M. le président. L'amendement n° 186 rectifié quater, présenté par Mme Yonnet, MM. Sueur et Cornano, Mme Schillinger et MM. Filleul et Manable, est ainsi libellé :
Après l’article 32 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Aux premiers alinéas des articles L. 301-5-1-1 et L. 301-5-1-2, les références : « L. 1331-22 à L. 1331-30 » sont remplacées par les références : « L. 1311-4, L. 1331-22 à L. 1331-30 et L. 1334-1 à L. 1334-12 » ;
2° Le dix-septième alinéa de l’article L. 301-5-1-1 est complété par trois phrases ainsi rédigées :
« Il est également compétent, en application de l’article L. 1334-1 du même code, pour procéder, le cas échéant, à l’enquête sur l’environnement du mineur et pour faire réaliser le diagnostic portant sur les revêtements des immeubles ou parties d’immeubles. Le contrôle prévu à l’article L. 1334-3 du même code peut également lui être confié. Il peut demander que lui soient communiqués les constats de risque d’exposition au plomb établis en application des articles L. 1334-8 et L. 1334-8-1 du même code et proposer au président de l’établissement public de coopération intercommunale de prendre les mesures conservatoires mentionnées à l’article L. 1334-11 du même code. »
II. – Au deuxième alinéa de l’article L. 1311-4 du code de la santé publique, après les mots : « le maire » sont insérés les mots : « ou, le cas échéant, le président de l’établissement public de coopération intercommunale ».
La parole est à Mme Evelyne Yonnet.
Mme Evelyne Yonnet. Mes chers collègues, je vais vous présenter une série de neuf amendements sur un sujet qui me tient à cœur, comme à vous, madame la ministre, à savoir la lutte contre les marchands de sommeil et l’habitat indigne.
Les six premiers amendements ont pour but de simplifier et de coordonner les différents textes relatifs aux outils de lutte contre l’habitat indigne ou insalubre, sujet que l’on a beaucoup abordé aujourd’hui. Sont concernées a minima un million de personnes, soit 400 000 à 600 000 logements. Je dis bien a minima, car certaines associations estiment que la réalité est largement supérieure à ces chiffres.
Les trois derniers amendements sont relatifs à la lutte contre les marchands de sommeil et l’habitat indigne. Ils ne représentent, à notre regret, qu’une partie de la proposition de loi rédigée voilà quelques mois après une série d’auditions d’associations, de professionnels et de fonctionnaires de tous grades, que j’ai réalisées avec Jean-Pierre Sueur et d’autres collègues.
Cette proposition de loi fut aussi inspirée par nos parcours d’élus locaux, qui nous ont permis de constater que les procédures sont très longues et parfois vaines, tant ces personnes malveillantes sont toujours plus imaginatives et les condamnations loin de suivre la croissance de ce phénomène.
Ces faits, s’ils ne sont pas nouveaux, ont pris ces dernières années une ampleur inouïe dans les zones tendues. Ils se sont multipliés, au point de devenir une véritable économie souterraine, pour ne pas dire un business, dans ces territoires.
Les marchands de sommeil, eux, ne dorment pas. Ils tournent sur les villes et font un travail de repérage sur les adjudications ou les biens à l’abandon. Et ce phénomène concerne également aujourd’hui les villes moyennes et le milieu rural, avec le rachat de vieilles bâtisses, parfois à l’état de ruines.
Si des outils répressifs existent, il faut dès maintenant les harmoniser avec la loi ALUR et les renforcer. En effet, la crise économique de 2008 et les conséquences des printemps arabes ont permis la forte croissance de ce type de pratiques. Les réfugiés climatiques, bien plus nombreux, seront à l’avenir des victimes toutes désignées.
Avec ces amendements, nous proposons l’application pour les marchands de sommeil de la peine de confiscation de leur patrimoine, comme c’est le cas en matière de blanchiment, la possibilité pour les associations de lutte contre l’habitat indigne de prendre l’initiative d’une procédure lorsque les victimes, trop vulnérables, ne le font pas et la remise d’un état des lieux sur l’amélioration de l’hébergement des personnes défavorisées, ainsi que le rééquilibrage entre les territoires et l’effort d’hébergement.
Nous regrettons que le règlement ne nous permette pas d’introduire dans ce projet de loi l’ensemble des six articles de la proposition de loi. En effet, la cohérence et l’efficacité de cette lutte en auraient été grandement renforcées.
Monsieur le président, si vous me le permettez, je défendrai tout d'abord les amendements nos 186 rectifié quater, 187 rectifié quater et 188 rectifié bis. Il s’agit ici de mettre en cohérence avec la loi ALUR les dispositions sur les délégations de police du préfet, du maire ou des présidents d’EPCI pour faire émerger, selon les transferts de compétences, qu’il y ait ou non un service d’hygiène, un acteur unique pour la lutte contre l’habitat indigne.
M. le président. L'amendement n° 187 rectifié quater, présenté par Mme Yonnet, MM. Sueur et Cornano, Mme Schillinger et MM. Filleul et Manable, est ainsi libellé :
Après l’article 32 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Au troisième alinéa du I de l’article L. 521-3-1, aux I, II et VI de l’article L. 521-3-2 et au dernier alinéa des articles L. 521-3-3 et L. 521-3-4, après le mot : « maire » sont insérés les mots : « ou, le cas échéant, le président de l’établissement public de coopération intercommunale ».
2° Au V de l’article L. 521-3-2, après les mots : « la commune » sont insérés les mots : « ou, le cas échéant, l’établissement public de coopération intercommunale » ;
3° Au quatrième alinéa de l’article L. 521-3-3, les mots : « en application du III de l’article L. 521-3-2 sont remplacés par les mots « en application du I ou, le cas échéant, des III ou V de l’article L. 521-3-2 » ;
4° L’article L. 541-1 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« N’est pas suspensive l’opposition introduite devant le juge administratif au titre exécutoire émis par l’État, la commune ou, le cas échéant, l’établissement public de coopération intercommunale en paiement d’une créance résultant :
« 1° D’une astreinte prononcée en application des articles L. 1331-29 du code de la santé publique et des articles L. 123-3, L. 129-2 et L. 511-2 du présent code ;
« 2° De l’exécution d’office de mesures prises en application des articles L. 1311-4, L. 1331-24, L. 1331-26-1, L. 1331-28, L. 1331-29 et L. 1334-2 du code de la santé publique et des articles L. 123-3, L. 129-2, L. 129-3, L. 511-2 et L. 511-3 du présent code ;
« 3° Du relogement ou de l’hébergement des occupants effectué en application de l’article L. 521-3-2 du présent code. » ;
b) Au deuxième alinéa, après les mots : « de la commune », sont insérés les mots : « ou, le cas échéant, de l’établissement public de coopération intercommunale ».
L'amendement n° 188 rectifié bis, présenté par Mme Yonnet, MM. Sueur et Cornano, Mme Schillinger et MM. Filleul et Manable, est ainsi libellé :
Après l'article 32 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1331-29 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À la première phrase du IV, après les mots : « la commune », insérer les mots : « , le cas échéant l’établissement public de coopération intercommunale » ;
2° Le V est ainsi modifié :
a) Aux première et deuxième phrases, après les mots : « le maire », sont insérés les mots : « ou, le cas échéant, le président de l’établissement public de coopération intercommunale » ;
b) Aux deuxième et troisième phrases, après les mots : « la commune », sont insérés les mots : « ou, le cas échéant, l’établissement public de coopération intercommunale ».
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission est plus que favorable à ces trois amendements, puisque, s’ils sont adoptés, ils donneront plus de cohérence aux dispositifs en vigueur et les simplifieront. Je remercie en outre leur auteur, qui a procédé aux modifications rédactionnelles que nous lui avions demandées.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Cosse, ministre. Ces trois amendements sont le fruit d’un travail partagé entre Mme Yonnet et les services du ministère du logement, afin de mettre en cohérence les textes. Nous partageons les mêmes objectifs s'agissant de l’insalubrité, et il me semble très important que ces articles apparaissent dans un texte de loi.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur ces trois amendements.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 32 bis A.
Je mets aux voix l'amendement n° 187 rectifié quater.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 32 bis A.
Je mets aux voix l'amendement n° 188 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 32 bis A.
L'amendement n° 185 rectifié bis, présenté par Mme Yonnet, MM. Sueur et Cornano, Mme Schillinger, MM. Filleul et Manable et Mmes Tocqueville et Blondin, est ainsi libellé :
Après l'article 32 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, un état des lieux sur l’ensemble des missions exercées par les services communaux d’hygiène et de santé créés en application de l’article L. 1422-1 du code de la santé publique, ainsi que les moyens humains et financiers qui y sont consacrés. Cet état des lieux examinera en particulier l’exercice par ces services des attributions qui leur sont confiées en application du troisième alinéa de l’article susmentionné, ainsi qu’en matière de lutte contre l’insalubrité et le saturnisme. Il examinera également l’opportunité de transférer ces missions à un service intercommunal dédié à la lutte contre l’habitat indigne et les bâtiments dangereux, dont la création pourrait être obligatoire, ainsi que les modalités juridiques et financières d’un tel transfert.
La parole est à Mme Evelyne Yonnet.
Mme Evelyne Yonnet. Pour permettre à la représentation nationale de légiférer en toute connaissance de cause et de parachever les réformes engagées par la loi ALUR, il est nécessaire que le Gouvernement effectue un travail de diagnostic préalable, pour ensuite formaliser des propositions législatives sur lesquelles le législateur pourra statuer.
C’est pourquoi le présent amendement a pour objet de proposer la remise d’un état des lieux au Parlement sur ces questions. Je précise que nous avons élaboré cet amendement avec le Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. S’agissant d’une demande de rapport, l’avis de la commission spéciale est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Cosse, ministre. Nous souhaitons mieux connaître la situation avant de modifier la législation existante. Cet amendement ne sera sans doute pas adopté, mais il me donnera un prétexte pour commander une mission assez rapidement sur le sujet.
Le Gouvernement émet un avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 185 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 209 rectifié, présenté par Mmes Yonnet et Lienemann, MM. Rome, Guillaume et Magner, Mmes Blondin, Cartron et Conway-Mouret, MM. Lozach, Richard, Sueur, Vandierendonck, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 32 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1331-28 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa du I est supprimé ;
2° Après le deuxième alinéa du II, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Un immeuble ou un logement inoccupé et libre de location ne constituant pas de danger pour la santé et la sécurité des voisins peut être interdit à l’habitation par arrêté du représentant de l’État dans le département. L’arrêté, le cas échéant, précise les mesures nécessaires pour empêcher tout accès ou toute occupation des lieux aux fins d’habitation. Il précise également les travaux à réaliser pour que puisse être levée cette interdiction. L’arrêté de mainlevée est pris dans les formes précisées à l’article L. 1331-28-3. »
La parole est à Mme Evelyne Yonnet.
Mme Evelyne Yonnet. Je remercie Mme la ministre d’envisager de mettre en place une commission pour obtenir un état des lieux, ce qui paraît indispensable pour continuer cette lutte.
L’amendement n° 209 rectifié vise les logements ou immeubles insalubres.
Des mesures peuvent être prises pour empêcher tout accès ou toute occupation des lieux, et des travaux peuvent être prescrits pour lever cette interdiction. Toutefois, ces mesures, introduites par la loi santé du 26 janvier 2016, ont été mal insérées dans le code de la santé publique, de sorte que, aujourd’hui, elles sont inapplicables.
Elles ne peuvent en effet concerner que le cas où l’insalubrité peut être qualifiée de remédiable ou de non remédiable, auquel cas on ne peut prescrire de travaux autres que ceux destinés à empêcher l’accès.
Cet amendement a pour objet de rectifier cette erreur matérielle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission spéciale a émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 32 bis A.
L'amendement n° 286 rectifié bis, présenté par Mme Yonnet, M. Cornano, Mme Schillinger et MM. Filleul et Manable, est ainsi libellé :
Après l'article 32 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1422-1 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À titre dérogatoire, les deuxième et troisième alinéas s’appliquent, pour une durée de trois ans, à compter du 1er janvier 2017, pour les communes ou, le cas échéant, les groupements de communes, qui emploient un inspecteur de salubrité. »
La parole est à Mme Evelyne Yonnet.
Mme Evelyne Yonnet. Aujourd’hui, le nombre de services communaux d’hygiène et de santé est de 208 sur tout le territoire. Les autres communes peuvent néanmoins employer un inspecteur de salubrité habilité, qui aura les mêmes capacités légales d’effectuer un rapport de visite.
Dans ce cas, le rapport n’a pourtant pas les mêmes effets dans la procédure, puisque, après sa réception par l’ARS, cette dernière devra effectuer un autre rapport avant que le CODERST n’examine ce dossier.
Cet amendement vise donc à expérimenter un traitement sans distinction de procédure concernant les rapports rendus par les inspecteurs communaux ou intercommunaux de salubrité, que les collectivités disposent ou non d’un service d’hygiène et de santé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Il est difficile d’évaluer l’impact d’une telle disposition technique. Je sollicite par conséquent l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Cosse, ministre. Nous sommes réservés, parce que nous ne connaissons pas, nous non plus, l’impact de cette disposition, n’ayant pas obtenu suffisamment de retours des différentes directions concernées. Cette proposition arrive donc un peu trop tôt.
Aussi, je préfère demander le retrait de cet amendement en attendant d’obtenir plus d’informations, ce à quoi je vais m’employer. Vous pourrez certainement déposer de nouveau cette disposition à d’autres occasions, madame la sénatrice.
M. le président. Madame Yonnet, l'amendement n° 286 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Evelyne Yonnet. Non, je le retire, monsieur le président, tout en prenant l’engagement de le déposer de nouveau.
M. le président. L’amendement n° 286 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 218 rectifié, présenté par Mme Yonnet, M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Après l'article 32 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 225-15-1 du code pénal, il est inséré un article 225-15-2 ainsi rédigé :
« Art. 225-15-2. – Les personnes physiques ou morales déclarées responsables pénalement des infractions prévues à la présente section encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie des biens leur appartenant ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont elles ont la libre disposition, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. »
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre…
Renforcer la lutte contre les « marchands de sommeil » et l’habitat indigne
La parole est à Mme Evelyne Yonnet.
Mme Evelyne Yonnet. L’expérience montre que la lutte contre l’habitat indigne est particulièrement difficile à mettre en œuvre : les procédures étant complexes à engager et souvent mal appréhendées, les résultats sont rarement à la hauteur des attentes, puisqu’elles n’atteignent pas toujours leur cible.
Ainsi, à Aubervilliers, une mobilisation très forte de la commune a permis d’obtenir plusieurs condamnations, dont deux significatives.
La première était une condamnation à deux ans de prison et à 100 000 euros d’amende, mais le prévenu a disparu et son associé continue son activité.
La seconde a débouché sur la condamnation non pas du marchand de sommeil lui-même, mais d’une société-écran portée par ses enfants. Le vrai responsable continue en toute impunité son activité aujourd’hui. Cette situation, très mal vécue par les habitants, encourage les marchands de sommeil dans la poursuite de ces activités.
Nous proposons donc de renforcer les sanctions en appliquant aux personnes physiques et morales condamnées pour avoir soumis une ou plusieurs personnes à des conditions d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine la peine de confiscation générale de leur patrimoine, comme c’est le cas en matière de blanchiment.
La confiscation pourra alors porter sur tout ou partie des biens appartenant au condamné, quelle que soit leur origine, licite ou illicite, même en l’absence de tout lien avec l’infraction, ainsi que sur tous les biens dont il a la libre disposition, sous réserve des droits des tiers de bonne foi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Cet amendement me semble partiellement satisfait par le droit en vigueur.
Par ailleurs, il vise notamment à permettre la confiscation de tout le patrimoine. Or une telle règle, particulièrement dérogatoire, n’existe que pour le trafic d’armes, le trafic de stupéfiants et le blanchiment. En effet, l’organisation de réseaux et la qualification de criminalité organisée justifient une dérogation au principe de spécialité et, partant, permettent une plus grande atteinte au droit de propriété.
Ces conditions ne me semblent pas réunies pour cette délinquance, qui est généralement le fait d’individus seuls. Aussi, je sollicite l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Cosse, ministre. En l’état de la rédaction de l’amendement, l’avis du Gouvernement est plutôt défavorable, notamment parce que, comme vient de l’indiquer Mme la rapporteur, ses auteurs souhaitent appliquer la peine de confiscation à l’ensemble du patrimoine, et pas seulement aux biens ayant servi à commettre l’infraction. Cela me semble exagéré au regard des principes constitutionnels de nécessité et de proportionnalité des peines.
En outre, la peine ne s’appliquerait pas uniquement au délit d’hébergement contraire à la dignité de la personne, mais également aux autres infractions définies dans la section 3 et relatives au travail forcé et à la servitude.
Je vois tout à fait ce que vous cherchez à faire avec cet amendement, c’est-à-dire envoyer des signes aux marchands de sommeil et combattre les sociétés écran et les prête-noms. Ces sujets sont extrêmement importants, mais nous estimons, en l’état actuel de nos connaissances – je ne vous cache pas que j’attends d’autres avis du ministère de la justice –, que cet amendement est disproportionné.
Il n’empêche que la question de savoir comment nous pouvons renforcer les condamnations des marchands de sommeil est tout à fait primordiale. Aujourd’hui, je me bats pour essayer de faire accélérer les délais de traitement des affaires devant les juridictions, car c’est ce qui nous handicape aujourd’hui, plus que les poursuites en tant que telles.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Madame Yonnet, l'amendement n° 218 rectifié est-il maintenu ?
Mme Evelyne Yonnet. Je remercie Mme la rapporteur et Mme la ministre, mais je précise que nous avons bien visé « tout ou partie » des biens loués. Il ne s’agit pas de tous les biens appartenant au marchand de sommeil.
Pour rédiger cet amendement, nous avons consulté un juriste, qui nous a indiqué clairement qu’il s’agissait d’une forme de recel tout à fait condamnable. Ces activités mettant des personnes en danger, elles peuvent même être punies d’une peine d’emprisonnement et d’une amende très lourde.
Madame la ministre, je vais maintenir cet amendement, pour vous permettre de vérifier, ce dont je vous remercie par avance, que ses dispositions sont juridiquement solides.
M. le président. L'amendement n° 216 rectifié, présenté par Mme Yonnet, M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Après l'article 32 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase de l'article 2–10 du code de procédure pénale, après les mots : « lutter contre » sont insérés les mots : « l'habitat insalubre et l'hébergement incompatible avec la dignité humaine, » et après la référence : « 225-2 », est insérée la référence : « , 225-14 ».
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre…
Renforcer la lutte contre les « marchands de sommeil » et l’habitat indigne
La parole est à Mme Evelyne Yonnet.
Mme Evelyne Yonnet. Cet amendement vise les victimes des marchands de sommeil, qui sont placées dans une situation d’extrême vulnérabilité et qui prennent très rarement l’initiative d’une procédure.
Nous proposons donc de donner aux associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits, et dont l’objet statutaire comporte la lutte contre l’habitat indigne, la possibilité d’exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions relatives à l’hébergement incompatible avec la dignité humaine.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Les dispositions de cet amendement présentent deux difficultés principales.
En premier lieu, l’amendement vise à modifier l’article 2-10 du code de procédure pénale, qui permet aux associations luttant contre l’exclusion sociale de poursuivre tout fait de discrimination. Si cette modification permet à l’amendement d’être recevable, ces dispositions n’ont néanmoins pas de lien avec les associations luttant contre l’habitat insalubre et l’hébergement incompatible avec la dignité humaine.
Cette insertion est également maladroite. L’article 2-10 précise en effet que l’action des associations est recevable « en ce qui concerne les discriminations réprimées par les articles 225-2 et 432-7 du code pénal ».
La commission spéciale émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Cosse, ministre. Je comprends la position de Mme la rapporteur au sujet de l’insertion. Toutefois, je pense qu’il est utile que les associations soient présentes en tant que parties civiles dans ces procédures. Je tiens d’ailleurs à rappeler que de plus en plus de municipalités se portent parties civiles, ce qui est absolument nécessaire pour que la justice prenne mieux en compte ces problèmes.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 32 bis A.
L'amendement n° 221 rectifié, présenté par Mme Yonnet, M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Après l'article 32 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de trois mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la mise en œuvre de l'article L. 312-5-3 du code de l'action sociale et des familles et sur le rééquilibrage entre les territoires dans l'hébergement des personnes défavorisées.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre…
Renforcer la lutte contre les « marchands de sommeil » et l’habitat indigne
La parole est à Mme Evelyne Yonnet.
Mme Evelyne Yonnet. La résorption de l’habitat indigne passe aussi par une offre plus importante en matière d’hébergement, répartie sur l’ensemble du territoire.
Nous invitons le Gouvernement à présenter un rapport sur l’amélioration de la mise en œuvre de l’article L. 312-5-3 du code de l’action sociale et des familles, qui est relatif à l’hébergement des personnes défavorisées, ainsi que sur le rééquilibrage entre les territoires de l’effort d’hébergement.
Dans les villes qui comptent beaucoup d’habitat insalubre et où prospèrent les marchands de sommeil, le niveau de dangerosité est parfois tel qu’il faut héberger les gens en urgence dans d’autres lieux. L’idée est de partager la charge de ces hébergements pour soulager les villes particulièrement concernées, lorsque le « 115 » est déjà saturé et que les hôtels sont complets.
Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. S’agissant d’une demande de rapport, l’avis de la commission spéciale est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 221 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 32 bis B
(Non modifié)
Le dernier alinéa de l’article L. 153-11 du code de l’urbanisme est ainsi rédigé :
« L’autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l’article L. 424-1, sur les demandes d’autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan dès lors qu’a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d’aménagement et de développement durable. » – (Adopté.)
Article 32 bis C
(Non modifié)
À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme, le mot : « excessif » est supprimé.