris. Au-delà, le conseil de Paris – cela a suffisamment été répété ce soir – est l’instance de dialogue entre les maires d’arrondissement et le maire de la ville.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement demande la suppression de cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. J’entends l’argument avancé par M. le ministre, mais je veux rappeler que la commission a conçu cette instance, qui n’est pas une instance décisionnelle, pour mieux associer les conseils d’arrondissement à la gestion et aux projets de la collectivité territoriale.
Ce serait aussi le lieu où serait organisée la déconcentration nécessaire des compétences de la Ville au plus près du terrain, dans le cadre des arrondissements, afin de mieux répondre aux attentes des administrés.
J’émettrai donc un avis défavorable sur cet amendement, qui est contraire à la proposition de la commission.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4 bis.
(L'article 4 bis est adopté.)
Article 5
(Non modifié)
L’article L. 2512-20 du même code est ainsi rétabli :
« Art. L. 2512-20. – Sous réserve de la présente sous-section, la Ville de Paris est soumise aux dispositions des livres III des deuxième et troisième parties.
« La Ville de Paris est soumise aux dispositions des articles L. 5217-10-1 à L. 5217-10-15 et L. 5217-12-2 à L. 5217-12-5. Elle est soumise à la liste des dépenses obligatoires des communes et des départements telle qu’elle résulte de l’application des articles L. 2321-2 et L. 3321-1. »
Mme la présidente. L'amendement n° 45, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 45 est retiré.
Je mets aux voix l'article 5.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
I. – Le même code est ainsi modifié :
1° Au quatrième alinéa de l’article L. 2123-11-2, la référence : « et L. 2511-34 » est remplacée par les références : « , L. 2511-34 et L. 2511-34-1 » ;
2° Aux premier et second alinéas de l’article L. 2511-34, les mots : « le conseil de Paris et » sont supprimées ;
3° Après l’article L. 2511-34, il est inséré un article L. 2511-34-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2511-34-1. – Les indemnités votées par le conseil de Paris pour l’exercice effectif des fonctions de maire et de président de la délégation spéciale sont au maximum égales à 192,5 % du terme de référence mentionné au I de l’article L. 2123-20.
« Les indemnités votées par le conseil de Paris pour l’exercice effectif des fonctions d’adjoint au maire et de membre de la délégation spéciale sont au maximum égales à 128,5 % du terme de référence mentionné au même I.
« Les indemnités votées par le conseil de Paris pour l’exercice effectif des fonctions de conseiller de Paris sont au maximum égales à 90,5 % du terme de référence mentionné audit I.
« L’indemnité de fonction de chacun des membres de la commission permanente du conseil de Paris autres que le maire de Paris, les adjoints au maire de Paris ayant reçu délégation de l’exécutif, les conseillers de Paris ayant reçu délégation de l’exécutif et les conseillers de Paris investis des fonctions de maire d’arrondissement est, dans les mêmes conditions, au maximum égale à l’indemnité maximale de conseiller de Paris majorée de 10 %. » ;
4° L’article L. 2511-35 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après les mots : « des maires d’arrondissement », sont insérés les mots : « de Marseille et Lyon » ;
b) À la seconde phrase, le mot : « Paris, » est supprimé ;
5° Après l’article L. 2511-35, il est inséré un article L. 2511-35-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2511-35-1. – L’indemnité de fonction des conseillers de Paris investis des fonctions de maire d’arrondissement de Paris est au maximum égale à 128,5 % du terme de référence mentionné au I de l’article L. 2123-20.
« L’indemnité de fonction des maires d’arrondissement de Paris qui ne sont pas conseillers de Paris est au maximum égale à 72,5 % du terme de référence mentionné au même I.
« L’indemnité de fonction des adjoints au maire d’arrondissement de Paris qui ne sont pas conseillers de Paris est au maximum égale à 34,5 % du terme de référence mentionné audit I. » ;
6° Le dernier alinéa de l’article L. 3123-16 est supprimé ;
7° L’article L. 3123-17 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « ou par le conseil de Paris » sont supprimés ;
b) Au deuxième et au troisième alinéas, les mots : « ou du conseil de Paris » sont supprimés ;
c) Au dernier alinéa, les mots : « l’avant-dernier » sont remplacés par les mots : « le dernier ».
II. – Par dérogation à l’article L. 2511-34-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de la présente loi, et jusqu’au prochain renouvellement général des conseils municipaux, les indemnités votées par le conseil de Paris aux adjoints au maire qui exerçaient concomitamment au 31 décembre 2018 les fonctions d’adjoint au maire et de vice-président, sont au maximum égales à 150,5 % du terme de référence mentionné au I de l’article L. 2123-20 du même code.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 46 est présenté par M. P. Dominati.
L'amendement n° 84 rectifié est présenté par MM. Mézard, Arnell, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 46.
M. Philippe Dominati. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 46 est retiré.
La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l'amendement n° 84 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Cet amendement venu des cimes du Cantal apporte un vent de fraîcheur dans notre assemblée. (Sourires.)
Inspiré par M. Mézard, cet amendement vise à supprimer l’article 6 du projet de loi, qui met en place un régime indemnitaire spécifique pour les membres du conseil de Paris, les maires et leurs adjoints d’arrondissement. Ce régime permet de maintenir le cumul des indemnités afférentes à leurs fonctions au sein du conseil municipal et du conseil départemental, et ce même après la fusion à compter du 1er janvier 2019.
Or, s’il avait été rappelé lors des débats sur la loi du 14 février 2014 que le non-cumul des mandats pour les parlementaires avec une fonction exécutive locale répondait à une attente forte des Français, telle n’est pas exactement la réalité : en fait, comme nous l’avions dit et redit – vous étiez alors des nôtres, monsieur le ministre –, les Français sont surtout opposés au cumul des indemnités.
Le présent amendement de suppression tend donc à aligner la situation indemnitaire du maire et des adjoints au maire de Paris sur celle des maires et des adjoints des communes de plus de 100 000 habitants, mettant fin au cumul des indemnités au sein du conseil départemental et municipal, cumul devenu aussi incompréhensible qu’anachronique.
Ainsi, monsieur le ministre, mes chers collègues, soyons enfin modernes, sans hypocrisie ni démagogie, et adoptons le présent amendement de notre excellent collègue Jacques Mézard.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Cet amendement vise à favoriser la plus grande transparence.
La commission s’en remet à la sagesse du Sénat, sous réserve des explications du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Les conseillers de Paris, par ailleurs conseillers départementaux, cumulent ces indemnités, calculées au plus juste eu égard à leur implication et aux responsabilités qui leur incombent.
En fusionnant les deux collectivités, il va de soi que nous ne retirons aucune compétence ni aucune responsabilité aux élus. Il est donc logique qu’ils conservent les mêmes indemnités cumulées.
Si le législateur, dans sa sagesse, avait considéré comme nécessaire de cumuler les indemnités de conseiller départemental et de conseiller municipal à Paris, le fait de fusionner ces deux collectivités n’enlève rien à l’engagement des élus. Il est donc légitime qu’ils conservent ces mêmes indemnités. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. François Bonhomme. Olé !
M. Jean-Claude Requier. Je retire cet amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L'amendement n° 84 rectifié est retiré.
L'amendement n° 20, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 2511-35-… – Aucune sanction ne peut être appliquée à un membre du conseil de Paris qui est également parlementaire et désigné par son assemblée pour participer à une mission outre-mer, à l’étranger ou aux travaux d’une assemblée internationale. » ;
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Monsieur le ministre, si la commission permanente avait été instaurée, il aurait fallu supprimer les indemnités des conseillers de Paris, qui n’auraient plus rien eu à faire…
Lorsqu’un parlementaire est absent du conseil de Paris du fait de ses activités de sénateur ou de député, comme un certain nombre d’entre nous aujourd’hui, il est inscrit comme absent dans le compte rendu des débats. Indépendamment des éventuelles sanctions financières, qui sont secondaires, c’est très déplaisant par rapport à nos électeurs et aux deux millions de Parisiens qui suivent notre action et qui sont toujours très inquiets de voir que nous n’assistons pas à la réunion du conseil.
Je demanderai à la commission et au Gouvernement de faire preuve de sagesse, car il s’agit d’un amendement de bon sens.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Si j’entends vos arguments, mon cher collègue, une telle décision relève du règlement intérieur du conseil de Paris.
C'est la raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.
M. Yves Pozzo di Borgo. Si cette question ne dépendait que du règlement intérieur du conseil de Paris, je n’aurais pas déposé cet amendement, monsieur le rapporteur.
Cette question dépend d’un autre texte relatif au conseil général. Je crois que vos collaborateurs ne l’ont pas bien compris…
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 6.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
(Non modifié)
Les agents de la commune et du département de Paris relèvent de plein droit de la Ville de Paris, à la date de sa création, dans les conditions de statut et d’emploi qui sont les leurs.
Mme la présidente. L'amendement n° 47, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 47 est retiré.
Je mets aux voix l'article 7.
(L'article 7 est adopté.)
Article 8
I. – Les chapitres Ier et II du titre Ier du livre IV de la troisième partie du code général des collectivités territoriales sont abrogés.
II. – Le 2° de l’article L. 222-2 du code des relations entre le public et l’administration est abrogé.
Mme la présidente. L'amendement n° 48, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Je retire également cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 48 est retiré.
Je mets aux voix l'article 8.
(L'article 8 est adopté.)
Section 2
Dispositions diverses et transitoires
Article 9
I. – (Non modifié) À l’exception des dispositions du présent article, les dispositions du présent chapitre entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2019.
II. – En vue de la création de la Ville de Paris, le Gouvernement est autorisé, dans les conditions fixées par l’article 38 de la Constitution et dans les douze mois suivant la publication de la présente loi, à prendre par ordonnance les mesures de nature législative :
1° Tendant à adapter, en conséquence de la création de la Ville de Paris, les modalités d’organisation, de fonctionnement et de financement de tout établissement ou organisme institué par la loi ;
2° Propres à adapter les références au département et à la commune dans toutes les dispositions législatives en vigueur susceptibles d’être applicables à la Ville de Paris ;
3° Propres à préciser et adapter les règles budgétaires, financières, fiscales, comptables et relatives aux concours financiers de l’État applicables à cette collectivité.
Le projet de loi portant ratification de chaque ordonnance est déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant la publication de cette ordonnance.
Mme la présidente. L'amendement n° 49, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 49 est retiré.
L'amendement n° 106, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer le mot :
ordonnance
par le mot :
ordonnances
La parole est à M. le ministre.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Favorable, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 55 rectifié, présenté par MM. P. Laurent et Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
, autres que celles déjà incluses dans la présente loi
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. L’alinéa 2 de cet article donne au Gouvernement le pouvoir de prendre par ordonnances des mesures législatives en vue de la création de la Ville de Paris.
Le champ de ces ordonnances est très large : adapter les modalités d’organisation, de fonctionnement et de financement de tout établissement ou organisme institué par la loi et dont la commune ou le département est membre ; procéder, dans la législation en vigueur, aux coordinations de références résultant de la substitution de la collectivité unique au département et à la commune de Paris ; préciser et adapter les règles budgétaires, financières, fiscales, comptables et relatives aux concours financiers de l’État qui seraient applicables à la Ville de Paris.
Or un certain nombre de dispositions du projet de loi ont déjà pour but de résoudre certains problèmes essentiels posés par ce changement de statut.
Cet amendement vise à exclure du champ des ordonnances ce qui aura déjà été réglé par la loi, afin d’éviter que le Gouvernement ne revienne, par le biais des ordonnances, sur des dispositions votées par le Parlement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Cet amendement semble satisfait sur le fond. Il va de soi que les ordonnances qui seront prises dans le cadre de l’habilitation législative sollicitée par le Gouvernement porteront sur les adaptations nécessaires résultant de la création de la collectivité unique et non prévues par le présent projet de loi.
C'est la raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Cet amendement, qui vise à préciser que le Gouvernement ne prendra des mesures par voie d’ordonnance que sur des points non réglés par le présent projet de loi, est superfétatoire. En effet, le Gouvernement ne peut prendre par ordonnance que les mesures entrant dans le champ d’habilitation fixé par l’article 9 du présent texte.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur Laurent ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Laurent, l'amendement n° 55 rectifié est-il maintenu ?
M. Pierre Laurent. Compte tenu des explications qui m’ont été données, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 55 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 9
Mme la présidente. L'amendement n° 67 rectifié, présenté par MM. P. Laurent et Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa du II de l’article L. 2531-13 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « des communes de la région d’Île-de-France » sont insérés les mots : « ou de la Ville de Paris ».
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. Si vous me le permettez, madame la présidente, je présenterai également l’amendement n° 68 rectifié, dont l’objet est analogue.
Mme la présidente. L'amendement n° 68 rectifié, présenté par MM. P. Laurent et Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 3335-4 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 3335-4-…. ainsi rédigé :
« Art. L. 3335-4-… – La Ville de Paris est substituée de plein droit au département de Paris pour l’application des articles L. 3335-1 à L. 3335-4. »
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Christian Favier. Au travers de l’amendement n° 67 rectifié, nous souhaitons clarifier une incertitude qui inquiète légitimement nombre d’élus de petite couronne.
Il convient de préciser que nous restons persuadés que la dotation globale de fonctionnement doit rester la première source de financement des collectivités territoriales. La péréquation horizontale ne doit certainement pas se substituer à cette dotation globale de fonctionnement. Nous amenderons en ce sens le projet de loi de finances pour 2017.
Toutefois, au regard des baisses successives de la dotation globale de fonctionnement, la péréquation, notamment le fonds de solidarité des communes de la région d’Ile-de-France, avec des ressources de 290 millions d’euros, est aujourd’hui indispensable pour assurer un certain nombre de politiques publiques – je pense, notamment, à la survie de services publics établis sur des territoires aujourd’hui insuffisamment aidés.
Au travers de cet amendement, et après sollicitations d’élus locaux, nous voulons être certains que Paris continuera, même après le changement de statut, de contribuer à ce fonds de solidarité.
L’amendement n° 68 rectifié vise quant à lui plus spécifiquement la contribution de Paris au fonds départemental de péréquation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Ces deux amendements me semblent satisfaits par le sous-amendement n° 143 de la commission à l’amendement n° 101 du Gouvernement, qui a été adopté lors de l’examen de l’article 1er.
C'est la raison pour laquelle je demande le retrait de ces amendements ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Le Gouvernement partage la position de la commission.
L’amendement n° 67 rectifié tend à préciser que la Ville de Paris est bien considérée comme une commune d’Île-de-France pour la contribution au Fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France, le FSRIF.
Or cette précision, monsieur Favier, est inutile : en 2017, Paris continuera d’être considérée à la fois comme une commune et comme un département pour le calcul des dotations des fonds de péréquation. Les mesures de coordination qui pourraient éventuellement se révéler nécessaires seront présentées dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018.
Je tiens à saisir cette occasion pour réaffirmer devant le Sénat, de la manière la plus claire, que la fusion n’aura en aucun cas pour effet de réduire la contribution de la commune ou du département de Paris au dispositif de péréquation.
Pour ces dispositifs, les calculs seront faits comme s’il existait toujours une commune et un département. Il en va déjà ainsi dans les autres collectivités uniques réunissant deux niveaux : la métropole de Lyon, la Guyane ou la Martinique. Il en ira très prochainement de même en Corse, lorsque la collectivité territoriale de Corse et les départements auront fusionné.
Pour ces raisons, je demande le retrait de ces amendements ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Favier, les amendements nos 67 rectifié et 68 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Christian Favier. Monsieur le ministre, j’entends votre engagement très clair en ce qui concerne la continuité de la contribution de Paris au Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France, ainsi qu’au fonds départemental de péréquation. J’espère que cela ne vaudra pas seulement pour 2017, mais aussi pour les années suivantes.
Compte tenu de ces précisions, je retire ces amendements, madame la présidente.
Mme la présidente. Les amendements nos 67 rectifié et 68 rectifié sont retirés.
Article 10
Le maire de Paris, ses adjoints, les autres conseillers de Paris ainsi que les maires d’arrondissement, leurs adjoints et les conseillers d’arrondissement en fonction lors de la création de la Ville de Paris sont maintenus dans leurs mandats et leurs fonctions jusqu’au prochain renouvellement général des conseils municipaux.
Lors de la première séance du conseil de Paris qui suit la création de la Ville de Paris, le conseil de Paris fixe le nombre des membres de la commission permanente qu’il élit en son sein dans les conditions prévues aux troisième à cinquième alinéas de l’article L. 2512-5-2 du code général des collectivités territoriales.
Par dérogation aux dispositions de ce même article et jusqu’au prochain renouvellement général des conseils municipaux, la commission permanente n’est composée que du maire et des membres élus dans les conditions prévues au deuxième alinéa du présent article.
Les représentants désignés par la commune de Paris et le département de Paris dans des organismes extérieurs y représentent la Ville de Paris à compter de sa création et jusqu’au prochain renouvellement général des conseils municipaux.
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Marseille, sur l’article.
M. Hervé Marseille. Je voudrais juste apporter une précision. M. Favier a raison de s’interroger pour l’avenir. Si un gel de la contribution a bien été prévu pour 2017, une augmentation de 2 % est d'ores et déjà programmée pour 2018, mais nous ignorons le montant des contributions. Ces précisions peuvent figurer en loi de finances, mais aussi dans l’ordonnance.
J’imagine, monsieur le ministre, que vous vous êtes engagé au maintien du plafonnement. Dans le cas contraire, à enveloppe constante, ce seront les autres qui paieront.
Mme la présidente. L'amendement n° 50, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. J’aimerais connaître l’avis du rapporteur sur cet amendement, que j’aurais volontiers retiré.
Dans la mesure où il est fait mention de la commission permanente, j’aimerais savoir quels amendements M. le rapporteur souhaite porter à l’article 10. En effet, la suppression de l’article offrirait un peu plus de temps au rapporteur ou au Gouvernement pour nous faire de nouvelles propositions.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’article 10, lequel garantit la pérennité, jusqu’au prochain renouvellement général des conseils municipaux, en 2020, des mandats et fonctions en cours au moment de la mise en place de la nouvelle collectivité.
M. Philippe Dominati. Quid de la commission permanente ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Pour les motifs précédemment exposés, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, qui vise à vider la loi d’un de ses principaux objectifs, sans aucune justification.
En l’espèce, il s’agit de supprimer l’article 10, qui prévoit justement des dispositions transitoires facilitant la création de la Ville de Paris, notamment le maintien des élus parisiens dans leurs mandats et leurs fonctions. Ces mesures sont bien sûr indissociables de la réforme envisagée.
Mme la présidente. Monsieur Dominati, l’amendement n° 50 est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 50 est retiré.
L'amendement n° 107, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer la référence :
L. 2512-5-2
par la référence :
L. 2512-8
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Le Gouvernement propose de placer, conformément à sa position initiale, les dispositions relatives à la commission permanente du conseil de Paris à l’article L. 2512-8 du code général des collectivités territoriales, plutôt qu’à un nouvel article L. 2512-5-2.
Cet amendement est cohérent avec celui que le Gouvernement a déposé sur l’article 4.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Pour les motifs de cohérence rédactionnelle exposés lors de l’examen de l’amendement n° 104 du Gouvernement, à l’article 4, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote sur l'article.
M. Alain Richard. Je crois que M. Dominati avait raison sur un point. Je rappelle que la majorité du Sénat a cru devoir supprimer la commission permanente. Or cet article 10 comporte un alinéa prévoyant l’élection de ladite commission…
Il semble donc préférable de réserver le vote sur l’article, de manière que M. le rapporteur ait le temps de proposer une disposition de coordination.
Demande de réserve
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. À la suite de la remarque formulée par M. Alain Richard, la commission demande la réserve du vote de l’article 10 jusqu’à la fin de l’examen du présent texte.
Mme la présidente. Je suis donc saisie par la commission d’une demande de réserve du vote de l’article 10 jusqu’à la fin de l’examen du projet de loi.
Aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, la réserve est de droit lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande formulée par la commission ?
Mme la présidente. La réserve est ordonnée.
Article 11
(Non modifié)
La Ville de Paris est substituée à la commune de Paris et au département de Paris dans l’ensemble de leurs droits et obligations, dans toutes les délibérations et tous les actes qui relèvent de sa compétence, ainsi que dans toutes les procédures administratives et juridictionnelles en cours à la date de sa création.
Dans les mêmes conditions, la Ville de Paris est substituée à la commune de Paris et au département de Paris dans tous les contrats en cours à la date de sa création. Les contrats sont exécutés dans les conditions antérieures jusqu’à leur échéance, sauf accord contraire des parties. Les cocontractants sont informés de la substitution de la personne morale par la Ville de Paris. La substitution de personne morale aux contrats antérieurement conclus n’entraîne aucun droit à résiliation ou à indemnisation pour le cocontractant.
Les transferts de biens sont réalisés à titre gratuit.
Les transferts de biens, droits et obligations ne donnent lieu ni au versement de la contribution prévue à l’article 879 du code général des impôts, ni à la perception d’impôts, de droits ou de taxes de quelque nature que ce soit.
Mme la présidente. L'amendement n° 51, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 51 est retiré.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 13 est présenté par MM. Marseille et J. Gautier.
L'amendement n° 56 rectifié est présenté par MM. P. Laurent et Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 1
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
La Ville de Paris est substituée à la commune de Paris au sein des syndicats dont la commune de Paris était membre. Les attributions des syndicats, qui demeurent syndicats mixtes au sens de l’article L. 5711-1 du code général des collectivités territoriales et le périmètre dans lequel ils exercent leurs compétences ne sont pas modifiés.
La Ville de Paris est substituée au département de Paris au sein des syndicats dont le département de Paris était membre. Les attributions des syndicats, qui demeurent syndicats mixtes au sens de l’article L. 5721-2 du même code et le périmètre dans lequel ils exercent leurs compétences ne sont pas modifiés.
La parole est à M. Hervé Marseille, pour présenter l’amendement n° 13.
M. Hervé Marseille. Par cet amendement, il s’agit de stabiliser les grands syndicats de l’Île-de-France.
Mon collègue Christian Favier a évoqué tout à l’heure le SIAAP, le syndicat interdépartemental pour l’assainissement de l’agglomération parisienne. Toutefois, il existe un autre syndicat intercommunal, qui gère les barrages-réservoirs, ce qui lui confère une certaine importance au moment où la question des crues ne cesse de se poser.
Compte tenu de la loi NOTRe, ces syndicats sont sujets à des modifications permanentes. En effet, les collectivités qui en sont membres sont contraintes de réadhérer ; il faut ensuite modifier les statuts et, parfois, modifier un certain nombre de périmètres. Tout cela est très compliqué s’agissant d’ensembles importants.
Pour ma part, je préside le Syctom, le Syndicat intercommunal de traitement des ordures ménagères de l’agglomération parisienne, qui regroupe 84 communes, dont la Ville de Paris. Les statuts en ont été modifiés par deux fois au cours de cette année, et il devient difficile de travailler dans de telles conditions !
Par conséquent, à partir du moment où la Ville de Paris endosse son nouveau statut particulier, il convient de veiller, pour ne pas déstabiliser de nouveau les syndicats, à garantir une certaine pérennité : la substitution doit s’opérer sans modification des statuts ni du périmètre. Sinon, nous passerons notre temps à régler des problèmes d’ingénierie territoriale ou institutionnelle et nous ne pourrons plus travailler et gérer l’assainissement ou les barrages-réservoirs, particulièrement importants en cette période.
Je le répète, cet amendement vise à stabiliser la présence de la Ville de Paris au sein de ces syndicats, pour ne pas créer de nouveau des difficultés de tous ordres.
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Favier, pour présenter l’amendement n° 56 rectifié.
M. Christian Favier. La commune et le département de Paris sont membres de syndicats mixtes ou interdépartementaux.
La Ville de Paris étant amenée à se substituer à la commune et au département de Paris dans ces syndicats, le présent amendement a pour objet de permettre cette substitution sans qu’il soit nécessaire de changer le statut de ces syndicats. Son adoption aurait l’avantage d’assurer une sécurité juridique et une continuité des services publics assurés par ces syndicats, dont les fonctions sont souvent vitales pour la population non seulement de Paris, mais aussi de la métropole.
Mme la présidente. L'amendement n° 98, présenté par M. Marseille, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
La Ville de Paris est substituée au département de Paris au sein des syndicats dont le département de Paris était membre. Les attributions des syndicats, qui demeurent syndicats interdépartementaux au sens des articles L. 3451-1 et suivants du code général des collectivités territoriales et le périmètre dans lequel ils exercent leurs compétences ne sont pas modifiés.
La parole est à M. Hervé Marseille.
M. Hervé Marseille. Les dispositions de cet amendement complètent celles de l’amendement précédent. Afin d’éviter toute ambiguïté, il convient de mentionner explicitement que la Ville de Paris se substitue, au sein des syndicats, au département et à la commune, sans modification des statuts juridiques.
J’ai parlé à l’instant, à l’instar de mon collègue Christian Favier, des syndicats interdépartementaux. Toutefois, il existe d’autres syndicats, comme le Syctom, auquel la Ville de Paris adhère. Il convient de ne pas les déstabiliser, compte tenu du nouveau statut de l’entité parisienne, qui pourrait créer une insécurité juridique susceptible de les mettre à mal à un moment inopportun, puisqu’ils ont déjà dû, je le répète, s’adapter progressivement aux conditions d’application de la loi NOTRe, application qui est encore inachevée.
Des dispositions doivent donc être prises pour assurer la stabilité juridique de ces grands syndicats.
Mme la présidente. L'amendement n° 108, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
À compter de sa date de création, la Ville de Paris est substituée à la commune de Paris et au département de Paris au sein de tous les établissements publics dont chacune des deux collectivités était membre à cette date. Cette substitution ne modifie pas la qualité et le régime juridique applicables à ces établissements publics.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Cet amendement a le même objet que les amendements qui viennent d’être présentés. Toutefois, dans la mesure où il tend à couvrir l’ensemble du champ concerné, il paraît plus complet.
Il s’agit en effet de prévoir, à compter du 1er janvier 2019, la substitution de la Ville de Paris à la commune et au département de Paris au sein de tous les établissements publics dont chacune de ces deux collectivités était membre, à la date du 31 décembre 2018.
Cet amendement vise ainsi à assurer une continuité de l’exercice des compétences exercées par des établissements publics pour le compte de la commune et du département de Paris.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. La commission demande le retrait des amendements identiques nos 13 et 56 rectifié, ainsi que de l'amendement n° 98, qui seront satisfaits par l’adoption de l’amendement n° 108 du Gouvernement. À défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
En revanche, elle est favorable à l'amendement n° 108.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’ensemble de ces amendements, à l’exception de celui qu’il a présenté ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Les dispositions de l’amendement n° 108 du Gouvernement reprennent, de fait, l’ensemble des autres amendements en discussion commune.
Je demande donc aux auteurs des amendements identiques nos 13 et 56 rectifié, ainsi que l'amendement n° 98, de bien vouloir les retirer au profit de l'amendement n° 108.
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Marseille, pour explication de vote.
M. Hervé Marseille. Je ne verrais pas d’inconvénient à retirer mes amendements au profit de celui du Gouvernement. J’émettrai simplement une réserve : les dispositions de l’amendement n° 108 ne font pas référence au périmètre…
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Monsieur le sénateur, permettez-moi de vous rappeler les termes de l’amendement n° 108 : « À compter de sa date de création, la Ville de Paris est substituée à la commune de Paris et au département de Paris au sein de tous les établissements publics dont chacune des deux collectivités étaient membres ».
Les dispositions de cet amendement couvrent donc l’ensemble du champ concerné.
Mme la présidente. Monsieur Marseille, l’amendement n° 13 est-il maintenu ?
M. Hervé Marseille. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 13 est retiré.
Monsieur Favier, l’amendement n° 56 rectifié est-il maintenu ?
M. Christian Favier. Non, je le retire, madame la présidente, au profit de l’amendement n° 108.
Mme la présidente. L'amendement n° 56 rectifié est retiré.
Monsieur Marseille, l’amendement n° 98 est-il maintenu ?
M. Hervé Marseille. C’est justement l’amendement dont les dispositions font référence au périmètre dans lequel les syndicats exercent leurs compétences ! Je suis prêt à m’en remettre, encore une fois, aux explications de M. le ministre. Par conséquent, sous réserve d’investigations plus importantes, je m’apprête à retirer cet amendement.
En fait, les périmètres sont importants, dans la mesure où une certaine complexité est née de la loi NOTRe. À cet égard, je me tourne vers les représentants de la DGCL, la Direction générale des collectivités territoriales, qui se trouvent au banc du Gouvernement. Sans vouloir entrer dans un débat technique, je rappelle qu’il existe des représentations en étoile : à l’intérieur d’un même EPT, les villes n’adhèrent pas forcément aux mêmes syndicats, ce qui peut occasionner des discussions concernant les statuts. En effet, selon que l’on s’appuie sur les collectivités adhérentes ou sur l’ensemble des EPT, on n’obtient pas les mêmes résultats.
Je retire cet amendement pour faciliter l’avancée de nos travaux, mais je vous demande, monsieur le ministre, d’examiner de plus près la question des périmètres.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Monsieur Marseille, le principe est celui de la substitution. Il n’y a pas de modification des périmètres. Vos préoccupations devraient donc être satisfaites par l’adoption de l’amendement n° 108.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 57 rectifié, présenté par MM. P. Laurent et Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Au premier alinéa du I de l’article L. 5219-1 du code général des collectivités territoriales, les mots : « établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre à statut particulier » sont remplacés par les mots : « syndicat mixte ouvert ».
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. Si vous le permettez, madame la présidente, je présenterai de façon conjointe les amendements nos 57 rectifié et 58 rectifié.
Mme la présidente. J’appelle donc en discussion l'amendement n° 58 rectifié, présenté par MM. P. Laurent et Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Au premier alinéa du I de l’article L. 5219-1 du code général des collectivités territoriales, les mots : « de coopération intercommunale à fiscalité propre à statut particulier » sont supprimés.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Christian Favier. Le changement de statut de Paris peut constituer une source d’insécurité juridique pour les regroupements de collectivités territoriales dont la commune ou le département de Paris étaient membres. C’est notamment le cas pour la métropole du Grand Paris. En effet, l’article L. 5219-1 du code général des collectivités territoriales la définit comme étant un « établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre à statut particulier ».
Or le fait que Paris soit non plus une commune, mais une collectivité territoriale à statut particulier, pourrait entraîner la contestation du caractère d’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre de la métropole du Grand Paris.
Afin de se prémunir contre cette éventualité et d’assurer la continuité du service public existant, cet amendement vise à transformer la métropole du Grand Paris en syndicat mixte ouvert, ce statut permettant de faire coopérer, dans une même structure, des communes et d’autres collectivités territoriales.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. L’amendement n° 57 rectifié vise à transformer la métropole du Grand Paris, aujourd'hui établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre en syndicat mixte ouvert, à la suite de la création de la collectivité unique. Il semble que l’amendement n° 108 tende à régler cette question.
La commission demande le retrait des amendements nos 57 rectifié et 58 rectifié ; à défaut, elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Le point de vue du Gouvernement est identique à celui de la commission. En effet, l’amendement n° 108, que nous venons d’adopter, règle le problème.
Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Favier, les amendements nos 57 rectifié et 58 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Christian Favier. Oui, je les maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Au début de l’examen de ce texte, on a souligné qu’il ne fallait parler ni de la métropole du Grand Paris, ni des départements, ni de la loi NOTRe, au prétexte que le débat était clos. Or, avec ces amendements, on nous renvoie à la loi MAPTAM !
Ce n’est pas sérieux, monsieur Favier ! Je me demandais s’il s’agissait d’amendements d’appel, mais tel n’est manifestement pas le cas, puisque vous les maintenez. Le statut de syndicat mixte ouvert, que vous proposez, emporte un certain nombre de conséquences, que vous n’avez même pas évoquées !
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote.
M. Christian Favier. Je n’ai pas été convaincu par les explications données. Selon moi, il existe aujourd'hui un vrai risque juridique, compte tenu de la modification du statut de Paris, qui ne sera plus une commune, mais sera dotée d’un statut particulier. Une telle situation est en contradiction avec le statut de la métropole du Grand Paris, établissement public de coopération intercommunale, ce qui pourra entraîner des recours.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Article 12
(Non modifié)
Pour les opérations budgétaires et comptables consécutives à la création de la Ville de Paris, l’ordonnateur et le comptable public mettent en œuvre les procédures qui leur incombent respectivement sans qu’il soit fait application des règles relatives à la création d’une nouvelle personnalité morale. Les comptes du département de Paris sont clôturés et repris dans ceux de la commune de Paris. Ces derniers deviennent les comptes de la Ville de Paris.
Pour l’exercice 2019, l’article L. 1612-1 du code général des collectivités territoriales est applicable à la Ville de Paris, sur la base du cumul des montants inscrits aux budgets de l’année précédente de la commune de Paris et du département de Paris auxquels elle succède et des autorisations de programme et d’engagement votées au cours des exercices antérieurs des collectivités auxquelles elle succède.
Le conseil de Paris arrête les derniers comptes administratifs de la commune de Paris et du département de Paris dans les conditions prévues à l’article L. 1612-12 du même code.
Mme la présidente. L'amendement n° 52, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 52 est retiré.
Je mets aux voix l'article 12.
(L'article 12 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 12
Mme la présidente. L'amendement n° 34, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les personnes morales de droit public et personnes morales de droit privé utilisant la marque « Paris » s’engagent à régler par convention les droits afférents à la Ville de Paris.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Paris est une marque déposée par la Ville de Paris, qui en détient la propriété depuis le 14 août 2008. Le présent amendement vise à clarifier l’utilisation de cette marque et les changements juridiques liés au changement de statut, afin de prévenir tout risque de contentieux, d’autant qu’un certain nombre de sociétés privées ou d’État utilisent facilement le nom de Paris ; l’exemple nous en a été donné à l’instant.
Je tenais donc à m’assurer que des conventions et même le paiement de droits sont prévus.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Les droits conférés par une marque enregistrée sont encadrés par le code de la propriété intellectuelle. Sans plus d’explications de l’auteur de l’amendement sur les difficultés qu’il semble soulever, la commission émettra donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à l’amendement n° 34, dont les dispositions semblent superfétatoires. En effet, les dispositions proposées sont d’ores et déjà applicables. La marque Paris est en effet déposée par la commune de Paris depuis 2008. Le règlement par convention des droits afférents est déjà prévu.
En outre, l’article 11 du présent projet de loi prévoit, nous venons de le dire, un régime de substitution de la Ville de Paris à l’ensemble des droits, obligations et contrats de la commune de Paris.
M. Philippe Dominati. Je retire cet amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L’amendement n° 34 est retiré.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 35, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre Ier du titre Ier de la présente loi, portant création de la collectivité à statut particulier de la Ville de Paris, est également applicable aux communes de Marseille et de Lyon. Un décret en précise les modalités d’application.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Cet amendement vise, comme je l’ai souligné dans le cadre de la discussion générale, à lier le destin de Paris avec celui des deux autres grandes villes de l’ancienne loi PLM, la loi relative à l’organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon, laquelle a représenté la dernière évolution importante pour les habitants de ces communes.
Néanmoins, la commission permanente ayant été supprimée, je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 35 est retiré.
L'amendement n° 33 rectifié, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 4 de la présente loi, portant création d’une commission permanente au sein du conseil de Paris, est également applicable aux communes de Marseille et de Lyon. Un décret en précise les modalités d’application.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Cet amendement n’a également plus d’objet, puisqu’il n’existe plus de commission permanente. Néanmoins, je le maintiens pour l’instant, parce que je souhaite entendre les explications du Gouvernement sur ce sujet. Pourquoi prévoir une commission permanente pour la Ville de Paris, alors que Lyon et Marseille, qui sont de grandes collectivités, ne bénéficieront pas de la même structure ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. L’amendement n° 33 rectifié vise à transformer les communes de Marseille et de Lyon en collectivités territoriales à statut particulier, sur le modèle de la Ville de Paris.
Selon moi, cette disposition repose sur une confusion. En effet, la Ville de Paris fusionne deux collectivités sises sur le même territoire, le département et la commune de Paris, alors que les communes de Lyon et Marseille, régies par quelques règles spécifiques en raison de leur dimension, ne présentent que ce seul caractère communal.
Par ailleurs, la commune de Lyon est implantée sur le territoire de la métropole de Lyon, collectivité territoriale à statut particulier résultant de la fusion de la communauté urbaine du Grand Lyon et du département du Rhône sur son périmètre.
Quant à Marseille, elle est la ville-centre de la métropole d’Aix-Marseille-Provence, EPCI à fiscalité propre régi par quelques dispositions spécifiques.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. La situation de Paris, où nous fusionnons deux collectivités territoriales qui étaient dotées d’un même organe délibérant et coexistaient sur le même périmètre, n’est pas comparable à celle de Lyon et de Marseille. Il s’agit en effet de communes dont le périmètre ne coïncide pas avec celui du département. Par conséquent, les aligner sur le statut juridique de la future collectivité parisienne n’aurait aucun sens.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Dominati, l’amendement n° 33 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 33 rectifié est retiré.
Mes chers collègues, nous avons examiné 44 amendements au cours de la journée ; il en reste 79.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
11
Mise au point au sujet de votes
Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Madame la présidente, je veux signaler une erreur s'agissant des scrutins publics relatifs au sous-amendement n° 143, au I de l’amendement n° 101, à l’ensemble de l'amendement n° 101, ainsi qu’à l’article 1er.
Dans tous ces cas, il s’agissait pour le groupe écologiste de voter contre.
Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
12
Retrait d’une question orale
Mme la présidente. J’informe le Sénat que la question orale n° 1 486 de M. Jérôme Bignon est retirée de l’ordre du jour de la séance du mardi 15 novembre, ainsi que du rôle des questions orales, à la demande de son auteur.
Acte est donné de cette communication.
13
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mardi 8 novembre 2016 :
À quatorze heures trente :
Suite du projet de loi relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain (procédure accélérée ; n° 815, 2015-2016) ;
Rapport de M. Mathieu Darnaud, fait au nom de la commission des lois (n° 82, 2016-2017) ;
Texte de la commission (n° 83, 2016-2017).
À seize heures quarante-cinq :
Questions d’actualité au Gouvernement.
À dix-sept heures quarante-cinq et le soir :
Suite du projet de loi relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain (procédure accélérée ; n° 815, 2015-2016) ;
Rapport de M. Mathieu Darnaud, fait au nom de la commission des lois (n° 82, 2016-2017) ;
Texte de la commission (n° 83, 2016-2017).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.)
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD